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CHAPITRE II: LES GRIGNONS D'OLIVE

2.1 Caractéristiques physiques:

Les grignons bruts renferment la coque du noyau, réduite en morceaux, la peau et la pulpe broyée de l'olive, environ 25% d'eau et encore une certaine quantité d'huile qui favorisent leur altération rapide

Les grignons épuisés diffèrent essentiellement par une plus faible teneur en huile et une teneur en eau réduite du fait qu'ils ont été déshydratés au cours du processus de l'extraction.

Les grignons épuisés partiellment dénoyautés sont constitués essentiellement par la pulpe (mésocarpe) et contiennent encore une petite proportion de coques qui ne peuvent être séparées complètement par les procédés de tamisage ou de ventilation utilisés.

La Figure 4 rappelle les rendements en différents types de grignons à partir des olives traitées et leur composition physique respective.

2.2 Conditions de conservation des grignons:

Le problème principal que se pose pour la conservation des grignons bruts est leur teneur relativement élevée en eau et la présence d'une quantité encore importante de matières grasses. Ces grignons abandonnés à l'air libre rancissent rapidement et deviennent vite inconsommables par les animaux.

Il est estimé que les grignons bruts obtenus par centrifugation, plus humides, se détériorent après 4–5 jours, les grignons obtenus par pression aprés environ 15 jours, ces mêmes grignons déshydratés ne se conserveraient guère plus de 45 jours. Par contre les grignons épuisés qui ont de plus été déshydratés au cours de l'extraction pourraient se conserver plus d'un an.

La déshydratation est actuellement un procédé coûteux compte tenu du coût élévé de l'énergie nécessaire. De plus, dans le cas des grignons bruts encore riches en matières grasses son efficacité comme mode de conservation semble très limitée.

Les quelques essais effectués à petite échelle de conservation par ensilage laissent prévoir une possibilité de conservation plus simple, plus économique et plus efficace en utilisant la méthode des silos-taupinières qui permet de stocker des quantités très variables de quelques tonnes à plusieurs containes de tonnes.

Compte tenu du fait que le grignon brut frais se conserve très peu de temps il doit être distribué très rapidement aux animaux ou ensilé le plus tôt possible afin de ne pas s'altérer.

Il est toutefois à noter qu'il est généralement économiquement plus rentable d'extraire préalablement l'huile du grignon, mais lorsque pour des raisons spécifiques l'extraction n'a pas lieu, ce grignon brut peut être conservé pour être distribué ultérieurement aux animaux.

2.3 Caractéristique chimiques

2.3.1 Composition chimique de l'olive

Afin de comprendre plus facilement les variations de composition chimique des différents types de grignons il peut être utile de rappeler (Tableau 4) la composition chimique des différents composants de l'olive.

Tableau 4: Composition chimiques des composants de l'olive mûre

PartieMatières Az. totalesMatières GrassesCellulose bruteMatières minéralesExtractif non azoté
Epicarpe9,83,42,41,682,8
Mesocarpe9,651,812,02,324,2
Endocarpe
(noyau et amande)
1,20,874,11,222,7

Source: Maymone et al, 1961

Il est clair que la partie la plus riche en huile est le mésocarpe (ou pulpe), et celle plus riche en cellulose brute l'endocarpe (ou noyau)

2.3.2 Composition chimique des grignons:

Contrairement aux autres tourteaux oléagineux les grignons bruts sont pauvres en matières azotées et riches en cellulose brute. Ils restent relativement riches en matières grasses. L'épui ement par les solvants diminue la teneur en matières grasses et augmente relativement les autres teneurs. Le dénoyautage partiel par tamisage ou ventilation réduit les teneurs en cellulose brute. (Tableau 5).

Les pulpes, du fait de la séparation totale du noyau avant pression, ont la valeur la plus faible en cellulose brute.

Tableau 5: Composition chimique indicative des différents types de grignons:

 % de la Matière Sèche
TypeMatière SècheMatières mineralesMat. Az. totalesCellulose bruteMatières Grasses
Grignon brut75–803–55–1035–508–15
Gr. gras part. dénoyauté80–956–79–1220–3015–30
Grignon épuisé85–907–108–1035–404–6
Gr. épuisé part. denoyauté85–906–89–1415–354–6
Pulpe grasse35–405–89–1316–2526–33

Sources: nombreux auteurs

Les valeurs indiquées ci-dessus sont très variables principalement pour les grignons bruts et les grignons gras partiellement dénoyautés et ne peuvent être considérées que comme indicatives.

Il est à noter que ces différents grignons proviennent d'olives d'origines variées et ont subi des traitements différents ce qui explique l'hétérogènéité de certains résultats.

a) La cellulose brute:

Comme mentionné ci-dessus le taux de cellulose brute est élevé pour les grignons non dénoyautés. Le dénoyautage partiel réduit considérablement cette teneur, mais même la pulpe pure contient autour de 20% de cellulose brute.

L'analyse des fibres par la méthode de Van Soest et al (1975) révèle que les ont des teneurs très élevées en constituants pariétaux (NDF), en lignocellulose (A en lignine (ADL) (Tableau 6)

Tableau 6: Caractéristiques des constituants pariétaux des grignons

 Grignon Epuisé (Tunisie)(1)Grignon épuisé partiel. dénoyauté
Tunisie(1)Espagne (2)Grèce (3)
N.D.F.72557083
A.D.F.6045-64
A.D.L.31293124

Sources: (1) Nefzaoui, 1979
            (2) Alibes et Berge, 1983, résultats non publiés
            (3) Ohlde et Becker, 1982

Le tamisage paradoxalement réduit donc surtout la cellulose et très peu la lignine. Cette composition en constituants pariétaux des grignons d'olives est comparable à celle des pailles de céréales avec un degré de lignification apparement plus élevé.

b) Les matières azotées totales:

Leurs teneurs varient selon le type de grignon (voir Tableau 5) mais restent relativement modestes. L'azote protidique constitue plus de 95% de l'azote total et sa solubilité est particulièrement faible (1,5% de l'azote total selon Zelter, 1968, cité par Theriez et Boule, 1970, et Gomez-Cabrera, 1983, (communication personnelle), 3% selon Nefzaoui, 1983). D'ailleurs une grande partie des protéines (80 à 90%) est liée à la fraction lignocellulosique (ADF-N) (Nefzaoui, 1983)

c) Les lipides:

La matière grasse des grignons est très riche en acides gras en C16 et C18 insaturés qui constituent 96% du total des acides gras. Les grignons sont très vulnérables à l'oxygène atmosphérique responsable en grande partie de l'altération des propriétés organoleptiques. Cependant Theriez et Boule (1970) ont noté que l'huile rancie des grignons ne semble pas être la cause de la chute de digestibilité qu'ils ont observés in-vitro, les résultats obtenus avec des grignons amassés pendant plus d'un an étant les mêmes que ceux de grignons frais.

Les matières grasses du grignon brut peuvent constituer un apport d'énergie important mais dans le cas des grignons épuisés cet apport est limité.

2.4 Facteurs pouvant affecter l'utilisation digestive des grignons

De nombreuses expériences ont rapporté une “mauvaise utilisation digestive” des grignons d'olive. Celle-ci pourrait avoir pour cause une réduction de l'activité de la flore du rumen qui (mesurée par le dégagement gazeux) peut être réduite de 40% suite à l'ingestion de grignon brut (Theriez et Boule, 1970). L'ammoniogénèse du liquide du rumen d'ovins reçevant des grignons confirme également la réduction de l'activité de la flore ruminale (Balti, 1974, Nefzaoui et Abdouli, 1979, Nefzaoui et al 1982).

Trois hypothèses peuvent être évoquées:

2.4.1 Influence des matières grasses (surtout pour les grignons non épuisés)

Les concentrations élevées en acides gras libres dans le rumen peuvent altérer la digestion et l'appétit. Les matières grasses peuvent agir par l'un ou l'ensemble des facteurs suivants:

2.4.2 Facteurs inhibiteurs

Ce pourraient être des composés simples de type phénols qui inhiberaient les fermentations ou plus complexes de type tannins qui insolubiliseraient les protéines de la ration ou du grignon lui-même (Theriez et Boule 1970).

Cependant les résultats cités en général dans la bibliographie concernent les fruits avant extraction de l'huile, alors que cette opération élimine de grandes quantités de polyphénols et de tannins dans les margines.

Les analyses effectuées sur grignons par Nefzaoui (1978, 1980) ont révélés des taux de tannins inférieurs à 1% insuffisants pour exercer une influence négative sur la microflore du rumen et la digestibilité des protéines et des taux de polyphénols compris entre 0,15 et 0,75% de la matière sèche insuffisants pour inhiber les fermentations.

2.4.3 Influence de la lignine

Les grignons d'olive sont particulièrement riches en lignine et pauvres en contenu cellulaire. Il semble qu'il y ait le même phénomène qu'avec la paille de “protection” des carbohydrates liés à la lignine. En effet lorsque les grignons ont été traités aux alcalis leur digestibilité in-vitro a été presque quadruplée (Nefzaoui, 1983).

2.5 Valeur alimentaire des grignons d'olive

2.5.1 Digestibilité:

Tout d'abord il convient de rappeler que dans le cas de l'étude de certains sousproduits du type des grignons, plusieurs chercheurs (Michalet-Doreau, 1981, Orskov, 1977, Preston, 1981) ont mis en évidence l'importance du niveau de participation de l'aliment dans la ration totale, le type d'aliments (fourrages, concentrés) associés, le niveau d'alimentation de l'animal et finalement le mode de calcul ou d'estimation de la digestibilité.

Les études de digestibilité des grignons sont limitées et les résultats sont très hétérogènes. Le tableau 7 indique les principaux résultats de digestibilité in-vivo obtenus avec différents types de grignon.

Tableau 7: Principaux résultats de digestibilité in-vivo des différents types de grignons d'olive

Type de GrignonMode de déterminationMatière sècheMatière organiqueMat. Azotées TotalesMatières GrassesCellulose bruteSource
Pulpe grassePar différence, ovins
Par différence, ovins (24% de la ration)
Par différence, ovins (15% de la ration)
--
43,7
57,4
21,6
13,4
66,8
85,6
-
90,0
0
-
-
Maymone et al 1962
Theriez, Boule 1970
     "           "
Pulpe épuiséePar différence, ovins (21% de la ration)-69,428,0--Theriez, Boule 1970
Grignon brutIn-vivo sur ovins
In-vivo sur ovins
In-vivo sur différence sur ovins
-
-
In-vivo par différence sur ovins
-
-
32,9
-
-
-
30,8
-
35,4
26,2
31,0
45,7
6,6
-
24,5
10,0
9,0
23,6
65,5
86
57,7
89,6
89,2
75,2
28,4
0
29,6
-
29,6
-
Kellner, 1924
Meade, Guilbert 1927
Boza, Varela, 1960
Boza et al 1970
   "         "     "
Theriez, Boule 1970
G. partiellement dénoyauté, grasPar régression, ovins

Directe ovins
Par différence, ovins
41,9

-
-
49,9

37,2
21,6
32,5

19,4
15,5
91,5

84,1
85,5
22,2

33,6
12,8

BenHamouda 1975
Maymone, Carusi 1935
Maymone, Battaglini 1962
G. partiellement dénoyauté, épuiséPar différence, ovins
         "               "
         "               "
Par régression, ovins
Directe, ovins
         "                "
         "                "
-
-
Par différence, ovinsv
-
-
-
-
-
43,0
48,1
30,5
36,4
-
19,1
36,7
50,5
57,4
-
-
54,4
50,0
32,2
39,6
48,0
18,8
-
36,7
51,9
57,6
10,1
14,0
46,0
35,9
32,2
38,8
29,0
52,1
8,0
25,4
15,8
9,9
11,0
67,9
60,9
56,0
-
80,2
81,8
77,4
77,8
27,6
88,9
74,1
88,0
90,5
11,1
17,9
28,0
36,4
47,3
22,5
39,1
47,9
16,6
27,0
-
57,0
66,4
Maymone et al 1961
         "         "     "
Maymone, Carusi 1935
Nefzaoui, 1978
Nefzaoui, Abdouli 1978
Nefzaoui, 1980
Nefzaoui et al 1982
Eraso et al 1978
    "        "       "
Valamotis, 1983
Accardi et al, 1979
Duranti et al, 1978
      "       "        "

Il est parfois difficile d'après les compte-rendus d'expérience de classifier le type de grignon dont il s'agit, les conditions d'expérience ne sont pas toujour. clairement définies, de plus elles correspondent à des années différentes, des produits d'origines variées, etc. Il s'ensuit souvent des difficultés pour l'interprétation des résultats présentés.

D'une façon générale on peut toutefois conclure que:

2.5.2 Ingestion:

Les résultats disponibles sont rares et se rapportent essentiallement aux grignons partiellement dénoyautés épuisés ou non. (Nefzaoui, 1983, Boza et al 1970, Eraso et al 1978). Les grignons tels quels sont peu appétents et peu consommés. La plupart des essais décrits comportent 8 à 10% de mélasse (parfois 30%). Dans ces conditions les rations comportant une part plus ou moins importante (20 à 83%) de grignons sont très bien ingérés:

2.5.3. Dégradabilité

Très hautement ligno-cellulosiques les grignons d'olive ont selon Nefzaoui (1983) une dégradabilité très lente et les valeurs maximales atteintes sont très modestes (32% de la MS est dégradée après une durée de séjour de 72 h dans le rumen pour le grignon tamisé épuisé). La dégradabilité des protéines est aussi très faible, et cela peut s'expliquer par le fait que 75 à 90% de l'azote est lié à la fraction ligno-cellulosique entrainant ainsi une très faible solubilité de l'azote qui n'est que de 2,3% (N soluble % N total) pour le grignon brut, et de l'ordre de 0,2 à 0,4% pour les grignons tamisés.

2.5.4 Caractéristiques biochimiques au niveau du rumen:

Les rares données existantes proviennent des travaux effectués en Tunisie par Nefzaoui et al (1979, 1982) sur du grignon épuisé tamisé.

2.5.5 Comportement alimentaire

La présentation physique des grignons tamisés épuisés (particules de 1 à 4 mm) ne les apparente pas directement aux fourrages grossiers (paille, foin). Cependant ces grignons assurent une rumination et une ingestion tout à fait normales et identiques à celles du foin hâché (Tableau 8). Cet aspect favorable des grignons provient de leur richesse en élements de structure (teneurs élevévées en constituants pariétaux et surtout en ligno-cellulose).

Tableau 8: Comportement alimentaire de moutons de la race Texel, reçevant du grignon épuisé et tamisé (Nefzaoui et al., 1982)

 Foin haché (1)Foin pellets (1)Grignon (2)Grignon pellets (3)Grignon 4% soude pellets(4)Grignon 3% NH3(5)
Temps d'ingestion, %20,4014,8019,19,014,116,7
Temps de rumination, %32,906,1036,430,428,832,1
Nombre de bols de rumination, nbr./j--709,0494,0436,0574,0
Durée de bol (secondes)--44,053,057,048,0
DUI, min/g MSi/P0.75--3,21,1,72,7
DUR, min/g MSi/P0.75--6,23,83,45,2
Bol unitaire de rumination (nbr/g MSi/P0.75)--8,514,33,66,5

(1) Selon Y. Ruckebusch et J.P. Marquet, 1963
(2) Grignon mélassé à 8% et 100 g. d'orge concassée, consommation ad libitum (6 moutons, durée d'enregistrement de 12 jours)
(3) Grignon mélassé à 8% et 1,5% urée, puis mis en pellets. Distribué seul, consommation ad libitum - Idem 2
(4) Grignon traité au préalable avec 40 g. NaOH/Kg - Idem 2
(5) Grignon traité au préalable avec 3% d'ammoniac gazeux - Idem 2.
DUI = Durée Unitaire d'Ingestion
DUR =       "       "     de Rumination

2.6 Possibilités d'amélioration de la valeur alimentaire des grignons:

Comme pour la paille ce sont surtout les traitements aux alcalis qui ont fait l'objet de plus de travaux.

2.6.1 Traitement à la soude:

Les faibles quantités de soude, inférieures à 4% n'ont que peu d'effets sur la digestibilité in-vitro de la matière sèche. Celle-ci augumente progressivement pour atteindre des valeurs de 50 à 70% pour des quantités de 6 à 8% de soude (Abdouli, 1979; Nefzaoui, 1979). Le lavage et la filtration du grignon pour éliminer l'excès de soude réduit la digestibilité.

Le traitement de grignons gras à la soude peut entrainer la formation de savon par saponification. Ce phénomène a aussi été souligné par Karalazoo (1979). D'où la nécessité de ne traiter que des grignons épuisés ou d'utiliser des alcalis (Na2CO3, NH4OH) qui n'engendrent pas de réactions de saponification.

a) influence du traitement sur la composition chimique:

A part l'augmentation prévisible de la teneur en cendres, le traitement modifie surtout les teneurs des constituants pariétaux (Tableau 9) et de la fraction azotée liée à l'ADF.

Tableau 9: Teneurs moyennes en constituants pariétaux du grignon tamisé épuisé, traité ou non avec 4% de soude (6% de la MS) (Nefzaoui, 1979)

 Non traitéTraité (6% NaOH/MS)
NDF60,147,2
ADF49,938,8
ADL corrigé26,817,5
Hémi-cellulose10,28,3
Cellulose23,121,3
ADF-N/N total, %94,974,6

b) influence sur l'utilisation digestive:

La dégradabilité des protéines et de la matière sèche est améliorée. La digestibilité in-vivo de la matière sèche, et surtout celle des protéines et de la cellulose brute, sont augmentées. (Tableau 10).

Tableau 10: Influence du traitement à la soude (traitement industriel) sur la digestibilité “in vivo” des grignons tamisés épuisés

Mode de distributionTraitementCoeff. d'Utilisatior digestive apparent
MSMOMADCBNDFADFADLH.C.Cell.
Distribué seul, béliers noirs de Thibar (1)non traité
traité 4% NaOH
48
52
50
52
32
43
47
55
     
Mélassé en “pellets” distribué avec 100 g. foin et 1,5% urée, moutons Texel (2)non traité
traité 4% NaOH
31
35
32
36
39
46
23
33
24
33
18
26
14
23
49
62
26
29
Concentré à 40% de grignon, 49% d'orge, 8% mélasse et 3% minéraux, béliers noirs de Thibar (3)non traité
traité 4% NaOH
traité 4% NaOH + 1.5% urée
68
74
71
70
75
74
59
65
70
49
61
58
     

(1) Grignon tamisé épuisé à 26% CB, Nefzaoui, A., et Abdouli, H., 1979.
(2) Grignon tamisé épuisé à 14% CB, Nefzaoui, A., et Vanbelle, A., 1981
(3) Grignon tamisé épuisé à 26% CB, Nefzaoui, A., et Abdouli, H., 1979.

L'ingestion déjà importante n'est pas augmentée. Par contre la consommation d'eau de l'animal est plus que doublée et l'excrétion urinaire plus que triplée.

2.6.2 Ensilage avec des alcalis:

Des études en micro-silos (1,51) ont mis en évidence une amélioration de la digestibilité “in situ” importante avec des fortes doses de soude (8%), et supérieure à celle obtenue avec l'ammoniaque. (Tableau 11)

Tableau 11: Digestibilités “in situ” de silages de grignons tamisés épuisés traités aux alcalis (Nefzaoui, A. et al., 1982)

CUD aMSMOADFMAT
Témoin
Ammoniaque 2%
        "           4%
        "           6%
        "           8%
51.68
60.25
58.32
63.04
64.28
51.23
61.53
60.36
63.86
65.34
36.73
45.88
38.89
48.18
49.87
59.32
81.34
83.80
86.90
89.54
Soude 4%
    "     6%
    "     8%
62.86
62.46
78.51
62.00
60.55
77.67
46.63
47.17
62.04
72.84
73.93
79.35

2.6.3. Traitement à l'ammoniac

Des grignons tamisés épuisés préalablement mélassés ont été stockés en sac plastique avec injection de NH3 (3%). Il en résulte une amélioration importante de la valeur nutritive (Tableau 12) notamment par:

Tableau 12: Digestibilité, ingestion et bilan azoté de grignons tamisés épuisés ensilés avec de l'ammoniac* (Nefzaoui, A. et al., 1983)

 Grignon non traitéTraité 3% NH3
Digestibilités (%)
MS
MO
MAT
MG
CB
NDF
ADF
ADL
Hémi-cellulose
Cellulose
Ingestion g MS/j/P0.75

Bilan azoté: g N/j/P0.75
Ingéré
Fécal
Urinaire
Retenu

36
40
29
77
39
32
25
13
60
43
99


1,903 ( 100%)
1,353 ( 71%)
0,240 ( 13%)
0,310 ( 16%)

41
43
55
86
49
39
32
19
63
49
98


3,610 ( 100%)
1,632 ( 45%)
1,147 ( 32%)
0,831 ( 23%)

* Expérience factorielle en cross-over, avec des agneaux de la race Texel, reçevant les grignons à volonté et 100 g d'orge par jour.

2.6.4 Ensilage de grignons tamisés avec des fientes de volaille

Les essais réalisés par Nefzaoui et Deswysen (1982) ont montré que des ensilages comportant 70% de fientes ayant été accumulées pendant moins de 21 jours et 30% de grignons tamisés épuisés se conservaient de façon excellente (selon les critères d'appréciation de FLIEG)

2.6.5 Traitement au Na2 CO3

Vaccarino et al (1982) ont comparé des traitements à différentes doses de NaOH et Na2CO3 sur des grignons partiellement dénoyautés pendant 150 minutes à 70°C avant l'addition du solvant. Les deux méthodes améliorent considérablement la digestibilité in-vitro, la soude se révèlant toutefois plus efficace (Tableau 13).

Tableau 13: Effets de traitements de grignons partiellement dénoyautés avec NaOH ou Na2CO3 sur la digestibilité in-vitro (Vaccarino et al, 1982)

 TémoinNa OH, %Na2 CO3, %
2,95,78,63,87,211,4
Digestibilité de Mat. Organique15,820,732,350,826,940,647,9
Digestibilité Matière sèche9,78,827,231,95,139,446,5

2.6.6 Traitement mécanique:

Le seul traitement mécanique pratique consiste en la séparation partielle de la coque du noyau par tamisage ou ventilation. Ceoi a pour effet de réduire notablement le taux de cellulose brute (voir tableau 5) et de cellulose vraie mais paradoxalement très peu le taux de lignine (voir tableau 6).

Si l'on se reporte au tableau 7, l'effet du dénoyautage partiel sur la digestibilité des grignons non épuisés n'est pas évident: les résultats sont si peu nombreux et si hétérogènes que l'on ne peut pas en tirer de conclusions précises.

Cependant des travaux récents (Nefzaoui et al, 1983 - résultats non publiés) comparant des grignons épuisés non tamisés, traités avec différents alcalis (Figure 5) ont montré que le tamisage seul améliorait:

Le tamisage semble donc une méthode de traitement très efficace pour l'amélioration de la valeur nutritive des grignons épuisés.

2.6.7 Traitements biologiques:

Peu d'expériences ont été réalisées dans ce domaine. Cependant Karapinar (1977) et Worgan (1978) ont reporté que les tissus contenus dans les grignons d'olive sont résistants à la dégradation microbienne. Des cultures de champignons sur le résidu n'ont pas diminué de façon notable la teneur en fibres, même après un traitement aux alcalis. La culture de Sporotriclum pulverulentum sur le résidu tamisé a augmenté la teneur en matières azotées mais pas diminué significativement la teneur en cellulose brute (Tableau 14).

Figure 5: Effet du Tamisage du grignon épuisé comparé à divers traitements aux alcalis (Nefzaoui et el, 1983)

Figure 5

Tableau 14: Action de champignons (S, pulverulentum) sur des grignons d'olive

TraitementRendement: g/ 100g sous-produitComposition
Mat.SècheMATMATCellulose brute
Grignon1007,37,342
Gr. broyé, tamisé514,89,421
Culture de champignons43,56,314,520,7
Traitement alcalin + champ.348,52515

Sources: Karapinar (1977); Worgan (1978)
               Cités par Zoiopoulos, 1983

2.7 Utilisation des grignons d'olive dans l'alimentation des animaux:

Les grignons d'olive, sous leurs différentes formes sont utilisés traditionnellement dans la plupart des pays producteurs. Curieusement peu d'études approfondies ont été effectuées pour apprécier l'effet de leur incorporation à divers degrés dans des rations des animaux.

2.7.1 Les grignons bruts:

Ils sont utilisés en Tunisie en mélange à du son ou même du cactus pour alimenter les dromadaires sur une bonne partie de l'année ou les ovins pendant les périodes difficiles. Mais très peu d'essais ont été effectués avec ce type de grignon.

2.7.2 Les grignons gras partiellement dénoyautés:

a) sur ovins: Bloemeyer (1977) distribuant un concentré contenant de 0 à 40% de grignon avec mélasse-urée a obtenu des gains de poids de 125 à 101 g/j avec des moutons au pâturage reçevant 500 g de foin et le concentré en fonction du poids vif (20 à 30g/kg. poids vif).

Ben Ameur et Ben Hamouda (1975) substituant 0 à 30% d'orge par du grignon dans des rations de moutons ont obtenu des croissances sensiblement identiques mais légèrement décroissantes (274 g/j à 226 g/j) mais avec un indice de consommation supérieur.

Accardi et al (1979) remplaçant 30% de foin de sulla par 30% de grignons dans une ration pour agneaux comprenant 38% de maïs et 30% de tourteau de soja ont obtenu une croissance legèrement plus faible (191 g/j contre 209 g/j) et un indice de consommation supérieur (4,91 contre 4,24)

En Sardaigne, Piccarolo et Paschino (1978) Paschino et Piccarolo (1980) Dattilo (1980) Dattilo et Congiu (1979) ont introduit des grignons d'olives tamisés (environ 20%) dans des pellets contenant différents autres sous-produits et rapporté des productions laitières avec des brebis comparables à celles obtenues au pâturage.

Giouzelgiannis et al (1978) introduisant 15 et 25% de grignons (Procédé Kourgi) dans la ration d'agneaux n'ont pas mis en évidence de différences significatives en termes de gains de poids, d'ingestion ou qualité de carcasse: seul l'indice de consommation était supérieur au niveau de 25% de grignons.

b) sur bovins: Des expériences éffectuées en Italie (Piccinnini, 1906; Gugnoni, 1920; Maymone et Giustozzi, 1935) semblent montrer un effet positif des grignons sur la teneur en matière grasse du lait de vaches, avec une production de lait (à 4% MG) sensiblement équivalente, lorsque les vaches reçoivent de 1,8 à 4 kg de grignons/jour.

En Grèce Belibasakis (1982) alimentant des vaches laitères avec des proportions de 10 à 20% de grignons dans le concentré n'a pas constaté de différences significatives dans la production et la composition du lait.

Maymone et Giustozzi (1935) utilisant des génisses de 295 kg nourries pendant 60j avec du foin et de l'ensilage de luzerne plus de la farine de maïs ou des grignons (à 8% de MG) ont obtenu des gains de poids respectif de 630 g/j (avec 922 g/ j de maïs consommé) et 370 g/j (avec 775 g/j de grignons consommés)

2.7.3 Les grignons partiellement dénoyautés épuisés:

a) sur ovins:

Ces grignons ont été utilisés dans des rations de “disette” par Nefzaoui et Ksaier (1981) en Tunisie qui en ont incorporé 0–35 ou 70% du concentré distribué à des brebis gestantes d'abord puis allaitantes avec 300 g/j de paille. (Tableau 15) sur une période de 17 semaines. Les brebis reçevant 35% de grignons ont eu des performances comparables aux témoins. Celles en reçevant 70% ont perdu 20% de leur poids, le poids des agneaux à la naissance a été plus faible et la mortalité de ceux-ci beaucoup plus importante (61% contre 29%). Mais il est important de constater que cette ration a permis non saulement la survie des mères mais aussi de récupérer un nombre non négligeable d'agneaux sur une période de plus de 4 mois.l

Tableau 15: Entretien de brebis gestantes de la lutte à la mise-bas en Tunisie centrale (Ousseltia) avec des rations à base de grignons tamisés et épuisés. (Nefzaoui, A., Ksaier, H., 1981)

 Témoin35% Grignon70% Grignon
Composition des rations (%)
Grignon
Son
Mélasse
Urée
Minéraux

0.00
70.00
26.00
2.00
2.00

35.00
35.00
26.00
2.00
2.00

70.00
0.00
26.00
2.00
2.00
Performances
Nombre d'animaux
Poids initial, kg
Poids final, kg
Poids agneaux à la naissance
Ingestion g MS/j/P0.75

20
52.35
57.30
3.50
76.00

20
52.15
57.33
3.30
105.00

20
52.45
42.77
2.60
85.00

(1) Les brebis sont de la race barbarine âgées en moyenne de 6 ans
(2) Les animaux reçoivent 300 g/ j de paille et les rations à volenté

b) sur bovins:

Chez des jeunes bovins en croissance le remplacement de foin de vesce-avoine de qualité médicore par 0-20-40-60% de grignon épuisé tamisé a entrainé une baisse régulière du gain de poids, qui a été respectivement de 536-260-190-39 g/j. (Bougalech, 1980). Dans ce cas également une proportion aussi élevée que 60% de ce type de grignon dans la ration a permis d'assurer l'entretien des animaux.

En Libye, O'Donovan (1983) utilisant 32 génisses Holstein de 284 kg reçevant de la paille à volonté (5,7 kg/j) et 2,7 kg d'un concentré contenant 0-15-30-45% de grignons partiellement dénoyautés épuisés n'a las obtenu de différence de gain de poids, respectivement 688,706,695 et 698 g/j. Dans une autre expérience 12 génises et 12 taurillons Holstein pesant 130 kg et reçevant un minimum de paille (0,6 kg/j) et 3,3 kg d'un concentré contenant 0-15-30% de grignons ont eu des croissances respectives de 1.029, 975 et 813 g/j.

2.7.4 Les grignons partiellement dénoyautés épuisés traités aux alcalis:

Le traitement à la soude de grignons épuisés tamisés permet d'améliorer la digestibilité (voir paragraphe 251)

Tableau 16: Engraissement de moutons de la race barbarine avec des grignons tamisés traités ou non à la soude (Nefzaoui, A. et Abdouli, H., 1979)

 Témoin40% grignon non traité40% grignon traité
4% NaoH
40% grignon traité
% NaoH + Urée
Composition des rations
Grignon non traité
Grignon traité 4% NaOH
Orge
Mélasse
Urée
Minéraux + vitamines

-
-
89.00
8.00
-
3.00
40.00
-
49.00
8.00
-
3.00

-
40.00
49.00
8.00
-
3.00

-
40.00
47.40
8.00
1.60
3.00
Performances
Poids initial, kg
Poids final, kg
GMQ, g/ jour
Ingestion, g MS/j/P0.75
Indice consommation, kg MS/kg gain

41.94
54.18
175.00
89.00
9.29

37.49
49.31
169.00
109.00
10.94

37.64
52.09
206.00
108.00
9.04

36.78
51.04
203.00
110.00
9.24

(1) Chaque lot est composé de 10 moutons mâles, âgés de 15 à 16 mois
(2) Les animaux reçoivent 200 g de foin de vesce-avoine par jour et les concentrés à volonté
(3) L'essai a duré 90 jours

Alors que le replacement de 40% d'orge par 40% de grignon non traité dans le concentré distribué ad libitum à des moutons recevant par ailleurs 200 g/ j de foin n'a pas modifié leur croissance, le traitement avec 4% de soude a permis une augmentation du gain de poids et une amélioration de l'indice de consommation. L'addition d'urée n'a pas modifié ce résultat (Tableau 16). Les différences ne sont cependant pas spectaculaires. Ceci peut provenir du fait que la proportion de grignon reste limitée; 40% de la ration, que le reste de la ration est assez riche (environ 50% d'orge et 8% de mélasse) et que la proportion de soude est sans doute trop faible: 4% seulement (voir paragraphe 252). Il est doûteux que dans les circonstances économiques actuelles ce traitement à la soude soit rentabilisé par cette amélioration limitée des performances.

2.7.5 Autres perspectives:

Les prévisions de traitement des grignons épuisés pour la production de furfurol en Tunisie et sans doute dans d'autres pays devraient amenar à une augmentation de la proportion de grignons épuisés partiellement dénoyautés. Il serait possible - et souhaitable - d'effectuer ce dénoyautage au niveau des usines d'extraction et non à l'usine de furfurol. Ceci permettrait de diminuer les coûts de transport et de maintenir les grignons plus près des zones d'élevage et donc de les rendre plus disponibles pour les éleveurs.

2.8 Conclusions

  1. Les grignons sont des aliments grossiers ligno-cellulosiques de par:

  2. Les grignons ne contiennent probablement pas de substances toxiques ou inhibitrices. Leurs mauvaises utilisations digestive et métabolique, seraient principalement dûes à leur fort degré de lignification et aux processus technologiques d'extraction de l'huile, car ilsay subissent des échauffements souvent élevés.

  3. Distribués seuls:

  4. La pellicule et les coques sont très peu digestibles. Le tamisage qui élimine une partie ou la totalité des coques améliore la valeur nutritive du grignon. Un tamisage “poussé” ne laissant qu'un produit très léger constitué principalement de pellicule aurait un effect contraire. L'opération de tamisage doit conserver les morceaux de l'amandon brisé qui sont particulièrement riches en protéines et de digestibilité élevée.

  5. Leur utilisation sans aucun traitement préalable peut assurer:

  6. Des traitements peuvent améliorer la valeur nutritive des grignons:

    1. - Le traitement industrial à la soude malgré une amélioration certaine reste de portée limitée, car les investissements mis en oeuvre sont élevés.
    2. - Le traitement par voie d'ensilage, avec des doses de 6 à 8% de soude serait efficace, mais également trop coûteux.
    3. - Le traitement à l'ammociac gazeux (ensilage) serait plus prometteur, par une amélioration de la digestibilité et un apport d'azote supplémentaire.

  7. La complémentation des grignons par une source azotée de bonne qualité et de faible coût serait sans doute profitable - les premiers essais avec des fients de volaille semblent prometteurs.

  8. Le tableau 17 résume les possibilités d'utilisation des grignons d'olive en alimentation animale. Dans l'état actuel des connaissances, il apparait que tous les types de grignons peuvent être utilisés sans risque ad-libitum pour des opérations de sauvegarde, mais aucun ne peut assurer un type de production intensive.

Tableau 17: Possibilités d'utilisation des différentes types de grignon en alimentation animale

Type de productionSauvegardeEntretienProduction modéréeProduction intensive
Type de grignon    
G. Epuiséad-lib + fourrage +..---
G. Brutad-lib + fourrage +..ad-lib + fourrage +..--
G. Tamisé grasad-lib + fourrage+..>30%<30%-
G. Tamisé épuiséad-lib + fourrage +..ad-lib + fourrage +..<40-50%-
Pulpeidem grignon tamisé gras
  1. L'on ne retrouve pratiquement pas d'expériences sur procins, si ce n'est celle de Maymone et Durante (1945) qui ont Demplacé 50% de maîs dans une ration concentré qui en contenait 70% et ont obtenu des gains de poids respectifs de 940 g/j avec 70% de maîs et 770 g/j avec 50% de grignons gras (20% MG) partiellement dénoyautés et 20% de maîs sur une période de 64 jours avec des porcs pesant environ 16 kg au départ. Ces résultants n'ont toutefois pas été confirmés ultérieurement par d'autres expériences, et sont difficiles à expliquer compte-tenu de la teneur en lignocellulose des grignons.


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