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Annexe 1. Fondements institutionnels de l’approche écosystémique de la pêche


L’approche écosystémique de la pêche ne tourne pas le dos aux modèles passés de gestion halieutique. Elle en est plutôt une nouvelle phase dans un processus en évolution constante. Les principes qui sous-tendent cette approche figurent déjà dans de nombreux instruments de droit international et national. La présente annexe donne, dans l’ordre chronologique, la liste des plus remarquables d’entre eux.. Elle montre comment des capacités institutionnelles se sont progressivement constituées à mesure que progressaient la connaissance du fonctionnement des écosystèmes et la création d’institutions humaines pour les préserver ou les utiliser. Certains des principes essentiels et des instruments intéressant la pêche sont succinctement passés en revue pour montrer que l’approche écosystémique est déjà bien établie dans les politiques générales et les bases juridiques convenues.

1. L’approche écosystémique et la notion de développement durable

L’approche écosystémique prend ses racines dans deux processus institutionnels historiques directement liés à la formation du concept de développement durable.

1. En 1972, la Conférence des Nations Unies sur l’environnement humain (Stockholm, Suède) qui portait sur les aspects environnementaux de la gestion des ressources naturelles, a souligné le droit qu’avait l’humanité de modifier l’environnement pour son développement, et les dangers que recelait la capacité énorme qu’elle montrait à le faire. Elle a mis en exergue les notions fondamentales de la gestion des écosystèmes en général et de la gestion écosystémique de la pêche en particulier: participation de la population, caractère limité des ressources, dégradation de l’environnement, démographie, planification et gestion, institutions, rôle de la science et de la technologie, coopération internationale et équité.

2. La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982 (appelée, dans la suite du texte, Convention de 1982), entrée en vigueur en 1994, a jeté les bases de la gestion classique et du développement de la pêche. La section qu’elle contient sur la pêche fait référence au rendement constant maximum, qui correspond au niveau auquel la production biologique (c’est-à-dire le taux de croissance et la capacité de renouvellement) est maximale, reconnaissant qu’il était influencé par des facteurs environnementaux. Dans la partie V de la Convention, l’article 61.3 dit que les mesures de conservation des ressources «visent aussi à maintenir ou rétablir les stocks des espèces exploitées à des niveaux qui assurent le rendement constant maximum, eu égard aux facteurs écologiques et économiques pertinents, (...) et compte tenu (...) de l’interdépendance des stocks (...)». L’article 61.4 tient compte des mesures de conservation dans la zone économique exclusive en énonçant que:”l’Etat côtier prend en considération leurs effets sur les espèces associées aux espèces exploitées ou dépendant de celles-ci afin de maintenir ou de rétablir les stocks de ces espèces associées ou dépendantes à un niveau tel que leur reproduction ne risque pas d’être sérieusement compromise». L’article 63 traite de la collaboration nécessaire pour le partage de populations d’espèces associées. L’article 119.1.b) est semblable à l’article 61.4 mais pour les ressources de haute mer. La partie XII de la Convention est consacrée à la protection et à la préservation du milieu marin. L’article 192 prévoit que «les États ont l’obligation de protéger et de préserver le milieu marin» et l’article 193 que «les États ont le droit souverain d’exploiter leurs ressources naturelles selon leur politique en matière d’environnement et conformément à leur obligation de protéger et de préserver le milieu marin».

Cette double origine de l’approche écosystémique apparaît encore dans les deux grands piliers de l’approche, dans les différentes formes sous lesquelles elle a déjà été adoptée: i) l’élimination de la surcapacité et de la surexploitation, la régénération des stocks épuisés et la protection des espèces associées ou dépendantes; et ii) le maintien des habitats de l’écosystème, des relations fonctionnelles entre les composantes et de la production biologique.

Le lien entre le développement durable et l’approche écosystémique est illustré par la définition d’une pratique durable de la pêche donnée par le Comité américain de gestion des écosystèmes pour une pratique durable de la pêche marine, à savoir: «des activités de pêche qui ne provoquent ni n’entraînent de changements indésirables dans la productivité biologique et économique, la diversité biologique ou la structure et le fonctionnement des écosystèmes d’une génération humaine à l’autre. La pêche est durable lorsqu’elle peut être pratiquée à longue échéance avec un niveau acceptable de productivité biologique et économique sans provoquer de modifications écologiques qui excluent certaines options pour les générations futures» (Conseil national de la recherche, États-Unis, 1999).

L’expression apparentée de «développement écologiquement durable» a été adoptée au début des années 1990 en Australie pour souligner l’importance de l’environnement pour le bien-être humain à long terme et faire en sorte que les problèmes environnementaux, sociaux et économiques soient traités selon une approche équilibrée. Le développement écologiquement durable a été défini comme résultant du souci d’utiliser, de préserver et de développer les ressources de la communauté de manière à maintenir les processus écologiques dont dépend la vie et à accroître la qualité totale de la vie au présent et à l’avenir[12]. Cette approche du développement a trois objectifs principaux: i) accroître le bien-être et améliorer la vie des personnes et de la collectivité en suivant une voie de développement économique qui préserve la prospérité des générations futures; ii) respecter une certaine équité au sein des générations présentes et entre celles-ci et les générations futures; et iii) protéger la diversité biologique et maintenir les processus écologiques essentiels ainsi que les systèmes biotiques.

2. La voie institutionnelle de la gestion écosystémique de la pêche

Plusieurs événements internationaux, outre la Conférence des Nations Unies de 1972 sur l’environnement humain et la Convention de 1982, ont contribué à faire émerger progressivement le modèle écosystémique de gestion halieutique.

1. La Conférence technique de la FAO sur la pollution des mers et ses effets sur les ressources biologiques et la pêche (Rome, 1970) a donné la première l’alarme sur les sources de pollution et de dégradation des pêcheries que constituent certaines activités basées à terre.

2. La Conférence d’experts sur l’aménagement et le développement des pêches, organisée par la FAO à Vancouver, au Canada, en 1972, a mis l’accent à la fois sur les problèmes de surexploitation halieutique et de dégradation de l’environnement par des sources autres que la pêche. Elle invitait par ailleurs les pays à adopter de nouvelles méthodes de gestion fondées sur la précaution et le règlement des problèmes de la pêche multispécifique. Elle proposait d’intégrer la nouvelle gestion halieutique dans le cadre plus large de l’aménagement des océans.

3. La Convention de 1980 sur la conservation de la faune et la flore marines de l’Antarctique est habituellement considérée comme le précurseur de l’approche écosystémique de la pêche. Aux termes de ses dispositions, l’exploitation et les activités associées doivent être menées conformément aux principes de conservation suivants: i) prévenir la diminution du volume de toute population exploitée en deçà du niveau nécessaire au maintien de sa stabilité et, à cette fin, ne pas permettre que ce volume descende en deçà du niveau proche de celui qui assure l’accroissement maximum annuel net de la population; ii) maintenir les rapports écologiques entre les populations exploitées, dépendantes ou associées des ressources marines vivantes de l’Antarctique et reconstituer leurs populations exploitées aux niveaux définis à l’alinéa i); et iii) prévenir les modifications ou minimiser les risques de modifications de l’écosystème marin qui ne seraient pas potentiellement réversibles en deux ou trois décennies, compte tenu de l’état des connaissances disponibles en ce qui concerne les répercussions directes ou indirectes de l’exploitation, de l’effet de l’introduction d’espèces exogènes, des effets des activités connexes sur l’écosystème marin et de ceux des modifications du milieu, afin de permettre une conservation continue des ressources marines vivantes de l’Antarctique.

4. La Commission mondiale sur l’environnement et le développement (1984-1987) et le Rapport Brundtland qui en est issu (Notre avenir à tous, Commission Brundtland, 1987) ont continué à développer la notion de développement durable. Le rapport soulignait, entre autres choses, les notions d’équité entre générations, d’utilisation durable, d’études environnementales préalables, de consultation préalable, de précaution et de responsabilité et de coopération au sujet des problèmes internationaux d’environnement et de ressources naturelles.

5. La Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement (CNUED, 1992) a achevé ces travaux et a créé le plan Action 21 comme base de mise en oeuvre. La Conférence a abouti à l’adoption de plusieurs conventions et accords qui présentent un rapport avec l’approche écosystémique, tels que la Convention cadre sur le changement climatique, la Convention sur la diversité biologique et l’Accord des Nations Unies sur les stocks de poisson. La Déclaration de Rio met les êtres humains «au centre des préoccupations» (principe n° 1) et reconnaît le droit souverain des États d’exploiter leurs ressources (principe n° 2) ainsi que leur devoir de le faire sans causer de dommages à l’environnement au-delà de leur ZEE (principe n° 2). Elle reconnaît, entre autres choses, la nécessité: de ménager les besoins des générations futures (principe n° 3), d’intégrer la protection de l’environnement dans le développement (principe n° 4), d’éliminer les modes de production et de consommation non viables (principe n° 8), d’encourager la participation de la population (principe n° 10), d’appliquer largement le principe de précaution (principe n° 15), d’internaliser les coûts de protection de l’environnement (principe n° 16 - principe du pollueur-payeur), de réaliser des études d’impact sur l’environnement (principe n° 17), de reconnaître le rôle des femmes (principe n° 20) et celui des communautés autochtones (principe n° 22), et de résoudre pacifiquement les différends (principe n° 26).

6. Le plan Action 21 (CNUED, 1992) préconise une approche écosystémique de la gestion des océans. Le chapitre 17 préconise «l’adoption de nouvelles stratégies de gestion et de mise en valeur des mers et océans et des zones côtières, stratégies qui doivent être intégrées et axées à la fois sur la précaution et la prévision». Le plan reconnaît que l’utilisation des ressources marines et la protection de l’environnement sont indissociables et que la gestion intégrée est nécessaire aux deux. Il traite en détail de la Gestion intégrée et du développement durable des zones côtières (Programme A), de la protection du milieu marin (Programme B), et de l’utilisation durable et la conservation des ressources marines biologiques en haute mer (Programme C) ainsi que dans les zones relevant de la juridiction nationale (Programme D). Il aborde également les incertitudes relatives à la gestion du milieu marin et au changement climatique (Programme E). Les programmes C et D présentent un intérêt particulier pour la pêche. Ils prévoient, entre autres choses, le renforcement de la gestion classique (pour éliminer la surexploitation) et la gestion multispécifique des espèces et celle des espèces associées et dépendantes, les relations entre populations, la régénération des stocks épuisés, l’amélioration de la sélectivité et la réduction des rejets, la protection des espèces et des habitats vitaux, l’interdiction de la pêche destructrice et le rôle de la science.

7. La Convention de 1992 sur la diversité biologique définit les principes fondamentaux de la gestion des usages multiples de la biodiversité. Elle met l’accent sur la conservation de la diversité biologique, l’utilisation durable de ses composantes et le partage juste et équitable des avantages. La Convention prévoit le droit des parties d’exploiter et d’utiliser les ressources biologiques, mais aussi le devoir de gérer les activités susceptibles de menacer la biodiversité, quel que soit l’endroit où se produisent leurs effets, et celui de coopérer lorsqu’ils se produisent au large. A cet égard, la Convention est compatible avec la Convention de 1982 et va dans le même sens. Elle la complète et la renforce en prévoyant l’application des buts de la conservation et de l’utilisation durable aux ressources marines en deçà de la ZEE, où les obligations de conservation ne sont pas expressément formulées dans la Convention de 1982 pour ce qui concerne la bande de 12 milles marins, les eaux intérieures ou les espèces sédentaires du plateau continental (article 22.1 de la Convention). La Convention développe aussi la Convention de 1982 en ce qui concerne les ressources génétiques et les organismes génétiquement modifiés. D’autre part, elle recommande la création d’un système de zones marines protégées, considérée comme une mesure essentielle pour préserver la diversité biologique. La «diversité biologique» y est définie comme la «variabilité des organismes vivants de toute origine y compris, entre autres, les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie» (article 2). Cette définition inclut la diversité des écosystèmes (la variété et la fréquence d’écosystèmes différents), la diversité des espèces (fréquence d’espèces différentes) et la diversité génétique (fréquence et diversité de gènes et/ou de génomes différents dans les espèces). La diversité biologique est importante du point de vue de l’approche écosystémique parce qu’elle est en rapport avec la résilience, capacité de résister à un choc ou de revenir à un état initial une fois le choc passé. Il est donc intéressant pour la pêche de maintenir, voire de favoriser la diversité dans les habitats exploités et entre les espèces, à titre «d’assurance» contre les conséquences négatives de changement futurs.

8. Le Mandat de Djakarta sur la diversité biologique marine et côtière (1995; CDP 2, Décision II/10) a encore développé «l’approche écosystémique» adoptée par la Convention sur la diversité biologique en mettant l’accent sur les zones protégées, l’approche de précaution, les connaissances scientifiques, le savoir indigène et la participation des intéressés. Les buts du Mandat sont, entre autres, la gestion intégrée, le développement de l’approche écosystémique, l’évaluation des effets des zones marines protégées, l’étude et la réduction des effets de l’aquaculture marine et la connaissance des causes et des effets de l’introduction d’espèces allogènes.

9. L’Accord de 1995 sur les stocks de poissons a pour but la conservation à long terme et l’utilisation durable des ressources marines vivantes, reconnaissant dès le départ «la nécessité d’éviter de causer des dommages au milieu marin, de préserver la diversité biologique, de maintenir l’intégrité des écosystèmes marins et de réduire au minimum le risque d’effets à long terme ou irréversibles des opérations de pêche». L’Accord porte sur l’approche de précaution, la protection de la diversité biologique et l’utilisation durable des ressources halieutiques. Il appelle les États participants entre autres choses à: i) protéger la diversité biologique du milieu marin; ii) adopter des mesures pour garantir la durabilité à long terme des stocks de poissons et favoriser leur exploitation optimale; iii) tenir compte des facteurs environnementaux et économiques; iv) adopter une approche des écosystèmes consistant à tenir compte des espèces dépendantes et associées; et v) prendre des mesures pour empêcher ou éliminer la surexploitation et la surcapacité de pêche. Il décrit pour la première fois de manière détaillée l’approche de précaution et les moyens de l’appliquer en spécifiant des points de référence et les mesures de gestion qui doivent être déclenchées en fonction de ces points de référence. Il préconise l’application du principe de compatibilité selon lequel les mesures de gestion prises dans des zones relevant de juridictions différentes doivent être compatibles dans toute la zone de répartition des stocks.

10. La Déclaration de Kyoto (1995) sur la contribution durable des pêches à la sécurité alimentaire souligne l’importance de la pêche comme source de nourriture pour la population mondiale. Elle expose plusieurs principes centrés sur le développement durable des ressources halieutiques en vue de maintenir la sécurité alimentaire. Les participants conviennent de prendre des mesures immédiates, entre autres pour «conduire des évaluations intégrées des pêcheries afin d’évaluer les opportunités et de renforcer la base scientifique pour la gestion multispécifique et des écosystèmes... ainsi que pour minimiser les pertes après captures...».

11. La Déclaration de Reykjavik sur la pêche responsable dans l’écosystème marin porte directement et expressément sur la prise en considération d’aspects plus nombreux de l’écosystème dans la gestion classique de la pêche. Se référant à la Convention de 1982, à la CNUED et au Code de conduite, elle reconnaît la nécessité de «prendre en compte les répercussions de la pêche sur les écosystèmes marins et celles des écosystèmes marins sur la pêche”, et confirme que «l’objectif poursuivi en incluant des considérations relatives à l’écosystème dans la gestion de la pêche est de contribuer à la sécurité alimentaire à long terme et au développement humain et d’assurer une préservation et une utilisation efficace de l’écosystème et de ses ressources». Elle reconnaît «l’interaction complexe entre les pêches et les autres composantes de l’écosystème marin”, mais souligne que le fait d’inclure des considérations relatives à l’écosystème dans la gestion halieutique pourrait «améliorer les performances du secteur». Elle préconise l’incorporation de considérations relatives à l’écosystème «telles que les relations entre proies et prédateurs”, ainsi qu’une meilleure connaissance de «l’impact des activités humaines sur l’écosystème». Elle souligne le rôle de la science et les effets des activités autres que la pêche, habituellement basées à terre. La déclaration de Reykjavik préconise, entre autres choses: i) l’introduction immédiate de plans de gestion comportant des incitations à utiliser durablement les écosystèmes, ii) le renforcement de la gouvernance, iii) la prévention des effets indésirables des activités autres que la pêche sur les écosystèmes marins et la pêche, iv) des progrès scientifiques pour justifier l’intégration de considérations relatives à l’écosystème dans la gestion (y compris l’approche de précaution), v) la surveillance des interactions entre la pêche et l’aquaculture, vi) le renforcement de la coopération internationale, vii) le transfert de technologie, viii) la suppression des distorsions commerciales, ix) le recueil d’informations sur les régimes de gestion et x) l’élaboration de directives.

12. Le Sommet mondial sur le développement durable de Johannesburg, Afrique du Sud (2002), a adopté une Déclaration politique et un plan d’application. Dans la Déclaration, les Chefs d’État sont «d’accord pour protéger et restaurer l’intégrité du système écologique de notre planète, en insistant sur la protection de la diversité biologique, et des mécanismes naturels qui commandent toute vie sur terre, (...) Le ralentissement dans des proportions appréciables du rythme actuel de disparition de la biodiversité au niveau national et au niveau mondial est la première chose à faire pour la pérennité de tous les êtres». La pertinence pour la pêche est évidente. Dans le plan d’application, il a été convenu

3. Éléments de l’approche écosystémique figurant dans le Code de conduite

On s’accorde généralement à reconnaître le Code de conduite comme la référence opérationnelle la plus complète pour la gestion des pêches car il combine de nombreux aspects de la pêche avec les dispositions de conventions et instruments concernant l’environnement. Il contient un certain nombre de dispositions qui, prises ensemble, donnent une bonne indication des principes écosystémiques, des préoccupations et des conseils en matière de politiques qui peuvent être utilisés pour élaborer une approche écosystémique de la pêche. Il s’agit des dispositions suivantes:

1. Protection des écosystèmes et des habitats: Le Code parle de «respect» des écosystèmes (Introduction). Reconnaissant la nature transfrontière des écosystèmes (6.4), il spécifie que les États devraient les «conserver”, les «protéger» et les «préserver» [(6.1, 6.6, 7.2.2 d), 12.10)] pour en «maintenir l’intégrité» (9.3.1), y compris contre les effets de l’aquaculture (9.2). Il encourage la recherche sur les écosystèmes (2.1) et préconise la réalisation d’études sur les effets de la pêche, de la pollution, d’autres altérations des habitats et du changement climatique (12.5). Le Code traite de la protection des habitats [(6.8, 7.2.2 d)] et de la nécessité de «préserver» (12.10) les habitats aquatiques: il préconise la remise en état de ceux qui sont dégradés (6.5, 7.6.10) et la réalisation de recherches sur les effets de leur altération sur l’écosystème (12.5) et d’études préalables des effets possibles de nouvelles pêcheries ou de l’introduction de nouvelles techniques (8.4.7, 12.11).

2. Rôle des facteurs environnementaux. Il est dit, dans l’Introduction du Code, qu’il «prend en considération l’environnement». Ses dispositions préconisent la protection de l’environnement (2 g), 6.5 et 8.7), la conduite de recherches sur les facteurs environnementaux [(2 j)] et la prise en considération des «données scientifiques les plus fiables disponibles» (6.4) même lorsque ces informations scientifiques sont insuffisantes (6.5). Le Code préconise d’exercer la pêche «en prenant dûment en considération» l’environnement (8.4.1), qu’il convient de surveiller en étudiant les effets qu’il subit (10.2.4) Conformément à la Convention de 1982, il reconnaît l’influence des facteurs environnementaux sur le rendement constant maximal (7.2.1)

3. Effets de la pêche sur l’environnement. Le Code prescrit de réduire autant que possible les effets de l’exercice de la pêche (y compris l’aquaculture et les récifs artificiels) [(6.7, 6.19, 8.9 d), 9.1.5)] et recommande la conduite d’études sur ces effets (8.11) pour les évaluer (9.15) et les surveiller (9.15). Il vise des activités «écologiquement durables» (9.1.3), et préconise de réduire la pollution et l’emploi de produits chimiques (9.4) et d’employer des méthodes de transformation, de transport et de stockage qui respectent l’environnement (11.1.7), et de réglementer les effets sur l’environnement des pratiques après capture (11.1.2). Le Code mentionne la nécessité de procéder à des études préalables et à un suivi des effets des engins (12.11), l’interdiction des pratiques destructrices (8.4.2) et la mise au point d’engins sans risque pour l’environnement. Il aborde également, quoique brièvement, le problème d’une utilisation rationnelle ou optimale de l’énergie [(8.6 et 11.8 c)].

4. Effets sur l’environnement d’autres utilisateurs et d’autres sources de pollution. Le Code mentionne aussi les utilisateurs autres que la pêche (1.2, 10.1.5) et admet les effets des autres activités humaines sur la pêche. Il recommande d’éviter les différends ou de les régler (10.1.4, 10.1.5). Il reconnaît aussi qu’il convient d’évaluer les effets produits par d’autres utilisateurs (7.2.3) et préconise la conduite de recherches sur l’environnement (8.4.8, 12.10). Il y a lieu d’éviter que la pêche n’aggrave les effets néfastes de phénomènes naturels de l’environnement (7.5.5) et de remettre en état les ressources dégradées par d’autres usages (7.6.10). Il préconise spécifiquement la tenue de consultations avec les autorités chargées de la pêche avant que des décisions soient prises au sujet de l’abandon, dans l’écosystème aquatique, de structures artificielles (plates-formes pétrolières, par exemple). Le Code contient aussi un article entièrement consacré à l’intégration de la pêche dans l’aménagement des zones côtières (1.1, 1.3, 6.9, 8.11.3). Il préconise une réduction de la pollution (7.2.2) par la mise au point de dispositifs d’élimination des déchets (par exemple pour le pétrole, les détritus, les engins déclassés) dans les ports et les lieux de débarquement [(8.7.4, 8.9 c)]. Le déversement de déchets en mer par les bateaux de pêche devrait être conforme aux prescriptions de la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires (MARPOL) (8.7.4) concernant l’incinération à bord (8.7.2). Il convient de réduire les rejets dans l’atmosphère (8.8), y compris les rejets de gaz d’échappement (8.8.1) et le dégagement d’ozone, de supprimer les produits de réfrigération classiques (chlorofluorocarbones) (8.8.3) et d’utiliser des produits de remplacement pour la réfrigération des navires (8.8.4).

5. Biodiversité et conservation des espèces menacées. Le Code parle de «respect» de la biodiversité (Introduction). Il préconise de la maintenir (6.1), de la protéger [(7.2.2 d)], de la préserver (12.10) et de la conserver (9.2.1), mentionnant la diversité génétique (9.3.1, 9.1.2) et la nécessité de réduire autant que possible les effets de la pêche sur la biodiversité (9.2.1) et d’effectuer des études sur les effets des engins de pêche. Il reconnaît également l’existence d’espèces menacées d’extinction qu’il convient de protéger (7.2.2) en réduisant dans toute la mesure possible les effets qu’elles subissent du fait de la pêche (7.6.9).

6. Gestion multispécifique. Le Code opère une distinction entre les espèces exploitées et les espèces non exploitées appartenant au même écosystème, espèces «visées» d’une part et «non visées» d’autre part, espèces «dépendantes et associées» (conformément à la Convention de 1982). En ce qui concerne les espèces dépendantes et associées, le Code préconise d’étudier leur comportement (12.10), leur conservation (6.2, 6.5), l’absence de données scientifiques adaptées (6.5, approche de précaution), la mortalité accidentelle due à la pêche, l’étude et la réduction maximale des captures (7.2.2, 7.6.9, 6.6) ou des effets de la pêche (6.6, 7.2.2). Il traite de la conservation de la structure des populations (6.1), de leur reconstitution lorsqu’elles sont endommagées (6.3) et de l’analyse des effets qu’ont sur elles les facteurs environnementaux (7.2.3). Il mentionne également la nécessité de mener des études scientifiques sur les relations d’interdépendance entres les populations (7.3.3).

7. Zones côtières. Le Code reconnaît que ces zones géographiques ont une importance capitale pour une gestion écosystémique de la pêche. Il prévoit qu’elles devraient être protégées [(2 g)] et contient un article entièrement consacré à l’intégration de la pêche dans l’aménagement des zones côtières (1.1, 1.3, 6.9, 8.11.3, 10.2.4).

8. Sélectivité, pêche fantôme, prises accessoires, rejets et déchets. La sélectivité insuffisante des engins de pêche est un problème écologique central qui a des effets sur les espèces visées et sur les autres, sur les prises accessoires, les rejets et les déchets. Le Code consacre une section entière à ce problème (8.5), préconisant l’utilisation d’engins plus sélectifs (7.6.9, 8.4.5) et le renforcement de la collaboration internationale pour améliorer la conception des engins (8.5.1, 8.5.4) et pour que soient arrêtées des normes de recherche en matière d’engins. Il préconise de réduire autant que possible les rejets (12.10) et les déchets (6.6, 7.2.2, 7.6.9) notamment en réduisant l’abandon et la perte d’engins (7.2.2).

9. Risques, incertitude et précaution. Conformément au Principe 15 de la Déclaration de Rio et à l’Accord de 1995 sur les stocks de poissons, le Code aborde la question de l’incertitude, des risques et de la précaution (7.5), et recommande que soit appliqué largement l’approche de précaution pour «préserver l’environnement aquatique» (6.5, 7.5.1) en tenant compte de diverses incertitudes (7.5.2, 10.23), en utilisant des points de référence (7.5.3), en adoptant des mesures prudentes pour les nouvelles pêcheries (7.5.4) et en évitant de soumettre à des pressions supplémentaires les stocks affectés naturellement par un phénomène néfaste de l’environnement (7.5.5). Le Code recommande également la conduite d’une étude d’impact préalable avant tout lancement d’une nouvelle pêcherie ou mise en service de nouveaux engins (8.4.7, 12.11).


[12] Commonwealth d’Australie, Stratégie nationale de développement écologiquement durable, Canberra, Service des publications du Gouvernement australien, 1992.

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