SYSTEME MONDIAL D'INFORMATION ET D'ALERTE RAPIDE DE LA FAO
PROGRAMME ALIMENTAIRE MONDIAL

RAPPORT SPECIAL

MADAGASCAR: RAPPORT DE LA MISSION FAO/PAM CHARGEE D’EVALUER L’INCIDENCE DU CYCLONE GRETELLE SUR LES SECTEURS DE L’ALIMENTATION ET DE L’AGRICULTURE

23 avril 1997




1. VUE D’ENSEMBLE


Après le cyclone "Gretelle" du 23 et du 24 janvier 1997, le Gouvernement malgache a demandé une assistance à la FAO et au PAM pour évaluer les pertes de production alimentaire et les dégâts aux infrastructures agricoles occasionnés par le cyclone, estimer la situation des approvisionnements alimentaires pour 1997 et identifier les mesures nécessaires pour remettre en état les infrastructures agricoles. Une mission FAO/PAM a été envoyée sur le terrain du 10 au 29 mars 1997 et a visité les six sous-préfectures touchées qui sont celles de Befotaka, Farafangana, Midongy-Sud, Vangaindrona, Vohipeno et Vondrozo. Les membres de la mission ont rencontré les hauts fonctionnaires concernés aux niveaux national et local, des agriculteurs, des représentants des milieux d’affaires, des ONG, des institutions des Nations Unies et des donateurs bilatéraux. Ils ont aussi examiné les conclusions des enquêtes sur l’impact socio-économique et des rapports d’évaluation sur l’état nutritionnel dans les zones touchées.

La mission a estimé les pertes totales sur les cultures à 7 000 tonnes pour le riz, 123 500 tonnes pour le manioc et 8 000 tonnes pour les cultures de rapport (principalement café). Malgré une baisse possible des rendements, due au repiquage tardif du riz de la deuxième campagne, on prévoit une bonne récolte dans l’ensemble pour 1997, principalement grâce aux conditions climatiques favorables après le cyclone. La production céréalière totale de 1997 est estimée à 2,7 millions de tonnes, à peu près comme en 1996.

Compte tenu des bonnes perspectives de production, la majeure partie du déficit pourra être comblé localement. Cependant, durant la période de soudure actuelle, une aide alimentaire d’urgence devra être fournie aux enfants souffrant de malnutrition, aux femmes enceintes et aux mères allaitantes dans la zone touchée, ainsi qu’aux habitants de la sous-préfecture de Farafangana (dans toutes les municipalités rurales), de 5 municipalités de la sous-préfecture de Vohipeno située dans le bas Matitanana, de 10 municipalités de la sous-préfecture de Vangaindrano et 3 municipalités de la sous-préfecture de Vondrozo, soit 274 172 personnes au total. Le besoin total d’aide alimentaire d’urgence est estimé à 4 754 tonnes de riz, 791 tonnes de légumineuses, 92 tonnes d’huile végétale, 65 tonnes de sucre, 38 tonnes de lait en poudre et 154 tonnes de mélange maïs-soja (MMS). Trois cents tonnes de riz et 300 tonnes de MMS sont déjà disponibles dans le pays et le solde reste à couvrir.

La mission a identifié des mesures urgentes pour remettre en état le secteur agricole, notamment des distributions de semences et des programmes de redressement des cultures de rapport et de remise en état des périmètres d’irrigation et des routes d’accès.




2. L’AGRICULTURE DANS LE CONTEXTE MACRO-ECONOMIQUE

[ Les données et informations concernant cette section proviennent des sources suivantes: Rapport économique, 4ème trimestre 1996 : Banque mondiale, Mission Résidente de Madagascar; Madagascar: Country Information Brief, 1996 , Food and Agriculture Organization of the United Nations, Country Representation Mission et Rapport de la Mission FAO/PAM, 1994 . ]


Le programme de stabilisation économique lancé en 1995 a été poursuivi pendant l’année 1996 avec quelques résultats positifs: le taux d’inflation annuel a baissé, tombant de 37 pour cent en 1995 à 8 pour cent en 1996, et le taux réel prêteur de base appliqué par la Banque centrale est tombé de 33 pour cent à 17 pour cent au cours de la même période. Grâce au ralentissement de l’inflation, le taux réel prêteur de base est devenu positif en 1996. La dette publique globale est tombée de 6 pour cent du PIB en 1995 à 4,5 pour cent en 1996. La balance commerciale s’est un peu améliorée, de 2,5 par rapport à 1995, principalement grâce à l’augmentation des exportations des sociétés franches et des exportations de crevettes. Après l’augmentation des avoirs nets à l’étranger, qui ont pratiquement doublé entre décembre 1995 et décembre 1996, les réserves officielles de devises atteignaient pratiquement la valeur de trois mois d’importations à la fin de 1996.

L’agriculture joue un rôle prédominant dans l’économie malgache, puisqu’elle contribue pour environ 35 pour cent au PIB, emploie plus de 70 pour cent de la population active et assure 60 à 65 pour cent des recettes d’exportation nationales. Le Document-cadre de politique économique (1996-1999) souligne l’importance d’une participation accrue des producteurs au processus d’établissement de l’économie de marché, afin qu’ils puissent progressivement prendre la relève pour les services de santé animale, la gestion de l’eau, le crédit et la commercialisation des intrants.

Sur le potentiel de terres arables, qui est de 32,8 millions d’hectares, 3 millions d’hectares seulement sont cultivés chaque année car de nombreuses contraintes limitent l’expansion du secteur agricole, en particulier: insuffisance du crédit rural et des infrastructures de base nécessaires pour développer la production, notamment routes et systèmes d’irrigation; faible fertilité des sols aggravée par une grave dégradation de l’environnement due au déboisement et à l’érosion; et faible niveau technologique des exploitations. Les principales cultures vivrières sont le riz, qui est l’aliment de base et occupe 61 pour cent des surfaces cultivées et 82 pour cent des surfaces irriguées, le maïs, le manioc et les pommes de terre. Les cultures industrielles sont la canne à sucre, l’arachide et le coton, alors que les cultures d’exportation sont le café, le piment, la vanille, les clous de girofle et le sisal.




3. LE CYCLONE GRETELLE



3.1 Intensité

Le cyclone Gretelle a frappé le littoral malgache, près de Farafangana, les 23 et 24 janvier 1997. Il a atteint la côte le 23 janvier et l’oeil du cyclone a frappé Farafangana, dans le sud-est, le 24 janvier. Les vents soufflaient à une vitesse de plus de 220 km/h. Ce cyclone a été plus violent que le cyclone Bonita qui a dévasté le pays en 1996.

Le cyclone Gretelle a provoqué des inondations étendues dues au débordement de trois grands fleuves: le Manambatra (crue de 3 mètres) dans la zone de Farafangana; le Mananara (crue de 10 mètres) dans la zone de Vangaindrano; et le Matitana (crue de 4,50 mètres) dans la zone de Vohipeno. Il a aussi causé des inondations dans la sous-préfecture de Midongy-Sud, dans la vallée Itonampy, car la plupart des affluents et des cours d’eau qui drainent les bassins versants ont débordé.

En plus de ces trois bassins principaux et des crues de nombreux fleuves de la région, pratiquement toutes les plaines de la zone touchée ont été inondées pendant des périodes variables.

3.2 Dégâts aux cultures

Les cultures ont subi des dégâts variables suivant les régions: les plus touchées étant celles de Faranfagana, puis de Vangaindrano. A l’intérieur de chaque région, les dégâts aux cultures ont été inégalement répartis. Les plus sérieux ont été causés par: i) le vent dans la région de Farafangana, où les cultures pérennes ont le plus souffert (arbres déracinés, troncs éclatés, défoliation totale, pertes de fruits) et ii) les inondations prolongées dans la région de Vangaindrano. Les dégâts aux cultures sont décrits dans le détail ci-dessous.

Riz

Dans la zone touchée, trois principaux types de riz sont cultivés: i) le riz de la première campagne (vary hosy), semé en juin et récolté en novembre/décembre; ii) le riz de la deuxième campagne (vary vatomandry) semé en décembre et récolté en mai; iii) le riz pluvial, semé en novembre et récolté en mai.

La production relativement faible de riz de la première campagne, en grande partie recoltée avant le cyclone, a été sérieusement réduite par une sécheresse au premier trimestre de 1996. En outre, la situation a été aggravée du fait que les stocks qui restaient quand le cyclone a frappé ont été gravement endommagés, principalement par des inondations dans les zones les plus durement touchées, en particulier à Vangaindrano. Dans ces régions, les populations victimes du cyclone n’ont pas accès à la production de la première campagne. Dans quelques zones moins gravement touchées, il reste cependant de très petits stocks de riz de la première campagne.

En ce qui concerne le riz de la deuxième (principale) campagne, environ 60 pour cent de la superficie était déjà repiquée lors du passage de cyclone. Cependant, presque tous les plants repiqués et les pépinières ont été détruits, du fait de la submersion prolongée et de l’ensablement des rizières. Cependant, comme les inondations sont fréquentes, les riziculteurs ont appris à installer des pépinières en terrain sec et disposaient de plantules suffisantes, si bien que la surface sous riz vatomandry a retrouvé son niveau normal. Le cyclone a eu pour principale conséquence de retarder le calendrier de culture du riz, dont la période de pointe pour la récolte sera repoussée de la mi-juin à la mi-juillet, selon la date du repiquage. Comme les plants utilisés pour le deuxième repiquage sont plus vieux, les rendements de la prochaine récolte risquent d’être légèrement affectés. Cependant, grâce aux conditions météorologiques actuellement favorables pour le riz, on devrait avoir une bonne récolte de mi-juin à mi-juillet. La mission estime que la récolte du riz de la deuxième campagne sera réduite d’environ 10 pour cent dans les zones touchées.

Le riz pluvial n’a été endommagé que là où le terrain a glissé, sur les pentes cultivées, à l’intérieur des zones touchées. Cependant, comme les pluies sont bonnes en ce moment, la production de riz pluvial de cette campagne devrait être satisfaisante. Les pertes totales de la production du riz des deux campagnes (1997) sont estimées à 7 000 tonnes.

Manioc

En ce qui concerne le manioc, le cyclone a surtout endommagé les plantes relativement jeunes, là où les racines étaient en cours de tubérisation ou là où les tubercules n’étaient pas complètement développés. Le cyclone a entraîné la destruction totale des cultures dans les zones inondées (en particulier, dans les plaines mais même sur les terres d’altitude moyenne, en raison de la hauteur exceptionnelle des crues) et des dégâts dus au vent aggravés par l’effet de l’eau de pluie sur les racines. Outre la réduction substantielle de la production de manioc, estimée à 60 pour cent, le cyclone a retardé le calendrier de récolte dans les zones touchées. Sauf sur les parcelles de l’intérieur, la récolte ne commencera pas avant juillet-août et s’étalera sur le quatrième trimestre. Les pertes de la production de manioc sont estimées au total à 123 500 tonnes.

Café

Les dégâts à la production de café ont principalement été dus au vent et dans une moindre mesure aux inondations, qui ont surtout endommagé les plantations situées en plaine ou sur les parties les plus basses des collines dans les zones fortement inondées. La production de café a sérieusement souffert dans toute la zone, mais les dégâts et les pertes les plus importants ont été enregistrés dans la région de Farafangana, où la production sera considérablement réduite en 1997.

Les plus gros dégâts à long terme ont été provoqués par la chute des arbres d’ombrage dans les plantations. Dans la région de Farafangana, la perte de production totale pour la campagne de 1997 est estimée à 85 pour cent. Dans les autres zones touchées (Befotaka, Midongy-Sud, Vangaindrano, Vohipeno et Vondrozo), la perte atteindrait entre 30 et 45 pour cent. Pour l’ensemble de la zone sinistrée, la perte totale de production en 1997 est estimée à environ 6 600 tonnes, ce qui représente 60 pour cent de la production totale de la zone, et entre 8 et 10 pour cent de celle du pays.

Poivre

La culture de poivre dans la zone touchée se caractérise sur l’utilisation d’arbres d’ombrage des caféiers (Bonara - Albizzia lebbeck principalement) pour soutenir les plants de poivre. Les vents ont directement endommagé quelques plants de poivre mais les dégâts les plus importants ont été causés par les arbres utilisés comme tuteurs, qui ont été cassés, courbés ou déracinés par le cyclone.

La récolte de "poivre léger" doux coïncidait à peu près avec la période où le cyclone a frappé. Elle a donc été directement touchée par Gretelle, mais reste marginale par rapport à la récolte principale qui a lieu six mois plus tard. Cependant comme cette dernière est le produit de la floraison du premier trimestre de l’année, elle a été directement influencée par le cyclone. La mission a noté la présence de fleurs dans les plantations touchées. Le développement des lianes dans les mois à venir conditionnera la prochaine récolte. La réduction de la production de poivre due au cyclone dans la région de Farafangana, qui représente plus de 90 pour cent du potentiel de production de la zone sinistrée, est estimée à 60 pour cent. Les pertes totales sont estimées à 235 tonnes, soit 10 à 12 pour cent de la production nationale de poivre.

Clous de girofle

La production de clous de girofle dans la zone touchée est surtout concentrée au sud de Vangaindro dans la région de Matanga. Cette culture est généralement très sensible aux cyclones, qui peuvent provoquer, après leur passage, un taux de mortalité important (comme cela a été le cas pour les cyclones Géralda-Bonita dans la région de Toamasina). Les pertes et les dégâts à cette culture semblent être modérés et l’on prévoit que la végétation reprendra très bien, car la principale région de production se trouvait à l’angle sud de la zone dévastée par les vents violents. Cependant la production de 1997 est gravement menacée, en partie en raison de la vulnérabilité de la plante, et en partie à cause du caractère variable de la production (une bonne année est généralement suivie d’une mauvaise année), étant donné que la récolte de 1996 a été supérieure à la moyenne. Les pertes de production dans la zone touchée sont estimées à 1 050 tonnes (85 pour cent), entraînant une perte totale, au niveau national, de 7 à 10 pour cent.

Litchi

Les dégâts ont été pour l’essentiel concentrés dans la région de Farafangana et au sud de Vohipeno. Cette culture pérenne est celle qui a le plus gravement souffert du cyclone, à la suite d’un grand nombre d’arbres détruits (40 pour cent selon les estimations) dans la région de Farafangana. La chute globale de la production dans l’ensemble de la zone touchée est estimée à 85 pour cent. Cependant, cette perte n’affectera pas le potentiel d’exportation régional et national car la zone sinistrée n’assure qu’un pourcentage infime des exportations.

Le Tableau 1 résume les estimations de pertes de production pour les principales cultures dans la zone dévastée par le cyclone.

Tableau 1: Estimation des pertes sur les cultures principales dues au cyclone Gretelle (en tonnes)

Culture Pertes estimées
Riz 7 000
- Première campagne 1 400
- Deuxième campagne 5 600
Manioc 123 500
Café 6 600
Poivre 235
Clous de girofle 1050


3.3. Dégâts dans le secteur de l’élevage

Le cheptel national comprend plus de dix millions de bovins (principalement zébus), 2 millions d’ovins, 900 000 porcins et 20 millions de volailles. Les pertes animales ont été relativement faibles par rapport aux pertes végétales. Les zones fortement inondées ont subi plus de pertes. Les dégâts aux volailles ont été plus sérieux, mais difficilement quantifiables.

3.4 Dégâts dans le secteur des forêts

Les dégâts les plus sérieux ont été enregistrés dans les forêts primaires, en particulier dans la zone côtière. Ils ont été considérables dans la Réserve spéciale N° 8, à Manombo (ANGAP - Association Nationale pour la Gestion des Aires protégées). A en juger par l’expérience de 1956, il devrait falloir une vingtaine d’années pour régénérer la forêt.

3.5 Dégâts dans le secteur des pêches

Les principaux dégâts matériels sont liés à la perte des pirogues et des filets le long du littoral, due au débordement des cours d’eau. Dans les régions de Farafangana et de Vangaindrano, les pêcheurs traditionnels représentent environ 5 pour cent de la population totale. Les pertes subies par la population de pêcheurs sont importantes et pourraient atteindre environ 450 000 FMG pour l’équipement "pirogues-filets". Comme résultat, certaines personnes travaillant dans ce secteur sont à présent sans emploi, par suite de l’absence d’équipement.




4. PRODUCTION VIVRIERE



4.1. Tendances de la production alimentaire: 1990/1996

La production totale des principales cultures vivrières a progressé de 3,4 pour cent entre 1990 et 1996, au rythme de 0,5 pour cent par an, alors que les productions de riz et de manioc ont respectivement augmenté de 3,3 pour cent et de 2,7 pour cent, au cours de la même période (Tableau 2). Le taux de croissance annuel de la production des principales cultures vivrières est resté bien inférieur au taux de croissance annuel de la population, estimé à 2,8 pour cent.

Tableau 2: Evolution de la production nationale pour les principales cultures vivrières, 1990/96 (en milliers de tonnes)


1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996
Céréales 2581 2496 2588 2723 2519 2634 2734
Riz (non décortiqué) 1/ 2421 2342 2450 2550 2357 2450 2550
Maïs 155 145 130 165 155 177 180
Blé 5 9 8 8 7 7 4
Autres cultures 3080 3097 3005 3160 3218 3155 3169
Manioc 2292 2307 2280 2350 2360 2400 2353
Patates douces 486 488 450 498 560 450 500
Pommes de terre 272 273 275 280 270 275 280
Arachide 30 29 22 32 28 30 36


Source: Ministère de l’agriculture et du développement rural, février 1997
1/ Le chiffre figurant sous l’année civile comprend la production de la première campagne récoltée à la fin de l’année précédente, la production de la deuxième campagne (principale) et la production du riz pluvial, recoltées dans l’année.

4.2 Perspectives de production pour 1997

Malgré une légère baisse des rendements, due au repiquage tardif du riz de la deuxième campagne, la Mission prévoit une bonne récolte pour 1997, principalement grâce aux conditions climatiques favorables. La production céréalière de 1997 devrait atteindre 2,7 millions de tonnes, à peu près comme en 1996, dont 2,5 millions de tonnes de riz, 180 000 tonnes de maïs et 5 000 tonnes de blé.

4.3 Besoins pour le redressement de l’agriculture

Le Cyclone Gretelle a provoqué des dégâts dans le secteur de l’agriculture dans le sud-est, en particulier dans les sous-préfectures de Farafangana et de Vangaindrano. La mission a identifié des mesures urgentes et à moyen terme pour redresser le secteur: celles-ci comprennent la distribution de semences et la relance des cultures de rapport. Les périmètres d’irrigation des cultures rizicoles ont été sérieusement endommagés à la fois à cause de la dégradation catastrophique constatée en amont et de l’état déplorable des infrastructures hydro-agricoles. Les provinces de Midongy-Sud et de Befotaka se sont retrouvées isolées du reste du pays à cause des glissements de terrain, de la destruction des ponts et de la formation de ravines. Des mesures d’urgence devraient être prises pour sauvegarder la prochaine récolte de riz de la première campagne, par de programmes de remise en état des périmètres d’irrigation et des routes d’accès.

Les conclusions et les recommandations de la mission concernant le redressement de l’agriculture sont en cours de finalisation et seront communiquées aux donateurs par le Bureau des opérations spéciales de secours de la FAO (TCOR). Bien qu’il est possible de mettre en oeuvre des programmes "vivres-contre-travail" pour remettre en état certaines infrastructures hydro-agricoles et routes de desserte, cette approche semble difficilement réalisable pour certains types de travaux de remise en état qui demandent de hautes qualifications techniques spécialisées.




5. SITUATION DES APPROVISIONNEMENTS ALIMENTAIRES


La situation alimentaire des habitants de la zone touchée est précaire, en particulier pendant la période de soudure, par suite des pertes et des dégâts occasionnés aux cultures et de la récolte médiocre de riz de la première campagne. Pour résoudre les problèmes alimentaires, on récolte en ce moment le manioc, qui est consommé entre les deux campagnes, 5 à 6 mois après les semis dans les zones côtières où la pression de la population est la plus forte. Les rendements sont très bas parce que les cultures sont récoltées avant d’avoir atteint la maturité et ont été endommagées par le cyclone (pourriture des racines). La production des autres cultures recoltées pendant la période de soudure (arbre à pain, taro et bananes) a aussi fortement diminué à cause des dégâts dus au cyclone. La situation alimentaire est devenue si précaire, pendant l’actuelle période de soudure que, dans les zones les plus gravement touchées, les populations se nourrissent de plus en plus de plantes sauvages (tavolo, hofika et viha).

Après le cyclone, les prix de certains aliments de base ont monté en flèche dans les zones les plus gravement sinistrées. La flambée des prix a été particulièrement forte dans les régions de Midongy-Sud et Befotaka, devenues inaccessibles à cause de la destruction des ponts et de la formation de ravines lors du passage du cyclone. A Midongy-Sud, au début du mois de janvier 1997 le prix du riz était de 1 750 FMG le kg, mais en mars il était passé à 3 240 FMG le kg, soit une hausse de 85 pour cent. A Befotaka, le riz, qui se vendait à 1 050 FMG le kg, au moment de la récolte en décembre 1996, est monté à 2 700 FMG en mars 1997, soit une augmentation de 157 pour cent. A l’inverse, les prix des animaux d’élevage ont chuté d’au moins 20 pour cent sur la plupart des marchés dans la zone sinistrée, ce qui laisse penser que la demande s’est effondrée par suite de la détérioration du pouvoir d’achat des acheteurs potentiels. Beaucoup de paysans vendent de nombreux animaux (principalement volaille) pour assurer leur subsistance durant cette période de soudure difficile. Les prix du poisson dans la zone touchée se sont aussi effondrés, principalement à cause de la faible demande, ce qui fait que les pêcheurs ne couvrent pas leurs frais. La pêche à la langouste, qui est une source de revenu importante, ouvrira le 1er mai 1997. Si les prix de ce produit sont bons, la situation économique des pêcheurs devrait s’améliorer. Cependant, ceux qui ont perdu leurs engins et leur équipement de pêche n’en profiteront pas. Les prix de quelques-unes des principales cultures vivrières et de certains autres articles sont résumés au Tableau 3.

Tableau 3: Prix de quelques cultures vivrières et autres articles, dans chaque région touchée, mars 1996 - mars 1997 (Francs malgaches/kg).


Riz Haricots Arachide Viande (boeuf) Sel Sucre

96 97 97/96

%

96 97 97/96

%

96 97 97/96

%

‘96 ‘97 97/96

%

96 97 97/96

%

96 97 97/96

%

Befotaka 1800 2700 50 950 1440 51 1300 1800 38 - - - 1300 2700 107 5000 11500 130
Farafan 1980 2160 9 2100 2500 19 2400 2600 8 7000 4000 - 40 900 950 6 3100 3250 5
Midong 1800 3240 80 1260 2160 71 1500 2400 60 - - - 1250 3600 188 4000 8000 100
Vangan 1980 2520 27 3000 3200 7 2800 3000 7 6000 5000 - 20 900 1000 11 3200 3400 6
Vehipen 2000 2150 8 2880 4500 56 1600 1700 6 5500 3000 - 45 1500 1650 10 5400 6480 20


Source: Enquêtes de la mission. Midong = Midongy; Farafang = Farafangana; Vangan = Vangaindrano; Vehipen = Vehipeno.

5.1 Bilan de l’offre et de la demande de céréales pour 1997/98

Vu l’importance des céréales dans l’alimentation de la population malgache (plus de la moitié de l’apport calorique), l’analyse de l’offre et de la demande présentée ci-dessous ne porte que sur ces aliments.

Etant donné que le riz de la deuxième campagne a été répiqué, la mission prévoit pour 1997, sous réserve que la menace actuelle d’infestation d’acridiens soit maîtrisée, une production céréalière de 2,7 millions de tonnes, comme en 1996, comprenant 2,5 millions de tonnes de riz, 180 000 tonnes de maïs et 5 000 tonnes de blé.

Comme la plupart des paysans vendent habituellement le gros de leur production juste après la récolte, et comme les stocks ont été détruits par le cyclone, on estime que les stocks paysans sont négligeables. En effet, dans la zone touchée beaucoup de petits exploitants n’ont même pas de semences en réserve pour les prochains semis de riz. Dans le secteur commercial, après la libéralisation des échanges de produits alimentaires en 1988, qui a favorisé la prédominance sur le marché de grandes entreprises privées, il est difficile d’évaluer avec précision les quantités en stocks tant dans les provinces qu’à Antananarivo. Sur la base des chiffres fournis par le Ministère du commerce, la mission a estimé les stocks céréaliers d’ouverture à 65 000 tonnes, au 1er janvier 1997.

D’après le recensement démographique d’août 1993, dont les résultats ont été publiés en mars 1997, la population nationale est de 12,24 millions d’habitants. Le taux de croissance démographique étant de 2,8 pour cent [ Les estimations du taux de croissance annuel de la population malgache varient considérablement. Le taux de 2,8 pour cent, retenu ici, est celui projeté par la Banque mondiale pour 1989-2000.] par an, la population devrait compter 14,01 millions d’habitants à la mi-juin 1997. Les besoins céréaliers totaux pour la consommation humaine ont été établis sur la base d’une consommation annuelle par habitant de 120 kg de riz, 10 kg de maïs et 5 kg de blé. Pour le maïs et le blé, les besoins sont ceux calculés par la mission FAO/PAM de 1994, mais le besoin en riz est inférieur au chiffre établi par cette même mission, qui était de 125 kg.

L’utilisation des céréales à des fins fourragères est considérée comme négligeable étant donné le système d’élevage pratiqué. Les autres utilisations céréalières comprennent les quantités conservées comme semences et les pertes. Au total, les utilisations non alimentaires et les pertes devraient représenter 8 pour cent pour le riz, 13 pour cent pour le maïs, et 5 pour cent pour le blé.

Sur la base des chiffres fournis par le Ministère du commerce et des interviews auprès des commerçants privés, les importations commerciales prévues sont estimées au total à 125 000 tonnes (65 000 tonnes de riz et 60 000 tonnes de blé).

Tableau 4: Madagascar: Bilan céréalier de l’offre et de la demande, 1997/98 (en milliers de tonnes)


Riz (usiné) Maïs Blé Total
A. DISPONIBILITES NATIONALES 1 756 184 10 1 950
Stocks d’ouverture 56 4 5 65
Production 1997 1 700 180 5 1 885
B. UTILISATION TOTALE 1 831 184 81 2 096
Utilisation alimentaire 1 681 140 70 1 891
Semences, fourrage et autres utilisations 136 23 1 160
Stocks de clôture 14 21 10 45
C. BESOINS D’IMPORTATION 75 0 71 146
Importations commerciales prévues 65 0 60 125
Aide alimentaire 10 0 11 21

Le bilan ci-dessus met en évidence un besoin d’aide alimentaire total de 21 000 tonnes.




6. BESOINS D’AIDE ALIMENTAIRE D’URGENCE


Compte tenu de la pénurie alimentaire dans les zones les plus durement touchées (Zone A), la mission estime que la population rurale, estimée à 274 172 habitants, aura besoin d’une aide alimentaire d’urgence pendant la période de soudure actuelle jusqu’à la récolte du riz de la deuxième campagne.

On propose de fournir une ration quotidienne individuelle de 300 g de riz et 50 g de légumineuses. Cette ration fournira un apport journalier de 1 248 calories et 31 grammes de protéines, représentant 66 pour cent de l’apport énergétique recommandé par le PAM. Cette ration a été choisie sur la base de l’expérience d’aide alimentaire d’urgence fournie en 1994 aux victimes du cyclone Geralda et des habitudes alimentaires des habitants de cette région.

Les résultats de l’enquête nutritionnelle conduite par CRIC du 24 au 28 février 1997 dans les six sous-préfectures touchées par le cyclone Gretelle, avec la collaboration de CARE, MSF, UNICEF et USAID, montrent que le taux de malnutrition aiguë a fortement augmenté parmi les enfants de 6 à 59 mois (17,5 pour cent contre 10,6 pour cent avant le cyclone). Cet accroissement est encore plus marqué pour les cas de malnutrition aiguë sévère. La malnutrition sévère et les oedèmes sont tout aussi alarmants et montrent que pour une catégorie d’enfants, le risque de mortalité est élevé. Les résultats révèlent une situation de crise et la gravité inhabituelle de la malnutrition pendant la période qui a précédé l’enquête. Afin de remédier à cette situation, MSF a ouvert un CRENI (Centre de réhabilitation nutritionnelle intensive) à Vohipeno le 23 février 1997 et compte en ouvrir d’autres à Farafangana, Vangaindrano, Vondrozo et Midongy. CARE International mettra aussi en place plusieurs CRENA (Centre de réhabililitation nutritionnelle ambulatoire) au profit des enfants atteints de malnutrition modérée.

Compte tenu de ce qui précède, la mission recommande de fournir une aide alimentaire d’urgence aux enfants souffrant de malnutrition sévère et modérée, dont le nombre est de 18 173 selon l’enquête nutritionnelle susmentionnée (il y a au total dans la région 103 850 enfants de moins de cinq ans). Comme le groupe d’âge des 6-59 mois est celui qui traduit le mieux l’état nutritionnel de toute population, la mission propose de fournir également une aide alimentaire d’urgence aux familles des enfants atteints de malnutrition qui seront soignés dans les CRENA dans les zones relativement moins touchées (Zone B), sur la base de quatre personnes par famille. En distribuant l’aide alimentaire aux familles, on s’assurera aussi que la ration donnée aux enfants n’est pas consommée par leur famille. Les distributions aux familles prendront fin à la prochaine récolte de riz. Bien que, l’aide alimentaire destinée aux enfants atteints de malnutrition sera maintenue jusqu’en septembre 1997 pour prévenir les rechutes, chaque enfant bénéficiera d’une aide alimentaire pendant six semaines.

La mission recommande également que les femmes enceintes et les mères allaitantes de la Zone B reçoivent aussi une aide alimentaire d’urgence. Leur nombre est estimé à 23 809 (4,5 pour cent de la population totale de la zone, pour les femmes enceintes et 7,5 pour cent pour les mères allaitantes, selon les pourcentages employés par le Ministère de la santé). Le tableau ci-dessous récapitule les besoins d’aide alimentaire d’urgence estimés par la mission.

Tableau 5: Estimation des besoins alimentaires

Types de bénéficiaires Nombre de béné-ficiares Durée de l’aide (en jours) Riz (tonnes) Légumineuses (tonnes) Huile (tonnes) Sucre (tonnes) Lait en poudre (tonnes) MMS (tonnes)
Enfants atteints de malnutrition, CRENI 7 581 180 - - 38 38 38 49
Enfants atteints de malnutrition, CRENA 18 173 180 - - 54 27 - 105
Distribution générale, Zone A 274 172 50 4 113 685 - - - -
Distribution aux familles des enfants atteints de malnutrition dans les CRENA, Zone B 18 960 50 284 47 - - - -
Femmes enceintes et mères allaitantes, Zone "B" 23 809 50 357 59 - - - -
TOTAL 4 754 791 92 65 38 154

Le coût du transport intérieur, de l’entreposage et de la manutention est estimé à 90 dollars E.-U. la tonne.

La Fédération internationale de la Croix rouge et la Croix rouge malgache se sont engagés à fournir l’aide alimentaire requise pour l’ensemble de la population dans les sous-préfectures de Midongy et de Befotaka. Selon les différents critères de ciblage des bénéficiaires indiqués plus haut, la mission a calculé que l’aide alimentaire nécessaire pour ces deux sous-préfectures pendant 50 jours s’élèvera à 172 tonnes de riz, 31 tonnes de légumineuses et 14 tonnes d’huile.

CARE International et CRS ont aussi reçu du gouvernement des Etats-Unis un don de 300 tonnes de MMS, qui sera distribué aux enfants souffrant de malnutrition modérée, par l’entremise des CRENA.

A ce jour, le PAM a fourni au total 300 tonnes de riz et 10 tonnes de matières grasses alimentaires.

En conséquence le solde restant à couvrir s’élève à 4 457 tonnes de riz, 791 tonnes de légumineuses, 82 tonnes d’huile, 65 tonnes de sucre et 38 tonnes de lait en poudre.

L’Union européenne prévoit de livrer une aide alimentaire d’une valeur de 2,0 millions d’ECU, par l’intermédiaire d’ONGs.

Depuis le passage du Cyclone Gretelle, 297 tonnes de riz ont été distribuées par le Conseil national de Secours (CNS) à tous les habitants de la région sinistrée. Cependant, comme les quantités disponibles étaient très faibles, les rations fournies à la population ont été bien inférieures aux besoins (entre 285 grammes et 1 kg de riz par famille et par jour, pendant trois mois).

CARE International a mis en place un Programme "vivres/espèces-contre-travail", dont le coût est estimé à 500 000 dollars E.-U., pour la remise en état des routes endommagées par le cyclone, qui devrait permettre de remettre en état 500 km de pistes rurales et de désenclaver certaines sous-préfectures et municipalités qui sont isolées. Les fonds fournis jusqu’à présent s’élèvent à 212 000 dollars E. -U., dont 137 000 dollars E. -U. ont déjà été dépensés. Les travaux de réfection des pistes restant à effectuer nécessitent au total 44 643 journées de travail. La mission propose que les travailleurs recrutés pour ces travaux reçoivent la moitié de leur rémunération en nature, sur la base de 1,120 kg de riz par journée de travail. La quantité totale de riz requise est donc estimée à 50 tonnes.

Le présent rapport a été établi sous la responsabilité des Secrétariats de la FAO et du PAM à partir d'informations provenant de sources officielles ou non. Il est réservé à un usage officiel. La situation pouvant évoluer rapidement, prière de s'adresser aux soussignés pour obtenir des informations complémentaires, le cas échéant
Abdur Rashid
Chef, SMIAR, FAO
Télex: 610181 FAO l
Télécopie: 0039-6-5225-4495
Courrier électronique:INTERNET:[email protected]..
M. Sondjo
Coordonnateur des programmes, OSA/PAM
Télex: 626675 WFP l
Télécopie: 0039-6-5228-2837

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