ALICOM 99/15





Conférence sur le commerce international des denrées alimentaires au-delà de l'an 2000: décisions fondées sur des données scientifiques, harmonisation, équivalence et reconnaissance mutuelle
Melbourne (Australie), 11-15 octobre 1999

Perspectives d'avenir: nouveaux problèmes - allergènes alimentaires

par

Steve L. Taylor, Ph.D., University of Nebraska, USA

 


Table des matières


1. Les allergies alimentaires ont probablement affecté l'humanité depuis l'origine des temps. Il y a des siècles, le philosophe romain Lucrèce a dit "la nourriture de l'un peut être poison pour l'autre". Les premiers cas bien documentés de patients allergiques à des aliments sont apparus au début du 20ème siècle. Toutefois, les allergies alimentaires ont été largement ignorées par la communauté médicale et par les organismes réglementaires jusque ces dernières années. Encore aujourd'hui, la prévalence des allergies alimentaires et leurs répercussions générales sur les individus ne sont pas clairement comprises dans de nombreuses parties du monde. Ces dernières années, les allergies alimentaires ont été plus largement reconnues par la communauté médicale en particulier en Amérique du Nord, en Europe, au Japon et en Australie. Toutefois, il est probable que des allergies affectent des individus dans tous les pays du monde. L'exposition involontaire à l'aliment agresseur pouvant avoir des conséquences extrêmement graves ou même mortelles pour certains individus souffrant d'allergie alimentaire, les organismes réglementaires devraient accorder une plus large place qu'ils ne le font aujourd'hui à l'incidence des allergies alimentaires sur la santé publique.

2. Dans le présent document, j'apporterai des données de base relatives aux divers types d'allergies et sensibilités alimentaires, notamment une description des symptômes qui se manifestent chez les individus affectés, une explication des mécanismes de plusieurs maladies au sein de cette catégorie, et une estimation de la prévalence des allergies alimentaires. Ensuite, je m'attacherai à certains aspects d'ordre réglementaire liés à cette question, y compris quelques recommandations concernant les mesures à prendre destinées à la FAO/OMS et aux gouvernements des États Membres.

Introduction et classification

3. Une sensibilité alimentaire est définie comme une réponse physiologique anormale à un aliment particulier. Ce même aliment peut être absorbé sans risque par la vaste majorité des consommateurs. Les sensibilités alimentaires peuvent être divisées en deux catégories principales: allergies alimentaires et intolérances alimentaires. Il est probable que de nombreux consommateurs et même certains membres du corps médical devant une réponse anormale à un ou plusieurs aliments, feront état d'allergie alimentaire quel que soit le mécanisme impliqué dans la réaction. Toutefois, les sensibilités alimentaires peuvent mettre en jeu plusieurs types différents de mécanismes. Il existe des raisons d'ordre pratique pour faire la distinction entre les vraies allergies alimentaires et les intolérances alimentaires tant du point de vue médical que réglementaire.

4. Les allergies alimentaires sont des réactions anormales du système immunitaire à certains composants des aliments. Les allergènes présents dans les aliments sont généralement des protéines naturelles. Les véritables allergies alimentaires peuvent être encore divisées en deux catégories: les réactions d'hypersensibilité immédiate et les réactions d'hypersensibilité retardée. Dans les réactions d'hypersensibilité immédiate, les symptômes commencent à se manifester dans les minutes ou l'heure qui suivent l'ingestion de quantités même infimes de l'aliment agresseur. Des réactions d'hypersensibilité immédiate ont été signalées avec plus de 170 aliments différents. Fondamentalement, tout aliment contenant des protéines a le potentiel de déclencher une sensibilisation allergique chez un individu quelconque. Les réactions dans les cas d'hypersensibilité immédiate peuvent parfois être très graves. Le mécanisme des réactions d'hypersensibilité immédiate seront décrits plus loin. En revanche, les symptômes associés aux réactions d'hypersensibilité retardée ne commencent à apparaître qu'au bout de 24 heures ou plus après l'ingestion de l'aliment agresseur. Le rôle des réactions d'hypersensibilité retardée dans les réactions aux aliments est encore très mal connu à l'exception de la maladie coeliaque (voir ci-après). Les symptômes des réactions d'hypersensibilité retardée n'atteignent pas le degré de gravité des cas les plus graves de réactions d'hypersensibilité immédiate. Toutefois, le niveau de tolérance pour l'aliment agresseur est également très faible en ce qui concerne les réactions d'hypersensibilité retardée.

5. Comme les véritables allergies alimentaires, les intolérances alimentaires affectent un nombre limité de personnes. Elles peuvent être définies comme toute forme de sensibilité alimentaire qui ne met pas en jeu de mécanismes immunologiques. Il existe trois grandes catégories d'intolérances alimentaires: troubles dus au métabolisme des aliments, réactions anaphylactoïdes et réactions idiosyncrasiques. Les mécanismes mis en jeu par ces maladies sont décrits plus loin. Pour la plupart, les intolérances alimentaires provoquent des manifestations moins fortes et les individus concernés peuvent fréquemment tolérer une certaine quantité de l'aliment agresseur dans leur régime alimentaire.

6. D'un point de vue pratique, il faut établir une distinction entre les véritables allergies alimentaires et les autres types de sensibilités alimentaires parce qu'elles peuvent engendrer de graves réactions chez certains individus et que les individus souffrant d'allergie alimentaire ne peuvent guère tolérer l'aliment agresseur dans leur régime. Par exemple, il est important de faire une distinction entre l'allergie au lait et l'intolérance au lactose. L'allergie au lait peut engendrer des réactions systémiques qui peuvent être graves, et les individus allergiques au lait ne peuvent guère tolérer de lait dans leur régime alimentaire. En revanche, l'intolérance au lactose, qui provient d'une déficience enzymatique dans l'intestin grêle, se traduit uniquement par des symptômes gastro-intestinaux, et les individus affectés peuvent souvent tolérer des quantités appréciables de lait dans leur régime.

Caractéristiques des différents types de sensibilités alimentaires

A. HYPERSENSIBILITÉ IMMÉDIATE

7. Les réactions d'hypersensibilité immédiate sont médiées par une classe particulière d'anticorps connus comme immunoglobine E ou IgE. Si tous les êtres humains ont de faibles taux d'anticorps IgE, seuls les individus prédisposés au développement d'allergies produisent des anticorps IgE qui sont spécifiques et reconnaissent certains antigènes ou allergènes d'environnement. Ces antigènes ou allergènes sont généralement des protéines, même si un petit nombre seulement des protéines présentes dans la nature sont capables d'agir comme allergènes en stimulant la production d'anticorps IgE spécifiques chez les individus sensibles. L'exposition à ces allergènes alimentaires particuliers déclenche la formation d'anticorps IgE spécifiques par les cellules B qui existent dans de nombreux tissus notamment les voies gastro-intestinales. Les anticorps IgE se fixent sur les mastocytes dans différents tissus et sur les basophiles dans le sang. A ce point, l'individu affecté est sensibilisé à l'aliment particulier mais aucune réaction allergique ne s'est encore manifestée. Lors d'une exposition ultérieure à la substance allergisante présente dans l'aliment agresseur, l'allergène interagit avec les anticorps IgE spécifiques sur la surface du mastocyte ou du basophile stimulant la libération d'une multitude de médiateurs de la réponse allergique dans les tissus et dans le sang. De nombreux médiateurs ont été décrits, mais l'histamine est l'un des principaux médiateurs responsables de nombreux symptômes immédiats qui apparaissent dans ces réactions. L'interaction de faibles quantités de l'allergène avec les anticorps IgE fixés sur le mastocyte déclenche la libération de quantités massives de ces médiateurs. Pour cette raison, l'ingestion d'une petite quantité de l'aliment agresseur peut entraîner une réaction chez un individu sensible.

8. Une grande variété de symptômes, de bénins à mortels, peuvent être associés aux allergies médiées par l'IgE. Les symptômes peuvent mettre en jeu les voies gastro-intestinales (nausée, vomissement, diarrhée, crampe abdominale), la peau (urticaire ou éruption, dermatites, eczéma, angioedème, prurit ou démangeaison), ou les voies respiratoires (rhinites, asthme, oedème laryngé). Les individus souffrant d'allergies alimentaires ne présentent ordinairement que quelques-uns des nombreux symptômes possibles. Les symptômes gastro-intestinaux sont assez courants car les aliments sont ingérés et les voies gastro-intestinales sont le premier organe lésé. Les réponses cutanées sont également des manifestations courantes des allergies alimentaires. Les réactions respiratoires se rencontrent moins souvent avec les allergies alimentaires qu'avec les allergies d'environnement comme les allergies au pollen ou aux poils et squames d'animaux, auquel cas les allergènes sont surtout inhalés. Toutefois, l'asthme fait partie des symptômes les plus graves liés aux allergies alimentaires, même si l'asthme induit par des aliments est relativement rare.

9. La manifestation d'allergie alimentaire la plus courante est peut-être le syndrome dit d'allergie orale, qui est si bénin qu'il est souvent ignoré par ceux mêmes qui en sont atteints. Le syndrome d'allergie orale se limite aux symptômes qui se manifestent dans la zone de l'oropharynx, notamment des démangeaisons, éruptions et oedèmes. Il est très fréquemment associé à l'ingestion de fruits et de légumes frais. Les allergènes présents dans ces aliments étant inactivés au contact de l'acide stomacal, les réactions systémiques sont rarement rencontrées.

10. Le symptôme le plus effrayant associé aux allergies alimentaires est le choc anaphylactique. Celui-ci met en jeu les voies gastro-intestinales, la peau, les voies respiratoires et le système cardio-vasculaire, avec des symptômes qui apparaissent souvent en combinaison et se développent rapidement. Il peut s'agit d'une hypotension grave, et la mort peut survenir dans les minutes qui suivent l'ingestion de l'aliment agresseur sans un traitement approprié. Les personnes souffrant d'allergies alimentaires pour lesquelles les conséquences risquent d'être aussi graves sont rares, mais de nombreux décès dus à une exposition involontaire à l'aliment agresseur ont été établis parmi celles-ci.

11. Les allergies médiées par l'IgE affectent entre 1 et 2 pour cent de la population totale. Toutefois, les nourrissons et les jeunes enfants sont plus souvent affectés d'allergies alimentaires que les autres groupes d'âge. Parmi les enfants âgés de moins de trois ans, la prévalence des allergies alimentaires semble se situer entre 5 et 8 pour cent. Dans certains pays, un pourcentage beaucoup plus élevé de la population croit souffrir d'allergie alimentaire parce que celle-ci a été diagnostiquée par eux-mêmes, par des parents ou qu'elle a été mal comprise ou mal diagnostiquée par des médecins.

12. La plupart des allergies alimentaires médiées par l'IgE sont attribuables à un petit groupe de 8 aliments ou groupes d'aliments, parfois dénommés les "grands 8": lait de vache, oeufs, poisson, crustacés, arachides, soja, fruits à coque et blé. On estime que ces aliments ou groupes d'aliments représentent plus de 90 pour cent de toutes les allergies alimentaires aux Etats-Unis. En 1995, une consultation technique de la FAO a catalogué ces aliments comme étant la cause des allergies alimentaires les plus courantes dans le monde. En ce qui concerne les allergies alimentaires, les crustacés incluent les crevettes, les crabes, les homards et les écrevisses. Pour ce qui est du poisson, il s'agit de toutes les espèces de poisson d'eau douce ou d'eau salée. Les fruits à coque incluent les amandes, les noix, les noix de pécan, les noix de cajou, les noix d'Amérique, les noisettes, les pistaches, les pignons, les noix de macadamia, les marrons et les noix d'hickory. Dans l'ensemble, il a été établi que plus de 170 aliments provoquent des allergies alimentaires. Plusieurs autres aliments méritent d'être mentionnés parce que, même s'ils sont moins fréquemment la cause d'allergies, ils sont connus pour causer de graves réactions. Ces aliments incluent les mollusques/crustacés (palourdes, huîtres, etc.), les graines de sésame, les graines de pavot, les graines de coton et certaines autres légumineuses (les divers types de haricots secs, pois, lentilles, pois chiche). Les allergènes associés aux allergies médiées par l'IgE sont des protéines naturelles spécifiques qui existent dans aliment particulier. Seule une ou quelques-unes des protéines présentes dans chacun de ces aliments peut agir comme un allergène.

13. La prévalence des allergies à des aliments spécifiques n'est pas connue de manière précise. L'allergie au lait de vache est très courante chez les enfants et très souvent disparaît lorsqu'ils grandissent. Selon des études menées dans plusieurs pays, la prévalence de l'allergie au lait de vache chez les jeunes enfants se situe souvent aux environs de 2 pour cent. Plusieurs études récentes ont montré que la prévalence de l'allergie aux arachides peut atteindre 1 pour cent aux Etats-Unis et 0,5 pour cent en Angleterre. Il est possible que la prévalence de l'allergie aux arachides soit plus faible en Angleterre parce que la consommation d'arachides y est moins fréquente qu'aux Etats-Unis. Toutefois, la consommation d'arachides a augmenté en Angleterre ces dernières années et il semble que la prévalence de l'allergie aux arachides augmente également en Angleterre.

14. Les symptômes des allergies alimentaires peuvent être traités par certains médicaments, notamment les antihistaminiques et l'épinéphrine, mais la seule approche prophylactique du traitement des allergies alimentaires consiste à suivre un régime de suppression spécifique. Par exemple, les personnes allergiques aux arachides doivent éviter d'ingérer des arachides. Toutefois, la construction et l'application sûres et efficaces de régimes de suppression posent souvent un défi aux individus souffrant d'allergies alimentaires. Ceux-ci doivent éviter toute forme de l'aliment agresseur contenant des protéines parce que les allergènes se trouvent dans la fraction protéique. Par exemple, les individus allergiques au lait de vache devraient éviter tous les produits laitiers et la plupart des ingrédients laitiers comme la caséine et le lactosérum. La déclaration des ingrédients dans l'étiquetage des aliments emballés apporte une information fondamentale aux consommateurs présentant des allergies alimentaires.

15. Chez les individus présentant des réactions allergiques médiées par l'IgE, les symptômes se manifesteront après exposition à de petites quantités de l'aliment agresseur. L'interaction de petites quantités de l'allergène avec les anticorps IgE sur la surface du mastocyte relâche des quantités massives de médiateurs, ce qui explique le faible degré de tolérance. On ne connaît pas les doses seuils précises des aliments allergènes, une exposition aussi basse que 1 à 2 mg de l'aliment agresseur provoquera des réactions allergiques chez les individus les plus sensibles. Les symptômes apparaissant chez l'individu allergique seront vraisemblablement d'autant plus graves que la dose d'exposition sera forte.

16. En dépit d'une lecture attentive des déclarations concernant les ingrédients alimentaires, les individus allergiques peuvent subir des réactions allergiques du fait de la présence "cachée" de l'aliment agresseur dans le produit ingéré. La règle des 25 pour cent autorise le non étiquetage de composants alimentaires allergènes dans les produits alimentaires à des niveaux assez élevés par rapport à la dose seuil déclenchant des réactions. Parfois, les ingrédients alimentaires sont issus de matériaux allergènes pouvant contenir des résidus d'allergènes protéiques provenant de ces sources. De plus, ces ingrédients figurent souvent dans la déclaration des ingrédients sous des termes collectifs, et l'origine de l'ingrédient n'est pas indiquée au consommateur. On peut citer, par exemple, les arômes, les épices, les huiles, l'amidon ou la lécithine. Ces ingrédients, même s'ils sont dérivés de sources allergènes, ne contiennent pas toujours de résidus des allergènes. Par exemple, les huiles végétales extrêmement raffinées, notamment les huiles d'arachide et de soja contiennent des quantités extrêmement faibles de protéines provenant du matériel d'origine et ne déclenchent pas de réactions allergiques chez les individus sensibles. On peut parfois trouver des résidus imprévus d'aliments allergènes du fait d'erreurs industrielles, comme des formulations erronées, des mélanges au niveau de l'emballage, l'utilisation imprudente de produits recyclés ou le nettoyage inadéquat de matériel à usage mixte. Même si de telles erreurs sont peu fréquentes, elles peuvent avoir de graves conséquences.

17. Du fait de la gravité des symptômes occasionnés par les allergies alimentaires médiées par l'IgE chez certains individus affectés et de la probabilité de réactions dues à l'ingestion de quantités très faibles de ces aliments allergènes, les allergies alimentaires médiées par l'IgE méritent la plus grande attention de la part des organismes réglementaires.

B. HYPERSENSIBILITÉ RETARDÉE

18. Les réactions d'hypersensibilité retardée sont médiées par les cellules immunitaires liées aux tissus. La maladie coeliaque est le seul exemple décrit de manière détaillée d'une réaction d'hypersensibilité retardée à des aliments. La maladie coeliaque, également appelée sprue coeliaque ou encore entéropathie sensible au gluten, apparaît chez certains individus après ingestion de blé, de seigle, d'orge, de céréales apparentées (notamment épeautre, kamut et triticale) et peut-être d'avoine. La maladie coeliaque résulte d'une réponse anormale des lymphocytes T dans l'intestin grêle à certaines protéines (le gluten du blé et les protéines apparentées d'autres céréales) qui sont présentes dans certaines céréales. Un processus inflammatoire se développe et endommage l'épithélium absorbant de l'intestin grêle. La lésion tissulaire se situe au niveau de l'intestin grêle mais la perturbation du processus d'absorption affecte de nombreuses autres fonctions physiologiques.

19. Les symptômes de la maladie coeliaque sont le résultat d'un syndrome de malabsorption et incluent la diarrhée, le météorisme, la perte de poids, l'anémie, les douleurs dans les os, la fatigue chronique, la faiblesse, les crampes musculaires et, chez les enfants, l'impossibilité de prendre du poids et le retard de croissance. La gravité de la maladie coeliaque est très variable selon les individus. Chez certains malades coeliaques les symptômes sont rares, et la maladie coeliaque latente et asymptomatique a été décrite en même temps que le risque de l'évolution de la maladie latente en maladie symptomatique si elle n'est pas diagnostiquée et traitée. Les symptômes se manifestent entre 24 et 72 heures après ingestion de l'aliment agresseur, parce que les lésions intestinales provoquées par le processus inflammatoire mettent du temps à apparaître. Les symptômes de la maladie coeliaque persistent généralement plusieurs jours, même en évitant l'aliment agresseur parce que l'organisme doit réparer la lésion intestinale avant de retrouver un fonctionnement normal. On n'a pas signalé de décès résultant directement de la phase aiguë de la maladie coeliaque. Toutefois, le risque de développer un lymphome malin est 50 à 100 fois plus élevé chez les malades atteints de la maladie coeliaque. Il faut peut-être éviter l'aliment agresseur pendant toute la vie afin de diminuer ce risque chronique.

20. La prévalence de la maladie coeliaque semble varier d'un pays à l'autre. Les différences proviennent peut être en partie de la méthode de diagnostic utilisée dans un pays particulier et de la probabilité de reconnaître une maladie coeliaque latente. La prévalence dans certains pays et régions d'Europe est proche de 1 sur 250 personnes, alors qu'aux Etats-Unis elle semble être de 1 sur 2 000 à 3 000 personnes. La maladie coeliaque est un caractère héréditaire qui se rencontre très fréquemment chez les populations européennes et leurs descendants dans d'autres pays. La maladie coeliaque est rare chez les populations asiatiques ou africaines.

21. Le traitement de la maladie coeliaque consiste à éviter totalement le blé, le seigle, l'orge et l'avoine et tous les produits fabriqués à partir de ces céréales. Le traitement avec un régime exempt de gluten se traduit par une nette amélioration de la muqueuse intestinale et de sa fonction d'absorption. Les personnes atteintes de la maladie coeliaque réagissent en principe à l'ingestion de quantités infimes de l'aliment agresseur, bien que la dose seuil n'ait pas été déterminée avec précision. Comme dans le cas des allergies alimentaires médiées par l'IgE, les céréales mises en cause dans la maladie coeliaque peuvent être "cachées" dans les aliments du fait du non étiquetage de l'origine de certains ingrédients, de l'absence de déclaration de certains ingrédients compte tenu de réglementations comme la règle des 25 pour cent, et de diverses erreurs involontaires faites par les fabricants de denrées alimentaires.

22. La maladie coeliaque doit également faire l'objet d'une attention particulière de la part des organismes réglementaires. Même si les symptômes sont moins graves, la morbidité de cette maladie est considérable à moins d'observer strictement un régime exempt de gluten.

C. TROUBLES DUS AU MÉTABOLISME DES ALIMENTS

23. Les troubles dus au métabolisme des aliments proviennent d'anomalies dans la capacité de métaboliser un composant alimentaire. Il s'agit souvent d'anomalies acquises génétiquement. Les meilleurs exemples de troubles alimentaires métaboliques liés à des aliments sont l'intolérance au lactose et le favisme.

24. L'intolérance au lactose provient d'une déficience héréditaire de l'enzyme, lactase ou ß-galactosidase, dans la muqueuse intestinale. De ce fait, le lactose, un dissacharide et le principal sucre dans le lait et les produits laitiers, ne peut être métabolisé en monosaccharides, galactose et glucose. Ces monosaccharides peuvent être absorbés par l'intestin et utilisés par l'organisme comme sources d'énergie, le lactose non digéré ne peut être absorbé par l'intestin grêle et passe dans le colon où des bactéries métabolisent le lactose en CO2 et en H2O. Les symptômes caractéristiques de l'intolérance au lactose sont notamment le météorisme, les flatulences, les crampes abdominales et la diarrhée spumeuse. L'intolérance au lactose affecte un grand nombre de personnes dans le monde. Elle est plus fréquente dans certains groupes ethniques (afro-américains, autochtones américains, hispaniques, asiatiques, certains groupes juifs, et arabes) affectant jusqu'à 60 à 90 pour cent des adultes les plus âgés dans ces groupes. La prévalence chez les Caucasiens se situe entre 6 et 12 pour cent environ. Les symptômes de l'intolérance au lactose se manifestent rarement à la naissance, mais peuvent commencer à se développer dès l'enfance, alors que le niveau d'activité des lactoses intestinaux commence à régresser. La maladie est très fréquente chez les individus plus âgés de la population. Le traitement habituel consiste à éviter les produits laitiers contenant du lactose. Toutefois, la plupart des individus affectés peuvent tolérer une certaine quantité de lactose dans leur régime alimentaire parce qu'il subsiste une certaine activité de la lactase intestinale. Souvent, ces individus peuvent ingérer plusieurs onces de lait sans apparition de symptômes. Aussi est-il plus facile d'élaborer des régimes pour les individus présentant une intolérance au lactose parce qu'il est peu probable que l'exposition à de très petites quantités de lactose résultant de pratiques d'étiquetage ou d'erreurs industrielles entraîne des réactions contraires. Les symptômes liés à l'intolérance au lactose étant bénins et la tolérance à de petites quantités de lactose chez les individus sensibles ayant été prouvée, il n'est pas nécessaire que les organismes réglementaires soient aussi vigilants en ce qui concerne ce type particulier d'intolérance alimentaire.

25. Le favisme est l'intolérance à la consommation de fèves ou à l'inhalation du pollen de la plante Vicia fava. Le favisme affecte les individus ayant une déficience héréditaire de l'érythrocite glucose-6-phosphate déshydrogénase (G6PDH). Celle-ci est une enzyme fondamentale pour la prévention des lésions d'oxydation des membranes érythrocytaires. Les fèves contiennent plusieurs oxydants naturels, notamment la vicine et la covicine, qui peuvent provoquer des lésions des membranes érythrocytaires chez les individus déficients en G6PDH. Il en résulte une anémie hémolytique aiguë accompagnée de pâleur, fatigue, dyspnée, nausée, douleurs abdominales et/ou dorsales, fièvres et frissons. Dans des cas rares, des symptômes plus graves apparaissent comme par exemple l'hémoglobinurie, la jaunisse et l'insuffisance rénale. Le temps de déclenchement est assez rapide, en général entre 5 et 24 heures après ingestion. Le favisme est une maladie auto-limitante à guérison rapide et spontanée à condition qu'il n'y ait pas d'autres expositions. La déficience en G6PDH est un caractère héréditaire que l'on rencontre très couramment dans les communautés orientales ou juives en Israël, chez les Sardes, les Grecs chypriotes, les Noirs Américains, et certaines populations africaines. Ce caractère est pratiquement inexistant dans les populations nord-européennes, chez les autochtones américains et les Esquimaux. On estime que la déficience en G6PDH affecte 100 millions d'individus dans le monde. Toutefois, un grand nombre d'entre eux ne sont jamais exposés aux fèves. Le favisme est très fréquent lorsque la plante Vicia fava est en fleur, donnant naissance à une forte concentration de pollen en suspension dans l'air et lorsque les fèves sont sur les marchés. Cependant, la consommation de fèves n'est pas courante dans de nombreuses parties du monde. La principale stratégie en ce qui concerne le traitement du favisme consiste à éviter les fèves. Les doses seuils des fèves chez les individus sensibles ne sont pas connues. Il n'est vraisemblablement pas nécessaire de prendre des mesures réglementaires en ce qui concerne le favisme, sauf dans les parties du monde où la fève se trouve couramment sur les marchés.

D. RÉACTIONS ANAPHYLACTOÏDES

26. Les réactions anaphylactoïdes sont dues à la présence de substances dans les aliments qui conduisent à la libération non immunologique de médiateurs chimiques provenant des mastocytes. Les médiateurs chimiques sont les mêmes que dans les allergies médiées par l'IgE mais le mécanisme ne fait pas intervenir les anticorps IgE. Il n'existe que des preuves circonstancielles à l'appui de l'implication de ce mécanisme dans les sensibilités alimentaires. On suppose que certaines substances chimiques d'origine alimentaire sont capables de déstabiliser les membranes des mastocytes et permettent la libération spontanée de l'histamine et d'autres médiateurs. Cependant, aucune de ces substances capables de libérer l'histamine n'a été identifiée.

E. RÉACTIONS IDIOSYNCRASIQUES

27. Les réactions idiosyncrasiques sont des réactions graves provoquées par des aliments chez certains individus selon un mécanisme que l'on ignore. La relation de cause à effet entre certains aliments et ingrédients et ces maladies idiosyncrasiques est souvent mal définie. De nombreux mécanismes pourraient intervenir mais aucun n'a été démontré. Dans quelques cas, le rôle des aliments dans un type spécifique de réaction idiosyncrasique est appuyé par une documentation détaillée.

28. L'asthme induit par les sulfites est un bon exemple d'une idiosyncrasie alimentaire bien établie. Le rôle des sulfites dans la manifestation de l'asthme dans une petite partie de la population asthmatique (estimée entre 1 et 2 pour cent de l'ensemble des asthmatiques) a été bien documenté par des essais cliniques en double aveugle avec placebo. Toutefois, le mécanisme de la maladie reste inconnu. La relation entre d'autres symptômes et l'ingestion de sulfites, bien qu'alléguée dans certains rapports, n'a pas été démontrée. Les sulfites sont des additifs alimentaires courants utilisés pour plusieurs fonctions techniques différentes. L'exposition aux sulfites peut intervenir par le biais de plusieurs aliments courants, notamment les vins, l'amidon de maïs, les fruits et légumes déshydratés, et beaucoup d'autres encore. Les individus sensibles au sulfite doivent éviter certaines denrées alimentaires et boissons contenant du sulfite, car la réaction peut être grave et même mortelle. Toutefois, les individus sensibles peuvent tolérer de faibles quantités de sulfites dans leur régime alimentaire, bien que le seuil en ce qui concerne les sulfites varie d'une personne à l'autre. Aux Etats-Unis et dans plusieurs autres pays, les organismes réglementaires ont rendu obligatoire l'étiquetage des sulfites lorsque les niveaux résiduels de SO2 dépassent 10 ppm. Cette stratégie d'étiquetage semble protéger le segment de la population sensible aux sulfites.

F. EMPOISONNEMENT À L'HISTAMINE

29. Il arrive que des intoxications de type allergique, principalement l'empoisonnement à l'histamine, ou encore empoisonnement aux scombridés, soient incluses dans les débats sur les allergies et sensibilités alimentaires. Cependant, l'empoisonnement à l'histamine n'est pas une réelle sensibilité alimentaire car elle peut affecter toutes les personnes. La confusion provient de ce que l'empoisonnement à l'histamine déclenche des symptômes de type allergique, ce qui ne devrait pas surprendre étant donné que l'histamine est l'un des principaux médiateurs des allergies alimentaires médiées par l'IgE, dans lesquelles l'histamine est libérée à partir des mastocytes in vivo. L'empoisonnement à l'histamine résulte de l'ingestion d'aliments contenant de fortes quantités d'histamine. Celui-ci n'étant pas une réelle sensibilité alimentaire, son examen ne sera pas poursuivi plus avant dans le présent document. Cependant, les organismes réglementaires se doivent de contrôler l'empoisonnement à l'histamine.

III. Recommandations de la FAO, de l'OMS, de l'OMC et des Gouvernements des États Membres

G. RAPPEL DES MESURES ADOPTÉES

30. Le Comité du Codex sur l'étiquetage des denrées alimentaires (CCFL) a examiné à plusieurs reprises les allergènes dans les aliments depuis qu'un document de travail sur l'examen des allergènes potentiels dans les aliments a été préparé en 1993 par la Norvège, en coopération avec la Finlande, l'Islande et la Suède (réf. CX/FL 93/5). Le CCFL, en collaboration avec la FAO, a organisé une Consultation technique FAO sur les allergies alimentaires à Rome en 1995. Il a été demandé notamment à cette consultation technique de la FAO de fournir une orientation pour l'élaboration de critères reposant sur la science afin de déterminer les aliments ou produits alimentaires qui devraient être portés sur une liste des aliments ou produits alimentaires dont la présence devrait toujours être déclarée dans la liste des ingrédients figurant sur une étiquette alimentaire, du fait de leurs propriétés allergènes. La Consultation a confirmé que la liste des aliments et ingrédients reconnus comme causant des allergies et des intolérances alimentaires, élaborée par le CCFL, était appropriée compte tenu de certaines modifications à apporter.

31. La liste révisée des aliments et ingrédients reconnus comme causant une hypersensibilité et qui doivent toujours être déclarés comme tels est la suivante:

32. Les débats se sont poursuivis au sein du CCFL dans les années qui ont suivi, mais la Commission du Codex Alimentarius a maintenant adopté cette liste comme texte définitif en juin 1999, étant entendu que les additions et/ou retraits futurs concernant cette liste seraient examinés par le CCFL compte tenu des avis fournis par le JECFA.

33. Par ailleurs, le CCFL a débattu de la règle des 25 pour cent et examiné s'il convenait de la remplacer par une règle des 5 pour cent. En juin 1999, la Commission du Codex Alimentarius a également adopté cette recommandation (soit 5 pour cent). En 1995, la Consultation technique de la FAO avait recommandé au CCFL de modifier la règle des 25 pour cent et de la réduire à 5 pour cent afin de mieux garantir aux consommateurs allergiques que les composants des aliments allergéniques seraient déclarés dans l'étiquetage des produits.

34. Au cours du débat au sein du CCFL, d'autres questions ont été soulevées nécessitant l'avis du Comité mixte FAO/OMS d'experts des additifs alimentaires (JECFA), comité qui formule des recommandations scientifiques à la Commission du Codex Alimentaire en ce qui concerne les additifs alimentaires et les ingrédients dans les aliments. En conséquence, l'OMS a réuni un groupe d'experts sur l'étiquetage des allergènes alimentaires à Genève, en février 1999, afin de fournir au JECFA les orientations nécessaires concernant certaines questions spécifiques liées aux allergies et intolérances alimentaires. En particulier, il a été demandé à ce groupe de fournir des apports sur les questions suivantes:

35. Le groupe d'experts a formulé plusieurs recommandations. En ce qui concerne les critères relatifs à l'inscription de nouvelles substances sur la liste Codex des aliments allergènes courants, le groupe d'experts a recommandé d'appliquer les critères suivants:

i) l'existence d'une relation crédible de cause à effet reposant sur des tests de provocation en double aveugle avec placebo qui sont positifs ou sur des rapports catégoriques de réactions ayant les caractéristiques usuelles des réactions d'allergie ou d'intolérance graves.

ii) constatation de réactions systémiques graves à la suite de l'exposition au produit alimentaire.

iii) le Groupe d'experts a reconnu que le critère idéal serait des données de prévalence chez les enfants et les adultes, reposant sur des études cliniques appropriées, c'est-à-dire des tests de provocation en double aveugle avec placebo effectués sur la population générale de plusieurs pays, mais il a noté qu'une telle information n'était disponible actuellement qu'en ce qui concerne 1) les nourrissons, 2) dans certains pays, et 3) pour quelques denrées. Ce type d'information est rarement disponible pour les adultes. De ce fait, le groupe d'experts est convenu que l'utilisation des données disponibles (par exemple, prévalence comparée de l'allergie alimentaire spécifique dans des groupes de personnes souffrant d'allergie dans plusieurs pays, appuyée idéalement par des tests de provocation en double aveugle avec placebo) était appropriée.

36. Le groupe d'experts a également reconnu que l'application de ces critères reposerait sur des avis autorisés. Il a donc estimé que la meilleure façon de fournir ces avis serait de constituer un organe qui, du fait de la diversité géographique des allergies alimentaires et des régimes alimentaires, représenterait différentes disciplines et régions dans le monde.

37. Le groupe d'experts a également examiné la liste adoptée par le CCFL qui contenait non seulement des aliments allergènes mais également leurs produits dérivés. Le Groupe d'experts s'est demandé si cette définition était trop large et incluait des produits qui ne sont pas allergènes parce qu'ils ne contiennent pas de quantités suffisantes de protéines allergènes pour déclencher une réaction. Toutefois, compte tenu des données disponibles, celui-ci a conclu qu'il était impossible de fixer une limite sur la quantité de protéines nécessaires pour déclencher une réaction allergique. Le groupe d'experts a formulé la recommandation suivante:

i) les produits d'aliments allergènes inscrits sur la liste du CCFL doivent toujours être étiquetés comme tels à moins qu'ils ne figurent dans une liste de produits exempts de la nécessité d'étiquetage de l'origine de l'aliment.

38. Les critères pour l'inscription d'un produit sur cette liste sont les suivants:

i) preuve qu'une étude clinique reposant sur des tests de provocation en double aveugle avec placebo a confirmé que le produit spécifique ne déclenche pas de réaction allergique dans un groupe de patients présentant une allergie clinique à l'aliment apparenté;

ii) spécifications concernant le produit et son processus de fabrication qui démontrent l'aptitude du processus à fournir en permanence un produit sans risque.

39. A la connaissance du Groupe d'experts, seuls deux produits peuvent remplir actuellement ces critères, à savoir les huiles d'arachide et de soja hautement raffinées. Le groupe a recommandé que ces deux produits soient examinés à la prochaine réunion du JECFA.

40. Le JECFA a examiné ces recommandations, y compris une évaluation du pouvoir allergisant des huiles d'arachide et de soja hautement raffinées, lors de sa réunion qui s'est tenue au cours de l'été 1999. Au moment de la rédaction du présent document, le rapport final de la réunion du JECFA n'avait pas encore été publié.

IV. Recommandations

41. La FAO, l'OMS, l'OMC et les gouvernements des États Membres doivent continuer à reconnaître l'importance des allergies et intolérances alimentaires pour la santé et le bien-être d'une proportion petite mais appréciable des consommateurs. Le processus de délibération auquel participent le CCFL, le JECFA, la Commission du Codex Alimentarius et divers groupes d'experts et consultations spécialisés doit se poursuivre lorsque cela est nécessaire afin de fournir aux gouvernements les mesures recommandées pour la protection du segment de la population souffrant d'allergies alimentaires. Il est évident que l'étiquetage est fondamental pour permettre aux individus présentant des allergies et intolérances alimentaires de suivre des régimes alimentaires de suppression qui soient sûrs et efficaces. Les organismes réglementaires doivent garantir que l'étiquetage est suffisant pour donner à ces individus les informations qu'ils recherchent et dont ils ont besoin.

42. A mon avis personnel, les recommandations formulées par la Commission du Codex Alimentarius et par le JECFA au cours de leurs réunions de 1999 sont raisonnables. J'inviterai les gouvernements des États Membres à prendre les mesures suivantes:

1) adopter la liste des aliments allergènes les plus courants adoptée par la Commission du Codex Alimentarius et modifier leurs règlements d'étiquetage afin de garantir que ces aliments allergènes et leurs produits dérivés soient toujours déclarés lorsqu'ils sont présents dans les aliments emballés.

2) exempter les huiles d'arachide et de soja hautement raffinées de ces dispositions d'étiquetage parce que ces deux produits ne contiennent pas de quantités suffisantes de protéines pour déclencher des réactions allergiques.

3) appuyer la décision de la Commission du Codex Alimentarius en modifiant la règle des 25 pour cent et la réduire à 5 pour cent et ensuite adopter cette nouvelle règle.

43. En ce qui concerne la FAO, l'OMS, l'OMC et les gouvernements des États Membres, je ferai les recommandations suivantes:

1) Étant donné que les questions touchant aux allergies et intolérances alimentaires nécessitent l'avis de personnes ayant une expérience en ce domaine, constituer un sous-comité ou un groupe d'experts sur les allergies et intolérances alimentaires afin de fournir au JECFA les orientations nécessaires.

2) Mettre en place un mécanisme semblable à celui recommandé par le groupe d'experts sur les allergènes alimentaires afin de fournir les orientations nécessaires relatives à l'inscription de nouveaux aliments ou ingrédients alimentaires spécifiques sur la liste Codex des aliments allergènes courants. Des arguments ont déjà été avancés en faveur de l'inscription des graines de sésame sur cette liste. Des avis autorisés sont nécessaires pour déterminer s'il existe des données suffisantes pour justifier de telles recommandations. Le groupe d'experts recommandé au point 1 ci-dessus pourrait fournir ces avis.

3) Mettre en place un mécanisme semblable à celui recommandé par le groupe d'experts sur les allergènes alimentaires afin de fournir les orientations relatives aux produits qui pourraient être exclus de l'étiquetage concernant l'origine. Il faut établir les critères relatifs à ces décisions. Les avis d'experts seront requis afin de déterminer s'il existe un fondement scientifique permettant une exclusion du critère d'étiquetage relatif aux "produits dérivés". Là encore, le groupe d'experts recommandé au point 1 ci-dessus pourrait fournir ces avis. Plusieurs ingrédients existants doivent être examinés aux fins d'exclusion, notamment l'huile d'arachide, l'huile de soja, le beurre, les matières grasses du beurre et l'huile de beurre (du lait), la lysozyme (des oeufs), la gélatine de poisson, diverses huiles de fruits à coque, et la chitine (des crustacés).

4) Exclure les huiles d'arachide et de soja hautement raffinées des dispositions d'étiquetage sur l'origine. Il existe déjà des données suffisantes pour appuyer cette recommandation.

5) Abolir la règle des 25 pour cent pour la remplacer par des règles d'étiquetage qui imposent la déclaration d'ingrédients ajoutés volontairement sauf en ce qui concerne plusieurs grandes catégories collectives comme par exemple les arômes, les épices, l'amidon, les huiles, etc. La règle des 5 pour cent qui a été adoptée n'est pas suffisante pour protéger les individus affectés d'allergies alimentaires, même si elle représente une amélioration par rapport à la règle des 25 pour cent. Même si les aliments et ingrédients de sources couramment allergènes (la liste Codex) sont toujours étiquetés, il existe plus de 160 autres aliments reconnus comme allergènes. Les allergies à ces aliments ne sont pas suffisamment courantes pour figurer sur la liste Codex, mais des consommateurs en plus petit nombre souhaitent éviter ces aliments du fait d'une sensibilisation allergique.

6) Le CCFL peut souhaiter formuler des recommandations en ce qui concerne l'utilisation de l'étiquetage de précaution. Plusieurs pays (par exemple, le Canada, le Royaume Uni) autorisent déjà l'étiquetage de précaution des aliments dont le processus de fabrication peut parfois occasionner la présence de résidus non déclarés d'aliments allergènes du fait de matériel utilisé à plusieurs fins, de pratiques de recyclage, etc. Ces pratiques de fabrication étant très répandues, l'utilisation d'étiquetage de précaution peut concerner de nombreux produits alimentaires emballés. Si ces pratiques sont autorisées, de nombreux aliments risquent d'être retirés des régimes d'individus souffrant d'allergies alimentaires. Certaines de ces restrictions sont peut être inutiles si l'aliment ne contient pas, dans la pratique, de résidus suffisants d'allergènes pour déclencher des réactions chez les consommateurs sensibles. De plus, de nombreuses formes de déclaration d'étiquetage de précaution ont fait leur apparition sur les emballages. On peut citer par exemple: "peut contenir", "peut contenir des quantités infimes de fruits à coque", "fabriqué sur le même matériel que", "fabriqué dans les mêmes installations que". Une plus grande uniformité dans ces déclarations peut éviter une certaine confusion chez les consommateurs. A l'évidence, il s'agit d'une nouvelle question pour le CCFL. Il faudrait réunir un groupe d'experts ou une consultation technique afin de formuler des recommandations au CCFL aux fins de délibérations ultérieures.

7) La FAO et l'OMS devraient envisager la création d'un centre de collaboration internationale sur les allergies et intolérances alimentaires. Ce centre pourrait accumuler et organiser des informations publiées sur les allergies et intolérances alimentaires. Le centre pourrait fournir des études faisant autorité qui seraient utiles au groupe d'experts recommandé au point 1) ci-dessus. Le centre pourrait servir de pôle de ressources aux divers gouvernements des États Membres recherchant des informations dont ils ont besoin sur des types spécifiques d'allergies alimentaires. Le programme de recherche et de ressources sur les allergies alimentaires de l'Université du Nebraska a déjà établi une vaste base de données informatiques sur la documentation scientifique et médicale existante sur les allergies et intolérances alimentaires.

V. Questions futures

44. L'entière question des allergies et intolérances alimentaires est relativement récente. Plusieurs des recommandations formulées plus haut doivent encore être pleinement mises en oeuvre par les gouvernements des États Membres bien que la FAO et l'OMS lui ait accordé une attention particulière ces dernières années. Il est manifeste que d'autres questions émergent encore, parmi lesquelles on a déjà déterminé l'étiquetage de précaution. Il n'apparaît pas encore clairement si la FAO et l'OMS doivent être impliqués dans la question de l'étiquetage de précaution mais le volume des échanges mondiaux d'aliments emballés et l'absence d'uniformité des déclarations d'étiquetage de précaution d'un pays à l'autre nécessite certainement d'envisager la participation de la FAO et de l'OMS dans ce domaine.

45. Une autre nouvelle question se rapporte aux aliments génétiquement modifiés. Ces derniers contiennent en général quelques nouvelles protéines par rapport aux aliments traditionnels dont ils étaient dérivés. Il est certainement possible que l'une ou plusieurs de ces nouvelles protéines soient ou deviennent des allergènes alimentaires. Cette éventualité a été largement admise et traitée dans le cadre de la Consultation d'experts FAO/OMS sur la biotechnologie et la salubrité des aliments qui s'est tenue en 1996. Toutefois, l'évaluation du pouvoir allergisant potentiel des aliments génétiquement modifiés continue d'être perfectionnée et examinée. Il est vraisemblable que la FAO et l'OMS devront à nouveau traiter cette question qui pourrait peut être constituer le thème unique d'une future consultation d'experts.