SYSTEME MONDIAL D'INFORMATION ET D'ALERTE RAPIDE DE LA FAO SUR L'ALIMENTATION ET L'AGRICULTURE 

RAPPORT SPECIAL

LES PLUIES ABONDANTES DUES AU PHENOMENE EL NIÑO DEVASTENT LES CULTURES DANS CERTAINES ZONES D’AFRIQUE DE L’EST

5 février 1998




VUE D’ENSEMBLE

Depuis octobre 1997, des pluies particulièrement abondantes dues au phénomène El Niño ont dévasté de nombreuses zones d’Afrique de l’Est, entraînant de graves inondations qui ont perturbé la production et la distribution de vivres. Les inondations ont également provoqué de vastes dégâts aux cultures, aussi bien dans les champs que dans les entrepôts, et causé de graves pertes dans les troupeaux. L’infrastructure de la sous-région (routes, ponts, chemins de fer) a été gravement endommagée, ce qui a fortement bouleversé la circulation des biens tant au plan national qu’international. Dans des pays comme la Somalie et le Kenya, on signale également d’importantes pertes de vies humaines. Une aide alimentaire est actuellement fournie aux populations sinistrées de ces pays; une aide massive reste néanmoins nécessaire de toute urgence sous la forme de vivres mais également d’un appui logistique, compte tenu des problèmes de transport. Dans la sous-région, environ 10 millions de personnes ont actuellement besoin d’une aide d’urgence.


SITUATION PAR PAYS

SOMALIE

Les pluies torrentielles tombées à la mi-octobre ont provoqué les inondations les plus graves des dernières décennies, entraînant la mort de 2 000 personnes, de graves dégâts aux logements et aux infrastructures, des pertes de cultures et de bétail et le déplacement de 250 000 personnes.

Les pluies abondantes qui ont continué à tomber jusqu’au début de janvier ont nui aux cultures de la campagne secondaire "Deyr" de 1997/98, à peine semées, qui assurent normalement quelque 20 pour cent de la production céréalière totale. Les zones les plus touchées sont les terres agricoles du sud, le long des fleuves Juba et Shebelle, notamment Baidoa, Q’dhere, Dinsor, Bardere, Jilib, Jamame, Sablale, Brava, Kismayo, Xagar et Afmadow, où, selon les estimations, 80 pour cent des cultures auraient été perdues. A la faveur de la décrue, on a refait les semis à grande échelle à partir de décembre mais les résultats restent incertains. Selon des estimations préliminaires, la production pour l’ensemble du pays accuserait une baisse d’un tiers par rapport à la normale. Il s’agirait alors de la quatrième récolte consécutive inférieure à la moyenne. On est actuellement en train d’évaluer plus en détail les résultats de la campagne "Deyr". Les inondations ont également provoqué des pertes parmi les stocks céréaliers constitués par les ménages après la récolte principale "Gu" de 1997. La production de cette campagne était également médiocre à cause de diverses vagues de sécheresse. La production céréalière globale pour 1997/98 est estimée provisoirement à 290 000 tonnes, soit à peu près le niveau médiocre de la campagne précédente. Les besoins d’importation pour la campagne de commercialisation 1997/98 (août/juillet) ont été révisés en hausse à 310 000 tonnes, dont 110 000 tonnes qui devront être fournies au titre de l’aide alimentaire.

Les inondations ont provoqué des pertes de bétail estimées à 35 500 animaux mais la poussée de fièvre de la vallée du Rift, combinée à d’autres maladie animales qui depuis octobre s’est propagée du nord-est du Kenya vers le sud de la Somalie, serait apparemment responsable de la perte d’un nombre encore plus important d’animaux domestiques, principalement de camélidés et de caprins.

KENYA

Les pluies abondantes tombées notamment en novembre et en janvier ont entraîné de graves inondations qui ont provoqué des pertes de vies humaines, de grands dégâts aux infrastructures et aux logements, l’isolement de nombreux villages et le déplacement d’une part importante de la population locale. Les zones les plus touchées sont la province de la Côte, la province du Nord-Est et diverses zones de la province de l’Est. Elles ont été déclarées zones sinistrées par le gouvernement, qui a lancé un appel à l’aide internationale pour faire face à cette situation d’urgence.

Les pluies ont également eu un effet négatif sur le maïs de 1997/98, principal aliment du pays. Les pluies torrentielles tombées en octobre/novembre, au moment de la récolte de la campagne principale assurant environ 80 pour cent de la production annuelle, ont réduit les rendements en maïs, qui avaient déjà souffert d’une vague de sécheresse au moment critique du remplissage des grains. Les rendements en blé ont également souffert des pluies abondantes tombées pendant la moisson. Toutefois, les effets les plus dévastateurs des inondations se sont fait sentir sur les cultures de la seconde campagne, produites de la mi-octobre à février dans les zones à régime bimodal dans les provinces de l’Ouest, du Centre et de l’Est. On estime que la production de maïs au cours de cette campagne a baissé d’un tiers par rapport à la normale alors que la récolte de haricots est fortement réduite à cause des intempéries mais aussi du manque de semences. La production totale de maïs pour 1997/98 est estimée à 2,3 millions de tonnes, soit un peu plus que le niveau médiocre de 1996/97 mais moins que la moyenne des cinq dernières années. La situation des approvisionnements alimentaires devrait être tendue dans les prochains mois. Les besoins d’importation de maïs, qui devraient être couverts principalement par les voies commerciales, sont estimés à 800 000 tonnes. Ce niveau est toutefois inférieur à celui de la campagne précédente, lorsque les importations de maïs avaient atteint un million de tonnes. Les importations totales de céréales, y compris de blé et de riz - denrées pour lesquelles le pays souffre d’un déficit structurel - devraient s’établir en 1997/98 (octobre/septembre) à 1,2 million de tonnes.

Les pluies abondantes des derniers mois ont amélioré l’état des pâturages mais en octobre, une poussée de fièvre de la vallée du Rift, causée par les inondations qui ont entraîné une pullulation des moustiques, vecteur de ce virus, s’est traduite par de nombreuses pertes de vies humaines. Ces conditions ont aussi favorisé le développement de différentes maladies animales qui ont causé la perte de milliers de bovins, ovins, caprins et camélidés.

TANZANIE

Les pluies abondantes et les inondations qu’elles ont provoquées à partir de novembre 1997 ont gravement endommagé le système routier et ferroviaire du pays, créant de sérieux problèmes pour le transport d’articles essentiels vers les zones sinistrées. La situation est particulièrement préoccupante dans les villages reculés où les agriculteurs ont perdu leur production ou leurs stocks à cause des pluies et où les secours ne peuvent pas arriver car les routes sont impraticables.

Les pluies abondantes ont également entraîné des pertes localisées de récolte et des dégâts aux cultures de la campagne "Vuli" de 1997/98, qui va d’octobre à février. Les zones les plus touchées sont les terres basses des régions de Mara, Arusha, Kilimandjaro, Tanga et Shinyanga ainsi que dans le sud de Mwanza, où l’on trouve principalement des sols lourds argileux. Toutefois, comme l’agriculture est également pratiquée sur des terres d’altitude, la production dans ce cas bénéficiera des précipitations supérieures à la normale. Dans l’ensemble, les pertes dans les basses terres seront en général compensées par les hausses de production dans les terres d’altitude. Les cultures de la campagne "Vuli", qui est la moins importante des trois campagnes annuelles du pays, devraient donner de bons résultats et la production devrait reprendre après une série de récoltes réduites par la sécheresse.

Après la sécheresse dévastatrice de 1996/97, on signalait, en plus des pertes de récolte, la disparition d’un grand nombre d’animaux domestiques dans les zones pastorales. Les fortes pluies tombées au cours des derniers mois ont eu un effet très positif sur l’état des pâturages, qui se traduira par une reprise du secteur de l’élevage. Du point de vue de la sécurité alimentaire des ménages, cette reprise a des implications importantes pour certains segments de la population, comme les Masaïs, qui dépendent étroitement de l’élevage.

Dans le centre et le sud, où les céréales de la campagne principale de 1998 sont au stade de l’épiaison, il pourrait y avoir d’importantes pertes dues aux inondations dans les basses terres des régions de Iringa et Mboya. Les précipitations abondantes des derniers mois ont toutefois eu un effet globalement positif et si le temps reste clément pour le reste de la campagne agricole, la production pourrait remonter par rapport au niveau médiocre de 1997. Une mission FAO/PAM d’évaluation des cultures et des disponibilités alimentaires, qui vient juste de rentrer de Tanzanie, termine actuellement son rapport.

OUGANDA

Les pluies torrentielles tombées de la mi-novembre au début décembre, principalement dans l’est, ont entraîné des inondations et des glissements de terrain qui ont provoqué des pertes de vies humaines, des dégâts aux logements et aux infrastructures et des pertes localisées de culture. Une aide alimentaire aux populations victimes des inondations est actuellement fournie, mais les opérations sont rendues difficiles par le mauvais état des routes. Néanmoins, les perspectives globales des cultures vivrières de la seconde campagne, actuellement rentrées, sont favorables. Malgré les pertes de récolte signalées par endroits, les pluies abondantes tombées depuis le début de la campagne ont eu un effet bénéfique sur la croissance des cultures. Ces pluies abondantes ont également permis d’améliorer les pâturages et l’état du bétail, notamment dans la région de Karamoja, qui avait souffert auparavant d’une vague de sécheresse prolongée.

Les prix du maïs et des haricots, qui en décembre 1997 avaient doublé en l’espace d’un an, devraient maintenant baisser avec l’arrivée de la nouvelle récolte sur les marchés; la situation des approvisionnements alimentaires, auparavant tendue à la suite de deux récoltes réduites consécutives, devrait désormais s’améliorer. La situation alimentaire reste toutefois précaire pour un grand nombre de personnes déplacées dans le nord du pays, car les troubles intérieurs se poursuivent.

ETHIOPIE

Des pluies particulièrement abondantes ont commencé à tomber dans tout le pays dans la première décade d’octobre et se sont poursuivies jusqu’à la fin novembre. Ces pluies ont bouleversé les opérations de récolte pour toutes les cultures, ont accentué la chute des semences pour le teff, ralenti le taux de séchage des céréales tardives avant le battage, augmenté les pertes dans les meules de céréales moissonnées, provoqué dans certains cas la germination du blé et du sorgho sur pied et accru les risques d’attaques fongiques pour les grains sur pied et les récoltes déjà entreposées, notamment dans le cas des grains de légumineuses. Dans le sud-est, à la frontière avec la Somalie et le Kenya, les pluies torrentielles ont provoqué de graves inondations, qui se sont soldées par des pertes de vies humaines, le déplacement d’un grand nombre de personnes et des dégâts aux logements. Selon les rapports reçus, plus de 10 000 animaux domestiques auraient été perdus et 30 000 hectares inondés. Les pouvoirs publics distribuent actuellement une aide alimentaire et non alimentaire dans les zones sinistrées.

Les pluies abondantes arrivées après des précipitations irrégulières en début de campagne, combinées à l’application réduite d’engrais, se sont traduites par une baisse d’un quart de la production de grains de 1997 par rapport au niveau record de la campagne précédente. Après deux années d’autosuffisance, les besoins d’importation de grains pour 1998 sont estimés à 530 000 tonnes, à couvrir principalement par l’aide alimentaire; ces quantités sont destinées à plus de 5 millions de personnes vulnérables, dont des agriculteurs qui ont eu une mauvaise récolte.

ERYTHREE

Les pluies exceptionnelles pour la saison tombées en octobre, au moment de la récolte, ont provoqué la détérioration des céréales moissonnées et empilées en meules et réduit les rendements de cultures qui avaient déjà souffert d’une vague de sécheresse en septembre, moment critique de la maturation des cultures. La production de grains devrait, selon les estimations, se situer au même niveau médiocre qu’en 1996. Des pluies torrentielles inattendues ont également entraîné de fortes infestations acridiennes dans le nord, mais des opérations de lutte ont déjà été entreprises.

Les prix des céréales, qui baissent normalement au moment de la récolte, ont fortement augmenté en novembre, car on prévoit une production médiocre. Comme il s’agit de la troisième année consécutive de récolte de céréales inférieure à la moyenne et que les disponibilités exportables de grains de l’Ethiopie ont fortement baissé, la situation des approvisionnements alimentaires sera tendue dans le courant de l’année.

Ailleurs dans la sous-région, les rendements ont souffert d’un retard d’un mois dans le début des pluies au Rwanda et au Burundi, après quoi des pluies abondantes sont tombées à partir de la mi-octobre, provoquant inondations et pertes localisées de récolte dans les basses terres. Toutefois, compte tenu de la nette augmentation des superficies ensemencées, la production vivrière dans ces deux pays devrait, selon les estimations, augmenter par rapport aux niveaux réduits de l’année précédente. La poursuite des troubles intérieurs dans ces pays reste toutefois un obstacle à la production vivrière. Au Soudan, la production de céréales secondaires de 1997 a été affectée par des précipitations inférieures à la moyenne dans certaines zones, notamment dans le sud où la récolte a été nettement réduite, mais également dans certaines zones des régions occidentales du nord Darfour et nord Kordofan. Selon les estimations, la production aurait baissé de 15 pour cent par rapport à la récolte record de l’année précédente, mais resterait supérieure à la moyenne. Dans l’ensemble, les disponibilités alimentaires devraient être adéquates grâce au niveau élevé des stocks de report mais une aide alimentaire d’urgence est nécessaire pour 2,4 millions de personnes déplacées et de victimes de la sécheresse.

Le Système mondial FAO d’information et d’alerte rapide suit en permanence les effets du phénomène El Niño sur les cultures et sur la situation des approvisionnements alimentaires dans diverses parties du globe et publiera, le cas échéant, des mises à jour périodiques.
 

Le présent rapport a été établi sous la responsabilité du Secrétariat de la FAO à partir d’informations provenant de sources officielles et officieuses. La situation pouvant évoluer rapidement, prière de s’adresser, pour tout complément d’information, à: M. Abdur Rashid, Chef, SMIAR , FAO (Télex 610181 FAO I; Télécopie: 0039-6-5705-4495, Courrier électronique: [email protected]).
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