Previous PageTable Of ContentsNext Page


3.2.14 République démocratique du Congo

LA GESTION DES FORETS TROPICALES SECONDAIRES EN AFRIQUE:

Réalité et perspectives

Rapport national de la République démocratique du Congo

Ecrit par
Kanu Mbizi Léon
Direction de la gestion forestière; Ministère de l’environnement
Av. Papa Ileo n° 15; Commune de la Gombé
B.P. 12 348 Kin. 1; Kinshasa
République démocratique du Congo
Tel. 00(243) 98 231 555

POUR

L’ATELIER FAO/EC LNV/GTZ SUR

LA GESTION DES FORETS TROPICALES SECONDAIRES EN AFRIQUE:

Réalité et perspectives

En collaboration avec l’UICN, ICRAF et CIFOR
Douala, Cameroun, 17 – 21 novembre 2003

RESUME

Le présent document fait partie des rapports nationaux écrits dans la perspective de l’atelier sur la gestion des forêts secondaires tropicales en Afrique subsaharienne francophone (Douala, Cameroun, 17-21 novembre 2003). Il donne un aperçu sur les forêts secondaires en République démocratique du Congo (RDC).

1. Dans ce pays, les forêts secondaires occupent des surfaces de territoire de plus en plus vastes. Si rien ne vient freiner l’effet conjugué de la croissance démographique et de la concentration de la population sur une partie du territoire, on peut prédire que les forêts secondaires couvriront plus de 15 millions d’ha en 2010.

2. Les forêts secondaires sont distinguées d’après leur âge et leur composition spécifique : adventice, jachère herbeuse, jachère préforestière, forêt secondaire jeune et forêt secondaire adulte. Leur évolution – du stade d’adventice à celui de forêt secondaire adulte – se traduit par une diminution progressive d'espèces à très large distribution (cosmopolites, pantropicales, paléotropicales et afro-américaines) et une augmentation d’espèces guinéo-congolaises. Ainsi la flore congolaise rétablit son originalité après avoir été perturbée.

3. Ces forêts attirent de nombreux intervenants qui poursuivent deux objectifs : (i) jouir des biens tangibles et intangibles de ces forêts et (ii) assurer la pérennité de celles-ci.

4. Bien qu’elles contribuent de façon considérable au bien-être des Congolais, les forêts secondaires ne sont pas soumises à un mode de gestion spécifique. S’appliquent à ces forêts, les textes qui régissent la gestion des forêts primaires : entre autres, le Code forestier du 29 août 2002 et la loi foncière n° 73/021 du 20 juillet 1973. Mais l’attention est portée sur les ressources des réserves forestières, celles des parcs nationaux et sur les espèces commercialisables ; la pauvreté, la croissance démographique ou les conflits armés induisent l’exploitation irrationnelle des forêts secondaires.

5. Ces agressions et le souci d’assurer une meilleure gestion des forêts secondaires ont conduit à la réalisation de deux expériences : l’enrichissement des forêts secondaires des réserves forestières en limba (Terminalia superba) et le traitement sylvicole des forêts secondaires des environs de Kinshasa, de la réserve de la biosphère de la Luki (Mayombe) et des forêts denses de la Cuvette centrale.

6. En ce qui concerne le cadre institutionnel, les forêts secondaires du domaine forestier permanent sont gérées par le Ministère de l’Environnement, Conservation de la Nature, Eaux et Forêts et les autres, par les chefs de villages et/ou les titulaires de titres fonciers.

7. Les forêts secondaires sont finalement un milieu où se côtoient des acteurs aux intérêts parfois divergents : administration forestière, exploitants forestiers, chefs traditionnels, populations, etc. Les modes de gestion appropriés de ces écosystèmes seraient par conséquent ceux qui intègrent les intérêts de tous les acteurs.

INTRODUCTION

Un nouvel état d’esprit apparaît aujourd’hui, favorable à une gestion durable des forêts secondaires. Il y a eu pour ce regain d’intérêt l’apport financier et technique des gouvernements comme ceux des Pays-Bas et d’Allemagne, des organisations internationales comme la FAO et le CIFOR. Le dialogue sur les apports des forêts secondaires aux sociétés humaines commencé ainsi en Amérique Latine et en Asie se poursuit en Afrique (Douala, Cameroun, du 17 au 21 novembre 2003).

Le dialogue de Douala est consacré aux forêts secondaires tropicales d’Afrique francophone ; il se propose d’aboutir à une synthèse de la situation actuelle de ces forêts et à des perspectives de leur contribution à un développement durable.

Pour faciliter ce dialogue, chaque pays a été invité à produire un rapport national qui sera exploité dans la préparation des synthèses régionales sur la gestion des forêts secondaires.

Cependant les données sur ces forêts sont rares. Ce rapport rassemble les informations relatives à la gestion des forêts secondaires, mais certaines d’entre elles sont liées aussi à la gestion des forêts primaires.

Conformément aux termes de référence formulés par les organisateurs de l’atelier de Douala, le présent rapport national est structuré en six parties. On présentera d’abord le contexte dans lequel les forêts secondaires sont gérées. On examinera ensuite les caractéristiques de ces forêts ainsi que leur importance socioéconomique et écologique. Dans les trois dernières parties, on évoquera successivement les connaissances et les expériences effectives, les pratiques courantes, les politiques et les questions institutionnelles en matière de gestion des forêts secondaires. En se fondant sur les leçons tirées de l’exploitation et de la conservation des forêts secondaires en RDC, on conclura ce rapport en présentant quelques recommandations.

1. SITUATION SOCIOECONOMIQUE GENERALE DE LA FORESTERIE ET DE L'UTILISATION DES TERRES

La RDC est dotée d’abondantes ressources forestières : 135,207 millions d’ha de forêts, 59,6 % des forêts d’Afrique centrale et 21% des forêts d’Afrique, qui renferment une grande variété de produits : feuilles, écorces, fruits, plantes médicinales, etc.

En milieu rural, ces forêts fournissent le tiers environ des revenus extra agricoles. Elles sont responsables du développement de l'habitat, de l'artisanat et de la production d’environ 85% de l’énergie domestique - 46 millions de mètres cubes de bois énergie ou 12 millions de tonnes équivalent pétrole en 1999.

En 2000, la part du secteur forestier dans la constitution du PIB du secteur agricole était estimée à 22%; celle de ce dernier secteur au PIB, à 55%.

Malgré ses immenses ressources naturelles, la RDC est pauvre. De l'ordre de 200 $US par habitant en 1990, le revenu par tête est tombé à 90 $US en 1999.

Un facteur majeur figure dans les études sur la foresterie en RDC, tant on le considère comme déterminant la perte des ressources forestières : la répartition géographique inégale de la population. Pourtant le pays est sous peuplé, 22 habitants au kilomètre carré en moyenne. Mais, actuellement, environ 47% de la population est concentrée sur 10% de la superficie du pays, ce qui induit le défrichement des forêts primaires. Compte tenu notamment de l’urbanisation et des conflits armés à l’intérieur du pays, cette dynamique s’accentue. Si rien ne vient la freiner (la RDC a actuellement 47% de sa population sur 10% du territoire et en aura 50% sur la même superficie dans 10), on peut prédire que les forêts secondaires couvriront plus de 15 millions d’ha dans les années à venir. Les milieux écologiques menacés sont les forêts de montagne de l'est, les forêts du Mayombe (y compris la mangrove), les savanes boisées du nord et du sud et les forêts claires du sud.

La demande en bois de feu, l'agriculture itinérante sur brûlis, l'urbanisation, l'installation des infrastructures de développement, l'exploitation du bois d'œuvre et d'industrie ainsi que l'exploitation minière en zones forestières sont parmi les causes de la dégradation des forêts. S’y ajoute, dans certains cas, la récolte des PFNL (notamment le rotin).

2. CARACTERISTIQUES ET ETENDUE DES FORETS SECONDAIRES

La superficie des forêts secondaires est estimée à 12.167.000 hectares (9% des forêts du pays).57On distingue cinq types de forêts secondaires : les forêts secondaires après exploitation, les forêts secondaires dans des jachères laissées par l’agriculture itinérante, les forêts secondaires remises en état, les forêts secondaires après incendie et les forêts secondaires après abandon d'autres utilisations des terres (par exemple, villages, camps d’habitation). Ces forêts sont généralement situées dans les zones de fortes densités de population, non loin des forêts climaciques, des écotones forêts/savanes et des terrains dégradés mis en défens.

D’une manière générale, le processus de la reconstitution forestière se réalise en plusieurs étapes. Le nombre de celles-ci est fonction du niveau de dégradation du sol, du climat et de la technique culturale. Les principaux stades évolutifs sont : stades d’adventices, de jachère herbeuse, de friches et jachères préforestières (qui succèdent à celui d’adventices lorsque le sol n’est pas épuisé et que la durée du champ n’a pas été longue), de forêt secondaire jeune, de forêt secondaire vieille et de forêt substituée (climax).

Le premier stade, adventices, se caractérise par une flore proche de celle des milieux rudéraux, une faible diversité spécifique et par la présence dominante des espèces herbeuses annuelles ou biannuelles.

Le deuxième stade, jachère herbeuse, ne succède au stade précédent que dans le cas d’une longue période d’exploitation ayant provoqué l’épuisement du sol. Il se caractérise par l’abondance d’herbes vivaces à rhizomes ou à racines fasciculées pouvant devenir permanentes.

Si la diversité spécifique est faible au stade d’adventices, elle est grande au stade de jachère préforestière et s’accroît avec l’âge de la jachère, la plus grande diversité biologique étant au stade de forêt secondaire vieille.

La forêt secondaire jeune est constituée d'un étage arborescent généralement dense mais irrégulier sur le plan vertical ; le dôme varie de 15 à 25 mètres et le sous-bois est souvent très dense. Le diamètre des essences se situe entre 20 et 50 centimètres, c'est dire qu'on rencontre rarement des tiges atteignant le diamètre d'exploitabilité.

Ce peuplement comprend un petit nombre d'espèces héliophiles à croissance rapide ; celles-ci sont souvent grégaires et ne se régénèrent pas dans les couches inférieures, car elles n'y trouvent pas le plein éclairement. L’étage sous-jacent est composé d'héliophytes facultatifs qui percent le dôme et constituent l'étage arborescent de la forêt adulte. La biomasse augmente lentement. Les principales essences caractéristiques de la forêt secondaire jeune sont données au tableau 1.

Tableau No1 : Principales essences caractéristiques de la forêt secondaire jeune

Essences

Essences

- Allanbackia floribunda

- Harungana madagascarensis

- Allophylus africanus

- Croton sylvaticus

- Barteria fistulosa

- Croton mubango

- Bridelia atroviridis

- Croton haumanianus

- Canthium addonii

- Albizia zygia

- Canthium arnoldiana

- Albizia adianthifolia

- Croton haumonianus

- Hymonocardia ulmoides

- Cecropia leucocoma

- Markhamia tomentosa

- Margaritaria (Phyllantus) discoideas

- Buchneroendron speciosum

- Macaranga monandra

- Millettia drastica

- Maracanga spinosa

- Dracaena nitens

- Milletia eetveldeana

- Anthonotha macrophylla

- Myrianthus arboreus

- Lindackeria dentata

- Musanga cecropioides

- Elais guineensis

La forêt secondaire adulte regroupe un ensemble de peuplements qui succèdent à la forêt secondaire jeune et précèdent la forêt primaire. Elle est composée d'héliophytes tolérants à croissance moyennement rapide et à feuillage caducifolié.

La hauteur d’une forêt secondaire peut atteindre 35 mètres, l'étage arborescent supérieur formant un dôme inégal et d'apparence enchevêtrée. La lumière pénètre facilement dans le sous-bois et favorise souvent la prolifération des lianes et de grandes monocotylées. Ici, le volume à l'hectare des essences de bois d'œuvre de qualité supérieure est important. Les principales essences caractéristiques de la forêt secondaire adulte sont données au tableau 2. Pendant la régénération de la forêt, les espèces à très large distribution (cosmopolites, pantropicales, paléotropicales et afro-américaines) diminuent de façon progressive ; elles sont remplacées par des espèces guinéo-congolaises. La flore congolaise rétablit ainsi son originalité après avoir été altérée.

3. IMPORTANCE SOCIOECONOMIQUE ET ECOLOGIQUE DE FORETS SECONDAIRES

Les forêts secondaires de la RDC attirent de nombreux acteurs. Il s’agit notamment des populations riveraines, de l’administration forestière, des exploitants forestiers, des sociétés agro-industrielles, des ONG nationales et internationales et des organismes de recherche. Ils mènent des activités très variées. Les populations riveraines s’adonnent principalement à l’agriculture, la chasse, la collecte du bois de feu et la récolte des produits forestiers non ligneux. L’administration forestière planifie, alloue, suit et contrôle l’exploitation des ressources forestières. Elle intervient également dans la reconstitution des forêts secondaires et l’amélioration de la connaissance de celles-ci. Les exploitants forestiers récoltent du bois d’œuvre et, dans les villages, les revenus découlant de cette activité contribuent à réduire la pauvreté. Les sociétés agro-industrielles développent des palmeraies, ce qui se traduit par la réduction de la superficie des forêts. Les travaux d’aménagement sont précédés entre autres par des opérations de mensurations périodiques dans des parcelles échantillons, des inventaires multiressources et des traitements sylvicoles. Les difficultés financières actuelles ralentissent le développement de ces recherches.

Tableau No 2 : Principales essences caractéristiques de la forêt secondaire adulte

Essences

Essences

- Alstonia bonnei

- Lannea welwitschii

- Antrocaryon nannani

- Megaphrynium macrostachyun

- Canarium schweinfurtii

- Triplochiton scleroxylon

- Ceiba pentandra

- Pentaclethra macrophylla

- Milicia (Chlorophora) excelsa

- Petersianthus macrocarpus

- Dacrydes spp

- Pycnathus angolensis

- Fagara macrophylla

- Renealmia africana

- Holoptelia grandis

- Uapaca guineensis

- Khaya anthotheca

- Xylopia aethiopa

- Ricinodendron heudelotii

- Xylopia hypotamphra

- Tabernaemontana crassa

- Petersianthus macrocarpus

-Celtis gomphophylla

- Funtumia elastica

- Celtis adolphi frederichii

- Funtumia latifolia

4. CONNAISSANCE ET EXPERIENCES EFFECTIVES EN MATIERE DE GESTION DES FORETS SECONDAIRES

Les forêts secondaires sont mal connues. Les informations disponibles proviennent des expériences d’enrichissement de ces forêts en limba et en essences à croissance rapide ; elles découlent également des études écologiques menées de 1978 à 1985 avec l’assistance technique de la coopération canadienne : inventaires de reconnaissance, description des peuplements, inventaires totaux de certains blocs de forêts, identification des essences avec constitution d’herbiers, observations phénologiques, études sylvicoles, etc. En 1978 par exemple, 250 parcelles échantillons permanentes avaient été établies dans la Cuvette centrale afin de suivre la dynamique des peuplements forestiers naturels (primaires et secondaires).

En outre, à l’Université de Kisangani, le département d’écologie et conservation de la nature a mené de nombreuses recherches qui ont permis la création des réserves de reconstitution forestière à partir des jachères forestières et le développement de l’agroforesterie par l’enrichissement des jachères à l’aide de légumineuses plantées en couloir et alternant avec les cultures de manioc et de maïs. Il a procédé également à l’inventaire de la flore et de la faune mammalienne dans les jachères et forêts secondaires et amélioré des plantes cultivées à partir des tissus méristématiques.

La première expérience en matière de gestion des forêts secondaires remonte aux années 1940. Il s’agit des essais d’enrichissement des forêts secondaires des réserves forestières notamment en limba (Terminalia superba). Cette expérience a été menée suivant deux méthodes : la méthode des layons et la méthode sylvobananière, une variante de la méthode sylvoagricole.

Si, selon la première méthode, les limba et/ou les autres espèces à croissance rapide sont plantés sur des layons parallèles percés dans la forêt secondaire, ces arbres, selon la deuxième, sont cultivés dans un champ de bananiers. On a constaté que la deuxième méthode est plus avantageuse que la première, car le sylviculteur bénéficie des soins apportés à la culture des bananiers et le propriétaire du champ tire profit de la présence des arbres.

Depuis 1940, la méthode sylvoagricole est utilisée en RDC, particulièrement dans les réserves forestières du Mayombe, tant on considère qu’elle favorise la participation de différents acteurs (l’Etat, les populations locales, le secteur privé et les ONG) à la gestion des forêts secondaires. Dans le cadre de cette méthode, les préoccupations sur l’avenir des forêts secondaires, dans un contexte où la demande en terres agricoles est forte en croissance, priment sur les conflits d’intérêt entre par exemple les agriculteurs et les conservateurs des ressources forestières.

Toutefois, en dépit des avantages de cette méthode, l’administration forestière éprouve, du fait de la pression humaine, des difficultés quant à faire appliquer les règles d’une gestion rationnelle des forêts secondaires incluses dans les réserves forestières, règles pourtant connues depuis l’époque coloniale.

Au-delà, de 1979 à 1985, le SPIAF a suivi le développement des forêts périurbaines de Kinshasa, la réserve de la biosphère de la Luki (Mayombe) et les forêts denses de la Cuvette centrale dans le cadre d’un projet d’aménagement de ces sites. Quelques techniques sylvicoles ont été expérimentées sur des forêts secondaires jeunes et adultes.

De cette expérience, il ressort que les forêts secondaires jeunes traitées en taillis simple suivi d’une sélection de rejets des souches peuvent produire entre 7 et 10 m3/ha/an de bois sur six ans. Quant à l’accroissement annuel, il a varié de 11 à 14 m3/ha/an sur trois ans. En traitant les forêts secondaires adultes selon la même méthode, mais en plaçant les rejets des souches sous futaie, on obtient une récolte de 6 à 8 m3/ha/an.

Bien qu’elle ait été suspendue à cause des conflits sociopolitiques que connaît le pays, cette expérience devrait se poursuivre afin de permettre aux exploitants forestiers de comprendre la sylviculture des forêts secondaires et d’aborder le problème de leur aménagement ainsi que de leur rendement dans des zones de fortes densités de population.

5. PRATIQUES COURANTES DE GESTION DES FORETS SECONDAIRES

Les forêts secondaires qui font l’objet d’une exploitation de bois d’oeuvre sont gérées conformément au régime forestier. Parce que l’application du nouveau code forestier commence, nous évoquerons les dispositions de l’ancien régime forestier.

Conformément à l’ancien régime forestier, l’allocation d’une concession forestière passe par trois étapes : l’autorisation de prospection, la lettre d’intention et la garantie d’approvisionnement. La superficie maximale d’une concession que le Ministère ayant les forêts dans ses attributions peut octroyer à un exploitant forestier est de 250.000 hectares. Pour une superficie supérieure à celle-là, la demande est soumise à l’examen du Gouvernement.

L’autorisation de prospection forestière est un arrêté ministériel qui accorde au promoteur d’un projet d’exploitation forestière l’autorisation de procéder, à ses frais et par le biais du SPIAF, à un inventaire forestier d’allocation. Cet inventaire fournit des renseignements généraux pour la formulation d’un plan de mise en valeur et d’utilisation de la concession forestière sollicitée.

L’autorisation de prospection forestière a une période de validité d’un an, au cours de laquelle le requérant est tenu de réaliser l’inventaire d’allocation et de s’abstenir d’entreprendre toute activité d’exploitation forestière. Cet arrêté ne peut être signé qu’au vu des avis de vacance relatifs à la concession sollicitée, émis par les autorités provinciales.

La lettre d’intention est un contrat signé entre l’exploitant et l’Etat congolais représenté par le Ministre ayant les forêts dans ses attributions. La lettre d’intention n’est accordée qu’à l’exploitant qui a réalisé la première étape relative à l’autorisation de prospection forestière. Sa validité est de trois ans au cours desquels l’exploitant est obligé de réaliser au moins 50% de son projet d’investissement – implantation d’une usine de transformation à l’intérieur du territoire national.

La garantie d’approvisionnement, d’une validité de 25 ans renouvelable, n’est en principe octroyée qu’à une personne physique ou morale ayant rempli les conditions de l’étape précédente ou possédant une industrie installée ayant les capacités requises par rapport aux potentialités forestières de la concession sollicitée. Son détenteur est autorisé à procéder à l’exploitation des permis de coupe de bois qui lui sont accordés chaque année.

En ce qui concerne les forêts secondaires situées dans les aires protégées, le droit d’usage est garanti. Il porte notamment sur la récolte du bois mort, du bois de service, de la litière du sous-bois et des produits forestiers non ligneux.

Les forêts secondaires situées à l’extérieur des aires protégées sont d’accès quasi libre. Les populations y prélèvent une grande variété de produits pour des utilisations diverses (culinaires, médicinales, ornementales, etc.). Raison pour laquelle ces forêts sont surexploitées et certaines d’entre elles, dégradées ou menacées de disparition.

6. POLITIQUES ET QUESTIONS INSTITUTIONNELLES RELATIVES A LA GESTION DES FORETS SECONDAIRES

6.1 Cadre légal

Du 11 avril 1949 à nos jours, deux textes fondamentaux ont régi la gestion des forêts en RDC : le décret du 11 avril 1949 portant régime forestier et la foncière nº 73/021 du 20 juillet 1973.

Les textes législatifs antérieurs au 29 août 2002 sont ambigus. Par exemple, la loi « Bakajika » reconnaît à l’Etat la plénitude de ses droits fonciers sur toute l’étendue du territoire national mais respecte les titulaires de droits fonciers et coutumiers antérieurs. Par contre, la loi nº 73/021 du 20 juillet 1973 stipule que « les terres ainsi que les produits de la terre appartiennent à l’Etat ». Autrement dit, la population ne dispose que d’un droit de jouissance limité sur les ressources foncières. C’est dans le double but d’actualiser la loi forestière et d’assurer une gestion durable des forêts naturelles (ci-inclus les forêts secondaires), que le code forestier du 29 août 2002 a été promulgué.

Les principales dispositions de cette loi peuvent être résumées comme suit:

Sur le plan institutionnel:

− l’Etat élabore un plan forestier national qu’il révise périodiquement en fonction de l’industrialisation forestière ;

− les forêts sont classées et déclassées par le Ministre conformément à la procédure fixée par décret du Président de la République ;

− trois catégories de forêts sont prévues : forêts classées, forêts protégées et forêts de production permanente.

− l’Etat crée un cadastre forestier tant au niveau de l’administration centrale qu’au niveau provincial;

− l’Etat crée un conseil consultatif national et des conseils consultatifs provinciaux des forêts.

Sur le plan de la gestion forestière,

− une enquête préalable est requise pour toute forêt à concéder et la consultation de la population riveraine est obligatoire;

− pour un développement durable du secteur forestier, l’inventaire et l’aménagement forestiers constituent les deux concepts-clés applicables et imposables à tout exploitant forestier;

− la concession forestière est désormais sous-tendue par un contrat de concession forestière accompagné des cahiers de charges qui spécifient les droits et les obligations des parties contractantes;

− l’adjudication et, de manière exceptionnelle, le gré à gré, sont les deux voies possibles d’acquisition d’une concession forestière;

− le nouveau Code forestier insère également dans le régime forestier des dispositions spécifiques relatives à la fiscalité à travers une politique de rétrocession d’une partie de recettes fiscales aux entités décentralisées.

6.2 Politique forestière et cadre institutionnel

En RDC, des lignes directrices permettent d’orienter les activités forestières. Elles concernent notamment la diversification des sources de recettes en devises du pays, la promotion de nouveaux modes de gestion forestière (gestion participative, foresterie communautaire, etc.).

La tutelle administrative sur les services chargés des ressources forestières (primaires et secondaires) est assurée par le Ministère de l’environnement, conservation de la nature, eaux et forêts. Celui-ci exécute son mandat à travers ses structures:

- la Direction de la gestion forestière;

- le Service permanent d'inventaire et d'aménagement forestiers;

- le Service national de reboisement;

- le Centre d'adaptation des techniques d'énergie - bois;

- le Centre de promotion du bois;

- le fonds de reconstitution du capital forestier;

- le Centre national de l'information environnementale;

- la Direction des ressources en eau;

- le Secrétariat permanent du Comité interministériel de l'environnement;

- la Direction de développement durable;

- la Direction de l’inspection et du contrôle.

PRINCIPALES LEÇONS ET CONCLUSIONS

Les évolutions de la pensée à l’échelle internationale et les particularités des forêts secondaires provoquent un regain d’intérêt, favorable à une meilleure gestion de ces ressources. Cependant celles-ci ne font pas l’objet d’une gestion à part, séparée de la gestion des forêts primaires. Théoriquement, l’administration forestière applique aux forêts secondaires les textes qui régissent la gestion des forêts primaires: entre autres, le Code forestier du 29 août 2002 et la loi foncière n° 73/021 du 20 juillet 1973.

Mais la gestion forestière est principalement une « gestion du bois, des espèces de faune commercialisables et des parcs nationaux ». Les forêts secondaires, particulièrement celles situées à l’extérieur des aires protégées, sont d’accès quasi libre, défrichées et - certaines d’entre elles -, menacées de disparition.

De nouveaux systèmes de gestion des ressources forestières sont nécessaires pour assurer la durabilité des forêts secondaires et améliorer leur contribution au développement du pays. Les systèmes les plus appropriés seraient ceux qui promeuvent la foresterie communautaire et la gestion participative des ressources forestières.

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

1. Anonyme (1997): Plan national d’action environnemental, Document synthèse, Ministère de l’environnement, conservation de la nature et tourisme, Kinshasa, 129pp. et photos.

2. Anonyme (1997): Etat de la diversité biologique en République démocratique du Congo : Niveau de connaissance, gestion et menaces (Monographie nationale de la biodiversité), Ministère de l’environnement, conservation de la nature et tourisme, Kinshasa, 213pp.

3. Anonyme (1999): Stratégie nationale et plan d’action de la diversité biologique, Ministère des Affaires Foncières, Environnement, Conservation de la Nature, Pêche et Forêts, Kinshasa, 134pp.

4. Anonyme (2002): Loi portant code forestier en République démocratique du Congo, Présidence de la République, 59pp. + annexes.

5. Barnes, R. (1988): Conservation et utilisation rationnelle des écosystèmes forestiers en Afrique centrale, Profile of the Zaire Forest, IUCN International Report.

6. B.E.A.U (1982): Aménagement du territoire, Esquisse d’un schéma national, Bureau d’Etude d’Aménagement et d’Urbanisme, Ministère des travaux publics et d’aménagement du territoire, Zaïre, 25pp.

7. Doumenge, C.V (1990): La conservation des écosystèmes forestiers du Zaïre, UICN, 242pp.

8. EVRARD, C. (1968): Recherches écologiques sur les peuplements forestiers des sols hydromorphes de la cuvette centrale congolaise, Publication INEAC, Série scientifique 110 : 1-29 S.

9. Hukes et Nina (1988): Etude institutionnel du secteur forestier : L’état de la conservation des forêts et ses besoins immédiats, Rapport du Département des affaires foncières, environnement et conservation de la nature et IIED, 29pp, 2 fig., 11 tabl.

10. IIED (1988): Rapport du séminaire sur la politique forestière au Zaïre, Kinshasa, 11-13 mai 1988, Washington DC, USA, 216pp.

11. Kapa, B. et M. Malele (2003): Bilan et analyse des expériences de partenariat en gestion forestière dans le Bassin du Congo : cas de la République démocratique du Congo. Rapport national, OIBT-UICN-CEFDHAC, Kinshasa, RDC. 63pp.

12. Lubini, A. (1982): Végétation messicole et postculturale des sous-régions de Kisangani et de la Tshopo (Haut-Zaïre). Fac. SC. Université de Kisangani, Thèse de doctorat, Inédit. Kisangani, 489pp et annexes.

13. Lubini, A. (1994): Evolution de la flore au cours des successions végétales secondaires dans la cuvette centrale congolaise (Zaïre). In : Seyani&A.C. Chikuni, Proc. XIIe Plenary Meeting AETFAT, Malawi. pp 1413-1426.

14. Malele, M. (2003): Situation des ressources génétiques forestières de la République démocratique du Congo. Note thématique sur les ressources génétiques forestières. Document de travail FGR/56F, FAO, Rome, Italie, 44pp.

15. Malele, M. et B. Ritvisay (1986): Les forêts dégradées des environs de Kinshasa : leur aménagement et leur contribution éventuelle à la production d’énergie domestique. Rapport général du projet lambeaux forestiers. SPIAF, Kinshasa, Zaïre. 76pp.

16. OIBT (2002): Directives OIBT pour la restauration, l’aménagement et la réhabilitation des forêts tropicales dégradées et secondaires. Série Développement de politiques OIBT N° 13, Yokohama, Japon. 89pp.

17. Ritvisay, B. et M. Malele (1985): Essai de vulgarisation du projet lambeaux forestiers. SPIAF, Kinshasa, Zaïre. 38pp.

18. SPIAF (1988): Liste des essences forestières du Zaïre. Département des affaires foncières, environnement et conservation de la nature, Kinshasa, Zaïre, 70pp.

19. SPIAF (1995): Carte synthèse forestière de la République démocratique du Congo, Kinshasa, RD Congo.

20. Vangu, L., M. Malele et B. Ritvisay (1985): Plan d’aménagement forestier du Bas-Fleuve. Département de l’environnement, conservation de la nature et tourisme, SPIAF, Kinshasa, Zaïre. 101pp.

21. Vangu, L. et M. Mabiala (1982): Résultats de l’inventaire d’aménagement forestier du Bas-Fleuve (Région du Bas-Congo). Doc. N° 2. Résultats d’inventaire et analyse du biophysique forestier du Bas-Fleuve. Département de l’environnement, conservation de la nature et tourisme, SPIAF, Kinshasa, Zaïre. 240pp.

22. Zins, R. et K. Kambale (1989): L’énergie-bois au Zaïre : Bilan et perspectives. Plan d’action forestier tropical. Kinshasa, Zaïre. 145pp.


57 Ce chiffre est approximatif. Cette superficie est obtenue en relevant les superficies des forêts secondaires de l'ensemble du territoire sur la carte forestière synthèse produite par le SPIAF en 1995. Cependant l'analyse des résultats d’inventaires forestiers (les inventaires de pré-investissement, les inventaires nationaux, les inventaires d'aménagement et les inventaires d’allocation forestière qui ont couvert 20 millions d'hectares des 135 millions d'hectares de forêts du pays) laisse penser que la superficie des forêts secondaires est supérieure à 12.167.000 ha. Cette observation est proche de la réalité si l’on considère le taux de déboisement (532.000 hectares/ an en 2000) fourni par la FAO.

Previous PageTop Of PageNext Page