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CHAPITRE 1

1.  INTRODUCTION

Autrefois, le succès d'une campagne de pêche dépendait beaucoup de la vue, de l'odorat et de l'ouïe du pêcheur. Ainsi, le pêcheur choisissait-il souvent une position en hauteur avantageuse comme le mât de vigie, afin de repérer le poisson. Aujourd'hui, l'aviation moderne et les satellites ont porté les possibilités d'observation de l'homme à un niveau inimaginable pour les générations antérieures; en même temps, on a mis au point des appareils qui ont étendu les perceptions de l'homme bien au-delà des limites de ses sens. La combinaison de ces technologies a donné naissance à une science moderne connue sous le nom de télédétection, qui peut être définie comme l'acquisition d'informations sur un objet ou un événement sans contact physique avec celui-ci. Nous commençons seulement à découvrir certains des moyens par lesquels la télédétection peut être appliquée à la recherche séculaire de l'homme pour récolter la nourriture que la mer lui offre.

Ce manuel a pour objet d'initier à la télédétection les personnes participant à l'étude, la gestion ou l'utilisation des ressources, principalement dans les pays en développement. Bien que certaines formes de télédétection existent depuis bon nombre d'années et soient généralement bien assimilées, des progrès extraordinaires ont été réalisés depuis vingt ou trente ans, aussi bien dans la technologie que dans les applications. en raison de l'abondance même de la documentation disponible, et des multiples connaissances techniques nécessaires à la compréhension de ce domaine, un manuel d'initiation est indispensable. Cet ouvrage ne prétend pas fournir une description exhaustive de la télédétection moderne ni une documentation complète sur tous les programmes de recherche en cours et de leur application à la localisation et à la capture du poisson. Il tente plutôt de donner au lecteur une compréhension de base de certains termes, concepts et systèmes spécifiques utilisés en télédétection, et d'illustrer par des études de cas, quelques applications importantes pour ceux qui s'occupent des pêches.

1.1   Bref historique

Le terme “télédétection” a été inventé en 1960 par Evelyn Pruit du Bureau de la Recherche Navale des Etats-Unis mais l'histoire de la télédétection remonte bien plus loin. Les premières photographies aériennes ont été prises d'un ballon captif près de Paris en 1858. Pendant les cinquante années qui suivirent des progrès importants ont été faits par les appareils et les émulsions photographiques. Des photographies ont été prises à partir de plate-formes très diverses: cerfs-volants, fusées et mêmes pigeons voyageurs.

La première photo prise d'un avion est un film tourné au-dessus de Centocelli en Italie, en 1909, dans un avion piloté par Wilbur Wright. La plupart de ces premières photos donnaient une vue oblique plutôt que verticale du terrain. Des photographies d'un grand nombre de grandes villes et d'autres panoramas intéressantes ont été également réalisées par des moyens aériens. Les scientifiques cependant, ont compris le potentiel de la photo aérienne comme outil de cartographie et petit à petit la science de la photogrammétrie s'est développée.

Ce n'est qu'a la première guerre mondiale que la photo aérienne a été maîtrisée et utilisée à grande échelle, de façon systématique. Des appareils ont été spécifiquement conçus pour la reconnaissance aérienne et des méthodes de traitement ont été mises au point pour produire des milliers de photos par jour. L'élaboration des techniques de photo-interprétation pour obtenir des renseignements à partir des images a représenté un autre progrès tout aussi important. En observant le mouvement des hommes et du matériel sur une période donnée, les stratèges pouvaient prévoir les manoeuvres militaires. A la fin de la première guerre mondiale, les avions, les appareils photographiques et le matériel de développement s'étaient beaucoup améliorés et un assez grand nombre de personnes ont acquis l'expérience d'aspects différents de la réalisation et de l'utilisation de la photo aérienne.

Tandis que le matériel photogramétrique amélioré était introduit dans les années 20 et 30, la photographie aérienne verticale devenait la source d'information habituelle pour l'élaboration des cartes topographiques. La photo aérienne était utilisée dans une mesure limitée par les géologues, les forestiers et les urbanistes en Europe et en Amérique du Nord, et par les cartographes et les géographes pour des études géographiques à petite échelle en Afrique et en Amérique du Sud. Le film en couleur a été mis au point pendant cette période, mais il n'a guère été utilisé pour la photographie aérienne jusqu'à la deuxième guerre mondiale. Plusieurs domaines de la recherche scientifique ont aussi été ouverts, qui ont servi ensuite de base aux techniques modernes de télédétection.

La seconde querre mondiale a également favorisé le développement technologique rapide dans le domaine de la télédétection. Dans ce cas encore la photographie de reconnaissance militaire a été la première application. Les techniques de photo-interprétation se sont beaucoup perfectionnées. L'utilisation de la photographie aérienne pour la préparation des attaques amphibies a facilité les études ultérieures de la zone côtière. La capacité de pénétration de l'eau par le film aérien, en particulier le film en couleur, a permis d'obtenir des renseignements fiables, sur la bathymétrie et la composition des fonds à l'époque où les cartes de navigation étaient peu précises, voire inexistantes. Les premiers films infra-rouge couleur ont également été mis au point pendant la guerre pour détecter le camouflage. De vastes réseaux de radars ont été mis en place dans les années 40, pour donner rapidement l'alerte en cas d'attaque aérienne. Les progrès effectués dans la technologie du radar, ont permis de créer un matériel de transmission et de réception plus petit, et par conséquent mieux adapté à l'utilisation aéroportée. Il existait notamment des radars indicateurs des gisements panoramiques P.P.I. (Plan Position Indicator) qui donnaient une image du terrain situé sous l'avion, indépendamment des conditions climatiques, et de la visibilité. Ce radar P.P.I. utilisé principalement pour la détection de cibles au cours des missions de bombardement nocturnes ou à haute altitude au dessus des nuages, s'est aussi révélé utile pour la navigation côtière.

Dans les années 50, des systèmes d'imagerie à infra-rouge thermique ont été élaborés pour obtenir une “image thermique” des objets ou des terrains, mais contrairement aux radars ces systèmes, ne peuvent pas “voir” à travers les nuages. A cette même époque, un radar a visée latérale SLAR (Side Looking Airborne Radar : radar aéroporté à antenne latérale) a été étudié pour améliorer l'imager ie plutot grossière produite par le radar P.P.I. Ces deux systèmes ont été mis au point à l'origine à des fins militaires et n'ont été disponibles pour l'usage civil que quelques années plus tard.

Le lancement de SPOUTNIK I par l'URSS en 1957 a marqué le début de “l'ère aérospatiale”. En 1959, le satellite américain EXPLORER VI a transmis la première image de la terre vue de l'espace. Le premier satellite météorologique du monde, TIRPS I, a été lancé en 1960; c'était le précurseur des satellites météorologiques plus évolués en service aujourd'hui. Les vols spatiaux avec hommes à bord ont joué un rôle particulièrement important pour faire comprendre les possibilités de cartographie et de surveillance des ressources depuis l'espace. Les premières photographies de la terre, prises à l'aide d'appareils tenus à la main dans l'espace, ont fourni des renseignements extraordinairement abondants sur la terre et l'eau sur une vaste superficie. Les missions effectuées ultérieurement par les Etats- Unis et l'URSS ont été dotées d'un matériel photographique et de “scanneur” (radiomètre à balayage) plus sophistiqués, destiné spécifiquement à obtenir des images pour l'évaluation des ressources.

Les missions avec hommes à bord réussissaient à démontrer la valeur de l'imagerie spatiale mais elles étaient souvent de courte durée et ne fournissaient pas une couverture photographique uniforme à l'échelle mondiale. Ces limites ont été largement surmontées grâce à la mise au point des satellites d'étude des ressources terrestres comme la série américaine LANDSAT. En fonctionnant dans une orbite plus basse que les satellites-météo, LANDSAT et plus tard, des systèmes similaires ont assuré une meilleure résolution spatiale, tout en ayant une couverture temporelle moins fréquente. Bien que les détecteurs aient été choisis en premier lieu pour les applications terrestres, ils se sont avérés utiles pour plusieurs études côtières et marines.

Outre les satellites actuellement opérationnels, plusieurs autres systèmes expérimentaux ont été lancés et ont démontré l'intérêt de la surveillance de l'environnement marin depuis l'espace. Citons le satellite NIMBUS VII qui portait le CZCS (Coastal Zone Colour Scanner) et le satellite de courte durée SEASAT porteur de détecteurs spécifiques à l'environnement marin. Depuis quelques années, plusieurs pays, autre que l'URSS et les Etat-Unis ont lancé leurs propres satellites de télédétection.

Il faut préciser que les avions continuent de jouer un grand rôle dans la télédétection à cause de leur souplesse d'utilisation, en ce qui concerne l'altitude, la planification et les détecteurs. Suivant besoins de renseignements et les ressources des utilisateurs, les avions utilisés dans les études de télédétection peuvent varier de l'appareil léger mono-moteur à l'avion à réaction à plusieurs moteurs de haute altitude. Les avions servent souvent de plate-formes pour tester les détecteurs qui seront utilisés sur les satellites.

Les progrès rapides de l'informatique ont influé sur tous les aspects de la télédétection. Les usagers s'intéressent particulièrement aux techniques de traitement numérique mises au point pour l'analyse des données. Des programmes sont disponibles pour la correction géométrique, le rehaussement de l'image et l'extraction de données quantitatives. La rapidité des ordinateurs permet à un seul opérateur de faire l'analyse de données pour de vastes régions géographiques dans un délai relativement court.

Alors que l'acquisition des données et les techniques d'analyse, contiennent de progresser, le grand problème pour la télédétection est aujourd'hui, de fournir des informations utilisables en temps voulu pour ceux qui en ont besoin. Une infrastructure est donc nécessaire pour accéder aux données, et les diffuser et il faut aussi un groupe d'usagers capables de les appliquer à leurs programmes. En ce sens, météorologie est probablement le seul domaine d'application dans lequel la télédétection puisse être vraiment considérée comme opérationnelle, au moins de façon générale. La FAO fournit un cadre pour la coopération international dans la télédétection et, par ses programmes de recherche, ses publications et ses stages de formation, elle encourage vivement l'utilisation plus large et rationnelle de cette technique.

1.2  Les termes et les concepts de base

Avant d'aller plus loin, nous tenons à expliquer certains termes et concepts utilisés tout au long de ce manuel. Même s'ils sont étudiés plus longuement dans les chapitres suivants, nous les présentons brièvement ici pour faciliter la compréhension du texte.

On entend par télédétection l'acquisition de renseignements concernant un objet ou un événement sur la base de mesures effectuées à distance. Dans la pratique, ce mot est habituellement utilisé pour décrire la saisie et l'analyse des données à partir d'instruments portés dans l'atmosphère terrestre ou au-dessus.

Un capteur est un appareil qui détecte et mesure un paramètre physique comme la radiation et le convertit sous une forme qui puisse être stockée ou transmise. En d'autres termes, c'est l'appareil qui “voit” les objets ou le terrain vers lesquels il est orienté. Alors que les appareils qui captent la gravité, les champs magnétiques ou les ondes sonores peuvent être classés comme capteurs, de nombreux auteurs restreignent l'usage du terme “télédétection” à la mesure des radiations électromagnétique. Nous allons suivre cette règle ici, bien que nous ayons ajouté un bref chapitre sur les appareils acoustiques sous-marins tels que les sonars et les écho-sondeurs à cause de leur importance pour l'industrie de la pêche.

Le rayonnement électromagnétique (REM) est une énergie qui apparaît sous forme de rayons X, de lumière visible, de micro-ondes et d'ondes-radio. Ces formes de REM, qui peuvent initialement apparaître comme des phénomènes séparés, font, en fait partie d'un spectre continu. Le meilleur exemple est celui d'un prisme, qui sépare la. lumière blanche en différentes couleurs, dont chacune représente une longueur d'ondes lumineuse différente. La lumière visible est la seule partie du REM détectable par l'oeil humain.

Un capteur donné peut détecter le REM seulement sur une gamme limitée de longueurs d'ondes, qui est dite bande spectrale. La largeur de la bande spectrale, c'est-à-dire l'étendue de la gamme réduite aux longueurs d'ondes détectées, est dénommée résolution spectrale. Certains capteurs comprennent un certain nombre de détecteurs dont chacun est sensible à une bande spectrale différente; ces capteurs s'appellent capteurs multi-spectraux ou multi-bandes. Quand nous regardons la terre dans deux ou plusieurs bandes simultanément, il est possible de distinguer une plus large gamme de caractéristiques. L'ensemble des réponses types émanant d'une cible spécifique vue par un capteur dans différentes bandes spectrales constitue la signature spectrale de cette cible.

On peut classer les capteurs selon différents critères. Il existe, par exemple, des capteurs “imageurs” et d'autres “non-imageurs”; comme leur nom l'indique, les capteurs “imageurs” produisent “une image” à deux dimensions, alors que les capteurs “non-imageurs” produisent des mesures en points ou des profils. Les capteurs peuvent également être soit actifs, soit passifs: les premiers transmettent la radiation pour “illuminer” la surface et pour recevoir et mesurer la quantité de radiation qui est réfléchie; les capteurs passifs, au contraire, mesurent la radiation produite naturellement, radiation qui est soit l'énergie solaire renvoyée, soit l'énergie terrestre émise.

Pour donner une vue de la surface terrestre, un capteur doit être monté sur une plate-forme qui est simplement le vecteur ou véhicule à partir duquel le capteur fonctionne. Bien que des plate-formes stationnaires directement reliées ou posées au sol soient parfois utilisées pour des applications spécialisées, les plate-formes les plus couramment utilisées pour la télédétection sont les avions et les satellites. La règle générale est que plus l'altitude d'une plate-forme est grande, plus la superficie qui peut-être “vue” par le capteur est étendue; toutefois, la capacité à distinguer de petits objets est alors réduite.

Le degré de détail spatial qui peut être observé ou enregistré par un capteur est dénommé résolution spatiale. Pour un système donné de capteur plate-forme, la résolution spatiale est habituellement exprimée par la plus petite unité de surface qui peut être distinguée de ses voisins. Dans un système de capteurs “imageurs”, les éléments qui constituent l'image s'appellent des pixels, terme dérivé de “picture elements”. La superficie de la surface de la terre, représentée par un pixel, correspond normalement à la résolution spatiale du capteur, c'est-à-dire à la taille cellulaire de la résolution au sol.

Les données des capteurs peuvent être stockées sous des formats analogiques ou numériques. Dans un système analogique, les variations de la “puissance” du signal initial, (par exemple, la variation de la luminosité dans une image), sont représentées par des variations continues dans un autre milieu, comme la tension ou la densité du film. Une représentation numérique au contraire découpe le signal initial en échelles discrètes, dont chacune porte une valeur numérique. L'étendue du signal initial, telle qu'elle est représentée par une seule valeur numérique, est appelée la résolution radiométrique du capteur. Les données numériquement enregistrées, contrairement aux données analogiques, peuvent être facilement traitées par ordinateurs et peuvent être copiées d'une façon répétitive, sans altérer les données d'orgine ou les copies. Pour l'interprétation humaine, cependant, un affichage analogique telle qu'une photographie ou une image de télévision est plus utile. A l'aide d'un matériel approprié, on peut convertir les données d'un format à un autre.

Enfin, il faut mentionner ici la disponibilité temporelle de l'information obtenue par télédétection. L'expression temps réel est utilisée pour décrire les données qui sont disponibles pour l'affichage ou l'analyse au moment même et à la cadence même auxquels elles sont acquises. Le plus souvent, il y a un délai entre le moment où un capteur observe la surface et celui où les données sont disponibles pour l'utilisation. Si ce délai est court, par exemple de quelques heures, les données sont dites “proches du temps réel” et quand les données ont été saisies bien avant qu'elles ne soient analysées, on les appelle données historiques ou d'archive. La disponibilité temporelle est une considération particulièrement importante pour les applications de pêche, à cause de la nature dynamique des ressources marines et des phénomènes liés aux océans.

1.3.  Les applications de pêche

Jusqu'à maintenant, nous avons parlé de la technologie de la télédétection, sans aborder son application à la gestion de la pêche. Les chapitres suivants décrivent les principes de télédétection, les systèmes et les techniques d'analyses plus en détail. Avant de passer à ces aspects de la télédétection, il convient d'indiquer les genres d'études relatives à la pêche auxquelles la télédétection peut s'appliquer. Il faut bien souligner qu'un certain nombre des applications décrites sont encore au stade de la recherche et ne sont pas actuellement opérationnelles.

La détection directe de bancs de poissons, qui semble être le but le plus évident de la télédétection, est en fait le plus difficile à atteindre. Le repérage visuel de poissons à partir d'un avion est pratiqué avec succès pour localiser un certain nombre d'espèces pélagiques comme les anchois, l'espadon, le menhaden et le thon. Dans ce cas-là, un observateur bien formé joue le rôle de “capteur” et il est en liaison radio avec les bateaux se trouvant dans la zone concernée. S'il y a un appareil photographique à bord, des photos peuvent aussi être prises en vue d'une évaluation ultérieure du banc. On peut distinguer les différentes espèces en fonction de leur couleur, leur comportement et leurs formations en bancs. Le tableau 1.1. donne une liste d'espèces qui peuvent être directement observées d'un avion à basse altitude. Le repérage de poissons est limié par la portée de l'avion et n'est réalisable que lorsque les probabilités de détection de poissons sont assez élevées et que le rendement economique de la péche justifie les frais de surveillance aérienne.

Une méthode modifiée de repérage de poissons consiste à utiliser le phénomène de la bioluminescence, c'est à dire, l'émission de lumière par certains types de plancton quand ils sont dérangés par le mouvement des poissons. Ce phénomène est connu par les pêcheurs depuis des siècles et est utilisé régulièrement pour localiser le poisson quand les organismes bioluminescents sont abondants. Des systèmes de télévision sensibles aux faibles lumières (LLLTV) équipés de tubes de renforcement d'images peuvent être utilisés pour amplifier la petite quantité de lumière produite biologiquement. Les ce genre peuvent guider les bateaux vers les bancs de poissons. On a même tenté de prendre une image de la bioluminescence à partir d'un satellite en orbite pendant son exploration de la face nocturne de la terre.

Alors que la détection directe de poissons n'est pas toujours possible, leur détection indirecte peut être possible grâce à l'observation des phénomènes de la surface de la mer directement associés à la répartition des espèces. Ceci peut tout simplement consister à établir une carte de la répartition des activités de pêche dans une zone déterminée. Les changements de couleur de l'océan, du bleu au vert, peuvent indiquer une abondance croissante de plancton. La couleur verte indique la présence de chlorophylle, pigment qui retient la lumière du phytoplancton. Alors que les pêcheurs ont toujours utilisé la couleur de l'océan pour repérer les espèces de poissons à l'échelon local, les avions et l'imagerie par satellite peuvent enregistrer les variations de couleur sur une surface plus grande et d'une façon plus précise. On a élaboré des techniques permettant de déterminer la productivité biologique à partir de la répartition de la chlorophylle et de son abondance.

Tableau 1.1
Espèces représentatives de poissons pouvant être observées d'un avion à basse altitude
(D'après W.H. Stevenson et E.J. Pastula, 1971)
Océan Atlantique et mer MéditerranéeOcéan Pacifique et océan Indien
Atlantique EstPacifique Est
Poissons:Poissons:
AllacheRequin pèlerin
(Sardinella aurita)
(Cetorhinus maximus)
HarengRequin blanc
(Sardinella eba)
(Cachararodon Carcharis)
“Maquereau d'Espagne”Anchois du Pacifique
(Scomberomorus maculatus)
(Sardinops sagax)
AlbacoreBonita du Pacifique
(Thunnus albacares)
(Sarda chiliensis)
Bonite barioléeMaquereau espagnol
(Katsuwonus pelanis)
(Scomber japonicus)
PilchardBécune
(Sardinops trachurus)
(Sphyraena argentea)
 Sériola
Atlantique Nord
(Seriola dorsalis)
Poissons:Bar blanc
 
(Cynoscion nobilis)
Faux Hareng 
(Opisthonema oglinum)
Thon rouge
 
(Thunnus thynnus)
“Maquereau d'Espagne” 
(Scomberomorus maculatus)
Germon
 
(Thunnus alalunga)
Tassergal 
(Pomatomus saltatrix)
Albacore
 
(Thunnus albacares)
Menhaden 
(Brevoortia patronus)
Bonite bariolée
 
(Katsuwonus pelamis)
Tarpon 
(Elops saurus)
“Jacksmelt”
 
(Atherinopsis californiensis)
Carangue 
(Caranx crysos)
Poisson lune
 
(Mola mola)
TarponBar d'Amérique
(Megalops atlantica)
(Morone saxatilis)
HarengBalaou japonais
(Clupea harengus)
(Cololabis saira)
Maquereau bleuEspadon
(Scomber scombrus)
(Xiphia gladius)
Stromatée à fossettesMakaire
(Poronotus triacanthus)
(Tetrapturus audax)
MenhadenMaasbanker
(Brevoortia tyrannus)
(Trachurus symmetricus)
Mer MéditerranéeMammifères:
AllacheBaleine grise
(Sardinella aurita)
Baleine pilote
 Orque
Maquereau bleuMarsouin et dauphin
(Scomber scombrus)
Phoque et otarie
 Invertébrés:
 Calamar
 Méduse
 Pacifique ouest et océan Indien
 Poissons:
 Pilchard
 
(Sardinops pilchardus)
 Sardine
 
(Sardinella fimbriata)
 Maquereau
 (Rastrelliger Kanagurta)

La température de l'eau est un autre facteur important pour déterminer la répartition des espèces; des capteurs thermiques peuvent être utilisés pour établir des cartes de la température de la surface de la mer. Ces cartes peuvent permettre d'identifier les remontées d'eau froide riche en éléments nutritifs et de localiser les limites entre les eaux tièdes et les eaux froides où se rassemblent certaines espèces.

Outre la télédétection des ressources, la télédétection peut être utile pour établir les caractéristiques des environnements marins et côtiers: travaux de mise à jour des cartes de navigation au moyen de données littorales et bathymétriques; cartographie de la répartition des types de marécages côtiers; identification des plantes marines et des types de sédiment dans la zone de laisse et dans les eaux peu profondes; surveillance de l'état des récifs coralliens. Tandis que les applications citées ci-dessus se rapportent à des situations relativement statiques ou en évolution lente, la télédétection permet aussi d'observer des phénomènes plus dynamiques d'une façon régulière et répétitive. Citons comme exemples les modèles de turbidité (due aux matériaux organiques et inorganiques), les courants, les mélanges d'eau douce et d'eau salée, et les zones subsissant l'effet du vent et des vagues. La surveillance à long terme de ces phénomènes peut contribuer à une meilleure compréhension de l'environnement physique qui entretient l'activité biologique et de poser des repères par rapport auxquels on peut mesurer des évènements divergents ou insolites.

L'amélioration des prévisions météorologiques, fondée en partie sur la télédétection, peut renforcer la sécurité des pêcheurs en mer. Les sources de pollution côtière ou du large qui peuvent afecter les zones de pêche peuvent être surveillées par la télédétection. L'intensité et le type de pêche peuvent également être détectées par un capteur. Ces renseignements pourront être utilisés pour déterminer le taux d'exploitation des ressources et pour aider à appliquer les réglements de pêche.

Les exemples cités ci-dessus illustrent certaines applications de la télédétection pouvant intéresser la pêche. Cependant il faut bien préciser que la télédétection peut rarement être utilisée seule; il faut l'associer à d'autres sources de renseignements. Dans les chapitres suivants, nous expliquons comment on peut effectuer la saisie, le traitement et l'analyse des données de télédétection et en présentant une série d'études de cas, comment on peut aujourd'hui utiliser ces données pour faciliter l'exploitation et la gestion de la pêche.


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