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Cas particulier

La vulnérabilité des environnements montagnards et de leurs populations

Sur les quelques 5 milliards de personnes qui peuplent le monde en développement et la CEI, près de 13 pour cent vivent dans des régions montagneuses, souvent isolées et au milieu écologique fragile. La surpopulation a intensifié les pressions exercées sur les ressources, entraînant des migrations vers les villes et les régions basses et l'érosion des modes de vie traditionnels, tout en accentuant l'insécurité alimentaire de ceux restés sur place.

Une étude multidisciplinaire de la FAO, entreprise à titre de contribution à l'Année internationale de la montagne, s'est appuyée sur des données géoréférencées récentes pour fournir des informations et des cartes détaillées sur le nombre, l'emplacement, les modes de vie et la vulnérabilité des habitants des montagnes.

Environnements montagnards

Le Centre mondial de surveillance de la conservation (PNUE/SNSC) a défini six catégories de montagnes, couvrant près de 22 pour cent de la surface terrestre. Les régions situées à une altitude d'au moins de 2 500 m sont toujours classées comme montagnes. Entre 300 et de 2 500 m, on parle de régions montagneuses en présence de pentes raides ou d'une gamme importante d'altitudes locales (LER) sur une superficie restreinte, ou les deux. De nombreux plateaux et vallées situés en dessous de 2 500 m et ne présentant pas de pente suffisante ou de gamme d'éminences locales ne sont pas classés comme des montagnes.

Etant donné que la température décroît à mesure qu'augmente l'altitude, les régions montagneuses présentent une grande variété de conditions climatiques et végétatives. En outre, les écosystèmes montagneux varient en fonction de la nature du terrain, du degré d'exposition au soleil et au vent, et de la latitude à laquelle ils sont situés dans des régions tempérées, subtropicales ou tropicales. En dépit de leur riche diversité biologique, les écosystèmes montagneux sont généralement fragiles. A des altitudes élevées, ils sont souvent battus par des vents violents et par des pluies torrentielles, tandis que d'autres ne reçoivent virtuellement aucune précipitation. Mais il est d'autres risques pour ces systèmes, tels que l'exposition aux radiations solaires intenses et les catastrophes naturelles comme les avalanches, les glissements de terrain, les tremblements de terre et les crues soudaines. Les températures étant souvent plus faibles dans les régions montagneuses, la formation du sol et le processus végétatif y sont ralentis, tandis que les pentes facilitent l'érosion. Les environnements montagneux se caractérisent par une mauvaise qualité du sol.

Zones montagneuses par région


L'habitat des populations montagnardes

La FAO a estimé, en 2000, le nombre total des populations montagnardes de la planète à 718 millions, dont 625 millions vivent dans les pays en développement et dans la CEI. Soixante pour cent de la superficie montagneuse de ces pays se trouvent situés à des altitudes inférieures à 1 500 m, et 70 pour cent des populations montagnardes y sont installées. En revanche, seuls 15 pour cent de la surface montagneuse sont situés au-dessus de 3 500 m, et 2,5 pour cent de la population se trouvent sur ces hauteurs. Bien que l'urbanisation et la croissance des villes de montagne sont importantes dans certaines régions, plus des trois quarts des populations montagnardes des pays en développement et de la CEI sont encore rurales et tirent leurs moyens d'existence d'une combinaison d'agriculture, de foresterie, d'activités pastorales, de chasse de pêche et de collecte de plantes sauvages. Les produits, particulièrement adaptés au développement commercial des écosystèmes montagneux, sont les céréales indigènes, l'arboriculture - théiers et pommiers, par exemple -, les herbes médicinales et les autres produits de la forêt, ainsi que le poisson d'eau douce.

La FAO estime qu'environ 40 pour cent des zones montagneuses dans les pays en développement et dans la CEI produisent moins de 100 kg de céréales par personne et par an, tandis que 30 pour cent sont occupés par des forêts fermées ou des réserves naturelles. Les populations rurales vivant dans ces régions ont du mal à tirer de l'agriculture des moyens d'existence et un mode de vie adéquats. La FAO s'est employée, au moyen d'estimations associées à d'autres informations qualitatives, à faire une estimation préliminaire du nombre de montagnards vulnérables à l'insécurité alimentaire.

Populations montagnardes par sous-région, 2000


La vulnérabilité des populations montagnardes

Sur la base des informations actuellement disponibles, la FAO estime que plus de la moitié des habitants des montagnes dans les pays en développement et dans les pays de la CEI (250 à 370 millions de personnes) souffrent de la faim ou en sont menacés. (Cette estimation relative à la vulnérabilité ne doit pas être confondue avec les estimations de la FAO sur les populations sous-alimentées. De manière générale, environ la moitié des personnes jugées vulnérables sont en fait sous-alimentées.)

Comme nous l'avons déjà signalé, les environnements montagnards diffèrent de façon marquée en fonction de l'altitude, de la latitude et du terrain. Ces différences influent tant sur les moyens d'existence que sur la vulnérabilité des populations. De nombreux autres facteurs jouent également un rôle important parmi lesquels on citera l'isolement de certaines zones, la difficulté d'accès, le degré d'intégration à la société nationale et de rattachement à l'économie du pays, et enfin les performances économiques générales.

Dans les régions montagneuses, les traditions culturelles sont souvent solides et tenaces. La diversité insuffisante des cultures et l'accès limité aux informations et aux connaissances récentes en matière de régime alimentaire et de pratiques favorisant la bonne santé exposent les populations montagnardes à des taux élevés de malnutrition et de maladie. Les attitudes et les croyances traditionnelles risquent, en outre, de conduire ces populations à perpétuer des pratiques d'utilisation des terres qui ne conviennent plus à l'évolution des environnements montagneux.

Dans de nombreux endroits, les stratégies traditionnelles de survie n'offrent plus de solutions durables en raison de la pression démographique croissante, du déboisement rapide, de l'érosion et de la dégradation des sols. Dans de telles conditions, on voit fréquemment se développer des conflits axés sur le contrôle de ressources plus en plus rares.

Les villes des montagnes, bien qu'offrant des perspectives économiques, apportent avec elles la pollution, le besoin croissant d'argent et l'affaiblissement des institutions indigènes locales.

Populations montagnardes vulnérables, par région, 2000


Ressources et perspectives des populations montagnardes vulnérables

L'eau - L'eau est une importante ressource naturelle que l'on trouve à des altitudes élevées et qui provient principalement des sources montagneuses et de la neige fondue. Le captage de cette précieuse ressource est un problème important pour les populations montagnardes, car une bonne partie de la demande provient de populations installées dans les basses terres environnantes. L'utilisation de l'eau provenant des montagnes pour générer de l'électricité, mais aussi pour l'irrigation ou pour la vente d'eau minérale embouteillée, de même que pour les usages industriels, est un phénomène commun. Cependant, on voit apparaître de plus en plus fréquemment des conflits axés sur les droits d'exploitation de l'eau entre les utilisateurs en aval et les populations montagnardes vivant à proximité des sources; or, les politiques publiques ne réussissent pas à traiter efficacement ce problème.

Agriculture - Bien que l'eau abonde en montagne, les sols risquent d'être arides lorsque les pluies sont insuffisantes. Dans de nombreuses régions, les agriculteurs montagnards ont élaboré des techniques sophistiquées de gestion de l'eau et d'irrigation à petite échelle. Lorsque la qualité des sols a été préservée ou lorsque l'on veut la reconstituer dans des conditions économiques, l'agriculture montagnarde demeure une option viable. L'élevage et l'aquaculture de montagne offrent également des perspectives de diversification du revenu, tout en contribuant à l'obtention de produits riches en protéines de haute qualité destinés aux chaînes alimentaires montagnardes.

Conservation et tourisme - La beauté naturelle et la biodiversité dont sont dotés de nombreux environnements montagneux offrent de bonnes possibilités de développement de l'écotourisme et de l'ethnotourisme, outre des perspectives d'emploi pour le personnel chargé de la protection des zones désignées. Il conviendra, afin de réaliser ces possibilités, d'investir dans l'infrastructure et dans les programmes de formation destinés à sous-tendre le secteur touristique.

Foresterie et pâturages - De nombreuses montagnes offrent un potentiel élevé de mise en valeur de la foresterie. Cependant, l'exploitation de ce potentiel a été entravée par le besoin prioritaire, pour les populations montagnardes, d'utiliser les arbres comme source d'argent frais, sous forme de vente de bois de feu et de bois d'oeuvre, ou encore pour dégager des pâturages. Pour que de telles initiatives réussissent, il est nécessaire d'introduire des pratiques de gestion forestière qui permettent aux populations de maintenir leurs revenus sans devoir abattre les arbres à un taux de non-renouvellement.

L'industrie montagnarde - La croissance spontanée de centres urbains à laquelle on assiste dans certaines régions montagnardes pourrait être encouragée dans d'autres régions, car ils offrent toute une gamme d'emplois virtuels pour les populations montagnardes et peuvent contribuer à maintenir l'équilibre entre ces populations et la capacité offerte par la base de ressources naturelles. En investissant dans le développement d'infrastructures de transport et d'industries susceptibles d'ajouter de la valeur aux ressources locales et de réduire le volume des produits avant qu'ils ne soient expédiés vers les marchés situés en dehors de zones montagneuses, on pourra favoriser un processus d'urbanisation harmonieux des régions montagneuses.


Vulnérabilité et durabilité des systèmes d'existence des montagnes

L'étude de la FAO est centrée sur 18 chaînes montagneuses où habitent près de 90 pour cent des populations de montagnards des pays en développement et de la CEI. Cette analyse prend en considération un certain nombre de facteurs qui déterminent la vulnérabilité et la durabilité des moyens d'existence des montagnards. Ces facteurs comprennent l'altitude, la densité démographique, le degré d'urbanisation, les modes d'utilisation des terres, la productivité agricole et les traditions culturelles.

Les cartes présentées à l'appui de cet article décrivent les régions montagneuses par catégorie de montagne, densité de population, caractéristiques du couvert végétal et production céréalière d'agriculture pluviale par habitant. Les textes réunis font le point des sources de vulnérabilité spécifiques à chacune des chaînes de montagnes, tout en mettant en relief les mesures pouvant contribuer à réduire cette vulnérabilité.

Amérique latine - Les Andes et la Sierra Madre

Clés de lecture des cartes

De manière générale, les 112 millions de montagnards qui peuplent les régions élevées d'Amérique latine et des Caraïbes sont les plus urbanisés et les moins vulnérables du monde en développement. La proximité de villes de montagne dynamiques au plan économique leur offre, en effet, davantage d'options créatrices de revenus qu'à la plupart des montagnards de la région. Cependant, certaines poches de population situées à des altitudes élevées dans la Cordillère des Andes demeurent isolées et extrêmement vulnérables. En outre, les montagnards ruraux d'Amérique centrale et du Mexique sont, eux aussi, très exposés. Rappelons que les terres agricoles ont été distribuées de façon très inégale, condamnant de nombreux agriculteurs montagnards à exploiter des parcelles minuscules et les obligeant à vendre leur force de travail pour survivre.


Dans les Andes septentrionales, les deux tiers des populations montagnardes vivent dans des grandes villes ou à leur périphérie. La plupart des montagnards ruraux pratiquent, à des altitudes modérées, l'agriculture intensive à orientation commerciale. Sur les pentes inférieures et dans les vallées, les agriculteurs sont nombreux à pratiquer la caféiculture et l'horticulture en vue de la vente locale ou de l'exportation. Dans les vallées plus élevées, ce sont les cultures tempérées, le maïs et l'élevage du porc qui prédominent. La vulnérabilité à l'insécurité alimentaire est relativement faible.

L'urbanisation est également assez poussée dans les Andes supérieures. Près de la moitié de la population vit dans les agglomérations ou à proximité, ou encore sur des flancs montagneux peu élevés où l'accès aux emplois et aux marchés aide à atténuer la vulnérabilité. Cependant, l'autre moitié se compose de ménages agricoles indigènes extrêmement pauvres, qui cultivent des céréales traditionnelles (quinoa) et des pommes de terre, tout en élevant des moutons et des lamas dans les vallées encaissées, ou encore sur de vastes plateaux déboisés situés au-dessus de 3 500 m. L'isolement, la pression démographique et l'érosion des sols ont gravement miné leurs systèmes d'existence traditionnels, et la vulnérabilité y est très élevée. Des marchés spécialisés existent pour la laine de lama et d'alpaga, les produits du tissage, le quinoa et les variétés sélectionnées de pommes de terre. Cependant, les populations de ces montagnes manquent des informations et des qualifications leur permettant d'y participer de façon efficace.

Dans la Sierra Madre d'Amérique centrale et du Mexique, plus de 40 pour cent des montagnards sont urbanisés et, selon des enquêtes récentes, relativement épargnés par la vulnérabilité. Cependant, la majeure partie des populations montagnardes rurales n'a pas cette chance. Les agriculteurs cultivent le maïs et les haricots, se livrant à des migrations saisonnières pour travailler comme manoeuvres dans les grandes exploitations de café et de sucre, mais les salaires sont maigres et la demande de travailleurs est en déclin. Pour subsister, nombreuses sont les familles qui doivent envoyer certains de leurs membres dans les villes ou dans les pays voisins pour y trouver du travail et faire parvenir de l'argent. En outre, des familles entières migrent vers de nouvelles régions ou défrichent des forêts pour en cultiver la terre. Dans l'ensemble, l'incidence de la vulnérabilité est assez élevée dans cette région.

Les montagnards d'Amérique latine doivent affronter une multitude de difficultés liées à l'accès à la terre et aux pratiques non viables de son utilisation, à la mauvaise intégration des populations indigènes aux sociétés et aux économies nationales et au manque de qualifications techniques.

Dans certains pays, des réformes agraires ont été introduites, mais elles ne contribueront de façon durable à réduire la pauvreté et la faim que si elles sont conjuguées à une amélioration de la vulgarisation agricole et des services de commercialisation destinés aux petits agriculteurs montagnards. En outre, il convient de mieux reconnaître, tout en l'appuyant, la contribution que peuvent apporter les cultures indigènes à la mise en valeur durable du milieu montagnard. Parallèlement, un soutien sera nécessaire aux nouveaux migrants dans les centres urbains de montagne.

Amérique latine - Les Andes et la Sierra Madre


Afrique orientale et australe: Vallée du Rift

Un peu plus de 90 pour cent des 88 millions de montagnards d'Afrique subsaharienne vivent dans les chaînes montagneuses d'Afrique de l'Est, à des altitudes qui dépassent rarement 2 500 m. Bien que ces reliefs comprennent certaines des régions de montagne les plus densément peuplées, moins de 15 pour cent de la population vit dans les centres urbains et l'incidence de la vulnérabilité est élevée.

Près de la moitié de la population montagnarde vit dans les régions à forte densité de population des hautes terres d'Ethiopie. Dans cette région, fréquemment ravagée par la sécheresse, le système agricole traditionnel, basé sur les céréales locales et l'élevage des moutons et des chèvres, ne peut subvenir véritablement aux besoins de la population actuelle ou projetée. Le nombre de paysans sans terre va croissant et leur futur est très sombre. La vulnérabilité à l'insécurité alimentaire est élevée, et la survie à long terme reste tributaire d'une action communautaire pour renforcer les activités non agricoles et l'infrastructure locale.

La densité démographique est également très élevée dans les montagnes du Burundi, du Rwanda et de la République démocratique du Congo oriental. Le déboisement et l'érosion des sols sont très répandus et les conflits entre agriculteurs et éleveurs nomades prennent parfois une grande acuité. Même si la vulnérabilité est très élevée, le fait que près d'un tiers de la population montagnarde habite dans des centres urbains offre des possibilités en matière de moyens d'existence. A condition d'être appuyée par des efforts vigoureux d'amélioration de l'infrastructure et des services de vulgarisation, la recherche d'une gestion plus durable des terres agricoles et des pâturages à accès libre, associée à la bonification des terres marécageuses, pourrait améliorer de façon significative la sécurité alimentaire.

Du Kenya au Zimbabwe, les populations montagnardes et non montagnardes ont un système commun d'exploitation agricole basé sur la culture du maïs, du tabac, du coton et des graines oléagineuses pour la vente au comptant. Cependant, la productivité s'est dégradée depuis que l'application des ajustements structurels a mis fin aux subventions applicables aux engrais. Les sécheresses, les maladies du bétail, la rareté des produits vivriers sauvages et la propagation du VIH/SIDA ont encore déstabilisé ces systèmes agricoles. Bien que l'incidence de la vulnérabilité soit actuellement élevée, les perspectives de développement durable sont bonnes, à condition que soient effectués les investissements nécessaires pour améliorer la gestion des ressources en terre et en eau et que soient mis en place des services de vulgarisation rurale participative.

Afrique orientale et australe: Vallée du Rift


Proche-Orient et Afrique du Nord: Atlas, Zagros et Caucase

La population montagnarde du Proche-Orient et de l'Afrique du Nord comptant 60 millions de personnes est la plus réduite de tout le monde en développement, et plus de la moitié vit dans les centres urbains. Cependant, la combinaison d'activités agricoles et pastorales pratiquées par les montagnards ruraux, du Maroc à l'Iran se heurte à des difficultés croissantes, et la vulnérabilité à l'insécurité alimentaire est très élevée.

La plupart des montagnards ruraux de la région sèment des céréales et du fourrage à l'automne. Ces cultures - principalement du blé, de l'orge et des légumes de culture pluviale - restent en dormance pendant les longs mois d'hiver rigoureux, avant d'achever leur croissance au printemps. Les cultures arboricoles, les fruits, les olives et la vigne poussent en terrasse. L'élevage des chèvres et des moutons est très répandu dans l'ensemble de la région, souvent sur des terres à gestion communale.

La détérioration de l'environnement est largement répandue, avec pour cause principale le mauvais entretien des terrasses et le surpâturage. Il s'ensuit un déclin de la productivité, qui, conjugué aux longues distances à parcourir jusqu'aux marchés, à la concurrence accrue livrée par les importations subventionnées de denrées alimentaires et à l'incidence croissante de la sécheresse, a aggravé et propagé la pauvreté et l'insécurité alimentaire. Les hommes sont nombreux à quitter les régions montagneuses pour aller chercher du travail ailleurs, et l'on peut donc prévoir qu'une forte proportion de ménages abandonneront l'agriculture.

Pour ceux qui demeurent, de nombreuses mesures pourraient entraîner des gains importants en matière de durabilité et de sécurité alimentaire. Il conviendra d'améliorer la planification et la gestion des bassins versants afin de protéger les niveaux actuels de productivité et les consommateurs d'eau ruraux et urbains situés en aval. L'introduction du travail de conservation du sol et la meilleure intégration des systèmes de production des cultures et du bétail pourraient également renforcer la productivité comme la durabilité. Par ailleurs, une réglementation et un contrôle plus équitables des ressources communes en pâturages - souvent classées comme terres domaniales - atténueraient les dégâts à l'environnement et l'insécurité alimentaire. Il convient également d'agir pour favoriser le remembrement des terres, renforcer les liens entre les activités agricoles et celles extérieures à la ferme, et promouvoir l'emploi local hors la ferme.

Proche-Orient: Zagros et Caucase


Asie méridionale et centrale: Hindu- Kush, Pamir, Himalaya, plateau tibétain et montagnes Kunlun

Le paysage de l'Afghanistan, du Pakistan, du nord de l'Inde, du Népal, du Bhoutan, du nord-ouest de la Chine et des républiques d'Asie centrale est dominé par le relief montagneux. Bien que cette région comprenne certains des pics les plus élevés et certains des pays les plus peuplés de notre planète, la population montagnarde du sud et du centre de l'Asie n'est pas beaucoup plus importante que celle du Rift d'Afrique orientale. Près de 90 pour cent des populations montagnardes habitent les chaînes élevées du nord. Rurales dans leur grande majorité, elles vivent à des altitudes inférieures à 3 500 m, pratiquant différentes combinaisons d'agriculture vivrière et d'élevage pastoral. L'incidence de la vulnérabilité, très élevée, y est encore exacerbée, comme ailleurs, par l'augmentation de la pression démographique et l'accentuation de la dégradation environnementale.

Le déboisement constitue une menace majeure pour la région. A mesure qu'augmente la population, les forêts subsistantes sont abattues à une cadence soutenue, afin de mettre en exploitation de nouvelles terres agricoles. Il s'ensuit une érosion et un assèchement des sols, ce qui réduit la productivité et oblige les femmes à parcourir des distances toujours plus grandes pour se procurer du bois de feu et de l'eau.

Les cultures traditionnelles, fortement ancrées, imposent souvent des pratiques locales qui régissent l'utilisation de la terre, de l'eau et des ressources forestières. Cependant, avec l'exode migratoire d'une bonne partie des hommes, la cohésion sociale s'effrite dans certaines régions, rendant plus difficile la résolution des différends portant sur la propriété foncière et l'utilisation des ressources communes. Par ailleurs, le rôle des femmes en tant qu'exploitants agricoles et leaders au sein du corps social gagne en importance. Si l'on veut surmonter ces problèmes environnementaux, économiques et sociaux, il faudra, de façon impérative, améliorer l'accès des femmes à la formation et aux ressources.

Bien que l'altitude plus élevée entraîne une érosion accentuée, la densité démographique est inférieure et les habitants des montagnes ont une gamme plus large de possibilités en matière de moyens d'existence. Ainsi, de nombreuses familles rurales font paître leurs troupeaux sur des pentes plus élevés et complètent leur revenu agricole grâce au commerce transfrontalier, au tourisme et aux excursions en montagne. Cependant, l'incidence de la vulnérabilité demeure très élevée.

Le système pastoral prédomine dans les régions montagneuses d'Asie centrale, de même que dans les plateaux élevés non montagneux. Les moutons et le bétail paissent dans des pâturages libres situés en haute montagne ou dans des zones sèches adjacentes, tandis que l'on cultive les céréales, le fourrage et les pommes de terre à des fins de subsistance dans les vallées montagneuses. Les principales sources de revenus sont la viande et la laine. Cependant, la population animale en excédent et les mauvaises techniques de pâturage ont entraîné une grave érosion ainsi qu'une dégradation des pâturages libres. La production de laine a chuté et la vulnérabilité à l'insécurité alimentaire est aujourd'hui très élevée. Il est essentiel, si l'on veut améliorer ces conditions, de rétablir la gestion durable des terres pastorales.

Asie méridionale et centrale:
Hindu- Kush, Pamir, Himalaya, plateau tibétain et montagnes Kunlun


Asie du Sud et du Sud-Est: Ningling Shan et Truong Son

Les montagnes de l'est et du sud-est de l'Asie, bien qu'étant loin d'atteindre la hauteur et la renommée de l'Himalaya et de l'Hindu- Kush, sont vastes et beaucoup plus densément peuplées. Près de la moitié de la population montagnarde des pays en développement et de la CEI vit dans les montagnes du sud de la Chine, la péninsule indochinoise et les grandes îles du Pacifique. Ces régions montagneuses sont, pour la plupart, à la fois densément peuplées et à large prédominance rurale, avec une très faible population urbaine. Il s'ensuit que les parcelles y sont extrêmement réduites, la production agricole par habitant faible, et que les agriculteurs se déplacent de plus en plus vers des terres plus marginales afin de survivre. En outre, le nombre de personnes vivant dans les forêts et dans les zones protégées est relativement important. La vulnérabilité à l'insécurité alimentaire est très élevée et affecte probablement entre 170 et de 220 millions de personnes.

L'intensité de la production vivrière et agricole en général est extrêmement variable. Dans le sud de la Chine, les agriculteurs montagnards ont élaboré des techniques très perfectionnées de construction de terrasses et de gestion de l'eau. Ils font un usage efficace des déchets de culture ou animaux pour préserver la qualité des sols. Ailleurs, les technologies de production intensive sont moins élaborées, la productivité est plus faible et la vulnérabilité des populations rurales montagnardes est plus généralisée.

Dans la région, on trouve deux systèmes d'exploitation agricole distincts. Aux altitudes modérées et sur les pentes douces, les agriculteurs font pousser une vaste gamme de cultures, avec le riz comme denrée de base dans le sud et le blé dans le nord. Le bétail est utilisé pour le trait, pour sa viande et comme élément de patrimoine. Les porcs et la volaille sont une source importante de revenus en espèces. Un tel système peut atteindre une forte productivité, comme le démontrent les agriculteurs montagnards du sud de la Chine, dont les activités agricoles intensives bénéficient également des bonnes liaisons avec les marchés, où ils peuvent se procurer des intrants et écouler leurs produits. Dans d'autres endroits, l'agriculture de semi-subsistance avec des ventes limites est pratique commune. Ces régions ont également un fort potentiel productif, à condition de recevoir les investissements nécessaires en infrastructure et de bénéficier de la vulgarisation participative. Sur les pentes plus élevées des régions tropicales, des groupes tribaux mettent en culture des surfaces étendues, employant les méthodes de l'agriculture sédentaire comme de l'agriculture itinérante. Ces groupes complètent leur production en faisant paître du bétail et des buffles dans les forêts et en recueillant des produits forestiers à usage domestique. La mauvaise qualité des sols, le faible emploi d'intrants et l'éloignement des marchés entravent le progrès, si bien que la pauvreté et l'insécurité alimentaire sont largement répandues. L'amélioration de la gestion des forêts et l'agroforesterie offrent les meilleures perspectives d'amélioration de ces conditions.

Asie du Sud et du Sud-Est: Ningling Shan et Truong Son



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