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SITUATION PAR RÉGIONS


1. Pacifique Sud
2. Asie de l'Est
3. Europe
4. Amérique latine et Caraïbes
5. Amérique du Nord
6. Proche-Orient et Afrique du Nord
7. Asie du Sud et du Sud-Est
8. Afrique subsaharienne

1. Pacifique Sud1

La région englobe la partie occidentale et centrale de l'océan Pacifique et s'étend depuis l'Australie à l'Ouest, jusqu'à l'île Pitcairn à l'Est. On compte 16 Etats indépendants, ainsi que des territoires qui dépendent des Etats-Unis, de la France et du Royaume-Uni. Deux d'entre eux, l'Australie et la Nouvelle-Zélande, sont des pays développés, tandis que d'autres Etats ou territoires rentrent dans la catégorie des petits Etats insulaires en développement. Les principales zones de pêche sont l'océan Pacifique Sud-Ouest et Centre, ainsi que l'océan Indien Est.

Bien que la région fournisse seulement quelque 2 pour cent2 de la production halieutique mondiale totale, le secteur des pêches - avec celui du tourisme - joue un rôle décisif au sein des économies des Etats et des territoires du Pacifique Sud. Les ressources continentales et côtières de la région sont exploitées pour répondre aux besoins alimentaires pour la vente sur les marchés nationaux et, dans une proportion plus grande, pour l'exportation. Le Pacifique Sud compte parmi les zones de pêche de thon les plus riches de la planète et ses exportations de produits de la pêche se composent presque exclusivement de thon. La consommation de poisson pour l'alimentation est relativement importante dans la région puisqu'elle s'élève en moyenne à 20 kg par an par habitant de poisson pour l'alimentation (équivalent poids vif). Si l'on ne tient pas compte de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande le chiffre moyen des disponibilités de poisson concernant uniquement certains petits Etats insulaires en développement serait probablement deux fois plus élevé3.

RESSOURCES ET PRODUCTION

Pêches en mer

Les pêches en mer de la région ont produit au total 769 000 tonnes en 1994, soit près de 90 pour cent de la production halieutique totale. Les flottilles étrangères récoltent chaque année environ 1 million de tonnes de thon. Dans les années 80 et au début des années 90, la production régionale a augmenté beaucoup plus que la moyenne mondiale, mais elle a diminué ces dernières années en raison surtout de la réorganisation des pêches industrielles australiennes et d'une modification des systèmes d'aménagement en Nouvelle-Zélande (voir ci-dessous). La plus grande partie des quantités débarquées cumulées provient de la zone de pêche du Pacifique Sud-Ouest, principalement du fait des activités de pêche de la Nouvelle-Zélande. L'Australie exploite également l'océan Indien Est et les captures des petits Etats insulaires en développement proviennent surtout de l'océan Pacifique Centre-Ouest.

Figure 30 Production halieutique régionale et part en pourcentage de la production mondiale totale

Dans les petits Etats insulaires en développement, les principaux types de pêches se caractérisent par leur mode d'exploitation et par la façon dont elles sont administrées. En ce qui concerne les pêches industrielles, le thon est l'espèce la plus recherchée et les flottes de pêche opérant en eaux lointaines de plusieurs pays extérieurs à la région participent dans le cadre d'accords autorisant leur accès; en fait, les flottes nationales des îles du Pacifique ne réalisent qu'environ 6,5 pour cent du total des captures, lesquelles s'élèvent à environ 1 million de tonnes. Les petites pêcheries côtières se répartissent suivant la destination des produits recherchés, c'est-à-dire le marché à l'exportation et le marché intérieur. Les produits de valeur élevée, pour des segments de marché spécifique, tels que bêches-de-mer, menus flétans et huîtres perlières, sont destinés à l'exportation. La production exportée et celle qui est destinée au marché national sont relativement indépendantes, et les espèces exportées ne font généralement pas partie des régimes alimentaires locaux traditionnels. Toutefois, les espèces exportées sont également conservées sur place pour l'industrie locale du tourisme. Les espèces consommées sur place incluent les crustacés, les poissons coralliens et les pélagiques tels que thon et espadon.

Partout dans les îles du Pacifique, on ignore généralement l'importance des captures côtières et l'état des stocks. Le classement par catégories des exportations est souvent imprécis, l'évaluation des stocks des pêches côtières est pratiquement inexistante et la plupart des informations prises en compte dans les décisions sont d'origine anecdotique. Les petits Etats insulaires en développement sont concernés par l'impact des opérations menées dans la région par des flottilles étrangères de pêche hauturière; en effet, 20 pour cent de la superficie de la région du Pacifique Sud correspond à des étendues de haute mer comprises entre les zones économiques exclusives (ZEE) des Etats insulaires et des territoires.

La technologie mise en œuvre par les pêches industrielles des Etats et des territoires insulaires du Pacifique se caractérise par un niveau de développement moyen. En effet, la plupart des Etats et des territoires de la région manquent de main-d'œuvre qualifiée et de l'infrastructure nécessaire à la poursuite d'opérations sophistiquées de pêche industrielle. Les flottilles de pêche étrangères œuvrant dans le Pacifique Sud sont surveillées par l'Organisme des pêches du Forum du Pacifique Sud (FFA) et un certain nombre d'activités liées à la conservation et à l'aménagement ont été mises en place à l'intention de ces flottilles, notamment un plafonnement régional du nombre de navires à senne coulissante dont la présence est autorisée. Les pêcheries côtières sont affectées par des problèmes de capacité localement excédentaire, en particulier au voisinage des atolls et des récifs. Le principal défi auquel les Etats et les territoires de la région sont confrontés consiste à mettre en place une exploitation durable des ressources tout en optimisant les avantages socioéconomiques recueillis.

Comme cela est généralement le cas dans les pays développés, la technologie et l'infrastructure des pêches en Australie et en Nouvelle-Zélande sont évoluées et adaptées à une industrie moderne des pêches. Dans le cas des pêches au chalut, ces deux pays ont joué un rôle pilote au niveau mondial en matière de technique de pêche au chalut en eau profonde. En ce qui concerne les pêches côtières, les méthodes de capture et la conception des navires de faible tonnage font appel également à des techniques extrêmement avancées. Dans de nombreux cas, cette tendance est soutenue par l'importance de l'industrie des petits bateaux de loisir, qui fait appel à des techniques et à des services analogues. Les captures australiennes se composent d'une assez grande variété d'espèces (pectens, homards et hoplostètes oranges, principalement). Récemment, les captures de la Nouvelle-Zélande ont été constituées essentiellement de grenadiers bleus, ainsi que de calmars, de chinchards, de maquereaux bâtards et d'hoplostètes oranges. Différents stocks ont présenté ces derniers temps des signes de surexploitation. Dans ces deux pays, la gestion de la capacité excédentaire n'est pas un problème particulièrement délicat. La capacité des flottilles a été réduite, en particulier la flottille de pêche à la crevette, dans le golfe de Carpentaria en Australie: suite à des mesures rigoureuses d'aménagement du secteur, elle est passée de 292 navires en 1977 à 125 en 1993.

Pêches continentales

Les pêcheries intérieures d'une taille appréciable sont limitées aux masses continentales les plus étendues (c'est-à-dire Australie, Nouvelle-Zélande et Papouasie-Nouvelle-Guinée), en raison de l'abondance de leurs ressources en eau douce. En Australie et en Nouvelle-Zélande, les pêches intérieures sont appréciées pour les possibilités de loisir qu'elles offrent et non en tant que facteur de sécurité alimentaire. Dans les zones montagneuses de Papouasie-Nouvelle-Guinée, d'autre part, les pêches intérieures jouent un rôle particulièrement notable en raison des difficultés d'accès aux zones côtières et de la production restreinte des autres sources de protéines animales. Des pêches intérieures assez importantes et des pêches spécialisées existent par ailleurs dans certains petits Etats insulaires en développement. Aussi, le niveau global des prises des pêches intérieures de capture dans le Pacifique Sud en 1994 a atteint 25 102 tonnes. On trouve dans la région des anguilles de rivière, des perches barramudi, des coquillages et des crustacés d'eau douce, des tilapias et des goujons. Les salmonidés, tels que truite arc-en-ciel et truite brune, font couramment l'objet d'activités de pêche sportive dans les eaux intérieures en Australie et en Nouvelle-Zélande.

Figure 31 Utilisation du poisson et disponibilités alimentaires

Figure 32 Importations et exportations de poisson (y compris le commerce intrarégional)

Les données sur les pêches intérieures ne couvrent pas les activités sportives et de loisir, qui jouent néanmoins un rôle notable dans les régions développées, comme l'Australie et la Nouvelle-Zélande. En dépit de la limitation des données concernant la pêche de loisir sur tout le territoire australien, les pêcheurs à la ligne semblent à présent les principaux utilisateurs de plusieurs espèces ichtyologiques estuariennes. Le nombre croissant de pêcheurs à la ligne en Australie, et sans doute dans d'autres pays, pourrait conduire à des conflits plus marqués entre les divers groupes d'utilisateurs, et à une intensification de l'exploitation de ressources limitées.

Aquaculture

La production de l'aquaculture a augmenté pour passer d'environ 20 000 tonnes en 1984 à près de 75 000 tonnes en 1994, en raison surtout des accroissements enregistrés en Nouvelle-Zélande et en Australie. A l'exception des deux principaux producteurs, les autres Etats et territoires du Pacifique ont produit à peine 2 500 tonnes en 1994. La plus forte augmentation due à une seule espèce a été celle obtenue grâce à l'élevage de moules en Nouvelle-Zélande dont la production est passée de 9 800 tonnes en 1984 à 47000 tonnes en 1994. D'autres augmentations notables et rapides ont été observées en ce qui concerne l'élevage des saumons en Nouvelle-Zélande et de saumon de l'Atlantique en Australie. L'huître et l'huître perlière comptent également parmi les espèces importantes à cet égard. La plus grande partie de la production aquacole est assurée par l'aquaculture côtière, bien que les possibilités physiques de développement de l'aquaculture en eau douce puissent être considérables dans les pays plus étendus.

Figure 33 Production halieutique par grands groupes d'espèces

Figure 34 Importations et exportations de poisson des principaux pays pratiquant des échanges en 1994

PRODUITS ET MARCHÉS

Dans la région, exception faite de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande, le poisson joue un rôle de premier plan en tant que source de nourriture, et ce, tant du point de vue culturel que du point de vue nutritionnel. Le régime alimentaire des populations des Etats insulaires du Pacifique est en effet fortement tributaire du poisson, et la plupart des Etats et territoires tirent du poisson une grande proportion de leurs disponibilités en protéines animales; elle atteint 69 pour cent dans le cas de Kiribati, tandis que la plupart des Etats se caractérisent par une proportion supérieure à 25 pour cent. Toutefois, la consommation effective de poisson est difficile à estimer en raison du peu de statistiques disponibles et de la contribution indéterminée des captures domestiques ne faisant pas l'objet de relevés. Les chiffres de disponibilités par habitant de poisson pour l'alimentation fournis par la FAO sous-estiment vraisemblablement la consommation globale. Ces chiffres ont fait apparaître d'année en année une tendance constante à la hausse et atteignent 100 kg par habitant par an (équivalent poids vif) dans le cas de Tokelaou. La moyenne régionale globale était de 20 kg par personne en 1994, tandis que la moyenne établie pour les seuls Etats insulaires - à l'exception de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande - est au moins deux fois plus élevée.

Les exportations des pêches de la région se composent en quasi - totalité de thon, qui constitue le principal facteur de développement du Pacifique Sud. Les conserveries du Samoa, de Fidji et des îles Salomon exportent du thon à des prix légèrement supérieurs à ceux de leurs homologues de l'Asie du Sud-Est, bien que ces deux derniers Etats bénéficient du régime ACP sur le marché de l'Union européenne (UE)4. Les exportations de produits de la pêche d'Australie et de Nouvelle-Zélande sont encouragées par des industries évoluées de transformation du poisson tournées vers l'exportation de produits de valeur élevée à destination de marchés discriminants.

POLITIQUE DES PÊCHES ET MESURES D'AMÉNAGEMENT

La plupart des administrations nationales des pêches des Etats insulaires du Pacifique se caractérisent par leur petite taille et leur précarité, compte tenu de la diversité limitée de leurs compétences techniques. Les pouvoirs publics privilégient particulièrement les mesures visant à renforcer les institutions et les moyens disponibles, en raison de l'importance des pêches dans ces pays. Au début des années 90, une restructuration des administrations nationales des pêches a été entreprise en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Dans chacun de ces cas, des administrations nationales des pêches, dotées d'un statut semicommercial, ont été créées. Elles ont permis au secteur privé de participer plus activement au sein des administrations des pêches, notamment sous forme de contribution financière aux frais d'administration et aux dépenses de recherche.

Le développement socioéconomique de nombreux Etats insulaires et des territoires du Pacifique Sud est étroitement lié au sort des pêches régionales. Par conséquent, les stratégies et la planification du développement national comportent invariablement des projets de développement et/ou de renforcement de la participation au secteur des pêches. Qui plus est, pour des raisons de sécurité économique, les Etats et territoires du Pacifique Sud privilégient fortement le développement des industries nationales (flottilles et industries de transformation), estimant que l'existence d'une industrie nationale leur permet d'avoir un plus grand contrôle de ce secteur. La forte participation des flottilles étrangères aux pêches de thon est considérée comme une solution intermédiaire et les Etats et territoires souhaitent généralement développer eux-mêmes leurs propres ressources halieutiques. Entre-temps, les Etats insulaires du Pacifique ont pour objectif d'augmenter les recettes tirées de l'octroi de droits de licence jusqu'à un niveau correspondant, selon eux, à une plus juste rémunération financière de l'exploitation de leurs propres ressources. La plupart des Etats et territoires du Pacifique Sud cherchent par ailleurs à diversifier les activités dans le secteur des pêches, en encourageant l'installation de nouvelles industries et en s'efforçant d'associer le secteur des pêches à une industrie du tourisme en pleine expansion et, lorsque cela est possible, la promotion des pêches intérieures et de l'aquaculture.

La coopération régionale des pêches dans le cadre du Pacifique Sud est bien établie; ayant à son actif de nombreux succès, elle constitue souvent la pierre angulaire de la politique étrangère nationale. Les Etats sont conscients de leur faiblesse individuelle liée à leur petite taille et des risques de manipulation auxquels ils sont exposés en ce qui concerne les pêches. De fait, cette prise de conscience a été essentiellement à l'origine de la création, en 1989, de l'Organisme des pêches du Forum du Pacifique Sud (FFA), qui a pour mission d'aider les pays membres à coordonner la politique des pêches et les activités correspondantes5. Le Programme régional océanien de l'environnement (PROE) aide les pays membres pour ce qui est des répercussions préjudiciables des activités humaines sur les pêches des zones côtières et en ce qui concerne les espèces ichtyques des récifs et des lagunes. Le programme des pêches côtières de la Commission du Pacifique Sud (CPS) met en place une procédure visant à harmoniser davantage les politiques nationales. La CPS recueille des données sur les pêches et établit des évaluations scientifiques destinées à soutenir les activités du FFA en matière de conservation et d'aménagement. Qui plus est, suite à la Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer, les Etats insulaires indépendants ont regroupé les capacités effectives d'aménagement des pêches de thon, sans doute beaucoup plus que dans toute autre région. Les Etats insulaires du Pacifique, généralement dépourvus de capacités de pêche hauturière, ont régulièrement adopté une approche fondée davantage sur la conservation que sur l'exploitation en matière d'aménagement des espèces de grands migrateurs.

En Australie et en Nouvelle-Zélande, la plupart des pêcheries sont gérées par un système de licences et/ou de contingents, tandis que l'importation de navires de l'étranger est surveillée; aussi la taille des flottilles est-elle proche de la valeur optimale, adaptée à l'exploitation des ressources. Cette approche est considérablement facilitée par la participation de l'industrie à l'aménagement des pêches. La réduction de la capacité des flottilles a été réalisée essentiellement grâce au rachat des licences existantes. En Nouvelle-Zélande, l'introduction de systèmes de contingents individuels transférables a fortement ralenti le rythme d'expansion des pêches et a permis de rationaliser davantage les pêcheries. Aussi bien en Australie qu'en Nouvelle-Zélande, les contingents individuels transférables ont renforcé l'efficacité économique au sein du secteur des pêches.

Particulièrement préoccupante dans le cas des pêches au chalut, la question des rejets en mer des captures accessoires concerne uniquement les pêcheries de crevettes du golfe de Papouasie-Nouvelle-Guinée, où le taux de prises accessoires est de l'ordre de 80 ou 90 pour cent du total, et très récemment la pêcherie expérimentale de pecten dans la lagune nord au large de la Nouvelle-Calédonie (encadré 6).


ENCADRÉ 6
Rejets en mer dans le Pacifique Sud

Dans le cadre de leur pêche artisanale de subsistance, les habitants des Etats insulaires du Pacifique rejettent en mer, ou restituent, une très faible fraction de leurs captures à l'exception du poisson tabou (tel que remora ou le requin dans certaines îles) et les espèces réputées pour la forte probabilité de transmission de ciguatera ou d'autres toxines. Si l'on considère les poissons consommés, le taux de récupération des matières comestibles est également très élevé; seuls les os, les écailles, les branchies et certains viscères sont mis au rebut. Les coquillages (hormis les coquillages à usage décoratif) ainsi que les carapaces de crustacés sont normalement considérés comme des déchets, et les fosses remplies de ce type de déchets de pêches sont une source de première importance d'information archéologique concernant les populations insulaires du Pacifique avant qu'elles ne se trouvent au contact des civilisations occidentales.

Les rejets en mer de prises accessoires sont un sujet de préoccupation en ce qui concerne les pêches hauturières à la palangre et, dans une moindre mesure, les pêches de listao et d'albacore à la senne coulissante. Les petits pêcheurs à la palangre qui effectuent de courtes sorties en mer à partir des ports de certaines îles du Pacifique ne rejettent généralement que les requins, et ce, d'autant moins qu'il existe une demande. Toute capture non commercialisable prise à la canne par des pêcheurs au thon des îles du Pacifique est conservée par l'équipage pour ses propres besoins ou, il y a quelques années, à Fidji, donnée aux villages du littoral pour compenser les autorisations de pêche avec appât vivant. A Honiara, d'importantes ventes de listao sur le marché local du poisson contribuent à présent à limiter les prix pratiqués et à améliorer le régime alimentaire des habitants des villages voisins.

Dans les îles du Pacifique, les pêches au chalut donnant lieu fréquemment à d'abondantes prises accessoires inutiles n'existent que dans le golfe de Papouasie (crevette) et très récemment dans le lagon nord au large de la Nouvelle-Calédonie (pecten). Les captures accessoires des pêches de crevettes au chalut du golfe de Papouasie atteignent une proportion de 80 à 90 pour cent, alors que les pêches de pecten au chalut en Nouvelle-Calédonie sont encore à un stade expérimental (et la plus grande partie des captures accessoires est susceptible d'être commercialisée). En règle générale, dans les îles du Pacifique, les fonds en eaux peu profondes sont trop riches en corail pour la pêche au chalut et aucune pêche n'a été identifiée sur les fonds abyssaux (à l'exception de quelques fonds de corail précieux).

Source: Commission du Pacifique Sud, 1996.

Nombre de ressources aquatiques côtières et continentales ont diminué du fait de leur surexploitation et de la détérioration des habitats. Au titre des efforts déployés pour inverser cette tendance, il y a lieu de citer la construction de récifs artificiels, ainsi que différentes mesures de réempoissonnement, d'amélioration des habitats et d'introduction d'espèces exotiques. Les milieux aquatiques ont été perturbés et détériorés du fait de l'intensification de la croissance démographique (encadré 7).


ENCADRÉ 7
Développement et restauration des pêches côtières

Nombre des ressources aquatiques côtières et continentales de la région Pacifique Sud ont diminué sous l'effet de la surexploitation et de la détérioration des habitats à proximité des zones urbaines ou industrielles. La gravité du problème de la surexploitation des zones côtières et lagunaires a été reconnue dans pratiquement tous les Etats et territoires du Pacifique Sud. Les efforts déployés dans la région pour augmenter la production ou les revenus des pêches continentales et côtières comprennent la construction de récifs artificiels, le réempoissonnement de plans d'eau et de récifs côtiers, l'amélioration des habitats et l'introduction d'espèces exotiques. Près de 30 espèces aquatiques exotiques ont été introduites en Australie et près de 20 en Nouvelle-Zélande. En Papouasie-Nouvelle-Guinée, plus de 30 espèces ont été introduites et le réempoissonnement de la rivière Sepik par des espèces exotiques fait encore l'objet d'un programme en cours. Les plus petits Etats insulaires ont introduit le tilapia (Oreochromis spp.) et le coquillage trochus (Trochus niloticus), ainsi que l'escargot de mer (Turbo spp.). Ayant pris conscience des dangers potentiels que comportent les introductions inadéquates, les Etats et territoires ont adopté des directives concernant l'utilisation des espèces exotiques.

De nombreuses espèces de coquillages commercialement importants font l'objet d'une surexploitation en raison de la lenteur de leur recrutement et de la facilité de capture. La palourde géante et les espèces apparentées (Tridacna spp. et Hippopus hipposus) ont été classées dans la catégorie des espèces menacées par l'Alliance mondiale pour la nature (UICN), et ce, dans un grand nombre des îles du Pacifique. Aussi, diffé-rents projets d'empoissonnement et de transplantation ont-ils été entrepris dans le cas des espèces de palourdes géantes (Tridacnidea) et des espèces de trochus sur la grande barrière corallienne de l'Australie, dans les îles Cook, en Polynésie française, dans les Etats fédérés de Micronésie et dans différentes îles du Pacifique. Les plus grandes écloseries destinées à constituer les stocks de Tridacna sont le Centre d'aquaculture côtière des îles Salomon, le Centre de développement de la mariculture micronésienne aux Palaos ainsi qu'à l'Université James Cook en Australie. On envisage le transfert de l'escargot de mer dans d'autres zones de la région (il a été introduit en Polynésie française à partir de Vanuatu) et son usage éventuel pour repeupler des récifs coralliens avec des alevins élevés en écloserie.

Des récifs ont été créés artificiellement pour diversifier les habitats et ainsi augmenter ou rassembler les espèces de poissons et de coquillages commercialement importants dans des régions telles que l'Australie du Sud et le Queensland. Grâce à l'emploi des matériaux disponibles - vieux pneus ou navires abandonnés -, les récifs artificiels ont permis d'accroître les captures des pêcheurs de loisir et des plongeurs.

Source: Commission du Pacifique Sud, 1996.

PERSPECTIVES

Le poisson et les produits de la pêche continueront à jouer un rôle économique et social fondamental dans les pays du Pacifique Sud. Le poisson pour la consommation humaine restera la principale source de protéines animales de maintes communautés insulaires du Pacifique et, en particulier, des communautés les plus défavorisées de la région. Le secteur des pêches sera l'un des principaux facteurs de promotion du développement économique dans le Pacifique Sud et, pour certains Etats et territoires, sera à l'origine même de ce développement. Peu de zones ou de régions du monde seront autant tributaires du secteur des pêches pour leur développement que le Pacifique Sud.

Les ressources halieutiques de la région sont vraisemblablement en mesure de répondre à une demande future de poisson sensiblement augmentée, bien qu'à cet effet il soit sans doute nécessaire de consommer des quantités supplémentaires d'espèces pélagiques, en particulier dans les zones urbaines et dans d'autres secteurs de forte concentration des populations. Toutefois, il faudra améliorer les systèmes de commercialisation et de distribution afin d'assurer plus rapidement et plus efficacement le transport du poisson entre les Etats et les territoires de la région et à l'intérieur des Etats et territoires proprement dits. La promotion de pêches durables et la mise en œuvre d'arrangements régionaux et nationaux propres à assurer l'utilisation judicieuse des ressources halieutiques figurent parmi les principaux enjeux sociaux et économiques du Pacifique Sud et la plupart des Etats et territoires s'efforcent de résoudre la question de la surexploitation des ressources côtières.

Les Etats et territoires du Pacifique Sud sont conscients du fait qu'une réglementation effective et durable des ressources halieutiques côtières et hauturières est indispensable pour la sécurité alimentaire et socioéconomique à long terme.

Le potentiel de développement de l'aquaculture varie notablement d'une sous - région à l'autre. Des problèmes matériels, biotechniques, économiques, institutionnels et autres affectent généralement le développement de l'aquaculture dans les pays du Pacifique Sud, en dépit de réelles possibilités de développement sélectif et attentif de la production à des fins tant alimentaires qu'économiques.

En ce qui concerne le commerce, l'Australie et la Nouvelle-Zélande sont des exportateurs de spécialités à destination du Japon, des Etats-Unis et de l'Europe. Les exportations se sont développées ces dernières années, en particulier pour les produits de la pêche néo-zélandais (par exemple moules). Cette évolution est appelée à se poursuivre; les perspectives offertes aux exportations de fruits de mer de Nouvelle-Zélande et - dans une moindre mesure - d'Australie sont prometteuses, à condition que de saines pratiques d'aménagement soient appliquées à l'égard des espèces démersales, comme l'hoplostète orange, dont la croissance est lente.

Un recul des importations de poisson et une légère augmentation des exportations, principalement de thon, sont prévus dans les petits Etats insulaires en développement. Le thon frais de qualité sashimi est d'ores et déjà expédié par avion sur le marché japonais, bien que l'éloignement de ses débouchés et différents problèmes de logistique continuent de gêner l'accès à ce marché lucratif. La Papouasie-Nouvelle-Guinée pourrait devenir un important exportateur de thon en conserve vers le marché européen, une fois ses conserveries pleinement opérationnelles. L'industrie de Papouasie-Nouvelle-Guinée a pour avantage de se trouver à proximité de la ressource et de bénéficier d'un thon d'excellente qualité.

1 D'après l'étude régionale préparée par l'équipe spéciale interdépartementale de la FAO dirigée par M. D. Doulman, Division des politiques et de la planification de la pêche/Service des institutions internationales et de liaison (FIPL).Les données sont fondées sur les documents établis par M. T. Adams de la Section de la gestion et de l'évaluation des ressources, Programme des pêches côtières de la Commission du Pacifique Sud, Nouméa, Nouvelle-Calédonie.

2 Y compris les activités de pêche des flottilles de pêche étrangères.

3 Les statistiques précises sur les disponibilités de poisson concernant les îles du Pacifique ne sont pas disponibles.

4 L'Union européenne a conclu un accord commercial avec 69 pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP). Toutefois, avec l'entrée en vigueur du nouvel Accord de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce/Organisation mondiale du commerce (GATT/OMC), les privilèges correspondants seront progressivement retirés. Voir encadré 22 p. 103.

5 Les Etats membres du FFA sont l'Australie, les îles Cook, les Etats fédérés de Micronésie, Fidji, Kiribati, les îles Marshall, Nauru, la Nouvelle-Zélande, l'île Nioué, les Palaos, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, le Samoa, les îles Salomon, les Tonga, Tuvalu et Vanuatu.

2. Asie de l'Est1

La région englobe des eaux maritimes et continentales placées sous la juridiction des Etats suivants: République populaire démocratique de Corée, Hong-kong, Japon, Macao, Mongolie, Chine, République de Corée, zone côtière orientale de la Fédération de Russie (les pêches de la Fédération de Russie sont traitées dans l'étude régionale consacrée à l'Europe, p. 64) et Taïwan, Province de Chine. L'étude sera plus particulièrement axée sur les trois principaux pays pratiquant la pêche: le Japon, la Chine et la République de Corée, bien que les chiffres indiqués pour la région concernent l'ensemble des pays, sauf option contraire. Les mers situées dans cette région comprennent l'océan Pacifique Nord-Ouest, y compris la mer du Japon, la mer de Chine orientale et la mer Jaune.

La production halieutique est une activité économique importante dans les Etats côtiers de l'Asie de l'Est. La région compte parmi les principales zones productrices de poisson à l'échelle mondiale, avec une production totale de 36,6 millions de tonnes en 19942. La mer de Chine orientale, la mer Jaune, la mer du Japon et les eaux côtières orientales du Japon comptent parmi les zones de pêche les plus intensément exploitées, tandis que la production aquacole a représenté plus de 70 pour cent des quantités globales produites. La consommation de poisson est généralement forte, dépassant la consommation de viande dans certains de ces pays; le niveau annuel des disponibilités de poisson pour la consommation s'élève à 21 kg par habitant en moyenne (équivalent poids vif). La région est un partenaire commercial actif du marché international et un importateur net (tant en volume qu'en valeur).

RESSOURCES ET PRODUCTION

Pêches en mer

Les quantités débarquées provenant des captures en mer réalisées par les flottilles locales se sont élevées au total à 22,6 millions de tonnes en 1994. Une quantité supplémentaire de 1,9 million de tonnes a été pêchée dans d'autres eaux maritimes. La Chine se classe au premier rang des pays pratiquant cette activité, suivie du Japon et de la République de Corée.

Les pêches réalisées par les pêcheries de la mer de Chine orientale correspondent généralement à des activités à petite échelle, bien qu'elles utilisent également d'assez gros chalutiers. Le thon, le maquereau, la crevette, le chano, la dorade, les sciaenidés et les coquillages de divers types comptent parmi les principales espèces exploitées. Les ressources démersales de la mer Jaune sont exploitées depuis des années par des chalutiers de la Chine, de la République de Corée, de la République populaire démocratique de Corée et du Japon. Les principales ressources comprennent la dorade, les sciaenidés, l'anoli, la crevette, le poissonsabre, le maquereau bâtard, le calmar et le flétan. Toutes ces espèces sont surexploitées et les captures des espèces particulièrement précieuses ont diminué récemment. La mer du Japon compte un grand nombre d'espèces pélagiques et démersales, notamment hareng, pilchard, lieu de l'Alaska, maquereau et thon rouge, bien que ces ressources aient progressivement fait l'objet d'une surexploitation. La pêche au calmar est pratiquée dans la partie centrale de la mer du Japon, la pêche au saumon dans les zones côtières et celle des crustacés dans les zones les plus profondes. Les flottilles du Japon, de la Fédération de Russie, de la République de Corée et de la République populaire démocratique de Corée y pratiquent une pêche intensive.

La production marine totale de la région a diminué ces dernières années, bien que les quantités débarquées en 1994 aient enregistré une légère augmentation par rapport à l'année précédente. La diminution est liée essentiellement au recul des quantités débarquées de pélagiques, en particulier le pilchard du Japon; cette évolution est apparemment sans rapport avec l'effort de pêche, mais plutôt due aux modifications à l'échelle décennale du milieu marin (encadré 8). Au demeurant, d'autres ressources sont actuellement appauvries en raison de l'intensité de leur exploitation, en particulier le lieu de l'Alaska.


ENCADRÉ 8
La pêche au pilchard du Japon

La variation la plus brutale ayant affecté les ressources halieutiques de la région a concerné le pilchard (Sardinops melanostictus) dans le Pacifique Nord-Ouest au large du Japon. Cette pêcherie s'est développée rapidement dans les années 30 pour devenir l'une des principales pêcheries monospécifiques mondiales à cette époque. Au début des années 40, la population ichtyque s'est effondrée brutalement, puis est restée fortement appauvrie pendant près de trois décennies. Ensuite, vers le milieu des années 70, la population a connu soudainement une très forte augmentation amorçant ainsi une phase rapide de reconstitution, à l'origine du niveau maximal atteint par les captures en 1980, représentant plus de trois fois (5,4 millions de tonnes en 1988) le niveau des captures maximales préalablement à l'effondrement antérieur du stock dans les années 40. A l'heure actuelle, la population connaît une rapide diminution pour la seconde fois, après avoir fait l'objet d'une exploitation intensive pendant une période de temps prolongée. En 1994, les quantités débarquées ont été inférieures à 1,3 million de tonnes (réalisées principalement par le Japon, mais aussi par la Chine et la République de Corée). En 1996, on n'a constaté aucun signe de reprise; la population ichtyque a continué de diminuer et se trouve actuellement extrêmement appauvrie. Bien que l'activité reproductrice des anchois japonais ait été très forte ces dernières années, la reconstitution du stock d'alevins a été très limitée. Aussi, les chercheurs japonais ont-ils la conviction que les fluctuations des stocks de pilchards ne résultent pas de la surexploitation, mais plutôt des changements climatiques, lesquels semblent avoir eu des effets préjudiciables sur l'efficacité de la reproduction.

On ne connaît pas encore la nature exacte du lien entre les fluctuations climatiques et l'efficacité des processus reproductifs. Il y a, semble-t-il, une certaine synchronisation des cycles pluriannuels d'efficacité ou d'inefficacité des processus de reproduction au sein des principales populations de poisson, et ce dans des zones nettement séparées de l'océan Pacifique, comme dans plusieurs autres régions ou zones océaniques ailleurs dans le monde. D'autres stocks halieutiques extrêmement importants ont tendance à présenter des fluctuations synchronisées, en phase, ou en opposition de phase, avec le pilchard du Japon, sur des périodes de plusieurs années; on peut citer à cet égard les populations de sardines au large de la côte ouest de l'Amérique du Sud et au large du sud-ouest de l'Afrique, l'anchois du Pérou, le lieu de l'Alaska et plusieurs autres espèces de salmonidés dans le Pacifique Nord. Ces périodes de croissance ou d'appauvrissement des populations sont liées à leur tour à plusieurs indices climatiques, notamment la température moyenne du globe, l'indice d'oscillation méridionale du phénomène El Niño, etc. Aussi peut-on en conclure que la variabilité climatique est susceptible de déclencher les phases d'expansion et de contraction des populations ichtyques. (Voir également encadré 13 p. 74.)

Figure 35 Production halieutique régionale et part en pourcentage de la production mondiale totale

Les principales flottilles de pêche de la région sont celles du Japon et de la République de Corée qui comptaient respectivement, en 1994, 2 423 et 1 012 navires, avec un tonnage de jauge brute (TJB) de plus de 100 TJB/navire. La flotte de pêche chinoise se composait à la même date de 253 navires de plus de 100 TJB. En République de Corée, le secteur de la pêche est confronté à des difficultés dues au renchérissement de la main-d'œuvre et à l'épuisement des ressources marines, et dans certaines pêches, par exemple la pêche à l'anchois au filet dérivant et la pêche au lieu de l'Alaska, un degré élevé d'automatisation a été introduit. De plus, le gouvernement prévoit d'adapter la capacité de pêche dans les eaux nationales en réduisant le tonnage total de 137 000 TJB d'ici à 2004. Cependant, ces dernières années on a pu constater une légère augmentation du tonnage total en dépit de la diminution du nombre de navires3. Au Japon, le nombre de navires a également diminué au cours des années 90, parallèlement au recul du nombre de pêcheurs et d'entreprises de pêche. En Chine, la capacité de capture dans les eaux intérieures a augmenté beaucoup plus vite que la production. Par exemple, la capacité totale des bateaux de pêche chinois opérant dans la mer de Chine orientale a augmenté dans un rapport de 7,6 approximativement entre les années 60 et le début des années 90 pour des captures simplement multipliées par 2,6.

La forte exploitation de la plupart des ressources halieutiques marines nationales dans les eaux chinoises et l'apparition progressive d'un marché à la consommation ont donné l'élan nécessaire à la constitution par la Chine d'une flotte de pêche hauturière, créée initialement en 1985. La République de Corée et Taïwan, Province de Chine, réalisent la plus grande partie de leurs captures dans les eaux locales, mais elles ont étendu leurs activités en haute mer ces derniers temps. En 1995, les quantités débarquées par la flotte de pêche hauturière de la République de Corée ont atteint 0,9 million de tonnes.

Les captures en haute mer des flottilles japonaises ont diminué de 2,1 million de tonnes en 1970 à 0,9 million de tonnes en 1993 et sont appelées à diminuer encore, compte tenu des difficultés rencontrées par les compagnies de pêche japonaises face à la concurrence des importations de poisson et de produits de la pêche.

Pêches continentales

La production des pêches de capture en eau douce dans la région est encore dominée par la Chine, qui a produit plus d'un million de tonnes en 1994, sur un total régional de 1,4 million de tonnes. Toutefois, la dégradation de l'environnement jointe à la surexploitation a eu pour effet d'affecter les pêches de capture dans tous les grands cours d'eau chinois, en particulier sur les segments situés en aval des principales sources de pollution. Il en a résulté une baisse notable des rendements et la perte de nombreuses espèces présentant un intérêt commercial. Alors que la contribution des pêches fluviatiles diminue, des rendements accrus sont atteints actuellement au moyen d'une exploitation plus intensive des lacs naturels et des retenues d'eau, surtout grâce à des mesures de mise en valeur (repeuplement, fertilisation, contrôle des espèces indésirables, modification des habitats et génie écologique des masses d'eau).

Aquaculture

La production aquacole totale de la région s'est élevée en 1994 à 18,4 millions de tonnes, soit 22,8 milliards de dollars EU en valeur, niveaux correspondant respectivement à 73 pour cent et 57 pour cent de la production mondiale totale. Au cours de la période 1984-1994, la croissance annuelle moyenne de ce sous - secteur a été de 10 pour cent en volume et de 11 pour cent en valeur.

La Chine est de loin de principal producteur puisqu'elle assure à elle seule plus de 60 pour cent de la production aquacole mondiale: 15,4 millions de tonnes en 1994. La production de poisson est concentrée en Chine, où les élevages se caractérisent par de faibles densités d'empoissonnement, dans le cadre de systèmes de polyculture semiintensive en étang. Parmi les principales espèces figurent les cyprinidés, tels que la carpe argentée, la carpe herbivore, la carpe commune, la carpe marbrée et, plus récemment, le tilapia.

La production aquacole chinoise de poisson diffère très nettement de celle pratiquée au Japon où elle se limite de façon quasi exclusive aux espèces marines carnivores de valeur élevée et aux espèces diadromes, dans le cadre de systèmes d'élevage intensifs. Les principales espèces sont les brèmes queue jaune et les dorades rouges. Les plantes aquatiques constituent le deuxième groupe d'espèces par ordre d'importance en poids et en valeur. Les mollusques et les crustacés sont également produits. De plus, la mariculture est pratiquée au Japon, où près de 80 espèces sont utilisées en élevage en mer (notamment les élevages en cours d'aménagement technique). Les activités de mariculture sont consacrées principalement à la brème de mer argentée, au halibut bâtard, à la crevette kuruma, au crabe, à l'ormeau, ainsi qu'à l'oursin de mer. La question de la préservation de l'environnement devient de plus en plus préoccupante pour le développement futur de l'aquaculture (encadré 9).


ENCADRÉ 9
Questions de protection de l'environnement liées à l'aquaculture

La qualité de l'environnement continue d'être une condition clé du développement de l'aquaculture dans la région. Par exemple, des éleveurs de crevette chinois ont récemment subi des pertes considérables consécutives à des épidémies imputables à la qualité médiocre de l'eau et du sol de leurs étangs et perturbant les populations d'élevage, à l'introduction d'agents pathogènes et aux très fortes densités de peuplement des unités d'élevage à certains endroits. L'intensification de l'utilisation des ressources et de la production est de plus en plus manifeste dans l'industrie chinoise de l'aquaculture en eau douce, et suscite des inquiétudes quant au risque correspondant de rejets de déchets.

La préservation de l'environnement vis-à-vis de l'aquaculture côtière à Hong-kong, au Japon et en République de Corée est liée essentiellement aux fortes densités de cages et de nasses flottantes dans les plans d'eau caractérisés par une circulation d'eau restreinte. Toutefois, de nombreux aquaculteurs de la région subissent une pollution aquatique de plus en plus grave due à d'autres activités. Les éleveurs de coquillages en République de Corée, par exemple, ont dû faire face à des proliférations récurrentes d'algues dangereuses, provoquant dans certains cas l'anoxie des eaux benthiques et la contamination de leurs produits par des toxines. La pollution croissante des cours d'eau, des lacs et des retenues d'eau en Chine est responsable de pertes économiques considérables infligées aux aquaculteurs et aux pêcheurs. Les problèmes de préservation de l'environnement liés au développement de l'aquaculture font l'objet d'une grande attention dans les pays concernés et de nombreux efforts sont actuellement déployés pour garantir un développement plus durable du secteur.

Sources: ADB/NACA, 1996. Aquaculture sustainability action plan. Regional study and workshop on aquaculture sustainability and the environment (RETA 5534). Banque asiatique de développement (BAsD) et Réseau de centres d'aquaculture d'Asie et du Pacifique, NACA. Bangkok, Thaïlande. 21 p.; Bagarinao, T.U. et E.E.C. Flores, (éds). 1995. Towards sustainable aquaculture in Southeast Asia and Japan. Actes de l'Atelier de travail sur le développement de l'aquaculture en Asie du Sud-Est, qui s'est tenu du 26 au 28 juillet 1994 à Iloilo City, Philippines, SEAFDEC Aquaculture Department. 254 p.; FAO/NACA. 1995. Regional Study and Workshop on the Environmental Assessment and Management of Aquaculture Development in Asia-Pacific. NACA Environment and Aquaculture Development Series No. 1. FAO et Network of Aquaculture Centres in Asia-Pacific. NACA, Bangkok, Thaïlande. 492 p.

PRODUITS ET MARCHÉS

La consommation de poisson dans la région est très élevée par comparaison aux normes internationales. Ainsi, la valeur moyenne annuelle des disponibilités de poisson pour l'alimentation est de 21 kg par personne (équivalent poids vif) dans la région, et le poisson fournit environ un quart de la totalité de la ration alimentaire en protéines animales. En particulier au Japon, la tradition consistant à se nourrir de poisson est très forte et l'importance de cet aliment est généralement supérieure à celle de la viande, bien qu'actuellement les générations plus jeunes tendent à consommer davantage de viande qu'auparavant. Les disponibilités par habitant de poisson pour l'alimentation dépassent 70 kg par an. Bien que le poisson frais soit consommé de préférence, la demande est diversifiée et comporte une part croissante de produits transformés tant traditionnels que nouveaux. A présent, environ les deux tiers de la production halieutique servent de matière première aux industries de transformation. Toutefois, l'industrie de la pêche comme celle de la transformation sont maintenant en cours de rationalisation et les opérations sont de plus relocalisées dans des pays étrangers, dans le cadre de coentreprises et de différents arrangements, grâce à des coûts de main-d'œuvre réduits et en fonction d'un accès privilégié aux matières premières utilisées.

Figure 36 Utilisation du poisson et disponibilités alimentaires

Figure 37 Importations et exportations de poisson (y compris le commerce intrarégional)

Au cours de la décennie écoulée, les importations ont considérablement augmenté et le commerce international dans la région est axé sur le Japon, principal importateur mondial de poisson et de produits de la pêche. Près d'un tiers du commerce mondial de poisson est destiné au Japon (en valeur) et les importations japonaises de produits de la pêche ont quadruplé au cours de la décennie qui s'est terminée en 1994. Les importations ont été constituées essentiellement de crevettes et de bouquets, de thon frais et congelé, de crabe et de saumon (en valeur), ainsi que de crevettes, de bouquets et de thon (en volume).

Les statistiques concernant la République de Corée et Hong-kong font apparaître des valeurs par habitant des disponibilités de poisson pour l'alimentation d'environ 50 à 55 kg par an. En République de Corée, le produit des pêches de capture est généralement préféré au poisson d'élevage, et le poisson frais consommé de préférence aux produits transformés. Néanmoins, le nombre d'usines de transformation installées dans le pays semble augmenter4. La République de Corée est à la fois un grand importateur et un grand exportateur. Dans le passé, des droits élevés ont protégé l'industrie de la pêche contre les importations de céphalopodes et d'autres produits de la pêche. De ce fait, le prix des encornets était parmi les plus élevés au monde. Néanmoins, à compter de 1995, la République de Corée a libéré les échanges de plus de 300 produits, et ouvrira entièrement ses marchés aux produits de la pêche en 1997.

En Chine, la valeur moyenne des disponibilités par habitant, établie en 1990, était de 10 kg, mais la consommation a vraisemblablement augmenté notablement depuis lors. Cependant, il existe de fortes variations à l'échelle nationale; dans les régions méridionales, en particulier dans la province de Guangdong, la disponibilité moyenne est de 43 kg par habitant, alors que la consommation de poisson dans les régions isolées du nord-est est négligeable. La demande intérieure est largement couverte par les produits d'élevage en étang d'eau douce, en particulier par différentes espèces de carpes. En 1993, plus de la moitié de la production chinoise de poisson provenait des pêcheries de culture. L'augmentation actuellement constatée des revenus disponibles en Chine crée des débouchés commerciaux également pour les importations de poisson. Une des principales importations de poisson est actuellement le lieu de l'Alaska provenant de la Fédération de Russie, qui est transformé, puis exporté vers l'Allemagne et les Etats-Unis. La crevette est également importée avant d'être transformée, puis réexportée aux Etats-Unis.

POLITIQUE DES PÊCHES ET MESURES D'AMÉNAGEMENT

Les flux restreints d'eaux océaniques pénétrant et sortant des eaux d'Asie de l'Est rendent, semble-t-il, ces dernières particulièrement vulnérables aux modifications de l'environnement d'origine humaine ou naturelle. En République de Corée, les complexes industriels proches des zones côtières et les afflux croissants d'eaux usées provenant des zones urbaines s'avèrent préjudiciables pour les zones de pêche côtières. Qui plus est, des projets de mise en valeur des terres incultes limitent l'étendue des zones de pêche tandis que des phénomènes de pollution pétrolière et de marées rouges ont été constatés, en particulier dans la partie sud5. Des phénomènes analogues surviennent également dans d'autres parties de cette région.

Fournissant plus d'un tiers des quantités débarquées mondiales, la région produit par conséquent une part comparable des prises accessoires. La fraction des prises accessoires rejetée en mer est néanmoins susceptible d'être plus faible, en particulier en Chine; toutefois, il existe très peu de données détaillées à ce sujet.

Les problèmes internationaux concernant les pêches dans cette région ont fait l'objet d'accords bilatéraux, par exemple entre le Japon et la République de Corée et entre le Japon et la Chine. La Fédération de Russie a institué une ZEE; le Japon en a fait autant sur sa côte orientale, mais cette ZEE n'est appliquée ni à la Chine, ni à la République de Corée. Les efforts déployés dans la région pour éviter les litiges inutiles concernant les chevauchements potentiels de juridiction maritime sont évidents. La coopération régionale (à l'exception de Taïwan, Province de Chine) est également assurée par le biais de la Commission des pêches pour l'Asie et le Pacifique (APFIC), organisme régional des pêches créé sous les auspices de la FAO et reconstitué récemment. De manière analogue, les Etats côtiers (à l'exception de la République populaire démocratique de Corée) sont devenus membres du Groupe de travail sur les pêches de la coopération économique Asie-Pacifique (APEC).

En République de Corée, la Loi sur les pêches a été modifiée en 1995 pour tenir compte de nouveaux systèmes internationaux d'aménagement et reflète les dispositions appropriées de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS) et de différentes règles et dispositions internationales relatives aux pêches. En raison de la réglementation croissante de la haute mer, et de la détérioration des ressources dans les eaux voisines de la République de Corée, le gouvernement a entrepris en 1994 un projet de réorganisation des pêches visant à réduire le nombre de navires de pêche. De plus, pour remédier à la détérioration de l'environnement, le gouvernement a défini un certain nombre de zones de conservation des ressources halieutiques et intensifié les activités de recherche portant sur les questions liées à la pollution6.

Figure 38 Production halieutique par grands groupes d'espèces

Figure 39 Importations et exportations de poisson des principaux pays pratiquant des échanges en 1994

Le Japon est doté d'un système unique et global d'aménagement des pêches. Les pêches côtières et continentales sont dirigées par des coopératives, grâce à un système de droits de pêche. Les pêches côtières et hauturières sont gérées par le biais de l'octroi de licences. La Loi sur les pêches et la Loi sur la protection des ressources halieutiques constituent le fondement juridique de l'aménagement des pêches, tandis que des responsabilités étendues sont conférées au Ministère de l'agriculture, des forêts et des pêches, ainsi qu'aux préfets. A l'avenir, un meilleur aménagement des pêches s'attachera vraisemblablement à augmenter la production des espèces à valeur élevée, grâce à des techniques classiques d'aménagement (réglementation de l'effort des pêches ou des captures, saisons et zones de fermeture de la pêche), à des mesures d'aménagement communautaire et à l'adoption d'approches novatrices permettant de remédier à la détérioration des milieux naturels afin de favoriser les habitats, la croissance et le recrutement des espèces recherchées de valeur élevée. L'aménagement concerté et la coopération régionale seront en outre privilégiés, l'introduction de ZEE étant par ailleurs probable. Le Japon aura vraisemblablement une conception plus intégrée de l'ensemble de l'industrie de la pêche et des industries de transformation à la faveur du renforcement et du caractère plus évident des liens entre les marchés, le commerce et les ressources.

La Chine a adopté une approche pragmatique en matière de développement de ses institutions et de son administration des pêches, et renforce actuellement ses capacités de gestion. Cette orientation est appuyée par des dispositions juridiques appropriées telles que les Lois sur les pêches et les Règlements en matière de conservation et de reproduction des ressources halieutiques. La Chine semble confrontée au même problème d'aménagement des pêches et de la zone côtière que les autres pays de la région, notamment à la nécessité de créer des possibilités d'emplois de substitution pour les pêcheurs côtiers, à la concurrence intersectorielle, à la pollution de l'environnement et à la destruction des habitats. En outre, la plus grande autonomie des gouvernements provinciaux exigera rapidement une coordination interprovinciale afin de résoudre les conflits liés à l'utilisation commune des ressources et pour faire face à la détérioration de l'environnement.

PERSPECTIVES

La consommation de poisson dans la région devrait rester élevée et même augmenter encore dans certaines zones (tant en volume qu'en termes de consommation par habitant), à la faveur de la croissance démographique et de l'augmentation du pouvoir d'achat des consommateurs.

Le Japon est sans doute une exception, puisque la consommation de poisson y est déjà élevée et que la croissance démographique est pratiquement nulle. Néanmoins, la composition du panier de produits de la pêche consommé au Japon devrait continuer à évoluer, au profit de produits de valeur élevée, lesquels pourraient comporter davantage de produits prêts à la consommation, comme de produits vendus par l'intermédiaire de chaînes d'établissements de restauration rapide. Le caractère sophistiqué du comportement en matière de consommation de poisson a des répercussions importantes sur les stratégies de production nationale, lesquelles imposent une priorité aux types de produits pour lesquels les producteurs japonais ont un avantage concurrentiel marqué par rapport aux fournisseurs étrangers, par exemple les produits de mariculture susceptibles d'être commercialisés en tant que «produits naturels», par opposition aux produits d'élevage. L'élevage extensif en mer devrait devenir la forme privilégiée d'élevage du poisson. Par conséquent, l'évolution à venir des pêches au Japon sera définie principalement par le marché, en particulier par la capacité de l'industrie nationale à affronter la concurrence des fournisseurs étrangers. Les pêches japonaises ne devraient pas connaître une forte croissance dans les décennies à venir. Les gains de production modérés obtenus grâce à l'élevage et au pacage marins devraient être compensés par une nouvelle baisse de la production des flottilles de pêche hauturière, mais le pays continuera à dépendre des importations pour répondre à sa forte demande de produits de la pêche.

Jusqu'à un certain point un comportement analogue en matière de consommation peut être observé en République de Corée, qui libéralise actuellement sa réglementation du commerce des produits de la pêche et dont les importations sont appelées à croître. Toutefois, ce pays reste simultanément un grand exportateur. Pour la production intérieure, la priorité ira au renforcement de l'utilisation des zones de pêche nationales grâce à la construction de récifs artificiels et au moyen de lâchers d'alevins. L'aquaculture devient par ailleurs une source importante de produits de la pêche7.

En Chine, la poursuite prévue d'une croissance économique rapide et de l'expansion de la production halieutique permettra un nouvel accroissement de la consommation par habitant. L'aquaculture en eau douce présente un fort potentiel de croissance, principalement grâce à la remise en état des étangs existants, à l'utilisation des zones saturées d'eau et grâce aux vastes étendues des rizières. La multiplication des écloseries autorisera la réalisation de ce potentiel. En revanche, les pêches traditionnelles de capture en mer ne semblent guère offrir de possibilités substantielles de développement. Les ressources côtières devront faire l'objet d'un aménagement attentif et toute augmentation future des quantités débarquées dépendra sans doute de la pêche hauturière. Toutefois, la vigueur de la croissance économique générera vraisemblablement suffisamment de pouvoir d'achat pour compenser par un appel aux importations tout déficit de l'offre par rapport à la demande.

1 D'après l'étude régionale préparée par l'équipe spéciale interdépartementale de la FAO dirigée par M. J. Cortez, Division des politiques et de la planification de la pêche/Service des institutions internationales et de liaison (FIPL).

2 Y compris la pêche hauturière pratiquée par les flottilles de la région et par les navires de pêche de la Pologne présents dans cette zone.

3 Université nationale des pêches de Pusan. 1996. Fisheries country profile. Pusan, République de Corée.

4 Université nationale des pêches de Pusan, op. cit., note 3.

5 Ibid.

6 Ibid.

7 Ibid.

3. Europe1

La région comprend deux grands groupes de pays: 1. les pays européens industrialisés de l'Union européenne (UE) et de l'Association européenne de libre-échange (AELE), c'est-à-dire l'espace économique européen, ainsi que Malte, Andorre et Monaco; et 2. les anciens pays à économie dirigée - ou pays en transition - de l'Europe centrale et orientale y compris la Fédération de Russie et les autres républiques européennes de l'ex-URSS. Les eaux maritimes bordant ces pays sont l'Atlantique Nord-Est (mer du Nord, mer Baltique, mer de Norvège et mer de Barents incluses), la mer Noire, la mer Méditerranée et le Pacifique Nord-Ouest (mers de Bering et d'Okhotsk).

La production de poisson revêt une grande importance dans nombre de pays de la région, en particulier comme source de devises étrangères dans les Etats en transition et comme source d'emploi au sein des communautés côtières. Les flottilles régionales assurent 16 pour cent de la production halieutique mondiale en volume, soit 17,2 millions de tonnes. La consommation de poisson par habitant varie de niveaux moyens assez élevés dans certains pays méditerranéens et nordiques, c'est-à-dire des disponibilités de poisson pour l'alimentation dépassant 30 kg par an (équivalent poids vif) à des niveaux compris entre 10 et 15 kg par an dans certains pays en transition et pays continentaux. La région est un importateur net, tant en valeur qu'en volume.

RESSOURCES ET PRODUCTION

Pêches en mer

Le total régional des captures en mer s'est élevé à 15,3 millions de tonnes en 19942. La part correspondant aux flottilles de pêche des pays industrialisés a représenté environ 70 pour cent de ce total. La production de la sous - région occidentale est dominée par les captures effectuées dans l'Atlantique Nord-Est, où les principales espèces commerciales comptent notamment le hareng, le lançon, le capelan, la morue, le maquereau, le pilchard, le sprat, le maquereau bâtard, le merlan bleu et le lieu noir. Plus au nord, dans l'océan Arctique Nord-Est et dans la mer de Barents, comme dans les zones de pêche de l'Islande et des îles Féroé, la morue et le capelan sont les espèces les plus couramment exploitées, ainsi que le hareng, l'églefin et le lieu noir. Dans la mer Baltique, les activités de pêche sont consacrées à la morue, au hareng, au sprat et au saumon.

Figure 40 Production halieutique régionale et part en pourcentage de la production mondiale totale

Toutefois, de nombreux stocks de poissons démersaux ont fait l'objet d'une exploitation intensive au cours des dernières décennies et certains des stocks sont considérés à présent comme en dehors des limites de sécurité biologique. Les petites espèces pélagiques sont généralement moins touchées. En outre, la pollution a provoqué une détérioration de l'environnement dans certaines zones côtières de l'Atlantique Nord. Quant au saumon de la mer Baltique, les populations naturelles sont menacées par la maladie et la concurrence des populations d'élevage (encadré 10). En Méditerranée, la plupart des stocks démersaux sont également exploités ou surexploités. Par conséquent, les flottilles de l'Union européenne (UE) pêchent non seulement dans les eaux limitrophes, mais cherchent de plus en plus à pratiquer la pêche hauturière dans les ZEE d'autres pays et les fonds budgétaires affectés à des accords autorisant ce type d'accès ont été récemment augmentés3. De manière analogue, l'Islande et la Norvège pratiquent des activités de pêche dans le cadre d'un certain nombre d'accords bilatéraux.


ENCADRÉ 10
Stocks de saumons sauvages de la mer Baltique

On constate fréquemment une incidence accrue des maladies du poisson dans les zones d'appauvrissement en oxygène des eaux de fond et au voisinage des débouchés des rivières, mais cela se produit à une trop petite échelle pour affecter les stocks de poissons les plus importants du point de vue économique. Il faut néanmoins attirer l'attention sur une exception qui pourrait être celle du saumon dans la mer Baltique. Un syndrome appelé M74 crée actuellement une mortalité collective dans les populations de reproducteurs de saumons, dont seulement un faible pourcentage survit; par conséquent, les reproducteurs doivent être beaucoup plus nombreux qu'auparavant à atteindre les rivières de façon à maintenir les tailles moyennes par tranche d'âge. Le Conseil international pour l'exploration de la mer (CIEM) recommande donc une fermeture complète des pêcheries de saumon sauvage dans la Baltique. Les causes du syndrome M74 sont mal connues, mais elles semblent liées à la contamination des saumons femelles par les substances organochlorées; les facteurs nutritionnels sont également en cause. Les tentatives de protection du saumon sauvage se heurtent à une difficulté supplémentaire: les saumons d'élevage risquent d'envahir les cours d'eau fréquentés par les saumons sauvages s'ils ne sont pas capturés. Le saumon d'élevage représente de 80 à 90 pour cent de la biomasse totale de saumon dans la Baltique et la plupart du temps il est présent sur les mêmes lieux de pêche que le saumon sauvage.

Source: CIEM. 1996. Rapport du Comité consultatif du CIEM sur l'aménagement des pêches, 1995. ICES Cooperative Research Report.

Les principales zones de pêche de la sous-région orientale sont la mer d'Okhotsk et la mer de Bering dans l'océan Pacifique Nord. Les principales espèces exploitées dans l'océan Pacifique Nord sont le lieu de l'Alaska, bien que les quantités débarquées en 1994 aient été de 2 millions de tonnes, soit seulement la moitié du niveau atteint en 1986. Les flottilles des pays en transition opèrent également dans la mer de Barents, principalement les morutiers russes, et dans la mer Baltique les navires de pêche estoniens, lituaniens, lettons et de la Fédération de Russie.

En mer Noire, les captures totales ont enregistré une brutale baisse passant de 913 000 tonnes à 277 000 tonnes de 1988 à 19924, mais elles ont augmenté depuis lors puisqu'elles s'élevaient à 511 000 tonnes en 1994. Cette baisse semble s'expliquer par une modification de l'écosystème sous l'effet d'un certain nombre de facteurs: pêche incontrôlée et intensive, apport d'éléments nutritifs des rivières et des zones littorales et introduction d'espèces exotiques.

Compte tenu du caractère très évolué de la technologie des flottilles de pêche, celles-ci tendent à se caractériser par une forte intensité de capital plutôt que de main-d'œuvre. Toutefois, les investissements consacrés aux navires de pêche des poissons de fond ont généralement diminué ces derniers temps. Ils ont par contre été orientés davantage vers les pêches pélagiques et l'industrie de transformation. Les pêches européennes présentent actuellement une surcapacité critique; d'après une étude récente de l'UE, une réduction de 40 pour cent de la capacité de capture globale s'impose pour ramener la taille de la flottille de pêche à un niveau adapté aux ressources halieutiques disponibles5.

La production maritime des anciens pays à économie dirigée et de l'ex-URSS (sous-région orientale) a diminué, pour passer d'environ 10 millions de tonnes par an au début des années 80, à seulement 4,5 millions de tonnes en 1994. Le pays dont la production halieutique est la plus considérable, à savoir la Fédération de Russie, a produit 3,5 millions de tonnes en 1994. Une des raisons majeures de cette chute brutale tient à la réduction des activités de pêche hauturière; l'ex-URSS, la Pologne, la Roumanie et la Bulgarie possédaient d'importantes flottilles de pêche hauturière et, en 1983, les flottilles de ces pays assuraient quelque 40 pour cent de leur production halieutique. En 1993, cette part était tombée à 20 pour cent. Les flottilles des pays en transition sont généralement anciennes et ont fortement besoin d'être modernisées. La Fédération de Russie a entrepris un programme ambitieux de rénovation de sa flottille de pêche en 1994 et on peut constater certains signes de reprise; ainsi, les captures de la Fédération de Russie et de la Pologne ont augmenté d'environ 20 pour cent en 1995.

Pêches continentales

La production des pêches continentales de capture de la région a diminué de près de 50 pour cent au cours de la décennie écoulée, étant passée de 820 000 tonnes en 1984 à 420000 tonnes en 1994. Les principales espèces comprennent notamment la truite arc-en-ciel, le sprat de la mer d'Azov et la carpe commune. Toutefois, il ne faut pas oublier que les données officielles sur les pêches de capture dans les eaux continentales risquent dans de nombreux cas d'être sous-estimées. La production des activités de subsistance et de loisir est rarement prise en compte avec précision dans les statistiques et ces différents secteurs jouent vraisemblablement un rôle relativement important en matière de disponibilité alimentaire dans les économies en transition. Néanmoins, les captures commerciales ont diminué suite aux changements politiques intervenus dans les anciens pays à économie dirigée et à la disparition de l'infrastructure et des systèmes de distribution. La pollution, les projets d'infrastructure et la concurrence exercée d'autres secteurs pour l'utilisation des ressources aquatiques ont eu également un impact négatif sur la production des pêches. Tous les pays de la sous-région orientale géraient habituellement leurs pêches continentales au moyen de programmes d'empoissonnement et de fertilisation destinés à développer les pêches de capture. Dans la Fédération de Russie, cette activité est encore subventionnée, alors que cette pratique semble avoir disparu dans les autres pays, en raison des difficultés économiques inhérentes à cette période de transition.

Dans les pays industrialisés, les mesures d'aménagement des eaux continentales concernent essentiellement la pêche sportive; la pêche commerciale est secondaire sauf dans les lacs les plus étendus. La reconstitution des populations de certaines espèces telles que la truite arc-en-ciel, l'adoption de lois rigoureuses antipollution et la mise en œuvre de programmes de remise en état comptent fréquemment parmi les éléments constitutifs des programmes d'aménagement de ces pêcheries.

Aquaculture

En 1994, la production aquacole régionale a représenté 6 pour cent et 10 pour cent de la production mondiale totale, respectivement en volume et en valeur. En 1994, 1,5 million de tonnes ont été produites pour une valeur de 3,8 milliards de dollars EU, dont 1,3 million de tonnes dans les pays industrialisés et 195 000 tonnes dans les pays en transition. Dans le premier groupe de pays, près de la moitié de la production se compose de mollusques6, tandis que le second élément par ordre d'importance de la production se compose de poissons diadromes, par exemple de saumons et de truites arc-en-ciel. En fait, le secteur de l'aquaculture a connu une véritable révolution en raison du succès rencontré tout particulièrement par l'élevage du saumon.

Dans la partie orientale de la région, la production totale a diminué de moitié entre 1991 et 1992, en raison des difficultés économiques et sociales posées par l'effondrement du système à économie dirigée. Cette baisse a été observée surtout dans les pays de l'ex-URSS; en revanche, la production est restée plus stable en Hongrie, en Pologne et dans l'ancienne Tchécoslovaquie. L'élevage de la carpe (carpe chinoise et carpe commune) et de divers cyprinidés est très répandu, en dépit de la mise en place progressive d'une production d'espèces de valeur plus élevée; une nouvelle réorientation des activités pourrait ainsi être prévue quand les niveaux de production remontent.

PRODUITS ET MARCHÉS

Pratiquement tous les pays industrialisés européens sont dotés d'un genre ou d'un autre d'industries de transformation, c'est-à-dire d'installations de conserverie, de fumage, de congélation ou d'autres traitements du poisson. Il existe également dans la région une industrie de production de farine de poisson. La production de produits alimentaires prêts à consommer constitue le secteur dont la croissance est la plus rapide au sein de l'industrie de transformation du poisson de l'UE, et les grands distributeurs présents sur le marché s'emploient activement à introduire de nouveaux produits. On constate en outre une évolution dans certains pays en faveur du poisson frais et du poisson réfrigéré et une augmentation des ventes de poisson dans les supermarchés.

Dans les pays en transition, une grande partie de l'industrie de transformation doit être modernisée et exige de nouveaux investissements. Durant l'ère soviétique, certains pays côtiers et certaines républiques du littoral étaient dotés d'une importante industrie de transformation, par exemple l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie, dont une partie seulement est actuellement en service en raison de la chute de leur approvisionnement en matières premières. De plus, dans le passé, la distribution du poisson et des produits de la pêche était assurée par de grandes sociétés d'Etat qui n'ont pas survécu à la période de transition. Le système ancien n'a cependant pas encore été entièrement remplacé, bien que de nouvelles sociétés de distribution privées et des chaînes de supermarchés fassent actuellement leur apparition - par le biais de coentreprises - parallèlement à une infrastructure de distribution en gros. De manière analogue, certaines des usines de transformation ont été modernisées et produisent actuellement des produits à valeur ajoutée conformes aux normes de l'UE applicables aux exportations. Seule la Pologne dispose encore d'importants équipements de transformation en mer; le poisson est ainsi congelé à bord des navires de pêche hauturière et exporté principalement à destination de l'UE.

Figure 41 Utilisation du poisson et disponibilités alimentaires

Figure 42 Importations et exportations de poisson (y compris le commerce intrarégional)

Les niveaux de consommation de poisson présentent de fortes variations d'une sous-région à l'autre et entre les différents pays. Dans l'ensemble de la région, les disponibilités moyennes par habitant de poisson pour l'alimentation étaient de 17 kg (équivalent poids vif) en 1994. Toutefois, dans les pays industrialisés, les disponibilités moyennes atteignent environ 22,5 kg par an, avec des fluctuations, par exemple entre l'Islande, où les disponibilités moyennes de poisson par personne et par an dépassent 90 kg, et l'Albanie, la Bosnie, la Croatie et la République fédérative de Yougoslavie, où les disponibilités sont inférieures à 2 kg. En règle générale cependant, le consommateur a une image positive du poisson et la demande est susceptible d'augmenter à l'avenir. Puisque la production locale ne peut fournir les quantités requises, la région est un importateur net de produits de la pêche. Au sein de l'UE, le poisson est le deuxième article d'importation alimentaire. En revanche, les 12 Etats membres de l'UE assuraient 20 pour cent des exportations mondiales de poisson en 1994 (ce chiffre tenant compte de la valeur du commerce intrarégional).

La pression exercée par les consommateurs sur l'industrie de la pêche en faveur des objectifs de préservation de l'environnement se manifeste depuis peu dans la région. Au nombre des initiatives prises à cet égard il convient de mentionner l'amélioration de l'administration maritime, conformément aux règles d'écoétiquetage définies conjointement par Unilever et le Fonds mondial pour la nature, l'accord entre Unilever et Sainsbury renonçant à l'utilisation de l'huile de poisson provenant des pêches industrielles, le projet d'interdiction des importations de crevettes d'élevage en Suède et enfin les lois sur l'emballage adoptées en Allemagne.

Figure 43 Production halieutique par grands groupes d'espèces

Figure 44 Importations et exportations de poisson des principaux pays pratiquant des échanges en 1994

Dans les pays en transition, la consommation de poisson a brutalement baissé récemment faute d'approvisionnement. Dans la Fédération de Russie, la consommation par habitant est tombée de 29 kg à 9 kg par an entre 1989 et 1993. En ce qui concerne le commerce, la répartition traditionnelle des importations et des exportations a été complètement modifiée ces dernières années. Les pays d'Europe de l'Est et les républiques de l'ex-URSS exportent maintenant de plus en plus d'espèces de valeur élevée pour obtenir des devises étrangères. Les espèces de poisson de fond telles que le lieu de l'Alaska et la morue sont parmi les produits les plus courants. Simultanément, des produits de faible valeur sont importés et les pays en question sont davantage tributaires de ces échanges depuis la chute de la production locale. La région est dans l'ensemble un importateur net de poisson en volume, mais la valeur des exportations a dépassé celle des importations de 1,2 million de dollars en 1994.

POLITIQUE DES PÊCHES ET MESURES D'AMÉNAGEMENT

Dans les nouvelles républiques issues de l'ex-URSS, les administrations des pêches sont des instances gouvernementales récemment constituées alors qu'auparavant la gestion du secteur était centralisée à Moscou. Pendant les années de transition, la structure administrative a généralement fait l'objet de plusieurs changements et peut encore avoir besoin d'être modifiée, par exemple pour répondre à un besoin fréquent de renforcement des capacités socioéconomiques. Bien que ces pays disposent d'excellents spécialistes des sciences naturelles, ils manquent généralement de personnel qualifié dans le domaine des sciences sociales. De plus, il importe d'introduire (ou de réintroduire) la notion de planification du secteur. Jusqu'à présent, les politiques des pêches ont été axées sur le maintien de l'accès aux zones de pêche hauturière, l'amélioration de l'aménagement des pêches dans les zones nationales et, le cas échéant, l'harmonisation des législations nationales avec celles de l'UE. Des efforts ont été déployés pour restructurer et privatiser le secteur des pêches dans tous les pays mais se sont fréquemment heurtés à des difficultés telles que le niveau élevé des taux d'intérêt.

Au sein de l'UE, il existe parallèlement à la politique agricole commune (PAC) une politique commune de la pêche consistant à appliquer «des règles communes dans tous les pays membres de la CE et concernant tous les aspects de l'industrie de la pêche depuis la mer jusqu'aux consommateurs7» (encadré 11).


ENCADRÉ 11
La nouvelle Politique commune de la pêche de l'UE

La Politique commune de la pêche de l'UE a vu le jour en 1983. Elle a évolué depuis lors et a été adaptée continuellement aux éléments nouveaux à l'échelle internationale et aux transformations au sein de l'UE proprement dite. La politique commune des pêches repose sur une conception globale des activités du secteur et concerne l'accès aux ressources, la conservation des stocks de poisson et le suivi des activités de pêche du point de vue de la production, ainsi que la commercialisation des produits de la pêche et la recherche. Les mesures structurelles en constituent une composante importante. L'Instrument financier d'orientation de la pêche (IFOP) et PESCA sont les principaux programmes entrepris. Depuis 1993, ces mesures structurelles ont été intégrées au sein du système de fonds structurels de l'UE (le Fonds européen de développement régional et le Fonds européen social).

Un budget d'environ 2,6 milliards d'Unités monétaires européennes (ECU) pour la période 1994-1999 a été alloué à l'IFOP (établi sur la base d'une Europe constituée de 12 membres); ce programme peut contribuer à financer les initiatives suivantes:

· ajustement de l'effort de pêche (attribution de primes au retrait permanent et à la création de coentreprises et d'opérations en association);

· retrait de flottilles de pêche et modernisation des navires;

· aide aux investissements consacrés à l'aquaculture et à la création de zones marines côtières, aux équipements des ports de pêche, ainsi qu'à la transformation et à la commercialisation des produits de la pêche. Dans chaque cas, la priorité sera donnée aux mesures visant à améliorer la qualité, les conditions sanitaires, l'impact sur l'environnement et les instruments statistiques;

· différentes mesures telles que les activités de promotion et de recherche portant sur les nouveaux débouchés, les mesures adoptées par l'industrie de la pêche (par exemple la gestion des quotas de pêche par une organisation de producteurs ou les retraits temporaires).

PESCA est une initiative qui a été spécialement conçue pour aider les zones géographiques tributaires des pêches. Elle s'attache aux objectifs suivants:

· permettre à l'industrie de la pêche de mener à bien son processus de transformation, en fournissant une aide au secteur s'ajoutant à l'assistance offerte au titre de l'objectif 5a;

· aider l'industrie de la pêche à faire face aux répercussions sociales et économiques en offrant une aide visant à assurer le recyclage et la diversification des activités au sein du secteur;

· contribuer à la diversification des régions côtières concernées, grâce à des programmes de développement de nouvelles activités. De plus et dans certaines circonstances, l'IFOP contribue au financement des programmes nationaux de préretraite à l'intention des pêcheurs.

En 1992, dans le cadre des Programmes d'orientation pluriannuels, de nouveaux objectifs de réduction de la capacité des flottilles de pêche ont été approuvés pour chaque Etat membre de l'UE, destinés à réduire progressivement la capacité de capture - sans pour autant affecter le processus de modernisation des unités de pêche - afin d'améliorer les conditions de sécurité et la conservation du poisson à bord, créant ainsi des conditions plus propices au renforcement de la rentabilité des unités restantes. Les programmes d'orientation pluriannuels ont pour objectif de réduire l'effort de pêche de 20 pour cent en 1996, mesuré en tonneaux de jauge brute (TJB) et en puissance motrice (kilowatts ou kW).

Source: Commission européenne. 1995. Structural policy to assist fisheries and aquaculture. Direction générale de la pêche, XIV. Saint-Jacques de Compostelle, Espagne.

Un certain nombre de systèmes d'aménagement des pêches ont été mis en place dans la région. La politique commune de la pêche de l'UE utilise un système de totaux admissibles de capture et de quotas, complété par des mesures techniques. Dans la mer Baltique, les TAC et les quotas nationaux sont approuvés par la Commission internationale des pêches de la Baltique (IBSFC), sur avis du CIEM, qui fournit également des conseils en matière d'aménagement concernant d'autres parties de l'Atlantique Nord-Est. En Méditerranée, les différents pays établissent des politiques nationales qui diffèrent d'un pays à l'autre en dépit du fait que l'UE assure la coordination des politiques nationales de ses membres, en tenant compte des avis consultatifs du Conseil général des pêches pour la Méditerranée (CGPM). Les mesures d'aménagement portent principalement sur la limitation des licences octroyées et les subventions allouées au secteur, plutôt que sur le contrôle des quotas. On constate par ailleurs une insuffisance certaine des informations disponibles concernant l'état actuel des stocks. Dans la mer Noire, il n'y a ni quotas, ni mesures de limitation de l'effort de pêche, et les flottilles donnent lieu à une surcapitalisation très importante. Une nouvelle convention régissant le fonctionnement d'une commission des pêches de la mer Noire est actuellement en cours de négociation entre les Etats riverains.

Les rejets en mer posent un problème grave dans la région. Le Pacifique Nord-Ouest se caractérise par les plus fortes quantités de rejets en mer à l'échelle mondiale, lesquelles sont estimées à 9,1 millions de tonnes, précédant ainsi l'Atlantique Nord-Est dont les rejets s'élèvent à 3,7 millions de tonnes. Dans l'Atlantique, ce phénomène semble résulter en partie d'un aménagement monospécifique par un système de quotas appliqué à des pêcheries multispécifiques, encourageant ainsi des pratiques de sélection des prises de valeur élevée et de rejets en mer, qui affectent parfois près de 50 pour cent des captures démersales, bien que l'absence générale d'observateurs à bord des navires de pêche commerciaux ne facilite pas la quantification des pratiques en question. La Norvège, qui compte parmi les principaux pays pratiquant la pêche dans cette région, a adopté une politique de suppression des rejets en mer (encadré 12). En Méditerranée et dans la mer Noire, les problèmes de rejets sont vraisemblablement moins graves, sauf en ce qui concerne la pêche au filet maillant à grande échelle qui est toujours pratiquée, en dépit de l'interdiction prononcée par les Nations Unies.


ENCADRÉ 12
Politique norvégienne d'élimination des rejets en mer

En 1983, la Norvège a adopté une nouvelle loi concernant les rejets en mer des pêches marines. Aux termes de cette législation, le rejet du poisson en mer est justifié à condition qu'il survive. Or, cette éventualité est exceptionnelle; dans la plupart des cas, les poissons capturés sont morts ou sur le point de mourir après avoir été rejetés en mer. Puisque cette pratique est un gaspillage de précieuses ressources halieutiques, la Norvège a complètement interdit le rejet en mer de toutes les espèces présentant une valeur économique élevée. Cette mesure de conservation a conféré à la Norvège un rôle précurseur dans ce domaine et a reçu le soutien de la Fédération de Russie, qui partage d'importants stocks de poissons avec la Norvège dans la mer de Barents. De plus, le Canada, l'Islande et les îles Féroé ont adopté des mesures analogues dans leurs zones respectives de 200 milles, d'après le modèle norvégien. L'interdiction des rejets en mer et l'interdiction légale de débarquer la totalité des captures visent à assurer tant une gestion judicieuse des stocks en bon état que l'observation des quotas fixés.

Une interdiction des rejets en mer est évidemment difficile à mettre en œuvre sans une surveillance constante de toutes les activités de pêche. Toutefois, l'existence même d'une interdiction a contribué à modifier l'attitude des pêcheurs à l'égard des rejets en mer. Pour surmonter le problème des rejets en mer d'alevins et pour tenir compte des conditions réelles d'exploitation des pêcheries multispécifiques, l'interdiction a été complétée par des mesures de conservation telles que des fermetures temporaires des zones de pêche et l'amélioration de la sélectivité des engins de pêche. En résumé, la politique entreprise a eu un impact positif en termes d'amélioration de l'exploitation des ressources marines.

Source: Direction des pêches de Norvège. 1996. Correspondance adressée à la FAO.

Les organisations et les arrangements de gestion des pêches de l'Atlantique Nord-Est se heurtent à différents problèmes tels que la pollution, la production d'informations inexactes, et les défauts de mise en application. Le Groupe de travail pour la mer du Nord8 a entrepris l'un des rapports d'état les plus exhaustifs jamais effectués pour un écosystème marin et formulé des recommandations pour l'élaboration d'une stratégie visant à protéger les espèces et les habitats9.

L'un des principaux problèmes rencontrés est celui des «débarquements occultes», c'est-à-dire les débarquements non signalés effectués pour échapper aux limitations des quotas. Parmi les efforts déployés pour renforcer les capacités de suivi, de contrôle et de surveillance, il y a lieu de citer l'utilisation de systèmes de surveillance des navires, et l'UE prévoit de mettre en place des vérifications supplémentaires après-capture des registres et des documents commerciaux.

Les méthodes traditionnelles de gestion consistant à limiter les captures ont échoué à plusieurs reprises en matière de réduction de la mortalité des poissons dans l'Atlantique Nord-Est et se trouvent à présent largement discréditées. Une importante réduction de la capacité des flottilles jointe à un recours élargi à la limitation directe de l'effort de pêche, telle que l'UE l'envisage actuellement, pourrait s'avérer plus efficace.

PERSPECTIVES

La demande de poisson est susceptible d'augmenter à l'avenir, compte tenu de l'image positive du poisson en tant qu'aliment dans la partie occidentale de la région et du retour au niveau de consommation antérieur dans la partie orientale. Toutefois, une rapide reprise de la consommation exigerait des approvisionnements en produits peu coûteux.

La production de poisson dans les pays en transition, en particulier la Fédération de Russie, pourrait bientôt cesser de diminuer et commencer à amorcer une lente reprise. Une industrie de la pêche revigorée présentera des caractéristiques très différentes par comparaison aux années 80; ainsi, le secteur de la pêche hauturière ne jouera vraisemblablement qu'un rôle mineur et l'accent sera mis davantage sur une meilleure utilisation des ressources dans les eaux nationales. Un programme de restructuration judicieusement conçu devrait comporter la rénovation des flottilles - d'ores et déjà entreprise dans la Fédération de Russie - ainsi qu'une réduction de la surcapacité.

Les perspectives futures de la pêche dans les pays industrialisés dépendent principalement de l'efficacité des mesures d'aménagement adoptées dans l'Atlantique Nord-Est. Tel qu'indiqué ci-dessus, l'élimination des capacités excédentaires et l'exercice d'un contrôle plus direct de l'effort de pêche pourraient constituer les deux éléments d'un programme d'amélioration de l'aménagement.

Les ressources halieutiques continentales sont d'ores et déjà considérablement exploitées, et leur vocation majeure passe progressivement de la production alimentaire aux activités de loisir. Toutefois, leur aménagement plus judicieux permettrait d'augmenter dans certains cas la production de poisson pour l'alimentation à partir des eaux continentales - en particulier dans les pays en transition. Bien que la production aquacole puisse augmenter dans les pays de l'Europe de l'Ouest, elle sera probablement restreinte par la disponibilité limitée de sites de pêche, les utilisations concurrentes des ressources aquatiques, la réglementation plus rigoureuse de l'environnement et les importations à meilleur marché provenant d'autres régions. Toutefois, compte tenu des marchés potentiels présents dans les pays industrialisés, la production aquacole dans les pays en transition est susceptible de s'étendre à l'élevage d'espèces de valeur plus élevée telles que le saumon et l'anguille.

Le commerce des produits de la pêche a continué d'augmenter, mais à un rythme plus lent au cours des trois dernières années. Pour répondre à la demande future, la région dans son ensemble restera un importateur net de poisson.

1 Cet examen s'appuie sur l'étude régionale préparée par l'équipe spéciale interdépartementale de la FAO dirigée par M. R. Grainger, Unité de l'information, des données et des statistiques sur les pêches (FIDI).

2 Y compris la production de la pêche hauturière.

3 Fishing News International. 1996. Review of Europe's fishing deal.

4 Les captures totales en mer Noire incluent les captures des pays ne faisant pas partie de cette région.

5 Rapport du Groupe d'experts indépendants chargés de conseiller la Commission européenne au sujet de la Quatrième génération de Programmes d'orientation pluriannuels. 1996.

6 Il y a lieu de signaler qu'en ce qui concerne les mollusques, environ 10 pour cent seulement du poids brut est effectivement consommé; ainsi la plus grande partie du tonnage produit est constituée de coquilles.

7 Commission européenne. 1994. The new Common Fisheries Policy. Direction générale de la pêche, XIV, Luxembourg.

8 Le groupe de travail se compose des huit Etats riverains de la mer du Nord: l'Allemagne, la Belgique, le Danemark, la France, la Norvège, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et la Suède ainsi que des représentants concernés de la Commission européenne.

9 North Sea Task Force. 1993. North Sea Quality Status Report. 1993.

4. Amérique latine et Caraïbes1

La région comprend le continent sud-américain, ainsi que l’Amérique centrale et le Mexique, outre les Etats insulaires et les territoires des Caraïbes. La région est entourée par les parties sud de l’océan Atlantique et de l’océan Pacifique et comprend également les mers semi-fermées du golfe du Mexique et de la mer des Caraïbes.

La production halieutique de l’Amérique latine et des Caraïbes a culminé en 1994 à 24 millions de tonnes, soit 22 pour cent du total mondial. Les petites espèces pélagiques représentent quelque 75 pour cent des captures totales. La contribution du secteur à l’économie est essentiellement concentrée dans les régions côtières rurales où il constitue la principale - et parfois seule - source d’emploi et de revenus; sur le plan national, il joue cependant un rôle mineur. La consommation de poisson pour l’alimentation a été inférieure à la moyenne mondiale, puisque les disponibilités par habitant sont d’environ 9 kg par an (équivalent poids vif). Les pays d’Amérique latine sont de gros exportateurs de poisson et de produits de la pêche et assurent 11 pour cent des exportations mondiales, le Chili étant le premier exportateur net. Les exportations se composent essentiellement de crevettes et de farine de poisson.

RESSOURCES ET PRODUCTION

Pêches en mer

Les quantités débarquées totales des pêches marines de la région se sont élevées à 23,1 millions de tonnes en 1994, dont 85 pour cent provenaient du Pacifique Sud-Est où les captures ont atteint un niveau record cette même année. La production totale est encore dominée par l’anchois du Pérou et les fluctuations du volume total des captures sont imputables à la variabilité propre à cette espèce. Les captures des pêcheries d’anchois ont brutalement diminué dans les années 70, passant de 13,1 millions de tonnes en 1970 à 1,7 million de tonnes en 1973, avant de tomber à 94 000 tonnes en 1984. Depuis cette date, le stock s’est reconstitué et les quantités débarquées ont atteint 11,9 millions de tonnes en 1994. L’intensité de l’effort de pêche a certes joué un rôle prépondérant dans l’épuisement du stock, mais le changement climatique dû au phénomène El Niño a également été l’une des principales causes de la défaillance du recrutement et de l’appauvrissement du stock (encadré 13). Bien que l’on signale à présent la pleine exploitation des deux principaux sous-stocks d’anchois du Pérou, il est indispensable de prendre des mesures rigoureuses de suivi et de surveillance afin d’éviter toute situation de surpêche.


ENCADRÉ 13
Effets environnementaux sur les pêches marines et en particulier dans le cas du phénomène El Niño

La région Amérique latine et Caraïbes, en particulier la côte occidentale de l’Amérique centrale et du Sud, semble vulnérable aux modifications de l’environnement sur les stocks de poissons de mer. Les fluctuations très violentes observées à l’échelle décennale dans l’océan Pacifique ont gravement affecté l’abondance générale et la production totale de petits pélagiques, comme de différents stocks.

L’impact sur l’environnement du phénomène El Niño s’avère particulièrement important: le phénomène El Niño de 1972/73 a contribué à l’effondrement des pêches d’anchois péruviens et celui de 1982/83 a eu des répercussions préjudiciables sur l’abondance de poisson et la production effective dans toute la zone du Pacifique. Toutes les espèces de poissons ont été touchées. En outre, les variations dans la répartition générale et dans l’abondance locale des encornets, des thons, des crevettes côtières, des merlus et d’une gamme relativement vaste d’espèces, signalées tant sur le littoral pacifique que sur le littoral atlantique du continent américain, pourraient être dues aux changements survenus dans les oscillations méridionales du phénomène El Niño.

La progression des eaux de l’Antarctique dans l’Atlantique Sud-Ouest, les ouragans et les typhons dans les Caraïbes et différents changements décennaux des conditions environnementales sont d’autres exemples d’effets dus à l’environnement.

Il est manifestement indispensable de s’employer à améliorer les capacités de prévision de tels changements, aussi bien pour réduire leurs répercussions préjudiciables sur les pêcheries que pour bénéficier de certains de leurs effets positifs éventuels. (Voir aussi encadré 8 p. 59).

Source: FAO. 1994. Examen de l’état des ressources ichtyologiques marines mondiales. FAO, Document technique sur les pêches n° 335. Rome; et autres sources.

Les stocks d’autres petits pélagiques, tels que le pilchard du Chili, le chinchard du Chili et le maquereau, ont commencé à augmenter lors de l’effondrement des pêches d’anchois du Pérou. Les deux premières espèces constituent actuellement les principaux éléments de la production dans cette zone. On estime toutefois que les stocks de pilchards sont pleinement exploités et même surexploités dans une partie du secteur qu’ils occupent.

Dans l’Atlantique Sud-Ouest la production a augmenté récemment. Les principales espèces sont l’encornet et le merlu, suivis des basses, des congres et de différents démersaux. Les encornets, les crevettes, les langoustes et les crabes, et d’autres petits pélagiques, tels que la sardine et l’anchois d’Argentine, sont également pêchés. Jusqu’aux années 80, cette zone a compté parmi les principales zones de pêche mondiales et présentait un important potentiel de développement, mais depuis, plusieurs pêches hauturières industrialisées se sont créées et la plupart des stocks de poisson sont à présent considérés comme pleinement exploités, certains ayant été surexploités au cours des dernières années.

Figure 45 Production halieutique régionale et part en pourcentage de la production mondiale totale

Dans la zone Atlantique Centre-Ouest, la plupart des pêches pélagiques, dont le brochet, le thon et l’espadon, sont pleinement exploitées ou surexploitées. Les poissons osseux, en particulier les requins et les raies, suscitent actuellement des inquiétudes communément répandues, et nombre d’espèces de poissons coralliens ont été pleinement exploitées ou surexploitées, comme l’a été le strombe rose. Dans le Pacifique Centre-Est la production de poisson a généralement diminué en dépit d’une légère augmentation entre 1993 et 1994. La diminution la plus nette des captures depuis le milieu des années 80 a été celle des pêcheries d’anchois de Californie et de sardine, qui a entraîné une baisse de la production mexicaine. Par ailleurs, la production de thon et de divers grands pélagiques a légèrement augmenté au cours des 20 dernières années. Dans toute cette zone la crevette et le bouquet donnent lieu à des pêches de valeur élevée et d’une grande importance.

Alors que dans le passé la région de l’Amérique latine a été fortement tributaire des importations de construction navale et d’équipement de pêche, on a observé récemment un transfert accru de technologie vers cette région, en provenance de l’Europe du Nord en particulier. A l’heure actuelle, ses chantiers navals sont en mesure de construire et d’armer des navires de pêche, conformément à des normes de qualité rigoureuses tandis que les industriels locaux peuvent fabriquer n’importe quel type d’engin de pêche et d’équipement de manutention. Les grands navires modernes équipés de sennes coulissantes construits par les chantiers navals du Pérou et du Chili témoignent de ce transfert de technologie. Dans la partie sud du Pacifique, la pêche à la senne coulissante de petits pélagiques est réalisée à très grande échelle et vise essentiellement à fournir la matière première nécessaire au fonctionnement des usines de farine et d’huile de poisson. Dans la partie nord, la pêche au chalut de la crevette est plus répandue. Sur le littoral atlantique, les principales méthodes de capture vont de la pêche au chalut de la crevette et des espèces démersales, avec des navires de capacité moyenne dans la région située au nord de l’Amazone, à la pêche au chalut à plus grande échelle dans les eaux benthiques et dans les eaux intermédiaires, au moyen de grands chalutiers équipés d’installations de congélation au sud du Rio de la Plata. En outre, une pêche saisonnière à la senne coulissante axée sur les petits pélagiques est pratiquée au sud du Brésil et il existe d’importantes pêcheries au thon du même type au Venezuela. La pêcheries à la palangre est également pratiquée le long du littoral.

Dans les petits Etats insulaires des Caraïbes, les pêches sont essentiellement des activités artisanales à petite échelle, utilisant des engins passifs tels que lignes à hameçon, filets maillants et cages. Dans la plupart des cas, les navires des pêcheurs artisanaux sont construits par des méthodes traditionnelles pour l’exploitation des ressources démersales et des crustacés au voisinage des îles.

D’après les données des Services d’information maritime de la loyd, la flottille de pêche d’Amérique latine s’est développée à un taux annuel d’environ 5 pour cent au cours de la dernière décennie. Même sans tenir compte des inscriptions maritimes libres du Panama et du Honduras, on a constaté une augmentation du nombre de grands navires de la région. Ainsi, le registre d’inscription de la loyd fait apparaître 3 156 navires dont le tonnage dépasse 100 tonneaux de jauge brute (TJB) inscrits dans la région en 1995, contre 2 238 en 19852. Ce développement de la flottille de pêche industrielle s’est traduit par une capacité de capture excédentaire qui pose actuellement un problème, même dans plusieurs pêcheries de merlus et de crevettes tropicales.

Pêches continentales

Suite à une croissance rapide de la production des pêches continentales jusqu’en 1987, date à laquelle les captures régionales totales ont atteint 580 000 tonnes, les captures se sont stabilisées ou ont même diminué pour tomber à environ 450 000 tonnes en 1991. En 1994, les captures totales déclarées ont atteint quelque 500 000 tonnes, soit un niveau nettement inférieur au rendement potentiel des eaux intérieures du continent et bien en deçà de la production notifiée dans des régions tropicales analogues en Afrique et en Asie. Cela tient peut-être en partie à la qualité insuffisante des données statistiques (en règle générale les données correspondant aux activités de subsistance et de loisir ne sont pas prises en compte), mais est vraisemblablement surtout imputable à une productivité généralement basse.

Les pêches continentales sont concentrées au voisinage des principaux cours d’eau. En dépit du faible niveau d’exploitation, certaines zones localisées présentent des signes de surexploitation. A différents endroits, les effets de la surexploitation ont été aggravés par la détérioration de l’environnement. Trois principaux systèmes d’exploitation caractérisent la région: au sud, c’est-à-dire en Argentine, au Chili et dans une partie du Brésil, les pêcheries commerciales ont actuellement été fermées et les ressources sont surtout réservées aux activités de loisir et de subsistance. Dans la partie centrale, les pêches commerciales pratiquées dans les rivières et les retenues d’eau présentent un caractère moins intensif; et dans la partie nord, en particulier dans le polygone de sécheresse du Brésil, à Cuba et au Mexique, on constate une tendance croissante à une exploitation intensive des retenues d’eau par des mesures d’empoissonnement et d’introduction d’espèces, à la suite desquelles ces secteurs ont enregistré le plus fort taux de croissance de ces dernières années.

La plupart des îles des Caraïbes ne possèdent pas d’eaux intérieures étendues; aussi, les pêches intérieures y sont-elles pratiquement inexistantes.

Aquaculture

En 1994, la production aquacole totale a atteint 472 000 tonnes, soit respectivement 2 et 5 pour cent de la production mondiale en volume et en valeur. L’aquaculture représente une contribution analogue à la production régionale totale des pêches et six pays assurent la plus grande partie de la production. L’élevage de la crevette a progressé très rapidement et représentait plus de 80 pour cent de la production régionale totale en valeur en 1994. L’élevage du saumon s’est également développé, bien qu’il soit limité pratiquement au Chili. Toutefois, les marges bénéficiaires réalisées grâce à ces deux espèces ont diminué. L’élevage des poissons d’eau douce et des coquillages est également pratiqué, notamment de tilapias, de truites et de carpes.

L’aquaculture industrielle vouée à l’exportation s’est développée dans une proportion importante et présente encore un certain potentiel de croissance. Enfin, l’aquaculture orientée vers la production d’espèces peu coûteuses s’est légèrement intensifiée.

PRODUITS ET MARCHÉS

Les niveaux de consommation de poisson varient d’un pays à l’autre, ainsi qu’à l’intérieur de chacun des différents pays considérés. La moyenne régionale des disponibilités par habitant de poisson pour l’alimentation est proche de 9 kg par an (équivalent poids vif), ce qui est nettement en dessous de la moyenne mondiale d’environ 13 kg. Toutefois, la consommation s’est accrue au cours des dernières décennies. Pour quelque 5 pour cent de la population (les habitants des îles anglophones des Caraïbes et ceux du Chili), les disponibilités annuelles par habitant atteignent 30 kg. A l’inverse, dans la plupart des pays d’Amérique centrale, ce chiffre est inférieur à 5 kg par an. Aussi, la contribution des produits de la pêche aux disponibilités en protéines animales s’avère-t-elle moins critique en Amérique latine que dans beaucoup d’autres pays en développement, bien que le poisson reste une denrée alimentaire vitale dans certaines communautés locales.

L’abondance des petits pélagiques assure l’existence d’une importante industrie du poisson en Amérique latine, où plus des deux tiers des captures totales ne sont pas destinées à l’alimentation humaine. Les principaux articles en question sont la farine et l’huile de poisson utilisées comme produits d’alimentation animale dans les secteurs de l’élevage, de l’aviculture et de l’aquaculture. Au Chili, au Pérou et dans une moindre mesure en Equateur, la plus grande partie de cette matière première est transformée en farine de poisson. Les autres utilisations non alimentaires, par exemple la production d’appâts et d’aliments pour animaux d’appartement, ne représentent pas des parts substantielles de la production des pêches. Des efforts de longue haleine ont été entrepris pour limiter les quantités destinées à la production de farine de poisson et pour trouver d’autres possibilités d’utilisation pour la consommation humaine directe. Jusqu’à présent, cette orientation n’a pas donné lieu à des succès durables et n’a pas démontré sa faisabilité économique, en raison principalement de la concurrence exercée par l’utilisation comme matière première de la farine de poisson et des hésitations à investir dans des activités de développement des marchés.

Figure 46 Utilisation du poisson et disponibilités alimentaires

Figure 47 Importations et exportations de poisson (y compris le commerce intrarégional)

Les captures destinées à la consommation humaine directe se composent dans une forte proportion de poisson frais (par exemple, de plus de 50 pour cent), de poisson congelé et de poisson en conserve dans des proportions voisines de 20 pour cent dans l’un et l’autre cas. L’utilisation des disponibilités de poisson en fonction du type de transformation préalable a généralement évolué dans le passé selon les ressources disponibles et des mécanismes de marché, en particulier la demande internationale. Bien que le marché international joue encore un rôle prépondérant, l’industrie de la pêche semble à présent davantage soucieuse d’adapter rapidement les technologies disponibles aux tendances marquantes du marché intérieur. Naturellement, l’utilisation du poisson varie au niveau sous-régional. Dans les Caraïbes, elle est également tributaire des besoins du tourisme.

Figure 48 Production halieutique par grands groupes d’espèces

Figure 49 Importations et exportations de poisson des principaux pays pratiquant des échanges en 1994

Les pays d’Amérique latine sont de grands exportateurs de poisson et de produits de la pêche puisqu’ils assurent 11 pour cent des exportations mondiales. Equipée d’installations modernes de transformation, la région est en mesure de fabriquer des produits conformes aux normes internationales et de garantir la fourniture de produits sains et équilibrés. Les exportations sont composées surtout de crevettes et de farine de poisson. Le Chili et le Pérou dominent le marché mondial de la farine de poisson et leurs exportations sont destinées essentiellement au marché asiatique, tandis que le Mexique et l’Equateur sont des exportateurs de crevettes. La plupart des exportations de crevettes d’Amérique latine sont destinées au marché des Etats-Unis; c’est seulement depuis peu que les exportateurs de crevettes de l’Equateur ont réussi à pénétrer le marché européen. Alors que les exportations mexicaines de crevettes se composent essentiellement de crevettes sauvages, les exportations de l’Equateur sont constituées en quasi-totalité de crevettes d’élevage. Le thon compte traditionnellement parmi les principales exportations de poisson. Toutefois, l’application de la politique de préservation des dauphins adoptée par le Gouvernement des Etats-Unis en 1991 a posé de graves problèmes aux pêcheries de thon d’Amérique latine.

En tant qu’importateurs de poisson, les pays d’Amérique latine ne représentent que 2 pour cent environ du total mondial. Le commerce intrarégional est par ailleurs encore très limité.

POLITIQUE DES PÊCHES ET MESURES D’AMÉNAGEMENT

Dans la plupart des pays, la politique des pêches a été fortement influencée par les mesures macroéconomiques qui font partie des programmes de stabilisation. Parmi ces mesures figurent la privatisation des unités de production, la promotion du commerce extérieur, la réduction ou l’élimination des mesures d’incitation économique et l’encouragement aux investissements étrangers dans le secteur des pêches. Ces mesures ont également eu pour but de rationaliser les mesures administratives et techniques des administrations publiques, notamment de l’administration des pêches. Au cours de la période de transition, les capacités de recherche et de gestion de l’administration des pêches ont été affectées en termes d’étendue des responsabilités, d’allocations budgétaires et de dotations en personnel technique et administratif. Récemment, la situation semble s’être améliorée dans plusieurs pays.

La plupart des pays de la région pratiquant la pêche ont adopté des dispositions juridiques destinées à réglementer et à limiter l’accès à leurs principales zones de pêche par différents types de systèmes d’octroi de licence qui régissent ou limitent le nombre total de navires, de pêcheurs, d’équipements, de puissances motrices totales ou de différentes mesures de la capacité de capture susceptibles d’être déployées dans la plupart des pêcheries importantes. De ce fait, les pêcheries dont l’état d’exploitation maximal ou proche du niveau maximum a été reconnu sont en principe soumises à un régime d’accès restreint, c’est-à-dire interdisant l’accès à tout nouveau bâtiment de pêche, sinon pour remplacer un bâtiment déjà présent. Certains pays utilisent également des systèmes de quotas individuels pour répartir l’accès aux ressources et exercer ainsi un contrôle sur la capacité de capture. Les régimes de contingents individuels transférables ne sont actuellement en vigueur dans aucun pays de la région. Toutefois, plusieurs pays envisagent d’instituer des contingents individuels transférables dans certaines pêcheries après évaluation des aspects techniques et socioéconomiques en cause.

Les législations nationales visant à exercer un contrôle sur la capacité de capture n’ont pas toujours été efficaces dans la région. Bien que la législation actuellement en vigueur puisse être appropriée, une surveillance inexistante ou trop permissive et des méthodes d’application indéfinies ou trop floues risquent d’être une cause majeure de capacité excédentaire dans certaines pêcheries hautement rentables.

Différents organismes régionaux constituent le cadre institutionnel régional de coopération, d’aménagement et de développement des pêches. Ces organismes sont complètement ou partiellement différents les uns des autres sur le plan du statut juridique, de la composition, des domaines de compétences, des attributions et de la couverture géographique. Deux d’entre eux sont des organes de la FAO: la Commission des pêches pour l’Atlantique Centre-Ouest (COPACO) et la Commission des pêches continentales pour l’Amérique latine (COPESCAL); les autres sont des organisations intergouvernementales extérieures à la FAO, c’est-à-dire l’Organisation des Etats des Caraïbes Orientales (OECO), la Communauté des Caraïbes et le Marché commun des Caraïbes (CARICOM), la Commission permanente du Pacifique Sud (CPPS) et l’Organisation latino-américaine de développement des pêches (OLDEPESCA).

Les pêches d’Amérique latine représentent généralement un pourcentage assez faible des quantités totales rejetées en mer, puisqu’il est estimé à environ 5 pour cent. Ce chiffre relativement bas est dû principalement à l’importance des quantités débarquées par le Pérou et le Chili d’espèces destinées à la fabrication de farine de poisson, qui donnent lieu à des rejets en mer très faibles, voire nuls. Les valeurs rapportées des quantités débarquées par ces deux pays s’élèvent à 18,6 millions de tonnes de sardines, d’anchois et de chinchards destinés principalement à leurs industries de farine de poisson, de telle sorte que les captures résiduelles de la zone sont inférieures à 4,8 millions de tonnes. Toutefois, il importe de passer en revue les productions résiduelles de ces pêcheries (encadré 14).


ENCADRÉ 14
Problème des prises accessoires en Amérique du Sud et en Amérique Centrale

Les prises accessoires et les rejets en mer dans la région Amérique latine et Caraïbes posent trois problèmes particuliers: les prises accessoires de poissons de fond et de tortues pendant les opérations de pêche à la crevette et les prises accessoires de dauphins pendant la pêche au thon.

La pêche à la crevette est connue de longue date pour l’importance des rejets en mer des prises accessoires constituées de poissons de fond et de tortues. Puisque dans nombre de cas il s’agit d’alevins, l’abondance et la durabilité des stocks en question sont menacées. Les pêcheries de crevettes du Brésil et du Mexique offrent d’excellents exemples des mesures adoptées pour résoudre ce problème. Des chaluts multiples à angle d’ouverture réduit ont été utilisés, permettant d’obtenir une meilleure sélectivité et une plus grande efficacité des opérations de pêche. Les prises accessoires ont été réduites de 18 pour cent et les captures de crevettes ont augmenté de 5 pour cent. Toutefois, les chalutiers traditionnels sont toujours présents dans les pêcheries côtières où les prises accessoires servent à la consommation humaine.

Le Conseil national de la recherche des Etats-Unis a décrit le problème des prises accessoires de la pêche au chalut de la crevette comme la principale cause artificielle de mortalité des tortues. De nombreux dispositifs visant à réduire les rejets en mer des prises accessoires de tortues (dispositif de ségrégation des tortues) ont été mis au point et continuent à l’être. Il est possible de limiter les captures de tortues dans une proportion de 97 pour cent grâce à des dispositifs de ce type. Suite à une interdiction par les Etats-Unis des importations de crevettes provenant des pays n’utilisant pas de dispositifs de ségrégation afin de préserver les stocks de tortues, certains pays de la région ont fait de même, et le Mexique et le Venezuela par exemple ont imposé en 1993 l’utilisation des dispositifs de ségrégation des tortues.

Les captures de dauphins, lors des pêches au thon pratiquées dans les zones tropicales du Pacifique Est sont un sujet de préoccupation depuis un certain temps. Ainsi, depuis le début des années 70, les populations de dauphins semblent s’être stabilisées suite aux efforts concertés pour limiter les prises accessoires: formation des patrons de pêche à l’exécution de procédures de remise en eau; aide aux dauphins capturés dans les filets; et réalisation des modifications appropriées des engins de pêche. Le Programme international de conservation des dauphins a permis de préserver les stocks tandis que les importations aux Etats-Unis de thon provenant de pays participant à ce programme sont encouragées.

Les rejets en mer de prises accessoires et leur impact sur différents stocks exigent manifestement l’adoption de mesures. Il est urgent de veiller à ce que les équipements et les pratiques de pêche assurent une utilisation durable des ressources au profit des populations dont la subsistance et les générations futures sont tributaires des pêches.

Source: FAO. 1994. A global assessment of fisheries by-catch and discards. FAO, Document technique sur les pêches no 339. Rome.

La détérioration de la zone côtière a pour effet de réduire le potentiel de pêche à de nombreux endroits, en particulier au sein des pêcheries à petite échelle. Celles-ci continuent à jouer un rôle clé en matière de nourriture et d’emplois dans les zones côtières marginales. Par conséquent, plusieurs pays prennent des mesures pour mettre en place des approches d’aménagement intégré des zones côtières à titre d’alternative à d’autres systèmes d’aménagement des ressources.

PERSPECTIVES

La consommation de poisson en Amérique latine et aux Caraïbes a augmenté progressivement au cours des 20 dernières années et continuera probablement d’augmenter à l’avenir. Compte tenu des perspectives de croissance démographique et économique, on estime que la demande aura augmenté d’environ 2 à 3 millions de tonnes d’ici à l’an 2010.

L’accroissement des disponibilités pourrait provenir d’une diminution des rejets en mer et des pertes après-capture. Une plus forte utilisation des petits pélagiques pour la consommation humaine directe pourrait constituer un enjeu décisif pour la région, mais cette option devra être fondée sur un examen de sa faisabilité économique, technologique et commerciale. Quant à l’accroissement des quantités débarquées, les espèces marines exploitées commercialement ont déjà atteint en règle générale un niveau d’exploitation avancé et devront faire l’objet d’un meilleur aménagement pour pouvoir répondre à la demande future. De plus, la production de poisson dans la région Amérique latine et Caraïbes variera en fonction de l’abondance des stocks de petits pélagiques.

Les tendances actuelles de la production des pêches continentales seront probablement plus marquées à l’avenir. Dans la partie sud de cette région, en Argentine, au Chili et dans certaines régions du Brésil, la tendance à fermer certaines pêcheries à l’exploitation commerciale et à les réserver aux activités de loisir et de subsistance se confirmera. Dans la partie centrale, les pêches commerciales exploitant les rivières et les retenues d’eau poursuivront généralement leurs activités, caractérisées par une faible productivité. Dans le nord et en particulier dans le polygone de sécheresse du Brésil, à Cuba et au Mexique, une gestion plus intensive des retenues d’eau par des mesures d’empoissonnement et d’introduction d’espèces se poursuivra probablement. Compte tenu de ces tendances, il sera possible d’obtenir une production accrue sous réserve d’une gestion prudente et d’un assainissement des retenues d’eau d’Amérique latine.

L’aquaculture industrielle tournée vers l’exportation s’est développée notablement dans la région et comporte encore des possibilités de croissance limitées. Les autres types d’aquaculture tels que les étangs d’élevage dans des réservoirs, l’élevage de poissons en eau douce, l’élevage de coquillages et de plantes aquatiques, se sont moins développés prévu. Le potentiel régional en matière d’aquaculture ne procède pas seulement des ressources disponibles (eau, terre, littoral, température, agriculture, etc.), mais aussi des capacités existantes en matière de structures institutionnelles, de recherche et d’esprit d’entreprise. La plupart des difficultés responsables de la lenteur du développement de l’aquaculture mettent en cause ces facteurs. Le développement restreint de l’aquaculture à vocation sociale, comme de l’aquaculture tournée vers la production de produits de faible valeur à l’intention des catégories sociales à faibles revenus, est une conséquence importante de cette situation. Aussi, un défi futur consistera-t-il à instituer des mesures visant à utiliser au mieux les possibilités existantes pour mettre en place ces types de production aquacole.

Les pays consommateurs de poisson, en particulier aux Caraïbes, resteront tributaires des importations, bien qu’un meilleur aménagement de leurs ressources et l’exploitation des grands pélagiques puissent alléger quelque peu leurs dépenses d’importation. Parallèlement, d’autres produits alimentaires peuvent, dans une certaine mesure, se substituer au poisson.

Vu le rôle déterminant de la demande internationale sur le plan des quantités et des valeurs unitaires, ainsi que l’orientation de l’industrie régionale vers les marchés étrangers, la valeur des importations de poisson devrait continuer à croître. A cet effet, une condition importante à remplir est de veiller à ce que les mesures macro-économiques et les politiques sectorielles continuent à maintenir la compétitivité des produits régionaux. La tendance à intensifier la production de produits à valeur ajoutée, au lieu de vendre simplement des matières premières destinées à des industries de transformation, se poursuivra vraisemblablement dans les années à venir. Les mesures liées au commerce et à l’environnement pourraient créer des difficultés économiques dans certains secteurs de l’industrie de la pêche, par exemple à cause des prises accessoires de dauphins et de tortues, qui accompagnent respectivement la pêche au thon et à la crevette.

1 D’après l’étude régionale préparée par l’équipe spéciale interdépartementale de la FAO dirigée par M. A. Gumy, Division des politiques et de la planification de la pêche/Service de la planification et du développement (FIPP).

2 Si l’on fait abstraction des flottilles du Honduras et du Panama, les chiffres correspondants sont de 2 152 en 1995 et 1 787 en 1985.

5. Amérique du Nord1

La région comprend le Canada, le Groenland et les Etats-Unis (Caraïbes et îles du Pacifique Sud non comprises, mais avec les Bermudes, Saint-Pierre-et-Miquelon, et l’Alaska) et les zones de pêche adjacentes de l’Atlantique Nord-Ouest et de l’Atlantique Centre et du Pacifique Nord-Est. Compte tenu de la composition des données disponibles, l’étude porte essentiellement sur la situation au Canada et aux Etats-Unis.

Avec une production totale de 7,1 millions de tonnes en 1994, la région assure quelque 6 pour cent des captures mondiales de poisson. Les quantités débarquées des pêches commerciales en mer ont enregistré certaines fluctuations au cours de la décennie écoulée, marquée par une baisse des captures dans l’Atlantique Nord. L’aquaculture et les pêches de loisir présentent par contre une tendance plus régulière à la croissance. La consommation de poisson pour l’alimentation correspond à des disponibilités moyennes par habitant de 22 à 23 kg (équivalent poids vif par an), et elle est restée assez stable ces dernières années. Les Etats-Unis en particulier, mais aussi le Canada, comptent parmi les premiers importateurs et parmi les principaux exportateurs de poisson et de produits de la pêche. Au Groenland, le poisson représente plus de 90 pour cent en valeur des exportations totales de l’île.

RESSOURCES ET PRODUCTION

Pêches en mer

En 1994, le volume total des captures en mer dans la région Amérique du Nord a atteint 6,5 millions de tonnes, soit une légère diminution par comparaison avec 1993, mais avec une augmentation par rapport à 1992. Ces fluctuations font suite à une période de croissance continue d’une vingtaine d’années terminée en 1990, date à laquelle les quantités débarquées au niveau régional ont atteint 7,2 millions de tonnes. La stagnation observée récemment est principalement due à la surexploitation commerciale des principaux stocks de poissons de fond dans certaines zones où les pêches sont actuellement fermées ou assujetties à des restrictions. Par exemple, dans l’Atlantique Nord, la morue qui auparavant constituait la plus grande partie des débarquements fait l’objet d’un moratoire au large du littoral nord-est du Canada et ne représente donc à présent qu’une petite fraction en valeur des niveaux de production observés auparavant. En outre, les restrictions en question ont entraîné des changements socio-économiques dans de nombreuses communautés de cette région jusqu’alors entièrement tributaires des captures en mer pour leur subsistance.

Figure 50 Production halieutique régionale et part en pourcentage de la production mondiale totale

D’autre part, les principaux stocks de pélagiques, c’est-à-dire de harengs et de maquereaux, semblent en bien meilleur état, sauf dans certaines zones. Les stocks de crevettes, de crabes blancs et de homards sont également en bon état et, en ce qui concerne la crevette, on a supposé que les stocks avaient peut-être effectivement bénéficié d’une présence réduite de prédateurs dans certaines zones, suite à l’effondrement des stocks de morue.

Dans le Pacifique Nord, les principales espèces de poisson comprennent le lieu de l’Alaska, la morue du Pacifique, le hareng, la limande du Japon, le merlu du Pacifique Nord, le thon et le saumon. Le lieu de l’Alaska vient nettement en tête, puisqu’il représentait 40 pour cent des captures en volume dans le Pacifique en 1994. Parmi les espèces considérées comme pleinement exploitées, figurent la morue du Pacifique (golfe de l’Alaska), le flétan du Pacifique, la morue charbonnière, les stocks de poissons de fond au large de la côte Pacifique des Etats-Unis et le merlan du Pacifique (merlu). Les ressources en saumon du Pacifique varient considérablement d’une zone à l’autre, la plupart des stocks étant considérés comme pleinement exploités; par ailleurs, les stocks de saumon argenté et de saumon royal sont surexploités.

Les poissons plats autres que le flétan sont abondants et sous-utilisés dans la mer de Bering et dans le golfe de l’Alaska, grâce aux restrictions imposées aux prises accessoires d’autres espèces capturées au moyen du même engin de pêche. Les stocks de chinchard sont également sous-exploités. Bien que les stocks de hareng du Pacifique soient plus ou moins abondants, ils ont généralement tendance à présenter un état assez satisfaisant.

Les flottes de pêche régionales se caractérisent par un niveau technologique élevé. L’excédent de capacité est un problème important aux Etats-Unis et au Canada, qui ont adopté l’un et l’autre des programmes visant à résoudre cette difficulté. En 1995, les Etats-Unis ont entrepris deux programmes régionaux visant à réduire l’effort de pêche. Dans l’Atlantique Nord-Ouest, la capacité de pêche de poissons de fond est réduite actuellement par des mesures de retrait de navires et de cession de permis, alors que dans le Pacifique Nord-Est, des centaines de permis de pêche au saumon ont été retirés. Des Centres d’assistance familiale à la pêche ont été créés à titre de mesure complémentaire des programmes de rachat des navires de pêche et des permis (voir également Politique des pêches et mesures d’aménagement).

Au Canada, la capacité des flottilles nationales est excédentaire dans les deux zones côtières, bien que la flotte de pêche de poissons de fond dans l’océan Atlantique ait été en grande partie inactive et que sa capacité ait été réduite ces dernières années. Dans la région atlantique, un programme de retrait des permis de pêche des poissons de fond a été mené à bien en 1994. En outre, un plan de préretraite des pêcheurs a été annoncé en 1995 et les pêches au saumon dans le Pacifique font l’objet actuellement d’un programme de retrait des permis.

Pêches continentales

Dans les pêches continentales, les captures des pêcheries commerciales à petite échelle diminuent régulièrement, laissant progressivement la place au développement des pêches de loisir. On estime que les captures de la pêche de loisir en eau douce aux Etats-Unis dépassent maintenant nettement les captures commerciales réalisées dans l’ensemble de l’Amérique du Nord. L’aide fédérale au rétablissement de la pêche sportive est considérable et, en 1995, sept agences fédérales concernées par l’administration du secteur ont pris différentes mesures visant à mettre sur pied des programmes de pêche de loisir. Dans les régions centrale et arctique du Canada, les captures de la pêche de loisir dépassent les captures commerciales dans les eaux continentales. En 1994, les captures commerciales se sont élevées à 71 000 tonnes.

Aquaculture

L’aquaculture en Amérique du Nord est une activité diversifiée qui porte sur les poissons de mer et les poissons d’eau douce, les coquillages et les végétaux. Dans l’industrie canadienne de l’aquaculture, on exploite plus particulièrement les espèces d’eau froide telles que le saumon, la truite et les mollusques. Aux Etats-Unis, on compte parmi les principales espèces utilisées en aquaculture le poisson-chat, l’huître creuse, la truite arc-en-ciel, la Notemigonus crysoleucas (utilisé comme appât), le saumon et la langouste. Pour certaines espèces, par exemple pour le tilapia et la crevette, la croissance des activités aquacoles a été particulièrement rapide. En moyenne, le secteur de l’aquaculture aux Etats-Unis s’est développé à raison de 2 pour cent par an au cours de la décennie terminée en 1994, tandis qu’au Canada le taux de croissance observé dépassait 20 pour cent. En valeur, le secteur aquacole canadien doit atteindre le quart de la valeur des captures des pêches commerciales, d’ici à l’an 2000. La production aquacole totale de la région s’est élevée à près de 0,5 million de tonnes en 1994.

PRODUITS ET MARCHÉS

La consommation de poisson nord-américaine a augmenté de 1970 jusqu’à la fin des années 80, puisque les disponibilités sont passées de 14,7 kg par personne à près de 22 kg; depuis, ce chiffre est resté constant. Les prix réels du poisson ont augmenté par comparaison avec les produits carnés, tandis que les dépenses consacrées aux fruits de mer semblent augmenter, à la faveur d’une réorientation de la demande au détriment de la viande rouge. Les produits de la pêche les plus appréciés sont le thon (surtout en conserve), la crevette, le lieu, la morue, le saumon, le loup, les poissons plats, les clams, le crabe et les pectens. Trois facteurs principaux ont influencé - négativement et positivement - l’image auprès des consommateurs, ainsi que la demande de poisson et de produits de la pêche aux Etats-Unis: la sensibilisation accrue aux avantages pour la santé de la consommation des produits de la mer; l’importance accordée à l’innocuité des fruits de mer; la plus grande prise de conscience par le consommateur du milieu marin et l’intérêt porté aux mammifères marins, en particulier aux dauphins et aux baleines, aux tortues de mer et aux espèces en danger ou menacées en général (encadré 15).


ENCADRÉ 15
Conservation de l’environnement et des ressources

Les pêches et l’aquaculture en Amérique du Nord subissent l’influence d’une forte prise de conscience des questions d’environnement et de conservation des ressources parmi le public en général et les consommateurs. Aux Etats-Unis, cette situation se traduit dans les nombreuses dispositions réglementaires prises par les pouvoirs publics pour protéger le milieu aquatique et sa diversité biologique. La législation en question comprend la Loi sur les espèces menacées, la Loi sur la protection des mammifères marins, la Loi sur la protection des pêches côtières et le Projet de loi sur les pêches (Loi C-115) qui se rapportent tous à la protection des espèces ainsi qu’à la conservation de leurs habitats. En outre, des groupes d’intérêt américains visant à promouvoir la défense de l’environnement ont exercé des pressions afin d’utiliser le commerce international pour influer sur les méthodes et l’équipement de pêche utilisés. Cette approche s’est traduite par exemple par l’obligation de réduire les importations de certaines espèces de poisson qui n’ont pas été pêchées au moyen d’engins et selon des méthodes répondant à certaines exigences. Les exigences ainsi formulées ne reposent pas toujours sur des données scientifiques et sont donc susceptibles d’être contestées du point de vue du respect des lois du marché international.

Source: United States Department of Commerce. 1995. Our living oceans. Report on the Status of United States Living Marine Resources; et autres sources.

Figure 51 Utilisation du poisson et disponibilités alimentaires

Figure 52 Importations et exportations de poisson (y compris le commerce intrarégional)

A l’instar du sous-secteur de la pêche, l’industrie de transformation de la région est techniquement très évoluée. Des techniques novatrices sont apparues dans le domaine du transport, de la distribution et de la congélation et la durée de conservation du poisson frais et du poisson vivant a été prolongée, autorisant ainsi un développement des échanges au-delà des marchés locaux. En conséquence, la plus grande partie des quantités débarquées à l’échelle nationale est utilisée à l’état frais ou à l’état congelé, tandis que l’importance relative de produits de l’aquaculture à l’état frais et à l’état congelé, en particulier de silures et de saumons, tend à augmenter. En revanche, nombre des pêches sauvages traditionnelles ont vu leur importance diminuer, en termes de niveau de consommation par habitant: la morue, les poissons plats, les clams et les pectens. Quant aux produits de la pêche en conserve, la consommation n’a augmenté que légèrement depuis 1970, dénotant ainsi un basculement du consommateur des Etats-Unis au profit des fruits de mer de valeur plus élevée. Grâce à l’amélioration du système de distribution, il est de plus en plus possible de se procurer du poisson frais et des coquillages dans les zones urbaines à tout moment de l’année. On estime à 70 pour cent la part des dépenses de fruits de mer aux Etats-Unis effectuée par l’intermédiaire des services de livraison à domicile; les fruits de mer de valeur plus élevée semblent être consommés plus fréquemment dans les restaurants, et cette tendance de consommation à l’extérieur du foyer est appelée à se maintenir. Les Etats-Unis sont l’un des premiers pays importateurs et exportateurs de poisson, tandis que le Canada se classe parmi les premiers exportateurs au monde. Les Etats-Unis viennent au second rang des importateurs après le Japon, avec des importations de poisson pour l’alimentation évaluées à 6,6 milliards de dollars EU en 1994. Les achats de crevettes en constituent plus d’un tiers et proviennent essentiellement de l’Equateur et de la Thaïlande. Les importations de filets et de blocs de poissons de fond sont également importantes et proviennent surtout de la Fédération de Russie et de Chine. Quant aux exportations des Etats-Unis, elles se sont élevées à 3,1 milliards de dollars EU la même année, et se composaient principalement de saumon et de poissons de fond du Pacifique2. Les statistiques concernant les pêches à l’exportation du Canada font apparaître une valeur à l’exportation de plus de 2 milliards de dollars en 1994. Les principaux débouchés des exportations canadiennes sont les Etats-Unis, le Japon et l’UE. Le Groenland a exporté des produits de la pêche pour une valeur de 266 millions de dollars EU en 1994. Le poisson représente plus de 90 pour cent des exportations totales de l’île3.

POLITIQUE DES PÊCHES ET MESURES D’AMÉNAGEMENT

Aux Etats-Unis, les pêches maritimes sont administrées au niveau national par l’Administration nationale des océans et de l’atmosphère (NOAA) par l’intermédiaire du Service national des pêches maritimes et par huit conseils régionaux d’aménagement des pêches. Les pêches continentales sont administrées par des institutions spécialisées au niveau fédéral et de chaque Etat, tandis que les conseils régionaux sont responsables de l’aménagement des ressources marines situées dans leur juridiction respective.

Au Canada, les pêches sont placées sous la juridiction fédérale du Département des pêches et des océans, dont les objectifs d’aménagement consistent à conserver et à protéger les ressources, en association avec les utilisateurs pratiquant la pêche industrielle, la pêche de subsistance et la pêche de loisir, afin de garantir la durabilité des pêches et de ce secteur d’activité. La compétence du Département des pêches et des océans s’étend également dans une certaine mesure aux ressources continentales, constituées pour l’essentiel de la région centrale et de la région arctique, lesquelles comprennent environ 67 pour cent des eaux douces du Canada et sept des plus grands lacs à l’échelle mondiale.

La détérioration des habitats est sans doute le problème d’environnement le plus grave auquel le secteur des pêches se trouve confronté dans la région. Dans le Pacifique Nord-Ouest (Etats-Unis) et en Colombie britannique (Canada), on estime à 80 pour cent la proportion qui a été détruite des lieux de ponte et des habitats fluviatiles des montées de saumons du Pacifique et de truites arc-en-ciel. Parmi les techniques le plus couramment employées pour reconstituer les pêches de capture figurent l’empoissonnement ou la reconstitution des écloseries, la construction de récifs artificiels, la création de réserves aquatiques ou de zones protégées et la restauration des habitats. Les écloseries sont à présent communément répandues et des milliards d’alevins sont libérés tous les ans. Toutefois, en dépit des mesures constituant le dispositif de protection de l’environnement mis en place par les gouvernements fédéraux des Etats-Unis et du Canada, les intérêts socio-économiques et politiques en présence modifient fréquemment les modalités de mise en place et d’application des mesures en question.

Les politiques nationales actuellement en vigueur en matière de conservation et d’aménagement des pêches aux Etats-Unis reposent sur des programmes mis au point au terme de consultations approfondies avec les institutions gouvernementales, les groupes de pression et les groupes d’utilisateurs et les organisations internationales concernées. Pratiquement toutes les pêches fédérales font l’objet d’une forme ou d’une autre de limitation d’accès (licences et permis). Ainsi, à l’heure actuelle, seulement trois systèmes fédéraux de contingents individuels transférables ont été mis en place dans certaines pêcheries et passent pour avoir contribué à une réduction substantielle du nombre de navires de pêche. Des programmes de réduction de la capacité de capture excédentaire ont été adoptés. L’évolution technologique observée aux Etats-Unis a par ailleurs été influencée ces derniers temps par l’importance accordée à l’écologie et aux lois du marché. Certains progrès ont été enregistrés en matière de sélectivité des engins de pêche et la modernisation des activités après-capture devrait se poursuivre sous l’effet de la demande de produits à valeur ajoutée. De plus, un programme d’inspection obligatoire des fruits de mer est actuellement en cours d’élaboration.

Figure 53 Production halieutique par grands groupes d’espèces

Figure 54 Importations et exportations de poisson des principaux pays pratiquant des échanges en 1994

Dans la région Atlantique du Canada, les mesures d’aménagement prennent en considération les recommandations du Conseil de conservation des ressources halieutiques, créé afin de regrouper les compétences des pêcheurs, des industriels de la pêche et des scientifiques dans un effort concerté pour guider la conduite des pêches de l’Atlantique. Une instance analogue a été créée pour la région Pacifique. Outre l’adoption de moratoires concernant différentes espèces, la politique canadienne d’aménagement des pêches impose aux flottilles de présenter des plans acceptables de capture conservatoire avant chaque campagne de pêche. Pour gérer la capacité excédentaire, une réorganisation a été engagée dans le sens des allocations par entreprises, des contingents individuels transférables, des quotas individuels et des quotas communautaires.

Les mesures d’aménagement propres à différentes zones et à certaines espèces sont préconisées par les organisations régionales des pêches en vertu des arrangements auxquels le Canada et les Etats-Unis participent, notamment l’Organisation des pêches de l’Atlantique Nord-Ouest (NAFO), l’Organisation pour la conservation du saumon de l’Atlantique Nord (NASCO), la Commission du saumon du Pacifique, la Commission du poisson anadrome du Pacifique Nord et la Commission internationale du flétan du Pacifique (IPHC). Le Canada et les Etats-Unis coopèrent dans une certaine mesure pour gérer les espèces de grands migrateurs et les stocks chevauchants par l’intermédiaire de ses organisations régionales des pêches. Il existe également dans ces deux pays des réglementations concernant le développement de l’aquaculture.

Les réorientations et les accords régionaux relatifs aux prises accessoires sont en place depuis un certain nombre d’années, de telle sorte que pour la plupart des espèces les rejets en mer sont relativement limités, aussi bien dans l’Atlantique Nord-Ouest que dans le Pacifique Nord-Est. Cette question continue néanmoins de retenir l’attention et, par exemple aux Etats-Unis, le Service national des pêches maritimes élabore actuellement un plan stratégique sur 10 ans concernant les activités de recherche et d’aménagement (encadré 16).


ENCADRÉ 16
Plan stratégique du Service national des pêches maritimes des Etats-Unis concernant les prises accessoires

Le Service national des pêches maritimes des Etats-Unis a défini un plan stratégique sur 10 ans concernant les recherches subventionnées consacrées aux prises accessoires et aux mesures d’aménagement. Parmi les tâches prioritaires il y a lieu de citer: i) le recueil de données sur les prises accessoires afin d’identifier les pêcheries où les prises accessoires sont importantes; ii) évaluation de l’incidence biologique, économique, sociale et sur les écosystèmes des mesures envisagées de réduction des prises accessoires, ainsi que de leur échelle et de leurs caractéristiques; et iii) équipements de conservation. Le plan comportera des recommandations quant aux priorités, aux stratégies permettant d’atteindre des objectifs approuvés d’un programme de mise en œuvre et de procédures de surveillance et d’évaluation des options choisies. Le Comité consultatif des pêches en mer du Service national des pêches maritimes, qui étudie des solutions à long terme pour les problèmes liés aux prises accessoires, a envisagé différentes mesures, notamment en matière de conception et de modification des engins de pêche, de développement de l’industrie de la mariculture dans le cas des pêches utilisant des stocks sauvages intensément exploités, des techniques d’aménagement permettant de surveiller l’évolution du problème, et enfin, des approches tournées vers le marché qui ont été couronnées de succès en Alaska.

Source: United States Department of Commerce, Fisheries Service. Correspondance destinée à la FAO, 1996.

PERSPECTIVES

La demande future de fruits de mer en Amérique du Nord dépendra sans doute du renforcement de l’image du poisson en tant qu’aliment sain, d’une part, et de l’importance accordée aux préoccupations d’ordre sanitaire et environnemental, d’autre part. Il est difficile de quantifier l’incidence exacte de ces différents facteurs sur le comportement en matière de consommation. Toutefois, on peut s’attendre que la demande de poisson et de produits de la pêche augmente à l’avenir. Une réorientation au profit des fruits de mer de valeur élevée est également probable.

Les pêches de capture en mer de la région ont atteint pratiquement un palier de production qui correspond au niveau d’exploitation maximale ou à la surexploitation des stocks d’espèces commerciales. L’accès libre et ouvert ainsi que les mesures traditionnelles d’aménagement sont perçus de plus en plus comme étant insatisfaisants, et l’on constate actuellement une évolution en faveur de nouveaux systèmes de répartition et de conservation des ressources, davantage axés sur la privatisation et la participation directe du secteur privé aux activités de surveillance. Il est néanmoins trop tôt pour prédire les conséquences en matière de niveaux de production et de composition des captures futures. Les quelques stocks sous-exploités, constitués principalement de petites espèces pélagiques, ne semblent pas avoir de débouchés immédiats. Par conséquent, l’accroissement de la production viendra sans doute essentiellement de l’aquaculture. Compte tenu des tendances passées, cette évolution comportera vraisemblablement une forte intensité de technologies et devra tenir dûment compte des problèmes écologiques.

Les disponibilités pourraient en outre être renforcées par un accroissement des importations, offrant ainsi la possibilité aux pays en développement dotés d’industries aquacoles en plein essor, en particulier en Asie du Sud-Est, d’accroître leurs exportations à destination de l’Amérique du Nord. Les Etats-Unis surtout continueront donc à figurer parmi les principaux importateurs de produits de la pêche. Toutefois, les aspects concernant l’environnement et le contrôle de la qualité continueront à déterminer les importations destinées à cette région et les habitudes alimentaires.

1 D’après l’étude régionale préparée par l’équipe spéciale interdépartementale de la FAO dirigée par Mme M. Lizarraga, Division des politiques et de la planification de la pêche/Service des institutions internationales et de liaison (FIPL).

2 United States Department of Commerce. 1995. Fisheries of the United States 1994. Current Fishery Statistics N° 9400. Silver Spring, Maryland, Etats-Unis.

3 Danmarks Statistik. 1996. External trade of Denmark 1994. Copenhague.

6. Proche-Orient et Afrique du Nord1

La région s’étend depuis le littoral atlantique du Maroc, le long du littoral méditerranéen de l’Afrique du Nord (hormis Malte, mais y compris Chypre) jusqu’au littoral de la Méditerranée orientale et de la Turquie, et comprend en outre l’Egypte, la Jordanie, les pays de la péninsule arabique (bordant la mer Rouge, le golfe d’Aden, le golfe d’Oman et la mer d’Arabie), ainsi que les pays d’Asie centrale. La mer Noire (qui fait également l’objet de l’étude régionale concernant l’Europe à la page 64), la mer Caspienne et la mer d’Aral comptent également parmi les masses d’eau importantes de la région.

Aucun pays de la région Proche-Orient et Afrique du Nord n’est fortement tributaire de la pêche et des produits de la pêche en tant que support de l’économie. Les pêches sont diversifiées puisqu’elles englobent des activités fondées sur les ressources relativement abondantes de la côte atlantique du Maroc et les pêches côtières et continentales exploitant des ressources assez pauvres. La production totale a atteint environ 2,8 millions de tonnes en 1994, dont plus d’un quart correspondait aux débarquements de la pêche marocaine. La consommation de poisson pour l’alimentation varie fortement à l’intérieur de la région et elle est relativement faible par comparaison avec la viande. Au Yémen, les disponibilités alimentaires sont proches de 40 kg par habitant, tandis que l’Afghanistan se caractérise par la plus faible consommation par habitant, soit 0,1 kg (équivalent poids vif). En règle générale, la part de la région dans le commerce international des pêches est limitée.

RESSOURCES ET PRODUCTION

Pêches en mer

En 1994, après plusieurs années de captures peu importantes, les captures totales réalisées en mer dans la région se sont élevées à 2,2 millions de tonnes, atteignant pratiquement le niveau de 1988, date à laquelle les quantités débarquées ont atteint un niveau maximum. Le Maroc dispose des ressources halieutiques les plus abondantes, puisqu’il borde aussi bien l’Atlantique que la Méditerranée. L’Atlantique Centre-Est fournit environ un tiers de la production marine totale de la région. Céphalopodes, merlus, dorades et crustacés constituent les espèces de valeur élevée qui sont recherchées. La région compte également d’abondantes ressources en petits pélagiques tels que sardine, maquereau, chinchard et sardinelle, la principale espèce étant la sardine. Les pêches de céphalopodes et de démersaux sont considérées comme surexploitées et devant faire l’objet de réduction de l’effort de pêche. Certaines ressources de petits pélagiques sont en meilleur état, en particulier les stocks de sardinelles, exploités en commun avec la Mauritanie au sud.

Figure 55 Production halieutique régionale et part en pourcentage de la production mondiale totale

La Méditerranée orientale offre peu de possibilités d’augmentation des débarquements des pêches de capture. Globalement, il semble peu probable que la Méditerranée compte encore des stocks sous-exploités, bien que certains stocks de petits pélagiques puissent se reconstituer brutalement de temps à autre, sans doute grâce à un changement momentané de l’environnement. Le golfe de Gabès en Tunisie, le golfe de Syrie dans la Jamahiriya arabe libyenne et au large du delta du Nil en Egypte contiennent des zones de chalutage relativement riches. Les principales espèces méditerranéennes comprennent les sardines, les anchois et les chinchards. Les captures dans la mer Noire ont brutalement diminué il y a quelques années, en particulier les prises d’anchois des pêcheurs turcs. La surexploitation, la pollution et l’introduction d’espèces exotiques semblent avoir été la cause de cette baisse.

Les ressources halieutiques des principales mers de la région ne sont pas abondantes, mais fournissent des emplois aux pêcheurs côtiers locaux. Il existe certes des estimations fiables d’importantes ressources mésopélagiques susceptibles d’être exploitées dans la mer d’Arabie, au large d’Oman, de la République islamique d’Iran et du Pakistan, mais la viabilité commerciale de telles opérations n’est pas du tout certaine. Toutefois, tous les stocks présentant une valeur commerciale présents dans les eaux de l’Arabie saoudite orientale, de Bahreïn, de Qatar et des Emirats arabes unis sont d’ores et déjà pleinement exploités. Le potentiel d’exploitation de la mer Rouge a donné lieu à différentes estimations. Compte tenu des récifs coralliens et des communautés de pêcheurs vivant dans cette zone, les ressources tendent à être vulnérables à la surexploitation. Parmi les principales espèces commerciales exploitées figurent le homard et la crevette.

Dans toute la région, les pêches sont menacées par la détérioration de l’environnement imputable aux marées noires, ainsi qu’aux eaux de ruissellement industrielles, urbaines et agricoles. Les cténophores, qui ont dévasté l’écosystème de la mer Noire, sont également présents maintenant dans le nord-est de la Méditerranée. Les prises accessoires et les rejets en mer qui en résultent posent un problème grave dans les eaux du Koweït, de l’Iran, de l’Arabie saoudite et de Bahreïn où les prises accessoires des chalutiers pêchant la crevette peuvent atteindre 95 pour cent du total, soit près de 35 000 tonnes en 1994. La situation est encore plus préoccupante dans le cas des chalutages de céphalopodes et des pêches au merlu et aux crustacés au large de l’Afrique du Nord-Ouest, puisque la valeur probable des prises accessoires est estimée à près de 350 000 tonnes.

En l’absence d’étude il est difficile d’estimer l’état des stocks et de surveiller conjointement l’effort de pêche dans la plupart des pays; aussi, seules des suppositions fondées sur les tendances des captures sont-elles possibles. On peut donc raisonnablement supposer que la diminution des captures résulte davantage de la surpêche que de réductions de l’effort de pêche. Un problème de capacité excédentaire est réapparu dans la partie méridionale de la Méditerranée, en rapport avec les programmes de développement des flottilles de pêche entrepris dans la Jamahiriya arabe libyenne et avec le transfert dans les eaux turques de la Méditerranée d’une partie de la flottille turque de pêche à l’anchois en mer Noire. Récemment, certains gouvernements ont limité les subventions et restreint les prêts pour investissement à taux réduit, afin de ralentir le processus de capitalisation. Toutefois, les navires deviennent en général de plus en plus sophistiqués et sont dotés des derniers perfectionnements en matière d’instruments de navigation, d’engins et de techniques de manutention. Cependant, les très gros bâtiments de pêche hauturière tendent à se raréfier, en particulier dans les pays d’Europe de l’Est qui ont réorganisé leurs flottes. Au Maroc, le nouvel accord d’accès aux zones de pêche conclu avec l’Union européenne (UE) prévoit une diminution du nombre de navires. Par conséquent, le Maroc envisage de moderniser sa flottille de pêche côtière pour bénéficier de la diminution de l’effort de pêche des flottilles étrangères dans sa zone de pêche. Néanmoins, les investissements supplémentaires réalisés dans le secteur d’ores et déjà surcapitalisé de la pêche aux céphalopodes sont susceptibles d’être dissuadés.

Pêches continentales

La production totale des eaux continentales de la région a atteint 452 000 tonnes en 1994. L’Egypte en fournit le quart, grâce à ses pêcheries du Nil et du lac Nasser. L’Iraq, l’Iran, la Turquie et Israël disposent également d’importantes pêches de capture dans leurs eaux continentales.

Figure 56 Utilisation du poisson et disponibilités alimentaires

Figure 57 Importations et exportations de poisson (y compris le commerce intrarégional)

Dans la mer Caspienne, qui représente l’essentiel des ressources aquatiques continentales de l’Iran, l’esturgeon, l’alos de la Caspienne et la carpe argentée sont les principales espèces exploitées en dehors d’un certain nombre de petits pélagiques, par exemple le kilka. L’état des stocks d’esturgeons est un sujet de préoccupation majeure, puisqu’ils ont déjà été exploités intensivement pendant une période prolongée. La zone en question a par ailleurs subi une dégradation de son environnement au cours des décennies passées due aussi bien à des facteurs climatiques qu’aux activités humaines. Les stocks d’esturgeons ont néanmoins été entretenus grâce à des programmes d’écloserie et les petites espèces pélagiques ne sont, semble-t-il, que faiblement exploitées (encadré 17).


ENCADRÉ 17
Les pêcheries iraniennes de la mer Caspienne

La mer Caspienne est exposée à une pollution grave et à des problèmes environnementaux qui menacent les ressources biologiques marines. Les ressources halieutiques ont également souffert d’une pratique intense de la pêche et les stocks d’esturgeons sont particulièrement appauvris. La mer Caspienne est l’une des principales zones de pêche dont dispose la République islamique d’Iran qui a récemment élaboré un plan stratégique visant à améliorer l’état de ses ressources halieutiques dont l’un des objectifs consiste à augmenter la production d’esturgeons.

A cet effet, l’Iran a développé un programme ambitieux d’écloseries et a conclu des accords internationaux avec les pays voisins pour fixer la répartition des captures et pour limiter le braconnage. De plus, la pêche à la seiche au filet maillant est en passe d’être supprimée au moyen d’un programme de rachat des licences, mis en place en raison de l’importance de prises accessoires d’esturgeons associées à cette pêche. Les pêcheurs concernés sont incités à se tourner vers la pêche à la senne de rivage et vers la pêche au kilka qui n’impliquent pas de prises accessoires d’esturgeons. Il existe des perspectives encourageantes d’accroissement de la production de kilka et l’ouverture de nouvelles zones de pêche permettrait de doubler le niveau de captures durable. Le kilka est une espèce de faible valeur abondamment productrice et utilisée pour la production de farine de poisson, bien que certaines mesures aient été prises pour soutenir une réorientation de cette production vers la consommation humaine. Une certaine quantité de cette production est d’ores et déjà mise en conserve et congelée pour les besoins de la consommation nationale.

Source: FAO. 1996. The Formulation, evaluation and implementation of fisheries management practices in the Islamic Republic of Iran. TCP Technical Report (restricted). FI:TCP/IRA/4559. Rome.

En Asie centrale, la canalisation des cours d’eau, la création de retenues et la détérioration progressive de la mer d’Aral ont fait obstacle à un développement harmonieux des pêches. La profondeur de la mer d’Aral a diminué notablement et toutes les activités commerciales ont cessé en 1982 (encadré 18).


ENCADRÉ 18
Le bassin versant de la mer d’Aral

La mer d’Aral est alimentée par deux cours d’eau importants: l’Amou-Darya et le Sour-Darya. Toutefois, depuis 1960 la mer d’Aral s’est asséchée progressivement. Outre les causes climatiques, par exemple une série d’années de sécheresse dans les années 70, l’assèchement a été le résultat des détournements d’eau prélevés dans les deux rivières qui l’alimentaient, à des fins d’irrigation.

Il existe dans la région une longue tradition d’agriculture irriguée, mais la consommation d’eau a fortement augmenté à partir de 1960. Dans le bassin hydrographique de l’Amou-Darya, la superficie irriguée a augmenté de 37 pour cent entre 1961 et 1980, évolution caractérisée par la nécessité d’apports supplémentaires et par une augmentation de 80 pour cent de la consommation d’eau. En outre, les détournements d’eau ont aussi été dirigés vers le canal Karakum, également à des fins d’irrigation. Sensiblement à la même époque, la superficie irriguée du bassin hydrographique du Sour-Darya a augmenté de 31 pour cent et la consommation correspondante de 22 pour cent. Afin de gérer ces systèmes d’irrigation, des retenues d’eau ont été construites et les réseaux de canalisations se sont développés. Les eaux résiduaires ont également été réutilisées pour renforcer le ruissellement fluviatile. Une aggravation de la salinité a également été constatée, en particulier lors des années de sécheresse, mais ce phénomène a connu une brutale intensification dans les cours d’eau et les retenues d’eau, suite à la mise en place du nouveau régime hydrographique.

L’intensification des captages d’irrigation dans les bassins hydrographiques du Sour-Darya et de l’Amou-Darya s’est révélée désastreuse pour les deltas fluviatiles comme pour la mer d’Aral. Les stocks de poissons ont été gravement touchés et l’on a observé une réduction substantielle des lieux de ponte et des écloseries. De nombreux lacs plus petits du delta ont disparu et la superficie de la mer d’Aral a considérablement diminué, ce qui fait qu’elle a cessé de jouer un rôle important pour les pêches; la pêche commerciale a complètement disparu en 1982. La disparition du poisson a entraîné la perte de 60 000 emplois, ce qui a été un désastre social et économique pour les communautés locales.

En 1993, un accord multinational a été signé par les cinq Etats du bassin hydrographique de la mer d’Aral, c’est-à-dire le Kazakhstan, le Kirghizistan, l’Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Turkménistan afin d’améliorer l’aménagement des ressources hydriques de la région. Toutefois, compte tenu des problèmes économiques et politiques auxquels ces derniers sont confrontés, il a été difficile de mettre en œuvre un plan de sauvetage.

Source: FAO. 1995. Indo-Pacific Fishery Commission: Papers contributed to the Regional symposium on sustainable development of inland fisheries under environmental constraints. 5. Case Study 2: The Aral Sea catchment rédigé par T. Petr, et M. Morris. Bangkok, Thaïlande, 19-21 octobre 1994. FAO, Rapport sur les pêches n° 512 Sup.; People and the Planet Magazine. 1995. Requiem for a dying sea. Vol. 4 n° 2.

Aquaculture

En 1994, la valeur de la production aquacole de la région a représenté seulement 2 pour cent du tonnage mondial, tandis que les tonnages produits représentaient 0,6 pour cent du total mondial (soit 148 000 tonnes pour une valeur de 875 millions de dollars EU). Six pays assurent quelque 90 pour cent de la production, constituée presque entièrement de poisson et principalement de carpes communes, de tilapias du Nil et de carpes argentées. La production de mollusques et de crustacés correspond au pourcentage résiduel.

Les principaux systèmes de production dulcicole reposent sur l’élevage d’une combinaison d’espèces de poissons herbivores et omnivores et se caractérisent par un niveau faible à modéré des intrants d’origine locale (systèmes extensifs et semi-extensifs). En Egypte, qui réalise 26 pour cent de la production totale en volume, l’élevage de la carpe commune est pratiqué dans les rizières. L’élevage des poissons de mer est pratiqué essentiellement dans le cadre de systèmes intensifs, tels que des élevages côtiers en nasses, et dans une moindre mesure, dans des sites et des lagons côtiers. Ces systèmes sont entièrement tributaires d’un approvisionnement en aliments pour animaux aquatiques nutritivement complets, à forte teneur en farine et en huile de poisson. En bref, la production aquacole a continué à se développer à des rythmes nettement supérieurs aux taux mondiaux et présente des perspectives prometteuses d’expansion. De plus, dans certains pays l’aquaculture réalise une précieuse contribution à la production halieutique globale: 70 pour cent en Israël, 50 pour cent en Syrie et 17 pour cent en Egypte.

PRODUITS ET MARCHÉS

La consommation de poisson au Proche-Orient et en Afrique du Nord varie fortement d’une sous-région et d’un pays à l’autre, et même à l’intérieur de chacun d’eux. Par exemple, la consommation de poisson en Afghanistan compte parmi les plus faibles au monde, puisque les disponibilités de poisson pour l’alimentation sont de 0,1 kg par personne et par an (équivalent poids vif), tandis qu’à Aden (Yémen) le chiffre correspondant est de 40 kg par personne et par an. La valeur moyenne des disponibilités par habitant dans la région est seulement de 5 kg par an. Autour de la Méditerranée, le poisson est une nourriture traditionnelle préparée de multiples façons et occupant une place de choix dans la cuisine. Or, même dans la région méditerranéenne, les petites espèces pélagiques telles que les sardines ne sont pas prisées autant que les démersaux comme la dorade, ou les grands pélagiques comme l’espadon. Parmi les petits pélagiques, les anchois sont généralement plus demandés que les sardines.

Figure 58 Production halieutique par grands groupes d’espèces

Figure 59 Importations et exportations de poisson des principaux pays pratiquant des échanges en 1994

Le poisson est le plus souvent consommé à l’état frais, en particulier les démersaux, les céphalopodes et les coquillages. Les petits pélagiques méditerranéens, tels que les sardines et les anchois, sont consommés à l’état frais, en conserve ou sous forme salée, et le thon est surtout mis en conserve. Au Yémen et à Oman, les petites espèces pélagiques sont également séchées sur la plage et destinées à l’alimentation animale; au Maroc et en Iran, elles servent aussi à la fabrication de farine et d’huile de poisson. De plus, la sardine a commencé à être mise en conserve au Maroc à partir de la première guerre mondiale, et cette industrie représente une contribution notable à l’économie. Les ressources importantes de petites espèces mésopélagiques (4 cm de long) de la mer d’Arabie ne sont pas encore exploitées commercialement, bien que des opérations de pêche expérimentales réalisées à l’aide de navires d’Oman et d’Iran aient été entreprises dans la perspective d’une production de farine de poisson.

En règle générale, la participation de la région au commerce international de poisson est limitée. Toutefois, le Maroc est un grand exportateur de poisson et devrait accroître ses exportations en raison de l’intensification de la demande européenne de poisson de valeur élevée et du développement de la flottille de pêche marocaine. Son secteur de la transformation de la sardine a assimilé les technologies les plus récentes afin d’assurer sa compétitivité sur les marchés mondiaux. D’autres pays exportent principalement des poissons de valeur élevée, ainsi qu’une certaine quantité de céphalopodes et de crustacés, à destination des marchés européens et du Japon. Il existe dans certains pays un commerce limité, mais en expansion, de poisson frais et de poisson congelé à destination de l’Europe, ainsi qu’un commerce intra-régional vers l’Arabie saoudite, Israël, Bahreïn, Qatar et les Emirats arabes unis.

POLITIQUE DES PÊCHES ET MESURES D’AMÉNAGEMENT

En raison du rôle mineur des pêches dans la plupart des pays de la région, l’importance des administrations nationales des pêches est généralement réduite. L’exigence d’efficacité conduit en outre à limiter de plus en plus le personnel et les fonds dont disposent certaines administrations pour soutenir ce secteur. Dans de nombreux pays, le secteur privé joue le rôle pilote assuré jusque-là par les administrations nationales. Tel est particulièrement le cas des activités de vulgarisation, où la vente de documents techniques et l’assistance des fabricants d’équipements et de moteurs continuent à assurer le soutien indispensable dont les pêcheurs ont besoin.

Les pays de l’ancienne Union Soviétique d’Asie Centrale se sont employés à s’adapter à la situation de transition, et un certain nombre d’activités ont été dévolues au secteur privé. On peut citer, à titre d’exemple de cette évolution dans la région, la privatisation des fermes piscicoles et des écloseries, des ports, ainsi que des flottilles et des sociétés de commercialisation.

En règle générale, les gouvernements ont pris peu de décisions rigoureuses de conservation et d’aménagement et seuls quelques pays ont fixé des limites à l’effort de pêche ou à la capture de différentes espèces. De plus, dans de nombreux pays, les décisions concernant l’aménagement ne sont pas appliquées. Parmi les mesures de cet ordre figurent l’interdiction complète du chalutage par les Emirats arabes unis et l’ouverture de campagnes de pêche saisonnières uniquement en Iran; la fixation d’une taille minimale des mailles de filets; la protection des pêches artisanales grâce à la création d’une zone littorale dans laquelle la pêche industrielle est interdite; l’établissement de saisons de fermeture de la pêche; et le contrôle de l’effort de pêche.

Compte tenu de l’aggravation de la pression sur les stocks, certains gouvernements ont réduit les subventions et les prêts à taux réduit pour les investissements; des mesures ont été adoptées pour gérer la capacité de capture excédentaire; par exemple, la Tunisie a supprimé toute aide aux investissements consacrés à de nouveaux navires équipés pour la pêche dans le golfe de Gabès où les stocks sont d’ores et déjà surexploités, et le Gouvernement iranien a lancé un programme de réduction de la flottille de pêche suite à l’interdiction du chalutage dans la mer adjacente, et un plan d’aménagement des pêches de la mer Caspienne (encadré 17). La plupart des gouvernements ne taxent pas le fuel nécessaire aux opérations de pêche, et certains d’entre eux le fournissent à des prix inférieurs aux cours mondiaux, alors que la pratique des subventions est généralisée, à l’encontre de la tendance actuelle dans ce domaine en matière de subventions des pouvoirs publics.

Les organismes régionaux des pêches de la FAO couvrent la plupart des zones de pêche de cette région, à l’exception des pêches continentales de l’Asie centrale. Parmi ces organismes figurent la Commission des pêches de l’océan Indien, le Conseil général des pêches de la Méditerranée de la FAO (CGPM), et le Comité des pêches de la FAO pour l’Atlantique Centre-Est (COPACE). Les services de ce dernier seront utilisés à des fins scientifiques et d’aménagement par la Conférence ministérielle sur la coopération des pêches entre les Etats africains riverains de l’océan Atlantique.

PERSPECTIVES

En supposant que la consommation de poisson dans cette région reste relativement faible par comparaison aux chiffres mondiaux, on peut raisonnablement s’attendre que, au moins jusqu’en l’an 2010, un accroissement des débarquements régionaux permette de faire face à une légère augmentation de la demande, à condition de ne pas être détourné vers le marché à l’exportation. Parmi les facteurs jouant en faveur d’un éventuel accroissement de la consommation dans certains pays d’Afrique du Nord, figurent l’expansion économique et le développement du tourisme. Le Maroc connaîtra vraisemblablement un fort accroissement de la consommation de poisson à la faveur de l’expansion de l’économie et du secteur des pêches. La consommation de poisson dans les pays du Proche-Orient devrait rester relativement limitée. Les disponibilités de poisson ne jouent pas et ne devraient pas jouer un rôle réellement déterminant sur le plan de la sécurité alimentaire de la sous-région, bien que le poisson soit, en tout état de cause, une importante solution de rechange en tant que source d’alimentation.

L’amélioration des politiques d’aménagement, notamment la limitation de l’effort de pêche réel, devrait autoriser une augmentation des captures sur certains stocks qui, à l’heure actuelle, font l’objet d’une exploitation intensive; les petits pélagiques en particulier devraient permettre un accroissement des quantités débarquées dans toute la région. Les eaux atlantiques du Maroc offrent des possibilités intéressantes pour répondre à la demande accrue de poisson et de produits de la pêche. Les sardines en conserve sont achetées dans le monde entier, souvent par des personnes appartenant aux groupes à faible revenu, et contribuent ainsi à la sécurité alimentaire. Il existe, par ailleurs, des stocks substantiels de mésopélagiques au large des côtes du Yémen, d’Oman, du Pakistan et de l’Iran. Pour les exploiter il faudra mettre au point des méthodes relativement peu coûteuses de capture et de transformation. Au Proche-Orient, l’aquaculture représente la principale possibilité d’accroissement des disponibilités de poisson; elle devrait par ailleurs donner lieu à un développement des lagunes côtières et des zones protégées d’Afrique du Nord.

Parmi les problèmes futurs auxquels le développement de l’aquaculture régionale se trouve confronté figurent la concurrence de l’aquaculture en eau douce, la disponibilité de sites appropriés et la composition des produits d’alimentation animale. La planification intersectorielle du développement est insuffisante, en particulier en ce qui concerne l’agriculture et l’aquaculture. Les pays confrontés à ces difficultés s’orientent à présent vers l’élevage du poisson dans les eaux intérieures existantes et dans les eaux marines côtières afin d’éviter d’utiliser les terres arables. Or, en aquaculture marine, la saturation du marché et la faiblesse particulière des prix ont joué en faveur d’une efficacité de production accrue et d’une diversification des espèces cultivées.

Le développement du marché européen des espèces de valeur élevée est à l’origine de la création de nombreuses entreprises de pêche à petite échelle au Maroc et d’un renforcement des investissements consacrés aux installations à terre de transformation, de manutention et de distribution.

Il s’agit là d’une tendance susceptible de se poursuivre. Toutefois, le commerce futur avec l’Europe risque d’être affecté par l’entrée en vigueur des réglementations de contrôle sanitaire de l’UE, compte tenu du temps nécessaire pour que les pays s’adaptent aux nouvelles exigences.

1 D’après l’étude régionale établie par l’équipe spéciale interdépartementale de la FAO dirigée par M. G.V. Everett, Division des politiques et de la planification de la pêche/Service de la planification et du développement (FIPP).

7. Asie du Sud et du Sud-Est1

La région se compose des pays de l’Asie du Sud et du Sud-Est, depuis le Pakistan à l’ouest jusqu’à l’Indonésie à l’est. La partie nord de l’océan Indien, notamment le golfe du Bengale et la mer d’Arabie, la mer de Chine méridionale, ainsi que la partie centre-ouest de l’océan Pacifique constituent les principales zones de pêche de ces pays.

Certaines des zones de pêche les plus productives de la planète se trouvent en Asie du Sud et en Asie du Sud-Est. Au niveau de la région, la production totale de poisson a été de 19,5 millions de tonnes en 1994, soit 27 pour cent des captures mondiales. On a estimé à plus de 10 millions le nombre de personnes employées dans le secteur des pêches. La consommation de poisson pour l’alimentation varie considérablement entre les différents pays et sous-régions, les disponibilités par habitant étant élevées, en particulier dans les zones côtières de l’Asie du Sud-Est et les niveaux de consommation beaucoup plus faibles dans les régions continentales septentrionales de l’Asie du Sud. En moyenne, les disponibilités de poisson par habitant ont été de 9 kg en 1994 (équivalent poids vif). Le commerce de poisson s’est développé de façon notable dans la région au cours de la décennie écoulée et la Thaïlande est actuellement le premier exportateur mondial de poisson et de produits de la pêche.

RESSOURCES ET PRODUCTION

Pêches en mer

Le niveau total des captures en mer en Asie du Sud et en Asie du Sud-Est a augmenté régulièrement passant de 9,1 millions de tonnes en 1984 à plus de 13,4 millions de tonnes en 1994, soit un taux de croissance annuel moyen de 3,9 pour cent. Dans les principaux pays pratiquant la pêche - Inde, Indonésie, Thaïlande et Philippines - la production cumulée a représenté plus de 73 pour cent de la production totale de la région. En Asie du Sud et du Sud-Est, les petits pélagiques contribuent davantage aux disponibilités alimentaires que dans toute autre région. Ainsi, ils ont représenté un peu moins d’un tiers des quantités débarquées en 1994, suivis des espèces démersales (16 pour cent) et du thon (10 pour cent). Bien que les prises de crevettes Penaeus constituent moins de 10 pour cent du poids total, il s’agit de loin du groupe d’espèces de valeur la plus élevée qui soit exploité. Les céphalopodes fournissent actuellement seulement une petite fraction des captures totales, mais la production a enregistré une progression substantielle notable, puisqu’elle a augmenté à un rythme annuel de 11 pour cent au cours des 10 dernières années.

Figure 60 Production halieutique régionale et part en pourcentage de la production mondiale totale

En 1994, 64 pour cent de la production marine (soit 7,9 millions de tonnes) provenaient du Pacifique Centre-Ouest. Les principales espèces se composent notamment des comètes, des sardinelles, des thons, des menus flétans, des crevettes et des maquereaux. Dans l’océan Indien Est, 3,7 millions de tonnes supplémentaires et dans l’océan Indien Ouest 2,4 millions de tonnes ont été capturées, les principales espèces étant constituées de maquereaux, d’aloses, de crevettes et de sardines. Toutefois, les statistiques de pêche classent fréquemment les débarquements régionaux sous la rubrique «non identifiés».

La plupart des stocks connus de poisson sont maintenant proches des niveaux d’exploitation maximums. Les espèces démersales côtières ont généralement été intensément exploitées, tandis que les ressources éloignées des côtes ont sans doute fait l’objet d’une pêche moins intense. Compte tenu de l’absence générale de statistiques de captures et d’effort de pêche, l’évaluation des stocks en question est délicate. Néanmoins, on estime que les stocks de petits pélagiques sont encore moins intensément exploités dans certaines eaux. La plupart des stocks de crevettes Penaeus sont apparemment pleinement exploités ou même épuisés. Les stocks de thon sont variables, mais dans de nombreuses zones, ils sont pleinement exploités. Les chiffres de production de céphalopodes pourraient augmenter à l’avenir car les stocks ne semblent que modérément exploités.

Les méthodes et les équipements de pêche utilisés sont très diversifiés. Les pays de la région comptent au total 1,3 million de navires de pêche: il s’agit essentiellement de petites embarcations traditionnelles utilisées souvent avec des engins simples, à proximité des côtes ou sur les rivières et dans les plaines inondables. Le nombre de navires pontés équipés de moteurs est d’environ 99 300, soit un tonnage total de 1,37 million de tonneaux de jauge brute (TJB). De 1984 à 1992, on a observé une augmentation modérée du nombre de navires et une croissance accélérée du tonnage total. Comme, par ailleurs, les petits navires sont moins nombreux, le niveau des investissements par pêcheur tend à s’accroître.

A la faveur du développement des flottilles nationales, les pays étrangers ont de moins en moins tendance à pêcher dans la région. Toutefois, les opérations de pêche hauturière des pays développés sont assez courantes dans les eaux régionales, surtout en ce qui concerne le thon. La Thaïlande, notamment, pêche d’importantes quantités en dehors de la région.

Pêches continentales

La production régionale des pêches intérieures a augmenté légèrement passant de 2,2 millions de tonnes en 1984 à 2,3 millions de tonnes en 1994. Près d’un quart des prises totales provient des vastes pêcheries intérieures du Bangladesh, dont la production a atteint 570 000 tonnes en 1994. Certains pays ont entrepris récemment des programmes d’empoissonnement à grande échelle et l’augmentation de la production dulcicole au Bangladesh est due en partie à la valorisation des pêches. L’Inde et l’Indonésie disposent de considérables ressources halieutiques intérieures et assurent conjointement quelque 35 pour cent de la production régionale totale. La totalité des captures des pays enclavés, tels que Laos, Bhoutan et Népal, comme la plus grande partie des disponibilités de poisson au Cambodge proviennent des eaux intérieures. En outre, étant donné que les statistiques de capture dans les eaux intérieures de nombreux pays ne tiennent pas compte de la pêche de subsistance, la production totale et l’importance relative du poisson d’eau douce dans les disponibilités alimentaires sont probablement sous-estimées. En Thaïlande, on estime que les quantités consommées directement par les pêcheurs et leur famille peuvent représenter 25 pour cent des captures déclarées.

AQUACULTURE

La production aquacole totale de la région a augmenté de façon spectaculaire et dans un rapport de 2,4, passant de 1,8 million de tonnes en 1984 à 4,4 millions de tonnes en 1994 (y compris les plantes aquatiques). L’augmentation en valeur au cours de la même période a été encore plus forte: de 1,57 milliard de dollars EU à 9,24 milliards de dollars. La contribution régionale à la production aquacole mondiale a été de 17 pour cent en quantité et de 23 pour cent en valeur. En volume, les principaux producteurs sont l’Inde, les Philippines, l’Indonésie et la Thaïlande. Les poissons osseux constituent le principal groupe d’espèces en volume, suivi des crustacés, des plantes aquatiques et des mollusques. Les crustacés ont constitué plus de 50 pour cent de la valeur totale des prises en 1994.

Figure 61 Utilisation du poisson et disponibilités alimentaires

Figure 62 Importations et exportations de poisson (y compris le commerce intrarégional)

La production totale de poissons osseux d’élevage a atteint 3 millions de tonnes en 1994, principalement en eau douce. La production dulcicole est essentiellement une polyculture, dans le cadre de systèmes d’élevage traditionnel en étang, de type semi-intensifs; elle constitue une source de poisson pour l’alimentation à bas prix, destinée à la consommation intérieure à grande échelle, en particulier en Inde. Les principales espèces élevées appartiennent à la famille des cyprinidés et comprennent les carpes de type roho, catla et Mrigal. D’autres espèces sont élevées en enclos et en cage (par exemple les tilapias) ou en étang côtier (par exemple, les chanidés).

La production de la crevette d’élevage a connu un développement spectaculaire au cours de la décennie écoulée, atteignant 692 000 tonnes en 1994, La région fournit 75 pour cent de la production mondiale totale de crevettes d’élevage et la crevette royale géante est l’espèce d’élevage la plus appréciée. Les principaux producteurs sont la Thaïlande et l’Indonésie. A plusieurs endroits de la région, l’environnement côtier a souffert de la croissance rapide des installations d’élevage (encadré 19).


ENCADRÉ 19
Les élevages de crevettes et leur incidence sur l’environnement

La croissance rapide et le développement des élevages de crevettes, favorisés par leur forte rentabilité et par la demande de consommateurs généralement aisés, ont procuré aux pays en développement de la région des revenus considérables en devises étrangères. Toutefois, l’essor de cette activité a été accompagné de certaines répercussions sur l’environnement. En particulier, l’essor des étangs d’élevage de crevettes a parfois contribué notablement à la disparition de mangroves - déjà exposées aux pressions exercées par d’autres sources de pollution. Toutefois, de nombreux élevages ont été construits dans des zones plus adaptées, extérieures aux mangroves, ou dans des zones où les mangroves avaient été préalablement défrichées pour d’autres raisons.

Les autres principaux sujets de préoccupation concernant l’environnement sont la salinisation des eaux souterraines et des terres agricoles, les répercussions sur l’abondance des populations de larves de crevettes consécutives au regroupement de souches sauvages et la pollution due aux effluents des élevages de crevettes concentrés dans des zones caractérisées par le renouvellement insuffisant des eaux côtières, provoquant en maintes circonstances une pollution des eaux voisines et la recrudescence de la maladie de la crevette. De nouveaux rapports concernant les répercussions sur l’environnement sont certes parus récemment, mais l’ampleur et la gravité des effets constatés n’ont pas toujours été étudiées avec l’objectivité et la perspicacité nécessaires. Toutefois, on admet généralement à présent que l’image auprès du public des élevages de crevettes et de l’aquaculture en général risque de pâtir des pratiques irresponsables de certains entrepreneurs qui ont provoqué une grave dégradation de l’environnement et des perturbations affectant la collectivité.

La durabilité à long terme des élevages de crevettes est actuellement étudiée au niveau national comme au niveau international. Nombre de gouvernements, représentants du secteur privé, organisations internationales et organisations non gouvernementales (ONG) préconisent actuellement des pratiques d’élevage de la crevette qui soient acceptables tant pour l’environnement que pour la collectivité. Au titre des activités régionales dans ce domaine figure la promotion d’une intensification durable des systèmes traditionnels d’élevage extensif, une gestion de l’environnement adaptée aux divers systèmes d’élevage, intégrant la production de crevettes et la sylviculture et enfin, l’élaboration de politiques et de mesures juridiques spécifiques.

Source: ADB/NACA. 1996. Aquaculture sustainability action plan. Regional study and workshop on aquaculture sustainability and the environment (RETa 5534). Asian Development Bank (ADB) and Network of Aquaculture Centres in Asia-Pacific (NACA). NACA, Bangkok. 21 p.; FAO. 1995. Code de conduite pour une pêche responsable. Rome. 48 p.; FAO/NACA. 1995. Regional Study and Workshop on the Environmental Assessment and Management of Aquaculture Development in Asia-Pacific. NACA Environment and Aquaculture Development Series N° 1. NACA, Bangkok. 492 p.

PRODUITS ET MARCHÉS

La consommation de poisson est plus ou moins développée à l’intérieur de la région; elle est relativement importante dans les zones côtières et les grands centres urbains, en particulier dans la partie orientale de la région. A Singapour et aux Philippines, les disponibilités moyennes de poisson par habitant pour l’alimentation sont d’environ 36 kg par an (équivalent poids vif); en Malaisie, elles atteignent pratiquement 30 kg, et en Thaïlande, elles sont de l’ordre de 25 kg. Aux Maldives, les disponibilités annuelles de poisson se classent au premier rang mondial, puisqu’elles atteignent 126 kg par personne. En revanche, en Inde, pays le plus peuplé, le chiffre correspondant est de 4 kg seulement et la moyenne régionale totale est donc limitée à quelque 9 kg. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que les caractéristiques de consommation présentent des différences notables à l’intérieur de l’Inde et que certaines communautés côtières sont étroitement tributaires du poisson pour leur alimentation.

Bien que la moitié des quantités de poisson débarquées soit commercialisée à l’état frais, les quantités commercialisées de poisson congelé sont de plus en plus considérables. L’utilisation du poisson se caractérise par une production accrue d’une vaste gamme de préparations à valeur ajoutée, tant pour les marchés nationaux qu’internationaux. Les installations de transformation thaïlandaises produisent encore des crevettes congelées en bloc, mais nombre d’entre elles produisent maintenant des crevettes écaillées et panées et utilisent des matières premières importées de pays tels que la Nouvelle-Zélande, l’Inde et les Etats-Unis, lorsque les approvisionnements locaux sont insuffisants. Des préparations de poisson émincé, notamment du surimi, sont également produites et font l’objet d’une consommation importante dans la région. Les poissons traités, c’est-à-dire séchés, ou salés, en particulier les petits pélagiques, revêtent également une certaine importance. Le poisson en conserve est un produit couramment consommé, produit en Thaïlande, en Indonésie et aux Philippines. L’industrie thaïlandaise de conserverie utilise des matières premières importées, en particulier des listaos et réexporte les produits finals. Dans la région, de plus en plus d’industries de transformation du poisson importent leurs matières premières.

Les pertes après-capture de poisson ont été notablement réduites ces dernières années, grâce à l’amélioration des infrastructures de débarquement, d’entreposage, de transport et de commercialisation. Toutefois, certaines pêcheries subissent de considérables pertes en valeur à caractère saisonnier. Les pertes dues au niveau excessif de l’offre sont de plus en plus utilisées pour l’alimentation animale en aquaculture.

La croissance économique et les politiques de libéralisation des échanges se sont traduites par un développement notable du commerce du poisson au cours de la décennie écoulée. Certains pays, en particulier les nouveaux membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), la Malaisie, les Philippines et l’Inde, procèdent actuellement à une baisse de leurs tarifs douaniers, suite à la conclusion des négociations du Cycle d’Uruguay de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT). Le pourcentage des captures destinées au commerce international a augmenté régulièrement et la Thaïlande s’est classée au premier rang des exportateurs mondiaux de poisson et de produits de la pêche à partir de 1993. L’Indonésie et l’Inde occupent respectivement les deuxième et troisième places au niveau régional. Hormis Singapour, tous les pays de la région étaient alors des exportateurs nets en valeur. La crevette et le thon congelés contribuent pour l’essentiel aux recettes à l’exportation des pêches régionales, les apports du thon et des céphalopodes en conserve étant par ailleurs notables.

Figure 63 Production halieutique par grands groupes d’espèces

Figure 64 Importations et exportations de poisson des principaux pays pratiquant des échanges en 1994

POLITIQUE DES PÊCHES ET MESURES D’AMÉNAGEMENT

La durabilité des ressources halieutiques est un problème crucial dans de nombreux pays. Les ressources côtières sont généralement gravement surexploitées par un secteur sur encombré de petits pêcheurs dont le niveau des captures, la taille et la qualité des poissons pêchés, et dans certains cas les revenus, diminuent. Les conflits entre pêches à petite échelle et chalutiers opérant dans les zones côtières sont fréquents. De plus, l’administration des pêches est rendue plus complexe par l’absence d’évaluations détaillées des stocks. Enfin, la diversité des ressources et des méthodes d’exploitation utilisées complique encore davantage l’aménagement des pêches côtières. D’après l’expérience recueillie à ce jour, les systèmes publics centralisés d’aménagement actuellement en vigueur dans de nombreux pays ne sont pas en mesure de réglementer convenablement les pêches pratiquées dans des zones de pêche très éloignées. Dans certains pays, un partenariat entre les communautés locales et le gouvernement central s’oriente vers la définition d’un système communautaire d’aménagement des pêches appliqué aux ressources locales. D’autres mesures d’aménagement sont également mises en place afin d’améliorer la situation, et l’effort de pêche est généralement réglementé par un type ou un autre de système d’octroi de licences concernant le nombre de navires ou d’équipements de pêche. L’interdiction du chalutage dans certaines zones de pêche indonésiennes est un exemple intéressant. Les pêcheurs au chalut auxquels il a été interdit de pratiquer le chalutage se sont orientés vers les pêches en mer d’espèces pélagiques et vers l’élevage de la crevette, ce qui a eu pour effet de limiter nettement les conflits.

Les ressources et les habitats côtiers sont gravement menacés par une rapide dégradation de l’environnement. Ainsi, la dégradation de l’environnement due aux activités humaines, par le biais de l’aquaculture et des élevages piscicoles, est un problème grave. Les exigences de préservation de l’environnement imposées par le commerce international et concernant la sélectivité des engins de pêche ont affecté l’Asie. Les avantages des dispositifs sans danger pour l’environnement, tels que les dispositifs de réduction des prises accessoires et de ségrégation de tortues, ainsi que les conséquences de l’obligation de les utiliser, sont actuellement à l’étude. Les protestations des pays asiatiques contre les exigences imposées par les Etats-Unis quant à l’utilisation des dispositifs de ségrégation de tortues pour pouvoir accéder à leurs marchés ont été portées à l’attention de l’OMC, en tant que violation des accords de commerce internationaux. Les prises accessoires des chalutages de crevettes et de poissons osseux sont très importantes dans la région. Avant que la mariculture côtière ne soit intensifiée, la plus grande partie des prises accessoires était rejetée en mer et seule une petite portion ramenée à terre. Grâce à la mise au point des systèmes d’eau de mer réfrigérée pour l’entreposage à bord et du fait de l’accroissement de la demande d’aliments pour animaux du secteur aquacole, les prises accessoires sont désormais débarquées dans une proportion nettement accrue. Par ailleurs, on utilise un poisson de meilleure qualité pour alimenter les poissons ou les crabes d’élevage. Une autre partie des prises accessoires est par ailleurs réduite en farine de poisson. De plus, la transformation du poisson et des produits à base de poisson a ouvert des débouchés aux prises accessoires. Néanmoins, leur utilisation éventuelle est fonction de l’emplacement des zones de pêche et des ports, de la situation socioéconomique des communautés de pêcheurs et de l’infrastructure en place. Dans le cas des pêcheries éloignées et faiblement développées, il se peut qu’il n’y ait aucune alternative au rejet en mer (encadré 20).


ENCADRÉ 20
Prises accessoires et rejets en mer dans les pêcheries de crevettes de Malaisie

Les prises accessoires des chalutages de crevettes en Malaisie se composent surtout de poissons osseux, céphalopodes, coquillages et différents crustacés de valeur moins élevée. Bien que les pêcheurs rapportent chez eux ou vendent la majorité des prises accessoires susceptibles d’être commercialisées en tant que nourriture, le restant est souvent considéré comme un produit de rebut et n’est pas utilisé comme aliment. Toutefois, le poisson de rebut est souvent débarqué et vendu comme produit d’alimentation animale destiné à l’aquaculture.

D’après les résultats d’une étude consacrée aux pêcheries de crevettes à Kuala Sepetang (côte ouest de la péninsule de Malaisie), en 1992, les prises accessoires réalisées par les engins de pêche traditionnels sont inférieures à celles des chalutiers industriels. Ainsi, ces chalutiers se caractérisaient par un rapport crevette/poisson compris entre 1:1,6 et 1:6,1, alors que le rapport correspondant des filets classiques était généralement compris entre 1:0,4 et 1:1,2 (à l’exception de deux mois de l’année pendant lesquels le volume des prises accessoires était plus important). Les prises accessoires des pêches traditionnelles étaient utilisées en partie comme produits d’alimentation animale dans les fermes aquacoles locales, mais certains chalutiers de pêche à la crevette rejettent leurs prises accessoires en mer dès lors que les prises principales permettent à elles seules d’obtenir des revenus suffisants. De plus, l’absence d’industrie locale de transformation du poisson de rebut a été donnée comme explication des rejets en mer.

Source: Adnan bin Nuruddin, A. et Fong, L.C. 1994. Biosocioeconomics of fishing for shrimp in Kuala Sepetang, Malaysia. Madras, Inde; Chee, P.E. A review of the by-catch and discards in the fisheries of Southeast Asia. Fisheries Research Institute, Penang, Malaisie. (non publié)

PERSPECTIVES

La population de la région augmente rapidement et le poisson reste pour la plupart des gens une source traditionnelle de protéines animales. Les marchés intérieurs devraient se développer rapidement, grâce à la progression des revenus, tandis que le renchérissement des prix sur les marchés internationaux contribuera à stimuler les exportations d’espèces sauvages et de poissons d’élevage de valeur élevée. La hausse des revenus se traduit par une intensification du commerce intra-régional de produits de valeur élevée et de poissons à bas prix pour la consommation courante. En 2010, les disponibilités de poisson devront avoir augmenté de 6 millions de tonnes, ne serait-ce que pour maintenir les niveaux actuels de consommation par habitant; l’incidence de la croissance économique sur la demande se traduira par la nécessité de disposer de quantités encore plus importantes.

Les ressources halieutiques marines sont généralement pleinement exploitées et offrent aux pays de la région peu de possibilités d’accroissement de leur approvisionnement national en protéines. La plupart des espèces pélagiques, des crustacés et des espèces démersales des zones de pêche côtière du golfe de Thaïlande, du golfe du Tonkin, du golfe du Bengale et de la mer de Chine méridionale ont été pleinement exploitées ou épuisées. En dépit du niveau d’exploitation modéré de certains stocks de poisson (par exemple, anchois ainsi que thon et céphalopodes de plus petite taille dans le Pacifique Centre-Ouest), il est peu vraisemblable de pouvoir répondre à la demande future par des accroissements notables de la production de poisson de mer. En fait, de nombreux stocks intensément exploités devront être reconstitués rapidement par des réductions drastiques de l’effort de pêche.

L’aquaculture et, dans une moindre mesure, les pêches intérieures, peuvent offrir des possibilités importantes de développement futur pour augmenter la production régionale de poisson, en particulier au Bangladesh, au Cambodge, en Inde, en Indonésie, au Laos, en Malaisie, au Myanmar, aux Philippines, en Thaïlande et au Viet Nam. Néanmoins, la région devra sans doute faire appel de plus en plus aux importations de produits de la pêche pour assurer ses approvisionnements futurs.

1 D’après l’étude régionale préparée par l’équipe spéciale interdépartementale de la FAO dirigée par M. M. Hotta, Division des politiques et de la planification de la pêche/Service de la planification et du développement (FIPP).

8. Afrique subsaharienne1

La région couvre le continent africain, à l’exception des pays d’Afrique du Nord riverains de la Méditerranée (Maroc compris). Les activités de pêche en mer sont concentrées dans l’Atlantique Centre-Est, l’Atlantique Sud-Est et l’océan Indien Ouest.

Les pêches jouent un rôle important dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne, en tant que principale source d’approvisionnement en protéines animales et en tant que fournisseur de devises étrangères et créateur d’emplois ruraux. On estime à 8 millions le nombre de personnes employées directement ou non dans le secteur. La production totale des pays de la région s’est élevée à 3,9 millions de tonnes en 19942. La consommation de poisson pour l’alimentation a diminué récemment, passant d’un niveau moyen de disponibilités par habitant d’environ 9 kg en 1990 à moins de 7 kg en 1994 (équivalent poids vif). Le bilan global des échanges de la région a été positif (en valeur) en ce qui concerne la décennie écoulée, bien que la région participe peu au commerce international.

RESSOURCES ET PRODUCTION

Pêches en mer

Les pêches de capture en mer assurent près de 60 pour cent de la production halieutique de la région et les quantités pêchées se sont élevées à environ 4,2 millions de tonnes en 1994, dont 2,3 millions pour les captures des flottilles nationales et 1,8 million pour celles des flottilles étrangères. Les pêches sont concentrées dans quatre grandes zones.

Figure 65 Production halieutique régionale et part en pourcentage de la production mondiale totale

Au sud, dans une zone comprenant les eaux territoriales de l’Angola, de la Namibie et de l’Afrique du Sud, le merlu du Cap fournit les captures les plus abondantes. Les principales espèces pélagiques exploitées sont la sardine et l’anchois. Les stocks d’anchois ont connu des variations considérables marquées par une tendance générale à la baisse. Le crabe rouge et la langouste du Cap sont les principaux crustacés exploités bien que les captures de ce dernier aient régulièrement diminué depuis les années 50. Hormis quelques petits pélagiques, la plupart des stocks sont pleinement exploités, notamment la majorité des stocks démersaux.

Dans la zone centrale, du Gabon à la Guinée, les ressources sont moins abondantes. L’important stock de balistes a pratiquement disparu aujourd’hui. Quant aux stocks traditionnels au large, ils sont intensément exploités et l’effort de pêche a encore augmenté depuis 1984. Dans une zone, des évaluations récentes font apparaître une diminution d’environ 50 pour cent de la biomasse totale. Toutefois, les petits pélagiques offrent des possibilités de poursuite de l’exploitation, ainsi que les stocks démersaux du plateau continental profond et du talus continental dans la plus grande partie du sud du golfe de Guinée. Il existe en outre des stocks localisés de crevettes jouant un rôle économique important, principalement au large des embouchures des cours d’eau et des entrées de lagunes dans le golfe de Guinée et aussi au large de la partie nord du littoral. Les ressources sont abondantes dans la zone septentrionale de la côte occidentale. La plupart des stocks démersaux sont pleinement exploités, mais depuis la Mauritanie jusqu’à la Guinée-Bissau, les petites espèces pélagiques sont généralement abondantes et se composent principalement de sardinelles, de chinchards et de sardines. Les quantités débarquées correspondantes ont enregistré une chute brutale en raison de la limitation de l’effort de pêche. Les céphalopodes sont pêchés au large du Sénégal, de la Mauritanie et du sud du Maroc3.

Au large de la côte orientale de l’Afrique, les captures constituent moins de 10 pour cent des captures totales de la région (productions étrangère et nationale mélangées). Les petits pélagiques sont moins abondants que sur la côte occidentale. La plupart des espèces de poissons osseux et de crustacés font l’objet d’une exploitation intense, sauf au large de la Somalie et de l’Erythrée.

Les thons, les bonites et différentes espèces de grands pélagiques sont capturés en haute mer (par des navires importants équipés de sennes coulissantes) et le long des côtes (à la canne) dans l’ensemble de l’Afrique subsaharienne.

Près de la moitié de la production marine totale de la région est encore le fait de flottilles étrangères, opérant essentiellement dans l’océan Atlantique, bien que leurs captures aient diminué rapidement ces dernières années. Suite au retrait partiel des flottilles d’Europe de l’Est et de l’ex-URSS du littoral d’Afrique de l’Ouest, la production totale de petits pélagiques a diminué, estime-t-on, de 72 pour cent entre 1990 et 1992. Les pêches artisanales (pirogues et petites embarcations) réalisent plus de 70 pour cent des débarquements nationaux sur le littoral oriental et près de la moitié sur le littoral occidental. Le secteur artisanal a, semble-t-il, amélioré notablement son efficacité et fait état de captures plus élevées par pirogue en 1990 qu’en 1980. Il s’agit d’un secteur à forte intensité de main-d’œuvre; dans certains petits Etats insulaires, plus d’un tiers des travailleurs agricoles participent également à des activités liées aux pêches.

A quelques exceptions près, l’efficacité économique des flottilles industrielles étrangères (sauf pour la pêche au thon) et des flottilles nationales est généralement faible. On constate une rotation importante des entreprises locales. Les pêches industrielles d’espèces démersales sont vraisemblablement instables en raison de leur surcapacité et, plus généralement, faute d’une gestion adéquate. La surcapacité est effectivement un facteur en cause dans le cas des navires pêchant les céphalopodes et la crevette. En termes de tonnage, les données disponibles font apparaître un doublement probable des flottilles nationales au cours de la période allant de 1980 à 1990 (principalement sur la côte occidentale). Toutefois, la multiplication des navires de pêche locaux ne doit pas être interprétée comme un accroissement net de l’effort de pêche, puisqu’elle a été accompagnée d’une diminution de l’effort de pêche des flottilles étrangères.

Une forte proportion des prises accessoires, en particulier des pêches démersales et des pêches de crustacés, sont rejetées en mer. Dans le cas des pêches à la crevette par exemple, 10 à 15 pour cent seulement des prises accessoires évaluées à environ 1 million de tonnes sont débarquées. Toutefois, on constate une tendance à une meilleure utilisation des prises accessoires grâce à l’introduction de mesures de réglementation spécifiques et à la mise au point de systèmes de collecte en mer par les pêcheurs locaux (encadré 21).


ENCADRÉ 21
Utilisation des prises accessoires des pêches à la crevette en Tanzanie

Bien qu’une partie des prises accessoires des chaluts de pêche à la crevette soit débarquée en République-Unie de Tanzanie depuis le démarrage des chalutages industriels dans le début des années 60, elles sont pour l’essentiel rejetées en mer. Il est difficile de les quantifier, mais on peut évaluer à 1:3 un rapport moyen des prises crevettes/poissons et à 40 à 60 pour cent la proportion de poissons rejetés en mer. Les rejets en mer posent un problème non seulement dans le cas des chalutages industriels de crevettes, mais aussi dans le secteur artisanal.

Le problème du rejet en mer des prises accessoires a souvent été associé à l’absence d’installations de conservation à bord des chalutiers de pêche à la crevette. Récemment toutefois, la diminution des captures par navire et par jour prouve qu’il y a maintenant un certain potentiel de stockage des prises accessoires. Les pêcheurs sont en outre devenus davantage désireux de vendre les prises accessoires afin de compléter leurs revenus. De plus, le gouvernement a commencé à réglementer les débarquements de prises accessoires: les chalutiers de pêche à la crevette doivent opérer en présence d’un fonctionnaire des pêches, qui participe à titre d’observateur; la pêche doit s’interrompre à 6 heures de l’après-midi pour permettre le recueil des prises accessoires et empêcher la destruction des filets artisanaux placés sur les mêmes zones de pêche; enfin, le renouvellement des licences annuelles de pêche a été assujetti au débarquement d’une certaine quantité de prises accessoires. Les mesures adoptées ont été suivies de résultats puisque les ventes de prises accessoires augmentent à nouveau et davantage de pêcheurs participent à ce commerce. Par exemple, en 1989, il n’y avait dans la ville de Bagamoyo aucun collecteur de prises accessoires, alors qu’en 1993 ils étaient une dizaine.

Cependant, les collecteurs de prises accessoires se heurtent à des difficultés liées à la nature même des accords de vente appliqués. Les négociations officielles avec la société de chalutage peuvent prendre beaucoup de temps et impliquer beaucoup de déplacements; par ailleurs les négociations directes avec le capitaine du chalutier confèrent un caractère aléatoire au résultat de la transaction, tandis que le troc entre les artisans pêcheurs et l’équipage (portant sur des cigarettes ou des légumes contre du poisson) sans arrangement préalable comporte des délais pour recevoir les prises accessoires et ne constitue pas une garantie d’approvisionnement. Le transport peut également être un problème, faute d’embarcations motorisées, en raison des coûts élevés et de la mauvaise qualité des routes d’accès au marché. Aussi les collecteurs potentiels risquent-ils d’être découragés par le coût prohibitif de la récupération des prises accessoires.

Il semble toutefois qu’il y ait un marché pour ces produits et que l’infrastructure actuelle puisse s’adapter à des quantités accrues de poisson. A condition de consacrer une plus grande attention aux prises accessoires des chalutiers de pêche à la crevette, le système pourrait être amélioré à l’avenir et autoriser ainsi un accroissement des disponibilités alimentaires de la population tanzanienne.

Source: Gouvernement de Madagascar/PNUD-CTPD/TCDC/FAO. Utilization of by-catch from shrimp trawlers. Rapport et actes d’un Atelier Programme des Nations Unies pour le développement sur la coopération technique entre pays en développement (PNUD-CTPD), Nosy Bé, Madagascar, 6-8 juin 1995.

Pêches continentales

La production des pêches de capture intérieures a augmenté au cours de la décennie passée, à un rythme annuel d’environ 3,5 pour cent, atteignant 1,6 million de tonnes en 1994 et représentant ainsi plus de 40 pour cent de la production halieutique totale de la région. Parmi les principales espèces figurent la perche du Nil, le tilapia et le loup. Les pêches intérieures jouent évidemment un rôle essentiel du point de vue des disponibilités alimentaires locales; hormis l’exportation de quelques tonnes de perches du Nil, la production intérieure est généralement consommée dans la région et représente près de la moitié des disponibilités locales (importations non comprises). Le Kenya, le Nigéria, l’Ouganda, la République-Unie de Tanzanie et le Zaïre sont les principaux pays producteurs de poisson d’eau douce en Afrique sub-saharienne et fournissent 70 pour cent des prises totales. Aussi la production dulcicole africaine subsaharienne est-elle relativement localisée, le lac Victoria fournissant un quart de la production totale.

Figure 66 Utilisation du poisson et disponibilités alimentaires

Figure 67 Importations et exportations de poisson (y compris le commerce intrarégional)

Les pêcheries dulcicoles sont pratiquement toutes de type artisanal et doivent rapidement faire l’objet de mesures d’aménagement appropriées car la plupart des zones de pêche présentent actuellement des signes d’exploitation intensive. La création de retenues d’eau se poursuit, mais il importe d’améliorer leur productivité naturelle. La production actuelle des systèmes lacustres plus importants est très proche de leur niveau de production potentiel. Seuls les stocks éloignés des côtes d’espèces pélagiques faiblement exploitées peuvent soutenir un effort de pêche accru.

Aquaculture

L’aquaculture africaine subsaharienne commence à se développer bien qu’il ne s’agisse pas d’une pratique traditionnelle comme en Asie. Toutefois, le continent ne fournit que 0,2 pour cent de la production mondiale totale et plusieurs pays ont simplement une production aquacole qui vient de démarrer ou dont le niveau est erratique. Dans l’ensemble, la région a produit 33 000 tonnes de poisson en 1994. Seuls l’Afrique du Sud, le Kenya, Madagascar, le Nigéria et la Zambie ont produit plus de 1000 tonnes chacun, mais ces pays ont doublé à plusieurs reprises leur production au cours de la décennie écoulée.

Les principales espèces cultivées comprennent les poissons osseux (tilapias, silures, carpes), les coquillages et les crevettes. Les poissons d’eau douce fournissent plus de 80 pour cent des captures totales, et la quasi-totalité des activités d’élevage piscicole en Afrique sont pratiquées à des fins de subsistance par des ruraux, dans des petits étangs d’élevage en eau douce, à titre d’activité complémentaire de l’agriculture. Les élevages commerciaux de crevettes se développent dans certains pays, notamment en Guinée, au Kenya, à Madagascar et au Mozambique. Toutefois, la poursuite du développement de l’aquaculture se heurte à l’insuffisance des soutiens institutionnels, ainsi qu’aux problèmes posés par le changement climatique. En outre, les efforts entrepris ne revêtent pas un caractère de durabilité particulière, car les projets de développement aquacole reposent souvent sur l’assistance extérieure.

PRODUITS ET MARCHÉS SUBSAHARIENNE

Le poisson est une nourriture communément appréciée en Afrique subsaharienne: il fournit 18 pour cent des apports en protéines animales, proportion pouvant atteindre 40 à 60 pour cent dans certains Etats d’Afrique de l’Ouest. Il est généralement consommé en petites quantités lors des repas quotidiens, constitués pour le reste essentiellement de féculents de base. Puisque toutes les parties du poisson sont consommées, il contribue substantiellement aux apports de calcium et d’iode.

Compte tenu de ces caractéristiques, la consommation de poisson dans la région joue sans doute un plus grand rôle que les chiffres de disponibilités par habitant de poisson pour l’alimentation ne le laissent supvposer. D’après les statistiques de la FAO, la consommation de poisson a baissé de plus de 2 kg par personne et par an au cours des dernières années - passant d’une disponibilité par habitant de 8,8 kg en 1984 à 6,8 kg en 1994 (équivalent poids vif). Cette évolution est due principalement à la rapidité de la croissance démographique, à une baisse des importations aggravée par la chute du pouvoir d’achat de certains pays riverains du golfe de Guinée et, enfin, par la fraction encore plus réduite de la production intérieure conservée pour les marchés locaux, puisque les pêches artisanales se tournent de plus en plus vers les marchés lucratifs à l’exportation. Toutefois, la plus grande partie de la production halieutique est encore destinée à l’alimentation des populations locales. Il convient de signaler une diminution comparable de la consommation de viande au cours des dernières années.

Figure 68 Production halieutique par grands groupes d’espèces

Figure 69 Importations et exportations de poisson des principaux pays pratiquant des échanges en 1994

Les produits de la pêche d’origine locale sont généralement commercialisés à l’état frais, fumés et séchés ou bien salés et séchés. Les consommateurs préfèrent les produits frais et près de la moitié des quantités consommées sont constituées de poissons osseux frais. Toutefois, en raison des problèmes de transport, les produits frais ne sont généralement disponibles qu’à proximité des centres de production. Les femmes jouent un rôle majeur en matière de transformation et de commercialisation, en particulier en Afrique occidentale. Les importations sont constituées essentiellement de produits congelés.

Le commerce intrarégional rencontre les problèmes suivants: coût élevé de transport et d’entreposage, carences des pratiques de manutention, limitation des réseaux de distribution et absence d’harmonisation et d’application effective des réglementations du commerce du poisson. Les barrières douanières et différents obstacles aux échanges existent toujours entre les pays faisant partie de l’union douanière. Le commerce est constitué essentiellement des exportations de petits pélagiques congelés provenant du littoral nord-ouest vers le sud à destination des pays du golfe de Guinée.

Bien que la balance du commerce régional ait été positive en valeur depuis le milieu des années 80, l’Afrique subsaharienne reste un importateur net de poisson en termes de volume. De nombreux pays exportent des quantités limitées, quoique de plus en plus importantes, de poissons démersaux et de crustacés frais et congelés, principalement à destination de l’Union européenne (UE). Toutefois, le solde globalement positif de la balance commerciale est assuré grâce aux exportations relativement fortes d’une poignée de pays. La dépendance à l’égard du marché de l’UE pourra à l’avenir être responsable de difficultés compte tenu de la libéralisation des échanges et de la disparition du statut préférentiel des pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) (voir encadré 22).


ENCADRÉ 22
Le Cycle d’Uruguay du GATT de négociations sur les échanges multilatéraux et les exportations d’Afrique subsaharienne de produits de la pêche à destination de l’UE

Un certain nombre de pays en développement ont actuellement accès au marché de l’Union européenne (UE) en vertu des dispositions concernant le commerce de la Convention de Lomé, accord conclu entre l’UE et 69 pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (les pays dits ACP). Conformément à cet accord, les exportations de produits de la pêche provenant des pays ACP peuvent pénétrer sans droits de douane à l’intérieur des pays de l’UE. Ainsi, les pays ACP d’Afrique subsaharienne sont fortement tributaires du marché européen, puisqu’ils y exportent de 75 à 85 pour cent de leurs exportations totales de poisson. Outre différents types de démersaux, l’exportation porte sur deux grands types de produits de la pêche: les crustacés, qui représentent près du quart en valeur des exportations de poisson de la région, essentiellement des crevettes de Côte d’Ivoire, du Sénégal, de Madagascar et du Mozambique; et le thon, soit un tiers en valeur des exportations totales, essentiellement du thon en conserve provenant de Côte d’Ivoire, de Maurice et du Sénégal.

Les négociations du Cycle d’Uruguay du GATT menées en 1994 ont conclu à la nécessité d’une harmonisation mondiale des régimes douaniers. Pour les produits de la pêche, le principal résultat obtenu a été un accord visant à abaisser les droits de douane de 26 pour cent en moyenne, de nombreux pays importateurs devant donc abaisser les droits de douane appliqués à un certain nombre de produits. En règle générale, les tarifs douaniers seront réduits progressivement, sur cinq années. Toutefois, alors que le Japon et les Etats-Unis réduisent considérablement leurs droits de douane, plusieurs tarifs douaniers de l’UE concernant les produits de la pêche restent pratiquement inchangés. Le fait que les droits d’importation appliqués aux crevettes tropicales tombent de 18 à 12 pour cent constitue une exception importante du point de vue des exportateurs d’Afrique subsaharienne. En revanche le thon en conserve continuera à faire l’objet d’un droit d’importation de 24 pour cent. Les concessions actuellement consenties par l’UE font cependant l’objet de nouvelles négociations, et de nouveaux abaissements des tarifs douaniers pourront être introduits à l’avenir.

En ce qui concerne les pays ACP d’Afrique subsaharienne, cette évolution conduira en définitive à une concurrence accrue d’autres pays en développement. Tout d’abord, la marge préférentielle dont bénéficient les pays ACP sera érodée et de plus, dans l’esprit du GATT, suivant lequel tous les partenaires commerciaux doivent faire l’objet d’un traitement identique, l’avenir de la Convention de Lomé sera probablement mis en cause.

Le résultat des accords commerciaux internationaux récemment négociés n’aura sans doute pas un effet immédiat sur les pêches d’Afrique subsaharienne. Au cours de la période intérimaire d’ajustement à ces régimes commerciaux, l’industrie devra cependant s’adapter à ce nouveau contexte pour rester concurrentielle.

Source: FAO. 1995. Impact de l’Acte final de l’Uruguay Round sur les pêches de l’Afrique subsaharienne. FAO, Circulaire sur les pêches n° 897. Rome; FAO/GLOBEFISH. 1995. Impact of the Uruguay Round on international fish trade, par A. Filhol. FAO/GLOBEFISH. Research Programme, Vol. 38. Rome.

POLITIQUE DES PÊCHES ET MESURES D’AMÉNAGEMENT

Depuis le milieu des années 80, de nombreux pays ont cherché à élaborer des plans sectoriels à moyen terme visant à soutenir les politiques macroéconomiques des pouvoirs publics. Toutefois, dans nombre de cas ces plans n’ont pas été menés à bien. Les principaux obstacles à une bonne planification de l’aménagement des pêches dans la région sont liés à l’insuffisance des budgets, à la faiblesse de la base institutionnelle et à l’absence de volonté politique d’application effective des politiques et des mesures d’aménagement. Les ajustements structurels et les coupes budgétaires qui en résultent ont contribué en outre à raréfier les subventions accordées aux pêches.

L’adoption de systèmes de quotas et d’octroi de licences est la solution la plus courante en matière d’aménagement des ressources marines. Dans nombre de pays côtiers, les licences sont une source importante de devises étrangères. Les accords de pêche font fréquemment partie de négociations plus complexes, dont le commerce ne constitue qu’un élément. De plus, les pêcheurs de subsistance opèrent dans le cadre de systèmes traditionnels d’aménagement, ce qui fait de la gestion des ressources une tâche plus délicate et plus complexe.

Le trait caractéristique du potentiel des pêches en eau douce d’Afrique subsaharienne est sa variabilité annuelle. Ainsi, les systèmes qui présentent des fluctuations saisonnières et interannuelles de superficie - retenues d’eau, marécages et plaines inondables des rivières - représentent près de 60 pour cent de la superficie totale des eaux. La gestion biologique et sociale de ce type de pêcherie est évidemment particulièrement délicate.

La coopération régionale en matière de politique des pêches et de mesures d’aménagement a été traditionnellement assurée par des organismes dépendant de la FAO, par exemple le Comité des pêches pour l’Atlantique Centre-Est (COPACE). Ces dernières années, des efforts ont été déployés pour renforcer les attributions des organismes des pêches vis-à-vis des problèmes liés à l’aménagement ou pour instituer de nouvelles instances, par exemple la Conférence ministérielle des Etats africains riverains de l’océan Atlantique, ou la Commission des pêches du lac Victoria. Ces initiatives devraient compléter les tâches accomplies par les nombreux groupements économiques responsables des pêches, mais qui, à l’exception de la Communauté du développement de l’Afrique australe (SADC), n’ont généralement pas mis en œuvre les moyens nécessaires pour appliquer une politique des pêches et des stratégies d’aménagement efficaces.

PERSPECTIVES

Les projections de croissance démographique établies par les Nations Unies annoncent pour la région une population atteignant 700 millions d’habitants en l’an 2000 et 915 millions en l’an 2010. En supposant inchangés les niveaux actuels de consommation de poisson pour l’alimentation par habitant, la satisfaction de la demande en l’an 2010 exigerait un accroissement des disponibilités totales de l’ordre de 2 millions de tonnes.

Les possibilités futures d’accroissement des disponibilités de poisson pour l’alimentation dans la région de l’Afrique subsaharienne sont liées principalement aux programmes d’amélioration de la productivité dans les petits plans d’eau, au développement de l’aquaculture, ainsi qu’à une meilleure utilisation des petits pélagiques, à la relocalisation des flottilles étrangères et à l’accroissement des importations. La mise en œuvre de systèmes judicieux d’aménagement des pêches, la réduction des rejets en mer des pêcheries industrielles et l’amélioration des pratiques de manutention après-capture et des réseaux de distribution permettraient en outre d’obtenir des accroissements supplémentaires.

Compte tenu des modestes prévisions de croissance du produit intérieur brut (PIB) pour les 15 prochaines années, les perspectives futures ne semblent guère prometteuses. On observera vraisemblablement de nouvelles réductions des importations, des augmentations du prix réel du poisson, une demande soutenue concernant essentiellement les espèces de faible valeur et la poursuite des exportations de la plupart des espèces démersales. Simultanément, la baisse des subventions des pouvoirs publics augmentera les coûts de production et affaiblira la compétitivité sur les marchés à l’exportation.

Les implications en termes de sécurité alimentaire et de disponibilités, comme en termes de recettes en devises étrangères, sont difficiles à quantifier, mais devraient constituer à l’avenir un sujet de préoccupation.

1 D’après l’étude régionale préparée par l’équipe spéciale interdépartementale de la FAO dirigée par M. A. Bonzon, Division des politiques et de la planification de la pêche/Service de la planification et du développement (FIPP).

2 Sans compter les tonnages pêchés par les flottilles étrangères et non débarqués dans la région.

3 Les pêches du Maroc sont passées en revue dans l’étude régionale consacrée au Proche-Orient et à l’Afrique du Nord p. 85.

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