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1. INTRODUCTION


1.1. DONNEES DE BASE

Le Territoire des îles Wallis et Futuna est un Territoire français d'outre-mer. L'archipel comprend l'île de Wallis d'une part et les îles de Futuna et Alofi d'autre part (tableau 1). Les deux groupes sont distants de 230 km et sont situés à l'intérieur d'un triangle Fidji - Samoa - Tonga.

TABLEAU 1: LES ILES WALLIS ET FUTUNA - DONNEES DE BASE

Iles

Superficie

(km2)

Population

(1990)

Taux d'accroissement annuel moyen

(1983-1990)

Densité de population

(habitants/km2)

Wallis

77,5

9 000

1,37

116

Futuna

48

4 700

1,18

98

Alofi

16,5

0

-

-

Total

142

13 700

1,31

96

1.2. LES DIFFERENTS TYPES DE FORETS ET L'UTILISATION DES SOLS

Autrefois, les îles Wallis, Futuna et Alofi étaient entièrement couvertes par des forêts naturelles constituées par des forêts denses humides et des forêts littorales. Celles-ci ont depuis été défrichées pour les besoins de l'agriculture, et notamment pour les cultures pluviales qui sont pratiquées, encore de nos jours, de manière itinérante après défriche et brûlis. Les principales cultures sont le manioc (culture qui occupe de loin la plus grande superficie), cocotier, taro (en culture irriguée et en culture pluviale), banane, igname et d'autres plantes à tubercule (Alocasia macrorrhiza, Xanthosoma atrovirens, Ipomea batatas) ainsi que Piper methysticum. Pratiquement toutes les surfaces cultivées sont destinées à la satisfaction des besoins domestiques, l'alimentation et de plus en plus pour les dons et échanges de vivres à l'occasion des fêtes coutumières.

Le tableau 2 indique les surfaces approximatives des différents types de forêt par île. Faute de données plus récentes, ces chiffres ont été tirés d'une étude de l'ORSTOM[1] publiée en 1985 («Contribution à la connaissance de la végétation de la flore de Wallis et Futuna» de P. Morat et J.M. Veillon). Il est certain qu'aujourd'hui les surfaces de forêts denses humides et des forêts secondaires se situent à un niveau inférieur à celles indiquées dans le tableau 2. En effet, depuis cette date, la population a augmenté ainsi que le cheptel porcin (nourri à base de manioc), ce qui a conduit inévitablement à une extension des surfaces cultivées aux dépens des forêts.

TABLEAU 2: SURFACES DES DIFFERENTS TYPES DE FORET PAR ILE

Iles

Forêts denses humides

Formations littorales

Forêts secondaires (formations à cocotier dominant)

Landes (toafa)

Plantations de Pinus caribaea

Zones anthropisées (cultures, villages)

ha

%

ha

%

ha

%

ha

%

ha

%

ha

%

Wallis

700

9

300

4

3 400

(2 800)

44

(36)

1 550

20

200

2,6

1 600

20,4

Futuna

900

19

200

4

2 350

(700)

49

(14)

800

17

200

4,2

350

6,8

Alofi

1 000

62

100

4

450

(100)

27

(5)

0

0

0

0

100

6

Total

2 600

18

600

4

6 200

(3 600)

44

(25)

2 350

17

400

2,8

2050

14,2

Remarque: les données sont données en hectares et en pourcentage de la surface totale de chaque île

1.2.1. La forêt dense humide

La forêt dense humide n'est pas haute. En effet, la strate supérieure ne dépasse guère 20 mètres de haut et les arbres 80 centimètres de diamètre. La répartition des espèces dans ce type de forêt n'est pas identique dans les trois îles et elle diffère aussi selon la nature du substrat, calcaire ou non. Le tableau 3 fournit une liste non exhaustive des espèces présentes dans la forêt dense humide.

1.2.2. Les formations littorales

La mangrove, absente à Futuna et Alofi, occupe à Wallis quelques petites anses vaseuses. Elle se présente comme une formation assez dense, de 3 à 4 mètres de hauteur, et qui ne contient que deux espèces: Bruguiera gymnorhiza et Rhizophora samoensis.

Les groupements psammophiles occupent les plages et les arrière-plages sableuses. Leur extension varie d'un simple cordon de végétation au pied de certaines falaises ou dans les arrière-mangroves jusqu'à recouvrir la totalité de certains îlots bas coralliens du lagon de Wallis. Les principales espèces d'arbre et d'arbuste présentes dans les groupements psammophiles sont Acacia simplex, Casuarina equisetifolia, Cocos nucifera et Guettarda speciosa.

La forêt littorale se trouve sur des sols peu évolués d'apport des plaines côtières entre 0 et 20 mètres d'altitude. Elle se présente sous l'aspect d'une forêt de 15 à 20 mètres de hauteur, comprenant, dans la strate supérieure Barringtonia asiatica, Calophyllum inophyllum, Cordia subcordata, Ficus prolixa, Hernandia nymphaeifolia, Hibiscus tiliaceus, Inocarpus edulis, Neisosperma oppositifolia, Terminalia samoensis et Thespesia populnea notamment.

TABLEAU 3: LISTE DES PRINCIPALES ESPECES PRESENTES DANS LA FORET DENSE HUMIDE

Noms scientifiques

Noms wallisiens

Noms futuniens

Aglaia psilopetala*

Lagakalo

Lalamea

Alphitonia zizyphoides

Toi

Toi

Anacolosa insularis



Calophyllum neo-ebudicum


Tamanu

Canarium vanikoroense


Agai

Cerbera manghas

Leva

Leva

Decaspermum fructicosum

Nukanuka

Nukanuka

Desmodium umbellatum

Lala

Laakau fela mata

Diospyros sp.

Kanuve

Kulume

Diospyros sp.

Tutuna

Tutunu

Dysoxilum mollissimum



Dysoxilum samoense

Maota

Maota

Elaeocarpus angustifolius

Togovao

Togovao

Elaeocarpus tonganus

Polo

Filimoto

Fagraea berteriana

Puauvea

Pua

Ficus tinctoria

Masi

Mati

Flacourtia rukam


Filimoto

Flueggea flexuosa

Poumuli

Poutea

Geniostoma samoense

Gahe

Saugapilo

Glochidion ramiflorum

Mahame

Masame

Hemandia moerenhoutiana


Pipi

Hemandia peltata

Pukotala

Puka

Medinilla racemosa*



Medinilla samoensis



Meryta sp.*



Myristica inutilis


Lalavao

Neisosperma oppositiplia

Fao

Fao

Neonauclea forsteri

Afa

Afa

Parinari insularum

Hea

Sea

Planchonella costata



Planchonella linggensis

Tasili

Tatili

Planchonella torricellensis


Maalava

Polyscias multijuga



Pometia pinnata

Tava

Tava

Procris pendunculata



Psychotria insularum


Olavai

Psychotria leptothyrsa



Psychotria spp.



Randia cochinchinensis

Olamaka

Ola

Rhus taitensis

Tavai

Tavai

Scirpodendron ghaeri



Sphaeropteris lunulata


Palapala

Syzygium clusiaefolium

Kafika

Asi

Syzygium dealatum



Syzygium inophylloides


Kokatuki

Syzygium neurocalyx

Koli

Koli

Syzygium samarangense



Syzygium sp.


Kolivai

Tarenna sambucina

Funavai

Funavai

* Espèces endémiques

1.2.3. Les forêts secondaires

Les forêts secondaires résultent de l'action de facteurs anthropiques (feux, défrichements, cultures, habitats) sur les forêts naturelles. Elles incluent beaucoup d'espèces héliophiles à croissance rapide. La liste des principales espèces présentes dans les forêts secondaires (tableau 4) n'est pas exhaustive.

Les degrés de secondarisation sont variés et la transformation atteint souvent un stade avancé avec un mélange d'espèces cultivées plus ou moins abandonnées telles que Aleurites moluccana, Artocarpus altilis, Carica papaya, Cocos nucifera, Mangifera indica, Musa spp., Psidium guayava, etc.

TABLEAU 4: LISTE DES PRINCIPALES ESPECES PRESENTES DANS LES FORETS SECONDAIRES

Noms scientifiques

Noms wallisiens

Noms futuniens

Acalypha grandis

Kalapuhi

Kalaapusi

Alphitonia zizyphoides

Toi

Toi

Cerbera manghas

Leva

Leva

Clidemia hirta



Commersonia bartramia


Samasama

Decaspermum fructicosum

Nukanuka

Nukanuka

Geniostoma rupestre



Hibiscus tiliaceus

Fau

Fau

Homolanthus nutans

Lepo

Pata

Macaranga harveyana

Laupata

Laupata

Melastoma denticulatum

Suka

Suka

Morinda citrifolia

Nonu

Nonu

Scaevola sericea

Gahu

Gasu

1.2.4. Le toafa

Le toafa (terme qui peut se traduire par «désert») est une lande à fougères qui s'est développée sur des sols ferralitiques. Les actions anthropiques, défrichements et incendies, sont probablement à l'origine de ce stade d'évolution sur ce type de sol. La végétation est à base de fougères, principalement Dicranopteris linearis, associées avec des espèces arbustives plus ou moins abondantes selon le degré d'évolution du toafa: Decaspermum fructicosum, Melastoma denticulatum, Maoutia australis, Pandanus tectorius et Scaevola sericea.

1.2.5. Les plantations

La déforestation a été particulièrement importante sur l'île de Wallis, île basse où le relief plat ne laisse que peu de zones inexploitables pour l'agriculture. Par contre, à Futuna et plus encore à Alofi, deux îles hautes, la topographie a permis la préservation de plus grandes surfaces forestières. Les conséquences de la déforestation sont relativement graves, les ressources en eau diminuent, les sols sont moins fertiles et sont plus exposés à l'érosion. C'est pourquoi des reboisements ont été réalisés.

Pinus caribaea a été planté majoritairement sur les zones les plus érodées constituées par les landes à fougères. Les plantations ont débuté en 1974 et se poursuivent encore de nos jours à un rythme de 20 ha/an. Elles couvrent maintenant 400 hectares (avec une densité de plantation de 1 100 pieds/ha). La croissance de Pinus caribaea est bonne. Dans les plus anciennes parcelles, un sous-bois se développe, constitué d'essences locales, y compris des espèces de forêt primaire, ce qui semble traduire un effet bénéfique sur l'environnement. Une augmentation du débit des sources situées en aval des plantations a été également constatée durant la saison sèche.

Quelques petites plantations constituées d'espèces locales ont été réalisées avec Thespesia populnea, Fluegga flexuosa, Calophyllum neo-ebudicum, Calophyllum inophyllum, Cordia subcordata, Pandanus tectorius, Metroxylon vitiense et Neisosperma oppositiplia. Ces plantations ont été réalisées essentiellement sur des landes à fougères mais sans ombrage, ni travail du sol, ni engrais et entretien. Ces tentatives se sont par conséquent soldées par un échec quasi complet.

1.2.6. Les différents types de propriété

Hormis quelques parcelles concédées à l'administration et à la mission catholique, toute la terre appartient aux populations locales, c'est-à-dire les familles et les villages. Une partie des terres collectives (plus particulièrement à Wallis) a été distribuée aux différentes familles pour faire face à l'augmentation de la population et aux pressions exercées par la communauté wallisienne et futunienne résidant en Nouvelle-Calédonie (environ 15 000 personnes). Les terres collectives sont constituées de forêts et de landes à fougères. Elles sont partiellement cultivées par des familles ne disposant pas d'une surface suffisante, après accord des chefs de village. L'exploitation des terres privées est décidée par le propriétaire (le chef de famille) sous un certain contrôle des autorités coutumières qui s'assurent que les productions agricoles (tant pour l'alimentation que pour les dons et échanges de vivres à l'occasion des cérémonies coutumières) sont suffisantes. En l'absence de cadastre, il s'avère impossible de connaître les données chiffrées concernant les différents types de propriété.

1.3. LES ASPECTS JURIDIQUES ET LA PLANIFICATION

Il n'y a aucun texte réglementaire concernant la conservation des ressources forestières, les forêts et l'environnement terrestre, qui soit applicable sur le Territoire. Les textes listés ci-dessous concernent les mesures de protection sanitaire et zoosanitaire:

- L'Arrêté n° 93-275 du 22 septembre 1993, modifié par l'Arrêté n° 96-183 du 1er avril 1996, lui-même modifié par l'Arrêté n° 97-100 du 28 février 1997, réglemente les importations et exportations des végétaux ou partie de végétaux vivants ou desséchés (foins, fourrages, même en emballage ou en poudre), des produits d'origine végétale, des matières susceptibles de contenir des organismes dangereux pour les végétaux (terre, composts, fumiers, etc.), ainsi que des emballages servant ou ayant servi au transport des produits ci-dessus.

- L'Arrêté n° 95-245 du 29 mai 1995 définit les listes des végétaux ou produits d'origine végétale dont l'importation est soit interdite, soit soumise à autorisation préalable, soit n'est pas soumise à autorisation préalable.

- L'Arrêté n° 95-244 du 29 mai 1995, modifié par l'Arrêté n° 96-314 du 3 juillet 1996, modifié par l'Arrêté n° 97-100 du 28 février 1997, définit les conditions spéciales imposées aux importations de certains végétaux ou produits d'origine végétale.

- L'Arrêté n° 93-276 du 22 septembre 1993, modifié par l'Arrêté n° 95-121 du 27 mars 1995, modifié par l'Arrêté n° 95-209 du 5 mai 1995, réglemente les importations et exportations d'animaux vivants et des produits d'origine animale.

- L'Arrêté n° 93-289 du 30 septembre 1993 définit le contenu du certificat zoosanitaire devant accompagner les animaux vivants importés.

- L'Arrêté n° 93-290 du 30 septembre 1993 définit le contenu du certificat zoosanitaire et de salubrité devant accompagner les produits d'origine animale importés destinés à la consommation humaine.

- L'Arrêté n° 93-291 du 30 septembre 1993 définit le contenu du certificat sanitaire devant accompagner les produits d'origine animale importés qui ne sont destinés ni à la consommation humaine, ni à la consommation animale.

- L'Arrêté n° 93-292 du 30 septembre 1993 définit les conditions spéciales imposées aux importations de certains produits d'origine animale.

- L'Arrêté n° 93-300 du 30 septembre 1993, modifié par Arrêté n°94-154 du 19 mai 1994, définit les listes des animaux vivants dont l'importation n'est pas soumise à autorisation préalable, ou est interdite, ou est soumise à autorisation préalable.

- L'Arrêté n° 94-153 du 19 mai 1994 définit les conditions spéciales imposées aux importations de certains animaux vivants.

- L'Arrêté n° 93-297 du 30 septembre 1993 définit les listes des produits d'origine animale dont l'importation est interdite, ou n'est pas soumise à autorisation préalable, ou est soumise à autorisation préalable.

Le Territoire des îles Wallis et Futuna n'est pas signataire de la Convention sur la biodiversité et de l'engagement international sur les ressources phytogénétiques. Il ne possède pas de planification, ni de politique forestière formelle. Il n'y a pas de code d'exploitation forestière, ni de directives pour atténuer les effets des exploitations forestières. En fait, il n'y a pas à proprement parler d'exploitation forestière, tout au plus des cueillettes limitées de bois. En effet, les arbres sont principalement coupés puis brûlés lors des défrichements pour les besoins de l'agriculture.

1.4. ROLES ECONOMIQUE ET ECOLOGIQUE DES FORETS ET DES ARBRES

Il n'y a pas de filière forêt-bois formelle en place sur le Territoire. Tout comme l'agriculture, la récolte d'arbres et de produits forestiers est presque entièrement pratiquée pour l'autoconsommation: construction des habitations traditionnelles (bois pour les poteaux et charpente, feuilles pour la toiture), artisanat (bois pour la sculpture, écorces et fruits pour la fabrication de «tapa», feuilles pour la vannerie, etc.), alimentation (fruits, feuillages, bois de chauffage), agriculture (clôtures, tuteurs). Il est cependant à noter qu'un petit marché local des produits artisanaux existe (ils rentrent pour une part infime dans les exportations) ainsi que pour les feuillages des toitures traditionnelles. Hormis une production locale infime des sciages (réalisés avec des tronçonneuses, une scie mobile à Wallis), la totalité des bois sciés est importée. Le volume des sciages importés varie approximativement de 2 000 à 2 500 m3/an, essentiellement du Pinus radiata.

Le premier rôle écologique des forêts et des arbres est celui de la capitalisation des eaux de surface et souterraines. A Wallis, les réserves d'eau douce se situent dans la nappe phréatique. Suite aux reboisements en Pinus caribaea, une régulation du débit des résurgences de la nappe phréatique situées en aval des plantations a été remarquée. A Futuna, les anciens sont unanimes pour noter une baisse du débit des rivières en saison sèche consécutive aux déboisements.

Le couvert forestier et les arbres jouent également un rôle important dans la protection des sols. En effet, un sol mis à nu est livré à l'érosion lors des fortes pluies, et les horizons superficiels, contenant les éléments facilement assimilables par les plantes, sont emportés. Ce phénomène est déploré par les agriculteurs qui constatent une baisse de fertilité des sols liée à des temps de jachère de plus en plus courts qui ne permettent plus la reconstitution d'un manteau forestier.


[1] Office de la recherche scientifique et technique d'outre-mer, France , maintenant IRD, Institut de recherche pour le développement

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