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Système d’exploitation agricole mixte pluvial


CARACTÉRISTIQUES DU SYSTÈME

Le système d’exploitation agricole mixte pluvial couvre près de 30 pour cent des terres de la région (voir encadré 5.11), la quasi-totalité de l’Inde centrale et du Sud ainsi qu’une petite zone au nord du Sri Lanka. Il n’existe aucun grand périmètre irrigué dans ce système; cependant, dans de nombreux cas, des surfaces relativement petites sont irriguées à l’aide de réservoirs, réduisant ainsi les risques liés à la sécheresse et permettant la culture de saison sèche. Ce système traditionnel de réservoir de complément s’est élargi au cours des dernières décennies grâce à l’utilisation de forages.

Encadré 5.11 Données de base: système d’exploitation agricole mixte pluvial

Population totale (m)

371

Population agricole (m)

226

Superficie totale (m/ha)

147

Zone agroécologique

sèche subhumide

Superficie cultivée (m/ha)

87

Superficie irriguée (m/ha)

14

Population bovine (m)

126

Cependant, les risques sont relativement élevés dans ce système d’exploitation agricole essentiellement pluvial, aussi l’introduction de nouvelles technologies y est-elle difficile. Les principales cultures sont le blé, l’orge, les cultures maraîchères et fourragères dans les parties les plus fraîches du nord; tandis que le maïs, le sorgho, le mil, les cultures maraîchères, le pois d’Angola, le haricot mungo, Vigna radiata (greengram) et l’arachide sont plus courants dans les parties sud de l’Inde au climat plus chaud. Des petites surfaces de soja, de colza, de piments, d’oignons et de sésame sont cultivées surtout comme cultures de rente. La double culture n’est possible qu’avec l’irrigation. Dans l’Inde du Sud et la zone sèche du Sri Lanka, où les exploitations sont plus petites, les agriculteurs préfèrent cultiver le riz sur les terres humides où l’irrigation est possible, ainsi que dans les fonds de vallées mal drainés pendant la saison humide. Les céréales mentionnées ci-dessus, les légumineuses et les oléagineux sont cultivées sur les parties hautes. Quelques arbres fruitiers comme le manguier sont cultivés dans les jardins domestiques. L’encadré 5.12 décrit un ménage représentatif de ce système.

L’élevage est très important dans ce système qui abrite le plus grand nombre de bovins, d’ovins et de caprins de la région. Il fournit habituellement la plus grande partie du revenu monétaire de la famille agricole, surtout grâce à la vente d’animaux jeunes ou adultes, la plupart de ces zones étant trop éloignées des centres urbains pour la production commerciale de lait. Cependant, au fur et à mesure de l’amélioration des infrastructures de certaines zones, la production laitière prend de l’importance.

La superficie totale couverte par ce système est plus grande que celle du système d’exploitation agricole riz-blé. Cependant, en raison du caractère pluvial de son agriculture, sa densité de population est beaucoup plus faible que celle du système riz-blé (à peine la moitié). Une grande partie de la population rurale du système d’exploitation agricole mixte pluvial vit dans une pauvreté chronique, aggravée par les sécheresses qui entraînent des périodes de grande pauvreté (voir encadré 5.13). L’agriculture est orientée vers la subsistance des familles; les infrastructures et les services de la plupart des zones éloignées des marchés, sont très peu développés. Les services de vulgarisation agricole de ces zones sont peu développés; les agriculteurs utilisent surtout des technologies traditionnelles axées vers la minimisation des risques. Le régime foncier est souvent un problème; les agriculteurs ne possèdent pas de titres de propriété suffisamment clairs pour pouvoir être utilisés comme garantie pour l’obtention d’un crédit officiel.

Encadré 5.12 Un ménage typique du système d’exploitation agricole mixte pluvial

Un foyer agricole pauvre représentatif de ce système mixte pluvial est composé de six membres, il cultive 3 ha de terre dans le Madhya Pradesh en Inde. Les cultures sont les suivantes: un hectare de sorgho (après la saison des pluies) avec un rendement de 1,3 tonne/ha; environ 0,5 ha de pois chiche avec un rendement de 0,85 tonne/ha; 0,2 ha de pois d’Angola avec un rendement de 0,5 tonne/ha; 0,3 ha d’arachide avec un rendement de 0,6 tonne/ha; 0,2 ha de colza avec un rendement de 0,7 tonne/ha. Le ménage est propriétaire de deux têtes de bétail, plusieurs chèvres et quelques volailles. Il a un revenu moyen juste en dessous du seuil de pauvreté internationale et est très exposé aux pertes de récolte.


Encadré 5.13 Vulnérabilité saisonnière

La vulnérabilité saisonnière est un aspect critique des moyens de subsistance sur le plateau du Deccan, elle est parfois considérée comme un moyen de mesurer la pauvreté. Les pertes de récolte sont plus fréquentes que dans n’importe quelle autre zone de culture importante de l’Asie du Sud, et les mécanismes traditionnels pour assurer la survie se sont affaiblis. De nouvelles formes de réduction des risques pour les petits agriculteurs, telles que l’assurance risque sécheresse, semblent intéressantes.

TENDANCES ET PROBLÈMES DU SYSTÈME MIXTE PLUVIAL

Malgré l’accès limité aux marchés, la gamme des activités a évolué assez rapidement. L’existence d’un marché a entraîné le développement de la production maraîchère et laitière là où l’irrigation à partir de réservoirs était possible. L’attribution de subventions[159] importantes a entraîné un boom de la production d’oléagineux, leur croissance devrait continuer. L’accroissement de la demande agricole et urbaine en eau devrait entraîner une pénurie. La dégradation des terres, y compris le déclin de fertilité des sols, devrait s’accentuer. La production vivrière va s’accroître et l’utilisation de sorghos et de mils hybrides devrait s’étendre. Le soja et le haricot mungo pourront remplacer, dans une certaine mesure, les légumineuses traditionnelles. L’accroissement modeste de l’utilisation des intrants externes et de la mécanisation devrait entraîner la commercialisation d’une partie de la production. La productivité de l’élevage devrait augmenter grâce à l’alimentation à l’étable et à un meilleur accès aux marchés. Bien que la sécurité alimentaire des ménages s’améliore, les déficits alimentaires subsisteront en année de sécheresse.

Les infrastructures (transports et services sociaux) devraient s’améliorer. Les agences gouvernementales devraient décentraliser partiellement leurs activités et le rôle des femmes dans les prises de décision locales devrait être renforcé dans certains pays. Le rôle du secteur public dans la recherche et la vulgarisation est appelé à diminuer, laissant ainsi plus de place aux organisations d’agriculteurs dans la fourniture des services agricoles. L’économie rurale hors exploitation devrait connaître une croissance limitée.

PRIORITÉS DU SYSTÈME MIXTE PLUVIAL

La mise en œuvre des stratégies suivantes, citées par ordre d’importance, pourraient permettre de réduire la pauvreté des ménages de ce système: diversification puis intensification, accroissement des revenu hors exploitation et sortie de l’agriculture (tous d’égale importance) et finalement augmentation de la taille des exploitations.

Peu de choses peuvent être faites pour réduire la pauvreté dans le système d’exploitation agricole mixte pluvial sans améliorer d’abord la sécurité d’accès à l’eau des ménages agricoles, qui non seulement est un préalable à l’intensification et la diversification, mais améliore aussi considérablement leur qualité de vie. Dans le passé, cela a consisté à améliorer la disponibilité en eau pour la consommation humaine et pour l’irrigation en réparant les réservoirs existants, en conduisant des travaux de diversion des cours d’eau, en augmentant la collecte de l’eau et en acquérant des pompes et des forages. Pour être durables, ces améliorations nécessitent une mobilisation sociale et une planification participative.

Cependant, à l’avenir, l’accent doit être mis sur la maximisation de la conservation de l’humidité des sols pour accroître la production. L’agriculture de conservation réduira aussi l’impact des risques climatiques. Cette approche comprend des mesures telles que les pratiques culturales en temps voulu, le travail minimum du sol, le semis précoce avec des variétés à cycle court, le mulching et, lorsque le coût de la main d’œuvre est suffisamment bas pendant la saison sèche et que la nature du sol le permet, le buttage et billonnage cloisonné. Les nouvelles technologies sont dans ce domaine, au mieux, adoptées lentement. Des méthodes plus sophistiquées, comme l’utilisation de films plastiques pour la conservation de l’eau, sont complètement absentes. La culture d’espèces fourragères et l’alimentation à l’étable permettent d’améliorer la production animale. Cette pratique peut entraîner l’augmentation de la fertilité des sols, l’augmentation des rendements des cultures pluviales et l’augmentation des sousproduits de récoltes pour l’alimentation du bétail. L’encadré 5.14 souligne les possibilités de conservation de l’eau qui sont ensuite discutées dans l’étude de cas qui l’accompagne.

La survie du système agricole dépendant de la pluviométrie et probablement de l’eau souterraine, il est nécessaire que la couverture forestière des parties supérieures du bassin versant soit suffisante pour réduire le ruissellement et favoriser l’infiltration et la percolation qui peuvent recharger les nappes phréatiques. Les améliorations du système requièrent une intervention pluridisciplinaire: le génie civil pour l’irrigation, la foresterie, la production de fourrage, l’élevage et l’horticulture, et, bien sûr, les agronomes des cultures traditionnelles. L’éloignement des marchés a toujours freiné l’introduction de l’horticulture et des arbres fruitiers. Cette difficulté peut être contournée dans les zones où il existe des avantages comparatifs pour ces cultures, à la condition que le secteur privé soit prêt à y installer des industries de transformation.

Encadré 5.14 Conservation de l’eau[160]

Dans les zones semi-arides et subhumides, la conservation de l’eau pourrait permettre à des millions de personnes d’accéder à l’eau, à la nourriture et à la sécurité alimentaire. Des exemples de réussite montrent comment une gestion améliorée de l’eau augmente la disponibilité en eau domestique et les revenus des cultures. Ces améliorations permettent à leur tour l’augmentation du nombre d’animaux et finalement la production de cultures arboricoles. Ce processus permet aussi l’amélioration des ressources naturelles et des bassins versants; le revenu des villages peut doubler. L’expérience montre que l’organisation de la communauté est un préalable essentiel au succès de la conservation de l’eau.

Certaines stations de recherche affirment avoir développé des paquets de pratiques convenant au système d’exploitation agricole pluvial. En général, l’adoption de ces recommandations est d’une lenteur décevante, qui s’explique par l’aversion des agriculteurs pour le risque, ou par le manque de main-d’œuvre ou d’autres ressources nécessaires à la mise en œuvre de ces améliorations. Pour réussir, les programmes ou les projets d’assistance ont besoin d’avoir un objectif plus large que la simple mise en œuvre de mesures agricoles. La fourniture d’eau potable est généralement la principale priorité des besoins de ces zones. D’autres services sociaux, comme les dispensaires et les écoles primaires, manquent souvent aussi.

Le développement des marchés est moins important que dans le système d’exploitation agricole riz-blé. L’accès des ménages pauvres à la terre, à l’eau et aux ressources forestières est un problème critique. De même, l’accès aux sources d’information est important pour l’intensification et la diversification de ces systèmes. Inversement, le développement des systèmes de diffusion d’information sera important et devrait accélérer la diversification d’une partie du système vers des activités de haute valeur, lorsque les besoins alimentaires auront été satisfaits.


[159] Gulati et Kelley, 1999.
[160] Extrait de l’étude de cas n°4, annexe 1.

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