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Les participants ont convenu qu'il restait encore de nombreuses questions nécessitant d'être éclaircies, parmi lesquelles:

Les avis étaient assez homogènes pour dire quelles étaient les questions à résoudre, mais il n'y avait aucun accord sur la manière de les résoudre. Les participants ont pensé qu'il fallait poursuivre le débat en se référant à l'expérience d'application de stratégies de moyens de subsistance durable dans des projets ou programmes pour essayer de faire la lumière sur ces points.

STRATÉGIES AXÉES SUR DES MOYENS DESUBSISTANCE DURABLES ET PAUVRETÉ

Ces stratégies mettent-elles toujours l'accent sur les plus pauvres? Les participants étaient loin d'être d'accord sur ce point. Les organisations qui se consacrent à la lutte contre la pauvreté s'intéressent aux démarches centrées sur des moyens de subsistance durables parce qu'elles les considèrent comme un moyen de contribuer directement à atteindre les objectifs de développement fixés au niveau international.6 D'autres participants estimaient que le mandat sectoriel de certaines organisations limiterait leurs possibilités d'atteindre les plus pauvres.7

Les stratégies centrées sur les moyens de subsistance durables peuvent nous aider à connaître les pauvres, mais peuvent-elles nous aider à les atteindre? Cinq des études de cas semblent indiquer qu'il y a un problème fondamental concernant le ciblage des interventions d'un projet sur les plus pauvres. Elles signalent que les résultats ont été satisfaisants tout au plus dans le cas des "moyennement pauvres".

STRATÉGIES AXÉES SUR DES MOYENS DE SUBSISTANCE DURABLES ET PAUVRETÉ

Bien que le projet mongolien ait été pensé comme un projet de lutte contre la pauvreté, sa principale activité, le crédit pour la reconstitution du cheptel, n'a pas réussi à atteindre les plus mal lotis qui représentent 50 pour cent de la population rurale pauvre. Le fait était dû à l'insistance du projet sur le remboursement du crédit. Selon le groupe, une démarche centrée sur les moyens de subsistance durables aurait amélioré le ciblage du projet sur la pauvreté.

Si le projet malien aidait les paysans de terres arides dans un des pays les plus pauvres du monde, il est passé très loin des ménages les plus pauvres de la région visée par le projet. Le groupe des études de cas a conclu que l'adoption d'une démarche centrée sur des moyens de subsistance durables aurait mis en lumière les différences socio-économiques présentes dans le champ du projet et lui aurait permis un recentrage sur les plus pauvres.

Les participants du Forum ont généralement estimé qu'il était encore trop tôt pour répondre à cette question. Les seuls projets axés sur des moyens de subsistance durables qui aient été analysés étaient celui du Malawi, DELIVERI et celui du Honduras. Les autres ne comportaient que quelques éléments de l'approche. Toutefois, les groupes ont estimé qu'aucun d'entre eux n'avait réussi à atteindre les segments les plus pauvres des communautés dans lesquelles ils travaillaient.

Bien que les projets aient atteint des personnes pauvres au regard de critères internationaux, dans le contexte local, ces personnes auraient pu être qualifiées de "moyennement pauvres" ou "à la limite de la pauvreté" (Bangladesh, Bolivie, Mali et Mongolie). Le projet du Honduras favorisait des technologies adaptées à différentes catégories socio-économiques, et notamment des technologies intéressant les métayers pauvres, que ceux-ci ont adoptées, et pourtant il n'est pas sûr qu'elles aient atteint les plus pauvres.

Comme le montre la mini-étude de cas au Pakistan, le schéma existant des mesures d'incitation s'adressant aux cadres des organisations du secteur peut ne pas les récompenser de s'intéresser aux plus pauvres.

Il peut souvent y avoir des compromis entre une gestion durable des ressources naturelles et un travail avec les pauvres

MESURES INSTITUTIONNELLES POUR DISSUADER DE TRAVAILLER AVEC LES PAUVRES - PAKISTAN

Travailler avec les pauvres n'est pas prestigieux. Les plus pauvres sont les moins disposés à changer parce que ce sont ceux qui peuvent le moins se permettre de prendre des risques, parce qu'ils vivent dans un état de survie élémentaire et qu'ils n'ont guère de temps à consacrer à discuter ou à planifier. Bien que le personnel féminin de ce projet se soit concerté pour travailler avec les villages les plus pauvres, elles ont trouvé qu'il leur fallait passer deux fois plus de temps dans ces villages et qu'elles "progressaient" moins que dans des villages mieux lotis. Comme l'efficacité du personnel était mesurée d'après les résultats positifs, et que les résultats positifs étaient plus faciles à obtenir parmi les non pauvres, les mesures d'incitation étaient dirigées contre le travail avec les pauvres.

Lorsque les projets prennent comme point de départ de leurs activités la terre ou des ressources naturelles, cela implique qu'ils traitent principalement avec les ménages qui possèdent ou gèrent ces ressources. Malgré les études de diagnostic et la PER, les deux projets participatifs d'aménagement d'un bassin versant d'altitude en Bolivie et au Pakistan sont passés à côté des pauvres sans terre parce que leur stratégie était basée sur la terre. Du fait que le projet INTERFISH au Bangladesh était basé sur l'intégration de la pisciculture et de la riziculture, il ne pouvait atteindre ceux qui fonctionnellement étaient sans terre. Selon le document du projet, les premiers bénéficiaires du projet concernant la pêche artisanale en Afrique de l'Ouest mené par le DFID et la FAO dans 25 pays doivent être "les utilisateurs des ressources dans les communautés vivant de la pêche artisanale, en particulier les pauvres parmi eux, y compris les petits négociants et transformateurs (principalement des femmes) et les consommateurs. Par une "approche de processus", ces bénéficiaires seront aidés ... à définir, réaliser et évaluer les activités de développement qui correspondent à leurs besoins et à leurs aspirations." Il sera important de suivre ce projet pour voir s'il touche les ménages les plus pauvres qui n'ont pas de bateau et qui tirent une maigre subsistance de la pêche sur le rivage, de la transformation du poisson, de la culture, de travaux occasionnels ou en travaillant sur les bateaux des autres.

QUELS SONT LES MEILLEURS POINTS D'INTERVENTION POUR LES STRATÉGIES CENTRÉES SUR DES MOYENS DESUBSISTANCE DURABLES?

De l'avis général, les projets ou programmes axés sur des moyens de subsistance durables devraient soit concerner un secteur unique soit être plurisectoriels. Il importe davantage qu'il y ait toute une gamme de possibilités en fonction du stade auquel se trouve le projet dans le cycle du programme. Les projets en cours peuvent intégrer des perspectives axées sur des moyens de subsistance durables à un moment critique du projet, par exemple au moment de l'examen ou de l'évaluation à mi-parcours. Cela aiderait à préciser si d'autres facteurs que les contraintes spécifiques du secteur visées par le projet sont susceptibles de contribuer à atteindre les objectifs ou d'en empêcher. Les principaux points à éclaircir au sujet des points d'intervention sont les suivants :

Qui choisit le point d'intervention (le gouvernement, les donateurs ou les pauvres)? D'une manière idéale, ce devrait être les bénéficiaires visés, plutôt que le gouvernement ou les donateurs. Cela nécessitera de changer les pratiques en vigueur qui veulent que ce soient les gouvernements et les donateurs qui choisissent les points d'intervention avant que les bénéficiaires puissent être consultés. Les organisations ne sont actuellement pas entièrement libres de donner aux communautés les moyens de produire leurs propres idées et elles sont censées répondre aux demandes des gouvernements. Avant toute consultation des bénéficiaires, le projet doit figurer dans le programme de dépenses publiques du gouvernement. Si un projet est inscrit comme projet d'élevage, ce qui était le cas en Mongolie, il peut être difficile de modifier le point d'intervention institutionnel, même en changeant le titre du projet, pour qu'il ne relève plus du département de l'élevage.

Quel est le meilleur niveau d'intervention des projets axés sur des moyens de subsistance durables? Certains membres du DFID participant au forum estiment que ce type d'approche permet une intervention à n'importe quel niveau, mais qu'il est plus rentable de travailler au niveau le plus élevé possible. Plus le niveau est élevé, plus haut se fait l'effet de levier pour réorienter les politiques, les institutions et les processus pour les rendre plus adaptables, conscients de leurs clients et centrés sur les gens. Toutefois, ce point de vue n'est pas corroboré par l'expérience du projet au Malawi, qui avait fait porter l'effort au sommet, tentant d'intégrer les notions de moyens de subsistance durables dans tous les plans et programmes nationaux de développement concernés (sécurité alimentaire des ménages, emploi et gestion durable des ressources naturelles), mais qui a eu du mal à obtenir des améliorations concrètes des moyens de subsistance au niveau des villages.

STRATÉGIES FONDÉES SUR DES MOYENS DESUBSISTANCE DURABLES ET POLITIQUES

Les stratégies doivent-elles toujours avoir une dimension politique et, si c'est le cas, quel est le meilleur moyen d'amener des changements des politiques? Les participants au Forum et à la conférence électronique/Internet ont unanimement répondu par l'affirmative, estimant que cette approche devait toujours prendre en considération les interactions entre les modes de subsistance au niveau le plus bas et le contexte des politiques dans lequel ils s'inscrivent. Comprendre ces rapports est essentiel aussi bien pour le diagnostic que pendant la réalisation du projet. Il n'est toutefois pas indispensable que les projets axés sur des moyens de subsistance durables aient un objectif explicite en termes de politique.

On s'accorde aussi davantage à reconnaître que l'utilisation d'une stratégie d'amont en matière de moyens de subsistance durables peut être valable à condition d'être correctement liée à une vérification des réalités élémentaires.

Le projet DELIVERI en Indonésie est un exemple de projet de réforme institutionnelle dont la stratégie consistait à utiliser les informations recueillies au cours de l'application pilote de nouvelles démarches au niveau des villages pour obtenir des changements de politique au niveau provincial voire plus haut. À l'inverse, l'approche du DFID dans le Projet de services de conseil en agriculture en Ouganda peut illustrer le danger qu'il y a pour les donateurs à s'embarquer dans un dialogue de haut niveau sur les politiques en vue d'obtenir des changements institutionnels sans que cette démarche s'accompagne de vérifications suffisantes au niveau du diagnostic des moyens de subsistance.

Les participants ont reconnu que bien que toutes les organisations doivent être conscientes des rapports à faire entre les questions relatives aux moyens de subsistance et les politiques centrales, les organisations n'étaient pas toutes également avantagées pour mener un dialogue sur les politiques au niveau national. Celles qui avaient un avantage au niveau de la communauté ou du district pouvaient aussi faire des contributions utiles, ou bien elles pouvaient accroître leur influence sur la politique en créant des partenariats avec d'autres organisations ayant une culture de dialogue sur les politiques.

Un débat important s'est instauré sur l'éthique des démarches de changement des politiques. Certains participants du DFID soulignaient qu'il était plus rentable de viser directement le sommet (le ministre, voire le président) pour influer sur une politique, alors que d'autres, au Forum ou à la conférence électronique/Internet, insistaient sur la nécessité de modifier le processus de décision pour qu'il soit engagé par la base et en réponse à une demande. Ils mettaient en garde contre les changements de politiques imposés par le haut, peu susceptibles selon eux d'être durables parce que trop tributaires, pour leur application, de la continuité politique au sommet, et susceptibles d'être balayés par un remaniement ministériel ou un changement à la tête du gouvernement.

La politique n'est pas seulement entre les mains des gouvernements mais elle résulte d'un processus pluraliste de consultation et de négociation. Les changements de politique partant de la base, en étant solidement ancrés dans les structures élémentaires et soutenus par la société civile, ont des chances d'être plus durables.

Comme l'ont fait ressortir les débats du Forum et les contributions de la conférence électronique/Internet, il faut manifestement poursuivre la discussion sur les institutions et le niveau qu'il convient de viser, à savoir local, intermédiaire (méso) ou central (macro) pour mettre en place des politiques favorisant des moyens de subsistance durables.

BANGLADESH - DES INDICATEURS DE PRODUCTION AUX INDICATEURS DE RÉSULTATS DÉFINIS PAR LES PAYSANS

Le système de suivi et d'évaluation du projet INTERFISH au Bangladesh, parce qu'il s'attachait initialement à mesurer davantage l'efficacité que les effets, avait tendance à sous-estimer les effets du projet. Des effets importants tels que la capacité acquise par les membres de la communauté de définir leurs propres besoins, d'avoir accès à des ressources extérieures et de prendre des décisions en connaissance de cause échappaient au système initial de suivi et d'évaluation. Les écoles pratiques d'agriculture, par exemple, n'ont pas seulement servi à former des paysans à la lutte intégrée contre les parasites de la pisciculture ou de la riziculture, mais leur ont aussi permis d'acquérir de l'expérience dans la résolution des problèmes, la réflexion critique et l'écologie de terrain.

L'introduction d'un système de suivi et d'évaluation participatif a radicalement transformé les relations entre la direction du projet et ses participants. Pour la première fois, les participants ont eu à définir comment il fallait mesurer la réussite du projet, et le projet a ainsi commencé à regarder au-delà de la fin de ses activités vers la qualité des activités et les résultats à plus long terme. A la fin de chaque campagne de riz, les paysans font le point pour savoir si le processus d'apprentissage les a aidés à réaliser l'objectif qu'ils s'étaient eux-mêmes fixé.

QUELS INDICATEURS PEUT-ON UTILISER POUR MESURER LES EFFETS?

L'idée généralement admise était qu'il fallait trouver de nouveaux types d'indicateurs de résultats pour mesurer les effets des stratégies axées sur des moyens de subsistance durables. Les indicateurs classiques, de type productif, ne permettent pas de saisir les changements les plus importants, par exemple le fait que les bénéficiaires aient pu, grâce au projet, améliorer leur capacité de résoudre les problèmes. Il faut en particulier continuer à travailler sur des indicateurs du renforcement des capacités. Actuellement, nous avons peu d'exemples d'indicateurs permettant de mesurer les améliorations institutionnelles.8

Les participants du Forum étaient plus partagés sur la question de savoir comment aborder le problème des indicateurs pertinents. Quel est le meilleur moyen de saisir l'effet d'un projet sur le développement du capital humain et social? Jusqu'à quel point l'évaluation des effets devrait-elle être holistique? Comment éviter de recueillir trop de données inutiles? En faisant participer les bénéficiaires visés par le projet au choix des indicateurs correspondant à leurs propres priorités, le projet du Bangladesh a pu limiter le nombre d'indicateurs de résultats à surveiller. Mais si les donateurs doivent comparer les effets du projet d'un village à un autre, ils ne peuvent se contenter des critères propres au site que suggèrent les bénéficiaires. Ils demanderont aussi un minimum de critères harmonisés.

"Les critères utilisés pour le suivi et l'évaluation doivent être clairement liés à la problématique et aux objectifs du projet, et il convient d'éviter de recueillir des données inutiles qui ne soient pas clairement liées à l'objectif ou à la problématique. Le programme devrait se doter de systèmes d'information pour renseigner sur les conséquences recherchées ou indésirables des activités. Les leçons à tirer de l'expérience peuvent être dégagées du suivi participatif et des autres aspects du processus de suivi et d'évaluation. Il s'agit d'un exercice indispensable pour l'amélioration du programme. L'un des principaux problèmes auxquels se heurtent les organismes d'exécution est de trouver le temps et les moyens de rassembler des informations sur les résultats.

"Pour mesurer les effets d'un programme axé sur des moyens de subsistance durables, il importe d'appliquer des critères ayant trait aux communautés et des critères normatifs. Les résultats à mesurer dans les approches participatives sont les changements significatifs pour une communauté. Si ces changements ne se produisent pas, le projet n'aura pas entraîné les améliorations qui sont importantes pour la communauté. La mesure de ces changements peut avoir une forte spécificité locale. Les critères normatifs sont importants pour le ciblage et pour permettre des comparaisons entre régions. Ils sont indispensables pour les donateurs et les gouvernements qui doivent décider de l'affectation de ressources entre régions ou entre pays. Ainsi, ces deux types d'informations doivent être incorporés dans les systèmes de suivi et d'évaluation des projets visant des moyens de subsistance durables."

- Tim Frankenberger, CARE

RÉVISION DU CADRE DU DFID RELATIF À DES MOYENS DESUBSISTANCE DURABLES

Plusieurs versions de ce cadre ont été établies. Toutes doivent servir d'outil pour analyser les stratégies de subsistance et mieux les comprendre. Il n'a jamais été question d'en faire des calques pour cette analyse. Les concepteurs de ces cadres soulignent qu'aucun ne peut contenir tous les facteurs qui entrent en ligne de compte dans les modes de subsistance et qu'ils doivent tous être adaptés et développés au fur et à mesure que se développe l'expérience de mise en œuvre de l'approche axée sur des moyens de subsistance durables.

Néanmoins, les participants du Forum ont fait plusieurs observations importantes sur le cadre et les insuffisances qu'il présente dans sa forme actuelle, dont ils ont estimé qu'elle gagnerait à être encore développée.

Rendre les gens visibles. Alors que le premier principe des stratégies axées sur des moyens de subsistance durables est qu'elles doivent être "centrées sur la personne", les personnes ne sont pas "visibles" dans le cadre actuel. Le fait qu'elles doivent être au coeur de la démarche centrée sur des moyens de subsistance durables pourrait être exprimé plus explicitement.

Niveaux d'analyse des ressources. Le niveau auquel doivent être évaluées les ressources n'est pas immédiatement perceptible. Il importe de faire la distinction entre les ressources individuelles, comme la terre ou le bétail, et les ressources communautaires comme les forêts, les pâturages, les puits, les routes et les écoles. Il faudrait compléter le cadre par des méthodes permettant de distinguer ces différents niveaux.

Différenciation socio-économique. On a aussi estimé que le cadre ne mettait pas assez l'accent sur les différences que présentent les catégories socio-économiques d'une communauté quant à leurs bases de ressources, leurs stratégies de subsistance et leur niveau de vie. Les membres de ménages pauvres tendent à être plus vulnérables aux chocs extérieurs que les ménages moins pauvres parce qu'ils possèdent moins de ressources. Les politiques, les institutions et les processus en place au niveau national peuvent produire des grandes disparités dans la propriété des ressources. Les pauvres ont généralement moins de possibilités de gagner leur vie que les autres.

Intégration d'éléments historiques et dynamiques. Les participants ont aussi trouvé que le cadre relatif à des moyens de subsistance durables était assez statique. On ne voyait pas d'emblée comment des éléments dynamiques tels que les changements historiques qui ne contribuaient pas directement à la vulnérabilité pouvaient être incorporés dans l'analyse. Il serait utile de souligner les trajectoires (ascendante ou descendante) des modes de subsistance de différentes catégories socio-économiques de la population.

STRATÉGIES POUR DES MOYENS DESUBSISTANCE DURABLES ET RÉSEAUX SOCIAUX

Lorsque le DFID propose une analyse de partenariat, il met l'accent sur les autres organisations internationales alors qu'il est tout aussi important d'analyser les partenariats qui existent entre les acteurs au niveau local. Bien que les stratégies axées sur des moyens de subsistance durables englobent "tout", elles tendent à négliger l'importance des réseaux sociaux qui existent entre les ménages au niveau du village et les relient au monde extérieur. Toute proposition portant sur les ressources naturelles et la pauvreté s'adresse non seulement au ménage, mais aussi à un réseau d'acteurs tels que les autorités locales, les petites entreprises, les organisations communautaires, les ONG et le secteur privé. Ces réseaux constituent des structures sociales dont l'existence ne dépend pas des projets. Les projets qui repèrent ces réseaux sociaux et prennent appui sur eux ont plus de chances d'être durables que ceux qui essaient de créer leur dynamique et leurs organisations propres. Néanmoins, comme les pauvres n'ont pas nécessairement voix au chapitre au même titre que les autres dans ces réseaux, il faut développer les capacités pour qu'ils soient en mesure d'accroître leur influence dans le contexte local. - Conférence électronique/Internet.

Le cadre doit être suffisamment souple pour faire ressortir les réseaux sociaux qui relient différents modes de subsistance entre eux (Forum et conférence électronique/ Internet). Dans de nombreuses sociétés rurales, les catégories socio-économiques sont reliées entre elles par des modes de subsistance interdépendants: généralement, les ménages plus riches ayant du capital se tournent vers les plus pauvres pour avoir de la main d'œuvre. Ainsi, l'analyse des modes de subsistance doit comprendre comment les gens s'appuient sur des réseaux traversant les catégories sociales pour le partage, la location et la copropriété des ressources (par exemple les terres, le bétail et le fourrage). Les relations de clientèle et les accords réciproques de partage du travail ou du capital constituent pour les pauvres des stratégies importantes pour faire face aux aléas tels que la maladie ou d'autres difficultés ou situations d'urgence. Par ailleurs, elles confèrent une légitimité à la position d'autorité locale des "riches". Les réseaux sociaux horizontaux sont aussi essentiels pour remédier aux pénuries graves de capital touchant les pauvres, particulièrement par le partage traditionnel du travail et autres arrangements réciproques.

Dimensions culturelles. Le cadre relatif à des moyens de subsistance durables repose pour une grande part sur l'expérience acquise dans des pays anglophones. Les praticiens francophones et hispanophones se heurtent à certaines difficultés pour travailler sur la base de concepts comme "livelihoods" (moyens de subsistance durables) qu'il est difficile de faire passer en un mot dans leur langue. En même temps, il existe un corps important d'expériences menées dans des pays hispanophones et francophones sur les mêmes thèmes mais qui ont, peut-être, été conceptualisées différemment. Il faut trouver comment incorporer cette expérience dans le cadre pour en créer des formes culturellement plus appropriées. Bien que l'on puisse traduire sustainable livelihoods en espagnol par les termes sistemas de vida y desarollo sostenible, il ne semble pas y avoir d'équivalent français adapté. En fait, aucune des traductions en français citées ci-dessous ne rend compte de l'intégralité du concept.

Incorporation de la dimension politique. La plupart des participants estimaient que, bien que le cadre ait aidé les praticiens à mettre l'accent sur les politiques, les institutions et les processus, il fallait rendre plus explicite la dimension politique de ces structures et processus. Il semble ressortir de l'expérience des études de cas que les projets ou programmes tentant d'aborder la question des moyens de subsistance d'une manière holistique devront s'engager dans la sphère politique pour obtenir des effets positifs et durables. Les éléments politiques dont il faudra tenir compte sont

CADRE DE TRAVAIL SUR DES MOYENS DESUBSISTANCE DURABLES ET HIÉRARCHISATION DES INTERVENTIONS

"Le cadre de travail sur des moyens de subsistance durables montre l'imbrication des éléments et nous aide à comprendre ce contexte complexe, notamment en élargissant le regard que nous portons sur une situation ... mais il n'aide par à hiérarchiser ou à trouver des interventions valables. Le plus gros point d'interrogation est la question des méthodes à utiliser après la conception du projet. Il faut chercher encore comment guider la démarche pour aller de A à B. Le cadre de travail sur les moyens de subsistance durables augmente la liste des choses à faire sans donner d'indications sur l'ordre dans lequel elles doivent être faites ni la manière de les faire."

Groupe de l'étude de cas de Zambie

"Le cadre de travail sur des moyens de subsistance durables est un outil pour améliorer la prise de décisions, et il ne nie manifestement pas la nécessité de raisonner clairement. Le caractère holistique de l'approche relative à des moyens de subsistance durables nous entraîne à étudier des possibilités et à les hiérarchiser, mais ne nous laisse pas d'autre outil que le bon sens pour faire la part entre l'impératif de priorité et celui de faisabilité.

Groupe de l'étude de cas du Bangladesh

Tous ces aspects ont des dimensions manifestement politiques et des effets potentiels sur les stratégies de subsistance. Des modifications du cadre devraient permettre aux gens d'intégrer plus facilement ces dimensions dans leur analyse d'ensemble. Il faut souligner davantage l'effet des processus centraux sur les trajectoires des modes de subsistance. Dans son cadre, le PNUD utilise un hexagone plutôt qu'un pentagone, le segment supplémentaire représentant le capital politique.

Moyens d'analyse des politiques, des institutions et des processus. On a considéré comme un point positif du cadre de travail sur des moyens de subsistance durables l'accent mis sur les politiques, les institutions et les processus, mais relevé qu'il manquait des méthodes pratiques pour l'analyse dans ce domaine et qu'il serait utile d'en définir.

Le cadre de travail sur des moyens de subsistance durables permet de définir des projects d'actions possibles mais ne fournit pas les indications appropriées pour les hiérarchiser.

L'évaluation des ressources selon ce cadre ne permet pas d'établir des comparaisons entre modes de subsistance ni de les quantifier par rapport aux objectifs visés.

PROBLÈMES POSÉS PAR LE PENTAGONE DES RESSOURCES - GROUPE DE L'ÉTUDE DE CAS DU MALI

Le polygone des ressources proposé dans l'approche des moyens de subsistance durables a cinq côtés: le capital naturel, le capital physique, le capital financier, le capital humain et le capital social. En essayant d'appliquer ce pentagone, le groupe de l'étude de cas du Mali s'est aperçu que la perception des concepteurs du projet différait de celle du groupe d'étude et qu'il fallait trois pentagones, un pour chaque catégorie socio-économique. De plus, il était difficile de combiner plusieurs dimensions d'un même type de capital sur le même axe. L'infrastructure physique régionale et communautaire tenait difficilement sur le même axe que les ressources du ménage. Comment noter le capital naturel sur un seul axe alors que la terre abonde mais qu'elle est de qualité médiocre? Comment noter le capital humain lorsque le niveau de santé et d'éducation est faible mais que la main d'œuvre est disponible en abondance? Lorsque nous évaluons le capital social comme étant élevé, moyen ou faible, à quelle aune devons-nous le mesurer (les régions du pays, le monde)?

Le cadre de travail sur des moyens de subsistance durables ne s'explique pas facilement. Le DFID et CARE rapportent que si les gouvernements, les techniciens et le personnel des projets ont été prompts à saisir les principes de cette approche, il est en revanche beaucoup plus difficile de leur transmettre ce cadre de travail. CARE a abordé le problème en recourant à des ateliers participatifs pour la formation du personnel. Chaque atelier commence par les principes directeurs des moyens de subsistance durables et les participants sont invités à définir leur propre cadre en partant de ces principes. Le DFID a constaté que si l'on commence par le cadre dans ses détails, il est difficile de faire passer des messages, mais que l'on arrive à mieux le faire comprendre en échafaudant le cadre à partir d'exemples.


6 Le DFID et d'autres organismes espèrent que l'adoption de telles stratégies contribuera directement à atteindre l'objectif international de développement voulant que le nombre de personnes vivant dans une pauvreté extrême soit réduit de moitié d'ici à 2015, et qu'elle constituera ainsi un moyen de s'attaquer aux racines même de la pauvreté.

7 Selon le contexte local, les plus pauvres comprennent les trois ou cinq quintiles inférieurs de la population à l'exception des invalides et des personnes très âgées (pour lesquels les filets de sécurité sont plus appropriés).

8 Tim Frankenberger, CARE

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