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Origines, impacts, effets et maîtrise du feu dans les zones boisées d'Afrique Australe

Peter G.H. Frost21
21 Institut des études sur l'environnement (Institute of Environmental Studies), Université du Zimbabwe, P.O. Box MP 167, Mount Pleasant, Harare, Zimbabwe.
INTRODUCTION

La combustion de la biomasse est un phénomène courant et très répandu dans tout le monde tropical. Les incendies de végétation, qu'ils soient allumés pour diverses raisons par les populations, ou par la foudre, sont fréquents et couvrent de grandes étendues. Les feux alimentés par le bois, le charbon de bois ou les résidus agricoles sont la principale source d'énergie domestique pour la cuisine et le chauffage. Le feu est aussi utilisé pour éliminer la biomasse lors du défrichement des terres destinées à l'agriculture, ou, après la culture, pour se débarrasser des résidus agricoles indésirables. L'ensemble de ces feux constitue une source importante de gaz traces et de particules en suspension libérés dans l'atmosphère. On évalue actuellement la quantité de biomasse brûlée chaque année à 6230-8700 Tg22 ms an-1, dont environ 87 pour cent sous les tropiques. Sur ces derniers, près de la moitié (49 pour cent) est attribuée aux feux de savanes, comprenant à la fois les incendies et les feux liés à l'utilisation des terres. Le reste correspond à la combustion du bois de feu, des résidus agricoles et des abattis de déforestation, en proportions à peu près égales. Pour les tropiques, on estime que 42 pour cent des émissions sont dues à l'Afrique, 29 pour cent à l'Asie, 23 pour cent à l'Amérique du Sud et 6 pour cent à l'Océanie (Andreae 1991). L'échelle de ces impacts souligne l'importance des problèmes liés au brûlage incontrôlé, tant à l'échelon régional que mondial.

22 1 téragramme (Tg) = 1012 g = 106 t, 1 gigagramme (Gg) = 109 g = 103 t
LA COMBUSTION DE LA BIOMASSE, CAUSE D'INQUIÉTUDE

Le nombre élevé d'incendies est source de nombreuses préoccupations. Le feu est généralement perçu comme un élément destructeur de la végétation, et de nombreuses savanes actuelles en Afrique sont considérées comme des formations sub-climaciques entretenues par le feu. Il n'y a cependant pas de consensus sur la nature de la végétation climacique: la forêt, ou seulement une phase plus dense de la végétation actuelle (Trapnell 1959, Hopkins 1965, Fanshawe 1971, West 1972, Freson et al. 1974, Menaut 1977, Lawton 1978, Scholes et Walker 1993, Frost 1996). Des incendies fréquents en fin de saison sèche transforment les zones boisées en savanes ouvertes, à strate herbacée haute, avec seulement quelques arbres de canopée isolés, tolérants au feu, et çà et là des arbres et arbustes de sous-bois. Les incendies fréquents suppriment aussi la régénération des plantes ligneuses, les empêchant de faire partie de la canopée. En revanche, la protection absolue contre le feu, et dans une moindre mesure le brûlage précoce en début de saison sèche, favorisent à la fois la régénération et la croissance des plantes ligneuses (Trapnell 1959). Le feu peut aussi avoir des effets négatifs sur la fertilité du sol (Trapnell et al. 1976, Frost et Robertson 1987).

On considère que la combustion de la biomasse contribue de façon importante aux émissions de gaz à effet de serre et aux précurseurs de l'ozone troposphérique. On estime que la combustion de la biomasse dans le monde entier dégage environ 3460 Tg C de dioxyde de carbone, 350 Tg C de monoxyde de carbone, 38 Tg C de méthane, 24 Tg C d'hydrocarbures non méthaniques (C2 - C10), 8,5 Tg d'azote sous forme d'oxyde nitreux (NO), des quantités plus faibles mais non moins importantes d'autres gaz traces tels que le chlorure de méthyle, et 104 Tg de particules en suspension (Hao et al. 1990, Andreae 1991). Le tableau 1 fournit des évaluations de la quantité de biomasse brûlée chaque année par les feux de savane, dans le monde entier et en Afrique. Le tableau 2 montre la part des émissions dues à ces incendies dans les émissions totales à l'échelon mondial. Il faut remarquer que les évaluations de la quantité de biomasse brûlée varient grandement, et le calcul des émissions est donc entaché d'une grande incertitude.

Tableau 1. Evaluation de la quantité de biomasse brûlée chaque année par les feux de savane (Tg MS an-1)

Afrique australe

Afrique de l'Ouest

Afrique

Monde

Référence




1190

Seiler & Crutzen, 1980




600-3200

Crutzen & Andreae, 1990

1200

1228

2428

3691

Hao et al., 1990




3690

Andreae, 1991


90-480

1294


Menaut et al., 1991



2520


Delmas et al., 1991



1300-2500

2500-3700

Lacaux et al., 1993

561-1743
(213-2812)




Scholes et al., 1996a (méthode 1)

177
(90-264)




Scholes et al., 1996a (méthode 2)


Tableau 2. Comparaison des valeurs mondiales estimées des émissions dues au brûlage de la biomasse, et de l'ensemble des émissions toutes sources confondues, brûlage de la biomasse inclus (Andreae 1991)

Composés chimiques

Emissions (Tg élément an-1)

Part du brûlage de la biomasse (%)

Brûlage de la biomasse

Toutes sources

Dioxyde de carbone (brut)

3460

8700

40

Dioxyde de carbone (net)1

1800

7000

26

Monoxyde de carbone

350

1100

32

Méthane

38

380

10

Hydrocarbures non méthaniques2

24

100

24

Oxyde nitreux

8,5

40

21

Chlorure de méthyle

0,5

2,3

22

Matière particulaire totale

104

1530

7

Carbone organique particulaire

69

180

39

Carbone élémentaire (suie noire)

19

<22

>86

1 Les émissions nettes de CO2 sont égales aux émissions brutes moins la quantité réabsorbée par les plantes en phase de repousse

2 Isoprènes et terpènes exclus

Les gaz traces dégagés par les incendies contribuent à la fois à l'effet de serre et à la réactivité chimique de l'atmosphère. Les feux de savane en Afrique sont considérés comme la cause principale du pic annuel prononcé d'ozone troposphérique qui s'étend sur tout l'océan Atlantique, de l'Afrique à l'Amérique du Sud, en septembre-octobre (Fishman et al. 1991). La combustion de la biomasse produit aussi de grandes quantités de particules de taille inférieure au micron qui restent en suspens dans l'atmosphère pendant de longues périodes, réduisant la qualité de l'air et la visibilité. Ce problème est aggravé en Afrique australe par l'atmosphère relativement stable pendant la saison sèche, qui permet le développement de fortes inversions thermiques, piégeant ainsi les particules dans les couches inférieures de l'atmosphère. Ceci est encore aggravé par la présence d'un grand mouvement giratoire atmosphérique subcontinental qui provoque la recirculation d'une grande partie de ces émissions autour de l'Afrique australe pendant la saison sèche (Garstang et al. 1996).

Ces effets négatifs sont à mettre en balance avec les avantages apparents du brûlage de la végétation, tels qu'ils sont perçus par les populations. Ces avantages comprennent notamment: le regain des herbacées après les incendies dans certains milieux, utilisé par les éleveurs pour augmenter la ration protéique de leur bétail; le contrôle de la progression de la brousse, permettant éventuellement d'augmenter les rendements des pâturages pour le bétail; le nettoyage des chemins entre les lieux d'habitation, facilitant la détection des prédateurs et autres animaux dangereux; et le contrôle de parasites tels que les tiques (Acaridae). Les incendies de végétation peuvent aussi être provoqués par une mauvaise maîtrise du feu utilisé pour le défrichement et la préparation des parcelles pour les cultures, par le brûlage de pare-feu, par la fabrication de charbon de bois, par l'enfumage des abeilles lors de la récolte du miel, et par le brûlage de certaines zones pour rabattre le gibier de chasse (Trapnell 1959, Kikula 1986). Ces pratiques et d'autres encore remontent probablement à des milliers d'années. On sait que les populations de l'Age de la pierre utilisaient le feu en Zambie il y a environ 55 000 ans (Clark et Van Zinderen Bakker 1964), et il existe des signes d'utilisation encore bien antérieure par les hominidés à Swartkrans Cave, en Afrique du Sud, remontant à environ 1,2 million d'années (Brain et Sillan 1988).

Cet article résume tout d'abord les principales préoccupations d'ordre politique, et les questions scientifiques et techniques sous-jacentes qui doivent être résolues avant de formuler une politique. Puis vient un résumé de quelques-unes des informations sur lesquelles doit s'appuyer l'élaboration de la politique, comprenant une présentation des législations en vigueur en matière d'utilisation du feu dans deux pays du sud de l'Afrique centrale, la Zambie et le Zimbabwe. L'article se termine par des suggestions concernant les possibilités d'amélioration de la situation actuelle par des modifications des politiques et des pratiques, et les contraintes rencontrées.

Questions d'ordre politique

La question clé en matière de politique est de savoir si les incendies de végétation en Afrique représentent un problème d'une telle importance qu'il exige une réponse de type législatif ou administratif. Pour aborder cette question correctement, il faut d'abord disposer d'informations sur l'ampleur et l'étendue des incendies en Afrique, et savoir précisément où, quand et comment ils se produisent. Ensuite, il faut disposer d'informations sur les effets directs et indirects de ces incendies sur l'environnement, sur les ressources naturelles et sur les moyens de subsistance des populations, et sur la façon dont ces effets varient selon les circonstances. Troisièmement, afin d'éviter la formulation d'une politique concernant une situation déjà dépassée, il est également nécessaire de déterminer si les régimes des feux se modifient, et, le cas échéant, de quelle manière, à quelle vitesse, et pourquoi. Il faut aussi disposer d'informations sur les causes les plus immédiates et les plus fondamentales des incendies, et si besoin est, sur leurs interactions.

En second lieu, si l'on admet que le brûlage est excessif et doit être mieux contrôlé, il faudra s'interroger sur les options permettant de limiter l'importance du brûlage de la végétation ou de réduire ses effets néfastes, et les coûts et avantages associés. Il faut évaluer l'efficacité éventuelle des diverses options et leurs coûts et avantages respectifs. Ceci implique aussi d'envisager quels seraient les éventuels coûts à long terme si l'on ne s'attaquait pas au problème.

Etant donné que la plupart des pays de la région possèdent déjà des lois et des réglementations régissant l'utilisation du feu, et en admettant qu'il existe un problème de brûlage excessif de la végétation, il faut aussi examiner les raisons qui font que la législation actuelle, ou son application, sont inefficaces et ne permettent pas de contrôler l'importance du brûlage. Les informations scientifiques et techniques nécessaires pour résoudre cette question comprennent notamment: la perception et la compréhension des réglementations par les populations; les méthodes de mise en application, si elles existent, et leur efficacité; l'identification des facteurs pouvant imposer ou faire respecter les réglementations; et la détermination des types de mesures, incitatives ou dissuasives, susceptibles de favoriser le respect des réglementations.

Etendue et ampleur des incendies de végétation en Afrique

Variations saisonnières

Bien que les incendies de végétation puissent se produire toute l'année en Afrique, comme c'est effectivement le cas, plus de 90 pour cent des incendies et plus de 99 pour cent de la superficie brûlée correspondent aux incendies de saison sèche. A cette époque, la végétation est soit morte (formations herbacées annuelles), soit dormante, et les arbres décidus ont perdu leurs feuilles, contribuant à l'accumulation de matériaux combustibles sur le sol. Les incendies se produisant pendant la saison humide sont peu fréquents et localisés. La figure 1 illustre la répartition saisonnière des incendies dans le sud de l'Afrique centrale en 1993, déterminée par l'analyse de données recueillies sur 1 km par le capteur AVHRR (radiomètre avancé à très haute résolution) placé à bord des satellites météo journaliers NOAA (voir aussi Arino et Melinotte (1997) pour des détails sur l'algorithme utilisé pour déterminer les points d'incendie actifs).

Figure 1. Répartition mensuelle en 1993 des points d'incendie actifs dans le sud de l'Afrique centrale de 6°S, 11°E à 23°S, 43°E, détectés par le capteur AVHRR sur le satellite NOAA pour une résolution de 1 km. Données dérivées de Arino et Melinotte (1997). Le nombre d'incendies relativement bas recensé en août est probablement inhabituel

Les données font apparaître des pics en septembre et en juin. Le pic de juin reflète une concentration du brûlage à cette période dans le nord de l'Angola et en République Démocratique du Congo. Le pic suivant correspond au brûlage de grandes superficies plus au sud et à l'est, dans l'est de l'Angola, en Zambie, au Malawi, au Mozambique et dans le nord du Zimbabwe. Le pourcentage relativement bas d'incendies en août est sans doute inhabituel, comme le montrent les données pluriannuelles du Parc national de Hwange au Zimbabwe. Dans ce parc, le pic des incendies se situe au mois d'août (figure 2). Bien que la plupart des incendies se soient produits d'août à octobre, les mois les plus importants en terme de pourcentage de la superficie totale brûlée sont septembre, octobre et dans une moindre mesure novembre. La forte chaleur, le vent et une extrême sécheresse pendant ces mois font que les incendies se propagent facilement et sont difficiles à maîtriser. Ils brûlent donc de vastes superficies, comme le montrent les superficies moyenne et maximale touchées par les incendies, toutes deux supérieures (figure 3).

Figure 2. Répartition saisonnière et pourcentage de la superficie totale brûlée pour les 156 incendies recensés de 1968 à 1989 dans le Parc national de Hwange au Zimbabwe

Figure 3. Moyenne mensuelle et gamme de variation des superficies touchées pour les 156 incendies recensés de 1968 à 1989 dans le Parc national de Hwange au Zimbabwe

Le nombre de points d'incendie actifs détectés par le capteur AVHRR NOAA ne reflète pas fidèlement la superficie brûlée. Scholes et al. (1996a) ont rapporté la superficie réelle brûlée, déterminée par 12 satellites de télédétection à analyseur multispectre (Landsat MSS) stratifiés, choisis au hasard dans toute l'Afrique australe, au nombre de points d'incendie détectés par le capteur AVHRR pour la même période. Ils ont démontré que la superficie réelle brûlée dans les zones arides et semi-arides, où les incendies ont tendance à être peu fréquents mais de grande ampleur, était sous-estimée par les données AVHRR, tandis que la superficie brûlée dans la zone sub-humide, où les incendies sont plus fréquents mais généralement de plus faible ampleur, était surestimée. Néanmoins, au sein d'une même zone, le nombre des incendies et la superficie brûlée chaque année varient tous deux énormément (figures 4 et 5).

Figure 4. Relation entre les précipitations annuelles et le nombre d'incendies de végétation recensés pendant la saison sèche suivante, Parc national de Hwange, Zimbabwe, 1968-1989

Figure 5. Relation entre les précipitations annuelles et la superficie totale brûlée par les incendies pendant la saison sèche suivante, Parc national de Hwange, Zimbabwe, 1968-1989

Répartition des incendies

Les incendies de végétation se produisent dans toute la bande des tropiques saisonniers en Afrique, essentiellement de novembre à avril au nord de l'équateur, et de mai à octobre au sud de celui-ci (figure 6). Dans le sud de l'Afrique centrale, de grands incendies débutent en mai-juin dans les formations herbacées hautes de la mosaïque forêt-savane, le long de la bordure méridionale du bassin du Congo, et se propagent ensuite vers le sud et vers l'est à travers le sous-continent (cf. données et images in Arino et Melinotte 1997). La comparaison de la répartition de ces incendies actifs avec la distribution spatiale des valeurs de l'indice de végétation à différence normalisée (NDVI), indice de "verdeur" de la végétation également obtenu par le capteur AVHRR, montre que les incendies suivent étroitement le schéma saisonnier de dessèchement de la végétation après la fin des pluies annuelles dans la région.

Figure 6. Répartition saisonnière des superficies brûlées en Afrique, de novembre 1990 à octobre 1991, obtenue par analyse de séries de données AVHRR NOAA à faible résolution (Global Area Coverage) (5 km), selon une technique pluri-temporelle, multi-seuils pour l'identification des zones touchées par les incendies (P. Barbosa in IGBP-DIS 1997)

Ces données, ainsi que celles obtenues par le Système opérationnel à balayage linéaire (Operational Linescan System, OLS) sur les satellites du Programme américain de satellites météorologiques de défense (USA Defence Meteorological Satellite Program, DSMP) (Cahoon et al. 1992), et par le radiomètre avancé à très haute résolution (AVHRR) sur les satellites de l'Administration nationale des océans et de l'atmosphère (NOAA) (Kendall et al. 1997), montrent également une réduction généralement marquée du nombre d'incendies recensés en Afrique au sud du Zambèze. Ceci est dû soit à l'environnement généralement plus sec, soit à une implantation humaine et un morcellement du couvert végétal naturel plus importants, soit à une combinaison de ces facteurs, au Zimbabwe, au Botswana et en Afrique du Sud.

Le tableau 3 fournit les valeurs estimées de l'ampleur des incendies et de la quantité de biomasse brûlée pour chacun des principaux types de végétation en Afrique au sud de l'équateur, obtenues par modélisation de la production végétale et de la superficie brûlée grâce à la télédétection. La savane infertile, essentiellement de type miombo, est de loin la formation végétale la plus touchée, que ce soit pour la superficie brûlée ou pour la quantité de biomasse consumée par les incendies.

Tableau 3. Evaluation de la superficie totale et de la quantité de biomasse brûlée par les incendies en Afrique au sud de l'équateur, obtenue par modélisation de la production de biomasse et du nombre des incendies pour une résolution de 0,5 x 0,5 ° utilisant une corrélation entre la superficie totale brûlée, l'indice de végétation à différence normalisée cumulé, et le nombre cumulé de points d'incendie actifs détectés par le capteur AVHRR NOAA (Scholes et al. 1996a)

Type de végétation

Surface totale
(103 km2)

Fraction de la surface brûlée

Surface totale brûlée
(103 km2)

Biomasse consumée (Tg)

Forêt sempervirente

1036

0,038

39,37

9,5

Forêt sèche

113

0,181

20,45

6,8

Mosaïque forêt/savane

716

0,270

193,32

21,4

Savane infertile

4177

0,250

1044,25

88,4

Savane fertile

2140

0,089

190,46

29,6

Formation arbustive aride/formation semi-désertique à succulents

534

0,011

5,87

0,4

Formation herbacée désertique

131

0,001

0,13

0,0

Fynbos

74

0,050

3,70

2,2

Formation herbacée infertile

371

0,317

117,61

10,6

Formation herbacée fertile

267

0,180

48,06

3,8

Zone humide (ex. dambos, vleis)

42

0,528

22,18

4,3

Total

10135

0,166

1685,40

177,0

Marge d'erreur (± 49 %)




(90-264)


Fréquence

On admet communément que les savanes africaines brûlent tous les 2-3 ans (Andreae 1991, Ward et al. 1996) mais il n'existe pratiquement pas de données à l'appui. Les rares données disponibles suggèrent que les intervalles entre les incendies successifs sur un site donné sont supérieurs (tableau 4), bien que certains sites et types de milieux brûlent sans aucun doute plus souvent, en particulier ceux situés à proximité des implantations humaines. Cette idée reçue ne se vérifie à peu près que dans le cas du Parc national du Serengeti, zone de vastes prairies, et du Parc national du Ruwenzori, caractérisé par deux saisons humides et deux saisons sèches annuelles. Le Serengeti, le Parc national Kruger et la zone de safari Matetsi ont tous été soumis à des brûlages dirigés très importants, ainsi qu'à des incendies incontrôlés déclenchés par les populations et par la foudre, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des zones en question.

Tableau 4. Fréquences recensées des incendies de surface, mesurées par l'intervalle moyen entre les incendies, et calculées en tant que réciproque du pourcentage moyen d'une superficie brûlée annuellement, pour divers écosystèmes africains

Localité (superficie)

Précipitations annuelles moyennes (mm)

Pourcentage moyen de la superficie brûlée annuellement

Intervalle moyen entre les incendies (années)

Référence

Parc national du Ruwenzori, Ouganda (1978 km2)

1010

0,36

2,8

Eltringham (1976)

Parc national du Serengeti, Tanzanie (25 000 km2)

600-1150

0,62

1,6

Stronach (1989)

Zone de safari de Matetsi, Zimbabwe (4720 km2)

650

0,26

3,8

Frost (1993)

Parc national de Hwange, Zimbabwe (14 600 km2)

625

0,17

5,9

Frost (1993)

Parc national Kruger, Afrique du Sud (19 485 km2)

420-630

0,13

7,7

Trollope (1993)

Parc national d'Etosha, Namibie (22 270 km2)

430

0,14

7,1

Siegfried (1981)


Causes des incendies de végétation

Les populations sont sans aucun doute à l'origine de la majorité des incendies en Afrique, mais on dispose de peu de données fiables sur le sujet. Les données disponibles émanent de zones protégées auxquelles les populations ont généralement peu accès, et dans lesquelles le personnel pratique parfois le brûlage dirigé (figure 7). Le brûlage dirigé représente 47 pour cent de la superficie brûlée dans le Parc national Kruger, en Afrique du Sud, entre mai 1985 et septembre 1992 (Trollope 1993). Il faut y ajouter les feux allumés par les réfugiés du Mozambique voisin (23 pour cent), des incendies d'autres sources non précisées (20 pour cent), et des incendies provoqués par la foudre (10 pour cent).

Dans le Parc national d'Etosha, en Namibie, qui est plus aride, environ 53 pour cent des 56 incendies recensés entre 1970 et 1979 ont été provoqués par la foudre. Pour 20 pour cent des incendies, les causes étaient inconnues mais attribuées selon toute probabilité à la foudre, et seuls 27 pour cent ont été allumés artificiellement ou avaient une origine extérieure au parc (Siegfried 1981). Dans le Parc national de Hwange, au Zimbabwe, la foudre a déclenché 37 pour cent des 68 incendies d'origine déterminée entre 1968 et 1989 (Jones, comm. pers.23). Les feux contrôlés (de gestion) totalisaient 31 pour cent. Les autres causes étaient les mises à feu par les braconniers (13 pour cent), les feux échappant au contrôle lors du brûlage des pare-feu (7 pour cent), les incendies provoqués par les trains passant le long de la bordure orientale du parc (6 pour cent), et les incendies accidentels (6 pour cent).

23 M.A. Jones, autrefois écologue au Département des parcs nationaux et de la gestion de la faune (Department of National Parks and Wild Life Management), Zimbabwe.
Le nombre de feux déclenchés par les populations risque d'être supérieur dans les zones habitées, bien qu'ils soient généralement de plus faible ampleur en raison du morcellement des milieux, de la quantité réduite de combustibles et de la lutte contre les incendies. Néanmoins, les incendies d'origine humaine ont tendance à se déclencher plus tôt dans la saison sèche que ceux provoqués par la foudre, et sont susceptibles de devancer l'éclosion ou la propagation de nombreux feux de foudre potentiels plus tard dans la saison. Cependant, les zones n'ayant pas brûlé auparavant risquent d'être mises à feu par des éclairs lors des nombreux orages qui s'accumulent à la fin de la saison sèche et au début de la saison humide. Ce point est important car il rend la protection absolue contre les incendies difficile à mettre en œuvre. Si les populations n'allument pas de feux, que ce soit de façon délibérée ou accidentelle, la foudre s'en chargera à plus ou moins brève échéance.

Figure 7. Causes des incendies dans trois parcs nationaux d'Afrique australe. Les données relatives aux parcs de Hwange et d'Etosha se rapportent au pourcentage d'incendies allumés par la foudre; les données pour le parc national Kruger montrent la proportion de la superficie brûlée par des incendies ayant des causes diverses (données tirées de Siegfried 1981, Trollope 1993 et Frost 1993)

PARC NATIONAL KRUGER

PARC NATIONAL DE HWANGE

PARC NATIONAL D'ETOSHA

Les causes des feux d'origine humaine sont nombreuses et variées, reflétant la vaste gamme de conditions socio-économiques, culturelles et écologiques des pays où le brûlage est répandu. Les utilisations les plus courantes du feu sont les suivantes: défrichement ou élimination de résidus indésirables; amélioration des pâturages du bétail domestique et, dans certaines réserves naturelles, de la faune sauvage; gestion de la structure et de la composition de la végétation; amélioration des conditions de chasse; et réduction des masses de combustibles éventuellement dangereux. Les incendies peuvent aussi être d'origine accidentelle, dus par exemple à la cuisson d'aliments sur le bord de la route ou aux feux de chauffage, à la fabrication de charbon de bois, à l'enfumage des abeilles pendant la récolte du miel, ou au brûlage des pare-feu. Certains feux sont aussi de nature criminelle.

Si les raisons d'utiliser le feu énumérées ci-dessus sont les plus immédiates, il existe aussi tout un éventail de facteurs plus généraux qui influencent l'importance des incendies. Les différents types de végétation n'ont pas le même degré d'exposition et de sensibilité au feu (van Wilgen et Scholes 1997). Certains types de végétation (formations herbacées, savanes ouvertes) sont plus homogènes dans l'espace et donc plus sujets à des feux étendus et fréquents que d'autres types de formations végétales plus différenciées. Les autres facteurs comprennent notamment: l'utilisation traditionnelle généralisée du feu; la dépendance constante des populations à l'agriculture comme moyen de subsistance, en raison du manque d'autres possibilités économiques en dehors de ce secteur; la nécessité de convertir toujours plus de terres boisées et d'herbages en terres agricoles consacrées à des cultures de subsistance pour faire face à la croissance démographique; l'appauvrissement continu de ces petits agriculteurs, qui restreint leurs possibilités d'adopter des technologies différentes; le manque fréquent de sécurité en matière de tenure des terres; et la faiblesse des institutions locales régissant l'accès aux ressources naturelles et leur utilisation. Ces facteurs sont aggravés par des politiques qui n'encouragent ni ne récompensent pas suffisamment les modes d'utilisation durable des terres, par l'absence à la fois de politiques et de moyens permettant d'appliquer des stratégies cohérentes de gestion des incendies à différents systèmes d'utilisation des terres, et par une mauvaise intégration entre les secteurs concernant l'utilisation des terres lors de l'élaboration et de la mise en œuvre de ces politiques.

Effets des incendies de végétation sur l'environnement et dans d'autres domaines

Effets sur la composition et sur la structure de la végétation

L'influence du feu sur la dynamique de la végétation de savane en Afrique australe est reconnue depuis longtemps (Trapnell 1959, Fanshawe 1971, Kennan 1972, Lawton 1978, Booysen et Tainton 1984, Chidumayo 1988, Frost et Robertson 1987). Les effets du feu sur les végétaux sont très variables: certaines espèces ne sont pas affectées, d'autres sont endommagées au niveau de leurs parties aériennes, d'autres encore seront tuées immédiatement. Les effets dépendent en partie du moment où se produit l'incendie et de son intensité, et aussi des caractères intrinsèques et de l'état physiologique des plantes concernées (Frost 1984). Un incendie unique a généralement moins d'effet que plusieurs incendies successifs. Dans ce cas, la fréquence des incendies est un paramètre important. En général, les feux de saison sèche affectent plus les plantes ligneuses que les herbacées (la plupart de celles-ci sont dormantes ou presque); chez les ligneux, les individus de hauteur inférieure à 2 m sont habituellement plus sensibles que les individus plus grands. Les feux de fin de saison sèche sont presque toujours plus destructeurs que ceux ayant lieu en début de saison sèche.

De nombreuses expériences réalisées sur tout le continent ont montré que la protection absolue d'un site contre le feu (pour un coût habituellement considérable au regard de la surface protégée) entraîne un accroissement de la densité et de la biomasse des plantes ligneuses et une diminution de la biomasse herbacée. Ceci est bien illustré par les résultats d'une expérience à long terme conduite à la Station de recherches de Matopos, au Zimbabwe (Frost, données non publiées). Une enquête effectuée en 1992 sur toutes les plantes ligneuses sur des parcelles (a) protégées du feu depuis 1947, (b) brûlées en fin de saison sèche (mi-septembre) à intervalles de 1, 2, 3 et 5 ans, et (c) brûlées en début de saison sèche (mi-juin) à intervalles de 1 et 2 ans, fait apparaître des différences marquées pour la densité, la biomasse (mesurée par la surface basale des plantes), et le nombre d'espèces (figures 8 à 10). Le nombre de plantes ligneuses de diamètre basal inférieur à 5 cm varie peu selon les traitements, tandis que le nombre d'arbres de diamètre basal supérieur à 5 cm, ainsi que la surface basale totale (figure 9), sont beaucoup plus élevés pour la protection absolue (figure 8).

Le nombre d'espèces ligneuses est aussi nettement plus élevé pour la protection absolue mais varie peu pour l'ensemble des autres traitements (figure 10). Les espèces supplémentaires recensées dans les parcelles protégées du feu depuis 1947 comprennent des espèces connues pour être sensibles au feu (par exemple Pappea capensis, Olea europea ssp. africana, Rhus pyroides - qui tire son nom de ses branches épineuses, non de son affinité pour le feu - et Pouzolzia mixta). Cependant toutes ces espèces sensibles au feu sont présentes dans les zones environnantes, brûlées occasionnellement, bien qu'elles y survivent en occupant des sites protégés du feu tels que les termitières et les affleurements rocheux. En revanche, dans les zones de lisière forêt-savane, par exemple dans certaines parties d'Afrique centrale et occidentale, la composition floristique évolue vers une flore forestière lorsqu'un site est protégé pendant de nombreuses années (Trapnell 1959, Hopkins 1965, Menaut 1977).

Figure 8. Nombre moyen de plantes ligneuses par parcelle de 0,084 ha (± 1 d.s.) sur les parcelles d'expérimentation sur le feu de Sandveld, Station de recherches de Matopos, Zimbabwe. L'expérience a débuté en 1947 et les mesures ont été effectuées en 1992. BD = brûlage en début de saison sèche (mi-juin); BF = brûlage en fin de saison sèche (mi-septembre); PA = protection absolue depuis 1947; 1, 2, 3 et 5 = nombre d'années entre les feux; DSH = diamètre à hauteur de la souche (cm) (environ 20 cm)

Figure 9. Comparaison de la surface basale des plantes ligneuses (m2 ha-1, ± 1 d.s.) pour différents régimes des feux expérimentaux sur les parcelles d'expérimentation sur le feu de Sandveld, Station de recherches de Matopos, Zimbabwe. Les mesures ont été effectuées en 1992. Voir la légende de la figure 8 pour plus de détails

Figure 10. Nombre moyen d'espèces ligneuses par parcelle de 0,084 ha (± 1 d.s.) sur les parcelles d'expérimentation sur le feu de Sandveld, Station de recherches de Matopos, Zimbabwe. Voir la légende de la figure 8 pour plus de détails

Effets sur le cycle des nutriments

Le feu est un facteur important dans le cycle des nutriments dans les savanes africaines. Les cations et une bonne partie du phosphore retournent au sol, où la hausse consécutive du pH du sol augmente la disponibilité des nutriments et diminue la solubilité d'éléments tels que le fer, l'aluminium et le manganèse. Des éléments tels que le carbone, l'azote, le soufre, et une partie du phosphore sont perdus par volatilisation ou dans les cendres emportées par le vent. Des données recueillies sur des parcelles d'expérimentation sur le feu à long terme montrent des concentrations d'azote moins élevées dans le sol des zones brûlées chaque année en fin de saison sèche que dans les parcelles brûlées plus tôt ou protégées, suggérant d'éventuelles pertes importantes en azote. Celles-ci peuvent être compensées en partie par la fixation azotée: les légumineuses fixatrices d'azote semblent réagir positivement aux concentrations supérieures en phosphore dans les parcelles brûlées régulièrement, mais les bilans globaux des nutriments doivent encore être déterminés (Frost et Robertson 1987).

Effets sur la chimie atmosphérique

La combustion de la biomasse est considérée couramment comme une source importante de dioxyde de carbone et d'autres gaz traces actifs au niveau de la radiation et réactifs chimiquement (Crutzen et al. 1979; Crutzen et Andreae 1990; Hao et al. 1990; Andreae 1991, 1997). Pour l'Afrique au sud de l'équateur, Scholes et al. (1996b) ont évalué les émissions annuelles de gaz traces par les incendies de végétation pour l'année 1989 à 324 Tg CO2, 14,9 Tg CO, 0,5 Tg CH4, 1,5 Tg NOX, 1,08 Tg de particules <2.5 µm et 0,42 Tg de carbone élémentaire.

Les évaluations des émissions de gaz traces par la combustion de la biomasse sont calculées par le produit de deux mesures de base: la quantité de biomasse consumée par le feu et le taux d'émission pour un gaz donné, ce dernier étant défini soit par la masse du gaz (CO2, CO, CH4, NOX, N2O, etc.) dégagé dans l'atmosphère par unité de masse de combustible consumé (habituellement exprimée en g kg-1 de matière sèche de combustible), soit par la masse de carbone ou d'azote dégagée dans un gaz donné par unité de masse de carbone ou d'azote dégagée par le combustible. La précision de ces évaluations dépend beaucoup de la qualité des données utilisées pour leur calcul. De grands progrès ont été faits ces dernières années dans la mesure des taux d'émission, à la fois dans des conditions expérimentales et de terrain (voir van Wilgen et al. 1997, et les articles parus dans un numéro spécial du Journal of Geophysical Research, vol. 101 n° D19, 1996), de sorte qu'ils sont relativement bien connus.

En revanche, la quantité de combustible consumée par les incendies de végétation n'est presque jamais connue en dehors des feux expérimentaux. Elle doit donc être évaluée à partir de la masse moyenne des matériaux combustibles présente dans un type de végétation donné dans une zone écologique spécifique, et du taux de combustion correspondant (pourcentage de la masse potentielle des combustibles effectivement brûlée). On note de très fortes variations, à la fois suivant les années en réponse aux variations de l'abondance et de l'époque des précipitations, et selon les sites en fonction du climat, des sols, du couvert ligneux, de l'impact des herbivores, et des modes de gestion. De plus, la mesure de la masse des combustibles dépend aussi de la méthode d'échantillonnage et du choix des éléments de la végétation et de la litière à inclure dans l'échantillon (par exemple, comparer les données pour les mêmes sites in Stocks et al. 1996, Trollope et al. 1996, et Shea et al. 1996). La quantité de combustibles effectivement brûlés dépend à son tour des conditions ambiantes, de la quantité de combustibles et de leur taux d'humidité, et des caractéristiques de la couche des combustibles au moment du feu. Les taux d'émission varient aussi avec l'efficacité de la combustion; ceux qui concernent les produits de combustion incomplète (CO, CH4, particules fines, etc.) sont inversement corrélés à l'efficacité de la combustion (Ward et al. 1996).

Toutes ces variations introduisent une incertitude considérable dans les évaluations des émissions. Les évaluations de la quantité de biomasse brûlée chaque année, sur lesquelles sont basés les calculs des émissions, sont grossières et doivent être interprétées avec prudence. Elles sont dérivées de données hautement agrégées, de statistiques discutables, et d'extrapolations à partir de bases de données étroites. Compte tenu des négociations en cours au sein de la Convention-cadre sur le changement climatique (CCCC) des Nations Unies, il est urgent d'affiner ces évaluations par des études plus détaillées sur les types et les fréquences de la combustion de la biomasse sous les tropiques, les quantités de biomasse brûlée, et les émissions en résultant.

Effets sur les ressources naturelles et sur les moyens de subsistance des populations

La disparition de la canopée formée par les espèces ligneuses et la diminution de la biomasse ont pour conséquence inévitable une diminution des ressources naturelles pour les populations, mais on manque de données quantitatives sur le sujet. Si le feu augmente sans aucun doute le rendement et la qualité de certaines ressources, en particulier les herbes utilisées pour les pâturages, il entraîne en revanche la diminution d'autres ressources: bois et autres produits ligneux, chaumes de couverture des toits, habitats du gibier de chasse. Les effets sont à la fois directs, par des dommages aux plantes, et indirects, par suppression de la repousse et modification des conditions micro-environnementales pour l'installation et la croissance des plantes. L'exclusion du feu, qu'elle ait lieu de façon délibérée par la maîtrise des incendies, ou par inadvertance en réduisant la quantité des combustibles dans les zones soumises à de fortes pressions de pâturage, peut aussi avoir des effets négatifs, en particulier la progression de la brousse, conduisant à une réduction de la capacité de pâturage. Les répercussions économiques, ou autres, de ces effets sur la subsistance des populations n'ont pas été évaluées de façon précise. Il est clair que compte tenu de l'utilisation répandue et fréquente du feu par les populations, les avantages perçus sembleraient supérieurs aux coûts, bien qu'il faille encore les quantifier et les évaluer.

Les régimes des feux dans la région évoluent-ils au cours du temps?

Quel que soit le milieu, les cas d'incendies doivent être examinés dans le contexte des régimes des feux de la zone considérée. Le régime des feux est une caractéristique composite qui englobe la fréquence moyenne des feux (ou durée de l'intervalle de retour du feu en années), le type de feu et son intensité caractéristique, et l'ampleur habituelle du feu et son mode de propagation. Les régimes des feux varient d'un milieu à l'autre en fonction du climat, de la végétation et des activités humaines, et réagissent de façon dynamique à des modifications de ces facteurs.

Il n'existe pas de données adéquates sur l'évolution du nombre des feux ou des superficies brûlées annuellement en Afrique australe. Les données du Parc National de Hwange et de la zone de safari de Matetsi avoisinante, au Zimbabwe, ne présentent pas de régularité particulière dans la variation du nombre de feux annuels, et ne montrent qu'une faible tendance à la baisse de la superficie brûlée chaque année, pour la période 1968-1989. Ces données proviennent cependant de zones protégées et sont probablement peu représentatives de la région dans son ensemble.

Dispositions légales régissant l'utilisation du feu

Parmi les lois actuelles régissant la foresterie et la conservation des ressources naturelles dans les pays d'Afrique australe, beaucoup dérivent de lois décrétées par les gouvernements coloniaux. Celles-ci visaient essentiellement les terres sous tenure privée et celles contrôlées par l'Etat, bien qu'elles aient également été appliquées aux terres sous tenure communale, régies en large mesure par les lois coutumières. Les lois actuellement en vigueur en Zambie et au Zimbabwe serviront d'exemple pour illustrer la portée et les dispositions des lois existantes. Les lois des autres pays d'Afrique australe sont analogues.

Zambie

La Loi sur la conservation des ressources naturelles (Natural Resources Conservation Act) (Chapitre 315, n° 53 de 1970) et la Loi forestière (Forests Act) (Chapitre 311, n° 39 de 1973) contiennent toutes deux des clauses concernant le contrôle du brûlage. En outre, la Loi sur la protection de l'environnement et le contrôle de la pollution (Environmental Protection and Pollution Control Act) (n° 12 de 1990), bien qu'elle ne prévoie pas de clauses particulières pour le contrôle du brûlage, met en place un Conseil pour l'environnement (Environmental Council) qui peut, entre autres, formuler des réglementations pour la conservation et la protection des ressources naturelles. La "conservation" est définie dans la section 2 de la loi comme la sauvegarde des ressources naturelles et leur protection contre un usage abusif, le feu (c'est l'auteur qui souligne) ou le gaspillage. La loi de 1990 abroge aussi certaines parties de la Loi sur la conservation des ressources naturelles, sans toutefois toucher aux clauses portant sur le contrôle des feux de brousse.

Loi sur la conservation des ressources naturelles (Natural Resources Conservation Act)

La Loi sur la conservation des ressources naturelles habilite le Ministre responsable de l'eau, des terres et des ressources naturelles à passer des décrets pour la conservation des ressources naturelles et pour la nomination de comités chargés des ressources naturelles aux échelons de la province et du district. La loi prévoit aussi des plans de conservation et la mise en place d'autorités chargées de la lutte contre les incendies.

L'occupant d'un terrain autre qu'une terre d'Etat non aliénée, une forêt délimitée, une zone de gestion cynégétique, un parc national ou une route publique sous l'autorité du Directeur du réseau routier, est tenu d'entreprendre ou d'adopter des mesures de prévention, de maîtrise ou de lutte contre les incendies, notamment la mise en place de pare-feu et la pratique du brûlage dirigé, là où de telles mesures sont considérées comme nécessaires à la conservation des ressources naturelles (section treize, sous-section (3)(j)). Un pare-feu est défini comme une bande de terrain débarrassée de tout matériel inflammable sur une largeur de 46 m, ou sur une largeur pouvant être déterminée par les clauses de la Loi, mais ne pouvant être inférieure à 3 m. Si après un délai raisonnable l'occupant du terrain ne remplit pas ou néglige ces obligations, il se rend coupable de délit. Le tribunal pourra non seulement lui intimer l'ordre d'exécuter le décret du Ministre dans des délais spécifiés, mais aussi lui infliger une amende. Chaque décret relevant de la section treize doit être adopté par texte réglementaire.

La Vème Partie de la loi concerne spécifiquement les clauses régissant le contrôle des feux de brousse. La clause clé est la nomination d'une autorité chargée de la lutte contre les incendies pour une zone particulière. En l'absence d'un décret-loi du Ministre, cet organisme est habituellement le comité de district chargé des ressources naturelles, et il est tenu de coopérer avec le Ministre et de l'assister dans la mise en application des clauses visant à la maîtrise des feux de brousse, d'effectuer des recherches et des études sur les feux et leurs causes, de recenser les feux si on le lui demande, et de soutenir et coordonner tous les arrangements volontaires en matière de prévention ou de lutte contre les incendies mis en place par les occupants du terrain dans une zone donnée.

L'autorité chargée de la lutte contre les incendies a les pouvoirs suivants: a) engager des pompiers honoraires ou d'autres personnes pour aider à la détection, à la signalisation, à l'étude et à l'extinction des incendies; b) mettre en place et entretenir des pare-feu dans les zones où ils ont été ordonnés par le Ministre; et c) déterminer la largeur de ces pare-feu. Le Ministre peut attribuer des prêts ou des subventions à une autorité chargée de la lutte contre les incendies pour lui permettre de remplir ses fonctions et d'exercer ses pouvoirs, en utilisant les fonds affectés par le Parlement à cet effet.

L'autorité chargée de la lutte contre les incendies peut, avec l'accord du Ministre et à la demande des occupants de plus de la moitié du terrain dans une zone donnée, préparer et adopter un plan de défense contre les incendies. Ce plan devra inclure des clauses concernant la mise en place et l'entretien de pare-feu, et le lieu et l'époque du brûlage dirigé, lorsque le plan le prévoit. Un plan de défense contre les incendies élaboré conformément à la Loi doit être publié sous forme de décret-loi passé par le Ministre. Tout individu ne se conformant pas aux dispositions du plan est considéré coupable de délit.

L'autorité chargée de la lutte contre les incendies peut interdire le brûlage à certaines époques et dans certaines conditions dans les zones sous sa juridiction, sauf dans une forêt délimitée, une zone de gestion cynégétique ou un parc national. Ces interdictions doivent être établies par texte réglementaire. L'autorité chargée de la lutte contre les incendies peut aussi effectuer un brûlage dirigé pour éviter la propagation des incendies au cas où l'occupant du terrain aurait négligé de le faire. Le Ministre peut aussi demander à cette autorité d'effectuer un brûlage dirigé sur des terres d'Etat non aliénées lorsqu'un plan de défense contre les incendies ou un plan de conservation l'exigent.

La Vème Partie de la loi exige également que chaque occupant ayant l'intention de brûler de la végétation sur son terrain, ou sur un terrain sur lequel il a le permis ou l'autorisation de brûler, dépose un préavis écrit de trois jours. Ce préavis doit être remis en mains propres à tous les occupants des terrains adjacents à celui où le brûlage doit avoir lieu, et indiquer le plus précisément possible la date et l'heure du brûlage prévu.

La Loi forestière (Forests Act)

La Loi forestière concerne la création et la gestion des forêts domaniales et locales, et comprend des clauses pour la conservation et la protection des forêts et des arbres. Elle prévoit aussi la délivrance des permis et la vente des produits forestiers. Les forêts domaniales sont réservées exclusivement à la conservation et au développement de forêts visant à garantir l'approvisionnement en bois d'œuvre et autres produits forestiers, la protection contre les inondations, l'érosion et la dessiccation, et la régulation des cours d'eau. Les forêts locales sont destinées exclusivement à garantir l'approvisionnement en bois et la protection des terres et des ressources en eau.

La section seize paragraphe (a) stipule que nul ne doit abattre, couper, modifier, brûler, endommager, prendre, récolter ou emporter quelque produit forestier que ce soit d'une forêt domaniale sans autorisation (c'est l'auteur qui souligne). Le paragraphe (c) de la même section est plus explicite: nul individu non autorisé ne peut mettre le feu aux arbres, plantes de sous-bois, herbes ou produits forestiers, ou aider à la mise à feu, ou laisser un feu allumé par lui-même, ses employés ou ses représentants, se propager à une forêt domaniale. Les clauses de la section seize s'appliquent aussi aux forêts locales, considérées ici comme forêts domaniales (section vingt-quatre). La loi stipule aussi (section vingt-six) que nul ne doit abattre, couper, modifier, brûler, endommager, prendre, récolter ou emporter un arbre protégé sans y être autorisé, exception faite des terres sous régime de propriété foncière libre ou de propriété louée à bail (c'est l'auteur qui souligne).

La loi stipule aussi les réglementations régissant la gestion, la conservation, l'utilisation et le développement des forêts domaniales et locales (section soixante-huit). La sous-section (2) paragraphe (n) de cette section habilite le Ministre à formuler, par texte réglementaire, les clauses régissant la prévention et la lutte contre les incendies dans les forêts domaniales et locales et dans les parterres de coupe sur les terres d'Etat, les réserves et les terres administrées par fidéicommis. Ces clauses sont contenues dans les Réglementations forestières (Forest Regulations) (SI 98 de 1976 et 31 de 1978).

La protection contre les incendies est traitée dans la IVème Partie des réglementations. En vertu de celles-ci, un concessionnaire est tenu d'éviter et d'éteindre tout incendie démarrant à l'intérieur ou à proximité du parterre de coupe, et d'effectuer les travaux de protection anti-incendie, notamment le nettoyage des pare-feu et le brûlage des branches et des déchets, qui seraient requis par un agent forestier. Le brûlage ne peut être effectué que sous la supervision de l'agent forestier, à moins que le concessionnaire n'obtienne une autorisation écrite de celui-ci. Le non-respect de ces dispositions peut amener le Département des forêts à effectuer les travaux et à recouvrer les frais correspondant auprès du concessionnaire.

Les réglementations définissent aussi comme un délit le fait de fumer dans une forêt domaniale ou locale en un lieu où il est indiqué que c'est interdit. Le fait d'enflammer, de transporter ou de jeter à terre tout matériau ou objet enflammé ou combustible, notamment des allumettes, briquets ou torches, à l'intérieur ou à proximité de toute pépinière, forêt, plantation, moulin ou entrepôt, constitue également un délit, excepté en cas de détention d'un permis. Les agents forestiers ont le pouvoir d'ordonner que ces matériaux ou objets enflammés ou combustibles leur soient remis, si cela s'avère nécessaire à la sauvegarde de la forêt ou d'un bien forestier.

Zimbabwe

Les dispositions en matière de maîtrise des incendies et de brûlage de la végétation au Zimbabwe sont énoncées dans la VIIIème Partie de la Loi forestière (Forest Act) (Chapitre 19:05). Nul n'est autorisé à brûler de la végétation sur pied ou en croissance sur quelque terrain que ce soit, à moins d'en avoir avisé les occupants de tous les terrains adjacents et un bureau du poste de police le plus proche possible, ou à moins qu'il n'existe un accord écrit entre l'individu ayant l'intention de brûler et tous les occupants des terrains adjacents (section soixante-sept). Dans ce dernier cas, l'avis concernant la date et l'heure du brûlage prévu doit néanmoins être déposé auprès d'un officier de police à la station de police la plus proche possible avant que le brûlage ne soit effectué. Pour avertir les propriétaires des terrains adjacents, l'individu souhaitant effectuer le brûlage doit d'abord déposer un avis préliminaire indiquant aussi précisément que possible la date du brûlage prévu, qui doit être comprise entre deux et huit semaines après la date de réception du préavis. Celui-ci doit être suivi d'un avis final indiquant l'heure du brûlage prévu, qui doit être comprise entre 6 et 24 heures après le dépôt de cet avis. Des clauses complémentaires concernant le dépôt de l'avis final permettent (a) de déposer un nouvel avis final si, pour une quelconque raison, le brûlage n'a pas lieu au moment prévu; et (b), au cas où il serait impossible de remettre l'avis final à l'occupant d'un terrain donné, de le remettre à tout individu âgé de plus de 16 ans présente sur ce terrain, ou de placer l'avis final en un lieu bien visible sur le terrain.

La Loi prévoit que tout propriétaire ou occupant de terrain qui souhaite se protéger contre les incendies traversant les limites de sa propriété doit demander aux propriétaires ou occupants des terrains adjacents de l'aider à la mise en place et à l'entretien de pare-feu le long des limites communes de leurs propriétés, par une participation pour moitié soit au travail soit aux dépenses nécessaires, et ce dans les trois semaines suivant cette demande (section soixante-huit). Si un voisin refuse l'aide ou la participation demandée, le demandeur peut mettre en place ou entretenir le pare-feu et recouvrer la moitié des coûts engagés auprès du voisin concerné. Aux fins de la section soixante-huit, les terres communales sont assimilées à des terres privées et le Ministre de l'environnement et du tourisme (aujourd'hui des mines, de l'environnement et du tourisme) est considéré comme le propriétaire et occupant du terrain.

Un pare-feu est défini par la loi comme "une bande de terrain, boisée ou non, qui a été débarrassée des matériaux inflammables" et, il doit, aux fins de la section soixante-huit, avoir une largeur minimale de 9 m de chaque côté de la limite commune ou de toute autre ligne définie d'un commun accord par les parties concernées. Si le Ministre, en consultation avec le Bureau des ressources naturelles, considère que la nature de la végétation est telle qu'un pare-feu de 18 m est insuffisant, il peut ordonner par écrit au propriétaire ou à l'occupant du terrain de mettre en place un pare-feu de largeur supérieure à 9 m de son propre côté de la limite commune. Le Ministre peut aussi exiger que le propriétaire ou l'occupant mette en place et entretienne sur le terrain des pare-feu internes de largeur spécifiée (section soixante-neuf). Cette section habilite également le Ministre à autoriser le comité chargé de la conservation d'une zone déclarée zone de conservation intensive par la Loi sur les ressources naturelles (Natural Resources Act) (Chapitre 20: 13) à préparer un plan de prévention des incendies dans cette zone. Les détails du plan, prescrits réglementairement, doivent inclure des clauses concernant les points suivants: pare-feu, points d'eau, postes de guet, gardes forestiers, équipement et outils de lutte anti-incendie, et équipements de transmissions.

La section soixante-dix spécifie que tout individu se trouvant, légalement ou non, sur un terrain appartenant à une autre personne, ou sur une route ou un terrain vacant, doit soigneusement et correctement éteindre tout feu qu'il aura allumé ou utilisé. De plus, tant que le feu n'est pas éteint, l'individu doit rester suffisamment proche du feu pour permettre sa maîtrise, par lui-même ou par ses employés. La section soixante et onze permet l'utilisation de contre-feux pour éviter les pertes ou dommages aux êtres vivants, aux personnes ou aux biens, à condition que l'individu concerné prenne bien soin de s'assurer que le contre-feu ne se propage pas en dehors des limites nécessaires pour garantir sa propre sécurité contre les pertes ou les dommages.

Si un individu agissant sous la direction ou par ordre de son employeur enfreint, par action ou par omission, une des dispositions de cette partie de la loi, alors l'employeur ou l'employé ou les deux à la fois peuvent être poursuivis et, s'ils sont reconnus coupables, être sanctionnés en vertu de la loi (section soixante-douze). Un individu subissant une perte causée par un incendie peut obtenir réparation des dommages par une poursuite civile, exception faite des dommages dus à toutes actions raisonnables et nécessaires prises en vertu des sections soixante et onze ou soixante-quinze (section soixante-trois). Si un individu est reconnu coupable par un tribunal d'un délit envers cette loi, et qu'il apparaît que ce délit a occasionné des pertes à une autre personne, le tribunal peut, à réception d'une demande écrite de la partie lésée, enquêter sommairement et sans plaidoirie sur le montant du dommage causé (section soixante-quatorze). A réception des preuves établissant ce montant, le tribunal accordera des dommages et intérêts à la partie lésée à l'encontre de l'individu reconnu coupable, le jugement ayant les mêmes force, effet, et portée qu'une poursuite civile déposée devant le même tribunal. Une tel jugement exclura toute poursuite en justice ultérieure.

La section soixante-quinze stipule les procédures à suivre pour l'extinction des incendies. S'il y a lieu de croire qu'un feu de plein air risque de menacer des vies ou des biens, tout individu agissant de bonne foi, seul ou avec d'autres personnes sous ses ordres, peut pénétrer sur n'importe quel terrain dans le but d'éteindre un feu ou de prévenir son extension (sous-section (1)). L'individu concerné peut également aviser le propriétaire ou occupant du terrain qui l'inquiète, et ce propriétaire ou occupant a pour obligation de prendre les mesures nécessaires à l'extinction ou à la prévention de la propagation de l'incendie. S'ils ne se conforment pas à cette obligation, ils sont coupables de délit (sous-section 2)). Excepté dans le cas d'un incendie approchant la limite d'une forêt domaniale, auquel cas l'agent forestier présent a le droit de prendre la direction complète des opérations (sous-section (3)), tout individu agissant en vertu de la sous-section (1) ou tout propriétaire ou occupant du terrain sur lequel un feu a lieu peut diriger les personnes sous ses ordres ou toute personne proposant volontairement ses services (sous-section (4)).

La section soixante-quinze, sous-section (4), permet aussi à l'individu responsable de prendre toutes les mesures jugées raisonnables et nécessaires ou opportunes compte tenu de la situation pour protéger les vies et les biens, ou pour éteindre ou prévenir la propagation du feu. Ceci comprend la destruction judicieuse par coupe, labour, brûlage ou tout autre moyen, de toute végétation ou culture dans la mesure ou elle est nécessaire à la maîtrise du feu. L'individu responsable peut aussi demander à toute personne présente ou voisine de l'incendie de l'aider ou d'agir de toute manière jugée nécessaire ou opportune pour maîtriser ou éteindre l'incendie ou l'empêcher de se propager. Il est aussi prévu que l'individu responsable puisse ordonner à quiconque serait menacé par l'incendie, ou dont la présence pourrait interférer avec des opérations menées en relation avec celui-ci, de quitter les abords du feu et de débarrasser les lieux de tout véhicule ou de tout autre objet sous sa responsabilité. Tout individu ne se conformant pas aux dispositions de la sous-section (4) est coupable de délit.

La section soixante-quinze, sous-section (6), décharge l'Etat de toute responsabilité concernant toute perte ou dommage résultant de l'exercice légal par un agent forestier des pouvoirs qui lui sont conférés par cette section. Elle déboute aussi toute demande de compensation ou de récompense par tout individu ayant entrepris des actions ou fourni des services comme il lui est demandé ou ordonné par les termes de la sous-section (4). Cependant l'Etat peut accorder une compensation ou une récompense à un individu pour la perte ou les dommages ou les services rendus lors de la protection d'une forêt domaniale contre un incendie, la somme à payer étant déterminée par le Ministre avec l'accord du Ministère des finances. La section garantit aussi tout responsable des opérations entreprises légalement conformément aux clauses de cette section, ou tout individu ayant soutenu ces opérations, contre toutes les accusations d'entrée illégale sur une propriété privée ou celles concernant des dommages causés de bonne foi, bien que l'individu responsable soit tenu de rapporter les circonstances et actions menées à l'officier de police, au juge de paix, ou au magistrat provincial compétent le plus proche.

Les sanctions encourues pour avoir enfreint la loi sont énoncées dans la Xème Partie (Délits et Peines). La sanction pour l'allumage ou la participation à l'allumage, au rallumage, ou à l'alimentation d'un feu par apport de combustible dans une forêt domaniale, sans autorisation, consiste en une amende maximale de 4000 dollars du Zimbabwe (ZWD)24, ou en une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à dix ans, ou les deux. La sanction encourue par tout individu laissant sans surveillance un feu de plein air qu'il a allumé ou aidé à allumer, ou utilisé, ou rallumé, ou alimenté, avec ou sans autorisation, avant que ce feu ne soit complètement éteint, ou qui allume, aide à allumer, utilise, rallume, ou alimente un feu en train de se propager ou de causer des dommages, consiste en une amende ne dépassant pas 1000 ZWD, ou en une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à deux ans, ou les deux (section soixante-dix-huit). En outre, la section quatre-vingt-un définit comme délits pour tout individu se trouvant sur ou dans une forêt domaniale ou privée le fait de fumer là ou il est indiqué que c'est interdit, ou d'allumer ou de jeter négligemment à terre une allumette ou un objet enflammé. Un individu coupable de ce type de délit encourt une amende pouvant aller jusqu'à 200 ZWD, ou une peine d'emprisonnement maximale de 6 mois, ou les deux.

24 Un dollar du Zimbabwe (ZWD) valait 0,03 dollars US fin 1998. Le revenu annuel per capita du Zimbabwe est d'environ 200 dollars US.
La loi coutumière

On dispose de peu d'informations sur les dispositions de la loi coutumière concernant l'utilisation du feu et le brûlage de la végétation. Dans la Province Occidentale de Zambie, chaque fois que les populations locales font référence aux pratiques traditionnelles, elles ont à l'esprit les clauses des décrets de l'autorité locale sur les feux de brousse promulgués sous l'ancienne administration coloniale. Ces clauses comprenaient:

a) le droit pour une autorité locale de réserver des zones sur lesquelles le brûlage était interdit, notamment les pâturages et les zones utilisées pour la récolte des chaumes de couverture;

b) la responsabilité pour l'autorité locale, en consultation avec le Commissaire de District et l'Agent des services agricoles, d'organiser le brûlage de la brousse entre mai et juin, tous les habitants de la zone concernée étant tenus de participer à ce brûlage;

c) la responsabilité pour chaque individu de mettre en place, avant la fin du mois d'avril de chaque année, des pare-feu adéquats pour protéger sa propriété, y compris les bâtiments et les jardins, des incendies;

d) la responsabilité et l'obligation pour tout individu qui aurait remarqué un feu susceptible d'endommager des propriétés de participer à l'extinction de ce feu;

e) la responsabilité et l'obligation pour tout individu qui aurait vu un feu de brousse de le signaler au chef le plus proche, celui étant tenu d'éteindre ce feu avec l'aide de toutes les personnes disponibles, à moins que le feu n'ait lieu dans un jardin et ne soit tenu sous contrôle.

D'autres dispositions comprenaient la mise au ban de tout individu allumant un feu de brousse sans en avertir les propriétaires et utilisateurs des terrains adjacents, et l'obligation pour tout individu utilisant un feu pour la cuisson des aliments de l'éteindre ensuite. Dans la Province Occidentale de Zambie, c'était le Litunga, ou roi, qui était investi du pouvoir de l'autorité locale, et il déléguait à son tour l'autorité d'effectuer le brûlage précoce aux kapasus, les policiers locaux. Les individus reconnus coupables par les tribunaux locaux d'avoir enfreint les ordres des autorités locales concernant les feux étaient soumises à des amendes et les sommes étaient versées sur le compte de l'autorité locale. En outre, le Litunga désignait certaines zones (sitaka) dans la plaine inondable du Bulozi (Zambèze supérieur) qui ne devaient pas être brûlées car elles constituaient des refuges pour la faune sauvage (Frost 1992a).

Dans l'est du Zimbabwe, il existe au moins une communauté qui engage des guetteurs de feu parmi les habitants; ils ont pour tâche de guetter les feux, de mobiliser les forces de lutte quand besoin est, et d'étudier la cause et le contexte d'un incendie. La communauté impose une échelle mobile d'amendes et de sanctions aux individus reconnus responsables de l'allumage d'un feu sans autorisation, ou n'ayant pas réussi à maîtriser les feux qu'ils avaient allumés. L'amende dépend de paramètres tels que les précautions prises lors de la mise à feu, les efforts déployés pour maîtriser sa propagation, et les dommages causés (Mandondo, comm. pers.)25. La loi coutumière et le contrôle de l'utilisation du feu doivent de toute évidence être étudiés de façon plus approfondie.

25 M. Alois Mandondo, Institut des études sur l'environnement (Institute of Environmental Studies), Université du Zimbabwe, Zimbabwe.
CONCLUSIONS

Le feu, phénomène écologique et socioculturel

Toute discussion sur les politiques liées au feu exige une bonne connaissance des conditions écologiques, sociales et culturelles entourant son apparition et ses utilisations. Les populations font un grand usage du feu, dans de nombreux contextes différents, pour la gestion de la terre et de ses ressources, et ces pratiques sont profondément ancrées dans la culture et les traditions de nombreuses sociétés. Elles agissent en interaction avec les caractéristiques biophysiques de l'environnement, qui les influencent en retour, tout ceci déterminant le régime des feux, la dynamique des combustibles, les variations de la probabilité de l'ignition, et les impacts du feu sur les fonctions écologiques tant des milieux naturels que des milieux marqués par l'action humaine.

Les feux ont des effets à la fois bénéfiques et néfastes qui se répercutent bien au-delà de leur point d'origine. L'attitude du public vis-à-vis du feu est généralement marquée par la perception des effets néfastes. Les préoccupations concernent la destruction de la végétation, la disparition des habitats pour la flore et la faune, les menaces à la biodiversité, la baisse de la qualité de l'air due à la fumée, à la brume sèche et aux polluants atmosphériques, et le rôle des émissions de gaz traces dégagés par les incendies sur le changement climatique mondial. Il se peut que seules certaines de ces préoccupations soient justifiées, mais c'est néanmoins sur elles que reposent la plupart des initiatives politiques actuelles en matière d'incendies.

Les effets bénéfiques du feu sont moins largement reconnus. Le feu agit sur la matière organique et la dynamique des nutriments, entretient les habitats des espèces qui ont évolué avec le feu et s'y sont adaptées, et agit comme une perturbation naturelle altérant par intermittence la composition des communautés végétales et les structures d'âge et de taille des populations qui les constituent. A cet égard, le feu est un phénomène naturel important dans la dynamique de la plupart des écosystèmes d'Afrique australe, même s'il survient peu fréquemment. C'est aussi un instrument essentiel de gestion de ces écosystèmes, et il est souvent nécessaire au maintien de la diversité et de la productivité.

Options possibles pour la maîtrise des incendies de végétation

Le problème à résoudre ne concerne pas le fait que le feu n'est pas un phénomène naturel, ni nécessairement que son utilisation très répandue soit injustifiée - les populations utilisent le feu parce qu'elles prévoient et obtiennent des avantages de cette utilisation. Le problème en Afrique australe est l'absence de maîtrise efficace du feu. Une politique en matière de feu doit donc avoir pour objectif global de limiter les effets néfastes du brûlage incontrôlé. Trois options politiques semblent se présenter à cet égard (Frost 1992b). La première consiste à ne rien faire, en considérant que le problème est exagéré ou que la gestion de l'utilisation très répandue du feu est trop complexe. Cette option du laissez faire ne résout pas les problèmes identifiés plus haut, et ne prend pas non plus en compte les connaissances considérables disponibles sur le feu, qui pourraient être utilisées pour l'amélioration des pratiques actuelles (Chidumayo 1997). Cette option ne convient pas.

La deuxième option, souvent développée au cours des discussions nationales sur le feu, consiste à décourager activement ou même à essayer de proscrire l'utilisation du feu, en considérant que ses effets néfastes dépassent de loin ses avantages éventuels. Cependant il est impossible de mettre cette option en pratique car les tentatives d'exclure totalement le feu des environnements de savane en Afrique n'ont jamais été couronnées de succès (sauf pour de petites parcelles bénéficiant d'un haut degré de protection) - et elles n'ont aucune chance de l'être. Compte tenu de la fréquence de la foudre, de la facilité et de la fréquence d'utilisation du feu par les populations, souvent pour des motifs parfaitement légitimes, un feu accidentel ou provoqué par la foudre se produira inévitablement bien avant que la croissance du couvert ligneux ne supprime naturellement les matériaux combustibles dans le sous-bois. En l'absence de feux de réduction des combustibles, ou d'autres moyens de réduire leur importance, comme par exemple le pâturage intensif du bétail, l'accumulation des combustibles au cours du temps ne fait qu'augmenter le risque de voir se produire des incendies ultérieurs plus intenses et plus destructeurs. De plus, l'exclusion du feu des savanes africaines altérerait sérieusement les fonctions écologiques dans ces écosystème adaptés au feu. Cette option n'aborde donc pas le problème de manière adéquate. Toute tentative de restreindre l'utilisation généralisée du feu est vouée à l'échec, car les populations l'utiliseront tout simplement en cachette, en espérant ne pas être prises. Il y a des chance qu'elles ne le soient pas.

La troisième option, consistant à promouvoir une politique de brûlage planifié et contrôlé, est considérée ici comme la seule viable. Elle se base sur la réalité, considérant que l'utilisation du feu possède à la fois des avantages et des inconvénients, et qu'il faut influencer les populations et les encourager à utiliser le feu de façon plus responsable, mieux maîtrisée, et plus bénéfique, afin d'en retirer des avantages tout en diminuant les coûts écologiques, économiques et sociaux.

Etant donné le large éventail des objectifs et les différences qui en résultent en termes de priorités chez les gestionnaires des terres et de leurs ressources, une approche unique de la mise en œuvre de cette option n'est ni adéquate ni réalisable dans la pratique. Le défi consiste à élaborer un cadre politique suffisamment souple pour englober les différentes conditions écologiques, traditions, valeurs culturelles, pratiques et conditions sociales des communautés concernées, tout en favorisant des actions qui résulteront en des pratiques d'utilisation du feu plus maîtrisées, et un nombre inférieur des feux incontrôlés. Il faut insister davantage sur les mesures incitatives ayant pour objectif une meilleure gestion et une meilleure maîtrise des incendies que sur les sanctions; l'accent mis sur les mesures punitives à l'heure actuelle est excessif (et les moyens de les appliquer trop limités), si bien que la majorité des individus n'accepte pas de prendre des responsabilités.

Il est impossible de formuler et de mettre en œuvre correctement une politique d'utilisation du feu sans tenir compte des autres politiques touchant aux modes d'utilisation des terres et de leurs ressources. Pour être efficace, ces politiques doivent être élaborées conjointement avec les politiques plus générales portant sur l'utilisation des terres dans les secteurs agricole et forestier, et y être intégrées, afin d'éviter que les gains obtenus dans un secteur soient annulés par des évènements contradictoires apparaissant dans les autres secteurs.

Le feu, instrument de gestion des terres et de leurs ressources

L'utilisation du feu comme instrument de gestion des terres et de leurs ressources fait partie intégrante de la culture et des traditions de nombreuses sociétés d'Afrique australe. Les populations utilisent le feu dans le cadre de leurs pratiques agricoles normales pour augmenter la production et pour ouvrir de nouvelles terres destinées à l'implantation humaine et à l'agriculture, en réponse à l'augmentation constante de la pression démographique dans ces régions. Le feu est généralement plus économique et plus facile à utiliser que toute autre méthode d'élimination de la biomasse indésirable. Les tentatives de proscrire son utilisation, en l'absence de solutions plus rentables, ne seront pas efficaces dans le contexte actuel.

Dans une large mesure, la législation actuelle en Afrique australe, illustrée par les textes de loi en vigueur en Zambie et au Zimbabwe, reconnaît implicitement que le feu est un instrument de gestion légitime et efficace en termes de coûts. Cependant, malgré cela, la maîtrise du feu dans ces pays à l'heure actuelle n'est pas forcément meilleure que dans d'autres parties du monde. Ceci illustre l'inefficacité de lois qui ne sont pas, ou ne peuvent pas être appliquées, aussi bien intentionnées soient-elles. Le brûlage incontrôlé est toujours très répandu car les dispositions législatives sont en grande partie inadaptées aux terres sous tenure communale ou coutumière, sur lesquelles se produisent de nombreux incendies. La plupart des gouvernements conservent la responsabilité globale de la gestion des terres et des ressources naturelles dans ces zones, mais bien souvent elles ne disposent pas des moyens nécessaires pour entreprendre les aménagements et les mesures de mise en application nécessaires.

Ceci fournit des arguments en faveur d'une modification du rôle du gouvernement en matière de contrôle des ressources naturelles, et du passage à une politique de gestion basée sur la participation des communautés. Etant donné que la plupart des feux sont causés par les populations, et que les personnes les plus proches d'un feu peuvent le détecter et réagir plus rapidement pour limiter sa propagation et les dommages éventuels que ne pourrait le faire un organisme centralisé, la responsabilité de la gestion des incendies doit être décentralisée au niveau le plus bas possible. Néanmoins, bien que les bénéfices potentiels de la gestion des ressources naturelles basée sur la participation des communautés soient largement reconnus, peu nombreux sont les exemples en ce domaine, et encore moins les réussites. Les communautés sont actuellement limitées par une pénurie de moyens financiers et autres, et par des limites floues entre les responsabilités individuelles et communautaires. Les communautés qui ont été privées de pouvoirs depuis si longtemps auront besoin de temps pour reprendre en main leurs responsabilités et mettre en place ou recréer les institutions nécessaires à une prise de décision et à une action efficaces. Il faudra aussi beaucoup de temps, de moyens et de compétences pour soutenir de telles initiatives. lI importe de ne pas sous-estimer ces coûts.

Pour être efficaces et durables, les programmes de gestion des ressources naturelles basés sur la participation des communautés ne doivent donc pas se limiter à une simple délégation de la responsabilité de gestion du gouvernement central aux institutions régionales. Ils nécessitent aussi une modification des relations entre les gouvernements et ces institutions. Dans les premiers temps, les communautés peuvent avoir besoin d'aide à la prise de décision. Elles ont souvent besoin d'informations et d'avis techniques adéquats concernant les risques et les possibilités associés à l'utilisation du feu dans différents milieux, la manière d'utiliser le feu plus efficacement pour atteindre des objectifs de gestion particuliers, et la meilleure façon de circonscrire et de maîtriser les feux dans différentes situations. Il faut également s'assurer que les communautés possèdent les moyens nécessaires à la mise en œuvre des activités voulues, ou qu'elles ont facilement accès à ces moyens.

Une large consultation est également nécessaire pour garantir que les politiques envisagées soient compatibles avec les objectifs des populations en matière d'utilisation des terres, et avec leur bonne volonté et leurs capacités à remplir leurs obligations. Lorsque les perceptions et pratiques courantes des populations sont incompatibles avec les propositions visant à adopter de nouvelles méthodes, il faut que l'éducation, la formation, et l'adoption et l'utilisation de technologies différentes offrent de bonnes perspectives de résoudre le problème. A cet égard, il faut augmenter les actions permettant au public de mieux comprendre les raisons d'une utilisation plus maîtrisée du feu. Il faut augmenter les investissements dans des programmes adaptés d'éducation, de vulgarisation et de sensibilisation à la maîtrise des incendies et à l'utilisation des terres.

Problèmes techniques

La diminution de la fréquence et de l'ampleur du brûlage incontrôlé et de ses effets néfastes comporte des éléments techniques, sociaux et politiques, qui ont tous d'importantes répercussions économiques et autres. Les problèmes techniques fondamentaux comprennent la nécessité de développer et d'adopter des techniques améliorées de gestion des terres afin de diminuer les besoins en matière de brûlage et de réduire le plus possible les risques de feux incontrôlés. Des systèmes améliorés d'alerte précoce pour l'évaluation du risque incendie sont nécessaires, mais ceci nécessite en retour de meilleures capacités et infrastructures locales permettant l'utilisation des données de télédétection par satellite concernant l'évaluation du risque, et des prévisions climatiques à long terme. Compte tenu des expériences vécues dans d'autres parties du monde avec les brumes sèches de fumée et les effets nocifs sur la santé qui leur sont associés, il faut aussi renforcer la capacité de modélisation de la dispersion et du transport des émissions, et de leurs conséquences sur la qualité de l'air.

Les principaux problèmes sociaux sont centrés sur le besoin de mettre en place des institutions adéquates et efficaces pour le contrôle par la communauté de l'utilisation du feu, et sur la meilleure façon de modifier dans le sens désiré les attitudes et les actions du public. Ceci nécessite l'amélioration de la prise de conscience des populations et de leur compréhension des problèmes découlant de l'utilisation du feu, qu'ils soient d'ordre écologique, environnemental, social, culturel, ou liés à l'utilisation des terres et à la santé publique.

Le développement d'institutions chargées de la gestion de l'utilisation du feu et de la lutte contre les incendies, basées sur la participation des communautés, nécessite la délégation des responsabilités de l'utilisation du feu aux communautés locales, le soutien à la prise de décision et aux actions entreprises au niveau communautaire, et la fourniture des moyens et du personnel nécessaires au soutien de ces programmes. Ces projets seront facilités par l'harmonisation des politiques nationales dans les domaines de l'implantation humaine et de l'utilisation des terres, de l'agriculture et de la foresterie, accompagnée au besoin par la révision des politiques et des lois en vigueur. Des accords adéquats sur la tenure des terres doivent aussi être adoptés, pour inciter les communautés à effectuer les investissements indispensables en terme de temps, d'efforts et de moyens, qu'exigent la gestion des ressources naturelles et la protection et la lutte contre les incendies.

De nombreux pays africains ont actuellement des capacités limitées de formulation et de mise en œuvre de politiques efficaces sur l'utilisation du feu. Le développement économique et social, l'éducation, la production agricole et la sécurité alimentaire sont souvent considérés comme des problèmes plus urgents. Les moyens et les capacités nécessaires à la mise en œuvre des politiques sont limités et sur le déclin, d'autant plus que les gouvernements sont contraints de restructurer leurs économies et de réduire leurs dépenses. Toute initiative visant à réduire la fréquence et l'ampleur du brûlage incontrôlé doit s'assurer que la capacité nécessaire à la mise en pratique des politiques est présente; en effet, ces politiques ne seront pas efficaces si les gouvernements n'ont pas la volonté et les moyens de les mettre en œuvre et de les soutenir.

Besoins en information

Compte tenu de l'évolution rapide du contexte social, économique, politique et environnemental qui se manifeste actuellement en Afrique australe, les politiques en général et celles concernant les feux en particulier doivent être régulièrement réexaminées et, le cas échéant, révisées afin de s'adapter à un contexte en pleine mutation. Pour ce faire, il faut disposer d'informations sur l'efficacité des politiques et programmes en cours, et suivre l'évolution des conditions environnementales et socio-économiques qui influencent les cas d'incendies. Pour soutenir l'élaboration d'une politique et d'une stratégie détaillées pour aborder les problèmes, il faut disposer d'informations exactes et à jour sur le nombre, le type, la localisation et la superficie des zones brûlées, et sur les causes et les effets de ces incendies. Des informations analogues sont nécessaires pour le suivi et l'évaluation des performances des différents programmes de gestion des incendies visant à réduire la fréquence du brûlage incontrôlé.

Ces informations sont difficiles à obtenir en raison de la nature diffuse du feu: des milliers de feux dont l'ampleur, l'origine et les effets sont variables se produisent chaque année dans toute la région, avec une forte variation interannuelle. Seule la télédétection peut permettre la surveillance à si grande échelle, bien que la technologie et les algorithmes en soient encore à la phase de mise au point (Justice et al. 1996, Kendall et al. 1997). Le développement et l'extension de ces initiatives, comprenant la tâche importante de rendre les informations rapidement et facilement disponibles pour les groupes d'utilisateurs nombreux et variés, doivent être soutenus.

Si les communauté locales doivent être investies de la responsabilité de la protection contre les incendies, il faudra encore plus d'informations sur l'importance des savoirs locaux en matière d'utilisation du feu et sur leur pertinence dans le contexte actuel. Compte tenu de la longue histoire des feux d'origine humaine, et des nombreuses traditions et croyances entourant son utilisation, il serait surprenant qu'il n'existe pas une somme considérable de connaissances sur le feu et sa gestion dans différents environnements. Ces connaissances ont rarement été documentées de façon systématique: il est urgent de le faire.

Enfin, les coûts et bénéfices résultant de l'utilisation du feu, ou de l'encouragement des pratiques d'exclusion du feu, ont rarement été évalués. Les valeurs monétaires ou non commerciales des ressources affectées par le feu, ainsi que les impacts économiques directs et indirects du brûlage, doivent être quantifiés. Ceci permettra aux décideurs et à l'ensemble de la société d'évaluer les coûts et les bénéfices des différentes politiques et pratiques. En bref, le problème doit être abordé par une approche intégrée, multidisciplinaire, afin de renforcer les connaissances approfondies requises pour l'élaboration de politiques efficaces et durables.

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