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4. PROPAGATION ARTIFICIELLE DU POISSON

4.1 Nécessité du recours à la propagation artificielle

Certaines interventions, au cours de la reproduction naturelle de poissons dont l'élevage est effectif ou possible, sont de nature à aider à améliorer la survie des novelles générations. Les nombreuses techniques de propagation artificielle visent toutes à produire en abondance oeufs, juvéniles et alevins pour l'élevage ou pour le réempoissonnement des plans d'eau et rivières. La demande en produits de qualité est particulièrement forte pour les systèmes de pisciculture intensive et surintensive. La polyculture a encore multiplié les besoins en jeune frai d'espèces dont les habitudes alimentaires sont différentes.

La propagation artificielle, qui fait donc intervenir l'homme dans le processus de reproduction, a pour avantages: i) d'obtenir de meilleurs taux de fécondation et d'éclosion, ii) de protéger la ponte contre les ennemis des poissons et les conditions défavorables de l'environnement, iii) de créer des conditions meilleures de survie et de croissance.

4.2 Modes de propagation artificielle

Les pratiques de propagation artificielle varient dans le monde selon les conditions et les facilités locales. Elles vont depuis le ramassage et l'élevage d'oeufs ou de jeune frai produits naturellement, jusqu'à la ponte elle-même induite artificiellement (Fig. 9), suivie de la fécondation et de l'éclosion contrôlées, enfin de l'élevage des larves et juvéniles.

4.2.1 Collecte et élevage des oeufs fécondés, des larves et du jeune frai

La collecte des oeufs flottants, des larves et des juvéniles des poissons qui fraient dans les rivières et les zones inondées (c'est-à-dire les grandes carpes) est une pratique très ancienne en Inde et en Chine. Des filets du genre verveux sont disposés en grand nombre le long des berges en pente douce, pour récolter au passage les oeufs et larves dérivant dans le courant. Ces filets sont sous surveillance constante et les oeufs ou les larves se concentrent dans la poche qui est vidée périodiquement. Le produit de la pêche est maintenu temporairement dans de petites fosses, à eau courante ou stagnante, creusées à même le sol, ou bien dans des enclos (hapas) implantés dans le lit même de la rivière où la récolte est mise en condition avant d'être transportée ailleurs. Lorsqu'il s'agit d'oeufs, ils éclosent dans ces fosses ou dans ces hapas et on laisse les larves grandir pendant quelques jours, avant de les transférer dans des bassins d'alevinage. De même, le jeune frai récolté dans les rivières avec des filets spéciaux est également transporté dans les nurseries, où, devenu alevins, ceux-ci serviront à repeupler les étangs.

Dans ce procédé, l'intervention artificielle consiste: 1) à récolter les oeufs, larves ou juvéniles; 2) à les protéger contre leurs ennemis naturels et les facteurs défavorables du milieu; 3) à élever les larves jusqu'au stade alevin; 4) à distribuer les alevins dans différents plans d'eau à repeupler. Cette technique de collecte dans les cours d'eau peut aisément être adoptée dans toutes les parties du monde où les poissons frayant en rivière sont très abondants. Elle présente toutefois plusieurs inconvénients. La récolte n'est généralement pas “pure”, mais consiste en un mélange d'espèces dont certaines peuvent être indésirables, ou même prédatrices. Il n'est pas facile de les séparer, surtout dans leurs stades précoces. L'Inde et la Chine, cependant, ont mis au point des procédés pour mettre à part les captures à rejeter, mais qui ne sont pas entièrement satisfaisants, car il faut attendre que les larves se métamorphosent en juvéniles bien caractérisés pour pouvoir les identifier. D'autre part, la méthode exige beaucoup de main-d'oeuvre et requiert une dextérité particulière pour manutentionner les oeufs ou les larves et les transporter. Enfin, dernier inconvénient: le stock de géniteurs n'est pas connu et il n'y a guère de possibilités de l'améliorer.

Un grand nombre d'auteurs ne considèrent pas cette technique de reproduction comme artificielle, quoiqu'il soit évident que l'intervention de l'homme dans le cycle biologique du poisson soit bien artificielle.

4.2.2 Recueil, puis élevage d'oeufs fécondés

Il est possible de se procurer des oeufs fécondés, libres totalement ou presque d'oeufs d'autres espèces. Après incubation contrôlée, les larves qui en éclosent peuvent être élevées jusqu'au stade alevin dans les conditions qu'exige l'espèce en question. Le but à atteindre est de parvenir au taux optimal de survie, de croissance et de bon état physiologique. On peut se procurer les oeufs par différentes méthodes:

4.2.2.1 Récolte d'oeufs fécondés sans traitement hormonal:

  1. en recueillant les oeufs de “géniteurs nidificateurs”, au moyen de nids artificiels installés dans les emplacements de leurs frayères naturelles (par exemple, pour le sandre);

  2. en imitant les conditions de la fraie naturelle dans de petits étangs artificiels, au moyen de “nids” ou de tapis d'herbes servant de collecteurs d'oeufs aux géniteurs qui vont y frayer (notamment pour le glane ou grand silure européen, le sandre, la brème, la carpe commune, le gourami géant, etc.);

  3. en creusant des trous sur les parois des fossés où les poissons ont l'habitude de frayer (par exemple, le magure);

  4. en fournissant aux poissons des “retraites” ou “réceptacles” pour leur ponte, tels que fûts ou bidons (par exemple, pour l'ictalure tacheté);

  5. en recueillant les grappes ou les “rubans” d'oeufs, ou bien les “nids d'écume”, pendant la saison de fraie dans les emplacements naturels de ponte (perche européenne, guabina, curito, etc.).

4.2.2.2 Obtention d'oeufs fécondés par reproduction induite après traitement hormonal:

  1. en administrant la gonadotrophine humaine aux géniteurs dans de petits bacs, comme le montre la Fig. 10 (ictalure tacheté, carpes chinoises, mulets divers, etc.);

  2. en induisant, par injection d'hormones pituitaires de poisson, la reproduction (par exemple, des grandes carpes indiennes) dans de petits bacs, ou dans des hapas (boîtes rectangulaires de filet à trame très serrée) implantés dans les bassins.

Toutes ces techniques, simples et peu coûteuses, ne requièrent aucune installation ni outillage exceptionnels, tout en évitant les difficultés et risques de la fécondation artificielle. Aussi, sont-elles partout très largement utilisées pour la propagation artificielle.

4.2.3 Fécondation artificielle et élevage des produits de la ponte

Dans la fécondation artificielle, les géniteurs relèvent directement du pisciculteur, qui est donc capable d'éliminer les spécimens qui ne lui conviennent pas et de choisir le type exact de poisson pour améliorer ensuite son stock. Cette technique permet en outre à l'éleveur de produire des hybrides qui combinent les qualités souhaitables de différentes souches de la même espèce et/ou d'espèces différentes.

L'une ou l'autre des méthodes ci-après permet d'obtenir les produits sexuels mûrs qu'exige la fécondation artificielle:

  1. les poissons sont capturés dans leur frayère au cours de la fraie naturelle; puis les produits sexuels (oeufs et sperme) sont extraits manuellement (Fig. 9b). Méthode applicable aux corégonidés, au brochet et à la carpe commune), ou bien,

  2. les poissons choisis reçoivent d'abord une injection de gonadotrophine humaine, ou d'extrait pituitaire de poisson; puis, dès qu'ils sont prêts à éjaculer, on procède à l'extraction manuelle de leurs produits sexuels (Fig. 9d). C'est la méthode communément adoptée en Inde pour les carpes chinoises.

Les oeufs fécondés artificiellement sont mis à éclore, puis élevés jusqu'au stade alevin en condition contrôlée, assurant ainsi aux poissons un taux élevé de survie et de bonne croissance.

Figure 9

Figure 9 Techniques employées pour récolter des oeufs fécondés et des larves, en vue de l'incubation contrôlée des premiers et/ou l'élevage des secondes

Figure 10

Figure 10 Phases de l'ovulation induite

4.3 Technologie de la reproduction artificielle

4.3.1 Les étapes de la reproduction artificielle

La reproduction (ou propagation) artificielle des poissons se présente comme une chaîne d'activités qui offrent certains points de similarité entre les espèces, mais qui diffèrent sur d'autres. Ces activités peuvent s'énumérer comme suit:

  1. capture des reproducteurs sauvages sur leurs terrains de frayères;

  2. sélection de géniteurs à partir d'un peuplement sauvage, pour reproduction naturelle ou traitement hormonal;

  3. élevage des reproducteurs;

  4. induction de la ponte naturelle avec ou sans traitement hormonal;

  5. extraction manuelle de produits sexuels mûrs, avec ou sans traitement hormonal;

  6. fécondation artificielle;

  7. incubation et éclosion des oeufs;

  8. élevage des larves, post-larves (juvéniles) et alevins;

Comme nous l'avons déjà signalé, les activités ci-dessus ne devront pas toutes être suivies, quelle que soit l'espèce considérée: cela dépendra du stade d'intervention artificielle et des besoins spéciaux de chaque espèce.

La technologie à appliquer dépendra des facteurs suivants:

  1. habitudes de fraie du poisson;

  2. conditions locales données, ou possibles;

  3. installations, matériel et outillage disponibles;

  4. effectifs et compétence du personnel chargé de ce travail.

D'après une enquête effectuée sur la reproduction artificielle pratiquée en différentes parties du monde, on constate que, même pour des espèces identiques, il n'y a pas de technologie immuable. Dans la plupart des cas, le pisciculteur adopte la technique qui lui paraît d'application la plus facile et qui lui donne de bons résultats. Toutefois, les différentes méthodes peuvent ne pas réussir toutes au même degré.

Les paragraphes suivants fournissent des détails sur les diverses activités qu'implique la propagation artificielle.

4.3.2 Géniteurs

La maturité sexuelle et la bonne santé du poisson sont les préliminaires indispensables à toute méthode de propagation artificielle ou semi-artificielle. Les géniteurs proviendront soit du milieu naturel juste avant la saison de fraie, soit de la zone frayère, soit du stock élevé sur l'exploitation.

4.3.2.1 Capture de géniteurs sauvages pendant la fraie. Cette capture est aisée lorsqu'il s'agit de poissons se rassemblant sur des hauts-fonds de frayère aisément détectables, ou migrant en masse vers ces zones. Il est également facile de les capturer au moment où ils sont précisément en train de frayer en groupes, ou sur des hauts-fonds. Cette capture a pour objet de se procurer des produits sexuels mûrs pour les faire incuber et en élever le produit en conditions contrôlées. En général, des écloseries spéciales sont construites à cet effet (pour les corégonidés, la carpe commune, le brochet, etc.). C'est une technique très ancienne que l'on pratique surtout en Europe pour se procurer de jeunes poissons qui serviront au réempoissonnement. Les poissons que nous venons de citer, ainsi que la brème, sont reproduits par cette méthode. Comme engins utilisés pour la capture, on se sert de nasses et de verveux à ailes pour le brochet, de filets maillants pour les corégones, de simples sennes pour la carpe commune et la brème, d'éperviers pour la carpe commune et le brochet.

Chez les poissons pris selon cette méthode, l'extraction manuelle des oeufs et de la laitance est facile, puisqu'ils sont déjà mûrs et prêts à éjaculer. Si certains d'entre eux ne sont pas tout à fait mûrs, il faut les maintenir en captivité pendant un couple d'heures avant que la femelle puisse ovuler. Pendant tout le cours de ces opérations, les géniteurs doivent être manutentionnés avec soin. Cette méthode oblige nécessairement à constituer et à maintenir en étangs, ou en bassins, un stock de géniteurs.

4.3.2.2 Capture de géniteurs dans leur habitat naturel. L'alternative consiste à capturer les poissons adultes à l'époque de leur fraie naturelle, ou de leur migration vers leurs frayères. Cette méthode produira vraisemblablement un bon nombre de géniteurs mûrs, mais ces poissons matures sont très vulnérables aux blessures au moment de leur capture dans les filets ou pendant le transport. De plus, les géniteurs sauvages ne s'accommodent pas facilement de la captivité: ils deviennent nerveux, sautent comme des fous et peuvent refuser de s'alimenter. En général, ils sont bien plus mal commodes à manipuler que les spécimens domestiqués. Il est également difficile de réunir des effectifs suffisants de la taille et de l'âge requis.

Il est nécessaire d'utiliser des tranquillisants pour la manutention et le transport de ces poissons sauvages, surtout lorsqu'ils sont de bonne taille, car la moindre blessure qui leur serait faite pourrait mettre en danger le succès de toute l'opération. Un autre risque est dû à l'introduction des plus probables des parasites dans l'écloserie. Toutefois, cette méthode a pour avantage certain de ne pas obliger le pisciculteur à constituer et entretenir sur son exploitation un stock de géniteurs. Nonobstant, la plupart des écloseries commerciales entretiennent en général leur propre fonds de géniteurs.

4.3.2.3 Elevage du stock de géniteurs sur l'exploitation. En dépit des nombreuses difficultés inhérentes à la méthode, celle-ci est largement pratiquée dans le monde entier, car elle permet de constituer et de sélectionner des géniteurs en bon état pour améliorer les peuplements. Toutefois, il est indispensable de maintenir de bonnes conditions d'environnement et une alimentation adéquate.

Heureusement, presque toutes les espèces cultivables atteignent en eaux fermées leur complète maturité sexuelle, ou au moins la maturation de leurs gonades jusqu'à la phase dormante. Les poissons qui fraient en eau courante ou dans les zones inondées représentent à cet égard des cas difficiles, mais presque tous ont pu être reproduits par les techniques de propagation artificielle (par exemple, les grandes carpes chinoises et indiennes, les espèces des bassins de l'Orénoque et de l'Amazone).

Dans les étangs de reproduction, il faut que les divers facteurs tels que la température, la lumière, la teneur de l'eau en oxygène, la densité de peuplement, la transquillité environnante, la dimension et la profondeur de l'étang et la nourriture se rapprochent le plus possible des conditions d'habitat naturel de l'espèce concernée. Autrement dit, la connaissance approfondie de ces facteurs est impérative pour réussir l'élevage des géniteurs (Fig. 11).

Température: même si beaucoup de poissons supportent des températures extrêmes, il est à conseiller d'élever le stock de géniteurs dans un bassin où de telles fluctuations ne se produisent pas. Comme l'ont montré les recherches, le développement normal des gonades exige une certaine somme de températures, que l'on exprime en degrés-jours. En zone tempérée, le développement gonadal de poissons tels que la carpe commune, les carpes chinoises, le poisson-chat, la tanche, etc., peut être accéléré en réchauffant le milieu, grâce à quoi l'époque de la fraie peut être avancée d'un mois. En mars, alors que la température atmosphérique n'est que de 4 à 8°C, la carpe commune peut être amenée à ovuler par hypophysation après réchauffement de son environnement pendant deux semaines. Si on la maintient à 25°C, la carpe commune peut se reproduire trois fois par an, alors qu'au contraire, la maturation gonadale de cette espèce peut être sensiblement retardée en la soumettant à de basses températures. Par conséquent, le pisciculteur a là un instrument commode, soit pour avancer, soit pour retarder la reproduction d'un poisson (Fig. 12).

Lumière: le besoin d'éclairage varie selon les espèces. Chez les salmonidés, le développement gonadal est photopériodique, tandis que, chez les poissons des eaux chaudes, il est contrarié si les conditions d'éclairage s'écartent de la normale. Beaucoup de poissons, les poissons-chats notamment, souffrent dans un milieu très éclairé. Plusieurs espèces, spécialement celles qui fraient en rivière, préfèrent les eaux troubles: elles s'agitent lorsque leur environnement est très lumineux et transparent, ce qui exerce un effet négatif sur leur développement gonadal. Même les reproducteurs qui ont subi un traitement hormonal évitent la lumière vive et recherchent un abri obscur.

Oxygène: des fluctuations fréquentes et un niveau bas de la teneur en oxygène de l'eau des bassins ont tendance à inhiber le développement gonadal. Pour maintenir celui-ci en bonne condition, l'eau du bassin de reproduction doit, pendant toute la période d'élevage, se maintenir à un taux optimal d'oxygénation. Il importe donc d'alimenter le bassin en eau fraîche et bien aérée.

Densité de peuplement: bien que la plupart des poissons cultivés soient capables de supporter une grosse affluence dans un bassin, les effets de telles conditions d'entassement sur le développement gonadal sont souvent très nuisibles. L'expérience a prouvé que 20 à 50 reproducteurs mûrs (pesant de 150 à 250 kg) peuvent être élevés dans un bassin de 1 000 m2. Le nombre de reproducteurs peut encore être augmenté avec des espèces d'habitudes alimentaires différentes, comme cela se pratique en polyculture indienne et chinoise. Le tableau 2 montre des exemples de charge biotique avec diverses combinaisons d'espèces de carpes chinoises comme reproducteurs:

Tableau 2
Combinaisons d'élevage de reproducteurs appartenant à plusieurs espèces de carpes chinoises

 Nombre de poissons à l'hectarePoids moyen individuel (en kg)
1. Carpe chinoise comme espèce principale
Carpe chinoise150–200  8–12
Carpe argentée60–902    
Carpe de vase   600–1 0000,02–0,05
2. Grosse tête comme espèce principale
Grosse tête  80–100 7–12
Carpe chinoise100–1205    
Carpe argentée30–502    
Carpe commune300–5000,25
3. Carpe argentée comme espèce principale
Carpe argentée150–2503–6 
Carpe chinoise100–1302    
Carpe de vase500–6000,02–0,05
4. Carpe de vase comme espèce principale
Carpe de vase1 600–2 3000,8–1,5
Carpe grosse tête30–505–6
Carpe argentée  60–1002–3

D'une manière générale, il n'est pas à conseiller de réunir dans le même étang, ou bassin, des poissons qu'on destine à la reproduction et d'autres à la vente, surtout si ces derniers reçoivent un régime alimentaire mal équilibré. Les jeunes candidats à la reproduction, par contre, peuvent être élevés en nombre limité avec des géniteurs matures.

Tranquillité: des perturbations fréquentes, croit-on, influent sur le développement gonadal normal. Toutefois, la pratique chinoise, qui consiste à capturer au filet les poissons une ou deux fois avant l'injection hormonale et à les tenir serrés les uns contre les autres, soit bloqués dans un coin de l'étang, soit suspendus dans des sennes, permet d'acclimater les reproducteurs à la manutention et au transport, réduit leur mortalité après la fraie et augmente le taux d'ovulation.

Dimension et profondeur du bassin: pour les plus gros reproducteurs (2 à 10 kg et au-dessus), le bassin (ou étang) d'élevage devrait avoir de 2 000 à 4 000 m2, moins si les poissons sont plus petits. La profondeur de ces plans d'eau varie en général de 1 à 2 m.

Alimentation: une alimentation suffisante et appropriée est de la plus grande importance pour les géniteurs. Si la femelle est affamée la vitellogenèse au cours du développement de ses ovules s'en ressentira. Si son alimentation est déficiente en éléments nutritifs essentiels, particulièrement en acides aminés, en vitamines et en substances minérales, le développement des ovules est contrarié et l'ovulation, finalement, avortera. Tandis que des géniteurs élevés avec une nourriture naturelle abondante, ou bien avec un régime artificiel riche en protéines, donneront des résultats satisfaisants. Il vaut donc mieux élever un petit nombre de reproducteurs avec un régime (ou une nourriture naturelle) qualitativement et quantitativement satisfaisant, que de garder un énorme stock en condition de demi-inanition. L'alimentation naturelle des poissons diffère d'une espèce à l'autre: il importe donc de connaître les modes et habitudes alimentaires des poissons que l'on cultive.

4.3.2.4 Age et poids des géniteurs. Ce sont des géniteurs “vierges”, qui se reproduisent pour la première fois, que l'on utilise généralement pour la propagation artificielle. Les gros poissons produisent davantage d'oeufs, mais la manipulation de “géants” pesant plus de 10 à 15 kg est difficile et fatigante. Pour la carpe commune, les carpes indiennes et chinoises, la taille qui convient le mieux est celle des spécimens pesant de 3 à 5 kg. Plus gros, ils conviendront s'ils se reproduisent spontanément sans qu'il soit besoin de les manipuler pour extraire leur laitance ou leurs oeufs. Quant aux très gros, ils se prêtent moins bien au traitement hormonal en raison des fortes doses qu'il faut leur injecter et des difficultés de leur manutention.

La fécondité des poissons de taille moyenne (2 à 6 kg) est généralement plus élevée que celle des géants. Les spécimens de 0,5 kg à 2 kg sont d'un maniement très commode pour les injections d'hormones et l'extraction manuelle des oeufs et laitances.

Avant de lâcher les géniteurs dans des bassins spéciaux de reproduction pour la fraie spontanée, ou avant de les préparer pour la reproduction induite, l'éleveur doit s'assurer qu'ils sont bien dans la condition voulue: si leurs gonades ne sont pas parvenues au stade dormant (ou de repos), les femelles ne répondront à aucune technique de reproduction. Il est donc très important, pour réussir la propagation artificielle, de trier au préalable les géniteurs.

4.3.2.5 Sélection des géniteurs pour la reproduction spontanée ou pour le traitement hormonal. Les signes incontestables de la maturité des géniteurs sont à peu près les mêmes dans toutes les espèces, à savoir (Fig. 13):

Femelles:

Mâles

Beaucoup d'espèces, comme la tanche, présentent un dimorphisme sexuel caractéristique. Chez certains poissons, comme la carpe chinoise, l'ictalure tacheté, etc., il faut examiner les femelles avant de les nourrir, pour s'assurer que leur embonpoint correspond bien au développement de leur ovaire et non à leur boulimie.

Quelques-uns des symptômes ci-dessus peuvent être absents chez certaines espèces, tandis qu'il peut s'en ajouter chez d'autres. Chez la femelle du cachama (Colossoma oculus), l'abdomen s'arrondit et devient mou très peu de temps seulement avant la ponte. Ce durcissement du ventre est une sorte d'adaptation de l'espèce pour co-exister avec les piranhas (caribe).

Si les deux sexes se trouvent réunis dans le même étang ou bassin, dès que les mâles manifestent qu'ils sont prêts à frayer, les femelles se mettent aussitôt en condition. Comme les poissons de rivière ne se reproduisent pas en eaux fermées, il n'est pas nécessaire de séparer les sexes. En revanche, la ségrégation est indispensable chez les espèces d'étang, car, sinon, il n'y aurait aucun contrôle de la reproduction (par exemple, pour la carpe commune), ou bien on provoquerait sans nécessité des batailles de mâles (chez les poisson-schats, notamment).

Les éleveurs devront observer soigneusement les modifications anatomiques et de comportement chez leurs reproducteurs, au cours de leur maturité, pour s'assurer de la réussite des opérations ultérieures.

4.3.3 Ovulation et/ou reproduction induites

Sur son terrain de frayère naturel un géniteur mature prêt à la fraie peut développer des produits sexuels mûrs en très peu de temps s'il trouve les conditions de milieu convenables. Autrement, la reproduction devra être induite.

Fondamentalement, il existe deux moyens, en conditions artificielles, d'induire l'ovulation (dernière phase de la maturation des ovules) et la reproduction (expulsion des oeufs en présence du mâle):

  1. simulation des facteurs de milieu, aptes à déclencher chez le poisson lui-même la secrétion des hormones qui commanderont la maturation finale des gonades;

  2. injection d'hormones gonadotrophiques, provoquant cette dernière phase du cycle de développement des gonades.

On adopte parfois une combinaison des deux méthodes, par exemple dans les techniques chinoises de propagation artificielle.

4.3.3.1 Fraie induite sans traitement hormonal. On peut stimuler certains poissons d'étang à frayer en leur fournissant:

Plusieurs de ces méthodes peuvent aussi être combinées pour obtenir de meilleurs résultats.

Reproduction induite grâce à des nids artificiels: c'est la méthode communément pratiquée pour les poissons nidificateurs, tels que le sandre, le grand silure européen, etc. (Fig. 14 et 15).

Le nid utilisé pour le sandre consiste en liasses sèches de racines buissonnantes de saule, de graminées, etc., ou bien des mêmes matériaux attachés à des cadres. On utilise également aujourd'hui des filets usagés, tendus entre deux pieux, et du gazon artificiel posé sur un cadre. Ces collecteurs sont disposés sur le terrain naturel de frayère peu de temps avant la saison de fraie et on contrôle tous les deux ou trois jours les signes éventuels de ponte. Les collecteurs sur lesquels adhèrent les oeufs sont relevés et transportés à l'écloserie.

Dans les exploitations piscicoles, on met en place les cadres d'herbes (0,50 m × 0,50 m) au fond d'un bassin à fond damé et de 500 à 2 000 m2 de superficie, à raison d'un cadre par 8 à 10 m2. On introduit dans l'eau (à 10°C environ) le nombre de sandres mâles et femelles correspondant au nombre de “nids”, que l'on vérifie tous les deux ou trois jours et dont on sort, pour l'incubation contrôlée, ceux où adhèrent des grappes d'oeufs. Les oeufs du sandre étant à double enveloppe peuvent être transportés facilement en caissons ou en paniers, en prenant soin de les tenir constamment humides.

Pour le grand silure européen (glane), on utilise des collecteurs en forme de tente, faits de buissons de racines sèches de saule, ou de branches de thuya ou de pin. Dans un étang de 1 000 à 2 000 m2 de superficie, on place 3 ou 4 de ces collecteurs, avec le nombre adéquat de paires de géniteurs. La fraie est facile à repérer, en raison des mouvements très violents des glanes. On retire ensuite les collecteurs avec leurs oeufs pour les faire incuber sous contrôle.

Quant aux gouramis (comme le gourami géant), le simple fait de fournir des matériaux appropriés les stimule à fabriquer leurs nids, puis à frayer.

Reproduction induite grâce aux kakabans: les kakabans sont des sortes de nattes de quelques mètres carrés de superficie, faites d'herbes sèches, de branches de pin ou de matériau analogue liés à un cadre. On les dispose soit au fond de l'étang où on les fixe avec des piquets, soit à 20 ou 30 cm au-dessous de la surface (Fig. 16). La carpe commune, en zones tropicale et subtropicale, se reproduit volontiers sur les kakabans, où elle disperse ses oeufs qui se collent au tapis végétal. Dans les étangs à fond vaseux, elle ne se reproduit pas, sauf si on lui fournit des kakabans. Une fois la fraie terminée, on relève les kakabans couverts d'oeufs et on les transfère dans les étangs d'alevinage, où les oeufs éclosent et où les carpettes grandissent sans risquer d'être infectées par leurs parents.

Cette technique de reproduction peut être appliquée aisément fût-ce dans des conditions primitives. Les kakabans couverts d'oeufs peuvent être commodément transportés en recouvrant les oeufs d'un linge ou d'herbe humides. La même méthode peut être adoptée pour toutes les espèces ayant des habitudes de fraie analogues à celles de la carpe commune.

Reproduction induite à l'aide de réceptacles pour la ponte: certains poissons, comme l'ictalure tacheté, recherchent pour frayer un endroit où se cacher. De plus, ils montent la garde au-dessus de leurs oeufs qu'ils oxygènent. Habituellement, on se sert de bidons de lait ou de fûts d'huile de 45 litres comme réceptacles, que l'on immerge dans les étangs ou dans une partie isolée de ceux-ci. Dès leur introduction dans l'étang les géniteurs matures fraient dans ces récipients, d'où les oeufs sont enlevés et mis en incubation contrôlée. Les autres espèces de poissons-chats qui fraient en étang peuvent aussi être induites à se reproduire à l'aide de réceptacles à ponte (Fig. 17).

On utilise également des tuyaux de terre cuite, de plastique ou de ciment armé suffisamment larges (20 à 25 cm de diamètre) pour stimuler la reproduction d'espèces comme Plecostomus plecostomus au Venezuela et Clarias batrachus en Extrême-Orient.

Toutes ces méthodes sont basées sur le “stimulus du nid” ou “du réceptacle”, qui induit les géniteurs à frayer, moyennant la condition absolue d'opérer pendant la saison de fraie naturelle et alors que mâles et femelles sont matures. Il est toujours recommandé d'introduire un ou deux mâles de moins que les femelles, puisque les mâles sont connus pour se battre les uns les autres lorsqu'ils sont plus nombreux que les femelles.

Reproduction induite par simulation des conditions naturelles du milieu: c'est sur cette technique qu'est basée la reproduction contrôlée de la carpe commune, connue aussi sous le nom de méthode de Dubisch, lequel a donné son nom aux étangs utilisés à cet effet (Fig. 18).

Les conditions indispensables à réunir pour la reproduction de la carpe commune sont les suivantes:

Des étangs (ou bassins) ayant les caractéristiques ci-dessus et mesurant de 100 à 1 000 m2 peuvent être facilement préparés. Un champ de riz peut aussi être converti à cet effet. Mais il sera toujours essentiel de disposer d'une source stable d'eau propre filtrée.

Un bassin de reproduction de ce type se construit de la manière suivante. On creuse une fosse de 2 à 3 m de large, profonde de 0,60 m à 0,80 m, adjacente à la digue ou à la berge principale, qui servira de refuge aux géniteurs; puis on place à son extrémité un dispositif d'évacuation, les autres parties du bassin ayant reçu une légère pente vers la fosse et été plantées d'herbes courtes. Après mise en eau complète, le fond herbeux sera recouvert de 30 à 50 cm d'eau (Fig. 18).

Lorsque la température de l'eau et les conditions atmosphériques s'y prêtent, on introduit un ou deux groupes de géniteurs composés chacun de deux femelles et de trois mâles. On les y laisse pendant quelques jours, en maintenant constamment un léger courant d'eau dans le bassin dont on règle l'évacuation par le dispositif précité. On ferme alors la vidange, de manière à faire monter lentement le niveau de l'eau et inonder graduellement toute la zone d'herbes. Cette opération déclenche aussitôt la pariade. Un jour après la fraie, les poissons sont épuisés et retirés avec soin du bassin, afin d'éviter que les parents ne mangent leur progéniture ou ne la contaminent de leurs parasites.

Cette technique est également utilisée avec succès pour la reproduction d'autres espèces, comme le brochet, la tanche, le cyprin carassin, le poisson-buffle, les Puntius spp., etc. La méthode devrait pouvoir être adoptée pour la reproduction induite de n'importe quel poisson frayant en étang et que l'on désire sélectionner pour l'élevage.

4.3.3.2 Ovulation et reproduction induites. Provoquée par l'hypophysation, cette induction équivaut à un “raccourci” du phénomène naturel. Dans la nature, l'ovulation est réglée et déterminée chez le poisson par ses propres hormones gonadotrophiques, secrétées et accumulées dans sa glande pituitaire (ou hypophyse), que celle-ci décharge dans le circuit sanguin quand toutes les conditions requises sont réunies. Tandis que, dans l'hypophysation, l'hormone est extraite de la pituitaire d'un autre poisson (donneur) et injectée dans le géniteur pour provoquer son ovulation.

Considérations générales - L'hypophysation représente aujourd'hui la technique la plus courante utilisée pour la propagation artificielle des poissons. Elle est employée non seulement dans la reproduction expérimentale, mais pour la production commerciale de millions de jeunes poissons.

Comme toute technique, celle-ci a ses limites. Certains poissons sensibles comme le sandre ne supportent pas le traitement, tandis que d'autres peuvent n'ovuler qu'irrégulièrement. De nouveau ici, les femelles dont l'ovaire n'a pas atteint encore le stade de maturité exact ne répondront pas à l'hypophysation. La règle est imprescriptible: l'hypophysation ne remplit son office que lorsque les ovules ont atteint dans l'ovaire la phase dormante, ou de repos, au terme du cycle de la vitellogenèse. Alors et alors seulement les ovules sont physiquement prêts à se développer sous la décharge de la ou des gonadotrophines.

On utilise pour l'hypophysation les glandes pituitaires, fraîches ou conservées, de poissons donneurs. Ces glandes doivent contenir une quantité suffisante d'hormones accumulées pour déclencher la fraie.

La glande pituitaire ou hypophyse, on le sait, agit comme relais entre le cerveau et les gonades. Ses cellules secrètent et emmagasinent des hormones gonadotropes, qu'elles ne relâchent que lorsque la glande en reçoit l'ordre. La teneur de la glande en hormones varie selon la saison et aussi selon les stades du cycle biologique du poisson. Les poissons immatures ne détiennent qu'une faible quantité de gonadotrophines dans leur pituitaire, de même que, après la fraie naturelle, la glande du poisson épuisé est totalement vidée d'hormones. En revanche, la teneur gonadotrophique est au maximum dans la pituitaire des poissons sexuellement matures, quand leurs gonades sont parvenues, ou sont sur le point de parvenir, à la phase dormante et durant toute cette période de repos. La migration de reproduction étant également déclenchée par la gonadotrophine, la pituitaire des poissons migrateurs n'a donc en temps normal qu'une teneur faible. Compte tenu de ces variations dans la teneur gonadotrophine, il importe de choisir le bon moment pour recueillir la glande pituitaire chez les différentes espèces de poissons.

Dosage. Au cours de l'ovulation naturelle, le poisson est capable de régler avec précision la dose de ses hormones. Cela se passe donc sans gaspillage alors qu'il y en a généralement beaucoup dans l'hypophysation où l'on injecte une hormone provenant d'une source extérieure: ceci, essentiellement parce qu'il est difficile de déterminer la dose exacte et que l'on en administre généralement davantage qu'il ne serait nécessaire.

L'ovulation est un processus complexe qui dure plusieurs heures, sa durée exacte dépendant de la température. On peut y distinguer deux phases: la préovulation et l'ovulation proprement dite. Dans la première phase, le noyau a terminé son déplacement à l'intérieur du cytoplasme et l'ovule s'hydrate considérablement, atteignant presque le volume qu'il aura lors de l'ovulation. Si l'hypophysation échoue, l'ovule arrête son développement à cette phase, ce qui peut facilement provoquer la mort de la femelle par nécrose des ovules et infection interne.

Le dosage hormonal requis peut varier beaucoup d'un specimen à l'autre de la même espèce, comme d'une technique à une autre: c'est selon que la femelle est plus ou moins “prête”, ce qui dépend de son âge, de sa taille, de sa sensibilité et de bien d'autres facteurs. Dans les régions tropicales et subtropicales où le métabolisme du poisson est activé par la température et où il est donc probable que l'on gaspillera davantage d'hormones qu'en zone tempérée, on administre en général deux doses ou davantage, mais plutôt deux seulement: la dose préparatoire et la dose finale ou décisive.

La dose unique et intégrale (à 100 pour cent) se pratique quand le géniteur est depuis longtemps en phase de repos. La dose préparatoire est d'environ 10 pour cent de la dose totale et, si l'on doit en administrer une seconde, sa teneur sera de nouveau le dixième de la dose totale. Pour cette dernière, on compte en général 2,5 à 3 mg (une glande) d'extrait pituitaire par kg de poids corporel pour les gros géniteurs pesant plus de 5 kg; 1,5 mg (une demi-glande) pour les poissons de taille moyenne (de 2 à 5 kg) et 0,75 mg (un quart de glande) pour les petits (de 0,5 à 2 kg). Il est recommandé d'éviter de dépasser la dose dans les injections préparatoires, ce qui pourrait provoquer l'ovulation partielle et donc perturber la programmation normale. Entre la dose préparatoire et la dose finale, il faut laisser passer au minimum 14 heures et au maximum 24 heures: très rarement, l'interruption pourra être prolongée à 48 heures. Lorsque l'on doit avoir recours à plus d'une dose préparatoire, il faut espacer les deux injections d'un intervalle de 24 heures.

En règle générale, on n'administre qu'une seule dose aux mâles, d'habitude au moment où les femelles reçoivent la dose finale. Il importe de ne pas traiter plus tôt les mâles, ce qui pourrait avoir pour résultat de les faire éjaculer avant que les femelles soient prêtes à ovuler.

Le dosage de l'hormone gonadotrope s'exprime soit en milligrammes, soit en nombre de glandes hypophyses séchées à l'acétone. Chez une carpe commune de 1,5 à 2 kg, la glande pituitaire séchée à l'acétone pèse de 2,5 à 3 mg. C'est cette valeur d'hypophyse qui est prise comme unité de mesure, quand le dosage est exprimé en nombre de glandes.

L'“unité-glande” est d'un emploi facile, la dose se préparant avec des glandes d'approximativement la même taille. L'autre méthode, c'est-à-dire le calcul de la dose au poids, est plus difficile, mais certainement plus précise.

Un léger excès d'hormone dans la seconde dose finale ne fait pas de mal au poisson: on considère qu'une dose excédentaire de 10 à 15 pour cent est sans risque. Pour la dose totale, c'est-à-dire à 100 pour cent, on administre généralement une glande à une glande et demi (soit 3,0 à 4,5 mg) d'hypophyse par kg de poids de la femelle. Si la dose calculée exige plus de cinq glandes, on en ajoute habituellement une de plus “pour le mortier”.

Si la glande pituitaire n'est disponible que déjà réduite en poudre, il faut avoir une bonne balance de précision, ou une cuiller de volume connu, pour mesurer la dose exacte. L'extrait pituitaire séché sous forme pulvérisée peut être facilement falsifié avec du tissu cérébral, aussi est-il conseillé au pisciculteur de ne se procurer son hypophyse qu'à des sources de confiance.

La dose unique et décisive recommandée pour les mâles est d'une demi-glande (1,0–1,5 mg) par kg de poids corporel, sans tenir compte de la longueur du poisson. Toutefois, il n'est pas nécessaire d'administrer l'hormone aux mâles dont la laitance suinte déjà.

Il est toujours préférable d'être assez libéral dans le calcul de la dose décisive. Aussi conseille-t-on aux pisciculteurs d'augmenter la dose requise de 10 à 15 pour cent. Dans la pratique, un bon principe à suivre consiste à ne pas administrer trop d'hormones dans la dose préparatoire et trop peu dans la dose décisive. Si cette dernière est administrée en deux ou trois fractions, il ne faut pas espacer les injections de plus de 6 à 8 heures.

Administration des hormones. Il y a plusieurs façons de procéder. Chaque méthode peut trouver sa justification, mais ne pas être universellement applicable. Cela dépendra généralement de l'espèce, des conditions locales, des méthodes de travail adoptées par les spécialistes et les techniciens du lieu; mais aucune ne peut être revendiquée comme la seule technique définitive. En règle générale, les femelles ont habituellement besoin de doses d'hormones plus élevées que les mâles, plusieurs doses fractionnées produisant de meilleurs résultats qu'une seule importante.

Nous décrivons ci-après ces différentes méthodes:

Méthode de l'injection unique: la dose calculée à 100 pour cent, (ou dose “assommoir”) est donnée en une seule injection. Elle ne réussira que si la femelle est totalement prête à frayer, comme celles qui se trouvent en train de migrer ou qui sont capturées sur leur terrain de frayère. Des poissons convenablement nourris sont dans cette condition à la deuxième moitié de leur saison de fraie.

Dans la majorité des espèces, les mâles sont mieux préparés à la fraie que les femelles: par conséquent, une dose unique suffit. Si la dose administrée est excessive, ou si elle n'est pas synchronisée avec la maturation ovarienne des femelles, il pourra arriver que les mâles déchargent leur sperme avant que les femelles soient prêtes.

Méthode des doses préparatoire et décisive: la dose préparatoire, qui est d'environ 10 pour cent de la dose décisive, avance le développement gonadal au stade de préovulation. On la donne généralement 18 à 24 heures avant la dose décisive (100 pour cent de la dose calculée). Cette séquence réussit habituellement bien dans les régions tempérées et subtropicales. Elle est également bonne avec les poissons nerveux et de manutention difficile.

L'intervalle entre les deux doses peut parfois être abrégé. Environ 14 à 18 heures suffisent dans la dernière moitié de la saison de fraie, où la température de l'eau est supérieure à celle de l'époque normale de reproduction. Si les femelles pèsent moins d'un kg et sont en condition de maturité pour le traitement hormonal, un intervalle de 6 heures seulement est suffisant.

a) Une dose préparatoire et deux décisives

Sous les tropiques, où le métabolisme des poissons est plus rapide, la dose décisive est donnée en deux fractions égales, ou bien en deux fractions de 40 et 60 pour cent, à intervalle de 6 à 8 heures. Une dose préparatoire de 5 à 10 pour cent devrait précéder la première dose décisive de 18 à 24 heures.

b) Plusieurs doses préparatoires et deux décisives

Dans certains cas où les ovules sont déjà au stade dormant, mais où l'ovaire doit encore descendre dans la partie inférieure de la cavité abdominale, une série de doses préparatoires sont nécessaires pour que la dose finale soit décisive. Par exemple, la femelle du cachama de l'Orénoque (Colossoma oculus) requiert cinq injections préparatoires (P1-1-5) à intervalles de 24 heures entre deux injections avant qu'elle soit prête pour la dose decisive (D1-2), qui est donnée en deux fractions de 40 et 60 pour cent à intervalle de 6 heures.

Dans ce cas, la séquence se présente comme suit:

Méthode des doses fractionnées: les injections sont alors réparties en plusieurs doses, à intervalles très courts, d'environ 6 à 8 heures.

Les séquences et dosages peuvent varier comme suit:

  1. 50 et 50 pour cent, à intervalles de 6 à 8 heures
  2. 40 et 60 pour cent, à intervalles de 6 à 8 heures
  3. 10, 30 et 60 pour cent, chacune à intervalles de 6 heures
  4. 33 ⅓, 33 ⅓ et 33 ⅓ pour cent, chacune à intervalles de 6 heures
  5. 20, 30 et 50 pour cent, chacune à intervalles de 6 heures

Ces séquences se sont avérées satisfaisantes pour les poissons tropicaux et pour ceux se reproduisant en eaux fermées.

On a constaté qu'il faut administrer davantage d'hormones quand l'ovaire est volumineux, particularité qui peut s'exprimer par la circonférence maximum de l'abdomen. Le dosage est alors réglé comme suit:

Circonférence maximum du corps, en cm38404244464850525456586062
Dosage d'extrait hypophysaire sec en mg/kg du poids corporel3,03,33,53,84,04,34,54,85,05,35,55,86,0

Cette relation est applicable aux grandes carpes chinoises, mais elle reste à être expérimentée chez les autres poissons.

Solvant. Le solvant utilisé pour l'hormone gonadotrope est une solution de NaCl à 0,6–0,7 pour cent (autrement dit, de sel ordinaire). Pour l'injection préparatoire, on emploie 1 ml de la solution, quel que soit le dosage (de 0,25 à 1 glande). Pour la dose décisive, la quantité de solution est calculée au taux de 0,5 ml pour chaque glande (2,5 à 3,0 mg), mais ne doit pas dépasser au maximum 5 ml.

La quantité de solvant utilisée n'a pas grande importance, sauf s'il y en a trop ou trop peu. Dans ce dernier cas, la perte d'une goutte de solution signifiera celle d'une quantité considérable d'hormones; dans le premier cas, un grand volume de solution posera un problème difficile. Aussi, recommande-t-on en général d'administrer 1 à 5 ml de solvant.

Préparation de la solution d'extrait pituitaire. La dose est déterminée d'après le poids, le nombre et le sexe des géniteurs; après quoi on compte ou l'on pèse le nombre de glandes pituitaires ou la quantité d'extrait. Si les glandes ne sont pas déjà réduites en poudre, on procède à cette opération dans un petit mortier de porcelaine ou dans un homogénéisateur. Il faut que le mortier soit parfaitement sec, sinon les glandes formeraient une pâte sous le pilon et ne se dissoudraient pas facilement. On ajoute alors immédiatement une quantité déterminée de solvant, qui est mesurée en général dans une seringue graduée. Il faut s'assurer que la poudre de pituitaire et le solvant soient bien mélangés, puis compter environ 10 à 30 minutes pour la dissolution de l'hormone. Le tissu résiduel peut être éliminé par centrifugation, ou bien simplement en le laissant déposer au fond et en aspirant la solution claire avec une seringue (Fig. 19).

Le solvant aura été préparé auparavant, en dissolvant 7 g de sel ordinaire propre, épuré d'iode, dans un litre d'eau potable bouillie et refroidie. Il n'est pas nécessaire d'employer de l'eau distillée. Le solvant peut être conservé longtemps en bouteilles scellées.

Lorsque l'on a un certain nombre de géniteurs à injecter, il est bon de les marquer individuellement avec des fils de différentes couleurs que l'on attache avec des noeuds lâches aux rayons de la nageoire dorsale, immédiatement après les avoir pesés. Cela facilitera l'identification des géniteurs et l'administration des doses correctes.

Partie du corps où doit se faire l'injection. La procédure la plus couramment adoptée consiste à pratiquer l'injection dans le muscle dorsal, au-dessus de la ligne latérale et au-dessous de la partie antérieure de la nageoire dorsale (Fig. 20). En Inde, l'injection se fait en général dans la partie dorsale du pédoncule caudal, système qui semble le meilleur pour les poissons sensibles.

Pour certains poissons, comme la tanche, l'injection est faite dans la cavité abdominale. Cela donne souvent de mauvais résultats. Parfois, on laisse le poisson dans l'eau pour lui administrer l'injection. Si, au contraire, on le retire de l'eau, il est recommandé de le placer sur une petite table recouverte d'un coussin ou d'une feuille de mousse de plastique, qui évite de blesser le poisson. Le géniteur devient plus calme en lui recouvrant la tête d'une pièce de tissu. Il est également recommandé de ne jamais le toucher les mains nues, mais de le saisir dans une serviette.

Avec les poissons à écailles, il faut prendre la précaution de ne pas les piquer à travers celles-ci, mais derrière une écaille dans le muscle sous-jacent.

L'administration d'extrait pituitaire ne provoque pas d'elle-même l'ovulation complète. Tout un ensemble de facteurs de milieu, tels que la température adéquate, la saturation de l'eau en oxygène, le calme de l'environnement, jouent sans doute un rôle décisif (Fig. 21). La température, notamment, a une importance déterminante. Si elle est trop basse, l'ovulation prendra très longtemps ou, dans la majorité des cas, avortera. Une température élevée non seulement provoque une forte demande d'oxygène et accélère le métabolisme, mais a aussi son effet inhibitoire. Un poisson traité à l'extrait pituitaire a besoin d'environ 50 pour cent de plus d'oxygène qu'avant l'injection. L'excitation causée par les manipulations et le traitement provoque également une consommation plus forte d'oxygène. C'est pourquoi il est essentiel de tenir les géniteurs traités dans un environnement bien aéré, ou dans une eau courante propre et riche en oxygène. Enfin, ne pas oublier que ces poissons ont besoin d'être tenus au calme: s'ils sont dérangés, ils deviennent agités, nagent à toute allure et sautent même par-dessus la paroi du bac, s'exposant à se blesser. On assurera leur tranquillité en laissant flotter des objects sombres dans le bac où l'on tient les géniteurs traites.

4.3.3.3 Induction de l'ovulation et/ou de la ponte au moyen de gonadotrophine chorionique humaine. La phase de préovulation peut s'obtenir facilement par administration de l'HCG (Human chorionic gonadotrophin, selon la terminologie anglaise adoptée en endocrinologie). Mais l'ovulation complète est de réalisation difficile avec cette méthode chez la plupart des poissons, même si certains réagissent parfaitement. En premier lieu, ce sont seulement les sujets bien préparés et mûrs pour le traitement hormonal qui répondent correctement aux injections d'HCG: par exemple, ceux capturés pendant leur migration pour la fraie. Les espèces carnivores peuvent également répondre mieux que les herbivores. Quant aux géniteurs d'élevage, ceux qui ont une alimentation naturelle abondante réagissent mieux à l'HCG que les sujets nourris artificiellement. Plusieurs facteurs de milieu, tels que l'eau vive à fort courant et la présence d'abris pour se dissimuler, peuvent jouer un rôle important dans la réussite du traitement à l'HCG. Les seuls poissons chez lesquels la reproduction induite à échelle commerciale a été réussie par administration d'HCG sont l'ictalure tacheté (Ictalurus punctatus), le mulet cabot (Mugil cephalus) et les grandes carpes chinoises. En ce qui concerne l'ictalure, l'HCG est injectée dans la cavité abdominale au taux de 700 à 2 000 unités internationales (UI) par kg du poids corporel, selon la maturité du poisson. Par contre, le mulet demande une injection intramusculaire de 6 000 UI d'HCG par kg de son poids corporel, donnée habituellement en deux doses et à intervalle de 24 à 48 heures, selon le stade de développement des ovules après l'injection initiale. Pour les grandes carpes chinoises, la dose n'est que de 800 à 1 000 UI par kg de leur poids corporel administrée en deux fractions à intervalle de 8 heures, la première ne contenant que 10 à 15 pour cent de la quantité totale d'hormones. Les mâles sont traités lorsque les femelles reçoivent leur deuxième injection.

4.3.3.4 Induction hormonale de l'ovulation, ou de la ponte

Ovulation induite par hormone. L'ovulation est la phase finale du développement normal de l'ovule. La préovulation, rappelons-le, commence quand le noyau de la cellule entame sa migration du centre vers le micropyle, période pendant laquelle l'ovule absorbe des fluides (phénomène de l'hydratation). L'ovulation, elle, démarre en même temps que disparaît la membrane du noyau et que les chromosomes deviennent visibles: elle se termine avec la première division méiotique. Simultanément, le follicule, qui tient les ovules fixés à la paroi de l'ovaire, se rompt et se dissout en partie, provoquant leur chute dans la cavité ovarienne. Ces ovules (qu'on peut appeler “oeufs” au terme de leur évolution) s'écoulent maintenant librement par l'orifice génital.

Ce processus final de maturation prend du temps, dépendant en grande partie de la température du milieu aquatique. Dans la pratique, il est nécessaire de connaître l'intervalle de temps entre la dernière injection décisive et l'ovulation complète. Cet espace temporel s'exprime en “heures-degrés”, que l'on calcule selon le système “jours-degrés”. La température de l'eau du bac où sont tenus les géniteurs est prise toutes les heures, depuis la dernière injection décisive jusqu'au terme de l'ovulation. On fait la somme des lectures qui donne le résultat heures-degrés. Celui-ci sera plus élevé en cas d'une dose unique, puisque le développement de l'oeuf comprendra alors à la fois la préovulation et l'ovulation. Chez la carpe commune, l'intervalle temporel est d'environ 16 à 18 heures à température de l'eau de 21 à 22°C, ce qui donne une somme heures-degrés de 340–360. Si le traitement pituitaire entraîne une, ou plusieurs injections préparatoires, et une seule injection finale, l'ovulation dure 240–260 heures-degrés à la température de l'eau de 21–22°C, soit environ 12 à 13 heures après la première injection.

La connaissance de la valeur heures-degrés permettra au pisciculteur de savoir exactement quand doit se produire l'ovulation après la dernière injection. Cette valeur dépend de l'espèce du poisson traité, du type de traitement, de la taille de la femelle et aussi du moment où le sujet commence à pondre après l'ovulation - aussitôt après ou plus tard.

a) Heures-degrés en fonction de l'espèce

A une température de l'eau de 21–22°C, la valeur heures-degrés chez la carpe commune est de 240–260, tandis qu'elle est de 200–220 chez la carpe chinoise, la carpe argentée et la grosse tête.

b) Heures-degrés en fonction du genre de traitement

Cette valeur est de 340–360 chez la carpe commune, avec une seule dose décisive. Elle ne sera que de 240–260 si l'on donne une dose préparatoire 24 heures avant la dose décisive. Elle s'abaissera à 200–220 avec deux injections décisives à intervalles de 6 à 8 heures. Le schéma vaut aussi probablement pour d'autres espèces.

c) Heures-degrés en fonction de la taille des femelles

Les petites femelles, c'est un fait connu ont leur ovulation plus précoce que les grandes. C'est particulièrement manifeste lorsque les femelles accusent de grosses différences de taille: par exemple, entre celles de 1 à 2 kg et celles de 7 à 10. Chez la carpe commune, la valeur heures-degrés n'est habituellement de 130–150 que lorsque les géniteurs sont de petite taille (de 1,0 à 2,0 kg).

Lorsqu'elles sont lâchées dans le “bac de stockage” en présence de mâles matures actifs, la plupart des femelles injectées commencent à pondre. Faute de quoi, cela signifierait que l'espèce ne répond pas à l'induction, que les mâles sont inactifs ou déjà épuisés, que les femelles sont blessées ou souffrent d'une dose d'hormones excessive, ou encore que les facteurs de milieu sont défavorables.

Ponte induite par hormones. Parmi les poissons traités aux hormones gonadotropes (extrait pituitaire de poisson ou gonadotrophine chorionique), beaucoup commencent à pondre en présence de mâles actifs après leur ovulation normale. Ce genre de reproduction est dénommé ‘reproduction induite’ ou “reproduction induite par hormones”. Dans ce cas, les oeufs sont fécondés par les géniteurs mâles eux-mêmes et peuvent être facilement recueillis pour leur éclosion ultérieure contrôlée.

Les espèces qui se prêtent à la ponte induite sont celles dont les oeufs ne collent pas, sont flottants ou semi-flottants, ou bien qui roulent sur le fond. Autrement, les oeufs fécondés s'agglutineront les uns aux autres en bloc. Les géniteurs nidificateurs peuvent aussi être reproduits selon cette technique, après que l'on aura disposé dans le bac de reproduction les nids ou collecteurs convenables.

Si le poisson disperse ses oeufs collants, comme le font la carpe commune, le cyprin carassin, la tanche, etc., il est recommandé de placer au fond du bac un collecteur d'oeufs du genre kakaban. Même ainsi, quelques oeufs seront dispersés et iront adhérer aux parois du bac.

La ponte induite comporte à la fois des avantages et des inconvénients, énumérés ci-après:

Avantages:

  1. il n'est pas nécessaire de calculer le moment exact de l'ovulation, ni de surveiller les femelles pour voir si elles sont en condition voulue pour procéder à l'extraction de leurs oeufs par pression abdominale;

  2. il n'est pas nécessaire de capturer les géniteurs pour cette extraction, ce qui évite les risques de blessures;

  3. l'extraction manuelle n'étant pas nécessaire, il n'y a pas lieu de procéder à la fécondation artificielle des oeufs, opération qui demande non seulement beaucoup de temps, mais aussi de la main-d'oeuvre habile;

  4. il n'y a pas de risque de dépasser le stade de maturation des oeufs dans l'ovaire, puisque la femelle pondra dès le terme de son ovulation.

Inconvénients:

  1. un collecteur d'oeufs spécial devra être placé sur le trop-plein du bac afin de recueillir les oeufs fécondés flottants, sans leur causer de dommage;

  2. les oeufs que l'on recueille sont généralement mélangés à des excreta et autres particules entraînées par le courant d'eau du bac, qui peuvent polluer les oeufs en se décomposant; les bactéries et champignons qui se développent sur ces déchets peuvent aussi devenir dangereux pour les oeufs au moment de leur incubation;

  3. le nombre total d'oeufs fécondés est plus difficile à estimer et plus compliqué que dans le procédé d'extraction manuelle;

  4. certaines femelles ne pondent pas complètement dans le bac de stockage, si bien qu'il reste dans leur ovaire des oeufs ovulés qui dépassent le stade de maturation et sont perdus. Il se perd de cette façon jusqu'à 50 pour cent des oeufs ovulés;

  5. d'autres femelles expulsent leurs oeufs en l'absence de mâles, d'où un pourcentage élevé d'oeufs non fécondés;

  6. si les mâles ne répondent pas à l'appel des femelles, la reproduction se traduit alors par un échec complet. C'est souvent le cas lorsqu'on ne met en présence dans le bac qu'un seul mâle et une seule femelle.

Pour réussir la reproduction induite, il est recommandé de mettre ensemble une femelle et deux ou trois mâles, deux femelles et trois mâles, ou au maximum trois femelles et quatre mâles, selon les dimensions du bac de stockage. Trop de géniteurs dans un petit bac se gêneront les uns les autres. Lorsque les géniteurs pèsent chacun 2 à 3 kg, on peut mettre au maximum deux femelles et trois mâles dans un bac de 2 m2. En revanche, s'ils ne pèsent chacun que 0,5 kg à 1 kg, le même bac pourra contenir jusqu'à trois ou cinq femelles et quatre à six mâles. Tandis que s'ils pèsent chacun de 4 à 5 kg, il est à conseiller de ne mettre ensemble qu'une femelle et deux mâles. Des poissons encore plus grands exigeraient un bac de stockage plus vaste pour obtenir des résultats satisfaisants.

Figure 11

Figure 11 Facteurs essentiels conditionnant l'élevage des reproducteurs

Figure 12

Figure 12 Accélération du développement des gonades sous climat tempéré par réchauffement de l'eau des bassins

Figure 13

Figure 13 Caractéristiques des géniteurs prêts à recevoir un traitement hormonal

Figure 14

Figure 14 Fabrication de collecteurs destinés aux géniteurs nidificateurs en étang, pour recueillir les oeufs fécondés moyennant ou sans traitement hormonal - 1 et 2 pour le sandre - 3 pour le silure européen (glane) - 4 pour la carpe commune

Figure 15

Figure 15 Systèmes utilisés pour la ponte induite sans traitement hormonal

Figure 16

Figure 16 Différents modes d'installation des collecteurs d'oeufs (nids artificiels)

Figure 17

Figure 17 Viviers pour la reproduction de l'ictalure tacheté, avec bidons de lait utilisés comme réceptacles pour la ponte

Figure 18

Figure 18 Etang de reproduction pour la carpe commune (étang de Dubisch)

Figure 19

Figure 19 Préparation de l'extrait de glande pituitaire pour la reproduction induite

Figure 20

Figure 20 Où et comment pratiquer l'injection d'hormone dans le corps du poisson

Figure 21

Figure 21 Conditions du milieu nécessaires à assurer aux géniteurs après traitement hormonal

4.3.4 Fécondation des oeufs

La fécondation s'obtient facilement avec la ponte induite. Lorsque, pour une raison ou une autre, la réponse à l'induction est négative, il faut alors extraire manuellement des géniteurs leurs oeufs et leur laitance et procéder artificiellement à la fécondation en mélangeant les produits sexuels ainsi recueillis. Seuls, les oeufs ovulés, il convient de le noter, peuvent être facilement extraits. Certains poissons ont des muscles circulaires autour de leur orifice génital, qui, même lorsque les oeufs sont ovulés, peuvent en rendre l'extraction difficile s'ils ne se détendent pas ni ne se dilatent. Dans certains cas, on ne peut dégager ces oeufs qu'en ouvrant l'abdomen de la femelle.

4.3.4.1 Fécondation artificielle des oeufs de poisson. Comme nous l'avons vu précédemment, il arrive que les poissons ne pondent pas spontanément après l'ovulation. D'autres, par contre, comme la carpe commune, sont empêchés par l'homme de pondre spontanément pour que leurs oeufs puissent subir un traitement spécial, qui consiste à en dissoudre l'enveloppe adhésive pour les faire incuber dans des jarres sous le contrôle du carpiculteur. Comme la carpe commune pond aussitôt après l'ovulation, il faut surveiller les femelles et, dès qu'elles commencent à lâcher leurs oeufs, les capturer; puis, ou bien procéder à l'extraction, ou bien suturer leur papille génitale (voir Fig. 22) pour empêcher la dispersion des oeufs. On identifie les femelles ovulées en introduisant un ou deux mâles dans leur bac où ils les suivront en les poussant du museau au voisinage de l'orifice génital pour inciter ces femelles à pondre. Chez presque toutes les espèces, les femelles ne lâchent pas leurs oeufs ovulés s'il n'y a pas de mâles aux environs. Auxquels cas, la ponte spontanée est facile à éviter en tenant mâles et femelles dans des bacs séparés.

Extraction manuelle des produits sexuels. Il n'est pas possible d'arrêter ou d'inverser le processus de maturation finale, c'est-à-dire l'ovulation. Une fois le processus engagé, les oeufs doivent être ou bien pondus ou bien extraits manuellement, faute de quoi ils dépasseront le stade de maturation et ne seront plus fécondables. Il est donc essentiel d'extraire les oeufs de la femelle ovulée dès que leur masse principale a atteint le stade “très mûr”, car ils deviendront “trop mûrs”, très peu de temps après, comme le montre le tableau suivant pour différentes espèces:

Période approximative après l'ovulation où 50 % des oeufs dépassent dans l'ovaire le stade de maturation

 Minutes
Carpe commune50–80
Carpe chinoise30–40
Carpe argentée30–40
Carpe grosse tête50–80
Prochilodus spp.20–30

D'une manière générale, les oeufs des poissons tropicaux et subtropicaux dépassent le stade de maturation plus rapidement que chez les poissons de la zone tempérée.

La plupart des oeufs mûrissent et tombent dans la cavité ovarienne au même moment, ce qui facilite leur extraction, car ils s'écoulent alors de l'abdomen en un jet épais. La connaissance de la valeur heures-degrés de l'espèce aide beaucoup à déterminer le moment exact de l'ovulation, avec une fourchette de 10 à 20 minutes. Lorsque 10 ou 15 femelles sont traitées en même temps, celles dont l'ovulation est la plus précoce sont immédiatement sorties du bac pour l'extraction manuelle et, à la fin de cette première opération, les autres femelles seront alors prêtes à leur tour.

L'éjection des oeufs, chez la plupart des poissons, se produit lorsqu'on les sort de l'eau. Mais il n'est pas nécessaire de les retirer du bac pour vérifier leur maturité pour la ponte: en tournant la femelle sur le dos et en pressant légèrement ses flancs près de la papille génitale, le suintement des oeufs est une indication suffisante de la maturité du poisson.

Une fois la femelle choisie, avant de procéder à l'extraction l'opérateur s'essuie soigneusement les mains avec une serviette-éponge douce qui lui sert aussi pour sécher le corps du poisson, surtout vers l'arrière et la queue. L'extraction s'opère par légère pression du pouce le long de l'abdomen près de l'orifice génital, pour faire jaillir les oeufs dans un bol émaillé ou de plastique bien sec. Pour les poissons de petite taille, il suffit de les tenir à la main pendant l'extraction, tandis que pour les plus gros (plus de 4 ou 5 kg) il faut les coucher sur une table garnie d'un coussin (Fig. 23).

Lorsque les femelles ont été suturées, leur ventre mou et la présence de quelques oeufs entre les points de suture seront signe de maturité (sinon, des mâles serviron d'“indicateurs”). Les sujets sont alors essuyés avec une serviette-éponge, puis on enlève les points de suture, ce qui provoquera aussitôt chez la femelle mûre l'expulsion des oeufs en un jet épais. Seuls les derniers oeufs devront être extraits par une pression légère de la main de. l'opérateur. On doit absolument éviter l'extraction forcée, autrement dit obliger les oeufs à sortir avec effort, car ces oeufs seraient impropres à la fécondation.

En même temps que l'on procède à l'extraction des oeufs des femelles, on fera la même opération sur les mâles pour faire jaillir leur sperme, ou bien celui-ci sera recueilli. Dans ce cas, si l'on prévoit que le mâle ne donnera que quelques gouttes de sperme, on les aspire avec une pipette spéciale, tandis qu'on se servira d'un collecteur de laitance si l'on pense en récolter amplement. Dans aucun de ces cas il n'est nécessaire d'essuyer les mâles, car le sperme qui suinte par l'orifice génital peut facilement être aspiré. Lorsqu'on en a récolté suffisamment, on verse cette laitance sur les oeufs et l'on mélange immédiatement le tout à sec, avec une cuiller de plastique ou une plume.

Une équipe bien entraînée de trois ou quatre personnes expérimentées peut procéder en 30 ou 50 minutes à l'extraction manuelle de 10 à 15 femelles et du nombre adéquat de mâles. La Fig. 24 montre le matériel nécessaire pour cette opération et pour la fécondation artificielle.

Dissolution de l'enveloppe collante des oeufs. Chez plusieurs espèces, notamment chez les carpes, les oeufs mûrs ont une enveloppe adhésive composée de glucoprotéines, c'est-àdire de sucre et d'acides aminés. C'est grâce à cette enveloppe que les oeufs adhèrent à la végétation aquatique, ou aux objets, et se développent indépendamment les uns des autres. Les oeufs qui ne sont pas encore mûrs ne possèdent pas cette enveloppe. Les “oeufs secs” ne sont pas collants, puisqu'ils ne le deviennent qu'au contact de l'eau. L'adhérence, plus forte au début, peut disparaître à la longue et varie selon les espèces: très faible chez le brochet, assez forte chez les cyprinidés et le sandre, elle est très forte chez le grand silure européen. Ces différences sont peut-être dues à celles de la composition chimique de la matière collante. L'eau salée n'active pas l'adhérence de l'oeuf de carpe, tandis que la carbamide et la guanidine dissolvent la matière collante sur la surface de l'enveloppe de l'oeuf. Toutefois, avec le sel ordinaire, la matière collante ne perd pas ses propriétés mais reste simplement inactive. Si l'on met les oeufs dans l'eau douce, ils s'agglutineront en bloc par suite de l'activation de la matière collante, ou de ce qui en reste, entre les oeufs. Il est donc nécessaire de laver à fond les oeufs avec la solution de carbamide et de sel pendant qu'ils gonflent, de manière à éliminer de leur surface la matière collante. Une méthode meilleure et plus simple consiste à les laver rapidement dans une solution de tannin lorsqu'ils ont fini de gonfler. Le tannin dénature tous les composés protéiques et élimine donc immédiatement l'adhérence des oeufs.

D'habitude, on emploie les deux méthodes. On commence par laver plusieurs fois les oeufs, pendant la période où ils gonflent, avec des quantités de plus en plus fortes de la solution carbamide-sel (solution dite “fécondante”); après quoi, on les plonge trois ou quatre fois dans une solution de tannin qui a aussi pour propriété d'empêcher les oeufs de continuer à gonfler en dénaturant les protéines de leur enveloppe. Aussi, ne doit-on appliquer la solution que quand les oeufs ont fini de gonfler.

Fécondation des oeufs adhérents. L'oeuf ovulé qui tombe dans la cavité ovarienne n'a entrepris que sa première division méiotique. La seconde ne se produit que lors de la pénétration du spermatozoîde, qui met fin à l'élimination du second globule polaire. En pénétrant dans l'oeuf par le micropyle, le spermatozoîde déclenche, en effet, les phases ultérieures du cycle: notamment l'élimination du second globule polaire et le développement du pronucleus femelle, qui ne contiennent quela moitié (n) du nombre normal de chromosomes. Ce pronucleus femelle fusionne alors avec le pronucleus mâle, qui n'a également que la moitié (n) du nombre de chromosomes: apparaît alors la première cellule somatique à (2n) chromosomes du nouveau poisson. Ainsi s'achève le cycle de la fécondation.

Le temps laissé à l'oeuf mûr pour être fécondé est très limité cela parce que, au contact de l'eau, il se met immédiatement à glonfler, ce qui provoque la fermeture du micropyle. Chez la carpe commune et les carpes chinoises, cette ouverture se referme en 45 à 60 secondes et, chez la plupart des autres espèces, les spermatozoîdes ne disposent que de quelques minutes pour que l'un d'eux pénètre dans l'oeuf.

Il faut faire extrèmement attention à la quantité d'eau ou de solution que l'on décide d'ajouter au mélange de produits sexuels. S'il y a trop de liquide, beaucoup de spermatozoïdes s'en iront à la dérive et manqueront le micropyle. En revanche, s'il n'y en a pas suffisamment, le micropyle peut être recouvert par un autre oeuf ou par le mucus de l'ovaire, ce qui empêchera les spermatozoïdes, dont la vie est très brève, d'entrer et de féconder l'oeuf: phénomène qui risque de se produire en dépit de la présence innombrable de spermatozoïdes dans la laitance (de dix à vingt milliards par cm3).

Le processus que nous décrivons ci-après se réfère à la fécondation et à la manutention des oeufs de la carpe commune, dont le schéma est représenté sur les Figures 25 (a-c).

L'addition d'eau au mélange d'oeufs et de laitance de carpe commune agglutine l'ensemble en quelques secondes, ce qui empêche les oeufs de gonfler et de se développer, et les fera mourir aussitôt faute de pouvoir s'oxygéner. Par contre, l'emploi d'une solution “fécondante” assurera la fécondation et un développement satisfaisants. Dans ce cas, en effet, les oeufs ne se collent pas en bloc les uns les autres, quand on les agite constamment et délicatement, et les spermatozoïdes se remuent activement. On a constaté que la survie des spermatozoïdes dure bien plus longtemps dans une solution de carbamide et de sel (20 à 25 minutes) que dans l'eau (1 à 2 minutes).

La solution fécondante se prépare en faisant dissoudre 30 g de carbamide (urée) et 40 de sel (NaCl) dans 10 litres d'eau pure d'étang (de préférence filtrée).

Au début de l'opération, verser une quantité de solution correspondant à peu près au dixième ou au cinquième du volume d'oeufs. Avec une cuiller de plastique ou une plume, mélanger alors sans discontinuer pendant trois à cinq minutes, laps de temps suffisant pour qu'un spermatozoïde pénètre dans le micropyle et achève le cycle de la fécondation. On continuera d'agiter le mélange à la main: une personne peut opérer sur deux bols à la fois sans s'arrêter, ou bien sur quatre à six par roulement.

Les oeufs absorbent sans peine la solution et commencent à gonfler. De temps à autre, on ajoute de plus grandes quantités de la même solution, tout en évacuant une partie du liquide qui contient la matière collante dissoute.

L'oeuf de la carpe commune augmente de dix fois son volume initial, environ. Aussi, avec 0,2 litre d'oeufs secs, faut-il disposer d'un bol d'environ 3 litres afin de leur laisser assez d'espace pour gonfler.

Au bout d'approximativement une heure à une heure et demi, les oeufs cessent de gonfler et leur couche adhésive est dissoute. Cependant, il n'empêche que si on les transfère dans l'eau, les oeufs peuvent avoir tendance à s'agglutiner en grappes distendues, en raison de la matière collante qui subsiste entre les oeufs. Pour se débarasser complètement de celle-ci, il est nécessaire de laver les oeufs deux et trois fois avec la solution fécondante, que l'on videra chaque fois pour éliminer la plus grande partie de la substance adhésive. On transfère alors les oeufs dans une seconde solution, composée de 5 à 8 g de tannin pour 10 litres d'eau. On devra veiller à ce que cette solution soit fraîchement préparée chaque fois qu'on en aura besoin de nouveau.

On verse 2 à 4 litres de la solution de tannin dans un seau de plastique, à laquelle on ajoute en une seule fois 2 à 3 litres d'oeufs gonflés. Après mélange à la main pendant 3 à 5 secondes, on remplira le seau d'eau pure. Quand les oeufs reposent au fond, la solution est vidée, de préférence avec un tamis. Par précaution, on verse alors une quantité moindre de solution de tannin (1 à 2 litres), puis, après mélange à la main, on ajoute de nouveau de l'eau pure et on évacue la solution. Le tannin peut être pernicieux pour les oeufs s'il reste trop longtemps à leur contact. C'est pourquoi, il faut répéter les lavages à l'eau pure, ou bien mettre immédiatement les oeufs dans les incubateurs et les y laver. Si la solution de tannin est insuffisante pour la quantité d'oeufs à traiter, il se pourra qu'ils restent légèrement collants, mais comme l'eau les aura durcis, ils peuvent être détachés et séparés à la main.

La même procédure sera adoptée pour traiter les oeufs de tanche (Tinca vulgaris), d'aspe (Aspius aspius), de brème (Abramis brema) et des autres cyprinidés, afin de les débarrasser de la substance collante.

Fécondation des oeufs non-adhérents. L'absence de couche adhésive rend la fécondation et la manipulation des oeufs non-adhérents bien plus faciles. Il suffit d'utiliser de l'eau pure, sans avoir recours à la “solution fécondante”, à raison d'environ 10 à 20 pour cent du volume des oeufs “secs”. L'opération dure environ cinq minutes, temps pendant lequel les oeufs doivent être constamment mélangés. Puis on transfère les oeufs dans des incubateurs, en n'y mettant que la quantité que peut contenir la jarre et non sans se rappeler que les oeufs gonflent de 40 à 60 fois leur volume primitif (Fig. 26). Certains éleveurs préfèrent attendre que les oeufs aient fini de gonfler dans le seau avant de les transférer dans les incubateurs, opération qui, toutefois, peut en endommager un certain nombre. Il est donc préférable de transférer les oeufs non-adhérents dans les incubateurs aussitôt après la fécondation et avant qu'ils commencent à gonfler.

Rôle catalyseur de la solution de carbamide dans la fécondation. On a constaté que les spermatozoïdes demeurent mobiles plus longtemps dans une solution de carbamide que dans l'eau pure. Les spermatozoïdes de carpe restent capables de féconder les oeufs après être demeurés 20 à 25 minutes dans une solution de carbamide: leur viabilité (ou leur survie) y est donc de dix à vingt fois supérieure à ce qu'elle est dans l'eau douce normale. C'est pourquoi cette solution est considérée comme un catalyseur de la fécondation. Outre qu'elle prolonge la survie des spermatozoïdes et augmente par conséquent le taux de fécondation, cette solution aide aussi à dissoudre les substances obstruant le micropyle des oeufs. Chez le brochet (Esox lucius), une solution de carbamide (de 16 g/1 litre d'eau) accroît considérablement le taux de fécondation, jusqu'à 80 ou 90 pour cent. La concentration optimale de carbamide varie cependant selon les espèces. On conseillera donc de déterminer ce taux optimal pour chaque espèce concernée en expérimentant la survie des spermatozoïdes à différentes concentrations. Celle-ci pourra être considérée comme optimale, si les spermatozoïdes continuent de se mouvoir vigoureusement pendant 10 à 15 minutes. L'emploi de cette “solution fécondante” de carbamide au lieu d'eau pure permet d'attendre de meilleurs résultats chez presque tous les poissons dont les oeufs sont fécondés artificiellement. Dans le cas du brochet, on a constaté un effet catalytique analogue en employant une solution de sel ordinaire.

4.3.4.2 Gonflement des oeufs. L'oeuf mûr gonfle au contact de l'eau ou de la “solution fécondante”. Même les oeufs qui ont dépassé le stade de maturation et ceux qui n'ont achevé que la phase de préovulation gonflent aussi, mais pas à un degré comparable à celui des oeufs mûrs. Les oeufs mûrs non fécondés gonflent également normalement: il apparaît donc que la fécondation de l'oeuf n'est pas indispensable pour le faire gonfler. Dès que l'oeuf commence à gonfler, le micropyle se ferme, ce qui interdit désormais aux spermatozoïdes de pénétrer dans l'ovule. Chez la carpe commune et la carpe chinoise, le micropyle se referme environ une minute après son entrée en contact avec l'eau ce qui signifie que ces deux espèces ne disposent que d'une minute pour que leurs oeufs soient fécondés une fois en contact avec l'eau. C'est pourquoi les oeufs doivent être manutentionnés à sec au moment de leur extraction de l'abdomen de la femelle.

L'oeuf gonflé se compose de trois éléments: un germe, l'espace périvitellin et l'enveloppe. Le germe contient la masse du vitellus avec ses réserves (lipides, etc.) et les cellules en phase de clivage. On y distingue deux pôles: le pôle animal, ou blastodisque, et le pôle végétatif, ou masse vitelline. Le pôle animal contient le noyau de la cellule dont, à ce moment, les chromosomes sont en nombre normal comme dans n'importe quelle cellule somatique. Autour du germe, s'étend l'espace dit périvitellin, rempli de liquide du même nom qui contient des protéines dissoutes. L'oeuf est enclos dans une membrane composée de une, deux ou trois couches selon les espèces de poisson. L'épaisseur, la dureté et autres caractéristiques de cette “coque” peuvent aussi varier selon les espèces, ce qui détermine le choix de l'incubateur dont le type dépendra de la nature de la membrane de l'oeuf.

Cette enveloppe de l'oeuf est très délicate chez certains poissons et peut se rompre facilement, entraînant la mort de l'oeuf. Chez d'autres, elle est très dure et résiste même à la pression entre les doigts (chez le mahaseer, par exemple).

Figure 22

Figure 22 Suturation de la carpe femelle

Figure 23

Figure 23 Techniques d'extraction manuelle des oeufs et de la laitance

Figure 24

Figure 24 Accessoires nécessaires à l'extraction manuelle des oeufs et de la laitance, puis à la fécondation artificielle

Figure 25a

Figure 25a Reproduction artificielle de la carpe ordinaire - I -

Figure 25b

Figure 25b Reproduction artificielle de la carpe ordinaire - II -

Figure 25c

Figure 25c Reproduction artificielle de la carpe ordinaire - III -

Figure 26

Figure 26 Manutention des oeufs non-adhérents


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