La biodiversité dans des peupleraies picardes, en France Des inventaires réalisés dans des plantations de peupliers ont révélé une diversité surprenante de carabes, d’oiseaux et de végétation. A. Berthelot, S. Augustin, J. Godin et G. Decocq Alain Berthelot est ingénieur de recherche chez AFOCEL, Station Nord-Est, Charrey-sur-Saône (France).
Des inventaires de biodiversité, réalisés en 2003 dans 16 peupleraies d’âges divers situées dans différentes localités de la Picardie (nord de la France), ont révélé l’existence d’un nombre impressionnant d’espèces. La diversité des espèces était élevée dans les trois composantes analysées, à savoir les carabes, les oiseaux et la végétation. L’inventaire a révélé la présence de 71 espèces de carabes sous les peupliers, en particulier sur les sites alluviaux. Leurs populations semblaient structurées en fonction de l’humidité du milieu, du couvert végétal et, dans une moindre mesure, du pH du sol. Certaines peupleraies ont été comparées à d’autres milieux voisins, et il en résulte que la richesse spécifique des peupleraies est supérieure à celle des forêts feuillues, et équivalente à celle des champs de céréales. L’indice de Shannon (abondance et uniformité des espèces) et l’indice d’équitabilité (distribution des espèces) étaient plus élevés dans les peupleraies et dans les forêts feuillues. Dans les champs de céréales, les populations de carabes étaient inégalement réparties. Les peupleraies semblaient capables d’accueillir à la fois des espèces des milieux ouverts et des espèces plus forestières dans des proportions à peu près équilibrées (tableau 1). L’étude a permis d’identifier 45 espèces d’oiseaux. En ce qui concerne ces communautés d’oiseaux, les peuplements de peupliers situés sur des sites alluviaux avaient une richesse et une diversité spécifiques plus élevées que les peupleraies situées sur des plateaux. La richesse et la diversité spécifiques diminuaient avec l’âge des plantations et la densité du couvert (tableau 2). L’avifaune était principalement constituée d’espèces universellement répandues dans les milieux de forêts denses (figure 1). Les espèces des milieux de forêts ouvertes se rencontraient plus fréquemment dans les jeunes peupleraies sans sous-étage. Il ne semblait pas y avoir d’avifaune spécifique aux peupleraies, hormis Oriolus oriolus, dont la présence a fréquemment été observée. Au total, 198 espèces herbacées ont été dénombrées. Malgré l’homogénéité de l’étage dominant, les communautés végétales étaient diversifiées, probablement à cause de la variété des sites, des sols et de la végétation précédente. La richesse en espèces herbacées était plus élevée dans les jeunes peuplements de peupliers et plus faible dans les peuplements adultes, en particulier sur les plateaux (figure 2). La grande diversité des espèces pourrait être due aux conditions favorables des sites alluviaux sur lesquels les peupliers sont cultivés, notamment à la disponibilité d’eau et de nutriments. Les opérations d’entretien (discage, fauchage) semblaient renforcer la diversité des espèces, mais réduire la cohésion naturelle des communautés végétales, en permettant la présence de certaines espèces annuelles qui auraient été éliminées naturellement par la concurrence. Les augmentations des ressources disponibles (lumière, eau, azote) étaient bénéfiques non seulement pour les peupliers cultivés, mais aussi parfois pour les espèces héliophiles qui concurrençaient fortement d’autres espèces herbacées (par exemple Rubus spp. sur les plateaux). En résumé, la richesse en espèces des peupleraies picardes varie selon les sites, mais elle est dans l’ensemble élevée pour les trois composantes examinées. L’âge des peuplements semble avoir une influence sur la richesse spécifique des carabes et de la végétation (mais être sans effet sur celle des oiseaux (figure 3); elle tend à être plus élevée dans les jeunes peuplements et plus faible dans les peuplements adultes, mais elle se remet à augmenter si les peupliers ne sont pas exploités.
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