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Annexe 2
Études de cas

Intervenants et circuits de commercialisation des céréales dans le Fouta Djalon en Guinée*

Le Fouta Djalon est une zone nettement déficitaire en riz. Il est largement alimenté par le riz importé de Conakry, la capitale du pays. Par contre, la région réalise des excédents appréciables de fonio et de maïs qui sont vendus aussi bien à l'intérieur de la zone qu'à Conakry. L'organisation de la commercialisation des produits céréaliers au Fouta présente la même typologie d'intervenants que dans le reste de la Guinée. La particularité ici réside dans le rôle important joué par les opérateurs basés à Conakry.

1 Producteurs

Ce sont généralement des paysannes qui vendent sur le marché hebdomadaire des quantités individuelles qui sont limitées par la nécessité de les porter sur la tête sur de longues distances.

2 Collecteurs

Ce sont des commerçants qui sont directement en contact avec les producteurs. Cette catégorie se compose essentiellement de femmes appelées «dioula-moussos»** qui se rendent sur les marchés hebdomadaires pour y acheter les produits agricoles. Certains de ces commerçants revendent les produits achetés sur les marchés de la préfecture, mais la plupart se rend à Conakry où le bénéfice tiré du maïs et du fonio est important.

3 Détaillants/grossistes du Fouta

On les appelle ainsi car leur activité porte à la fois sur la vente de gros et la vente au détail. Ces commerçants possèdent un ou plusieurs magasins de stockage qui servent également de magasins de vente. Ils sont installés dans les villes mais possèdent aussi leurs propres réseaux de collecteurs dans les régions de production céréalière.

4 Revendeuses

Ce sont les marchandes qui revendent aux consommateurs les produits achetés auprès des collecteurs ou auprès des détaillants/grossistes. Elles utilisent généralement une mesure traditionnelle dénommée «sariya» dont la capacité est égale à 1,5 kg pour le riz net. Elles utilisent aussi des boîtes de lait ou de conserve vides aux capacités diverses.

Les revendeuses du marché Madina de Conakry sont les principales clientes des collecteurs du Fouta. Le marché Madina est le plus grand marché de la capitale et du pays. Il remplit une triple fonction de stockage, de revente et de redistribution pour les produits céréaliers. La plupart des revendeuses ont plus de 10 ans d'expérience dans l'exercice de la profession; certaines sont très spécialisées et ne traitent qu'un seul produit: maïs ou fonio. Les plus riches de ces revendeuses achètent toujours les produits au comptant aux dioula-moussos; elles leur font également des avances de fonds, s'assurant ainsi la constance des fournisseurs. Les revendeuses du marché Madina ne se rendent ni dans les villes du Fouta, ni sur les marchés hebdomadaires. Elles ne possèdent pas de magasins. Elles ont recours aux services des magasiniers-stockeurs pour le stockage des produits.

5 Consommateurs

Le Fouta perd progressivement sa tradition de consommation de fonio pour se transformer en consommateur de riz. Cette concentration des habitudes alimentaires sur le riz provoque une pression constante de la demande de cette denrée sur tous les marchés de la région. Le fonio reste l'aliment des grandes cérémonies traditionnelles et le maïs est la base du couscous lacté largement consommé dans la région.

6 Transformateurs

Au Fouta, les femmes effectuent encore les opérations de décorticage, de concassage ou de mouture des produits céréaliers manuellement à l'aide du pilon. Les décortiqueuses mécaniques y sont presque inexistantes. Le projet GUI/86/004 de la FAO dans cette région en a installé trois, à Kankalabé, Ditinn et Koba, respectivement. À Conakry, les deux tiers des unités artisanales ont pour activité principale la mouture du maïs.

Les moulins au Burkina Faso*

Les activités de transformation des céréales sont effectuées au niveau artisanal par les moulins de quartier et des zones rurales, et au niveau industriel (ou semi-industriel) par des entreprises de transformation primaire (le grain en brisures ou en farine) et secondaire (la farine en produits de consommation finale).

1 Transformation artisanale

Les moulins artisanaux servant au décorticage ou à la mouture des céréales sont répandus dans les zones rurales grâce à l'action des projets et des ONG qui visaient, entre autres objectifs, à réduire la pénibilité des tâches des femmes rurales. Ils sont également nombreux dans les zones urbaines où ils sont installés par des opérateurs privés**. Dans les villes comme Ouagadougou et Bobo-Dioulasso, 75 pour cent de l'activité des petits moulins portent sur le maïs. La capacité théorique des moulins artisanaux ne dépasse généralement pas les 2 tonnes/jour; la quantité de grains décortiqués ou moulus est fonction de la situation géographique ou de la saison (les moulins des quartiers résidentiels des villes ont moins de clients que ceux des quartiers populaires; pendant les périodes de récolte, les moulins des zones rurales ont plus d'activités). Les clients des petits moulins artisanaux sont les ménagères et les commerçantes détaillantes des marchés. Quelquefois, le meunier achète le maïs pour produire et vendre la farine; mais ce cas est rare et se produit généralement quand le meunier a des clients fidèles parmi les commerçantes. Les facteurs qui freinent l'activité des moulins de village et des moulins de quartier dans les villes sont essentiellement des problèmes techniques ou financiers. On peut citer les suivants:

Vétusté des équipements. La plupart des moulins de quartier ou des zones rurales sont dans un état de vétusté avancé; les opérateurs de ces moulins consacrent beaucoup de temps et d'efforts à maintenir la machine dans un état de marche normale ou à empêcher l'altération de la qualité du produit obtenu. En effet, dans beaucoup de cas, le risque que le grain (ou le son) et la farine se mélangent à cause du manque d'étanchéité entre les différentes parties du moulin est très fréquent. La vétusté marquée du moulin empêche cette machine de travailler à sa capacité normale, ce qui réduit la demande de maïs à décortiquer ou à moudre par ce moyen.

Prix élevé du moulin et des pièces de rechange. Le prix relativement élevé du moulin et des pièces de rechange explique leur état de vétusté avancé et l'insuffisance de leur nombre dans certaines zones. En effet, il est difficile pour le propriétaire du moulin de renouveler son équipement au rythme souhaité en raison du haut coût des machines et des pièces de rechange. Un moulin coûte entre 600 000 et 1 500 000 FCFA selon les marques. Ce prix et celui des pièces détachées sont élevés en raison, entre autres, de la TVA (15 pour cent) et des taxes douanières (56,65 pour cent) auxquelles sont soumis les équipements importés. La Caisse nationale de crédit agricole octroie des crédits individuels «moulins» d'un montant de 1 200 000 à 1 600 000 FCFA sur 48 mois avec trois mois de différé; la condition de base pour l'obtention de ce crédit est que le propriétaire du moulin soit formé à la gestion des moulins. Cependant beaucoup de propriétaires de moulins ignorent l'existence d'un tel crédit; d'autres hésitent à en bénéficier n'étant pas certains que les gains tirés de leur production leur permettront de le rembourser dans les délais établis.

Manque d'activité commerciale soutenue. Les opérateurs de moulins se contentent généralement de décortiquer ou de moudre le grain que leur apportent les clients;leur activité consiste rarement à acheter les céréales en quantités importantes, et à les stocker en vue d'une transformation et d'une revente à des commerçants ou à des ménagères. À cette absence de diversification de l'activité des opérateurs des moulins s'oppose l'augmentation de la demande de céréales. Par ailleurs, dans les zones urbaines, l'absence de concertation entre les propriétaires de moulins détermine une concurrence anarchique entre les moulins d'une même sphère géographique. En effet, les propriétaires de moulins qui ont d'autres entreprises lucratives ont tendance à casser les prix pour attirer les clients; ils réduisent ainsi considérablement l'activité des autres opérateurs et attirent un nombre de clients supérieur à leur capacité de les satisfaire dans les meilleurs délais.

2 Transformation industrielle

Les Grands Moulins du Burkina (GMB) sont le principal opérateur de la transformation industrielle des céréales au Burkina Faso. Depuis 1989, les GMB ont mis l'accent sur la transformation des céréales locales en vue de réduire leur dépendance vis-à-vis des importations de blé dont les cours sont continuellement en hausse.

La capacité théorique de production de la farine de maïs est de 7 000 tonnes par an soit 18 pour cent de la capacité totale de l'usine. Les GMB produisent aussi du kribsi ( brisures de maïs de taille comprise entre 1 900 et 3 000 microns destinées aux brasseries) et du gritz ( brisures de plus petite taille utilisées comme semoule) Pour cette activité, les GMB ont une capacité de traitement de 60 tonnes de maïs par jour, ce qui représente une demande potentielle de plus de 17 500 tonnes de maïs par an et une production potentielle de plus de 10 000 tonnes de brisures.

Les GMB s'approvisionnent en maïs auprès des grands commerçants de la région de Bobo-Dioulasso et de Banfora avec lesquels sont signés des contrats indiquant les quantités, les prix et les qualités des produits à livrer. Le maïs exigé par les GMB est la variété SR 22, semi-vitreux, qui est vulgarisé auprès des producteurs dans tout le pays. La farine produite par les GMB est livrée à trois représentants exclusifs basés respectivement dans les villes de Bobo-Dioulasso, Ouagadougou et Banfora. Les autres opérateurs et consommateurs font leurs achats auprès de ces trois commerçants.

L'utilisation des égreneuses par les producteurs de maïs dans l'Ouest du Burkina Faso*

Dans la zone cotonnière de l'ouest du Burkina Faso, les grands producteurs de maïs ont substitué aux méthodes d'égrenage traditionnelles l'utilisation des égreneuses mécaniques à haut rendement. Parmi les égreneuses tirées par moteur, il en existe une qui a fait ses preuves dans cette zone: l'égreneuse monocéréale «Bamby» qui se présente également dans une version multicéréales appelée «Bamba».

Cette égreneuse a une capacité de 2,5 tonnes/heure environ avec un régime du batteur de 700 à 800 tours/minute pour le maïs et 1 200 tours/minute pour le mil. Bâtie de façon à être transportée par le tracteur, elle possède les éléments suivants:

Le réglage permet de varier l'inclinaison de la grille suivant le poids des grains pour favoriser la retenue vers l'arrière:

Le principe de cette machine est l'égrenage par frottement et non par choc, ce qui donne une bonne qualité de grains avec un minimum de brisures et un état de propreté satisfaisant.

De toutes les égreneuses connues par les producteurs, la Bamby ou Bamba s'est révélée la plus performante. En plus de sa simplicité, de sa robustesse et de ses performances, elle présente l'avantage d'être simple à régler et de ne pas nécessiter de coûteux entretiens puisqu'elle ne dispose que de deux points de graissage. En plus, elle peut être déplacée d'une aire de battage à une autre, ou d'un village à un autre.

Cette dernière caractéristique est d'ailleurs mise à profit par les producteurs, qui en font un outil de prestation de service. Ainsi, la machine n'est disponible que chez quelques producteurs ayant bénéficié des crédits d'équipement de l'opération mécanisation. Pendant la période de récolte, ces producteurs se déplacent avec leur machine pour offrir ses services à tous ceux qui en ont besoin. Le paiement se faisant en nature (un sac égrené pour le propriétaire de la machine pour chaque 12 ou 13 égrenés), cette forme d'utilisation est une réponse adaptée au coût élevé de la machine évalué à 7 à 8 millions de francs CFA.

Cependant, cette contrainte financière pourrait être levée si les artisans locaux fabriquaient eux-mêmes cette machine.

Ainsi, on peut noter l'exemple d'un mécanicien de la SOFITEX (société cotonnière) qui dispose des compétences techniques et du matériel nécessaires pour fabriquer la Bamby à un coût de revient six fois moins élevé que la Bamby d'importation. Ce mécanicien en a déjà livré une dizaine à des producteurs qui les utilisent avec satisfaction. Notre fabricant local estime sa capacité de production à deux machines/semaine.

La vulgarisation de cette machine auprès des producteurs des zones céréalières du Burkina Faso est adaptée pour tous les problèmes d'égrenage des céréales. Certes, les égreneuses manuelles sont bon marché mais, de l'avis même des producteurs, elles ne conviennent qu'aux petites quantités de céréales.

Le potentiel de diversification agricole du Bénin*

Au Bénin, la production agricole jouit d'un environnement naturel relativement favorable. La pluviométrie est supérieure à 800 mm en moyenne dans tout le pays hormis quelques zones du nord. Les terres cultivables sont estimées à 7 050 000 ha et sont mises en valeur chaque année à hauteur de 1 million d'hectares. Pour 1996/97, la superficie cultivée est de 1 255 389 ha. Les conditions agroclimatiques font que le pays est structuré en zones agroécologiques aux potentialités variées. Dans la zone agroécologique du sud sont pratiqués les systèmes de production associant le palmier à huile et la vigne à des cultures vivrières comme le maïs et le manioc; la répartition annuelle des pluies permet deux saisons de culture dans cette partie du pays. Dans la zone agroécologique du centre, les systèmes de production permettent une gamme diversifiée de produits (tubercules, céréales, légumineuses); la grande disponibilité en terres, le faible peuplement et l'existence de deux saisons de culture sont de grands atouts pour la diversification agricole dans cette partie du pays. Les différentes zones agroécologiques du nord (Borgou et Atacora) ont pour principales caractéristiques l'existence d'une seule saison de culture, l'introduction des cultures de rente (notamment le coton et l'anacardier), le faible peuplement et la disponibilité des terres.

Les semences de base sont produites par la station de recherche de Niaouli pour les départements du sud et par celle d'INA pour les départements du nord. L'INRAB a mis au point des variétés améliorées; pour le maïs, les variétés les plus cultivées sont la DMR-ESR dans le sud (cycle de 95 jours, rendement potentiel 4 500 kg/ha) et la TZPB-SR dans le nord dont le cycle est de 120 jours (rendement potentiel 5 500 kg/ha). Pour le sorgho, les deux variétés vulgarisées sont la SSBK et la SSBA4 avec des cycles respectifs de 140 et 160 jours (rendement potentiel, 2 500 kg/ha). L'une des plus grandes difficultés de la culture de l'igname était la pénurie de semenceaux car les paysans utilisaient plus de 20 pour cent de leur production comme matériel de plantation. La production de semenceaux (petits tubercules entiers pesant de 100 à 1 000 g) à partir de minifragments de 15 à 30 g a permis de résoudre ce problème en réduisant au 1/5 les quantités traditionnellement utilisées comme semences.

Les principaux produits agricoles d'exportation traditionnels du Bénin sont le coton et l'huile de palme sur lesquels ont été concentrés durant ces trois décennies l'essentiel des investissements agricoles, de la recherche et de la vulgarisation. Les résultats obtenus pour le coton peuvent être qualifiés de satisfaisants aux divers plans de l'amélioration du revenu des populations, du soutien aux autres produits agricoles et de l'impact sur l'ensemble de l'économie nationale. Le palmier à huile, par contre, se trouve dans une situation de déclin et ne représentait plus que 0,4 pour cent des recettes en 1993 contre 29 pour cent en 1982. Les raisons de ce déclin s'expliquent notamment par le vieillissement des plantations, la gestion étatique des plantations entre 1976 et 1989, la fréquence des périodes sèches dues à une baisse de la pluviométrie et l'inadéquation du matériel végétal au contexte climatique. Les tentatives (ou études) réalisées en vue de promouvoir d'autres cultures d'exportation à coté du coton (principalement les fruits et légumes) n'ont pas modifié la structure des exportations agricoles qui restent largement dominées par le coton. Pour cette raison, on comprend les motivations d'une valorisation des spéculations vivrières en vue de la diversification agricole.

Lorsque l'on examine les conditions de production et de commercialisation de ces différents produits vivriers, on constate que presque toutes ces cultures présentent globalement de possibilités réelles de diversification. Cependant, on peut sélectionner les produits vivriers qui offrent les meilleures occasions sur la base de critères comme les quantités produites et la rentabilité des circuits commerciaux. Le critère des quantités produites et commercialisées est important car il suppose que le produit concerné est intégré dans un réseau commercial traditionnel animé par des opérateurs ayant des marchés réels et potentiels qui ne demandent qu'à être explorés selon un système commercial approprié. Les produits susceptibles d'être retenus en vue de la diversification par rapport à ce critère sont l'igname, le manioc et le maïs. Le critère de la rentabilité des filières est un critère de choix dans cette sélection car il conditionne la réussite finale des actions de diversification. Suivant ce critère de rentabilité on peut retenir le haricot, le riz, l'arachide et, dans une certaine mesure, le manioc.

Lorsque l'on considère à la fois les deux critères dans le souci de révéler les avantages comparatifs des différentes filières, on aboutit aux remarques suivantes:

Dans ce cadre, la réalisation d'un plan d'aménagement hydro-agricole a été perçue comme une des actions déterminantes pour le développement de cette filière. Cependant, on n'a pas accordé beaucoup d'attention au fait que des systèmes de production plus ou moins onéreux n'accordaient aucune chance au riz local face à la concurrence du riz importé.

À la suite de toutes ces remarques, on peut retenir le maïs et le manioc comme les cultures vivrières les plus aptes à traduire les exigences de la diversification agricole. Le choix du maïs s'impose lorsqu'on voit le poids relatif de cette céréale dans le PIB et toutes les structures de commercialisation informelles qu'il impulse au Bénin et dans la région d'Afrique de l'Ouest. En 1997, les comptes nationaux publiés par l'INSAE indiquent que la production végétale intervient pour environ 30 pour cent dans la formation du PIB; or, plus de la moitié des surfaces cultivées sont consacrées aux céréales (55 pour cent) et le maïs, à lui seul, représente 40,5 pour cent des superficies emblavées. Quant à la filière manioc, une mission organisée dans le cadre de la diversification des exportations, et réalisée en février 1993 par la FAO et financée par la BAD**, l'avait déjà identifiée comme cadre d'actions en vue de la diversification agricole. À côté du maïs et du manioc, des produits comme le riz et le haricot peuvent être retenus en vue de la diversification; pour ce faire, il faudrait créer les conditions propres à une production suffisante et excédentaire de ces deux produits.

L'approvisionnement en intrants agricoles en Guinée* et au Bénin**

Jusqu'au milieu des années 80, la politique agricole de la Guinée s'est traduite, dans le domaine des approvisionnements en intrants agricoles, par la création de circuits de distribution dans lesquels l'État était fortement impliqué, et qui bénéficiaient de larges subventions. Les entreprises nationales AGRIMA pour le matériel agricole et SEMAPE pour les engrais et les produits phytosanitaires avaient le monopole de l'importation et de la distribution des intrants agricoles. Les producteurs avaient accès aux intrants agricoles au travers de coopératives qui pouvaient obtenir de la Banque nationale du développement agricole (BNDA) des prêts ne couvrant généralement qu'une partie du coût de la commande. Les prix de cession pratiqués par SEMAPE et AGRIMA, de même que le prix de vente aux producteurs par les FAPA (Ferme agropastorale d'arrondissement) ou d'autres intermédiaires, étaient établis par la Direction nationale des prix et conjoncture. Ces prix bénéficiaient d'un taux surévalué de la monnaie nationale et d'une exonération totale des droits de douane. Ils étaient également établis en fonction d'une politique de marges faibles, voire nulles, garantie par une caisse de péréquation et de stabilisation domiciliée au Ministère de l'économie et des finances. La Caisse de stabilisation ramenée en 1985 au Ministère du commerce a été supprimée début 1987. L'arrêt des activités d'AGRIMA et de SEMAPE depuis 1985 et les nouvelles procédures d'importation intervenues en 1986, qui ont consacré la libéralisation des importations, ont particulièrement affecté le système d'approvisionnement des intrants agricoles en Guinée. La forte dépréciation de la monnaie nationale et l'augmentation des prix, qui ont

Des tentatives ont alors été faites par le Ministère de l'agriculture en vue de créer une centrale nationale d'approvisionnement, mais ces efforts n'ont pas été couronnés de succès. De même, la reprise par des opérateurs privés d'AGRIMA et de SEMAPE, préconisée par les autorités du pays, n'a pu se faire en raison sans doute de la situation financière précaire de ces entreprises. Cependant, à partir de 1990, quelques sociétés guinéennes se sont lancées dans l'importation d'intrants agricoles, suite à une ordonnance publiée par les autorités et portant exonération de droits de douane de certains intrants agricoles. Il faut dire qu'il n'y a pas d'industries de production d'engrais et de produits phytosanitaires en Guinée et que les opérateurs de la filière des intrants agricoles se rencontrent aux stades de l'importation, de la distribution et de la consommation. Les sociétés privées d'importation d'intrants agricoles qui ont démarré en 1990 n'ont pas supporté la concurrence des sociétés étrangères plus compétitives lors des appels d'offres organisés par les Projets agricoles pour l'achat des intrants agricoles. Elles ont pratiquement toutes cessé leurs activités ou se sont reconverties dans d'autres secteurs; UNICIG, qui était le principal importateur, n'a acheté que 78 tonnes d'engrais en 1990 et 128 tonnes d'engrais au cours des sept premiers mois de 1991; elle a fermé en 1992. Seule l'Association de coopération technique (ACT) une organisation non gouvernementale belge créée en 1987 en Basse-Guinée a pu se maintenir. Fort de son succès, l'ACT s'est transformée 1991 en société commerciale et s'est implantée dans d'autres régions du pays. Le succès de l'ACT s'explique par le fait qu'elle a bénéficié pendant longtemps, sous sa forme d'ONG, des crédits à des conditions non commerciales et d'autres soutiens du principal projet de développement rural financé par l'Union européenne dans les régions de la Basse et de la Haute-Guinée.

Cependant, les principaux opérateurs du secteur des intrants agricoles demeurent les projets agricoles qui réalisent des activités de développement exigeant l'importation et la distribution des intrants agricoles. Il n'est pas dans la vocation de ces projets d'avoir un rôle d'acheteur et de distributeur d'intrants agricoles. Toutefois, compte tenu des faiblesses actuelles du système commercial dans ce domaine, ils sont amenés à jouer ce rôle pour ne pas freiner certaines activités de recherche, de développement, de vulgarisation et de mise en valeur de périmètres. La distribution des intrants agricoles est effectuée par la cellule crédit des projets. Dans le Projet FAO GUI/86/004 «Développement intégré du Fouta Djalon», qui a débuté en 1987 et qui a pratiquement pris fin en 1993, la distribution des engrais répondait au schéma suivant: les demandes d'engrais et de semences des paysans sont examinées et dépouillées par les conseillers ruraux (CR), centralisées par les chargés de groupements (CG) et la cellule agroformation du projet. Les demandes parviennent à la cellule crédit qui les centralise en vue d'une appréciation par le Comité de crédit du projet. Celui-ci comporte les représentants des cellules techniques et de la Direction du projet. Les intrants agricoles sont livrés, en priorité, aux paysans des groupements, sous la supervision des conseillers ruraux et des chefs de zone. Le remboursement se fait à un taux d'intérêt forfaitaire annuel de 15 pour cent. Une certaine quantité est vendue à des paysans individuels, mais la vente se fait au comptant. La cellule crédit couvre tous les volets d'intervention du projet. Elle accorde, cependant, la priorité au secteur agricole comme en fait foi la programmation suivante de son budget annuel.

Cette cellule accorde également des crédits aux paysans n'appartenant pas aux groupements jusqu'à concurrence de 15 pour cent du budget crédit. Les crédits de campagne (secteur agricole) sont accordés à partir de critères bien précis:

Au Bénin, le système actuel d'approvisionnement en intrants agricoles est caractérisé par le désengagement progressif de la Société nationale de promotion agricole (SONAPRA) au profit des importateurs privés et des organisations paysannes. La SONAPRA est la société cotonnière du Bénin et malgré la libéralisation officielle de la distribution des intrants agricoles, elle est au cœur de tout ce dispositif de l'importation et de la vente des engrais et des produits phytosanitaires. En effet, c'est elle qui prépare les dossiers de demande d'agrément à l'intention des importateurs privés et signe les contrats avec ces derniers en vue de leurs opérations d'importation.

C'est la SONAPRA, qui repartit également les zones de commercialisation entre les différents importateurs privés, leur octroie des cautions auprès des banques, prélève au cours des ventes du coton graine par groupements villageois les montants dus au titre des crédits intrants agricoles et assure le remboursement de ces crédits aux importateurs.

Les sociétés privées agréées pour la distribution des intrants agricoles sont environ une dizaine qui assurent l'importation et la mise en place de la quasi-totalité des besoins d'engrais et de produits phytosanitaires (80 pour cent) exprimés par les groupements villageois. Une caractéristique importante du système d'approvisionnement en intrants agricoles est qu'il est basé sur une implication active des groupements de producteurs organisés au sein des Unions sous-préfectorales de producteurs (USPP) qui ont été instituées dans le cadre du développement de la filière coton, mais qui concernent aussi les produits vivriers (maïs et haricot, notamment) dans la mesure où les producteurs de coton sont aussi les producteurs de ces denrées vivrières. L'inconvénient de ce système est que les engrais et autres produits de traitement importés pour le coton ne sont pas souvent adaptés aux cultures vivrières, et provoquent un accroissement disproportionné des coûts de production par rapport à celui des rendements. Par ailleurs, la grande majorité des producteurs vivriers non producteurs de coton sont exclus du système d'approvisionnement.

La principale difficulté rencontrée dans les tentatives de faire bénéficier cette catégorie du système réside dans la faiblesse des recouvrements des crédits intrants agricoles. En effet, contrairement au coton où il existe un acheteur officiel (SONAPRA) susceptible de récupérer la valeur des crédits au moment du paiement des producteurs, les produits vivriers sont vendus de gré à gré à une multitude d'intervenants en contact plus ou moins direct avec les paysans. Dans ces conditions, personne ne veut prendre le risque de garantir le crédit «intrants agricoles» et, comme les producteurs vivriers n'ont pas les moyens financiers de procéder aux achats au comptant auprès des fournisseurs, ils restent lésés dans le système d'approvisionnement en intrants agricoles.


* Kalil Kouyaté. Étude de la commercialisation des produits agricoles et de l'approvisionnement en intrants agricoles dans le Fouta Djallon, octobre 1991, projet FAO/GUI/004/87.

** En langue malinké (parlée dans le nord-est de la Guinée), «dioula» signifie commerçant et «mousso», femme. Littéralement donc «dioula mousso» veut dire «femme commerçante».

* Kalil Kouyaté. Analyse des contraintes en aval de la production du maïs au Burkina Faso; volet commercialisation et consommation, PSSA, FAO, octobre 1997.

** On estime qu'il y a au moins une dizaine de petits moulins dans chaque secteur de la ville de Ouagadougou.

* Cette note reprend l'avis d'un expert burkinabé sur l'égreneuse «Bamby» (voir Jean Baptiste Zoma. Analyse des contraintes en aval de la production du maïs au Burkina Faso; volet transformation et conservation. PSSA, FAO, octobre 1997).

* Kalil Kouyaté et Alapini Calixte: Etude de la commercialisation et de la diversification des produits vivriers au Bénin, FAO, octobre 1998

** Projet de diversification des exportations, mission de préparation, FAO, février 1993

* Kalil Kouyaté. Étude de la commercialisation des produits agricoles et de l'approvisionnement en intrants agricoles dans le Fouta Djallon, octobre 1991, projet FAO/GUI/004/87

** Kalil Kouyaté et Alapini Calixte. Étude de la commercialisation et de la diversification des produits vivriers au Bénin, FAO, octobre 1998résulté de la libéralisation du commerce, ont amené les commerçants à s'intéresser en premier lieu à l'importation et à la distribution des produits de première nécessité à rotation rapide (riz, farine, huile, sucre, ciment, tôles). L'importation et la distribution des engrais et, d'une manière générale, des intrants agricoles n'attiraient pas les opérateurs économiques pour les raisons suivantes:

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