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1. Les intervenants dans la commercialisation des denrées alimentaires


1.1 Les opérateurs privés directs
1.2 Les opérateurs privés indirects
1.3 Les intervenants publics
1.4 Les opérateurs internationaux

Les intervenants dans la commercialisation des denrées alimentaires sont nombreux en Afrique, avec une action directe ou indirecte sur la filière selon leurs activités.

On distinguera trois catégories d’intervenants: les opérateurs privés directs, les opérateurs privés indirects, les opérateurs publics.

1.1 Les opérateurs privés directs


1.1.1 Les producteurs
1.1.2 Les commerçants
1.1.3 Les transporteurs
1.1.4 Les transformateurs
1.1.5 Les consommateurs

Ils sont ainsi dénommés car ils opèrent directement dans la filière. Appartiennent à cette catégorie, les producteurs, les commerçants, les transporteurs, les transformateurs et les consommateurs.

1.1.1 Les producteurs

Ils sont les premiers intervenants de la chaîne de commercialisation des produits vivriers. En effet, après avoir stocké la partie de leur production destinée à la consommation familiale, les producteurs vont sur les marchés hebdomadaires pour vendre les surplus. C’est cette quantité qui constituera le premier apport alimentaire destiné aux villes. C’est à ce niveau de la filière que démarre l’approvisionnement alimentaire des villes en produits locaux. La manière dont se déroule cette première mise en marché est à l’origine d’une pérennisation du processus d’approvisionnement des villes.

En général, ce sont les paysannes qui viennent vendre les produits sur les marchés hebdomadaires, les hommes n’intervenant que lorsque les quantités à transporter du village au marché sont relativement importantes (un sac de riz par exemple). Le produit est présenté dans de grandes bassines (riz, fonio, maís, arachide), d’autres en tas plus ou moins grands (manioc, oignons, ignames, beurre de karité). Les prix ne sont jamais fixés avant le marché; ils se forment pendant les négociations entre producteurs et acheteurs. S’ils sont trop bas, le processus d’approvisionnement est stoppé pour le produit concerné, c’est-à-dire que pour la prochaine campagne, les producteurs éviteront de produire des surplus. Ceci est particulièrement vrai pour les filières céréalières où le produit est avant tout cultivé pour la consommation familiale. Des surplus sont dégagés pour les villes uniquement si le prix est rémunérateur.

Pour les filières fruits et légumes, l’approche du producteur est un peu différente; tout d’abord, la production, dans les villages, est souvent aux mains des femmes. Elles produisent des condiments pour faire la sauce du repas familial, mais surtout pour vendre sur le marché et dégager des ressources qui serviront à acheter d’autres produits (viande/poisson, savon, allumettes, bougies, etc.). Aux abords des grandes villes, le maraîchage est aux mains des hommes (indépendants ou en coopératives) et représente, pour eux, l’activité agricole principale. La destination des produits est uniquement le marché.

Pour les fruits, ce sont surtout les hommes qui sont concernés et qui plantent des vergers de manguiers, d’orangers, de citronniers, de bananiers, etc. selon la région (sahélienne ou forestière) où l’on se trouve. La production est alors destinée principalement à être mise sur le marché.

Pour les filières de la viande et du poisson, on retrouve au stade de la production, respectivement, les éleveurs et les pêcheurs.

L’élevage est pratiqué principalement dans les pays soudano/sahéliens. Il s’agit d’un élevage extensif qui va de pair avec l’activité agricole dont vivent environ 70 pour cent des populations.

L’élevage porte sur les bovins, les ovins, les caprins, les porcins, les ânes et la volaille. Tous ces animaux sont produits pour la vente sur les marchés car, dans les villages, la consommation de viande est généralement réduite au minimum. Cependant, la mise sur le marché varie selon le type d’animal produit: les bovins doivent atteindre sept ou huit ans avant de faire l’objet d’une vente. De plus, le berger qui garde le troupeau n’est souvent pas propriétaire des animaux et doit se référer au propriétaire avant d’engager une vente. La décision de vendre est prise selon les besoins financiers des propriétaires qui considèrent, dans leur très grande majorité, que le bétail est «une banque sur pied», c’est-à-dire un moyen de placer ses économies.

Pour les ovins et les caprins, l’approche du propriétaire est un peu différente: c’est un produit de rapport annuel. Les grandes périodes de vente sont situées autour du Tabaski et des autres fêtes musulmanes et chrétiennes. Le producteur les met donc sur le marché à bétail à ce moment-là de l’année car la demande est très forte et les prix rémunérateurs.

Pour le producteur de porcs et de volaille, la production est entièrement destinée à la vente dans les plus brefs délais. Ce type d’élevage se pratique surtout autour des grandes villes.

C’est dans les marchés hebdomadaires des régions rurales que les éleveurs négocient le bétail sur pied et la volaille vivante. Leurs principaux clients sont les bouchers. Les animaux sont vendus non pesés.

Le poisson fait l’objet d’une grande consommation dans les villes africaines. Il est consommé frais ou séché/fumé. Dans certaines régions situées sur la côte maritime ou dans la vallée des fleuves, le poisson est la base de l’alimentation. Ce poisson provient de l’activité de deux types de producteurs: les pêcheurs industriels et les pêcheurs traditionnels.

La pêche industrielle est le fait de grandes sociétés publiques ou privées qui possèdent des bateaux de pêche et des installations frigorifiques. Ces sociétés ravitaillent les marchés locaux et font aussi de l’exportation vers l’Europe. Des pays, comme le Sénégal et la Mauritanie, ont relativement bien développé la pêche industrielle qui représente une part importante dans la balance commerciale.

La pêche artisanale représente l’activité de la majorité des producteurs du secteur pêche. Elle est pratiquée en mer, dans les fleuves, les lacs et les rivières, selon la situation géographique des pays. Les prises portent sur plusieurs espèces de poissons dont la carpe, la sole, la daurade, le silure et le capitaine. Cette activité est destinée en priorité à nourrir la famille, mais la production de surplus, souvent importante à cause de l’existence d’un marché porteur, fait de cette activité la ressource principale pour le producteur. Dans certains pays, les pêcheurs constituent une vraie caste à l’intérieur de laquelle la profession se perpétue de père en fils; ainsi en est-il des Somonos de la Haute Guinée et des Bozos du Mali.

1.1.2 Les commerçants


1.1.2.1 Les collecteurs
1.1.2.2 Les grossistes
1.1.2.3 Les importateurs
1.1.2.4 Les détaillants

La catégorie des commerçants est composée de nombreux opérateurs dont les rôles, bien définis dans la théorie, se confondent souvent sur le terrain en fonction des opportunités du marché. Cela provoque généralement une impression de confusion lorsqu’on étudie les filières des produits, et pose quelques problèmes dans l’application des réglementations nationales.

1.1.2.1 Les collecteurs

Les collecteurs constituent le deuxième maillon de la chaîne d’approvisionnement en produits agricoles nationaux. Ils agissent le plus souvent pour le compte des grossistes et semi-grossistes qui mettent à leur disposition des ressources financières pour les achats. Ils peuvent également agir pour leur propre compte, mais leur surface financière est alors très petite. Très souvent, ils revendent en contrepartie des produits manufacturés de première nécessité comme le sel, le sucre, le savon et l’huile. Dans certains pays, les collecteurs sont des femmes appelées «dioula mousso». Ils ont une bonne connaissance du terrain et des producteurs, et détiennent les meilleures informations sur la qualité, les quantités, les prix des produits.

Pour les filières céréalières et de fruits et légumes, si le lieu d’achat privilégié du collecteur reste le marché hebdomadaire qui est par excellence le lieu de rencontre avec les paysans venus de divers villages, il n’est pas exclu de voir certains de ces commerçants se déplacer de village en village pour y acheter les produits. Ils stockent leurs achats dans une case et, lorsque la somme d’argent qu’ils possèdent est épuisée, ils reviennent en ville pour louer un camion afin de ramasser les produits collectés. Cette fonction est la plupart du temps assurée par de petits commerçants. Cependant, il arrive que des groupements agricoles ou des paysans eux-mêmes s’impliquent dans cette activité. Lors de la revente, le collecteur qui agit pour son propre compte, a plusieurs façons de revendre les produits collectés: il peut avoir pour clients aussi bien les grossistes des marchés urbains que les détaillants. Quelquefois, il peut même faire le détaillant lui-même.

Dans la filière viande, à ce stade, on rencontre également des collecteurs. Cependant, pour le bétail destiné aux petites villes de provinces, ces collecteurs se confondent avec les bouchers qui assument aussi le rôle de grossiste et de détaillant.

Les collecteurs s’approvisionnent sur les marchés de collecte du bétail ou bien directement au niveau des éleveurs et revendent, soit sur les marchés de redistribution auprès de négociants en bétail, soit sur les marchés de consommation, directement auprès des bouchers des grandes villes.

Pour le poisson, les circuits du frais sont très courts: les collecteurs qui achètent aux producteurs/pêcheurs sont souvent des femmes qui revendent directement sur les marchés de consommation dans les grandes villes.

Par contre, pour le poisson frais qui est fumé et séché, les possibilités de stockage plus longues permettent un circuit de revente beaucoup plus important. Dans ce cas, des collecteurs passent dans les villages de pêcheurs ou dans les marchés hebdomadaires pour acheter, puis ils vont revendre, soit directement sur le marché consommateur, soit sur des marchés d’échanges où le poisson est alors destiné aux régions qui ne produisent pas de poisson (souvent à l’exportation). Dans ce cas, beaucoup d’intermédiaires sont alors nécessaires pour approvisionner la destination finale.

1.1.2.2 Les grossistes

Ce sont les commerçants des villes et des grands centres ruraux qui opèrent le groupage, le stockage et la revente des produits collectés auprès des producteurs. Ils sont grossistes ou semi-grossistes selon leurs moyens financiers et disposent généralement de locaux de stockage dans les agglomérations urbaines et sur les places de marchés ruraux. Quelquefois, ils sont propriétaires de moyens de transport (camionnettes, camions de 10 tonnes).

Travaillant avec des fonds propres, ils n’empruntent pas aux banques car ils ne présentent pas suffisamment de garanties pour l’accès aux crédits et même s’ils ont parfois les garanties nécessaires, ils ignorent les procédures pour constituer un dossier de crédit bancaire.

Les grossistes de produits céréaliers sont, pour la plupart, multiproduits pour étaler les risques financiers: à côté des céréales locales, ils traitent le plus souvent les produits d’importation (riz, farine de blé, produits manufacturés) et d’autres produits du cru comme la cola, l’huile de palme, le piment sec, etc. Ces commerçants vendent le plus souvent par sacs ou au poids. Leurs clients sont des fonctionnaires, d’autres commerçants, et des détaillants des marchés. Leur activité peut aussi s’organiser autour des circuits beaucoup plus longs qui partent de leur ville à destination de grands centres urbains. Les produits peuvent être revendus plusieurs fois en passant toujours par les marchés et des magasins de stockage. Ces circuits se ramifient et deviennent denses dans les périodes de récoltes où certaines villes jouent un rôle particulier de marchés de groupage, tandis que d’autres (capitales nationales et capitales régionales) constituent des marchés de consommation et/ou des marchés de redistribution très importants.

Dans la filière viande, les chevillards jouent le rôle de grossistes. Ils interviennent généralement sur le marché du bétail de la ville où ils résident et sont habilités à abattre les animaux. De là, ils revendent la viande à des détaillants-bouchers à la sortie de l’abattoir. Certains de ces chevillards s’approvisionnent sur les marchés de regroupement à l’intérieur du pays.

1.1.2.3 Les importateurs

L’Etat, à travers des organismes spécialisés comme l’OFFNACER au Burkina, l’OPAM au Mali, les ERCOA en Guinée, etc., ou au travers de l’aide alimentaire internationale, est resté longtemps le principal opérateur de l’importation de céréales. A la faveur des mesures de libéralisation du commerce en rapport avec le Programme d’ajustement structurel, les commerçants privés commencent à participer à cette activité dans beaucoup de pays d’Afrique. Dans certains pays, comme la Guinée, cette fonction est complètement libéralisée et l’Etat n’importe plus rien depuis 1985; dans d’autres, comme le Burkina Faso, les importations de céréales (mil, sorgho, maïs, riz et blé) ont été libéralisées plus récemment (respectivement en 1992 et 1996); dans d’autres enfin, comme le Sénégal, la Caisse de péréquation veille encore à toute la procédure d’importation de céréales.

Cependant, des circuits informels animés par les opérateurs privés ont toujours assuré l’importation de quantités non négligeables de céréales à partir de pays voisins, même à l’époque où l’Etat maîtrisait encore le commerce. Par exemple, depuis de longues années, le maïs et le sorgho blanc quittent la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Togo pour les pays sahéliens du Mali, du Burkina Faso et du Niger. Ainsi, le mil importé du Ghana et du Mali approvisionne les marchés du Burkina Faso, le maïs du Mali est présent au Sénégal, le riz franchit les frontières de la Guinée pour le Mali, etc.

Les quantités de céréales qui transitent par ces circuits ne sont pas chiffrées en raison, justement, de leur caractère informel, mais elles sont appelées à être de plus en plus importantes à cause des mesures de libéralisation en cours dans les différents pays.

Les commerçants importateurs de céréales en provenance d’Asie, par exemple, participent aussi à la commercialisation des produits locaux: clients des acheteurs régionaux, ils organisent le transport et le stockage dans les centres-villes. Ils sont, le plus souvent, propriétaires de magasins de stockage et certains possèdent leur propre camion de transport. Cette catégorie d’opérateurs assure aussi, dans la plupart des pays, l’importation d’autres denrées alimentaires comme le sucre, la farine, l’huile, les produits laitiers et les conserves.

Pour la filière viande, les exportateurs et les importateurs de bétail sont devenus particulièrement importants depuis la dévaluation du franc CFA(FCFA). En effet, les pays de la côte, comme la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Togo, etc. qui importaient depuis de nombreuses années des viandes d’origine européenne, ont dû interrompre leurs importations à cause du renchérissement des prix. Depuis, les importations en provenance des pays du Sahel ont largement doublé, et les exportateurs et importateurs se sont multipliés, tant pour les destinations de la côte que pour l’axe Mali-Sénégal.

Les importateurs ivoiriens, par exemple, sont en fait de gros chevillards qui achètent directement dans les pays producteurs. Ils ont des accords avec des négociants maliens ou burkinabés qui leur envoient des animaux contre l’émission d’une lettre de crédit. Les importateurs sénégalais ont tendance à se déplacer directement sur les marchés maliens pour acheminer le bétail par train jusqu’à Dakar.

Pour la filière poisson, il existe des circuits d’importation particulièrement actifs. En effet, les pays continentaux qui n’ont pas beaucoup de fleuves (Burkina Faso, Niger, Tchad) satisfont une grande partie de leur consommation de poisson par l’importation des pays côtiers plus ou moins lointains (Côte d’Ivoire, Ghana, Sénégal). Le poisson séché et fumé du Mali va également au Burkina, tandis que la Gambie, la région maritime de Guinée, le Sénégal et la Guinée-Bissau sont les lieux d’achat du poisson destiné aux régions déficitaires de Guinée, du Mali, du Liberia et de la Sierra Leone.

1.1.2.4 Les détaillants

Bien que les collecteurs et les grossistes des villes peuvent vendre directement au client consommateur, ils assument alors un rôle de détaillant; il existe, dans tous les pays d’Afrique, une catégorie spécialisée dans la revente au détail qui est composée de femmes possédant des places fixes dans les marchés ou leurs alentours immédiats. En fait, il serait plus adéquat de parler, à ce niveau, de micro-détail car l’offre s’adapte à la demande et est fractionnée de telle manière que les quantités se mesurent à l’aide d’unités de mesure locale égales ou inférieures aux unités conventionnelles (litre ou poids).

Les revendeuses ou détaillantes ne se déplacent pas à l’intérieur du pays; elles ont pour fournisseurs les collecteurs, les grossistes des villes ou d’autres détaillants. Les femmes qui font ce travail ont des ressources financières extrêmement limitées. Leur fonds de roulement excède rarement FCFA 25000. C’est justement à cause de cette faiblesse de leurs moyens financiers qu’elles ne se rendent pas sur les marchés hebdomadaires et qu’elles sont obligées de rester en ville.

Pour la filière viande, les principaux détaillants sont les bouchers traditionnels. Ils achètent aux chevillards au niveau des abattoirs et revendent sur les marchés dans des conditions sanitaires trop souvent extrêmement insalubres. La viande est exposée aux mouches et au soleil jusqu’à ce qu’elle soit vendue. D’autres opérateurs au détail, sont:

Pour la filière poisson, la vente au détail du poisson frais se pratique au poids ou à l’unité, et de plusieurs manières:

Dans certaines villes comme Dakar, Conakry, Abidjan, il existe des ports de pêche artisanaux qui, le soir, à l’arrivée des barques, se transforment en marchés au poisson où les pêcheurs négocient leurs prises avec les commerçants et ménagères venus à leur rencontre. Une fois les transactions avec les pêcheurs terminées, certains commerçants s’installent sur les lieux pour commencer la revente.

Sur tous les marchés des villes d’Afrique, quelle que soit leur taille, des petits revendeurs, en majorité des femmes, présentent sur des étalages (petites tables ou nattes) du poisson fumé et séché en tas.

1.1.3 Les transporteurs

Les transporteurs ont un rôle très important dans l’acheminement des produits et des commerçants des zones de production vers les zones de consommation. En effet, exceptés les importateurs et quelques grossistes, les commerçants n’ont pas de moyens de transport propres.

Chaque ville est dotée d’une ou de plusieurs gares voitures d’où partent les taxis-brousse et les camions pour les marchés hebdomadaires. Les organisations professionnelles de transporteurs (ou syndicats) sont très développées dans les pays africains. Leur siège est généralement basé à la gare voiture d’où ils peuvent veiller à la bonne organisation des transports. Dans ces syndicats ne sont admis que les propriétaires de véhicules. Les chauffeurs non propriétaires ont quelquefois leurs propres syndicats.

Dans certains pays, une nouvelle catégorie d’opérateurs qui prend de plus en plus d’importance est apparue dans ce secteur: il s’agit des «locataires» ou des «coxeurs». Ils sont souvent d’anciens chauffeurs ayant beaucoup d’expérience et de connaissances sur les réalités du métier mais qui ne possèdent pas de véhicules. Le «locataire» loue le camion à son propriétaire et le gère ensuite à sa manière tout le temps que dure la location.

L’apparition des «locataires» est liée au fait que les propriétaires de véhicules sont souvent des commerçants qui ne peuvent délaisser leur commerce au profit des transports. Les chauffeurs embauchés ne sont pas suffisamment payés et, pour cela, ne rendent pas souvent des comptes justes aux propriétaires. La solution pour minimiser les problèmes et pour s’assurer d’un revenu confortable passe par l’intervention d’un «locataire».

1.1.4 Les transformateurs

L’activité de transformation concerne pratiquement tous les produits: céréales, légumes, fruits, tubercules, viande et poisson. Cette activité est indispensable pour adapter les produits du cru aux besoins des consommateurs. Dans l’approvisionnement des villes, elle représente un des maillons importants de la filière. Elle se passe à plusieurs niveaux: manuel, artisanal, semi-industriel et industriel.

La transformation manuelle est pratiquée par les femmes en milieu rural. Elle concerne aussi bien le décorticage que la mouture. On utilise le mortier et le pilon pour décortiquer les céréales ou réduire en farine les tubercules, la meule et la molette pour écraser les grains. Dans la majorité des pays africains, la plus grande partie de la consommation alimentaire passe par la transformation manuelle.

La transformation artisanale des céréales est réalisée à l’aide de moulins et de décortiqueuses. Elle permet la production de farine et l’extraction du son, produits qui permettent une préparation rapide et adaptée d’une nourriture conforme aux habitudes alimentaires des populations.

On parle de transformation semi-industrielle lorsque l’activité artisanale prend une certaine envergure en produisant de la farine de très bonne qualité et en permettant la création de véritables petites et moyennes entreprises (PME). Les unités de transformation de céréales sont restées longtemps localisées dans les grandes villes. Leur extension en milieu rural est essentiellement le fait des projets et des Organisations non gouvernementales (ONG).

La transformation industrielle des céréales à grande échelle a toujours concerné quelques sociétés publiques comme la Société de développement du riz (SODERIZ) de la Côte d’Ivoire, la Société nationale de collecte de riz du Burkina Faso (SONACOR), les brasseries et les grands moulins existant dans la plupart des pays africains.

Pour les légumes, la transformation est encore balbutiante malgré les poudres diverses de feuilles, d’oignons et de tomates séchées que l’on trouve sur les marchés. Les transformateurs sont encore de petits artisans sous-équipés et sans connaissance profonde de toutes les possibilités du marché.

Les transformateurs de viande n’existent pratiquement pas, sauf quelques rares bouchers-charcutiers installés dans les capitales de la sous-région. Cependant, au Mali, on commence à trouver de la viande séchée artisanalement et vendue en petits sachets aux fonctionnaires durant la pause-café.

Les transformateurs de poissons sont situés sur les lieux de production et sont souvent les pêcheurs et leur famille. La transformation est limitée au séchage et au fumage faute de moyens financiers et d’une bonne connaissance des marchés.

1.1.5 Les consommateurs

Les consommateurs sont les derniers intervenants des filières de produits alimentaires. C’est pour eux que se met en place cette chaîne d’intervenants, du producteur jusqu’au détaillant. La satisfaction de leurs besoins est le but ultime de l’existence des filières et des systèmes d’approvisionnement et de distribution des produits alimentaires. Sans eux, ces systèmes n’auraient aucune raison d’exister. Leur rôle est donc important pour indiquer aux intervenants qui les précèdent ce qu’ils désirent en produits, en quantités, en prix, en infrastructures, etc. Les contraintes ressenties par les consommateurs doivent, grâce à leur comportement, se répercuter tout au long de la filière jusqu’au producteur. Cependant, en ville, ces consommateurs se multiplient car la diversité des revenus favorise une demande très diversifiée en produits.

1.2 Les opérateurs privés indirects


1.2.1 Les banques
1.2.2 Les Organisations non gouvernementales (ONG)

1.2.1 Les banques

Les banques participent à l’approvisionnement des villes d’une manière indirecte, en assurant le financement des activités des différents acteurs. Leur rôle est cependant assez limité, car la plupart financent les gros commerçants importateurs de céréales et autres denrées alimentaires. Elles accordent très exceptionnellement des financements au commerce des produits du cru et lorsque cela se passe, c’est souvent avec des lignes de crédit provenant des bailleurs de fonds ou des gouvernements, crédits mis en place pour favoriser la commercialisation des produits alimentaires. Elles peuvent également accorder des crédits sur leurs propres fonds, mais en utilisant les fonds de garantie mis en place par les bailleurs de fonds.

Pour pallier cette insuffisance, certains projets, qui interviennent dans les filières de production et de commercialisation de produits agricoles, mettent en place leur propre cellule de crédit qui consent des prêts à des taux préférentiels.

Dans certains pays, de nouvelles formes de crédit, basées sur la caution solidaire et morale, ont font leur apparition: le crédit agricole et le crédit mutuel, qui expérimentent, avec plus ou moins de succès, la distribution du crédit aux petits opérateurs sans exiger les garanties classiques.

1.2.2 Les Organisations non gouvernementales (ONG)

De la même manière, les ONG interviennent aussi directement dans l’approvisionnement des villes. Elles apportent le plus souvent des appuis techniques, logistiques et financiers, mais en quantité plus limitée que ceux apportés par les bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux. Elles sont, par contre, plus proches des opérateurs privés (comme Afrique verte dans le domaine des céréales au Burkina Faso par exemple).

1.3 Les intervenants publics


1.3.1 Les Administrations centrales
1.3.2 Les autres Administrations
1.3.3 Les Chambres consulaires
1.3.4 Les Services de sécurité
1.3.5 L’Administration des marchés

Le nombre ou l’importance des organismes publics impliqués dans la commercialisation des produits alimentaires est différent selon les pays.

1.3.1 Les Administrations centrales


1.3.1.1 Le Ministère du commerce
1.3.1.2 Le Ministère de l’agriculture
1.3.1.3 Le Ministère de l’économie et des finances

1.3.1.1 Le Ministère du commerce

Le Ministère du commerce a été, dans tous les pays africains, directement et largement impliqué dans l’importation, l’achat local et la distribution des denrées alimentaires. La Direction du commerce se chargeait de l’élaboration des programmes d’importation et de la délivrance des licences en fonction de ces programmes. Elle gérait, de façon plus ou moins directe, les entreprises publiques chargées des importations, de la commercialisation locale ou de la distribution.

Actuellement, dans la plupart des pays africains, le Ministère du commerce s’occupe principalement de l’élaboration et de l’application de la réglementation commerciale. Dans certains pays comme la Côte d’Ivoire, le Togo et le Niger, il assure encore le contrôle des prix et la répression des fraudes dans le cadre de la loi sur la concurrence.

1.3.1.2 Le Ministère de l’agriculture

Le Ministère de l’agriculture a, dans la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest et pendant très longtemps, été impliqué dans la production et la commercialisation des produits du cru (céréales principalement) et cela au travers des organismes publics chargés de la production et de la commercialisation. La majeure partie d’entre eux étaient des mastodontes agissant dans un grand nombre de domaines. Au Burkina Faso, par exemple, ce Ministère englobait le plan ainsi que la gestion de l’eau, du tourisme et des routes. Avec la libéralisation du commerce des produits locaux, le rôle des Ministères de l’agriculture a été modifié et ils sont désormais chargés d’orienter, de superviser et de contrôler la mise en place de la politique agricole, ainsi que d’encadrer les producteurs.

1.3.1.3 Le Ministère de l’économie et des finances

Le Ministère de l’économie et des finances est l’interlocuteur direct des bailleurs de fonds des PAS. A ce titre, il pilote l’application des mesures préconisées par les PAS (privatisations, libéralisation, dévaluation, restructuration de la fonction publique, etc.). Fort de ces prérogatives, le Ministère de l’économie et des finances assume dans certains pays des attributions qui étaient dévolues au Ministère du commerce. Ainsi, au Sénégal, le contrôle des prix et la loi sur la concurrence sont exercés par l’Inspection générale du Ministère des finances. C’est également au Ministère des finances que sont déterminés la nature et les taux des impôts et taxes applicables aux activités du commerce alimentaire.

1.3.2 Les autres Administrations


1.3.2.1 La Caisse de péréquation
1.3.2.2 Le Service du conditionnement
1.3.2.3 La Direction des douanes
1.3.2.4 Les Directions de l’élevage et de la pêche

1.3.2.1 La Caisse de péréquation

Auparavant, son rôle consistait à acheter localement, à importer et à distribuer des produits alimentaires de première nécessité (riz, sucre, huile, etc.). Dans la majorité des cas, elle fixait le prix de ces denrées de manière à les mettre à la portée des faibles revenus et elle prélevait des taxes sur les importations d’autres produits (voitures, boissons alcoolisées, textiles etc.) pour compenser le manque à gagner sur les denrées. Dans certains pays, cet organisme a parfois fusionné avec la Caisse de stabilisation des prix dont la vocation est l’achat et l’exportation des produits d’exportation dans le but de stabiliser leur prix au niveau du producteur.

Dans la pratique, ces Caisses ont souvent été déviées de leur rôle: ainsi la Caisse de péréquation devenait un service financier spécialisé dans le prélèvement de taxes de péréquation destinées au budget national, et la Caisse de stabilisation une source de financement de grands projets d’investissement n’ayant aucun rapport avec le monde paysan.

1.3.2.2 Le Service du conditionnement

Appelé dans certains pays Direction du contrôle de la qualité, le Service du conditionnement est chargé de vérifier si les produits sont en état d’être consommés (date de péremption non dépassée, absence de moisissures, de charançons, etc.) ou conformes aux normes d’exportation ou d’importation. Ce service perçoit également une taxe reversée, soit au budget national, soit au budget de la Chambre de commerce, soit enfin dans les caisses de l’organisme public ayant le monopole de la commercialisation des produits d’exportation.

1.3.2.3 La Direction des douanes

Les douanes ont une fonction stratégique en Afrique en ce sens qu’elles constituent la source de financement essentielle du budget national. Les conditions de la liquidation et de la perception des taxes douanières influent considérablement sur le rythme et l’importance des approvisionnements alimentaires. Les taxes douanières sont d’ailleurs souvent utilisées comme outils de pilotage des importations en fixant des barèmes de taxation fluctuant en fonction des quantités produites dans le pays.

Dans certains pays, comme la Guinée et le Mali, la Direction des douanes a souvent été au centre des malversations financières destinées à enrichir certains cadres au détriment de l’Etat. C’est pour réduire ces pratiques que beaucoup de pays africains ont procédé à l’informatisation des services de douanes à l’aide de projets comme le projet Sydonia de la CNUCED.

1.3.2.4 Les Directions de l’élevage et de la pêche

Dans tous les pays, la Direction de l’élevage s’occupe de la conception et de la supervision des politiques de développement de l’élevage. Elle intervient sous forme d’assistance aux éleveurs dans la lutte contre les maladies. Elle assure aussi le contrôle sanitaire de la viande à l’abattoir et dans les boucheries. Elle essaie de réglementer les marchés de bétail et de faciliter l’approvisionnement en animaux vivants des grands centres de consommation.

La Direction de la pêche a le même rôle que la Direction de l’élevage. De plus, dans certains pays, il existe de grandes sociétés de pêche mixtes ou appartenant à l’Etat dont elle doit suivre la gestion.

1.3.3 Les Chambres consulaires

Les Chambres de commerce et d’agriculture sont plus ou moins bien structurées et dynamiques selon les pays. Jusqu’à il y a peu de temps, dans de nombreux pays, elles regroupaient généralement les commerçants, les agriculteurs, les artisans, et parfois même les industriels.

Ces Chambres de commerce et d’agriculture ont longtemps été des coquilles vides, entièrement dévouées à l’Etat et à ses Ministères. Les présidents étaient nommés par l’Etat. Cependant, depuis la libéralisation de l’économie, la tendance est à la séparation et à la création d’une Chambre consulaire pour chacune de ces professions, et à l’élection démocratique des présidents. Actuellement, elles regroupent aussi un certain nombre d’adhérents individuels et des associations professionnelles.

Leur rôle, dans l’approvisionnement alimentaire des villes, est indirect et encore peu efficace. Elles sont là pour favoriser le rassemblement et l’organisation des commerçants en vue de faciliter les contacts entre eux et éventuellement leur mobilisation pour la défense de leur profession. Elles sont le cadre privilégié pour le dialogue avec l’Etat pour tout ce qui concerne le rôle des opérateurs privés dans l’économie nationale. Dans l’avenir, ces Chambres consulaires, bien structurées, devraient aider l’Etat et les commerçants à mieux planifier les quantités et les flux alimentaires, et à fournir des services d’information, de formation, etc (KOITE, 1997).

1.3.4 Les Services de sécurité

Les Services de la police, de la gendarmerie et quelquefois de l’armée interviennent directement dans l’approvisionnement des villes en produits vivriers. En effet, dans tous les pays d’Afrique subsaharienne, de multiples barrages sont dressés sur les routes à l’intérieur et aux frontières des pays pour contrôler les marchandises et les personnes. Ces barrages sont une véritable plaie pour l’approvisionnement en produits locaux et importés, car les opérateurs doivent alors payer des volumes importants de taxes illicites pour acheminer les produits vers la ville.

1.3.5 L’Administration des marchés

Chaque marché possède son équipe d’administrateurs qui le gère. L’administrateur et ses collègues participent à la perception des taxes destinées aux budgets communaux, préfectoraux et nationaux. Ils attribuent les places aux commerçants et assurent la propreté et la sécurité du marché. L’Administration du marché veille aussi au climat d’entente entre les opérateurs. L’administrateur peut être un commerçant élu par les autres commerçants du marché mais, le plus souvent, c’est un homme désigné par la Préfecture ou le Ministère du commerce (ou des finances).

1.4 Les opérateurs internationaux

Dans beaucoup de pays africains, les bailleurs de fonds et les organismes internationaux (PNUD, CEE, PAM, FAO, etc.) interviennent au niveau des SADA dans le cadre de projets d’appui à la production et à la commercialisation des produits. Cette participation revêt plusieurs formes: appui technique, logistique, et encadrement des cadres des Ministères concernés ou des Chambres consulaires, organisation et assistance des organisations paysannes, mise en place de crédits à la commercialisation, mise en place de banques de céréales, importation et distribution de l’aide alimentaire, etc.


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