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DEUXIEME PARTIE - ETUDES DE CAS


I. BULGARIE

1.1. Introduction

En vertu de l’article 20 de la constitution bulgare, l’Etat doit établir des conditions favorisant un développement équilibré sur l’ensemble du territoire national, sans distinction de régions. L’assemblée nationale a cependant estimé nécessaire de mettre en place une loi propre aux zones de montagne, en considération de leurs caractéristiques particulières. Les montagnes bulgares abritent en effet près de 30 pour cent de la population et de plus de 50 pour cent des établissements humains, dont les conditions de vie difficiles justifient la prise de mesures spécifiques. De surcroît, elles recèlent un important potentiel économique, dont notamment des gisements miniers, des ressources hydrauliques, des sources thermales et des espaces de récréation[1].

En 2002, ledit projet de loi, entièrement rédigé, n’avait pas été définitivement adopté par le Parlement. Il s’agit d’un texte qui remonte en fait à 1993, intitulé loi relative au développement des régions de montagne en République de Bulgarie[2]. En plus de ce projet de loi, qui sera au cœur du présent chapitre - et qui sera désigné ci-dessous «loi» par commodité de langage -, trois autres textes seront évoqués incidemment: la loi relative à la protection des producteurs agricoles, la loi sur les aides aux agriculteurs et la loi concernant les aires protégées.

1.2. Délimitation de la montagne

La loi s’applique aux régions de montagne, telles que définies à l’article 3. Une région de montagne est un territoire, constitué d’une ou de plusieurs communes voisines, dont plus de 70 pour cent de la superficie a:

La loi donne en annexe la liste des communes ayant le statut de «communes de montagne» (art. 4.1). Il est à noter que cette liste ne peut être amendée que par voie législative (art. 4.2).

1.3. Administration de la montagne

La loi fixe les fonctions des différents organes chargés du développement des régions de montagne. Selon l’article 29, le Conseil des ministres est compétent pour: (i) coordonner les actions des ministères et institutions chargés de l’application de la loi; (ii) définir et adopter la politique nationale à moyen terme ainsi que les priorités en matière de développement des régions de montagne; et (iii) proposer à l’Assemblée nationale d’adopter, lors du vote du budget national, les crédits nécessaires pour assurer les investissements (art. 10.2), des ressources supplémentaires destinées aux budgets locaux des communes (art. 15) et des soutiens financiers en faveur des établissements scolaires dans les régions de montagne (art. 19).

Par ailleurs, la loi prévoit la création d’un Conseil national des régions de montagne (CNRM) et définit les attributions des conseils locaux des communes de montagne et des associations de communes de montagne.

1.3.1. Conseil national des régions de montagne

Le CNRM, organe public, est créé auprès du Conseil des ministres (art. 30). Il est composé pour moitié de personnes élues (élus locaux et députés) et pour moitié de représentants de l’Etat. Ces derniers sont nommés, selon le cas, par les maires des communes de montagne, par l’Assemblée nationale ou par le Premier ministre. Le président du CNRM est un député, nommé parmi les membres du Conseil par l’Assemblée nationale. L’organisation et le fonctionnement du CNRM doivent être précisés par son statut (art. 31).

Les fonctions du CNRM sont les suivantes (arts. 32, 12, 16.2 et 25):

1.3.2. Conseils des communes de montagne

Aux termes de l’article 33 de la loi, les fonctions devant être exercées par ces conseils se résument ainsi:

1.3.3. Associations des communes de montagne

Les communes de montagne peuvent s’associer en vue de résoudre des problèmes et de mener des actions d’intérêt commun. Les associations ainsi formées peuvent notamment mettre en place des programmes de développement, des équipements collectifs et des infrastructures sociales.

La loi encourage la création de ces associations dans la mesure où elle leur permet: (i) de prendre part, à titre consultatif, aux délibérations du CNRM, où elles sont habilitées à se faire représenter; (ii) à conditions égales avec les autres intervenants, de bénéficier d’un accès prioritaire aux fonds publics pour le financement de leurs projets (art. 34).

1.4. Développement de la montagne

La loi vise à promouvoir le développement des richesses naturelles des régions de montagne. A ce titre, elle prévoit que l’Etat et les pouvoirs locaux encouragent, à l’aide notamment d’incitations financières, les initiatives entreprises dans les domaines de l’agriculture, de la sylviculture, de l’élevage et du tourisme (art. 5).

1.4.1. Développement économique

(a) Fonds spécial

La loi prévoit la création d’un Fonds spécial de développement des régions de montagne, qui est alimenté par: les dotations du budget national, accordées en fonction des programmes et des projets présentés; les dons des particuliers; et les financements internationaux (art. 36.2).

Les ressources du Fonds peuvent être utilisées pour l’attribution de crédits d’investissement à faible taux d’intérêt et pour le financement de divers programmes en matière de recherche et de formation, de développement de l’agriculture et du tourisme, d’aménagement du territoire et de gestion des ressources forestières (art. 36.1).

La gestion du Fonds est assurée par le CNRM (art. 36.3), dans les conditions que fixera le Conseil des ministres par la voie d’un règlement, qui définira notamment les modalités d’affectation des ressources (art. 36.4).

Par ailleurs, la création de fonds locaux, destinés à promouvoir des initiatives locales et régionales de développement des régions de montagne, est également envisagée par la loi (art. 37).

En 1995, un Fonds spécial pour les projets environnementaux dans les régions de montagne avait été créé dans le but de mobiliser des financements visant, entre autres, à combattre l’érosion et la déforestation ou à assurer l’approvisionnement en eau. Ce fonds a été fusionné, en 1996, avec le Fonds national de protection de l’environnement[3].

(b) Agriculture

L’agriculture et l’élevage de montagne représentent deux domaines que l’Etat et les pouvoirs locaux doivent promouvoir aux termes de la loi, à l’échelle nationale, régionale et locale. Ils peuvent fournir à cette fin des soutiens financiers pour l’élaboration et la mise en oeuvre de programmes de développement de l’agriculture et de l’élevage en zone de montagne (art. 6.1.1). Selon l’article 7.1, de tels programmes doivent concourir:

Comme l’Etat est propriétaire de plus de la moitié des régions de montagne (Lynch et Maggio, 2000), la loi a prévu la possibilité d’utiliser, à des fins agricoles, certains pâturages faisant partie du domaine forestier de l’Etat là où les terres cultivables sont insuffisantes dans les régions montagneuses, et ce dans le but de favoriser le développement de l’agriculture de montagne (art. 27)

Ces dispositions ont été complétées, en 1995, par la loi relative à la protection des producteurs agricoles. Celle-ci a prévu l’adoption d’un programme annuel de développement agricole, qui doit contenir des mesures particulières concernant l’agriculture de montagne. De plus, elle a créé un Fonds agricole spécial, dont une partie des ressources doit être allouée à des actions de développement de l’agriculture de montagne. A cet effet, des aides financières peuvent être octroyées aux producteurs agricoles sous forme de crédits d’investissements (art. 13.1.5). Cette loi a été remplacée en 1998 par la loi sur les aides aux agriculteurs, mais celle-ci a maintenu les dispositions relatives au fonds agricole. D’après le Plan national concernant l’agriculture et le développement rural 2000-2006, les recettes dudit fonds représentaient, en 1999, 42 millions d’Euros.

(c) Tourisme

La loi dispose que l’Etat et les pouvoirs locaux encouragent le développement du tourisme dans les régions de montagne (art. 5). Dans ce but, des subventions peuvent être accordées pour la mise en place de programmes visant à promouvoir le tourisme de montagne à l’échelle nationale, régionale et locale (art. 6.1.2). Aux termes de l’article 8, ces programmes doivent permettre:

De plus, la loi prévoit la délimitation, dans les plans régionaux et locaux d’aménagement du territoire, de zones dites touristiques (art. 9.2).

1.4.2. Développement social

Les multiples contraintes, d’ordre physique et climatique, qui rendent souvent difficile la vie en région de montagne, ont été prises en compte lors de l’élaboration de la loi, notamment dans le chapitre III, qui est entièrement consacré à l’amélioration des infrastructures et des services sociaux. Dans ce domaine, l’Etat doit fixer, en partenariat avec les administrations régionales et les pouvoirs locaux, les priorités à moyen terme en matière de transport, de communication, d’approvisionnement en eau, de santé, de formation, entre autres actions sociales (art. 14.2).

L’Etat encourage également le développement social des régions de montagne par l’octroi de financements. Les promoteurs de projets d’amélioration des infrastructures et équipements sociaux en montagne peuvent bénéficier de subventions ou de crédits à faible taux d’intérêt (art. 16.1). L’Etat contribue aussi à l’entretien de telles infrastructures et équipements au niveau des communes de montagne en accordant des crédits supplémentaires aux budgets locaux (art. 15).

Des mesures avantageuses sont également prévues en matière d’éducation. Selon l’éloignement, les services publics chargés de la santé et de l’éducation fixent, en collaboration avec les pouvoirs locaux, des normes moins contraignantes quant au nombre minimum d’enfants requis pour créer des établissements scolaires (art. 18). De plus, en région de montagne, le financement des écoles dites «d’acclimatation», destinées aux enfants atteints de maladies chroniques, est assuré par le budget national, par l’intermédiaire du budget de la commune où l’école se situe (art. 19).

Enfin, les établissements de santé et de récréation font l’objet de dispositions particulières: les associations de communes de montagne sont habilitées, dans certaines régions, à exploiter gratuitement les complexes récréatifs et médicaux de l’Etat (art. 20).

1.5. Protection de la montagne

La préservation de l’environnement fait l’objet de dispositions constitutionnelles qui font obligation à l’Etat et aux citoyens à mettre en œuvre les moyens nécessaires à la sauvegarde du milieu naturel (articles 15 et 55 de la constitution). En conformité avec ces dispositions, la loi consacre le chapitre IV aux ressources hydrauliques et forestières. Conçu d’une manière favorable aux populations de montagne, ce chapitre énonce les mesures à prendre pour assurer une gestion équilibrée et durable des ressources naturelles. En outre, le souci de protéger l’environnement est aussi présent dans les dispositions susvisées concernant les programmes de promotion de l’agriculture et de l’élevage de montagne, telles que celles visant à combattre efficacement l’érosion, les crues et les avalanches (art. 7.1.3).

1.5.1. Forêts

Les régions de montagne abritent les deux tiers du couvert forestier en Bulgarie (Observatoire européen des forêts de montagne). Les ressources forestières constituent donc une des bases essentielles du développement de ces régions et leur gestion durable nécessite, de ce fait, un encadrement législatif adéquat. A cette fin, la loi prévoit la possibilité d’accorder des subventions, sur proposition du CNRM et en accord avec le Comité des forêts et le Ministère de l’agriculture (art. 25), aux inspections locales des forêts et aux producteurs forestiers:

La loi tend, de plus, à favoriser la valorisation des sous-produits forestiers. L’Etat et les communes peuvent ainsi autoriser les particuliers à utiliser, à titre gratuit, des bâtiments destinés à la création d’entreprises pour le séchage et le traitement de champignons, d’herbes médicinales et de fruits sauvages, entre autres sous-produits forestiers (art. 26).

Enfin, vu le développement des activités économiques locales liées à la transformation du bois, la loi habilite les inspections locales des forêts à fixer les quotas de coupe de bois afin sans doute d’éviter les prélèvements excessifs (art. 28). A cet égard, il a été observé au sujet des forêts de montagne en Bulgarie que “la restriction des coupes rases et des structures du même âge” a été l’un des objectifs poursuivis par le pays au cours de ces dernières années (Observatoire européen des forêts de montagne).

1.5.2. Eaux

Bien que les régions de montagne recèlent plus de 80 pour cent des ressources hydriques du pays, la loi ne contient pas de mesures spécifiques sur la protection des eaux - lesquelles sont incluses dans la loi sur l’eau. Quant à la présente loi, elle crée un régime de faveur au profit des usagers habitant en montagne, qui paient des taxes réduites pour l’approvisionnement en eau (art. 22).

1.5.3. Aires protégées

C’est dans les régions de montagne que se situe la majorité (85 pour cent) des réserves naturelles et autres espaces spécialement protégés (Giurova, 1995), tels que ces derniers sont définis par la loi relative aires protégées, principal texte législatif régissant la conservation des habitats et des paysages naturels. En fait, les parcs nationaux, sites protégés et réserves naturelles ont été, pour l’essentiel, établis en zone de montagne et sont donc soumis au régime spécifique de ladite loi concernant les aires protégées.

Par ailleurs, dans le cadre du programme de l’UNESCO sur l’homme est la biosphère (MAB), la Bulgarie dispose d’un large éventail de 14 réserves de la biosphère. Bien que réparties dans l’ensemble du territoire national, toutes ces réserves, à l’exception de trois, sont situées en région de montagne.

1.6. Conclusion

L’analyse qui précède du projet de loi bulgare montre combien il peut être utile d’élaborer une loi propre à la montagne. Les mesures spécifiques de développement socio-économique que cette loi prévoit en faveur des populations montagnardes visent à leur procurer des conditions de vie comparables à celles qui prévalent dans le reste du pays, avec l’espoir de leur offrir des chances égales d’épanouissement.

Ladite loi a aussi le mérite de prévoir la création d’institutions spécialement chargées de veiller au développement des régions de montagne, ainsi que la constitution d’un fonds spécial destiné à mobiliser et redistribuer les financements requis pour la réalisation des programmes et projets de développement des zones montagneuses.

La loi est toutefois assez laconique en ce qui concerne les mesures particulières de protection de l’environnement en région de montagne. Il est vrai qu’il existe en Bulgarie une législation générale en la matière. Il n’en demeure pas moins que la présente loi gagnerait à être complétée par des dispositions explicites sur la protection des ressources naturelles des écosystèmes de montagnes.

Bibliographie

Législation

Documents

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II. FEDERATION DE RUSSIE - REPUBLIQUE D’OSSETIE-ALANIE DU NORD

2.1. Introduction

Bien que possédant neuf chaînes montagneuses (Curtis, 1996), la Fédération de Russie n’a pas encore élaboré une politique spécifique pour les régions de montagne, pas plus qu’elle n’a adopté un texte de loi fixant des critères pour l’attribution du statut «montagne» à une région montagneuses (Ministry of Environmental Protection and Natural Resources of the Russian Federation, 1996). C’est dire qu’il n’existe pas d’instrument spécifique, politique ou juridique, consacré aux montagnes à l’échelle fédérale.

Située dans la partie septentrionale des massifs caucasiens, la République d’Ossétie-Alanie du Nord de la Fédération de Russie a plus particulièrement ressenti le besoin de développer ses régions montagneuses en vue d’améliorer les conditions socio-économiques des populations qui les habitent. Les montagnes occupent plus de la moitié du territoire de la République et, de ce fait, la politique de la montagne constitue l’un des piliers du développement de l’Ossétie-Alanie du Nord (Vaguin, 1999). Celle-ci possède son propre programme de développement, «les montagnes d’Ossétie», formellement approuvé par le gouvernement de la République (Badenkov, 1996), que le parlement de l'Ossétie-Alanie du Nord a ensuite juridiquement sanctionné en adoptant une loi montagne.

Il s’agit de la loi relative aux régions de montagnes du 30 décembre 1998. En 43 articles regroupés en sept chapitres, la loi couvre tous les aspects du développement socio-économique des régions de montagne d'Ossétie-Alanie du Nord. Conçue comme un texte de base énonçant les principes fondamentaux et les règles générales régissant les activités des populations de montagne, la loi devrait être complétée et précisée par des règlements d’application (art. 1).

En dehors de la loi de 1998, le droit de la montagne en Ossétie-Alanie du Nord puise accessoirement ses sources dans d’autres lois de la République et de la Fédération (art. 6).

2.2. Délimitation de la montagne

La loi montagne détermine son champ d’application en spécifiant les régions auxquelles elle s’applique et en définissant les concepts qu’elle utilise (art. 1 à 5). La loi établit des critères détaillés de définition des régions de montagne, allant jusqu’à en délimiter les contours. Elle précise également la consistance des établissements humains en zone de montagne afin de permettre l’identification des populations pouvant bénéficier des avantages qu’elle prévoit.

Les régions de montagne sont définies comme étant des régions dont les conditions naturelles - altitude, relief, climat - affectent considérablement les activités humaines qui s’y exercent (art. 1). Les régions de montagne comprennent les bassins versants, les flancs de montagne et les chaînes rocheuses, y compris les dépressions pastorales et forestières. Leurs confins sont délimités au Nord, au Sud et à l’Ouest: la «frontière nord» longe la ligne de démarcation du domaine forestier de l’Etat (limite septentrionale des montagnes Noires), la «frontière sud» coïncide avec la frontière entre la Fédération de Russie et la Géorgie et la «frontière ouest» est constituée par les limites administratives séparant la République d'Ossétie-Alanie du Nord de la République de Inguche (art. 2). Outre la fixation de leurs confins, la loi subdivise les régions de montagne en trois catégories en fonction de leur altitude:

Les établissements humains en zone de montagne, pour leur part, sont décrits comme étant les villages, installations de travail et autres établissements situés dans les limites des bassins versants, des flancs de montagne et des chaînes rocheuses du Grand Caucase (art. 3). Le gouvernement de la République doit établir une liste de ces établissements humains conformément aux dispositions de la loi. Cette liste est particulièrement importante lors de la détermination des «populations de montagne», puisqu’elle sert de référence pour l’enregistrement des résidents des établissements de montagne. Il s'agit des personnes installées dans lesdits établissements de façon permanente ou y ayant travaillé pendant plus d’un an et qui continuent d’y demeurer en raison de leur travail, d’une incapacité ou de leur retraite. Ces personnes doivent avoir été enregistrées dans un établissement de montagne (art. 4).

2.3. Administration de la montagne

La loi prévoit la création d’une institution spécialement chargée des régions de montagne, mais sans préciser ses attributions et son organisation, qui devront être ultérieurement fixées par voie réglementaire (art. 9). Dans l’exercice de ses fonctions, cette institution devra agir de façon coordonnée avec les services environnementaux, en coopération avec les autorités locales et dans le respect des droits des usagers de la nature (art. 10). L’institution en question devra aussi contribuer à la réglementation et à la gestion des ressources naturelles en région de montagne, de concert avec les services techniques compétents en la matière (art. 35). Son budget devra être alimenté notamment par des dotations de la Fédération et de la République, ainsi que par le produit des taxes et redevances d’utilisation des ressources naturelles des régions de montagne (art. 27).

La loi définit également les domaines de compétence respectifs de l’administration centrale et des autorités locales en matière de protection et d’utilisation des ressources naturelles de la montagne. Les organes centraux et locaux contribuent, à leurs niveaux, à la formulation, au financement et à la réalisation de programmes de gestion des ressources naturelles en montagne, ainsi qu’à l’adoption de mesures en faveur de la protection de l’environnement. Ils remplissent aussi, séparément, des fonctions propres. Par exemple, le gouvernement central est chargé de l’adoption des lois et règlements relatifs à l’utilisation des ressources naturelles, de la gestion des registres fonciers et de la création de banques de données sur les ressources naturelles. Les autorités locales, de leur côté, adoptent et exécutent les budgets locaux, contribuent à la constitution de fonds de développement des régions de montagne, réglementent l’utilisation de l’eau au niveau local et gèrent les terres communales en zone de montagne (arts. 7 et 8). Enfin, un contrôle général de la gestion des ressources naturelles en région de montagne est exercé tant par l’administration centrale que par les autorités locales (art. 36).

2.4. Développement de la montagne

Selon son préambule, la loi vise à établir les bases socio-économiques et le cadre juridique du développement durable des régions de montagne d'Ossétie-Alanie du Nord, de préserver leurs ressources naturelles et d’en assurer l’utilisation rationnelle, ainsi que de sauvegarder le patrimoine historique, culturel et architectural qu’elles recèlent.

2.4.1. Exploitation des ressources naturelles: Droits et obligations des usagers

Les nationaux, comme les étrangers, ont en principe le droit de jouir des ressources naturelles en zone de montagne. Toutefois, les populations qui y résident ont un droit d’usage prioritaire desdites ressources (art. 11). En outre, des privilèges sont accordés à différentes catégories de personnes et d’institutions établies en montagne pour l’utilisation des ressources de celle-ci, tels que les exploitants agricoles, les producteurs de marchandises destinées aux zones de montagne, ainsi que les entreprises municipales et les structures chargées de l’éducation, la santé et la culture. La nature de ces privilèges sera fixée par le parlement d'Ossétie-Alanie du Nord, sur proposition du gouvernement (art. 19). Enfin, la loi confère aussi aux populations de montagne des droits d’utilisation du bois à des fins lucratives (art. 17).

En contrepartie des droits qui leur sont reconnus, les bénéficiaires doivent aussi assumer certaines obligations. Ainsi, les usagers des ressources naturelles non renouvelables doivent les exploiter rationnellement, dans le respect des normes environnementales en vigueur, faute de quoi ils mettent en jeu leur responsabilité administrative et pénale (art. 15). Quant aux usagers des ressources naturelles renouvelables, ils sont tenus d’assurer la protection, la restauration et la régénération des ressources en eau et en sol, ainsi que la faune et la flore sauvages. Les dommages résultant d’une diminution ou d’une perte de fertilité du sol causée par la faute de l’utilisateur doivent être réparés par ce dernier. Celui-ci engage également sa responsabilité pénale en cas d’infraction aux lois et aux règlements relatifs aux ressources naturelles (art. 16).

La violation des dispositions de la loi montagne entraîne en outre des sanctions spécifiques, tant civiles que pénales (arts. 40 et 41). En plus du dédommagement des propriétaires affectés, les auteurs d’infractions portant atteinte aux ressources naturelles s’exposent aux sanctions prévues par les lois de la Fédération comme de la République. Ces dispositions s’appliquent aussi bien aux nationaux qu’aux étrangers, ces derniers ayant les mêmes droits mais aussi les mêmes devoirs que les citoyens de la République au regard des ressources naturelles de montagne (art. 39).

2.4.2. Gestion des ressources naturelles: Instruments économiques et financiers

Dans les régions de montagne, l’utilisation des ressources naturelles à des fins lucratives, que ce soit pour l’exploitation minière, l’utilisation des eaux douces et minérales, les activités de tourisme et de loisir, la coupe de bois, la récolte de plantes médicinales, le pâturage ou la chasse, est assujettie à l’obtention de permis, accordés aux requérants dans les conditions fixées par les lois et règlements régissant ces diverses matières (art. 14).

L’accès aux ressources naturelles est gratuit dans certains cas et payant dans d’autres. Le paiement de redevances est requis, par exemple, pour l’exploitation du sol et du sous-sol, des ressources en eau douce, de la faune et de la flore sauvages, ainsi que pour la construction d’installations industrielles, sanitaires et récréatives (art. 17). Les redevances sont fixées conformément aux dispositions en vigueur ou, à défaut, par le gouvernement de la République (art. 18). Inversement, certaines activités sans but lucratif s’exercent gratuitement. Il s’agit notamment de la récolte de fruits, champignons et plantes médicinales, du prélèvement d’eau pour les besoins domestiques ou du pâturage par les populations de montagne (art. 17).

La loi prévoit par ailleurs la possibilité de recourir à divers instruments économiques et financiers pour assurer sa mise en œuvre, tels que taxes, crédits ou assurances (art. 24). Le régime d’imposition diffère selon les secteurs et les contribuables. En matière de ressources naturelles, les contribuables ne résidant pas en montagne sont assujettis aux mêmes taxes que dans le reste de la République et la Fédération. En revanche, les entreprises publiques établies en montagne bénéficient d’une réduction de 50 pour cent des taxes normalement dues. Enfin, sont totalement exemptés de taxes les fonctionnaires publics ainsi que, pendant les cinq premières années de leur établissement, les nouveaux résidents et les producteurs privés nouvellement installés en région de montagne (art. 20).

Selon que les ressources naturelles relèvent de la propriété publique ou privée, le financement des actions y afférentes est assuré par le gouvernement ou les particuliers (art. 25). Ceux-ci doivent aussi prendre en charge les coûts de mise en valeur des ressources naturelles qu’ils exploitent en montagne. Par contre, les crédits de fonctionnement des services publics de la culture, l’éducation, la science, la santé, la communication et la télévision sont imputés aux budgets de la République et de la Fédération (art. 26).

2.5. Protection de la montagne

Les programmes de protection des ressources naturelles doivent, en région de montagne, être mis en œuvre par l’institution gouvernementale chargée de ces régions, en collaboration avec les autorités locales concernées, leur financement devant être assuré par le budget de la République (art. 34).

Au titre des mesures spécifiques de protection de l’environnement montagnard, la loi dispose que des ressources naturelles doivent être gérées soigneusement. En particulier, l’abattage des arbres doit être opéré de façon appropriée, les pâturages améliorés, l’érosion combattue, etc. (art. 14).

Plus largement, le gouvernement doit veiller aux équilibres écologiques des montagnes, notamment par le biais d’études d’impact sur l’environnement. Celles-ci doivent être effectuées par des organismes spécialisés de la République en la matière avant tous projets ou travaux pouvant porter atteinte au milieu naturel dans les zones de montagne. Les décisions prises par ces organismes au terme de leur expertise écologique ne peuvent être contestées que par voie judiciaire (art. 37).

2.6. Conclusion

L’Ossétie-Alanie du Nord est l’unique République de la Fédération de Russie disposant d’une loi qui traite spécifiquement des régions de montagne. Cette loi est largement axée sur le régime de gestion des ressources naturelles de la montagne, dont elle tend à assurer la protection et à réglementer l’utilisation. Elle fixe des droits et des devoirs particuliers à cet égard, qu’elle module en fonction des usagers et des secteurs, en privilégiant les populations des zones de montagne et les activités qui concourent à leur développement, grâce notamment à des incitations fiscales.

La loi met aussi en place un cadre institutionnel spécialement chargé de l’administration des régions de montagne et de sa propre mise en œuvre. Elle envisage à cet effet la mobilisation de nouvelles ressources financières, principalement d’origine budgétaire. Enfin, elle institue une obligation générale d’évaluation des impacts écologiques des ouvrages et projets susceptibles d’être préjudiciables à l’environnement montagnard. Dans ces différents domaines, toutefois, une application effective de la loi requiert l’adoption de dispositions réglementaires détaillées.

Bibliographie

Législation

Documents

III. FRANCE

3.1. Introduction

Depuis plus de trente ans, la mise en valeur des régions de montagne constitue un important enjeu du développement national en France. Dès 1974, un premier rapport sur la montagne était établi. Il a ensuite été complété, un an plus tard, par le rapport Brocard intitulé «Pour que la montagne vive». Ces documents ont souligné «la nécessité de mieux protéger l’espace montagnard et la priorité de la lutte contre l’exode montagnard» (Prieur, 2001). En 1977, la montagne fut consacrée comme entité globale alliant des fonctions écologiques, agricoles, forestières et touristiques[4], vision que le législateur a confirmée, en 1985, avec l’adoption de la loi montagne.

La politique nationale de la montagne vise à «permettre aux populations locales et à leurs élus d’acquérir les moyens et la maîtrise de leur développement en vue d’établir, dans le respect de l’identité culturelle montagnarde, la parité des revenus et des conditions de vie entre la montagne et les autres régions» (article 1er de la loi montagne). Définie initialement pour remédier aux handicaps caractérisant les régions de montagne, cette politique s’oriente maintenant vers le développement des atouts et potentialités des massifs de montagne.

La législation s’appliquant aux zones de montagne repose principalement sur la loi 85-30 de 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, qui est venue remplacer la directive nationale d’aménagement et de protection de la montagne (1977). Elle précise que le gouvernement s’efforcera d’obtenir de la Communauté européenne qu’elle tienne compte des objectifs qu’elle fixe dans les décisions communautaires de politique agricole et d’action régionale (art. 2).

Depuis son adoption, la loi 85-30 a été plusieurs fois amendée. Dans sa version actuelle, elle comporte 102 articles regroupés en sept titres. Des dispositions complémentaires touchant aux montagnes sont par ailleurs contenues dans le code général des collectivités territoriales, le code rural, le code de l’environnement, le code forestier et le code de l’urbanisme, ainsi que dans la loi 95-115 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire. Le droit français de la montagne puise donc ses sources dans ces divers textes.

3.2. Délimitation de la montagne

Les modalités de délimitation des zones de montagne diffèrent selon que celles-ci se trouvent en métropole ou dans les départements d’outremer. De plus, la délimitation des divers massifs fait l’objet de dispositions particulières.

3.2.1. Métropole

Les zones de montagne situées en métropole sont délimitées par arrêté interministériel, en prenant en considération le facteur altitude et les conditions particulières qui en découlent. C’est ce qui ressort de l’article 3 de la loi 85-30, aux termes duquel la zone de montagne comprend «les communes ou parties de communes caractérisées par une limitation considérable des possibilités d’utilisation des terres et un accroissement important des coûts des travaux dus:

On observera que les critères de définition des zones de montagne n’ont pas beaucoup évolué depuis le décret 61-650 du 23 juin 1961 qui, se basant sur une approche similaire, disposait que la «zone de montagne comprend le territoire des communes qui sont situées dans une proportion d’au moins 80 pour cent de leur superficie à une altitude supérieure à 600 mètres au-dessus du niveau de la mer, ou dans lesquelles le dénivellement entre les limites altimétriques inférieures et supérieures cultivées n’est pas inférieur à 400 mètres. Peuvent en outre être classées en zones de montagne, les communes ne répondant pas aux critères ci-dessus d’altitude ou de dénivellement du territoire cultivé mais dont l’économie est étroitement liée à celle des communes limitrophes satisfaisant aux conditions définies à l’article précédent».

3.2.2. Outremer

La délimitation des zones de montagne dans les départements d’outremer s’effectue aussi par arrêté interministériel, par référence aux mêmes critères applicables en métropole, mais la loi détermine précisément les niveaux d’altitude à considérer suivant les départements. Les zones de montagne comprennent ainsi les communes situées à une altitude supérieure à 500 mètres dans le département de la Réunion et à 300 mètres dans les départements de la Guadeloupe et de la Martinique. En outre, les régions de montagne de ces divers départements comprennent également les communes situées à plus de 100 mètres d’altitude lorsque la majeure partie de leur territoire présente des pentes d’au moins 15 pour cent (loi 85-30, art. 4).

3.2.3. Massifs

La délimitation de chaque massif est opérée par décret. En métropole, «chaque zone de montagne et les zones qui lui sont immédiatement contiguës et forment avec elle une même entité géographique, économique et sociale constituent un massif». Il y a actuellement sept massifs en métropole. Dans les départements d’outremer, il existe un massif par département, qui comprend exclusivement les zones de montagne (art. 5).

3.3. Administration de la montagne

La loi a créé des institutions chargées de fonctions précises à l’égard de la montagne tant à l’échelon central qu’au niveau de chaque massif, à savoir: le Conseil national pour le développement, l’aménagement et la protection de la montagne, d'une part, et les comités pour le développement, l’aménagement et la protection des massifs de montagne, d'autre part.

3.3.1. Conseil national de la montagne

Le Conseil national définit les objectifs et précise les actions qu’il juge souhaitables pour le développement, l’aménagement et la protection de la montagne, en veillant à promouvoir la coordination des actions publiques dans les zones de montagne. Il est en outre consulté sur les priorités d’intervention et les conditions générales d’attribution des aides accordées aux zones de montagne par le Fonds national d’aménagement et de développement du territoire (évoqué ci-dessous). Il est informé, chaque année, des programmes d’investissement de l’Etat dans chacun des massifs de montagne (loi 85-30, art. 6).

L’organisation du Conseil est précisée par le décret 85-994 de 1985. Présidé par le Premier ministre ou, sur délégation, par le ministre chargé de l’aménagement du territoire (art. 1), le Conseil est composé de 59 membres représentant l’ensemble des secteurs concernés par la montagne, notamment les élus nationaux, régionaux et locaux, les organes consultatifs, les organisations professionnelles et syndicales, les associations, les opérateurs ruraux, ainsi que les comités de massif (art. 2). Le Conseil se réunit au moins une fois par an et peut entendre toute personne dont l’audition peut être utile à ses travaux (arts. 4 et 5).

Le Conseil dispose d’une commission permanente, composée de 17 membres désignés en son sein, qui assiste le président dans la définition du programme de travail et d’intervention du Conseil. Elle veille à la mise en œuvre des recommandations et des propositions émises par le Conseil et peut, à cette fin, auditionner toute personne pouvant l’éclairer (arts. 6 et 7).

3.3.2. Comités des massifs de montagne

Il existe un comité pour chacun des sept massifs de montagne que compte le pays. Leur composition et leur fonctionnement sont définis par décret et éventuellement modulés en fonction des spécificités des massifs. Ces derniers sont: le Massif Central (décret 85-995), les Alpes du Nord (décret 85-996), les Alpes du Sud (décret 85-997), la Corse (décret 85-998), les Pyrénées (décret 85-999), le Massif Jurassien (décret 85-1000) et le Massif Vosgien (décret 85-1001).

Les comités de massif sont présidés par le représentant de l’Etat désigné pour assurer la coordination dans le massif, en général le préfet de région. Ils sont composés de représentants des régions, des départements, des communes ou de leurs groupements, des établissements publics consulaires, des parcs nationaux et régionaux, des organisations socioprofessionnelles et des associations concernées par le développement, l’aménagement et la protection du massif (loi 85-30, art. 7). Les articles 2 et 3 de tous les décrets régissant les comités de massif sont relatifs, respectivement, à la présidence et à la composition de ces derniers.

Comme le Conseil national, les comités de massif déterminent les objectifs et précisent les actions nécessaires à la promotion du développement et de la protection du massif concerné. Ils émettent des propositions, avis et conseils visant à coordonner les actions publiques dans le massif, participent à l’élaboration des orientations du schéma interrégional de massif et sont associés à la conception des dispositions relatives au développement économique, social et culturel du massif contenues dans les plans des régions correspondants. Les comités sont aussi informés, annuellement, des attributions de crédits inscrits dans la section locale du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire, ainsi que des programmes de développement agricole et des programmes d’investissements de l’Etat, des régions, des départements et des établissements publics dans le massif. Les comités sont par ailleurs saisis de tout projet visant à modifier la délimitation des massifs de montagne, comme ils peuvent prendre l’initiative de proposer une telle modification (loi 85-30, art. 7).

En matière d’urbanisme, les comités de massif contribuent à l’élaboration des directives d’aménagement des zones de montagne. Le code de l’urbanisme prévoit à cet égard que les orientations fondamentales de l’Etat «en matière d’aménagement et d’équilibre entre les perspectives de développement, de protection et de mise en valeur des territoires» sont fixées par les directives territoriales d’aménagement, prises par décret après avis ou sur proposition des conseils régionaux et des comités de massif intéressés (arts. L111-1-1 et L45-7). De plus, les comités de massif peuvent élaborer des recommandations particulières à certaines zones sensibles, comme les secteurs de haute montagne.

3.4. Développement de la montagne

L’un des objectifs de la loi 85-30 est de promouvoir le développement local des zones de montagne, grâce à la valorisation et l’exploitation de leurs ressources, en vue d’assurer leur croissance économique tout en préservant leur identité et leur spécificité (art. 1). Dans cet esprit, elle consacre le «droit à la prise en compte des différences et à la solidarité nationale» (titre II). Elle prévoit en conséquence la nécessité d’adapter les dispositions nationales à la spécificité de la montagne, ainsi que les dispositions générales relatives au développement de la montagne à la situation particulière de chaque massif ou partie de massif (art. 8).

Au niveau national, les besoins spécifiques de la montagne doivent être reflétés dans le plan de développement économique et social. Celui-ci fixe les choix stratégiques, les objectifs à atteindre et les moyens de les réaliser d’une manière générale (loi 82-653, art. 1er), mais il doit également comporter des prescriptions particulières sur le développement, l’aménagement et la protection des zones de montagne. Il en va de même pour le plan régional de développement (loi 85-30, art. 9).

De plus, la loi 95-115 a permis de mieux tenir compte de la réalité géographique des massifs de montagne par l'incorporation, en 1995, d'un article 9-bis dans la loi 85-30. Lorsque des massifs s’étendent sur plus d’une région, seules des politiques interrégionales peuvent orienter leur développement. Ces politiques sont conçues et approuvées de façon concertée par les conseils régionaux concernés par la gestion du massif, après consultation des comités de massif.

3.4.1. Développement économique

(a) Financement

Avec la création, en 1995, du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire, divers types de financements ont été regroupés: les crédits alloués à l’aménagement du territoire, la restructuration des zones minières, l’aménagement rural, mais aussi au développement de la montagne. Les ressources du Fonds national sont réparties entre une section générale et une section locale à gestion déconcentrée (loi 95-115, art. 33).

Les crédits de la section générale sont distribués par le préfet de région, agissant à titre de coordonnateur de massif, sur proposition du commissaire à l’aménagement du massif et après avis du comité de massif concerné. Les décisions d’attribution des crédits inscrits dans la section locale à gestion déconcentrée sont communiquées par le représentant de l’Etat aux présidents des conseils régionaux et des conseils généraux intéressés, qui doit également leur fournir un rapport annuel sur les conditions d’exécution de ces décisions.

Dans la mise en œuvre des crédits que l’Etat affecte aux investissements dans le domaine du bâtiment et des travaux publics, il doit être tenu compte des contraintes climatiques des régions de montagne (loi 85-30, art. 14).

(b) Agriculture

La loi 85-30 souligne l’importance de l’agriculture dans les zones de montagne en ces termes: «Par sa contribution à la production, à l’emploi, à l’entretien des sols et à la protection des paysages, l’agriculture de montagne est reconnue d’intérêt général comme activité de base de la vie montagnarde» (article 18, devenu article L113-1 du code rural[5]). Cet énoncé des lignes de conduite à tenir pour promouvoir le développement agricole dans les zones montagneuses est conforté par d’autres dispositions traitant de l’agriculture de montagne contenues dans le code rural (art. L113-2), dans la loi 99-574 sur la politique agricole (art. 1) et dans le code de l’urbanisme (art. L145-3).

Des mesures particulières peuvent être prises pour le maintien des régions de montagne dans lesquelles les activités agricoles, où prédomine le pastoralisme, contribuent à la protection du milieu naturel. En particulier, des groupements pastoraux peuvent être créés à cet effet et jouir d’un droit d’utilisation prioritaire des pâturages lorsque leurs membres sont en majorité des exploitants locaux (code rural, art. L113-3).

Afin de valoriser les produits de la montagne, leur qualité et leur spécificité sont protégées par la loi. L’utilisation du label «montagne» est soumise à des conditions fixées par le décret 2000-1231. L’appellation «montagne» ne peut être accordée que si la production, l’élevage, l’engraissement, l’abattage et la préparation, la fabrication, l’affinage et le conditionnement des denrées alimentaires (autres que les vins) et des produits agricoles non alimentaires et non transformés, ainsi que les matières premières entrant dans l’alimentation des animaux ou dans la fabrication des denrées et produits, sont situés en zone de montagne ou en proviennent (art. 1). Toutefois, certaines exceptions sont prévues (art. 2). Ainsi:

L’utilisation non autorisée du label «montagne» est assortie de sanctions (art. 12), ce qui permet un meilleur contrôle de la qualité des produits de la montagne.

(c) Tourisme

La loi 85-30 consacre l’un de ses chapitres à l’organisation et la promotion des activités touristiques en montagne, que complète le code de l’urbanisme en ce qui concerne les aspects d’aménagement et d’urbanisme (Prieur, 2001). Activité nouvelle ou en expansion selon les zones, le tourisme entraîne partout des modifications dans l’occupation de l’espace et requiert des capacités d’hébergement accrues. C’est pourquoi des dispositions complémentaires le concernant ont été ajoutées à la loi montagne, puis introduites dans le code de l’urbanisme (art. L145-9 et suivants).

Le contrôle de la mise en œuvre des opérations d’aménagement touristique est opéré par la commune, le groupement de communes ou le syndicat mixte de collectivités locales concernées. Pour la réalisation de tout nouvel aménagement, un contrat doit être conclu entre le promoteur et la commune ou le groupement de communes ou le syndicat mixte, suivant les modalités fixées par la loi 85-30 (art. 42).

La directive montagne de 1977 prévoyait déjà un certain encadrement du développement des unités touristiques nouvelles. Ces dispositions ont ensuite été élaborées et intégrées dans loi 85-30, puis dans le code de l’urbanisme. Elles définissent les principes d’aménagement et de protection en zone de montagne en général et les règles relatives aux unités touristiques nouvelles en particulier.

La directive de 1977 avait interdit la construction sur les pentes en vue, surtout, de protéger les terres agricoles. Désormais, en plus de la protection de celles-ci, la loi 85-30 réglemente l’urbanisation en montagne de façon générale. Par exemple, les constructions doivent, dans les aménagements touristiques nouveaux, être effectuées «en continuité avec les bourgs, villages et hameaux existants» (code de l’urbanisme, art. L145-3), et ce afin de rationaliser l’occupation de l’espace rural (Romi, 2001).

Une procédure particulière s’applique à la création des unités touristiques nouvelles lorsque les communes sont dotées d’un plan d’occupation des sols (code de l’urbanisme, art. R145). En voici les principales étapes:

Le préfet doit, en prenant sa décision, tenir compte des risques naturels que peuvent entraîner les nouveaux aménagements (code de l’environnement, art. L563-2) et veiller à ce que la localisation, la conception et la réalisation des unités touristiques respectent «la qualité des sites et les grands équilibres naturels» (code de l’urbanisme, art. L145-3).

Enfin, la loi 85-30 prévoit la possibilité de grever certaines terres privées ou faisant partie du domaine privé des collectivités publiques de servitudes au profit des installations touristiques (art. 53). Par exemple, des servitudes peuvent être constituées pour permettre l’accès aux pistes de ski ou aires de remontée mécanique. Les propriétaires lésés du fait de ces servitudes doivent être indemnisés des dommages subis (art. 54).

3.4.2. Développement social

La loi 85-30 vise à assurer aux habitants de montagne des services de qualité comparable à ceux que reçoit la population dans le reste du territoire national, notamment par l’adaptation et l’amélioration des équipements.

(a) Services publics

Dans chaque département de montagne, une commission est chargée de proposer au président du Conseil général et au représentant de l’Etat des mesures tendant à améliorer l’organisation des services publics en montagne. La composition de cette commission est fixée par décret (art. 15).

En matière de communication, des adaptations techniques doivent être opérées afin d’assurer une diffusion adéquate des émission de la radio et de la télévision en zone de montagne (art. 16). L’égalité d’accès aux services de l’information et de la communication doit être garantie, de façon générale, par le schéma de services collectifs prévu par la loi 95-115 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire.

(b) Education

Le système d’éducation est également inspiré du souci de tenir compte des particularités de la montagne. Le code rural prévoit ainsi que les programmes des établissements d’enseignement agricole doivent être adaptés aux «conditions spécifiques de l’environnement naturel, économique et social des différents massifs de montagne» et qu’ils doivent prendre en considération les prescriptions particulières des plans régionaux des massifs de montagne (art. L815-1).

Les «centres de formation des ruraux aux activités du tourisme» et les établissements de formation professionnelle situés en montagne doivent aussi offrir des formations adaptées aux spécificités de leurs zones. En outre, des groupements d’intérêt public peuvent être créés afin de valoriser la recherche reliée à la montagne dans un but de «diffusion d’informations ou de formation dans le domaine de la protection et de la mise en valeur de la zone de montagne» (articles 11 et 12 de la loi 85-30).

(c) Commerce et artisanat

Le commerce et l’artisanat en zone de montagne font également l’objet d’un chapitre de la loi 85-30, qui déclare d’intérêt général la présence, en zones de montagne, d’un équipement commercial et d’un artisanat de services adéquats contribuant à l’animation de la vie locale (art. 55). Ce principe directeur doit être à la base des actions publiques conduites en matière de développement économique et social en zone de montagne. Le gouvernement doit rendre compte, annuellement, au Conseil national de la montagne et aux comités de massif des mesures prises en faveur des commerçants et artisans en zone de montagne (art. 56).

3.5. Protection de la montagne

Tenant compte de la vulnérabilité des écosystèmes montagneux, la loi 85-30 dispose que «la protection des équilibres biologiques et écologiques, la préservation des sites et des paysages, la réhabilitation du bâti existant et la promotion du patrimoine culturel» doivent être l’un des piliers de la politique nationale de la montagne (art. 1). Selon le code de l’environnement (art. L333-2), la création de parcs naturels régionaux en zone de montagne constitue une application directe de ces orientations politiques. D’autres mesures de protection peuvent être prises dans les domaines des forêts, de l’eau et du sol.

3.5.1. Forêts

Le code forestier dispose que «la mise en valeur et la protection des forêts sont reconnues d’intérêt général» (art. L1). Reconnaissant les spécificités des forêts montagnardes et les contraintes naturelles de leur exploitation, il institue un système d’aides publiques en leur faveur. Les avantages accordés varient en fonction des difficultés de mise en valeur et de protection des bois et forêts en zone de montagne (art. L7).

Le défrichement des forêts de montagne peut être refusé dans un but de conservation, par exemple lorsque la protection «des bois ou des massifs qu’ils complètent est nécessaire au maintien des terres sur les montagnes ou sur les pentes» (art. L311-3). Plus encore, dans le département de la Réunion, le défrichement des bois et forêts est en principe interdit, sauf dérogation accordée par autorisation spéciale (art. L363-2). Enfin, les forêts dont la conservation est reconnue nécessaire au maintien des terres en montagne peuvent être classées comme «forêts de protection» et bénéficier à ce titre d’une protection totale (art. L411-1).

3.5.2. Eaux

Pour assurer la protection des eaux, les nouvelles constructions, installations et routes, ainsi que les extractions et fouilles sont interdites sur une largeur de 300 mètres à compter des rives des plans d’eau de moins de 1 000 hectares. Cette interdiction comporte toutefois plusieurs dérogations: «les bâtiments à usage agricole, pastoral ou forestier, les refuges et gîtes d’étapes ouverts au public pour la randonnée, les installations à caractère scientifique si aucune autre implantation n’est possible et les équipements d’accueil et de sécurité nécessaires à la pratique de la baignade ou des sports nautiques» peuvent être autorisés (code de l’urbanisme, art. L145-5). A cet égard, comme le note un auteur (Romi, 2001), la loi 85-30 est en retrait par rapport à la directive montagne de 1977, suivant laquelle l’interdiction d’aménagement s’appliquait à tous les plans d’eau sans restriction.

3.5.3. Sols

La loi 85-30 ne traite pas explicitement de la protection des sols de montagne contre l’érosion. En revanche, le code forestier consacre un titre à la conservation et la restauration des terrains de montagne. Les mesures à prendre varient en fonction de l’état du sol.

Lorsque «l’état de la dégradation du sol ne paraît pas assez avancé pour nécessiter des travaux de restructuration» (art. L421-1), il est procédé à leur mise en défens. Celle-ci «a pour objet de conserver les sols fragiles en excluant non seulement le pâturage mais tous autres modes d’utilisation» (Liagre, 1997). Ainsi, par décision du préfet, toute utilisation d’un terrain peut être interdite pour une durée pouvant aller jusqu’à dix ans, en indemnisant le propriétaire privé de sa jouissance. Lorsqu’une telle interdiction doit se prolonger au-delà de dix ans, l’Etat est tenu d’acquérir le terrain si le propriétaire en fait la demande (art. L421-2).

Lorsqu’un terrain est gravement affecté, des travaux de restructuration peuvent être déclarés d’utilité publique par décret, après enquête publique, délibération des conseils des communes, avis d’une commission spéciale et avis du conseil général. Les coûts des travaux sont à la charge de la collectivité publique ayant requis la restructuration (art. L424).

3.6. Conclusion

Le régime juridique institué par la loi 85-30 reflète les conditions et les besoins spécifiques des régions de montagne à divers égards. La loi permet de définir les zones de montagne avec précision, à partir de critères principalement altimétriques, complétés par une délimitation particulière des différents massifs montagneux que compte le pays. La loi met aussi en place des institutions de réflexion, de concertation et de gestion propres aux zones de montagne et aux massifs montagneux. En outre, la loi alloue aux actions de développement montagnard une partie des ressources du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire.

Plusieurs dispositions de la loi 85-30 ont été incorporées dans divers codes qui, avec elle, constituent le droit de la montagne en France. Ainsi, l’agriculture de montagne, reconnue d’importance majeure pour les habitants de la montagne, est régie par le code rural. De même, les aménagements touristiques sont abordé dans la loi 85-30 mais sont plus largement traités par le code de l’urbanisme. Pareillement, la protection de l’environnement en zone de montagne, qu’il s’agisse des espaces forestiers ou des plans d’eau, fait l’objet de dispositions particulières dans le code forestier et le code de l’urbanisme. Il en résulte un cadre juridique assez propice à l’aménagement et au développement des montagnes françaises.

Bibliographie

Législation

Doctrine

Sites

IV. GEORGIE

4.1. Introduction

En vertu de la constitution géorgienne, l’Etat doit promouvoir un développement équitable sur l’ensemble du territoire national, avec la possibilité d’instituer, par voie législative, des privilèges spéciaux visant à «garantir le progrès économique et social des régions de hautes montagnes» (art. 31). Cette disposition constitutionnelle a été concrétisée par l’adoption, en 1999, de la loi relative au développement socio-économique et culturel des régions de montagne. Traduisant l’importance géopolitique des régions de montagne, cette loi à pour objet de créer des conditions favorables à leur développement durable, de mettre en valeur leur potentiel économique et de diminuer l’exode des populations montagnardes.

La législation régissant les montagnes repose essentiellement sur la loi montagne de 1999, brève et simple, dont l’adoption a conduit à l’amendement d’autres textes législatifs, en particulier la loi relative à l’éducation et la loi relative à la santé. Ces dernières ont été modifiées en 1999 pour assurer la complémentarité et la conformité de leurs dispositions avec les objectifs de la loi montagne.

4.2. Délimitation de la montagne

Les régions de montagne sont, en Géorgie, délimitées principalement suivant le critère hypsométrique. En règle générale, pour pouvoir être considérée montagneuse, une région doit avoir une altitude minimale de 1 500 mètres. A ce critère de base, la loi ajoute d’autres paramètres: degré d’escarpement des pentes, conditions environnementales, qualité des sols, situation géographique, caractéristiques économiques et ethniques, facteurs démographiques et migratoires.

Il en résulte un élargissement de la notion de montagne permettant d’étendre l’application de la loi à d’autres zones, telles que la partie sud du Caucase et les massifs d’Adjara et de Guria, qui se trouvent à moins de 1 000 mètres d’altitude, voire parfois moins de 800 mètres (art. 4). En outre, indépendamment du critère hypsométrique, la loi s’applique aussi à certaines zones de réhabilitation des établissements humains: les régions de Mtianeti, Pshav-Khevsureti, Tusheti et le Ravin de Gudamaknri (art. 5).

Et pour plus de précision, la loi comporte une annexe spécifiant des villages et agglomérations qui entrent dans son champ d’application (art. 6).

4.3. Administration de la montagne

Aucune institution spécialement chargée des régions de montagne n’a été créée par la loi. La mise en œuvre de celle-ci incombe donc aux organes compétents déjà en place. Dans les faits, cependant, un comité pour les régions et les établissements de montagne a été institué au sein du parlement géorgien afin de promouvoir le développement des régions de montagne.

Ce comité agit en étroite collaboration avec une ONG qui se voue à la défense des zones de montagne, l’Union géorgienne des activistes de la montagne. Fondée en 1999, elle regroupe des spécialistes de la montagne d’horizons divers, qui œuvrent en faveur des montagnes géorgiennes, tant à l’échelon national qu’au plan international. L’Union a ainsi activement participé à l’élaboration de la loi montagne avant son adoption et elle soutient aujourd’hui son application. Elle a récemment conduit une étude visant à mieux définir les régions de montagne à partir de critères dits de «complexité». Ceux-ci font ressortir les caractéristiques distinctives de chaque région de montagne en tenant compte, notamment, de l’altitude, du relief, du climat et du réseau routier (Georgian Union of Mountain Activists, 2002). En outre, son programme d’action comprend plusieurs mesures de nature environnementale, socio-économique, touristique et juridique en appui au développement des montagnes du pays, ainsi que la promotion d’une «convention caucasienne» en vue de créer un cadre régional pour la coopération transcaucasienne[6].

4.4. Développement de la montagne

Les régions montagneuses couvrent plus des 2/3 du territoire national et sont habitées par environ 500 000 personnes, ce qui leur confère une importance cruciale pour l’économie générale du pays (Gulua, 1998). Leur développement socio-économique figure donc en bonne place dans la loi montagne.

4.4.1. Développement économique

(a) Financement

La mobilisation de financements de provenances diverses au profit des régions de montagne, y compris des fonds de l’Union européenne, est l’un des objectifs majeurs de la loi (art. 1.g). Celle-ci envisage deux sources particulières de financement: d’une part, les crédits alloués par les budgets locaux; de l’autre, les ressources d’un fonds qu’il est prévu de mettre en place et qui devrait être alimenté par les recettes d’exploitation des ressources locales, les redevances de location des pâturages, des donations, etc. (art. 5.2).

(b) Agriculture

Les régions montagneuses contribuent substantiellement à la production agricole nationale. La période 1990-1994 a cependant été marquée par une crise politique et économique qui a lourdement affecté les terres cultivables et les systèmes agricoles traditionnels, provoquant de fortes pertes de production de l’agriculture et de l’élevage (Gulua, 1998). C’est en partie pour remédier à ces difficultés que la loi montagne a été adoptée en 1999, dans l’espoir de redonner un essor au développement des zones montagneuses. Et c’est pourquoi elle fait des activités agricoles, dans toute leur diversité (productions animales, horticoles, fruitières, piscicoles, etc.), la base du développement économique, social et culturel des régions de montagne en Géorgie (art. 2).

(c) Tourisme

La Géorgie était jadis l’une des destinations touristiques préférées, accueillant au début des années 1990 plus de 1,7 millions de visiteurs nationaux et 170 000 touristes étrangers[7]. Par la suite, le tourisme a considérablement régressé en raison notamment de l’instabilité politique, l’insuffisance des infrastructures d’accueil et l’absence d’un environnement économique favorable (Mountain Agenda, 1999). Dans le souci d’inverser cette tendance, et fort des attraits touristiques des montagnes du pays, le gouvernement a déclaré en 1998 que le tourisme constitue «l’un des secteurs clés» du développement national[8]. Cette décision politique a trouvé écho un an plus tard dans la loi montagne, qui consacre des dispositions particulières à la promotion du tourisme. Des prêts préférentiels peuvent être accordés, sur le budget de l’Etat, aux investisseurs en région de montagne pour le développement d’activités touristiques, récréatives et sportives, ainsi que pour la protection et la restauration des monuments ruraux, historiques et naturels (art. 3).

(d) Artisanat

La loi encourage aussi, de la même manière, les investissements en faveur de l’artisanat en région de montagne et au profit des communautés montagnardes. Outre la création de centres de formation, diverses activités artisanales peuvent bénéficier de soutiens financiers, comme la sculpture sur bois, la poterie et la fabrication d’instruments de musique. Des aides peuvent également être accordées aux entreprises locales qui utilisent les ressources de la montagne et la main d’œuvre locale (art. 3).

4.4.2. Développement social

En raison des hautes altitudes et du manque d’infrastructures adéquates, les habitants de la montagne souffrent parfois d’isolement et sont souvent confrontés à des conditions de vie difficiles. Ils sont alors acculés à déserter les régions montagneuses, ce qui contribue à la déperdition de leur culture et de leurs connaissances traditionnelles (Curtis, 1994). D’où les mesures d’ordre social prévues par la loi en faveur des populations montagnardes (art. 1).

(a) Education

Après l’entrée en vigueur de la loi montagne, la loi relative à l’éducation a été complétée, en juin 1999, instituant la gratuité de l’éducation primaire et secondaire en région de montagne et le financement des écoles par l’Etat. La gratuité profite aussi aux élèves résidant en montagne qui, faute d’école chez eux, sont obligés de fréquenter des établissements scolaires en zone de plaine. De plus, les programmes scolaires en région de montagne doivent désormais comporter des cours d’écologie et d’artisanat. A défaut de ces derniers, l’Etat doit créer des écoles spéciales de formation en matière d’artisanat.

Pour compenser les difficultés de la vie en montagne, des compléments de salaire sont offerts aux personnels de l’éducation pour les inciter à s’établir en zone de montagne. Les avantages sont fixés selon le critère hypsométrique: dans les établissements scolaires situés jusqu’à 1 200 mètres d’altitude, les primes reçues équivalent à 50 pour cent des salaires; en dessus de 1 200 mètres, les enseignants ont droit à des avantages sociaux en plus d’une prime équivalant à 70 pour cent de leurs salaires. Enfin, les enseignants qui partent à la retraite continuent de percevoir 100 pour cent de leurs salaires.

(b) Santé

Des amendements ont également été apportés à la loi relative à la santé après l’adoption de la loi montagne. La loi modifiée prévoit la gratuité des soins médicaux en région de montagne, l’Etat prenant en charge les coûts de construction et de fonctionnement des établissements médicaux. En outre, pour encourager les personnels médicaux à s’installer en montagne, elle leur accorde des primes, qui sont fixées en fonction de l’altitude: 50 pour cent du salaire dans les régions où l’altitude s’élève jusqu’à 1 200 mètres et 70 pour cent du salaire au-delà de cette altitude.

4.5. Protection de la montagne

L’un des objectifs de la loi montagne est de promouvoir la protection des écosystèmes et des paysages montagneux (art. 1). A cette fin, des espaces montagneux peuvent être classés en zones de montagne «protégées» (art. 3). De plus, les projets de développement des régions de montagne doivent être réalisés de manière à assurer une utilisation rationnelle des ressources locales, dans le respect des principes de durabilité consacrés par la convention alpine (art. 2).

A part ces dispositions assez générales, la loi ne prévoit pas de mesures spéciales de protection de l’environnement propres aux régions de montagne. Toutefois, d’autres lois connexes (relatives aux aires protégées, aux forêts, à l’eau, etc.) comportent des dispositions complémentaires présentant un intérêt pour la conservation de l’environnement montagnard.

4.6. Conclusion

Quoique rédigée en termes concis, la loi montagne traite des principales dimensions du développement de la montagne. Sa mise en œuvre nécessite des règlements d’application plus détaillés, mais ceux-ci n’ont pas encore été pris. Sur le plan institutionnel, un comité a été créé au sein du parlement pour promouvoir et coordonner les actions de développement dans les zones de montagne. La loi énumère par ailleurs les secteurs d’activités socio-économiques (agriculture, tourisme, artisanat, éducation, etc.) devant bénéficier d’incitations en faveur des investissements dans les régions de montagne. Enfin, la loi contient quelques dispositions laconiques sur la protection des écosystèmes de montagne.

Bibliographie

Législation

Documents

Sites

V. ITALIE

5.1. Introduction

Les montagnes italiennes, où vivent plus de 10 millions d’habitants, comptent les régions les plus riches mais aussi les plus pauvres du pays. Ainsi, parmi les 30 municipalités les plus riches, 23 sont situées en montagne (majoritairement au Nord); et parmi les 30 municipalités les plus pauvres, 27 sont montagneuses (majoritairement au Sud)[9]. Toute politique de la montagne ne peut donc ignorer cette disparité du niveau de développement des zones de montagne et doit s’efforcer d’y porter remède.

La constitution italienne de 1947 se singularise par la place spéciale qu’elle fait aux régions de montagne. Elle énonce que celles-ci doivent, par voie législative, bénéficier de mesures avantageuses spécifiques visant à assurer leur protection et à promouvoir leur développement, de façon équilibrée, compte tenu de leurs conditions environnementales précaires et de leurs besoins particuliers en matière d’équipements et de services (arts. 44 et 129). Ces dispositions constitutionnelles ont été à l’origine de l’adoption de diverses lois concernant la montagne depuis les années 1950.

Aujourd’hui, le cadre législatif de protection et de mise en valeur des régions de montagne repose principalement sur deux textes complémentaires: la loi 1102 de 1971 portant nouvelles normes pour le développement de la montagne et la loi 97 de 1994 relative aux nouvelles dispositions sur les zones de montagne. Afin de réduire les inégalités socio-économiques entre les populations des vallées et les communautés de montagne, l’accent est mis sur l’amélioration des conditions de vie de ces dernières, notamment par la promotion des infrastructures et des services publics. De plus, les différentes dimensions du développement rural - agriculture, forêts, tourisme, environnement -sont articulées de façon intégrée.

Ces deux lois de base sont complétées par plusieurs autres textes, notamment la loi 72 de 1975 et la loi 93 de 1981 concernant le financement des communautés de montagne, la loi 142 de 1990 relative aux autonomies locales - qui précise le statut desdites communautés -, ainsi que divers autres textes spécifiques, dont certains seront évoqués ci-dessous.

En outre, la plupart des régions montagneuses disposent de leurs propres lois concernant les montagnes, mais celles-ci ne sont pas examinées dans le cadre de cette brève analyse de la législation nationale.

5.2. Délimitation de la montagne

Une définition précise du concept de «montagne» facilite la délimitation du champ territorial d’application des dispositions légales régissant les montagnes. Les critères de définition utilisés par le législateur ont été, initialement, d’ordre surtout altimétrique. La loi 991 de 1952 relative aux bois, forêts et territoires de montagne considérait comme montagneuses les communes dont au moins 80 pour cent de la superficie se trouvent au-dessus de 600 m d’altitude et les territoires ayant une dénivellation d’au moins 600 m (art. 1).

Un tempérament à cette approche «mécanique» de délimitation des zones de montagne a ensuite été introduit par la loi 657 de 1957, qui a permis d’ajouter aux communes de montagne ainsi classées celles qui ne répondent pas aux critères altimétriques, mais qui se caractérisent par les mêmes conditions agro-économiques. Cet élargissement des critères de qualification s’est traduit par une augmentation progressive du nombre de communes de montagne, portant leur nombre à 4194 à la fin de 1994, soit près de 51 pour cent des communes existantes et 54 pour cent du territoire national (Maglia et Santoloci, 1998).

La loi 142 de 1990 a abrogé ces critères de classification, sans en établir de nouveaux, se contentant d’imposer des limites précises aux structures des communautés de montagne. Face à se silence de la loi, les ministres de l’intérieur et de l’agriculture ont, par une décision conjointe de 1995, convenu qu’il n’y avait plus lieu de continuer à classer les communes de montagne. Il en est résulté une cristallisation du nombre des communes déjà classifiées à cette date (Maglia et Santoloci, 1998).

5.3. Administration de la montagne

5.3.1. Un cadre institutionnel décentralisé

Depuis la loi 1102 de 1971, le cadre institutionnel de la montagne est caractérisé par une décentralisation prononcée, avec de larges pouvoirs conférés aux régions. Auparavant, les actions en faveur de la montagne étaient majoritairement entreprises au niveau central, de façon fragmentaire, et s’inscrivaient dans une politique d’assistance aux zones de montagne.

En vertu de la constitution, les régions ont le pouvoir de légiférer dans divers domaines - politiques urbaines et rurales, chasse, agriculture, forêts, artisanat, etc. -, à condition de ne pas léser les intérêts de la nation ou d’autres régions (art. 117). Dans ces mêmes matières, les fonctions administratives relèvent également des régions. En outre, l’Etat peut déléguer l’exercice d’autres fonctions administratives aux régions. Celles-ci, à leur tour, peuvent déléguer certaines de leurs fonctions aux provinces, communes ou autres entités locales (art. 118).

Eu égard aux montagnes, la loi 1102 (art. 4.4) habilite la région à légiférer en vue:

5.3.2. Importance des communautés de montagne

(a) Statut des communautés

Dans la loi 1102, les communautés de montagne occupent une place centrale, comme cadres privilégiés d’intégration de la population locale. Créée par une loi régionale, la communauté de montagne est constituée par les communes montagneuses ou partiellement montagneuses d’une même province (loi 1102, art. 4; loi 142, art. 28). Personne morale de droit public selon la loi 1102, la communauté est considérée par la doctrine et la jurisprudence comme une entité locale autonome du point de vue politique et administratif. Sa finalité, son statut autant que son autonomie en font une entité de «second degré», intermédiaire entre les communes, les provinces et les régions (Maglia et Santoloci, 1998).

Les communautés de montagne ont un caractère obligatoire en ce sens que leur création ne dépend pas de la volonté des intéressés mais résulte d’une initiative du législateur. La loi qui les institue fixe les règles auxquelles les communautés doivent se conformer quant au contenu de leurs statuts, à l’articulation et la composition de leurs organes, à l’élaboration des plans de zonage et aux rapports avec les autres entités opérant sur le même territoire. Les organes des communautés doivent obligatoirement comprendre: (i) un organe délibérant, où doit être représentée la minorité de chaque conseil communal; et (ii) un organe exécutif assurant une vision unitaire des intérêts des communes participantes. Les communautés peuvent également mettre en place un bureau et un comité technique aux fins de préparation et d’exécution des plans de zonage (art. 4).

La composition des communautés de montagne tient à des critères géographiques, mais aussi démographiques. Ainsi, une communauté ne peut pas avoir moins de 5 000 habitants. De même, elle ne peut englober ni les communes dont la population est supérieure à 40 000 habitants, ni les communes partiellement montagneuses dont la population résidante en zone de montagne est inférieure à 15 pour cent de la totalité de la population. Les territoires ainsi exclus ne sont cependant pas privés du bénéfice des aides accordées aux zones de montagne par l’Union européenne, l’Etat ou la région. Une loi régionale peut, en outre, soit exclure d’une communauté les communes partiellement montagneuses susceptibles de nuire à son homogénéité géo-socio-économique, soit y inclure les communes voisines ayant au maximum 20 000 résidents et faisant partie intégrante du système géographique et socio-économique de la communauté (loi 142, art. 28).

(b) Prérogatives des communautés

La loi 142 précise que les communautés de montagne sont créées dans un but de valorisation des zones montagneuses, d’exercice conjoint des fonctions communales, voire de fusion des communes participantes (art. 28). A cette fin, les communautés mettent en œuvre un plan de développement socio-économique et des plans annuels ou pluriannuels d’actions et d’interventions, ainsi que les moyens requis pour leur exécution. Dans ce cadre, elles concourent également à la réalisation des programmes soutenus par l’Union européenne, l’Etat et la région (art. 29).

Les communautés de montagne peuvent par ailleurs déléguer partiellement à d’autres entités la mise en œuvre d’actions ou de programmes spécifiques relevant de leur compétence territoriale. Inversement, elles peuvent assumer des fonctions propres aux entités qui en font partie sur délégation de ces dernières (loi 1102, art. 6), y compris de la part des communes partiellement montagneuses dont la population ne dépasse pas 50 000 habitants (loi 93, art. 4).

5.4. Développement de la montagne

5.4.1. Développement économique

(a) Fonds spécial

La loi 97 de 1994 a créé le Fonds national pour la montagne dont les ressources sont affectées au financement de projets et d’actions en faveur du développement et de la protection des régions montagneuses, sur les plans économique et écologique autant que social et culturel (arts. 1 et 2). Le Fonds est alimenté par des apports de l’Union européenne, de l’Etat et d’autres entités publiques. A ces ressources s’ajoutent les dotations ordinaires ou spéciales de l’Etat au profit des collectivités locales.

Les ressources du Fonds sont réparties entre les régions et les provinces autonomes, lesquelles instituent leurs propres fonds régionaux pour la montagne et les alimentent par des dotations additionnelles de leurs budgets respectifs. Il appartient aux régions et provinces autonomes concernées de définir, par voie législative, les critères d’affectation de ces ressources (loi 97, art. 2).

Les critères de répartition des ressources du Fonds entre les différentes régions et provinces autonomes sont fixés par un comité interministériel, sur proposition des ministres concernés et après avis des intéressés, en tenant compte notamment des impératifs combinés de la sauvegarde de l’environnement et du développement agro-silvo-pastoral, de l’étendue des zones montagneuses, de la population résidente, du revenu moyen et du niveau des services publics (loi 97, art. 2).

(b) Activités agricoles et connexes

Bien que la loi 1102 traite du développement socio-économique des montagnes en général (arts. 5 et 6), elle n’aborde pas explicitement la dimension agricole. Les communautés de montagne disposent ainsi d’une large marge de manœuvre à cet égard, sous réserve de quelques règles contenues dans d’autres textes. Ainsi, la loi 97 prescrit des mesures de «conservation de l’intégrité de l’entreprise agricole» (art. 4).

Sous un autre angle, au titre de la protection du patrimoine historique et culturel montagnard, la loi 97 encourage la valorisation des produits agricoles typiques de la montagne protégés par une dénomination d’origine ou une indication géographique. Les produits agro-alimentaires confectionnés dans les communes de montagne ou avec des matières premières qui en proviennent peuvent en outre bénéficier du label «produits de la montagne italienne», aux conditions fixées à cet effet par arrêté ministériel (art. 15).

La loi 97 traite aussi d’autres activités rurales, qui sont généralement importantes pour l’économie locale en zone de montagne: chasse, pêche et récolte des produits du sous-bois (art. 8). Ces activités doivent notamment: (i) être conduites conformément aux dispositions en vigueur relatives à la protection de l’environnement et des ressources naturelles; (ii) être créatrices d’emplois et d’entreprises locales, ainsi que d’activités dans le secteur agro-silvo-pastoral.

5.4.2. Développement social

Une des finalités de la loi 1102 est de doter les zones de montagne d’infrastructures et de services adéquats afin d’assurer leur développement harmonieux et d’améliorer les conditions de vie des populations qui y résident en les aidant à mieux faire face aux difficultés de l’environnement montagnard.

A cet effet, la loi 97 prévoit expressément la possibilité d’exproprier, dans les communes de montagne et en cas d’utilité publique, les terrains nécessaires à la réalisation d’infrastructures ou d’ouvrages publics. Une autorisation du ministère de l’environnement doit être obtenue au préalable et les personnes expropriées ont droit à une juste indemnité des pertes subies (art. 12).

De manière plus spécifique, la loi 93 prévoit que les communautés de montagne bénéficient des tarifs d’électricité et de téléphone applicables aux communes. En outre, dans ces mêmes communautés, les coûts d’installation des lignes électriques et téléphoniques pour les usagers isolés ou dispersés - et donc handicapés par l’éloignement - devraient être équivalents à ceux pratiqués à l’intérieur des centres habités (art. 5).

5.5. Protection de la montagne

5.5.1. Environnement

Quelques dispositions générales de protection de l’environnement en montagne figurent dans la loi 1102 (art. 9) et la loi 97 (art. 7). La première prévoit la possibilité pour les régions, les communautés de montagne et les communes d’acquérir et de louer à long terme (au moins 20 ans) des terrains montagneux non cultivés ou déboisés afin de les convertir en bois, pâturages ou réserves naturelles. Faute d’accord sur l’acquisition de ces terrains aux prix courants, les régions, communautés et communes concernées peuvent procéder à leur expropriation pour les besoins de la conservation des sols et la protection du milieu naturel.

La seconde prévoit que les plans de développement des communautés de montagne, dont la finalité première est l’activité socio-économique, doivent également prioriser les interventions en matière de sauvegarde et de valorisation de l’environnement, notamment du point de vue des équilibres hydrologiques, du patrimoine naturel et culturel, ainsi que des paysages ruraux et montagneux, dans le respect des exigences tant du développement que de l’environnement.

5.5.2. Forêts

La loi 97 consacre des dispositions spécifiques au patrimoine forestier des zones de montagne (art. 9). Les communautés de montagne sont tenues, séparément ou conjointement, de promouvoir la gestion des forêts de leur ressort moyennant la conclusion de conventions entre les propriétaires ou la constitution de groupements forestiers. Des financements peuvent être accordés par l’Etat, les régions et les provinces autonomes aux communautés et communes de montagne pour la réalisation de plantations forestières. Les régions, provinces et communes peuvent par ailleurs déléguer aux communautés de montagne la gestion de leurs domaines forestiers respectifs.

5.6. Conclusion

La législation italienne relative à la montagne, l’une des plus anciennes du genre, a évolué et s’est enrichie progressivement au cours des trois dernières décennies. Depuis quelques années, elle confère des pouvoirs législatifs étendus aux régions, qui en ont fait régulièrement usage en adoptant une multitude de lois régionales propres à leurs zones montagneuses. Les régions peuvent, à leur tour, déléguer plusieurs de leurs fonctions à des entités locales, et ce afin d’associer la population montagnarde aux actions de protection et de mise en valeur de leur milieu naturel et de leur cadre de vie.

Outre l’agriculture, qui occupe une place importante dans le développement économique des zones montagneuses, la législation italienne comporte des mesures incitatives en faveur de l’aménagement et de l’exploitation des différentes ressources naturelles de la montagne, en vue de promouvoir la pluriactivité.

Sur le plan social, les textes régissant la montagne mettent l’accent sur le développement des infrastructures et des services publics, dans le souci d’améliorer le cadre de vie des habitants de montagne et de réduire les disparités de niveau de développement avec les résidents des vallées.

Enfin, l’environnement montagnard fait l’objet de dispositions protectrices, en particulier sous forme d’incitations au reboisement des terrains dénudés, à la conservation des sols, au maintien des équilibres hydrologiques et à la création de réserves naturelles.

Bibliographie

Législation

Documents

VI. SUISSE

6.1. Introduction

Contrairement à d’autres pays faisant l’objet de la présente étude, la Suisse ne possède pas une «loi montagne» unique, mais un ensemble de textes formant «législation de la montagne». Comme le pays est presque entièrement montagneux, plusieurs textes ont été pris, au fil des ans, pour réglementer les différents aspects du développement et de la protection des régions de montagne. Les mesures ainsi adoptées ont souvent été de nature pécuniaire, généralement des financements attribués au profit des zones montagneuses.

La politique suisse des régions de montagne vise à conjuguer la protection de la nature avec le droit des populations à un développement économique adéquat. Ces objectifs sont poursuivis tant par la Confédération que par les cantons, la Suisse étant un Etat fédéral[10]. Ils sont donc reflétés dans les lois fédérales autant que cantonales.

La loi fédérale sur l’aide aux investissements dans les régions de montagne 901.1 de 1997 est le principal texte contenant des encouragements au développement des régions de montagne. Elle vise à favoriser la compétitivité économique des zones de montagne, à faciliter l’exploitation de leurs potentialités, à maintenir leurs particularités socioculturelles, à assurer leur développement durable et, finalement, à renforcer la coopération entre communes, sous-régions et régions montagneuses (art. 1). Ces dispositions sont complétées, en matière de développement de l’agriculture de montagne, par la loi fédérale sur l’agriculture 910.1 de 1998.

Au plan du développement social, deux lois intéressent particulièrement les régions de montagne de par les avantages financiers qu’elles prévoient à leur profit: la loi fédérale concernant l’amélioration du logement dans les régions de montagne 844 de 1970 et la loi fédérale sur les allocations familiales dans l’agriculture 836.1 de 1952.

Quant aux critères de délimitation des régions de montagne, ils sont fixés par l'ordonnance 912.1 de 1998 sur le cadastre de la production agricole et la délimitation de zones.

Outre ce dispositif juridique fédéral, plusieurs cantons ont adopté des lois qui tiennent compte des spécificités de leurs zones montagneuses. C’est notamment le cas des cantons de Berne, de Fribourg, de Neuchâtel et de Vaud, dont les lois seront brièvement évoquées ci-dessous.

6.2. Délimitation de la montagne

Les régions de montagne sont délimitées conformément à un texte de portée générale, applicable à tout le territoire national, l’ordonnance 912.1, qui a été prise en application de la loi fédérale sur l’agriculture[11]. Les régions de montagne sont constituées par quatre catégories de zones, allant des sites montagneux bien situés (zones de montagne I) aux sites les plus défavorisés (zones de montagne IV), en passant par les catégories intermédiaires (zones II et III). La délimitation de ces zones se fait par référence à trois facteurs qui sont, par ordre d’importance décroissante: les conditions climatiques, les voies de communication et la configuration du terrain. En premier lieu, les conditions climatiques sont évaluées selon la durée de la végétation présente et compte tenu d’éléments tels que l’exposition au soleil, la projection d’ombre, l’altitude, les précipitations. Ensuite, l’état des voies de communication est jugé en fonction des dessertes, de la distance séparant l’exploitation du village et des transports publics. Enfin, la configuration du terrain est évaluée selon le degré de pente du terrain et d’après la possibilité d’utiliser les engins agricoles[12].

D’après l’ordonnance 912.1, la procédure de délimitation comporte trois étapes: (i) l’Office fédéral de l’agriculture fixe les limites d’une région de montagne; (ii) le canton concerné est entendu par l’Office; (iii) l’Office reporte les limites sur des cartes topographiques dressées sur support électronique et sur papier. Ces cartes forment le cadastre de la production agricole et doivent être conservées par: (a) l’Office pour l’ensemble du pays; (b) les services désignés par les cantons pour le territoire cantonal; et (c) les communes pour leur propre territoire (arts. 4 et 5).

Les limites des régions peuvent être modifiées soit à la demande des exploitants, soit à l’initiative de l’Office fédéral de l’agriculture, en tenant compte des critères susmentionnés. A ce stade, le canton sur le territoire duquel se trouve la limite à modifier doit être entendu (art. 6). La décision prise par l’Office est publiée dans le journal officiel du canton concerné et doit être conservée de la même manière que les cartes topographiques susvisées.

Deux autres textes se réfèrent aussi à l’ordonnance 912.1 pour ce qui est de leur champ d’application: (i) la loi 844 concernant l’amélioration locative en zones de montagne, en vertu de laquelle la délimitation de ces dernières «s’opère selon le cadastre de la production agricole» (art. 2); et (ii) la loi 836.1 concernant les allocations familiales dans l’agriculture (art. 6).

La loi 901.1 de 1997 relative à l’aide aux investissements dans les régions de montagne (dites «LIM»), pour sa part, définit son propre champ spatial. Pour les besoins de son application, les régions de montagne sont celles qu’elle mentionne en annexe. Plus de 50 régions y figurent et sont communément désignées comme étant les régions LIM. De telles régions sont formées par des communes regroupées suivant leurs caractéristiques géographiques et économiques comparables et leur volonté de partager les «tâches qui leur incombent» (art. 3). Leur composition peut toutefois être modifiée par les cantons et les communes concernés. L’adoption de la loi 901.1 a entraîné l’abrogation de la précédente loi fédérale sur l’aide en matière d’investissement dans les régions de montagne de 1974. Celle-ci renvoyait, pour la délimitation des régions de montagne, au cadastre de la production animale; ces régions étaient alors celles «situées dans le territoire circonscrit par le cadastre de la production animale». Aujourd’hui, ce système d’enregistrement n’est plus en vigueur.

6.3. Administration de la montagne

Les textes relatifs aux régions de montagne n’ont pas créé d’institutions spécialement chargées de l’administration de la montagne. La mise en oeuvre de ces textes revient ainsi à des organes déjà en place, qui sont désignés pour leur application.

En Suisse, Etat fédéral, les compétences en matière de gestion des ressources naturelles et de protection de l’environnement sont partagées entre la Confédération, les cantons et, dans une moindre mesure, les communes. Selon la constitution, la Confédération doit œuvrer «en faveur de la conservation durable des ressources naturelles» (art. 2), dans le respect des caractéristiques particulières des cantons et des communes (arts. 46 et 50). Les cantons exercent toutes les fonctions qui ne relèvent pas de la Confédération (art. 3). Ensemble, la Confédération et les cantons tâchent d’établir un «équilibre durable entre la nature et son utilisation par l’être humain» (art. 73). L’exécution des lois fédérales en la matière repose sur les cantons, sauf dispositions attribuant des compétences précises à la Confédération. Les communes, quant à elles, exercent les pouvoirs que les lois cantonales leur confèrent (art. 50).

Les lois régissant la montagne précisent la compétence de chaque organe. La loi 901.1 détermine les pouvoirs de la Confédération et des cantons pour l’octroi des aides: les cantons sont chargés de l’application de la loi et la Confédération en surveille l’exécution (arts. 22 et 23). Les aides financières sont accordées par la Confédération et il appartient aux cantons de déterminer les montants des prêts à octroyer (art. 4). De la même manière, selon la loi 844 relative à l’amélioration du logement dans les régions de montagne, des aides financières sont attribuées à cette fin par la Confédération aux cantons, lesquels doivent mettre en œuvre des mesures concrètes pour améliorer le logement en montagne (art. 1).

Il existe par ailleurs des associations qui se dédient spécialement au développement et à la protection des régions de montagne, dont deux en particulier se distinguent par l’importance de leur contribution: le Groupement suisse pour les régions de montagne (SAB) et l’Aide suisse aux montagnards.

Fondé dès 1943, le SAB a pour membres tous les cantons et communes de montagne, des organisations agricoles et d’entraide professionnelle, les régions LIM (loi 901.1), d’autres entités opérant en montagne, ainsi que de nombreuses personnes physiques. L’exploitation durable des ressources de montagne, la protection de la montagne en tant que milieu naturel et espace économique, l’amélioration des conditions de vie dans les régions de montagne, figurent parmi les objectifs majeurs du SAB. De concert avec le gouvernement fédéral, le parlement et d’autres associations, il présente des propositions et prend des initiatives en faveur des régions de montagne, en veillant au respect de leurs spécificités dans tous les domaines. Il informe l’opinion publique à l’aide de publications (notamment par la revue Montagna) et offre divers services tels que des conseils, cours, études, etc.

L’Aide suisse aux montagnards, association reconnue d’utilité publique, a été fondée en 1952. Elle se compose de personnes physiques et morales qui soutiennent les objectifs qu’elle poursuit et les activités qu’elle entreprend (article 4 de ses statuts). L’association vise à améliorer le potentiel économique des régions de montagne et les conditions de vie de leurs populations. Elle entend principalement enrayer l’exode rural en soutenant l’agriculture de montagne et en favorisant l’entraide entre paysans de montagne. Ses actions tendent aussi, notamment, à améliorer les conditions de logement et de travail, à mettre en valeur les régions de montagne par la construction d’infrastructures adéquates, à aider les jeunes paysans dans leur formation et à fournir une aide sociale aux personnes en difficultés.

6.4. Développement de la montagne

Pays montagneux s’il en est, la Suisse a tout avantage à mettre en œuvre des mesures concrètes en faveur du développement socio-économique de ses régions de montagne. C’est ainsi que diverses formes d’aides leur sont attribuées, directement par l’Etat ou, avec son appui, par des organisations indépendantes telle que l’Aide suisse aux montagnards, qui oeuvre à l’amélioration «des bases d’existence économique et les conditions de vie dans les régions de montagne» (article 2.1 de ses statuts).

6.4.1. Développement économique

(a) Fonds spéciaux

La loi 901.1 institue un Fonds de financement de l’aide aux investissements, dont les ressources sont constituées d’apports de l’Etat, des remboursements de prêts déjà octroyés et des intérêts produits par lesdits prêts, ainsi que des contributions des cantons, qui se portent en partie garants des prêts consentis[13]. Ce fonds est d’une grande importance pour la mise en œuvre efficace de la loi d’aide aux investissements. D’après la “politique agricole 2007”, il est actuellement doté de plus de 1,6 milliards de francs suisses (Office fédéral de l’agriculture, 2001).

Au niveau cantonal, l’application de la loi 901.1 s’effectue conformément aux dispositions correspondantes des lois cantonales. Les cantons peuvent prévoir la création d’un fonds spécial dans leur propre loi. C’est par exemple le cas du canton de Neuchâtel, qui a mis en place un Fonds cantonal d’aide aux régions de montagne par sa loi de 1999 d’introduction de la loi fédérale sur l’aide aux investissements (art. 13). Il en est de même pour le canton de Berne où un Fonds cantonal d’aide aux investissements a été créé par une loi similaire de 1997 (art. 1).

Certains financements sont également assurés par des organisations telles que le Groupement suisse pour les régions de montagne (SAB) et l’Aide suisse aux montagnards. Par exemple, cette dernière met à la disposition des communautés de montagne un fonds spécial dénommé «Mesures de promotion et de développement dans les régions de montagne»[14] pour la réalisation de grands projets régionaux, qui sont souvent exécutés en collaboration avec le SAB.

(b) Agriculture

La plupart des mesures concernant l’agriculture de montagne sont prévues par loi 910.1 sur l’agriculture. La Confédération doit veiller à ce que tout soit mis en oeuvre pour assurer une production agricole adéquate répondant «à la fois aux exigences du développement durable et à celles du marché» (art. 1). Ces mesures, qui sont de portée nationale, doivent être adaptées aux particularités des zones de montagne et tenir compte des conditions «difficiles de vie et de production» qui y prévalent (art. 4).

La Confédération encourage le développement agricole dans les régions de montagne par l’octroi de «paiements directs» aux exploitants qui gèrent une exploitation pour leur compte, à leurs risques et périls, et qui ont leur domicile en Suisse. D’après le rapport agricole 2000, en 1999, 63 pour cent du volume total des paiements directs sont allés aux zones de colline et de montagne (Département fédéral de l’économie, 2000).

Il existe une autre forme d’aide financière en faveur des exploitants agricoles, qui est attribuée suivant le degré de pente de la surface agricole utile. Les terrains pouvant en bénéficier sont ceux situés «dans la région de montagne et dans la zone des collines et ayant une déclivité de 18 pour cent ou plus» (ordonnance 910.13, art. 35). De plus, une contribution financière peut être octroyée pour la «garde d’animaux de rente consommant des fourrages grossiers dans la région de montagne» (loi 910.1, art. 74).

Toujours dans l’optique de préserver l’agriculture de montagne, la Confédération peut mettre à la disposition des cantons des fonds destinés à financer des aides aux exploitations paysannes (art. 78). Les aides sont versées sous forme de prêts pouvant servir, par exemple, à remettre sur pied des exploitations en difficulté, dans des conditions préférentielles, en zones montagneuses. Normalement, une exploitation ne peut recevoir un tel prêt que si: (i) elle est viable à long terme, grâce à un revenu d’appoint non agricole; (ii) elle est gérée rationnellement; et (iii) elle a une charge d’endettement non excessive. En région de montagne, ces prêts peuvent être accordés même aux exploitations agricoles qui ne sont viables «qu’à la faveur d’un revenu principal non agricole», donc aux «entreprises exploitées à titre accessoire» (art. 80).

La loi agricole prévoit en outre des aides pour la réalisation d’améliorations foncières et la construction de bâtiments ruraux. L’amélioration foncière s’entend des ouvrages et installations de génie rural ainsi que de la réorganisation de la propriété foncière et des rapports d’affermage, alors que les bâtiments ruraux comprennent aussi bien les bâtiments d’exploitation et alpestres que les bâtiments communautaires servant au traitement et au stockage des produits (art. 94). La Confédération peut financer jusqu’à 50 pour cent des coûts d’améliorations foncières en montagne (art. 95). La “politique agricole 2007” propose que la Confédération prenne aussi en charge «la remise en état de chemins desservants des biens-fonds agricoles» (Département fédéral de l’agriculture, 2001). La Confédération soutient par ailleurs la construction, la rénovation et la transformation des bâtiments ruraux (art. 96). Afin que les aides soient utilisées à bon escient, il est interdit d’affecter les constructions réalisées à des fins non agricoles pendant les 20 années qui suivent le versement des contributions fédérales (art. 102).

Au niveau cantonal, la loi 8.15 de 1995 relative à la promotion de l’économie agricole vaudoise prévoit des encouragements à l’agriculture montagnarde sous forme de subventions spéciales, notamment dans le but de favoriser la sélection de bétail de qualité et pour faciliter l’acquisition de machines agricoles. Cette loi a été complétée par un règlement prévoyant des aides en faveur des cultures accessoires, des études relatives à la promotion des produits de la montagne, de la diversification des activités agricoles montagnardes, etc.[15] De plus, pour encourager la production animale en montagne, des prêts peuvent être octroyés pour l’achat de vaches donneuses et pour la création d’installations permettant la diversification de la production de viande, et des contributions peuvent être versées pour la transplantation d’embryons et pour l’engraissement des veaux[16].

Enfin, à l’échelon fédéral, les travailleurs agricoles salariés d’une entreprise agricole ou ayant la qualité de «petits paysans» bénéficient d’une allocation familiale, que ce soit en plaine ou en montagne[17]. Toutefois, les montants de cette aide familiale sont plus importants lorsque le travailleur agricole ou le petit paysan exerce en zone de montagne.

(c) Infrastructures et investissements

La loi 901.1 établit un système de prêts consentis par la Confédération en faveur du développement des infrastructures en région de montagne. Dans chaque région, un organisme de développement régional doit être mis en place (art. 15). Ce dernier est chargé d’élaborer un programme de développement et un programme d’action pluriannuel qui, ensemble, orientent la réalisation de nouvelles infrastructures. En effet, tout projet d’infrastructures doit être conforme aux objectifs du programme de développement (art. 5). Pour obtenir une aide financière de la Confédération, les projets doivent viser, notamment, l’amélioration de la compétitivité de l’industrie régionale, l’amélioration de la qualité de la vie et l’accroissement du potentiel économique de la région (art. 6).

Les prêts sont accordés par la Confédération à des taux inférieurs à ceux du marché, qui peuvent être exempts de tout intérêt lorsque les possibilités financières du bénéficiaire et l’importance du projet le justifient (art. 9). Outre les contributions fédérales, les cantons jouent également un rôle de premier plan dans le financement de ces programmes. Par exemple, le Fonds d’aide aux investissements du canton de Berne sert à cofinancer les aides prévues par la loi 901.1[18]. Une participation paritaire à ces financements est aussi prévue dans les cantons de Fribourg[19] et de Neuchâtel[20]. De ce fait, en cas de non-remboursement des prêts, les cantons sont responsables pour la moitié des montants alloués (loi 901.1, art. 12).

6.4.2. Développement social

Les aides financières octroyées au titre de la loi 901.1 visent également à «améliorer la qualité de la vie tout en assurant ou en préservant l’identité et la diversité politiques et socioculturelles de la région» (art. 6). Analysée ci-dessus sous l’angle économique, cette disposition est tout aussi pertinente du point de vue social. En outre, afin de pallier la précarité des conditions de vie en région de montagne, deux autres lois à dimension sociale comportent des dispositions correctrices en matière d’allocations familiales et de logement.

(a) Allocations familiales dans le secteur agricole

La loi fédérale de 1952 sur les allocations familiales dans l’agriculture institue des prestations sociales de l’Etat en faveur des travailleurs agricoles et des petits paysans. Les caisses de compensation cantonales déterminent les montants des allocations et se chargent de leur distribution (art. 13).

Pour être éligible à la prestation travailleur agricole, une personne doit exercer un travail rémunéré dans une entreprise agricole. Deux allocations existent: l’allocation pour enfants, à raison de chaque enfant à charge au sein de la famille, et l’allocation de ménage, pour les travailleurs vivant avec leur conjoint. Les montants de l’allocation pour enfants sont plus élevés pour les travailleurs exerçant en zones montagneuses (arts. 1 et 9).

Pour pouvoir obtenir une allocation petit paysan, l’intéressé doit être un exploitant agricole, à titre principal ou accessoire, percevant des revenus ne dépassant pas un montant déterminé, ou encore être un exploitant d’alpage (art. 5). L’allocation est versée pour chaque enfant à charge et, là aussi, elle est plus importante lorsque l’exploitation est située en montagne.

(b) Amélioration du logement dans les régions de montagne

La loi fédérale de 1970 concernant l’amélioration du logement dans les régions de montagne permet aux personnes et aux familles possédant de faibles revenus et vivant en montagne d’obtenir une aide financière pour la rénovation, la construction ou l’amélioration de leur habitation afin de bénéficier de «saines conditions d’habitation» (art. 1). Le niveau de revenu en deçà duquel l’aide financière peut être attribuée est régulièrement révisé (Maissen, 1999). L’aide en question est fournie tant par la Confédération que par les cantons et couvre de 15 à 50 pour cent des coûts d’amélioration des logements. Les personnes se trouvant dans des situations d’extrême difficulté peuvent recevoir une contribution allant jusqu’à 75 pour cent desdits coûts (Office fédéral du logement, 1999).

Une interdiction de désaffectation pendant un délai de 20 ans est ici aussi prévue par la loi. Si un logement ayant bénéficié d’une aide financière est détourné de sa destination première ou est vendu avec profit avant l’expiration de ce délai, le bénéficiaire de l’aide est tenu de rembourser les sommes reçues (art. 13).

6.5. Protection de la montagne

De l’ensemble des textes étudiés, seulement quelques dispositions traitent de la protection environnementale des zones montagneuses. Par exemple, la loi 844 prévoit que les travaux réalisés dans le but d’améliorer le logement en région de montagne doivent être effectués en conformité avec les «exigences de l’aménagement du territoire, de la protection de la nature et du paysage et de la protection de l’environnement» (art. 4). De même, l’un des objectifs poursuivis par la loi 901.1, à travers l’octroi de financements pour des projets et programmes d’infrastructures, est de promouvoir le développement durable des régions de montagne.

Au-delà de ces dispositions ponctuelles, les mesures plus généralement applicables à la protection du milieu montagnard sont à puiser dans les lois relatives à l’environnement et aux ressources naturelles (forêts, eau, sols, etc.) en vigueur dans le pays. De plus, aux termes de la nouvelle Constitution fédérale de 1999, la «conservation durable des ressources naturelles» doit être l’un des objectifs de la politique gouvernementale (art. 2.4). Cette disposition «ancre formellement le principe du développement durable» dans la législation suisse (Flückiger, 2001). Au niveau cantonal, un exemple intéressant d’initiative en matière de développement durable est fourni par le canton de Valais: une Fondation pour le développement durable des régions de montagne y a été créée en 1999 afin notamment de «favoriser toutes les activités allant dans le sens du développement durable des régions de montagne» (article 3 de ses statuts).

6.6. Conclusion

Plusieurs textes, fédéraux et cantonaux, forment la substance de la législation suisse relative à la montagne. Ces textes convergent tous vers un objectif commun: assurer un développement adéquat des régions montagneuses. Les traits particuliers de ces régions et les conditions de vie relativement précaires qui les caractérisent expliquent la place centrale qu’occupent les incitations économiques et sociales dans la législation de la montagne. Les moyens mis en œuvre pour favoriser le développement des zones de montagne sont principalement de nature pécuniaire: aides au financement des investissements (en particulier sous la forme de prêts), contributions directes en faveur de l’agriculture, allocations familiales avantageuses, aides à l’amélioration du logement, etc. En revanche, en dépit de la richesse environnementale des montagnes suisses, leur sauvegarde du point de vue écologique n’est évoquée que de manière incidente par les lois régissant les zones montagneuses. Les mesures de protection de l’environnement montagnard sont donc à rechercher moins dans la législation propre à la montagne que dans les textes relatifs à la conservation du milieu naturel.

Bibliographie

Législation

Lois fédérales

Lois cantonales

Berne

· Décret du 10 novembre 1980 sur l’amélioration de l’habitat dans les régions de montagne

· Loi du 16 juin 1997 portant introduction de la loi fédérale sur l’aide aux investissements dans les régions de montagne (Textes accessibles sur: www.be.ch)

Fribourg

· Arrêté du 28 décembre 1954 relatif à la participation des communes au financement des allocations familiales aux travailleurs agricoles et aux paysans de montagne

· Arrêté du 8 septembre 1964 concernant les conditions et le taux de subventionnement de l’acquisition individuelle de machines agricoles en région de montagne

· Loi du 27 novembre 1998 d’application de la loi fédérale sur l’aide aux investissements dans les régions de montagne (Textes accessibles sur: www.fr.ch/etat)

Neuchâtel

· Loi du 1er février 1999 d’introduction de la loi fédérale sur l’aide aux investissements dans les régions de montagne

· Arrêté du 5 juillet 1999 relatif à la compétence en matière d’octroi des aides aux investissements dans les régions de montagne (Textes accessibles sur: www.ne.ch/neat/site)

Vaud

· Arrêté du 17 octobre 1990 relatif à l’encouragement de la production animale en montagne

· Loi du 13 novembre 1995 relative à la promotion de l’économie agricole vaudoise

· Règlement du 13 janvier 1998 pour l’encouragement aux cultures accessoires, à la promotion des produits de la montagne et aux métiers domestiques (Textes accessibles sur: www.vd.ch)

Documents

Sites


[1] Exposé des motifs du projet de loi relative au développement des régions de montagne.
[2] Selon une communication personnelle datée du 22 octobre 2001 de M. Svetoslav Apostolov (point focal de la Bulgarie pour l’Année internationale de la montagne, Service national de la protection de la nature, Ministère de l’eau et de l’environnement), certaines modifications ont été apportées au projet de loi après 1993, mais il n’en est pas tenu compte ici faute d’avoir pu en prendre connaissance.
[3] Site des Nations Unies sur le développement durable: Profil de la Bulgarie (1997) (www.un.org/esa/agenda21/natlinfo/countr/bulgaria/natur.htm).
[4] Décret 77-1281 du 22 novembre 1977 - Directive d’aménagement national relative à la protection et à l’aménagement de la montagne.
[5] Initialement, le chapitre concernant le développement des activités agricoles, pastorales et forestières de la loi 85-30 avait modifié différents textes tels que la loi d’orientation agricole 60-808, le code rural, la loi 72-12 sur la mise en valeur pastorale dans les régions d’économie montagnarde et le code forestier. Les dispositions de ce chapitre ont ensuite été, pour la plupart, intégrées dans les textes en question par consolidation. C’est donc à ces derniers textes qu’il est fait ici référence.
[6] Selon un membre influent de l’Union, M. Gigineishvili, une telle convention pourrait jouer un rôle déterminant dans le développement des chaîne montagneuses du Caucase en favorisant la coopération transfrontalière entre les régions concernées en matière juridique, économique et écologique (The Caucasian Convention: Contours and Prospects, www.itic.org.ge/geomountain/sympose.htm).
[7] Centre pour le tourisme durable, Tbilissi (www.mtnforum.org/emaildiscuss/discuss98/mar98/031798b.htm).
[8] Décision du Cabinet ministériel du 7 décembre 1998 (www.mtnforum.org/emaildiscuss/discuss98/mar98/031798b.htm).
[9] Site des Nations Unies sur le développement durable: Natural Resource Aspects of Sustainable Development in Italy (1997) (www.un.org/esa/agenda21/natlinfo/countr/italy/natur.htm).
[10] Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage, Division des affaires internationales, La Convention Alpine et la Suisse (www.buwal.ch/inter/f/faalpen.htm).
[11] Aux termes de loi fédérale sur l’agriculture, l’Office fédéral de l’agriculture est chargé «de subdiviser en zones la surface utilisée à des fins agricoles et d’établir un cadastre de production à cette fin», pendant que le Conseil fédéral est compétent pour fixer les critères de démarcation de ces zones (art. 4.3).
[12] Article 2 de l’ordonnance 912.1, complété par des informations obtenues de l’Office fédéral de l’agriculture (communication personnelle).
[13] Les cantons sont en effet responsables pour moitié du non-remboursement des prêts accordés (loi 901.1, art. 12).
[14] D’après le site de l’Aide suisse aux montagnards (www.berghilfe.ch/f/unit2/fwas.html).
[15] Règlement du 13 janvier 1988 pour l’encouragement aux cultures accessoires, à la promotion des produits de la montagne et aux métiers domestiques.
[16] Arrêté du 17 octobre 1990 relatif à l’encouragement de la production animale en montagne.
[17] Loi fédérale sur les allocations familiales dans l’agriculture du 20 juin 1952 (art. 1), examinée ci-dessous.
[18] Loi du canton de Berne du 16 juin 1997 portant introduction de la loi fédérale sur l’aide aux investissements dans les régions de montagne (art. 1).
[19] Loi du canton de Fribourg du 27 novembre 1998 d’application de la loi fédérale sur l’aide aux investissements dans les régions de montagne (art. 6).
[20] Loi du canton de Neuchâtel du 1er février 1999 d’introduction de la loi fédérale sur l’aide aux investissements dans les régions de montagne (art. 6).

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