L'objet de l'étude approfondie et sa prospective est d'analyser comment améliorer la disponibilité des données pour les espèces sélectionnées.
L'étude est concentrée sur l'aspect méthodologique dans le but de collecter et d'analyser les informations quantitatives disponibles sur la production, la consommation, la commercialisation des PFNL à Madagascar, ainsi que les informations qualitatives tels que les aspects socio-économiques et bio-écologiques (cf. termes de référence, annexe 8.1).
Pour mieux concrétiser la méthodologie de collecte à adopter, deux espèces végétales (Catharanthus roseus, Prunus africana) et une espèce animale (Mantella aurantiaca) ont été choisis du fait des critères suivants :
· leur importance à l'exportation ;
· leur classification parmi les espèces qui ne sembleraient pas gravement menacées sauf Prunus africana ;
· la disponibilité des données sur ces trois espèces.
Comme il a été mentionné dans l'étude générale, dans l'optique d'une gestion durable de ces PFNL, il y a lieu de définir les PFNL de caractère prioritaire afin de pouvoir suivre l'évolution du potentiel disponible. Il faut donc identifier les espèces prioritaires basées sur les critères suivantes :
• Valeur scientifique :
· endémicité ;
· disponibilité de stock dans
la nature ;
· dynamique de la population de l'espèce ;
· rôle
écologique (fixation du sol, ...) ;
· rôle thérapeutique (usage médicinal).
• Valeur économique :
· importance de l'exploitation sur le plan local,
régional et national ;
· importance du marché sur le plan local, régional et national (exportation).
• Utilisation :
· finalité de l'exploitation pour chaque acteur de la
filière allant de l'autoconsommation jusqu'aux transformations
industrielles ;
· définition du niveau d'utilisation et de la destination de la production.
• Statut :
· en abondance ;
· menacé ;
·
vulnérabilité ;
· rareté.
• Capacité de régénération :
· régénération naturelle (graines, sauvageons,
...) ;
· possibilité de régénération artificielle.
• Répartition géographique :
· densité ;
· aire de distribution ;
·
écologie ;
· accessibilité aux ressources.
La priorisation des PFNL doit donc tenir compte de ces critères.
L'objectif général de la méthodologie est d'assurer une gestion durable et pérenne des PFNL à partir de l'exploitation des données statistiques. Concernant les objectifs spécifiques de la méthodologie il s'agit de :
· connaître la biomasse disponible sur le terrain, suivre l'évolution de cette biomasse et identifier les facteurs influençant positivement ou négativement cette biomasse;
· mettre à la disposition des utilisateurs des PFNL une méthodologie adaptée. Ces utilisateurs peuvent être les opérateurs et les communautés de base ;
· mettre au service des autorités par le biais du centre de suivi une méthodologie dont les données collectées permettent de donner des directives de l'utilisation des PFNL (données non biaisées).
La méthodologie présentée couvre plusieurs aspects :
· aspect scientifique : Il s'agit avant tout de mener des études éco-biologiques afin de connaître le statut écologique que l'habitat, le potentiel (biomasse), la dynamique de la population, les facteurs influençant la population (facteurs positifs ou négatifs).
· aspect socio-économique : Les enquêtes seront essentiellement menées auprès des acteurs de la filière (famille individuelle, communauté, opérateurs économiques, Etat). Les types de données à collecter vont se rapporter à:
• la valeur économique du PFNL ;
• sa consommation ;
• sa commercialisation ;
• sa contribution au revenu ;
• la tendance récente de l'utilisation.
· aspect technique : Il s'agit de voir le mode de prélèvement de la ressource (arrachage de la plante, utilisation partielle) et de connaître la production (pourcentage collecte sauvage/cultivée).
· aspect statistique : Signalons l'importance capitale de cet aspect car les directives à prendre sur l'utilisation des PFNL résultent de l'analyse des données statistiques.
Pour ce faire, l'appui de l'INSTAT est vivement sollicité.
La méthodologie que l'on se propose de présenter semble classique. Elle a son importance de par le partage de responsabilités à chaque niveau d'acteurs concernés mais aussi et surtout de par la mise en place d'un dispositif de contrôle et suivi pratique dès la phase de collecte.
Ainsi la collecte des données se divise en quatre grandes phases :
· la phase préparatoire ;
· la phase de collecte de données proprement dite ;
· la phase d'exploitation et l'analyse des données ;
· la phase de stockage et diffusion des données.
Figure 1. Les quatre phases de la méthodologie proposée
Cette phase consiste surtout en la constitution de données brutes et d'informations utiles et fiables existantes.
Pour chaque PFNL qui fera l'objet de l'étude, cette phase est très importante dans la mesure où elle permettra de faire l'inventaire des données existantes qui proviennent de plusieurs sources à savoir :
· l'étude bibliographique ;
· les rapports d'activités parvenus au service central émanant des services déconcentrés de la base au sommet (TEF/CEF/CIREF/DIREF) ;
· les enquêtes (interview, descente sur terrain) ;
· les fournisseurs externes (projets, ONG, sociétés, ...) ;
· la consultation des cartes existantes.
Cette phase d'analyse et synthèse des données recueillies n'est pas aussi à négliger car par ses résultats, le gestionnaire des ressources pourra avoir, comme outil de travail, un tableau de bord reflétant la situation réelle des ressources.
Il s'agit :
· de capitaliser les acquis en ce qui concerne le PFNL choisi ;
· d'évaluer les données manquantes dans le but de connaître et de combler les lacunes relatives aux données qui ont été collectées depuis ;
· et enfin de sortir la situation à jour des informations utiles aux utilisateurs après avoir traité les données recueillies à l'état brut.
Deux types de données sont à collecter :
· les données quantitatives ;
· les données qualitatives.
Les données quantitatives sont celles ayant principalement trait :
· à la production ;
· à la consommation ;
· à la commercialisation.
Ces données sont à collecter d'une part, par les services forestiers régionaux et, d'autre part, par les services forestiers centraux.
Données à collecter par les Services forestiers régionaux
Production :
Pour chaque cas étudié, il s'agit avant tout de connaître la production trimestrielle, semestrielle et annuelle collectée de manière régulière à partir des services forestiers à la base sur terrain (TEF / CEF).
A cet effet :
· un système de collecte des données de base pourvu de personnel qualifié, de moyens financiers et logistiques en nombre et en quantité adéquate doit être mise en place ;
· des lignes de communication sont à établir pour relier les sources de données (TEF/CEF) et les unités de traitement et de stockage (CIREF/DIREF).
La collecte des données se fait à l'aide d'une fiche-type annexe 8.4.
Cette fiche servira de cadre standard à utiliser à l'échelon national afin d'uniformiser et de structurer les données recueillies. Ce qui facilite la saisie à l'ordinateur.
L'utilisation de cette fiche nous permettra d'obtenir des données pertinentes relatives au PFNL concerné :
· localisation de la production (collecte) ;
· référence des permis (convention) ;
· type de produits ;
· quantité collectée.
La circulation des informations se fera de la manière suivante :
TEF -> CEF -> CIREF -> DIREF -> BUREAUX CENTRAUX
L'analyse de ces informations au niveau central constitue un outil de gestion permettant de décider l'option à prendre quant à l'exploitation des ressources (produits de faune et flore).
La consommation
Il est à rappeler que les statistiques forestières existantes ne permettent pas d'évaluer la consommation locale.
Afin de connaître la consommation du PFNL au niveau local, il est nécessaire de faire une enquête au niveau des ménages. L'enquête a pour objectif de collecter des données permettant d'évaluer la consommation du PFNL au niveau local, régional et national. Les fiches de collecte doivent présenter le maximum d'informations.
Pour ce faire, les deux considérations suivantes sont prises en compte : d'une part, le mode d'échantillonnage pour bien asseoir les estimations qui vont en sortir, et d'autre part, les méthodes de relevés afin d'assurer le maximum d'objectivité et de réalité.
Le sondage doit s'effectuer à deux degrés :
· les ménages constituent les unités primaires ;
· les Fokontany (unité de base) constituent les unités secondaires.
La collecte des données se fait à l'aide d'une fiche type de manière à uniformiser les données recueillies (annexe 8.4). Cette fiche traditionnellement utilisée par le Service de la Statistique est à améliorer car elle est dépassée par le contexte actuel.
La commercialisation
Les données relatives aux PFNL en provenance des services décentralisés concernent l'exportation des produits non inscrits aux annexes de la Convention CITES, la délivrance de l'autorisation des produits CITES étant les prérogatives du Directeur de la Gestion Durable des Ressources Forestières à la Direction Générale des Eaux et Forêts.
Ces données seront à synthétiser trimestriellement suivant le modèle de tableau (en annexe 8.3), et à envoyer régulièrement au niveau central pour alimenter la base de données et ceci afin de connaître le volume d'exportation du PFNL concerné à l'échelon national.
Données à collecter par les services forestiers centraux
Les Services centraux du MEF concernés par la collecte des données relatives aux PFNL sont le:
· SVERF pour les plantes médicinales aromatiques, graines forestières non inscrits à la CITES ;
· SCB pour les PFNL inscrits aux annexes de la CITES et autres produits de la flore et de la faune non inscrits ;
· Service de la Statistique de la Direction de la Planification et du Suivi-Evaluation responsable de la capitalisation et de la diffusion des informations statistiques.
En fait, les données proviennent de deux sources :
Données issues des services régionaux des Eaux et Forêts
Ce sont les rapports relatifs à la production, à la consommation (si des enquêtes ont pu être réalisées c'est-à-dire ponctuel), et à la commercialisation des PFNL.
Données issues des partenaires du MEF
Ils peuvent être :
· les Services étatiques tels que l'INSTAT, le Service des Douanes,
· les divers projets et ONG travaillant sur la gestion des ressources forestières (MIRAY, WWF, CI, WCS...) ;
· les entrepreneurs, les sociétés privées, etc..
Ces aspects seront abordés en décrivant tout d'abord la systématique, le statut et la morphologie de l'espèce. Ensuite, ces différents points sont à relever :
Aspects écologiques
Il est à remarquer que l'analyse des études bio-écologiques menées jusqu'ici permet une meilleure compréhension des aspects socio-économiques concernant l'espèce étudiée
· la production ;
· la durabilité du potentiel et de l'offre ;
· l'habitat ;
· l'origine de la ressource ;
· les méthodes de récolte.
Une fois les données brutes recueillies auprès de différentes sources (institution publiques, ONG, ...) il s'agit alors de les saisir sur ordinateur et de les traiter pour en constituer des données plus élaborées.
Aspects socio-économiques
Il s'agit particulièrement de faire ressortir les points suivants :
· la valeur économique ;
· la consommation ;
· la commercialisation ;
· l'accès aux ressources et droits de propriété ;
· la contribution au revenu et à l'emploi ;
· la tendance récente de l'utilisation.
Les données d'ordre quantitatif seront gérées dans une base de données sous logiciel EXCEL/ACCESS.
Diverses informations peuvent en ressortir et vont nous permettre d'orienter notre décision quant à la gestion du PFNL concerné.
Pour un stockage rationnel et efficace, chaque entité responsable de la collecte des données (CIREF, DIREF, Services centraux responsables) doit être dotée d'ordinateur performant et mis en réseau avec les partenaires du MEF (locaux, régionaux, nationaux, internationaux).
La méthodologie de collecte des données étant établie, il s'agit alors de vérifier son efficacité à partir des études pilotes des espèces de faune et de flore choisies suivant des critères bien définis.
La collecte et l'analyse des différentes données requièrent l'utilisation de diverses méthodes relatives aux études scientifiques : Biologie, écologie et socio-économiques des PFNL.
Utilisation des différentes méthodes applicables sur terrain :
· Inventaire de la biodiversité dans un site donné par des techniques quantitatives et des mesures d'abondance en ajoutant des propositions de gestion (RAP) (Groombride et Jenkins, 1996; Healey JR et al. 1998) ;
· Etude de la distribution : localisation, répartition géographique, cartographie des données ;
· Etude de l'habitat ;
· Etude de la densité, de la biomasse et de la dynamique des populations ;
· Etude de la biologie de la reproduction et du développement (Glaw et Vences, 1994; Wilson et al. 1996) ;
· Etude de la croissance et de la productivité des plantes (Phillipps, 1996) ;
· Evaluation du potentiel disponible de PFNL, de la période favorable à la collecte ;
· Etude à long terme : Mise en place de sites de suivi permanent avec choix des indicateurs de suivi.
L'interaction de la population locale avec le milieu naturel est évaluée par l'éthnoécologie et l'éthnobotanie.
Le part de l'éthnoécologie qui concerne les animaux inclut:
· la relation entre population et animal ;
· l'inventaire qualitatif et quantitatif de l'utilisation de ces animaux ;
· les techniques d'évaluation rurale rapide et la participation rurale rapide (Hellier et al., 1999) ;
· les interviews semi-structurés (ISS) de MARP (Méthode Accélérée de Recherche Participative) (Bara et Karen, 1991).
La part de l'éthnobotanique concerne les plantes et inclut :
· relation entre population et plante ;
· inventaire éthnobotanique ;
· éthnobotanique quantitative.
Cette partie permet d'évaluer les pressions anthropiques subies par les PFNL, et de statuer sur les mesures nécessaires pour la conservation avant toute étude approfondie qui, souvent, demande une période plus ou moins longue.
· Etude du marché ;
· Etude des coût-bénéfice et valeur ;
· Evaluation du potentiel de menaces.
La mise en œuvre de la méthodologie nécessite la détermination :
· des activités à exécuter (quoi faire?) ;
· des acteurs (par qui ?) ;
· des types de données à collecter (quantitatif, qualitatif) ;
· de la structuration des données ;
· du protocole d'analyse (type de résultat, type de traitement) ;
· de la forme des résultats (rapport, étude comparative)
Afin d'assurer le fonctionnement du système et de bien gérer les données collectées, un centre de suivi est à mettre en place au sein du DEF suivant les recommandations émises dans l'étude générale.
Cependant, afin d'instaurer une meilleure fonctionnalité interne du système, la mise en réseau des différents organismes détenteurs d'informations (privés, ONG, Etats) s'avèrent indispensable.
L'idéal est de disposer d'un mécanisme de suivi et de contrôle approprié à chaque PFNL donné. Cela n'est réalisable qu'après avoir doté le service forestier d'un minimum de moyens financiers, matériel et de ressources humaines.
Trois types de suivi doivent être mis en place :
· le suivi administratif ;
· le suivi scientifique :
· le suivi technique.
· Exploitation des informations reçues (rapport trimestriel) provenant des CIREF/DIREF, rapports de mission ;
· Analyse des données élaborées au niveau central constituant ainsi un tableau de bord aux Chefs hiérarchiques et décideurs politiques ;
· Feed-back auprès des Services décentralisés pour la mise en exécution des décisions ;
· Respect des lois et des textes législatifs en vigueur relatifs aux PFNL à différents niveaux ainsi que de leur mise à jour :
• à la collecte
• à la commercialisation
Ces réglementations sont impérativement à diffuser au niveau de la base même.
· Recensement des nouvelles informations, documentations relatives à l'espèce à partir des rapports d'études.
· Etablissement d'un programme scientifique commun entre les Services forestiers (ici le Service de la Conservation de la Biodiversité et le Service de la Valorisation Economique) et des institutions scientifiques spécialisées dans le but de fournir des informations nouvelles, mises à jour, répondant aux exigences des normes :
• de conservation
• d'exploitation rationnelle, e.g. données sur le statut écologique toutes les espèces exploitées et exploitables
· Recueil de données scientifiques dans les programmes de production
· Inventaire et évaluation précises des potentiels malgaches en PFNL et sortie des résultats de recherche pour ceux qui sont à exploiter
· Elaboration de guides techniques sur les PFNL :
• à exploiter ;
• à développer ;
• à arrêter.
· Vérification sur terrain de la conduite ou des conditions exigées dans l'autorisation ou convention de collecte ou permis : Respect du cahier des charges ;
· Contrôle des produits récoltés (quantité / qualité) ;
· Encadrement à donner aux opérateurs sur les techniques de production et d'exploitation appropriées.
Bara, G & Karen, S.F. 1991. Introduction à la Méthode Accélérée de Recherche Participative (MARA). Rapid Rural Appraissal. Quelques notes pour appuyer une formation pratique, 70 p
Glaw, F. & Vences M. 1994. A fieldguide to the Amphidians and Reptiles of Madagascar, 2nd edition including mammals and freshwater fish, 480 p
Healey, J.R. et al. 1998. Rapid assessment of plant biodiversity (Chapitre 2 dans Watts et al.) 7 p
Groombridge, B. and Jenkins, M.D. 1996. Assessing biodiversity, status and sustainability by the World Conservation Monitoring Center 104 p
Hellier, A.; Newton, D. and Gocona, S.O.. 1999. Use of indigenous knowledge for rapid assessing. Trends in biodiversity : a case study from chiapas, Mexico; Biodiversity and conservation, 8 : 869 - 889
Phillips, O.L. 1996. Some quantitative methods for analyzing ethnobotanical knowledge; pp 171 - 197. In : Alexiades M.N. ed. Select guidelines for ethnobotanical research : A. field manual. New York Botanical Garden, 306 pp.