FAO au Cameroun

Des microprojets pour une meilleure gestion des emballages de pesticides au Cameroun

09/07/2020

A la faveur d’un projet pilote mené dans les villes de Garoua (région du Nord) et Loum (région du Littoral), les producteurs agricoles de ces localités et leurs environs ont expérimenté un processus de gestion des emballages vides de pesticides.

Au Cameroun, les quantités de pesticides importés connaissent une nette évolution depuis plusieurs années. De 15 200 tonnes en 2015, le pays a importé en 2018, 28 000 tonnes de pesticides[1] correspondant à la production d’un stock important d’emballages vides après usage. Si dans certaines agro-industries camerounaises dotées d’un protocole de pré destruction la gestion de ces emballages vides de pesticides est contrôlée, au niveau des exploitations paysannes, ils font souvent l’objet de diverses réutilisations notamment pour la conservation de produits alimentaires et des combustibles par les ménagères. Au Cameroun, la législation en vigueur[2] classe les emballages vides de pesticides dans la catégorie de déchets dangereux et leur gestion inappropriée peut présenter un risque réel sur la santé humaine et la destruction de l’environnement. Les Directives FAO/OMS[3] sur les options disponibles en matière de gestion des emballages vides de pesticides recommandent qu'un système de gestion soit mis en place pour garantir que les conteneurs de pesticides vides soient décontaminés par triple rinçage peu de temps après leur utilisation et ce avant toute forme d'élimination.  

C’est ainsi que dans le cadre de la mise en œuvre du projet « Elimination des polluants organiques persistants ( POP), des pesticides obsolètes et renforcement de la gestion rationnelle des pesticides au Cameroun »[4], l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) en partenariat avec le Ministère de l'environnement, de la protection de la nature et du développement durable (MINEPDED), ont élaboré deux projets pilotes de gestion des emballages vides de pesticides dans  les zones agro écologiques et culturelles du pays que sont les zone écologique Sahélienne (Région du Nord) et zone écologique forestière humide (Région du Littoral). Ces microprojets visaient le renforcement des capacités des agriculteurs membres des coopératives agricoles, aux techniques et principes de collecte et de gestion des emballages vides de pesticides. Cette première phase s’est fait suivre d’une étape pratique de collecte desdits emballages vides auprès des agriculteurs qui devaient par eux-mêmes, les retourner auprès des distributeurs et des points de collecte disposés à cet effet. Pour se faire, deux Accords ont été signés avec la Confédération nationale des producteurs de coton du Cameroun à Garoua et la Coopérative des planteurs honnêtes du Cameroun à Loum.

Dans leur mise en œuvre, les deux projets pilotes ont permis d’organiser vingt-cinq sessions de formation dans divers sites des villes de Garoua et Loum. 791 producteurs (186 femmes et 605 hommes) ont ainsi été formés sur la gestion des pesticides en général et celle de leurs emballages vides en particulier, avec un accent sur le triple rinçage. Dans la même lancée, deux mille posters illustrant le triple rinçage et les dangers liés à l’utilisation des emballages vides de pesticide à des fins domestiques ont été apposés devant les lieux de grandes fréquentations et points d’affichages dans les deux villes et leurs environs.

Pour ce qui est de la collecte à proprement parler, elle a permis de rassembler 2,6 tonnes d’emballages vides dans les deux villes. Ces déchets ont été compactés et entreposés dans le magasin central de la SODECOTON[5] dans la localité de Pitoa et à la Base Phytosanitaire de Nkongsamba dans la région du  Littoral. L’élimination de ces stocks se fera suivant une méthode respectueuse de l’environnement et sur la base des résultats de l’analyse des résidus préalablement effectuée sur un échantillon représentatif, conformément aux prescriptions du Code de conduite international sur la gestion des pesticides[6]. L’analyse des résidus permettra également de définir si le recyclage avec un risque minimal peut être envisagé pour certains déchets.

En termes de contraintes, la plus marquante est l’indisponibilité dans les deux zones pilotes, d’une machine qui permettrait de broyer les emballages vides de pesticides. Le défi principal ici réside dans l’appropriation de cette activité par tous les producteurs, car malgré les sensibilisations, certains d’entre eux continuent à conserver les emballages vides de pesticides. En fin de compte, la mise en œuvre de ces microprojets aura permis de sensibiliser les producteurs agricoles de Garoua et Loum sur les risques environnementaux et sanitaires liés à la manipulation des déchets de pesticides. Au regard de résultats obtenus, la FAO préconise la validation d’une stratégie nationale de gestion des emballages vides de pesticides et la mise en oeuvre d’un projet national éponyme, dont le mandat serait de collecter et traiter de facon écologique l’ensemble des déchets de pesticides au Cameroun.



[1] Source : base de données de la Sous-Direction de la réglementation des Pesticides (MINADER) : déclarations préalables à l’importation.

[2]Article 2 de la loi 89/027 du 29 décembre 1989 portant sur les déchets toxiques et dangereux.

[3] http://www.fao.org/publications/card/en/c/10c72761-d62e-4566-bbda-295d6b66bdba/.

[4] Projet financé par le Fonds pour l’environnement mondial (FEM) et visant à réduire l’impact négatif des rejets incontrôlés des pesticides obsolètes et des sites contaminés sur la santé publique et l’environnement, en favorisant une gestion saine des pesticides à l’avenir.

[5] La Société de développement du coton est une entreprise camerounaise d’État pour gérer la filière coton, dont le siège se trouve dans la ville de Garoua, dans le Nord Cameroun.

[6] Article 10 alinéa 7 du Code de conduite international sur la gestion des pesticides.