Senegal

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Parmi les pays sahéliens de la sous-région, le Sénégal a été caractérisé pendant longtemps par la monoculture de l'arachide au détriment des productions céréalières. Et pourtant, sur le plan alimentaire, l'arachide n'entre que pour 13% dans la ration énergétique et pour 7% dans la ration protéinique, alors que les céréales en représentent respectivement 65 et 62% 1/. Cette politique s'est traduite par des importations régulières de céréales, de riz notamment, mais aussi de mil et de sorgho, et de mais.

Conscient de l'importance de ce problème, le pays vient d'adopter une nouvelle orientation en matière agricole, appelée Nouvelle politique agricole et dont les grands axes sont les suivants:

On peut attendre de ce nouveau programme non seulement un accroissement des productions céréalières traditionnelles, qui sont le mil et le sorgho, mais aussi de la production de riz et: de mais, dont l'extension est relativement récente, et une réduction des pertes avant et après récolte.

Les régions visitées par le projet ont été celles du centre et du sud du pays, à savoir: le Sine-Saloum, le Sénégal oriental, la Haute et la Basse Casamance, où, suivant les ethnies rencontrées, on peut noter des différences sensibles dans les systèmes post-récolte.

1. Systemes post-recolte

1.1 Récolte et séchage

1.1.1 Région du Sine-Saloum

Dans le Sine-Saloum, peuplé essentiellement de Wolof et de Sérère, les principales productions vivrières sont le mil et le sorgho, le mais ne constituant qu'une culture de soudure ou culture de case. Le mil et le sorgho ne sont récoltés qu'au bout de 15 à 30 jours de séchage sur pied après maturité, au cours desquels les oiseaux sont les principaux déprédateurs; selon les paysans, ils peuvent occasionner des pertes de 5 à 10% suivant la qualité du gardiennage effectué. Quant au mais, pendant les trois semaines de séchage sur pied, les pertes occasionnées par les "mineuses" des épis, qui s'introduisent entre le rachis et le grain, peuvent atteindre 5%.

La récolte du mil consiste d'abord à coucher les tiges que l'on laisse sécher sur place pendant 10 à 20 jours. Durant cette période d'attente des dégâts sont occasionnés par les rats et les souris (5% de pert 4s environ), mais ils sont parfois dus également aux pluies tardives qui entraînent notamment des pertes par moisissures.

Ce n'est qu'au bout de ces 10 à 20 jours que les épis sont coupés etmis en battes (d'un poids de 10 kg en équivalent grain) avant d'être transportés en charrette attelée au village.

En ce qui concerne les épis de sorgho, ils sont mis en bottes dès la récolte, puis battus dans le champ même. Le grain peut alors être transporté en sac, ce qui évite les pertes habituelles subies lors du transport du sorgho en épis.

Enfin, les épis de mais sont récoltés et mis en tas pendant cinq à dix jours dans les champs. Ils sont ensuite transportés dans des sacs jusqu'au village, puis déspathés et étendus en couches, en vue du sechage à même le sol.

1.1.2 Région du Sénégal oriental

Dans le Sénégal oriental, les paysans Diakhanké utilisent les mêmes méthodes que les Wolof et les Sérère pour la récolte et le séchage du mil et sont confrontés aux mêmes problèmes en ce qui concerne les pertes dues aux oiseaux. En revanche, les épis de sorgho ne sont pas battus sur place au moment de la récolte, mais transportés au village pour y être stockés directement. Quant au mais, ce sont les tiges qui sont coupées puis mises en meules dans le champ durant un à trois mois de séchage. Les agriculteurs estiment que, hormis les dégâts causés parfois par le bétail, les pertes enregistrées pendant cette période pourtant longue sont négligeables.

1.1.3 Haute et Moyenne Casamance

Chez les Peulh, après environ trois semaines de séchage sur pied, les épis de mil sont coupés et: mis en bottes. Contrairement aux régions déjà citées, il ne semble pas que les oiseaux posent des problèmes dans les champs. Chez les Mandingue, trois jours après la coupe des tiges, les épis sont assez secs pour être cassés à la main et mis en tas. Dès que possible (un à dix jours selon le volume de la récolte), les épis sont mis en bottes pour être transportés au village.

Pour la récolte du sorgho, les Mandingue et les Peulh couchent les tiges en ligne, puis coupent immédiatement les épis. Si un moyen de transport est disponible (charrette par exemple), la récolte est aussitôt emmenée au village en vue du stockage. Sinon, ils procèdent à un stockage temporaire sur claie, dans le champ. Cette attente peut durer deux semaines, le temps d'organiser le transport. Elle occasionne des pertes qui peuvent être importantes et qui sont dues aux causes suivantes:

Le mais, quant à lui, est récolté normalement au bout de deux semaines de séchage sur pied, après maturité des grains. Mais, comme c'est une culture de soudure, il arrive qu'on le récolte au bout d'une semaine seulement de séchage sur pied. Chez les Mandingue, les tiges sont couchées, puis les épis sont cassés et déspathés en vue du stockage. Chez les Peulh, on met d'abord les tiges en meules pendant une à deux semaines avant de couper les épis. Ces opérations de récolte et de séchage du mais n'entraînent pratiquement pas de pertes.

Le riz enfin, qui est cultivé surtout par les Mandingue, est récolté au bout d'une semaine de séchage sur pied. A l'aide de couteaux, les femmes coupent les épis un à un et les attachent en bottes pour les transporter à pied jusqu'au village.

1.1.4 Basse Casamance

Dans la zone étudiée, chez les Diolas de Basse Casamance (village de Mlomp), le riz est pratiquement l'unique production céréalière. Chaque membre de la famille a son champ. La récolte du champ du chef de famille est réservée en général pour les grandes cérémonies, mariage et funérailles notamment. Celle du champ de la femme est destinée à la consommation familiale.

La récolte du riz, qui se déroule fin novembre, est faite épi par épi. Au bout de trois jours généralement, les hommes procèdent à la mise en bottes. Depuis quelques années, selon les paysans, on observe une pullulation considérable d'oiseaux à ce moment des récoltes. Auparavant, pour lutter contre ces ravageurs, les paysans s'organisaient pour détruire les nids et procéder à des battues. De telles pratiques sont interdites aujourd'hui par les autorités.

1.2 Stockage

1.2.1 Région du Sine-Saloum

1.2.1.1 Techniques de construction

Chez les Sérère et les Wolof, les épis de mil sont normalement stockés dans des greniers en Nguer (cf. figure I.1). Il s'agit d'une structure cylindrique, faite entièrement de matériaux végétaux et assise sur une plate-forme circulaire en branchages, qui repose à 25-30 cm du sol sur des poteaux également en bois. Le corps du grenier, très rigide grâce au tressage serré et minutieux des tiges de Nguer, est totalement ouvert au sommet et recouvert d'un toit conique en paille. Le remplissage ou les prélèvements de stock se font en soulevant la toiture.

Malheureusement, de nos jours, cette technique qui, selon les paysans, permettait de conserver les épis pendant deux ans, voire cinq ans sans dégâts appréciables, tend à disparaître, chez les Wolof notamment, du fait de la sécheresse prolongée et de l'introduction du battage motorisé du mil et du sorgho. On observe ainsi que les bottes d'épis de mil arrivant du champ sont simplement déposées sur une couche de tiges de mil, le tout étant retenu à chaque extrémité par des piquets et protégé par des branches épineuses. Cette installation de stockage provisoire, appelée Ngar, reste en place cinq à six mois, en attendant- le passage de la batteuse. Ce n'est qu'une fois battus que les grains de mil mais aussi de sorgho sont mis en sacs et stockés à l'intérieur des cases d'habitation ou de magasins désaffectés.

1.2.1.2 Techniques de conservation

Les nouvelles formes de stockage décrites ci-dessus sont l'objet de dégâts importants causés par les rongeurs et par les insectes. Ainsi, disent les agriculteurs, les pertes dues aux rats et aux souris sont de 5 à 10% dans le Ngar, et atteignent 10% du fait des insectes, car, lors du battage, les grains attaqués sont devenus irrécupérables. Après le battage, les grains mis en sacs et- stockés dans un magasin ou une habitation subissent encore des pertes provoquées par les insectes et les rongeurs. Un exemple cité par un paysan fait état de pertes de l'ordre de 10% au bout de trois mois seulement de stockage dans un magasin.

En revanche, le stockage en épi dans le grenier traditionnel en Nguer, que l'on rencontre de moins en moins dans le Sine-Saloum, permet une meilleure conservation, comme l'affirment les paysans.

1.2.2 Région du Sénégal oriental

1.2.2.1 Techniques de construction

Chez les Diakhanké, le grenier traditionnel typique, appelé Kouroukoro, est entièrement construit en matériaux végétaux. Cependant, depuis une vingtaine d'années, sont apparues des structures nouvelles où le stockage en épis est fait à même le sol. Il s'agit de magasins aux murs de banco, parfois même en ciment, avec une toiture de tôle ondulée (cf. figure 1.2). Dans le village de Missira, près de Tambacounda, des cases construites sur le même modèle que les habitations, c'est-à-dire avec des murs de banco et une toiture en paille, sont également utilisées pour le stockage en vrac des épis à même le sol.

Pour les villageois interrogés, si les magasins en tôle sont de plus en plus adoptés dans la région, malgré leur coût de construction élevé etdes pertes considérables 2/, c'est- en raison de la sécurité qu'ils apportent contre les incendies. Mais le vrai motif semble plutôt résider dans l'accroissement des productions, qui nécessite de plus grandes capacités de stockage, en même temps que dans un besoin de manifester sa prospérité.

Outre les structures de stockage collectif (magasins et cases), toujours situées à l'extérieur, on trouve chez les Diakhanké des petits greniers en argile en forme de grosse jarre, appelés Bountoung, placés à l'intérieur des cases d'habitation. Ils sont construits par les femmes, qui en gardent la propriété et- servent à conserver les graines de semences et: de légumineuses (arachide, niébé, etc.).

1.2.2.2 Techniques de conservation

Parmi les céréales stockées, le mais est: le plus sensible aux détériorations d'insectes. Quatre mois seulement après la mise en grenier, les épis commencent à être attaqués par des insectes, par les lépidoptères en particulier. En un an de stockage, les paysans estiment les pertes à 10%.

Cependant, à Missira, les principaux déprédateurs semblent: être les rongeurs, surtout les gros rats, qui occasionneraient des pertes de l'ordre de 20%. Ces rats qui, aux dires des villageois, viendraient de la vallée de la Gambie, envahissent: leur village tous les deux ans, s'attaquant tant aux stocks qu'aux cultures.

Les ingrédients naturels de préservation qu'utilisaient les villageois, semblent être oubliés de nos jours. On les a remplacés par une poudre chimique, destinée à traiter les cultures contre les insectes et qui est distribuée gratuitement- par les Centres d'expansion rurale (CER).

1.2.3 Haute et Moyenne Casamance

1.2.3.1 Techniques de construction

Autrefois, en Haute et Moyenne Casamance, les récoltes de céréales pouvaient rester longtemps au champ avant la mise en grenier. De nos jours, à cause des risques de vols et de feux de brousse, elles sont rentrées immédiatement.

La structure de stockage familial la plus répandue est entièrement: composée de matériaux végétaux. Le corps du grenier, de forme cylindrique, est fabriqué à partir de crintings 3/ et posé sur une plate-forme faite de pot eaux et de lattes de bambou (cf. figure 1.3 et - 1.4). Chez les Mandingue, le grenier traditionnel, appelé Bountoung, est installé sur une plate-forme très élevée (1,20 à 1,50 cm), ce qui permet facilement d'allumer un feu à la base pour sécher et/ou traiter le stock par la fumée. Un toit conique, débordant largement la structure, protège le grenier de la pluie. Autrefois, la toiture était faite avec une sorte de paille, appelée Soulouniantan et pouvait durer une dizaine d'années. Cette paille, qui poussait dans les basfonds utilisés maintenant pour la culture du riz, a disparu. Elle est remplacée par une graminée moins résistante, qui ne dure que trois ans.

Chez les Peulh, on retrouve ce même type de grenier, appelé Gaouri, composé des mêmes matériaux, mais installé sur une plate-forme beaucoup plus basse (50 cm environ) et surmonté d'un toit moins débordant.

Depuis une dizaine d'années, est apparu chez les Mandingue le stockage des épis en vrac à l'intérieur de magasins, faits de murs de banco avec toiture en tôle. Ces magasins ne sont souvent que le prolongement des habitations.

A l'intérieur des habitations Mandingue, on trouve de petits greniers en argile, toujours en forme de grande jarre, destinés à la conservation du riz de semence sous forme de paddy.

1.2.3.2 Techniques de conservation

Le mil est la céréale la plus vulnérable aux attaques des insectes etne peut guére être conservé plus de 12 mois sans dégâts importants. Cela explique pourquoi les paysans ont tendance à limiter sa production à la quantité nécessaire à l'autoconsommation. Quant au sorgho et au mais, lorsqu'ils sont suffisamment secs, ils peuvent se conserver jusqu'à deux ans sans pertes notables, surtout chez les Mandingue où l'on pratique le traitement par la fumée.

Enfin, la conservation du riz, faite en épis dans les greniers végétaux, ne pose apparemment aucun problème.

Les villageois de la région semblent méfiants quant à l'utilisation des pesticides chimiques qui ne sont employés ici que sur les semences.

Pour la préservation du stock, les Mandingue n'utilisent aucune plante locale ni aucun autre moyen. Ils traitent les épis de mais en grenier avec la fumée uniquement. Les Peulh, en revanche, pratiquent le crépissage du fond du grenier avec de la bouse de vache, ou avec une couche de la plante Hyptis spicigera, appelée Boummé en poulard.

Quant aux rats, contrairement à ce qui se passe à Missira, dans le Sénégal oriental, leur présence n'est pas signaléé. Ce sont seulement les souris que l'on voit souvent dans les greniers mais qui ne semblent pas causer beaucoup de dégâts.

1.2.4 Basse Casamance

1.2.4.1 Techniques de construction

Pour les Diolas de Basse Casamance, c'est un honneur de servir du riz datant de plusieurs années. Certains villageois disent même qu'ils ne mangent jamais de riz vieux de moins de trois ans.

La gestion et la conservation du stock destiné à la consommation familiale sont confiées à la femme et non au chef de famille. Le grenier, appelé dans le village de Mlomp Boulanguen, est une pièce arrière, incorporée à l'habitation, à l'intérieur de laquelle les bottes de mil sont soigneusement disposées sur une claie, à 80 cm du sol environ. Celle-ci est faite de deux poutres maîtresses en bois rouge 1/, sur lesquelles sont fixées en rangs serrés des traverses en bois de rônier.

Les graines de semences de riz sont conservées à part:, dans des poteries ou canaris, remplies jusqu'au bord et bouchées hermétiquement. Autrefois, on utilisait aussi de grands paniers en vannerie pour la conservation des réserves de paddy destinées à la dot. Mais cette pratique ancestrale tend à être remplacée par une remise d'argent.

1.2.4.2 Techniques de conservation

La partie de l'habitation réservée au stockage est divisée en deux pièces, séparant les stocks du mari et de la femme. Ces pièces sont généralement dépourvues de fenêtres. L'infestation par Sitotroga est fréquente mais le traitement régulier par la fumée permet de prévenir toutdégât. Ce traitement traditionnel consiste à faire brûler lentement de la paille de riz bien tassée et recouverte de sable. Une ouverture est: ménagée au sommet du tas ainsi formé pour permettre l'introduction de braises. Le feu se consume très lentement- en dégageant une fumée épaisse, qui détruit les insectes et même les souris, aux dires des villageois.

Selon ces derniers, les dégâts causés par les souris se limiteraient à la surface du stock et seraient: très difficiles à estimer. Quant à ceux occasionnés par les insectes, ils sont considérés comme négligeables.

2. Conclusions

2.1 Récolte et séchage

Le mil n'est récolté qu'au bout de 15 à 30 jours de séchage sur pied. Cette pratique est commune aux régions du Sine-Saloum, du Sénégal oriental et de la Haute Casamance. Pendant cette opération, les oiseaux sont- les principaux déprédateurs au Sine-Saloum et au Sénégal oriental, alors qu'en Haute Casamance ils ne semblent pas poser de problèmes dans les champs.

Outre cette période de séchage sur pied, on observe dans les deux premières régions une période supplémentaire d'attente (10 à 20 jours) avant la rentrée de la récolte, ce qui entraîne de nouvelles pertes dues aux rats et aux souris. Ce retard supplémentaire peut s'expliquer par la surcharge de travail agricole à ce moment de l'année.

Chez les Diakhanké du Sénégal oriental, les Peulh et les Mandingue de Haute Casamance, lorsqu'un moyen de transport adéquat est disponbile, les épis de sorgho, aussitôt récoltés, sont emmenés au village en vue du stockage. Si le moyen de transport fait défaut, on procède alors à un stockage temporaire sur claie, qui entraîne de nouvelles causes de pertes (feux de brousse, phacochères, singes et oiseaux). Ce n'est que chez les Wolof que les épis de sorgho, une fois coupés, sont aussitôt battus dans le champ, en vue du stockage en grain dans des sacs.

Chez les Diakhanké et les Peulh, les tiges de mais sont coupées et mises en meules pendant plusieurs semaines avant la récolte des épis. Chez les Mandingue, cette période supplémentaire de séchage n'est pas nécessaire car le grenier surélevé permet d'allumer un feu sous la plate-forme pour sécher le stock. C'est pourquoi, chez ces derniers, les épis sont cueillis aussitôt: après la coupe des tiges.

Que ce soit chez les Mandingue ou chez les Diola, au bout- d'une semaine de séchage sur pied, le riz est récolté par les femmes épi par épi et mis en bottes.

2.2 Stockage

2.2.1 Structures de stockage

Dans les trois régions visitées, les greniers traditionnels pour le stockage collectif sont entièrement faits de matériaux végétaux, soit à base de tiges de Guiera senegalensis ou Nguer, soit à base de lattes de bambou. Mais ces structures qui permettent une bonne conservation des céréales sont malheureusement remplacées peu à peu par des magasins en briques de banco, parfois même en ciment, avec une toiture en tôle. Dans ces nouveaux locaux les pertes dues aux insectes et aux moisissures sont beaucoup plus importantes.

Suivant les régions, on peut trouver des raisons différentes à l'adoption croissante des magasins:

2.2.2 Techniques de conservation

Les évolutions citées dans la section ci-avant entraînent des pertes importantes, surtout là où les récoltes sont entreposées dehors pendant cinq à six mois et- simplement protégées par des épines, comme c'est le cas avec les Ngar du Sine-Saloum. Dans cette même région, l'introduction du battage motorisé a pour conséquence le stockage en grain et dans des sacs à même le sol, ce qui assure une moins bonne conservation.,

L'emploi traditionnel des ingrédients naturels de préservation, principalement de plantes insectifuges, semble être abandonné de nos jours. On les a remplacés par des produits chimiques, distribués gratuitement dans les CER, et qui, souvent, sont destinés uniquement à la protection des cultures.

Il faut rappeler cependant que les Mandingue et les Diola utilisent encore des techniques traditionnelles de préservation qui semblent efficaces. Ainsi, chez les Mandingue, la fumée du feu allumé sous les greniers de mais permet non seulement de compléter le séchage des grains mais aussi d'éloigner les insectes. Chez les Diola, une technique quelque peu similaire, pratiquée sous le stock d'épis de riz dans les greniers intérieurs, permet de conserver les céréales pendant une dizaine d'années.

3. Recommandations

3.1 Adaptation et vulgarisation de cribs à mais

Depuis une quinzaine d'années, on observe une extension des surfaces cultivées en mais dans le sud du pays. Chez les Mandingue de Moyenne Casamance, la structure du grenier permet un bon séchage par le fumée. En revanche, dans d'autres zones, chez les Diakhanké et les Peulh, la pratique qui consiste à laisser les épis sur les tiges, mises en meules dans les champs, pendant plusieurs semaines, entraîne des pertes importantes. Afin d'écourter dans ces zones la durée du séchage, il est recommandé d'entreprendre l'adaptation et: la vulgarisation de cribs à mais, faits à partir de matériaux végétaux tels que le bambou, disponibles sur place.

3.2 Conception, expérimentation et vulgarisation de structures appropriées pour le stockage en grain

Le stockage des céréales en grain, dans des sacs et à l'intérieur des magasins ou des habitations à même le sol, entraîne des pertes élevées à cause des insectes, des rongeurs et des moisissures. Plusieurs types de structures, déjà proposés par la recherche, et souvent en douve de béton, se sont avérés trop coûteux et inappropriés.

Il est donc recommandé d'entreprendre la conception et l'expérimentation de structures plus simples en utilisant, autant que possible, des matériaux disponibles localement. Ensuite, pour favoriser la vulgarisation de ces structures, il serait nécessaire de prévoir un système de crédit qui permettrait leur financement par les villageois sur plusieurs années.

3.3 Essai de greniers améliorés pour le stockage en épis

Dans le Sénégal oriental et en Casamance, on observe l'apparition du stockage en épis à même le sol, dans des magasins aux murs de banco et à toit de tôle. Malgré les pertes constatées, les paysans justifient ce choix par la crainte des incendies.

Il est recommandé soit d'améliorer le magasin afin de le rendre plus étanche à l'humidité et aux rongeurs, soit de proposer un type de grenier en banco permettant à la fois de loger un plus grand stock d'épis et d'éviter les incendies.

3.4 Campagne nationale sur l'utilisation des pesticides

Face aux graves infestations d'insectes, surtout dans les structures nouvellement- adoptées, les paysans, pour éviter les pertes, sont contraints de faire appel aux pesticides chimiques. Les insecticides recommandés pour la protection des stocks (par exemple l'Actellic en poudre) n'étant pas disponibles au niveau des villages, les agriculteurs utilisent alors des produits pesticides normalement destinés à la défense des cultures. Afin de prévenir des accidents, il est vivement recommandé: d'une part de mettre à la disposition des CER des produits reconnus efficaces pour le stockage, tout en étant peu toxiques pour les humains, d'autre part d'entreprendre une campagne nationale de sensibilisation et d'information des villageois, sur les dangers que représente l'emploi de n'importe quel pesticide sur les denrées vivrières.

Figure 1.1: Grenier traditionnel en Nguer (SineSaloum, Sénégal). A remarquer les trois rangées de briques de ciment qui soutiennent le grenier? en remplacement des poteaux en bois utilisés autrefois.

Figure 1.2: Nouvelle structure de stockage, appelée magasin (Sine-Saloum, Sénégal oriental et Casamance). Remplace malheureusement le grenier traditionnel dans certaines régions. Stockage en épis ou en grain battu dans des sacs posés à même le sol.

Figure 1.3: Grenier collectif chez les Peulh de Haute Casamance

Figure 1.4: Grenier Mandingue entièrement construit en matière végétale, appelé Bountoung. Utilisé pour le stockage d'épis de céréales (sud du Sénégal et nord de la Guinée-Bissau).


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