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2. ALLURE GENERALE, TAXONOMIE REPARTITION ET ECOLOGIE DES ACACIAS

Ce chapitre contient de brefs commentaires sur l'allure générale des acacias, l'état passé et actuel de leur taxonomie, l'origine et la répartition actuelle du genre Acacia, et son écologie. Des références aux six espèces d'intérêt majeur seront incluses dans le texte lorsque nécessaire. Une liste succinte de références botaniques est présentée pour les principaux pays ou régions où l'on rencontre les acacias. Des notes sur la morphologie de divers organes des acacias sont présentées dans la section sur la taxonomie. L'objet de ce chapitre est de donner au lecteur un aperçu plus vaste sur ce genre botanique, en particulier dans les zones directement ou indirectement intéressées par les récoltes de semences. La taxonomie des acacias sera traitée d'une manière plus détaillée dans un manuel que la FAO et le CIRPG se proposent de publier sur ce sujet.

2.1 Allure générale

Les acacias sont des végétaux de taille très variable. Certains sont des lianes ligneuses (ex. A. pennata), d'autres des buissons bas (ex. A. depressa), tandis que d'autres encore sont de grands arbres forestiers de plus de 35 mètre de hauteur, tels qu'A. melanoxylon. La hauteur de l'arbre ou de l'arbuste est un facteur qui conditionne les méthodes de récolte.

La cime de l'arbre adulte est souvent caractéristique de l'espèce. De nombreux acacias africains ont une cime aplatie typique, tandis que la plupart des espèces australiennes ont une cime plus ou moins sphérique.

Les caractéristiques des feuilles et du feuillage des acacias sont diverses. De nombreux acacias africains (à l'exception d'A. albida) tendent à perdre leurs feuilles durant la saison sèche, tandis que la plupart des acacias australiens ont un feuillage persistant. En Amérique du Sud on trouve des espèces aussi bien à feuillage caduc que persistant (Ross 1981). Les feuilles de certaines espèces, telles qu'A. elata que l'on trouve en Australie en lisière de forêt dense - ont une position plus ou moins horizontale, tandis que les phyllodes d'A. harpophylla et de nombreuses espèces de stations sèches - sont pendantes, ce qui constitue sans doute une adaptation permettant d'éviter les radiations solaires directes. En outre certaines espèces africaines, appartenant notamment au sous-genre Acacia, ont la faculté de développer des bouquets de feuilles secondaires qui apparaissent aux noeuds à partir de pousses latérales nanifiées (Ross 1979).

La régénération naturelle se fait principalement par semis, mais certaines espèces peuvent se régénérer par drageons - très fréquents ches A. harpophylla -, et d'autres par rejets de souche (ex. A. albida).

2.2 Introduction à la taxonomie des Acacia destinée aux récolteurs de graines

2.21 Classification-passée et actuelle

Selon Ross (1973), le genre Acacia fut décrit pour la première fois en 1754 par Philip Miller, qui se basait sur A. nilotica. Le nom Acacia dériverait du grec akazein (aiguiser), par allusion aux stipules épineuses de nombreuses espèces africaines et asiatiques (Ross 1973). La passionnante histoire de la taxonomie des Acacia avant Linné a été retracée par Ross (1980).

Le lecteur peut être dérouté à propos de la dénomination de la famille à laquelle appartiennent les acacias. jacobs et Pickard (1981) en Australie les rangent dans la famille des Mimosacées, Green (1981) dans la famille des Légumineuses, sous-famille des Mimosoidae, tandis que certains auteurs africains (Ross 1979) et nord-américains (Shelter et Skog 1978) préfèrent le nom de famille de Fabacées à celui de Légumineuses. La nouvelle Flore de l'Australie de George (1981), suivant en cela Cronquist (1981), place Acacia dans la famille des Mimosacées. Ces variations sont souvent dues à des préférences personnelles.

L'histoire de la classification des Acacia en groupes d'espèces présentant une évolution semblable à été résumée par Ross (1973). Une classification particulièrement importante est celle qui avait été établie par Bentham en 1842, puis révisée en 1875, et dans laquelle le genre Acacia était divisé en six séries: Gummiferae, Vulgares, Filicinae, Phyllodinae, Botryocephalae et Pulchellae, basées principalement sur les caractères du feuillage et des stipules, une importance moindre étant attribuée à l'inflorenscence. Cette synthèse ancienne de Bentham, bien que de nombreuses espèces fussent inconnues de lui, était remarquable, et a pour l'essentiel résisté à l'épreuve du temps (Pedley 1978).

La plus récente tentative sérieuse de subdivision du genre Acacia est celle de Guinet et Vassal (1978). Ces auteurs prennent en considération les caractères du pollen, la cytologie (ex. nombre de chromosomes) et les caractères de la graine, ainsi que ceux de l'inflorescence et de la gousse, et les caractères végétatifs (ex. morphologie des semis). La classification de Bentham a été révisée, et trois sous-genres proposés, qui sont:

Sous-genre Aculeiferum Vassal (inclut les séries Vulgares et Filicinae de Bentham)

Sous-genre Heterophyllum Vassal (inclut les séries Phyllodinae, Botryocephalae et Pulchellae de Bentham)

Sous-genre Acacia (correspond à la série Gummifera de Bentham)

Cette division en sous-genres tend à être reconnue par les botanistes, et elle a été utilisée par Pedley (1978 – 1979) dans sa révision des acacias du Quensland (Australie) et par Ross (1981) dans son étude sur les acacias d'Afrique et du monde. Parmi les six espèces décrites dans le présent manuel, A. aneura appartient au sous-genre Heterphyllum, A. senegal au sous-genre Aculeiferum, tandis que les autres (A. albida, A. nilotica, A. tortilis et A. caven) se rangent dans le sous-genre Acacia. Il est intéressant de noter que Guinet (1969) suggérait de retirer A. albida et A. caven du genre Acacia, et de les placer respectivement dans les genre Faidherbia A. Chev. et Vachellia Wight et Arn.

En bref, les espèces appartenant au sous-genre Acacia ont des feuilles bipennées et des épines stipulaires, et celles du sousgenre Aculeiferum ont souvent des épines d'origine non stipulaire, ou de simples aiguillons, et sont des lianes ligneuses ou des arbres. Les espèces du sous-genre Heterophyllum sont souvent dépourvues d'épines, et leurs feuilles sont souvent modifiées en phyllodes. Bien que certaines espèces de ce dernier groupe, telles qu'A. decurrens, aient des feuilles bipennées sur les arbres adultes, elles sont, si l'on considère les autres caractères, plus proches du groupe des acacias à phyllodes (Simmons 1981).

Il importe que le récolteur, lorsqu'il recueille des provenances différentes (voir Chapitre 4), soit bien conscient qu'il existe une variation également à l'intérieur d'une espèce. Cette variation est amplement démontrée par le grand nombre de sous-espèces et de variétés qui ont été reconnues et nommées chez certains acacias, tels qu'A. nilotica (9 sous-espèces) et A. senegal (au moins 4 variétés). En outre, la viariation au niveau de la provenance, bien que les études à ce sujet soient peu nombreuses, a été démontrée en Australie pour A. melanoxylon (Farrell et Ashton 1978), et en Afrique pour A. karroo (Robbertse et al. 1981). Ces études ont montré qu'il peut exister dans une même espèce une variation considérable pour plusieurs caractères morphologiques, et qu'on peut s'attendre également à une variation dans la réponse physiologique. Le récolteur doit avoir ce fait présent à l'esprit lorsqu'il recueille des semences, et il doit choisir avec soin ses lieux de récolte.

2.22 Clefs de détermination des acacias

Le récolteur qui veut identifier les espèces sur le terrain se heurte à certaines difficultés. Il n'existe à ce jour aucune description complète de tous les acacias du monde. Les caractères botaniques, et des clefs d'identification des espèces locales, peuvent généralement être trouvés dans les flores couvrant un pays ou une région, entre autres dans les ouvrages suivants: pour l'Afrique “Flora of West Tropical Africa” (Hutchison et Dalziel 1958), “Flora of Tropical East Africa” (Brenan 1959), “Flora Zambesiaca” (Brenan 1970), “Trees of Southern Africa” (Palmer et Pitman 1972), “Kenya Trees and Shrubs” (Dale et Greenway 1961), “A conspectus of African Acacia species” (Ross 1979) 1. Pour l'Asie “Flora of West Pakistan” (Nasir et Ali 1971), “Flora of Java” (Backer et Bakhuizen 1963), ainsi que la révision de certaines espèces non australiennes par Pedley (1975). Pour l'Amérique du Sud “Flora of Guatemala” (Standley et Steyermark 1946), “Flora of Peru” (McBride 1943). Burkart (1946, 1947) a publié des informations sur les acacias d'Argentine. Pour les acacias d'Amérique du Nord on peut consulter Britton et Rose (1928), mais pour une information plus à jour Iseley (1969) est préférable. Bien qu'Acacia soit un genre important en Australie, on ne trouve aucun ouvrage complet sur les acacias australiens. La plupart des descriptions d'espèces ne couvrent qu'une région, comme celles de Whibley (1980) pour l'Australie-Méridionale, Armitage (1977) pour la Nouvelle-Galles du Sud, et Maslin (1981 b) pour l'Australie centrale. Parmi les révisions récentes on trouve celles de Pedley (1978, 1979) pour les acacias du Queensland, et de Maslin (1975) pour certaines espèces d'Australie-Occidentale. En conclusion, les informations botaniques sont éparses dans la littérature, et pour les description d'espèces et les clefs de détermination il faut consulter les flores régionales.

1 Et pour les pays francophones d'Afrique “Flore forestière soudanoguinéenne” (Aubréville 1950) (NdT)

2.23 Morphologie de certains organes des acacias

Le récolteur doit avoir une connaissance générale de la structure des végétaux auxquels il a affaire, afin de pouvoir utiliser efficacement les clefs de déterminarion. L'importance de ces organes dans les opérations de récolte ou de nettoyage des graines est mentionnée lorsqu'il y a lieu.

2.231 Feuilles et phyllodes

Dans tous les jeunes semis d'acacias les premières paires de feuilles sont pennées ou bipennées. Chez toutes les espèces africaines la forme bipennée persiste (ex. A. nilotica). Chez de nombreuses espèces australiennes les feuilles se dessèchent et disparaissent au cours de la première année, et elles sont relayées dans leurs fonctions par les pétioles qui se développent en organes semblables à des feuilles, appelés phyllodes. Ces phyllodes peuvent avoir soit une nervure unique, soit un réseau de nervures plus ou moins parallèles. Elles sont formées par un pétiole aplati généralement selon un plan vertical (horizontal chez quelques espèces). Ces “feuilles” aussi bien que le rachis des feuilles véritables portent souvent sur leur face supérieure de petites glandes, également appelées nectaires extrafloraux (voir Boughton 1981). Ces glandes sont semble-t-il mieux développées dans les espèces centraméricaines que dans les espèces australiennes. Elles peuvent attirer les fourmis et de ce fait gêner les récolteurs de semences.

Les phyllodes ont une taille qui varie entre 1,5 mm (ex. A. minutifolia) et 30 cm de longueur (ex. A. dunnii). Elles peuvent être larges et aplaties, comme chez A. mangium, ou cylindriques, rigides et pointues, comme chez A. ulicifolia. La fig. 1 montre des exemples de feuille typique et de phyllode.

Les fragments de feuilles ou de phyllodes doivent être éliminés dans les lots de semences lors des opérations de nettoyage.

2.232 Epines et aiguillons

Les épines, que l'on trouve sur de nombreux acacias et notamment sur les espèces africaines et américaines, peuvent rendre difficile la récolte de semences sur des arbres sur pied. Une épine possède un système vasculaire qui prolonge celui de la tige, tandis qu'un aiguillon est une simple excroissance épidermique non vascularisée. Toutes les espèces africaines peuvent être divisées en deux groupes selon qu'elles ont des stipules spinescentes (épineuses), comme A. nilotica (sous-genre Acacia) ou non spinescentes. La plupart des espèces à stipules non spinescentes du sous-genre Aculeiferum ont des aiguillons qui se trouvent soit aux noeuds (ex. A. senegal) soit répartis le long des internoeuds (ex. A. ataxacantha). Les épines et aiguillons ont un intérêt taxonomique considérable; certains de leurs caractères, tels que le nombre par noeud (2 ou 3), la forme renflée ou comprimée de la base, la courbure de la pointe, sont particulièrement utiles pour la détermination.

Les épines ont jusqu'à 30 cm de longueur chez certaines espèces comme A. karroo.

2.233 Fleurs

Les fleurs d'acacias sont petites, régulières, et généralement bisexuées. Chaque fleur contient fondamentalement 4 ou 5 sépales et pétales. Les sépales peuvent être libre ou réunis en calice, et les pétales peuvent être libres ou réunis en corolle. Les étamines sont nombreuses, et sont insérées au-dessous ou juste au-dessus de la base de l'ovaire. Le style filiforme déborde légèrement les étamines. L'ovaire est sessile ou courtement pédonculé, et sa surface externe peut être lisse ou couverte de poils minuscules. A la base de chaque fleur se trouve une petite bractéole, dont la forme varie selon les espèces.

Fig. 1AFig. 1B
Fig. 1C
Fig. 1D

Fig. 1 - Feuilles et phyllodes de deux espèces d'Acacia

(A) A. baileyana: croquis montrant quatre paires de feuilles et deux glandes sur le rachis

(B) A. baileyana: vue à plus grande échelle de la glande, du rachis et des quatre pennes

(C) Phyllode d'A. falciformis avec une glande sur le bord

(D) Vue à plus grande échelle de la glande d'une phyllode d'A. falciformis

Pedley (1981) indique que les fleurs prises isolément n'ont que peu d'intérêt pour l'identification et la classification des acacias australiens. En revanche Ross (1979) note des différences importantes dans les caractères floraux des espèces africaines appartenant aux sous-genres Aculeiferum et Acacia. Les espèces du premier sous-genre ont un ovaire pédonculé et un disque cupulaire entourant la base de l'ovaire, tandis que les espèces du second sous-genre n'ont pas de disque, et ont un ovaire sessile ou subsessile.

Les acacias attirent l'attention lorsqu'ils sont en fleurs, et une floraison profuse peut annoncer une récolte abondante de semences. La couleur des fleurs est sourtout dûe à la couleur de la partie libre des filaments staminaux. En Australie la gamme de couleurs de fleurs est assez réduite et varie de presque blanc à jaune-orange (Pedley 1978, 1979). Chez les espèces africaines elle est plus riche, allant du blanc ou blanc-jaunâtre au jaune d'or et au jaune-orange brillants, et parfois au rose pâle ou plus rarement au violet pâle (Ross 1979).

2.234 Inflorescences

Les fleurs de la plupart des acacias sont disposées soit en capitules (fleurs groupées en boule compacte) soit en épis (fleurs groupées en cylindre compact). Pedley (1978) et Ross (1979) ont tous deux discuté de la valeur de ce caractère pour la subdivision du genre Acacia, le premier pour les espèces australiennes, le second pour les espèces africaines. Le nombre de fleurs dans un capitule peut également aider à l'identification.

La disposition des capitules, et dans une moindre mesure celle des épis, peuvent être utiles pour délimiter des groupes d'espèces voisines. Les capitules peuvent être sessiles ou pédonculés, et les inflorescences peuvent être axillaires ou terminales. Les premières peuvent être solitaires, par paires, en groupes ou en racèmes (pouvant eux-mêmes être par paires). Les inflorescences terminales peuvent être fasciculées ou paniculées. La disposition des épis est de peu d'importance mais leur longueur, et la disposition plus ou moins dense des fleurs dans l'épi sont plus caractéristiques (Pedley 1978). En outre, Ross (1979) note que les espèces africaines appartenant au sous-genre Acacia ont un involucelle (collerette de bractées) entourant le pédoncule de l'inflorescence, et que celui-ci est absent chez les espèces du sous-genre Aculeiferum. La Fig. 2 montre des inflorescences d'acacias typiques.

1.235 Gousses

Une des caractéristiques des acacias est la grande diversité de leurs gousses. Whibley (1980) les décrit comme étant linéaires à oblogues, aplaties à cylindriques, droites, courbes ou tordues en spirale, papyracées à ligneuses, et généralement déhiscentes. Les caractères de la gousse sont souvent un élément de détermination pour certaines espèces, selon par exemple qu'elles sont droites, tordues ou spiralées, à bords parallèles ou moniliformes (en forme de chapelet), ou encore ailées. La disposition des fibres sur la surface de la gousse est également souvent caractéristique, ainsi elle peuvent être orientées transversalement ou longitudinalement. Les gousses de la plupart des espèces sont déhiscentes, mais quelques-unes ont des gousses indéhiscentes, telles qu'A. albida, A. nilotica et A. tortilis. Dans ce cas les graines et la gousse se fragmentent généralement en même temps, ce qui rend difficile le nettoyage des semences. La Fig. 3 montre la variation dans la forme des gousses des six espèces traitées dans le présent ouvrage.

Fig. 2AFig. 2BFig. 2C

Fig. 2 - Schémas simplifiés de trois types d'inflorescences d'Acacia

(A) Bouquet axillaire de quatre capitules sur des axes simples
(B) Deux racèmes axillaires avec capitules
(C) Trois épis

La disposition des graines dans la gousse est également souvent caractéristique de l'espèce. Chez certains acacias les graines sont alignées transversalement, tandis que chez d'autreselles sont alignées longitudinalement ou obliquement. Chez la plupart des espèces les graines sont alignées en une seule rangée, mais chez quelques espèces du sous-genre Acacia, comme A. farnesiana, elles forment deux ou trois rangées.

2.236 Graines

Etant donné que les graines de nombreux acacias sont caractéristiques, on a tenté à plusieurs reprises de classer les espèces d'après leurs graines, ou d'utiliser cellex-ci dans les clefs de détermination. Les descriptions de graines se fondent sur des caractères tels que le type de funicule, la taille et la forme du hile et du strophiole (Fig. 4), la forme, la couleur et les dimensions de la graine, et certains aspects de la morphologie interne tels que la présence ou l'absence d'endosperme (Blelcke 1946; Vassal 1963, 1971; Gopal et Thapliyal 1971). La forme et la taille de l'aréole présentent un intérêt particulier (Fig. 4); utilisant ce caractère pour les acacias africains, Ross (1973) constate une bonne corrélation entre espèces dont les graines ont des aréoles petites, en fer à cheval, situées au centre de la graine, et des inflorescences en épi. Par contre les espèces ayant des inflorescences en boule ont de grandes aréoles dont les limites suivent en gros le contour de la graine. De nombreuses espèces australiennes se distinguent, par contraste avec les acacias africains, par la couleur vive de leur funicules (voir Ross 1981). Plusieurs espèces d'Amérique Centrale ont une pulpe sucrée caractéristique entourant les graines (Janzen 1969). La Fig. 4 montre les graines des six espèces étudiées ici.

2.3 Répartition

2.31 Répartition des acacias dans le monde

Il existe plus de 1200 espèces d'acacias (Simmons 1981). Leur aire naturelle s'étend sur tous les continents à l'exception de l'Europe et de l'Antarctique. La Fig. 5 montre l'allure générale de leur répartition, et la répartition des six espèces étudiées ici. Il y a à l'heure actuelle 729 espèces reconnues en Australie, et on estime qu'il existe environ 120 taxons non encore décrits (Maslin 1980 a). L'Afrique en possède environ 115 espèces (Ross 1973, 1981), le reste se trouvant en Asie (y compris la Chine) et dans les Amériques. En Nouvelle-Zélande le genre n'est connu qu'à l'état fossile (Ross 1981).

La Fig. 6 montre la répartition des trois sous-genres d'Acacia dans le monde. Les espèces du sous-genre Acacia sont principalement africaines, mais on en trouve aussi en Asie, en Amérique du Sud, et en nombre restreint (une dizaine d'espèces seulement) dans le nord de l'Australie (Tindale et Roux 1975; Simmons 1981). Le sous-genre Aculeiferum est largement répandu sous les tropiques, avec une seule espèce, A. albizioides (qui est une liane de forêt dense), se trouvant en Australie. La majorité des espèces australiennes appartiennent au sous-genre Heterophyllum. On ne trouve que 18 espèces environ de ce sous-genre hors d'Australie, dont 10 n'existent pas en Australie. Le groupe extra-australien s'étend de Madagascar et des Mascareignes à la Nouvelle-Guinée, à Taïwan et à des îles du Pacifique jusqu'à Hawaï (Pedley 1975; Ross 1981; Simmons 1981). Sur les 115 espèces africaines 52 appartiennent au sous-genre Aculeiferum et 63 au sous-genre Acacia (Ross 1981). La répartition des espèces américaines entre les différents sous-genres n'est pas connue.

Fig. 3
Fig. 3 -Gousses de six espèces d'Acacia
 (A) A. albida(B) A. tortilis(C) A. niloteca
 (D) A. senegal(E) A. aneura(F) A. caven
Fig. 4

Fig. 4 - Croquis de graines de six espèces montrant leurs tailles respectives et les différentes formes et tailles d'aréoles, et vue en bout d'une graine d'une espèce montrant ses diverses parties. L'aréole (a) est délimitée par une mince ligne appelée pleurogramme (p)
(A) A. albida (B) A. aneura (C) A. caven (D) A. nilotica (E) A. senegal (F) A. tortilis (G) Vue en bout de graine d'A. caven montrant le strophiole (s), le hile (h) et le micropyle (m)

Fig. 5

Fig. 5 - Répartition naturelle des six espèces d'Acacia, et limites géographiques (- . - . -) de la répartition du genre

Fig. 6A

Fig. 6B

Fig. 6C

Fig. 6 - Répartition mondiale approximative des trois sous-genres d'Acacia
(A) Sous-genre Acacia (à l'exclusion d'A. farnesiana en Australie) (B) Sous-genre Aculeiferum (C) Sous-genre Heterophyllum

2.32 Origine des acacias

La recherche de l'origine et de la dispersion d'un genre botanique aussi largement répandu dans le monde est un sujet propre à exciter la curiosité. Les informations d'ordre biogéographique sont intéressantes pour le récolteur, et peuvent influer sur son choix des lieux de récolte lorsqu'il constitue une collection de provenances, et sur l'interprétation qu'il fera des résultats d'essais de provenances. Raven et Axelrod (1974) et Beadle (1981 a) émettent l'hypothèse que les formes ancestrales d'angiospermes et notamment d'acacias ont évolué dans les forêts tropicales de basse altitude de la partie occidentale du continent du Gondwana. Ces spéculations ont été étendues aux voies de dispersion à travers l'Afrique (Ross 1981) et l'Australie (Beadle 1981 a) après la rupture du Gondwana en continents séparés. Beadle (1981 a) suppose que quelques espèces étaient parvenues en Australie avant la séparation, et que leur évolution donna naissance à de nouvelles espèces qui se propagèrent vers le sud à partir de la zone tropicale du nord de l'Australie. Selon Tindale et Roux (1974), au contraire, c'est l'Australie orientale qui aurait été le centre d'origine des acacias australiens. Il n'est pas douteux qu'il y a eu une grande prolifération d'espèces en Australie même, dont plus de la moitié (486 espèces, dont 80 % sont endémiques) se trouvent aujourd'hui dans le sud-ouest de l'Australie-Occidentale (Hopper et Maslin 1978).

Certaines espèces ont pu être soumises à une dispersion sur de grandes distances. On a émis l'hypothèse que des acacias, tels que A. farnesiana, ont pu être transportés par la mer. Les oiseaux (Janzen 1969) sont susceptibles d'absorber et disperser les graines d'autres acacias, tels qu'A. caven. L'homme a à une époque récente transporté des semences de nombreux acacias vers d'autres pays (Berg 1977).

2.4 Ecologie

De brèves notes sur l'écologie des acacias australiens ont été présentées par Pedley (1978), Johnson et Burrows (1981) et Beadle (1981 a, 1981 a). Ross (1979, 1981) a défini les caractéristiques écologiques générales des acacias africains. En Australie, le genre Acacia - dont le type représentatif est A. aneura - est caractéristique des régions climatiques aride et semi-aride, et est également commun dans une grande partie de la région subhumide. Il est moins représenté dans la région humide, et l'est rarement dans la forêt dense tropicale ou dans les formations herbacées. D'une manière générale, les acacias subafricains tolèrent les climats chauds et arides, chauds et humides, froids et arides, mais non froids et humides (Ross 1979).

Dans la zone aride d'Australie les acacias prédominent surtout sur des sols contenant une forte proportion de sable et de gravier dans leur profil, tels que dunes, plaines sableuses ou crêtes rocheuses, où il forment des forêts claires ou des “scrubs” (Beadle 1981 b). Dans les zones semi-arides ils remplacent les eucalyptus dans des stations particulières telles que les sols superficiels à texture fine situés sur les crêtes. Une caractéristique intéressante des acacias est leur aptitude à coloniser des sols de basse fertilité, ce qui est dû à leur capacité de fixer l'azote atmosphérique grâce à leur association symbiotique avec les Rhizobium, bactéries se trouvant dans les nodosités des racines (Beadle 1981 b).

Enfin il faut noter la remarquable association réciproque qui existe entre des fourmis et certaines espèces du sous-genre Acacia en Amérique Centrale et en Afrique (Janzen 1969). Les fourmis vivent dans des épines stipulaires enflées et partiellement creuses. Elles tirent des protéines et des huiles d'organes appelés corps beltiens (extrémités modifiées de folioles) et des sucres des nectaires extra-floraux hupertrophiés (Ross 1981). Les fourmis protègent en retour la plante contre les insectes phyllophages. Les principaux genres de fourmis en cause sont Pseudomyrmex en Amérique, et Crematogaster en Afrique. Il n'existe pas de relations particulières analogues entre acacias et fourmis en Australie, bien qu'on y trouve de nombreux genres de fourmis. La présence de fourmis peut poser de sérieux problèmes pour la récolte des semences.


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