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Approches régionales:un lien entre les efforts nationaux et mondiaux

R.M. Martin

R. Michael Martin est Directeur de la Division des politiques et de l’information forestières, Département des forêts de la FAO, Rome.

Les initiatives mondiales et régionales peuvent être complétées par des approches régionales pour aider les pays qui sont confrontés à des problèmes communs à agir de manière efficace pour atteindre des objectifs communs.

Le déboisement et la dégradation forestière ainsi que la perte de diversité biologique forestière – ne sont que quelques-uns des problèmes auxquels sont confrontés les pays qui préparent la cinquième session du Forum des Nations Unies sur les forêts (FNUF), prévue pour mai 2005. Ils vont notamment se demander si des approches nouvelles ou novatrices sont nécessaires pour les inciter à prendre des mesures pour protéger leurs forêts et les aider à concourir à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement.

Quoique la démarche privilégiée soit l’action nationale étayée par un dialogue international, on devra veiller à ne pas négliger un complément utile: les approches et les accords régionaux pour traiter les grands problèmes en matière d’environnement, de commerce et de développement.

Les approches régionales renforcent les initiatives nationales et l’engagement international. C’est sur l’action nationale que reposent les efforts visant à améliorer la gestion des forêts, mais les forêts et les bassins versants ne s’arrêtent pas aux frontières nationales et le marché accepte des produits venant de n’importe où. En outre, de nombreux pays en développement n’ont pas les moyens financiers ou le poids politique qui pourraient être mobilisés au niveau régional.

De même, il est difficile de parvenir à un accord sur des initiatives mondiales car les pays sont extrêmement différents les uns des autres, par leurs types de forêts, leur développement économique, leur langue, leur culture et bien d’autres facteurs. La critique que l’on fait le plus couramment au «dialogue mondial sur les forêts» est que les paroles n’on toujours pas été suivies d’actes concrets. Les approches régionales peuvent parfois colmater les différences, et ce faisant rendre une action sur le fond plus réalisable.

Les processus régionaux permettent à des pays qui sont confrontés à des conditions et à des types de problèmes similaires de partager des expériences et de rechercher des solutions communes (sur la photo, un atelier régional pour les pays du Proche-Orient à faible couvert forestier)
DÉPARTEMENT DES FORÊTS DE LA FAO

QU’EST-CE QU’UNE RÉGION?

La composition d’une région (ou d’une organisation régionale) est ordinairement définie par ses membres, et reflète souvent une combinaison de facteurs, tels que proximité géographique, politiques similaires, intérêts économiques communs ou conditions environnementale comparables. La principale raison qui pousse à mettre en place des processus régionaux est probablement de favoriser les échanges d’expériences entre des pays qui ont des conditions et des types de problèmes similaires et qui, par conséquent, ont une possibilité de trouver des solutions communes.

Étant donné qu’il n’existe pas de règle établie pour définir les régions, les anomalies sont fréquentes. Par exemple, la région de l’Amérique latine est plus délimitée par la langue et par la culture que par des critères géographiques, puisque l’on considère généralement qu’elle inclut Cuba qui est hispanophone, mais pas la Jamaïque qui est anglophone. De même, l’Évaluation des ressources forestières mondiales 2000 de la FAO considère que l’Europe est la région du monde qui a le couvert forestier le plus étendu – uniquement parce que les immenses forêts de la Sibérie sont rat­tachées à l’Europe plutôt qu’à l’Asie; la Fédération de Russie, qui est géographiquement à cheval sur deux continents, devait être comptée dans l’une ou l’autre de ces régions.

En dépit de ces anomalies, on a recours à des approches régionales – qui peuvent être définies, en gros, comme des activités auxquelles participent plusieurs pays, mais qui n’ont pas une portée mondiale – pour diverses initiatives.


LES RÉGIONS ET LEURS FORÊTS

Les préoccupations des pays d’Europe et d’Amérique du Nord sont très différentes de celles de la plupart des pays d’Afrique, d’Asie et du Pacifique, d’Amérique latine et des Caraïbes et du Proche-Orient. La majorité des pays dits développés ont utilisé leurs forêts pour assurer la croissance de leurs économies dans le cadre des révolutions agricole et industrielle. Aujourd’hui, ces pays s’emploient à restaurer leurs paysages forestiers. Par exemple, après avoir défriché, exploité et géré leurs forêts pendant des siècles, la plupart des pays d’Europe n’ont plus de forêts primaires. Selon Thirgood (1989), la modification des forêts de la région a été le facteur qui a le plus conditionné l’évolution de la civilisation européenne. L’auteur affirme que «l’histoire des forêts européennes ne parle pas de leur préservation, mais de leur destruction et de leur reconstruction réussie». Thirgood conclut que la grande leçon de l’Europe est que «la destruction des forêts conduit inévitablement à un changement, mais pas nécessairement dans le sens d’une catastrophe, puisqu’elle peut même déboucher sur un renforcement de la productivité» – un enseignement qui garde toute son actualité dans le débat sur les politiques appropriées pour les régions en développement.

En Europe et en Amérique du Nord, les économies se sont développées, des progrès technologiques ont stabilisé la quantité de terres requise pour la production agricole, et le déboisement n’est plus un réel problème. Des problèmes comme la biodiversité et le changement climatique – deux concepts qui n’avaient jamais été évoqués durant les siècles de l’expansion des régions du nord de la planète – sont désormais au cœur des discussions.

Le débat sur les forêts est cependant très différent dans les pays en développement où l’agriculture et les forêts sont toujours en concurrence pour le même espace et où les populations humaines augmentent. Dans les régions tropicales, de nombreux pays ont des taux de déforestation supérieurs à 1 pour cent par an. Par exemple, en Amérique centrale, chaque pays a perdu au moins 10 pour cent de son couvert forestier entre 1990 et 2000. Dans cette région, le principal souci est de gérer les forêts de manière durable tout en maximisant les avantages économiques qui peuvent en être retirés.

Vu cette évolution historique, il n’est pas surprenant que des pays de régions différentes ne soient pas parvenus à un accord sur des questions clés. À la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement (CNUED), tenue à Rio de Janeiro (Brésil), en 1992, des pays membres de régions en développement ont mis en avant le droit souverain de chaque pays à décider comme bon lui semble de l’utilisation de ses ressources forestières. Les pays de régions développées ont répliqué que mettre un terme à la déforestation était un impératif mondial. Douze ans plus tard, la majorité des pays ont conclu qu’il était dans leur intérêt de gérer de manière durable les forêts, mais les choses avancent lentement car des divergences de vue affirmées avec force continuent à perturber le débat international sur les forêts.


LES APPROCHES RÉGIONALES: LE POUR ET LE CONTRE

Par rapport aux arrangements nationaux et mondiaux, les approches régionales présentent un certain nombre d’avantages, mais aussi quelques inconvénients.


Avantages par rapport aux approches nationales


Avantages par rapport aux approches mondiales


Inconvénients

Les initiatives régionales sont un complément, mais elles ne sauraient se substituer aux travaux effectués à l’échelle nationale. Par exemple, les pays individuels ont des lois et des institutions qui les habilitent à prendre certaines mesures, notamment à prélever des taxes et à faire appliquer des réglementations, alors que les groupements régionaux n’ont généralement pas ces pouvoirs.

En outre, certains problèmes – par exemple, le commerce international ou le changement climatique – ne peuvent pas être résolus de manière satisfaisante au niveau régional en raison de leur caractère mondial.


EXEMPLES D’INITIATIVES ET D’ORGANISATIONS RÉGIONALES QUI ONT UN IMPACT SUR LES FORÊTS


Processus relatifs aux critères et indicateurs de la gestion durable des forêts

Les années qui ont suivi la CNUED ont été marquées par un certain nombre d’initiatives volontaires dans lesquelles des pays ayant des points de vue similaires se sont réunis pour identifier les éléments clés de la gestion durable des forêts. Les processus relatifs aux critères et indicateurs, notamment pour la zone sèche de l’Afrique, les forêts sèches d’Asie, le Proche-Orient, l’Europe, les forêts tempérées et boréales non européennes, l’Amérique centrale et les pays du bassin amazonien, sont souvent cités comme des exemples d’initiatives régionales ou écorégionales réussies.


Processus de haut niveau sur les forêts

Dans plusieurs régions, des ministres chargés des forêts se sont réunis pour aborder des problèmes communs intéressant le secteur, tels que la conservation et la gestion des forêts ou la mise en application des lois et la gouvernance dans le secteur forestier (voir les articles spécifiques sur cette question dans ce numéro). Les ministres se sont réunis à intervalles relativement réguliers, dans le cadre de trois instances, à savoir: la Conférence des ministres des forêts de l’Afrique centrale (COMIFAC); la Conférence ministérielle sur la protection des forêts en Europe (CMPFE) et la Commission centraméricaine de l’environnement et du développement (CCAD). La CCAD, constituée des ministres de l’environnement de sept pays, a élaboré une Stratégie forestière pour l’Amérique centrale (voir encadré).

La Communauté du développement de l’Afrique australe (SADC) a établi un Protocole forestier – sorte de cadre d’action régional pour favoriser une approche commune pour la gestion des ressources forestières de la région – qui a été signé par les Chefs d’État et de gouvernement de la SADC, en 2002.

Les politiques forestières tiennent une place importante dans les travaux de l’Organisation du traité de coopération amazonien (OTCA). L’OTCA appuie l’élaboration de critères et indicateurs de la gestion durable des forêts, dans le cadre du Processus de Tarapoto, et met l’accent sur le rôle des communautés autochtones dans la conservation des forêts amazoniennes.

Les hauts fonctionnaires forestiers (ASOF) de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE) se réunissent une fois par an depuis sept ans et donnent des conseils concernat les questions forestières aux Ministres de l’agriculture et des forêts de l’ANASE. Ils ont par exemple recommandé l’adoption du Code des pratiques d’exploitation forestière pour la région Asie et Pacifique (élaboré sous les auspices de la Commission des forêts pour l’Asie et le Pacifique), et les ministres sont convenus d’établir un réseau pour favoriser la mise en œuvre du Code à l’échelle de la région.

Les brouillards de pollution transfrontières constituent un problème environnemental majeur dans la région Asie et Pacifique, et ils sont principalement causés par des incendies de forêt. Pour remédier au problème, la neuvième Conférence ministérielle de l’ANASE sur les brouillards, tenu en juin 2002, a adopté l’Accord de l’ANASE sur les brouillards de pollution transfrontières, en vertu duquel les pays signataires de la région conviennent de prendre des mesures pour prévenir et combattre les activités associées à des incendies des terres ou des forêts pouvant produire des brouillards de pollution transfrontières. L’Accord a aussi établi un centre de coordination pour aider les pays à coopérer et à coordonner leur action pour gérer l’impact de ces feux.


Groupements économiques et commerciaux régionaux

Les groupements et organisations économiques ou commerciaux régionaux facilitent le commerce des produits forestiers, grâce à diverses mesures telles que:

Grâce à ces mesures, les pays et les industries peuvent se spécialiser dans la manufacture de produits forestiers correspondant à leurs avantages comparatifs économiques, écologiques et sociaux.

Les groupements suivants sont peut-être les plus connus:


Réseaux régionaux

Les réseaux régionaux peuvent être très utiles pour diffuser des connaissances et promouvoir la collaboration entre des pays qui ont des besoins similaires en vue de résoudre leurs problèmes pour un moindre coût. Les réseaux sont des mécanismes efficaces pour soutenir la recherche (par exemple, le Réseau de recherche forestière en Afrique subsaharienne [RRFAS]; le Réseau africain de recherche forestière [AFORNET]; l’Association des instituts de recherche forestière de l’Asie et du Pacifique [APAFRI]); l’éducation (par exemple, le Réseau d’enseignement agroforestier pour l’Asie du Sud-Est [SEANAFE] et le Réseau d’enseignement agroforestier pour l’Afrique [ANAFE]); et la coopération technique sur des aspects spécifiques de la foresterie (par exemple, le Réseau latino-américain de coopération technique sur les parcs nationaux et autres aires protégées et sur la faune sauvage;le Réseau latino-américain de coopération technique sur l’aménagement des bassins versants; le Réseau de remise en état des forêts pour l’Asie et le Pacifique; et le Réseau Asie-Pacifique sur les espèces forestières envahissantes). Anderson et al. (1999) ont identifié plus d’une douzaine de réseaux régionaux spécialisés dans les produits forestiers non ligneux. Il existe un certain nombre de réseaux régionaux servant à renforcer la recherche et la conservation des ressources génétiques forestières – par exemple, le Programme européen des ressources génétiques forestières (EUFORGEN), le Programme pour les ressources génétiques forestières de l’Afrique subsaharienne (SAFORGEN), et l’Initiative de la région Pacifique Sud relative aux ressources génétiques forestières (SPRIG).

Pour promouvoir la conservation de la biodiversité, l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) a aidé ses pays membres à établir des réseaux régionaux de réserves de la biosphère, pour faciliter l’échange d’informations et d’idées.

Le Fonds mondial pour la nature (WWF) encourage la création de réseaux régionaux sur les forêts et le commerce constitués de groupes d’acheteurs et de producteurs, dans le cadre de son Réseau mondial sur les forêts et le commerce, en vue d’éliminer l’exploitation forestière illicite et d’améliorer la gestion des forêts précieuses et menacées. Ces réseaux facilitent les relations commerciales entre des entreprises qui ont pris l’engagement de pratiquer et de promouvoir une foresterie responsable.

Ces dernières années, la coopération bilatérale dans le domaine de la prévention et de la gestion des feux de forêt s’est rapidement développée avec l’établissement d’une série de réseaux régionaux sur les feux de forêts (Goldammer, 2004).


Initiatives de coopération régionale sur les forêts annoncées au SMDD

Au Sommet mondial pour le développement durable (SMDD), tenu à Johannesburg (Afrique du Sud) en 2002, deux nouvelles initiatives régionales majeures sur les forêts ont été annoncées:


Appui de la FAO aux régions

Bureaux régionaux et sous-régionaux. Peu après sa fondation en 1945, la FAO a commencé à structurer son secrétariat en plusieurs bureaux régionaux pour l’Asie et le Pacifique (Bangkok, Thaïlande), le Proche-Orient (Le Caire, Égypte), l’Afrique (Accra, Ghana), l’Amérique latine et les Caraïbes (Santiago, Chili) et l’Europe (Rome, Italie). Cette approche a par la suite été étendue dans les années 90, avec la création de bureaux sous-régionaux pour l’Afrique australe et orientale (Harare, Zimbabwe), les Caraïbes (Bridgetown, la Barbade), les Îles du Pacifique (Apia, Samoa), l’Europe de l’Est (Budapest, Hongrie) et l’Afrique du Nord (Tunis, Tunisie).

Commissions régionales des forêts. Six Commissions régionales des forêts, organisées par la FAO durant la période 1948-1960 se réunissent à intervalles réguliers depuis environ 50 ans (voir l’article de Koné et al. dans ce numéro). Ces commissions rassemblent les chefs des institutions forestières nationales pour traiter des questions intéressant tous les pays membres de la région.

Projets techniques. La FAO met en œuvre de nombreux projets forestiers de portée régionale, dont voici quelques exemples:


Initiatives régionales d’autres organisations

Comme la FAO, bien d’autres organisations internationales qui s’occupent de forêts, y compris des organisations non gouvernementales, organisent leurs activités selon une approche régionale. L’Union mondiale pour la nature (UICN), par exemple, a huit bureaux régionaux (Afrique de l’Ouest, Afrique centrale, Afrique de l’Est, Afrique australe, Amérique centrale, Amérique du Sud, Asie, Europe) qui s’occupent de problèmes spécifiques à leur région. En Europe orientale et centrale, par exemple, l’UICN, en partenariat avec la FAO, aide des associations de propriétaires forestiers à promouvoir la gestion durable des forêts et à renforcer la conservation de la biodiversité dans des forêts récemment privatisées, au moyen de mesures éducatives, d’échanges d’expériences, de matériel de formation et de vulgarisation (voir www.iucn.org/themes/fcp/wherewework/rofe_projects.htm). L’UICN veille aussi à ce que les travaux en cours pour boiser une bonne partie des terres de la région qui ne sont plus cultivées n’entraînent pas la perte d’habitats précieux ou un appauvrissement de la biodiversité.

On peut également citer le projet commun UICN/WWF sur les innovations forestières (voir www.iucn.org/themes/forests/policy/regional.html), qui a facilité l’élaboration de systèmes visant à évaluer l’efficacité de la gestion des zones protégées, pour l’Amérique centrale et l’Afrique centrale.

La FAO soutient l’élaboration d’une stratégie régionale pour la santé, la protection et la gestion des forêts d’Amérique centrale
G. ALLARD

Un projet régional de la FAO aide les pays producteurs de gommes et de résines de l’Afrique subsaharienne à échanger des expériences sur la production, la transformation, le contrôle de la qualité et la commercialisation de ces produits (ici, tri de la résine au Soudan)
H. ABDEL NOUR

CONCLUSIONS

Les processus intergouvernementaux reposent ordinairement sur le consensus; concrètement, cela signifie que les pays s’accordent sur des principes ou des objectifs généraux – principe selon lequel le développement durable est dans l’intérêt de tous, ou objectif de parvenir à la gestion durable de tous les types de forêt – mais pas sur les détails de la mise en œuvre. Il est donc difficile, sinon impossible, que tous les pays parviennent à un consensus mondial sur toute la gamme d’actions spécifiques nécessaires pour parvenir à une gestion durable des forêts. Cela est d’autant plus vrai si ces actions nécessitent un important engagement financier, ou un compromis de souveraineté nationale sur l’utilisation de ressources naturelles comme les forêts.

Les approches régionales permettent souvent à des pays qui sont confrontés aux mêmes problèmes et qui ont des capacités similaires de prendre des mesures efficaces pour atteindre des objectifs communs. Les organisations, processus et initiatives d’échelle régionale centrés sur les forêts ou pouvant avoir un impact majeur sur cette ressource sont déjà bien assez nombreux, voire trop dans quelques régions. Il n’y a donc aucune raison d’en concevoir de nouvelles, mais dans certains cas, il conviendrait de renforcer la collaboration entre les initiatives.

Les approches régionales ne sauraient aplanir à elles seules tous les problèmes des forêts du monde. En particulier, elles ne peuvent pas résoudre directement les problèmes entre deux ou plusieurs régions à moins d’être accompagnées de sérieuses négociations débouchant sur un compromis.

Bon nombre de ceux qui participent au dialogue international sur les forêts éprouvent un sentiment de frustration et de lassitude. Ils se rendent compte à quel point il est difficile de parvenir à un consensus mondial sur les mesures à prendre pour améliorer la gestion des ressources forestières mondiales, pour compléter les propositions volontaires d’action qui ont déjà été convenues. Dans ce cas, le moment est probablement venu d’examiner avec attention les avantages qu’il y aurait à miser sur les approches régionales.

Stratégie forestière pour l’Amérique centrale

Dans les années 90, tous les pays d’Amérique centrale (Bélize, Costa Rica, El Salvador, Guatemala, Honduras, Nicaragua et Panama) ont perdu au moins 10 pour cent de leur couvert forestier, essentiellement à cause de la conversion des terres forestières à l’agriculture, et de l’expansion des centres urbains. Face à la difficile tâche d’accélérer le développement économique tout en assurant la conservation des forêts, les Ministres de l’environnement et du développement des pays d’Amérique centrale (CCAD) ont mis au point une stratégie forestière pour l’Amérique centrale (Estrategia Forestal Centroamericana, EFCA), qui a été approuvée en 2002 et qui fixe des objectifs sur 10 et 25 ans pour le couvert forestier de la région. Cette stratégie invite aussi tous les pays d’Amérique centrale à réviser ou à mettre à jour leurs politiques forestières et leurs programmes forestiers nationaux d’ici à 2005.

La stratégie, conçue avec l’assistance d’autres organismes comme la FAO et l’UICN, se propose d’aider les pays de la région à mettre en œuvre les propositions d’action du Groupe intergouvernemental sur les forêts (IPF) et du Forum intergouvernemental sur les forêts (IFF). Mis à part l’accroissement du couvert forestier, ses objectifs sont les suivants:

  • remettre en état les forêts dégradées;
  • renforcer le système centraméricain de zones protégées (SICAP);
  • promouvoir le secteur forestier, comme principal acteur de la stratégie globale de conservation de l’environnement, de réduction de la vulnérabilité des populations rurales et de lutte contre la pauvreté.

La mise en œuvre de la Stratégie forestière a déjà avancé:

  • > Les ministres responsables de l’environnement se sont réunis trois fois avec les ministres chargés de l’agriculture; il s’agissait des premières réunions intersectorielles à ce niveau, sur le thème de la lutte contre la déforestation dans la région.
  • Plusieurs pays ont adopté des mécanismes pour la rémunération des services environnementaux.
  • Les pays de la région ont fait un effort pour accroître la superficie de forêts protégées dans le cadre du SICAP. Fin 2004, on avait établi 554 zones de conservation de la biodiversité couvrant 12,9 millions d’hectares, soit 24,8 pour cent de la superficie des terres de la région. Le premier Congrès centraméricain sur les zones protégées a eu lieu à Managua (Nicaragua), en mars 2003.
  • Avec une assistance financière de la FAO, sept pays d’Amérique centrale ont identifié des zones où mettre en œuvre des projets de développement forestier au titre du Mécanisme pour un développement propre du Protocole de Kyoto.
  • Avec l’aide de la FAO, une stratégie pour la santé et la gestion des forêts dans la région de l’Amérique centrale a été préparée.
  • Avec le concours de la FAO et de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), une commission sur les feux de forêt pour l’Amérique centrale et le Mexique a été établie; celle-ci a élaboré une stratégie régionale pour résoudre ce problème.
  • Des programmes forestiers nationaux ont été ou sont mis à jour ou révisés dans les sept pays, avec l’assistance de la FAO, du Mécanisme pour les programmes forestiers nationaux, de la Banque mondiale et des Gouvernements des Pays-Bas et de la Suède.

Bien qu’il soit impossible de mesurer les changements réels survenus dans le secteur forestier en quelques jours ou en quelques mois – il serait plus réaliste de raisonner sur des décennies ou même des générations – le monde observera attentivement les résultats de cette approche régionale dynamique.

Bibliographie

Anderson, J., Warner, K., Russo, L. et Qwist-Hoffmann, H. 1999. Produits forestiers non ligneux: les défis de la vulgarisation. Unasylva, 198: 54-57.

Durst, P.B. et Brown, C. 2003. Recherche d’excellence: Modèles d’aménagement forestier dans la région Asie et Pacifique. Unasylva, 214/215: 58.

FAO. 2003. Sustainable management of tropical forests in Central Africa – In search of excellence. FAO: Document sur les forêts no 143. Rome.

FAO. 2004. In-session seminar on alternative forest management models: opportunities for achieving sustainability and reducing poverty? Secretariat Note. Asia-Pacific Forestry Commission, 20th session, Nadi, Fiji, 19-23 April 2004. Bangkok, Thaïlande, FAO, Bureau régional pour l’Asie et le Pacifique. Disponible en ligne à: www.apfcweb.org/FO-APFC-2004-7.doc

Goldammer, J.G. 2004. Coopération internationale pour la gestion des incendies de forêt. Unasylva, 217: 3-9.

Thirgood, J.V. 1989. Man’s impact on the forests of Europe. Journal of World Forest Resource Management, 4(2): 127-167.

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