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EUROPE OCCIDENTALE

par
Maria Teresa Cirelli et Franz Schmithüsen

RESUME

Dans de nombreux pays d'Europe occidentale, les lois forestières, dont la plupart sont anciennes, ont fait l'objet de réformes et d'amendements pour tenir compte des nouvelles exigences sociales, économiques et environnementales. D'où la diversité très marquée des législations forestières existantes, en termes de période d'adoption, de structure et de contenu. Néanmoins, leur examen fait apparaître certaines tendances d'évolution du droit forestier dans la région. De manière générale, on observe que, désormais, la plupart des lois ont des objets multiples et qu'elles traitent en particulier de la gestion durable des forêts, la participation de la population, l'intégration de la foresterie et des activités connexes, la protection contre les incendies et les catastrophes naturelles.

Des éléments nouveaux ont été introduits par les lois ayant trait à des domaines connexes, comme les aires protégées, les régions de montagne et le développement rural. Les politiques publiques concernant la protection de la nature, l'aménagement du territoire et la gestion des ressources naturelles renouvelables ont donné naissance à des législations présentant un intérêt particulier pour les forêts. D'importants changements sont intervenus en matière de transfert des compétences constitutionnelles ou législatives du niveau national aux niveaux infra-nationaux. Par ailleurs, les réglementations communautaires et les instruments juridiques internationaux ont un impact grandissant sur les politiques publiques et les législations nationales.

La complexité croissante du cadre juridique traduit la multiplicité des fonctions remplies par les forêts dans le développement durable. Elle pose de nouvelles questions concernant les rôles respectifs des secteurs public et privé, les droits des propriétaires fonciers face aux exigences des tiers, ainsi que les mécanismes de compensation entre entreprises forestières, groupes d'usagers et organismes publics. Les mesures d'incitation et les procédures de rationalisation se sont développées, rendant plus efficaces les processus décisionnels relatifs à la gestion durable des ressources forestières et équilibrant les intérêts locaux, nationaux et supranationaux.

Le présent chapitre passe en revue la législation forestière en vigueur dans les pays d'Europe occidentale. Il examine les principales questions qu'elle régit, expose brièvement l'apport des réglementations communautaires et dégage les grandes tendances d'évolution des lois récentes relatives à la protection des forêts et à leur gestion durable. La liste des textes législatifs étudiés figure à la fin du chapitre. Elle est suivie d'une bibliographie comprenant aussi bien des références générales concernant l'ensemble de la région que des indications spécifiques aux différents pays.

I. APERÇU SUR LA LEGISLATION FORESTIERE EN VIGUEUR DANS LA REGION

Durant ces dernières années, on a assisté à une transformation rapide de la législation forestière presque partout en Europe. Ce phénomène a été nettement plus marqué dans les pays d'Europe centrale et orientale, dont la plupart ont mis en place un cadre légal profondément rénové en matière de forêts, de conservation de la nature et de protection de l'environnement (Cirelli, dans ce volume; Schmithüsen, Herbst et Le Master, 1999). Mais ce processus de réforme ne s'est pas limité à ces seuls pays. En fait, l'adaptation de la législation forestière aux évolutions politiques, économiques et sociales a pris un élan considérable à travers tout le continent. Comme le montre le tableau 1, les pays ayant adopté de nouvelles lois ou les ayant modifiées vont de l'Albanie et l'Ukraine à la Finlande et la Suède, en passant par l'Allemagne, le Danemark, l'Espagne, la France, la Grande-Bretagne et le Portugal (Schmithüsen, 1999).

Cette étude est axée sur les orientations dominantes des principales législations forestières des pays d'Europe occidentale. Les lois forestières en vigueur dans cette région ont été adoptées pendant une période s'étalant sur plus d'un siècle et vont du Code forestier belge de 1854, à la loi italienne de 1923, jusqu'aux récentes lois des pays scandinaves. Là où la législation forestière de base n'a pas été remplacée ou modifiée, elle a parfois évolué sous l'influence d'autres lois, adoptées dans les domaines de la protection de l'environnement, du développement rural et des zones de montagne ou des incitations économiques, notamment. D'importantes innovations ont également été introduites par les lois adoptées au niveau infra-national, ou par les textes d'application. De même, les déclarations politiques émises après l'adoption de ces lois suscitent parfois de nouvelles méthodes de mise en œuvre de la législation existante. Le cadre législatif applicable aux forêts dans ces pays tend ainsi à être d'une particulière complexité, comparé avec celui d'autres régions du monde, telle que l'Europe centrale et orientale, où la tendance à été de remplacer l'ancienne législation par de nouveaux textes de portée globale (Schmithüsen et Iselin, 1999).

Dans les pays de cette région, il y a également une grande diversité dans l'application et la portée des lois forestières de base. Les plus récentes tendent à être plus concises, laissant la réglementation détaillée des divers aspects aux textes d'application ou aux mesures prises au niveau provincial ou local. Cela est particulièrement vrai des questions institutionnelles, qui requièrent une certaine flexibilité, afin de pouvoir ajuster périodiquement le rôle des autorités chargées des forêts. C'est pourquoi les lois ne contiennent généralement pas de dispositions détaillées à cet égard. Les lois récentes, telle que celle de la Suède, qui évoquent ces questions institutionnelles se limitent à des dispositions générales. Dans certains cas, comme en Finlande, les aspects institutionnels font l'objet d'une loi, mais celle-ci est dissociée de loi forestière. De même, les lois ne comportent pas toutes des dispositions exhaustives relatives aux infractions et à la police forestières. Parfois, cela peut être le fait de traditions juridiques particulières. Ainsi, dans certains pays, toutes les infractions de nature criminelle sont prévues par le code pénal ou par une autre législation spécifique. Dans d'autres cas, cependant, cela peut être simplement dû à un manque de cohérence entre la législation forestière de base et les textes subséquents concernant les infractions.

Tableau 1 - Réformes ou amendements importants des législations forestières de 1990 à 1998

1990

Belgique

Décret forestier flamand

Croatie

Loi forestière

Espagne

Loi forestière (Navarre)

1991

Liechtenstein

Loi forestière

Pologne

Loi sur les forêts

1992

Albanie

Loi sur les forêts et la police forestière

Espagne

Loi forestière (Andalousie)

Suisse

Loi fédérale sur les forêts

1993

Estonie

Loi forestière

Finlande

Loi sur le service des forêts et des parcs

Slovénie

Loi forestière

Espagne

Loi forestière (Valence)

1994

Suède

Loi forestière

Lettonie

Loi sur la gestion et l'exploitation des forêts

Lituanie

Loi forestière

Norvège

Loi forestière

Espagne

Loi sur le développement des forêts (Castille et León)

Ukraine

Code forestier

1990-1994

Royaume-Uni

Directives et règles

1992-1994

Allemagne

Lois forestières dans les cinq Etats de l'ancienne République démocratique d'Allemagne

1995

Espagne

Loi forestière (Madrid, La Rioja)

1996

République tchèque

Loi forestière

Danemark

Loi forestière

Finlande

Loi forestière

Hongrie

Loi sur les forêts et leur protection

Portugal

Loi forestière

Roumanie

Code forestier

1997

Bulgarie

Loi sur la restauration de la propriété des forêts et des terres forestières

Pologne

Loi sur les forêts

Russie

Code forestier de la Fédération de Russie

Espagne (Extremadura)

Loi sur la conservation de la nature et des espaces naturels

1998

France

Révision du code forestier

Norvège

Révision de la loi forestière

Pologne

Révision de la loi forestière

Source: Conférence ministérielle sur la protection des forêts en Europe (Lisbonne 1998): rapports nationaux; et Schmithüsen, 1999.

Toutefois, sans doute plus nettement dans cette région qu'ailleurs, la gestion et l'utilisation des forêts, des terres forestières et de leurs produits sont soumises à un ensemble de politiques publiques et de dispositifs législatifs qui se sont considérablement développés au cours des vingt dernières années. En ce qui concerne le développement forestier et l'industrie du bois, les politiques publiques et les lois déterminant les orientations macro-économiques sont d'une importance considérable. Celles-ci concernent, par exemple, l'emploi, les finances publiques, les infrastructures, la communication, l'énergie, la recherche et les technologies.

De plus, la réglementation traitant, de façon directe ou indirecte, de la conservation des forêts et de l'utilisation durable des ressources forestières est de plus en plus complexe. Il en est ainsi des politiques et des lois intersectorielles se rapportant, notamment, à la protection de l'environnement, à la conservation de la nature et du paysage, à l'aménagement du territoire et au développement régional. Il en est également ainsi des politiques et des lois sectorielles qui ont été adoptées antérieurement, mais qui ont ensuite été substantiellement modifiées, dans des domaines tels que le développement rural, la protection et l'utilisation de l'eau, la pêche, la chasse et la conservation de la faune.

Si bien que les lois forestières examinées ici présentent une vision partielle du cadre juridique complet relatif aux forêts dans un pays déterminé. Malgré cette limite, l'examen des lois forestières de base des pays d'Europe occidentale est très instructif. Il permet de dégager les tendances majeures du droit forestier contemporain de cette région, révélant d'intéressants points de convergence et d'opposition, qui peuvent être riches d'enseignements à l'occasion des processus de réforme des lois forestières ailleurs dans le monde.

On donnera ci-après un bref aperçu de la législation forestière en vigueur dans divers pays d'Europe occidentale:

Allemagne: la loi fédérale sur les forêts de 1975 est une loi-cadre qui n'a subi aucune modification majeure depuis sa promulgation. Elle fait obligation aux propriétaires forestiers de gérer leurs forêts durablement, compte tenu de leurs fonctions multiples. Pour l'application de ce principe, la définition des forêts, les pratiques forestières rationnelles et durables, l'obligation de reboiser après les coupes, l'autorisation exigée pour le changement d'affectation des terres forestières, la promotion du développement forestier, l'élaboration de «plans-cadres» pour les districts forestiers ou des unités régionales plus grandes, ainsi que le classement de forêts protégées et récréatives, sont autant d'éléments importants. Nombre de dispositions de la loi sont consacrées aux différentes formes d'associations forestières et aux aides publiques. La loi prescrit également l'établissement et la mise à jour d'un inventaire forestier fédéral. Pour la mise en œuvre de ces prescriptions, les autorités compétentes du gouvernement fédéral ont établi, en 1994, un rapport forestier national comprenant une analyse complète du secteur et des directives générales sur la gestion durable des forêts du pays. En 1996 le ministère concerné a publié un document de politique forestière qui actualise le précédent rapport.

Les questions relatives à la protection et la gestion des ressources forestières sont pour la plupart régies par les lois et règlements forestiers des Länder, adoptés dans les années 1970 et modifiés postérieurement. Ils prévoient en particulier des mesures de précaution pour la protection de l'environnement, des restrictions aux coupes claires, la protection des plantations immatures, des obligations relatives à l'entretien des forêts et aux infrastructures forestières, la planification de la gestion et des pratiques forestières adéquates. Après la réunification, de nouvelles lois forestières ont été élaborées pour les cinq Etats de l'ancienne République démocratique d'Allemagne (Weber, 1994). Cela a nécessité nombre d'ajustements quant à la définition des compétences constitutionnelles, à l'organisation des services forestiers, à la fixation des droits et obligations des propriétaires forestiers privés et publics, à la réglementation des pratiques forestières et à la gestion durable, ainsi que des encouragements et indemnisations en matière de foresterie (Niesslein, 1992). Le processus de rétablissement des tenures forestières, par la reconnaissance des forêts privées, communales et domaniales, d'une part, et par la privatisation des terres ayant appartenu à des coopératives forestières, d'autre part, a constitué un élément important de la réorganisation du système d'exploitation forestière (Sasse, 1996). En outre, de nombreuses lois, tant au niveau fédéral qu'à celui des Etats, touchent directement ou indirectement aux forêts. Il en est ainsi, par exemple, de la loi régissant les semences et les plants forestiers, de la loi concernant l'indemnisation des dégâts causés aux forêts, de la loi relative au fonds des ventes forestières, des lois fédérale et étatiques sur la conservation de la nature, de la loi fédérale sur le contrôle des émissions et des ordonnances étatiques correspondantes, des lois fédérale et étatiques sur la chasse, des lois fédérale et étatiques sur la planification régionale et les paysages, des lois fédérale et étatiques sur l'eau.

Autriche: la loi forestière de 1975, modifiée en 1996, est assez détaillée. Elle prévoit trois sortes de plans d'aménagement, réglemente l'exploitation et la protection contre les incendies, les fléaux et la pollution de l'air, prévoit la création de forêts de protection et fixe les responsabilités du service forestier et du service de contrôle des torrents et des avalanches (Glück, 1988; Eckmüllner, 1992). Elle comprend aussi des dispositions sur les subventions. Une partie régit spécifiquement la production, la certification, l'importation et l'exportation de semences et de plants. L'utilisation du bois et les droits de pâturage des tiers sont régis par le droit public fédéral et la législation des Etats membres (Herbst, 1996). En application des Résolutions d'Helsinki et des Principes forestiers de Rio, plusieurs programmes forestiers nationaux visant l'amélioration de la gestion forestière durable et de la biodiversité ont été mis en œuvre. Le Plan sectoriel forestier a été élaboré et approuvé en 1997.

Belgique: Etat fédéral, la Belgique a un gouvernement fédéral, trois communautés et trois régions. En matière de forêts, les régions sont compétentes pour adopter leurs propres politique et législation. Dans la région de la capitale Bruxelles et dans la région wallonne, le code forestier de 1854 et la législation, plus récente, relative à la conservation de la nature et l'aménagement du territoire, constituent le cadre réglementaire de base. Le code forestier, tel que modifié, est un texte volumineux et détaillé qui définit le régime forestier applicable aux forêts appartenant, en tout ou en partie, à l'Etat ou aux communes. Des dispositions particulières s'appliquent aux forêts privées. Selon le régime forestier, les forêts doivent faire l'objet de plans approuvés par décision ministérielle. Une procédure détaillée est prescrite pour l'octroi des autorisations de coupe et de leur exploitation. Le code comprend des dispositions relatives aux droits d'usage, aux infractions et aux sanctions, ainsi qu'à la délimitation des forêts de l'Etat et des communes. Des dispositions spécifiques définissent les conditions d'accès aux forêts par le public, les subventions et les inventaires dans la région wallonne.

Le décret forestier flamand de 1990, applicable en Flandre, s'est substitué au code forestier de 1854, sauf en ce qui concerne les dispositions relatives à la police forestière. Il définit les forêts et régit leurs fonctions, l'organisation du service forestier, la gestion et la protection des forêts, ainsi que le système de planification aux niveaux stratégique et exécutif de la politique forestière. Le décret fixe les modalités des plans d'aménagement ainsi que les conditions de classement et de gestion des réserves forestières. Le processus d'élaboration du décret forestier flamand constitue un exemple intéressant d'une politique forestière régionale qui a été formulée avec la participation d'un grand nombre de parties prenantes, telles que les autorités locales, les organismes chargés de la planification rurale et les groupes de défense de la nature.

Chypre: la loi forestière de 1967 est relativement brève. Elle prévoit le classement de forêts d'Etat «principales» ou «secondaires» et réglemente les permis y afférents. Une disposition confère aux habitants de villages déterminés le droit de récolter, sans permis, des produits forestiers. Les forêts privées peuvent, à la demande de leurs propriétaires, être placées sous le contrôle de l'Etat et gérées par l'administration forestière. Les infractions et les pouvoirs réglementaires du ministre compétent font l'objet de dispositions détaillées.

Danemark: la loi forestière de 1989, modifiée en 1996, vise à assurer la pérennité des réserves forestières et leur administration suivant les règles de bonne gestion forestière multi-usage. Des dispositions complémentaires de la loi forestière figurent dans la loi de 1992 sur la conservation de la nature, la loi de 1991 sur la planification et la loi de 1993 sur les ceintures vertes et les forêts décidues (Act on Shelterbelts and Supplementary Deciduous Plantations). La loi forestière entend par «bonne gestion forestière multi-usage» celle qui vise aussi bien à développer et améliorer la production ligneuse qu'à sauvegarder la nature, les paysages et le patrimoine historique, à protéger l'environnement et favoriser les loisirs. Elle prévoit la mise en œuvre de pratiques forestières conformes à ces principes dans les forêts existantes, la conservation d'aires permanentes de forêts naturelles, le boisement privé de terres agricoles, avec indemnisation en cas de perte de revenus, le développement des produits issus des forêts et des industries du bois, la consultation de services du secteur forestier, ainsi que des mesures concernant les activités d'information, de conseil et de recherche. Des accords relatifs à la gestion des forêts peuvent être passés entre le ministre compétent et les propriétaires. Le ministre de l'environnement est chargé de l'application de la loi et peut, en cas d'infraction, prescrire les mesures de réparation nécessaires. Il peut déléguer ces pouvoirs ainsi que celui d'inspecter les propriétés. Des recours contre les décisions prises en vertu de la loi peuvent être formés suivant une procédure déterminée. Enfin, un conseil consultatif doté de fonctions particulières est institué.

Espagne: la loi forestière de 1957, qui est très détaillée, prévoit l'établissement d'un registre des forêts d'intérêt public et réglemente les servitudes, ventes et échanges ainsi que l'exploitation des forêts publiques et privées, les subventions, le reboisement, la protection contre les fléaux et les incendies, les fonctions du service de la conservation des eaux et le contrôle des industries forestières. La Constitution de 1978 confère aux communautés autonomes des pouvoirs dans de nombreux domaines, dont les forêts, la pêche dans les eaux intérieures, la chasse et l'aquaculture (art. 148). Ces pouvoirs peuvent être étendus à d'autres matières, à l'exception de celles énumérés à l'article 149, à savoir, notamment, les législations de base relatives à la protection de l'environnement et aux forêts, y compris l'exploitation de celles-ci et des zones réservées au pâturage.

En vertu de ces dispositions constitutionnelles, le gouvernement central demeure compétent en ce qui concerne les productions forestières en général, la planification et la coordination, les infrastructures forestières d'intérêt public, les activités internationales, les statistiques nationales, l'inventaire des terres érodées et des zones nécessitant une protection spéciale, la lutte aérienne contre les incendies de forêts et la gestion des parcs nationaux. Pour leur part, les communautés autonomes sont chargées de la gestion des forêts et des activités de développement forestier. Des lois forestières ont été promulguées pour l'Andalousie en 1992, la Catalogne en 1988, l'Extremadura en 1998, Madrid en 1995, la Navarre en 1990, La Rioja en 1995 et Valence en 1993. Les instruments financiers prévus par la loi de 1957 ont été transférés aux communautés autonomes, qui agissent désormais, dans une large mesure, conformément aux politiques économiques de l'Union européenne (UE). Ainsi, les aides publiques au reboisement, la protection des forêts contre la pollution atmosphérique et les incendies, les mesures environnementales s'inscrivent, pour la plupart, dans le cadre des réglementations de l'UE.

La loi de 1989 sur la protection des espaces naturels et de la flore et la faune sauvages comporte des principes de base relatifs à la gestion des ressources naturelles et à la conservation de la biodiversité. Elle impose l'élaboration de plans de gestion des ressources naturelles et réglemente le classement et la gestion des aires protégées. Elle est également importante du point de vue de la délimitation de la compétence de l'Etat central en matière de parcs nationaux (Rojas Briales, 1992). Elle contribue ainsi à la redéfinition des compétences constitutionnelles touchant à la législation relative aux forêts et à la conservation de la nature, ainsi que la distribution des rôles entre le gouvernement central au niveau national et les communautés autonomes au niveau régional.

Finlande: la loi forestière de 1996 définit son propre champ d'application, prévoit l'adoption de «programmes forestiers régionaux ciblés» et réglemente les coupes, qui doivent être suivies, s'il y a lieu, de nouvelles plantations d'arbres. Elle comporte des chapitres sur la protection de la biodiversité et des habitats revêtant une importance particulière, sur les forêts de protection et les «zones de protection». Les dispositions relatives à la mise en œuvre de la loi envisagent la possibilité de créer des comités d'inspection chargés de déterminer les infractions, des sanctions sont prescrites et les règles de poursuite des infractions sont fixées. Les réparations peuvent être négociées entre l'administration et le contrevenant. Les compétences des centres forestiers sont brièvement définies. Une loi distincte de 1996, relative au financement de la foresterie durable, régit les encouragements de l'Etat à celle-ci. Les aspects institutionnels de l'organisation du secteur forestier sont traités par la loi de 1996 sur les Centres forestiers et sur l'Institut central de développement forestier. De plus, une loi sur les associations de gestion forestière a été élaborée en 1997. Enfin, la loi relative aux dégâts causés par les insectes et les champignons, en vigueur depuis 1991, fait obligation aux propriétaires et aux autorités de prendre diverses mesures préventives et curatives.

La réorganisation de l'administration a entraîné d'importants changements législatifs (Tikkanen et Vehkamaki, 1996). La loi de 1994 sur le service des forêts et des parcs a créé une entreprise d'Etat travaillant sous l'autorité du ministre de l'agriculture et de la foresterie et, pour ce qui est de la protection de la nature, sous le contrôle du ministre de l'environnement. Le service des forêts et des parcs doit gérer les ressources naturelles et les biens relevant de sa compétence d'une manière durable et profitable, compte tenu des exigences de la protection et de la mise en valeur de la biodiversité. Les mesures de sauvegarde de la nature doivent être prises suivant la loi de 1997 relative à la conservation de la nature et des objectifs opérationnels et financiers précis. D'autres obligations découlent des prescriptions de la loi de 1982 sur la pêche, de la loi de 1991 sur le commerce des terrains, de la loi de 1993 sur la chasse et de la loi de 1973 sur les loisirs de plein air. Outre la production de bois et la protection de la nature et des parcs nationaux, les fonctions de ce nouveau service ont trait aux usages récréatifs des terres domaniales, aux mesures de lutte contre le chômage dans les zones rurales du Nord et à la sauvegarde des traditions locales et du patrimoine culturel.

La loi sur la conservation de la nature de 1997 a été préparée en même temps que la loi forestière afin de concilier les exigences de la conservation de la biodiversité et celles de l'exploitation commerciale des forêts. Elle encourage la création et la gestion des aires protégées, prévoit des compensations pour les pertes liées aux programmes de conservation de la nature, améliore la sécurité juridique des propriétaires forestiers et diversifie les méthodes de mise en œuvre des mesures de protection de la nature. La loi de 1994 concernant les études d'impact sur l'environnement requiert l'évaluation des projets pouvant porter atteinte aux forêts, tourbières et zones humides d'une superficie égale ou supérieure à 200 hectares. Les mesures tombant sous le coup de ces dispositions sont, par exemple, les nouveaux drainages, les défrichements ou la régénération au moyen d'espèces introduites.

France: le code forestier est un imposant corpus comprenant des dispositions à la fois législatives et réglementaires. Il comporte des règles sur l'organisation de l'Office national des forêts, le régime forestier applicable aux ventes du bois des forêts domaniales, le pâturage, la chasse, les droits d'usage. Il réglemente également les questions touchant aux forêts privées, comme la création de centres régionaux de propriétaires forestiers, divers types de plans d'aménagement ou la constitution des associations forestières. Au titre des mesures de protection, des dispositions spécifiques du code sont consacrées aux coupes claires, ainsi qu'à la prévention et la lutte contre les incendies. Le code fixe le statut des forêts de protection et réglemente la conservation des régions de montagne. Un inventaire des ressources forestières doit être effectué et un fonds forestier national est institué. Selon la loi 85-1273 relative à l'exploitation, la mise en valeur et la protection des forêts, les fonctions de production et de protection de celles-ci, ainsi que leur utilité sociale, constituent les principaux objectifs de la politique forestière nationale (Humbert, 1996). Cette loi apporte d'importants éclaircissements au code et consolide la législation antérieure. Elle complète la loi de 1976 sur la protection de la nature et les textes qui l'ont amendée. Suite à un récent rapport gouvernemental sur la politique forestière qui a formulé d'importantes propositions stratégiques visant à optimiser le potentiel des ressources forestières (Bianco, 1998), une réforme du code a été mise en chantier et le ministre chargé des forêts a annoncé qu'un projet de nouvelle loi forestière serait présenté prochainement. Dernièrement, cette initiative a été réactivée après les dégâts catastrophiques que les forêts ont subis à cause de violentes tempêtes suivies d'inondations.

Grèce: le cadre juridique de la conservation et de l'utilisation des ressources forestières est principalement constitué par le code forestier de 1969, la loi de 1979 sur la protection des forêts et des terres forestières et la loi de 1986 sur la protection de l'environnement. Le décret présidentiel de 1981 relatif à la protection de la flore et de la faune est également pertinent pour la conservation des forêts. Les autorisations d'opérer en forêt et dans les terres forestières font l'objet de nombreux décrets présidentiels (Goupos et Papastavrou, 1992, 1996). La législation relative aux pâturages revêt aussi une grande importance pour la gestion des forêts et des terres forestières (Papanastasis, 1988).

Irlande: la loi forestière de 1946, telle que modifiée, traite de façon assez détaillée des autorisations de coupe, des infractions et de leurs sanctions. Elle comporte des dispositions précises sur les servitudes, les droits de passage, les cessions et ventes forcées des terres. En vertu de la loi forestière de 1988, l'administration forestière d'Etat a été transformée en une société de développement forestier, dont les activités forestières doivent être menées suivant les règles du commerce et des pratiques sylvicoles efficaces (art. 12). Le ministre concerné reste compétent pour donner à la société des orientations politiques d'ordre général, pour qu'elle maintienne des services déterminés ou pour qu'elle utilise certaines terres dans des buts précis (art. 38); il peut aussi, par arrêté, réglementer l'accès ou l'utilisation des terres gérées par la société (art. 37 et 38). La loi sur la faune et la loi relative à la planification et au développement, qui datent de 1976, concernent également la protection et la gestion des forêts. La deuxième loi exige une évaluation environnementale et une autorisation de planter pour les boisements attenants aux forêts lorsqu'ils dépassent 70 hectares. En 1996, un plan stratégique pour le développement du secteur forestier a été adopté. En outre, un programme d'amélioration des terres boisées, des programmes de foresterie urbaine et récréative, de nouveaux systèmes de subventions forestières, des lignes directrices forestières et un code de bonnes pratiques forestières ont été adoptés au cours de ces dernières années.

Italie: encore aujourd'hui, la réglementation forestière reste largement basée sur la loi Serpieri de 1923 relative aux forêts, telle qu'elle a été modifiée, et par les règlements pris pour son application. Elle traite des restrictions pouvant être imposées aux propriétaires de terres boisées aux fins de conservation des ressources hydrauliques ou pour d'autres raisons, telle que la protection contre les avalanches, les glissements de terrains ou l'érosion éolienne. La loi décrit en détail la procédure à suivre à cet effet, ainsi que les peines encourues en cas d'infraction. Elle spécifie ensuite les autorités compétentes et les règles applicables en matière d'aménagement et de reboisement des bassins montagneux. Elle réglemente aussi la passation des contrats et l'accès au crédit dans ce domaine. Au titre des encouragements à la foresterie, elle prévoit des aides techniques et financières. Une autre partie de la loi concerne les forêts détenues par les autorités et les associations locales. Elle réglemente les modalités de gestion des terres par les associations traditionnelles, telles que les università agrarie, ainsi que par les comunanze. La dernière partie de la loi est relative à l'administration forestière de l'Etat, en particulier la police forestière (Corpo forestale dello Stato). Ces dispositions concernant l'administration forestière ont été modifiées et complétées par plusieurs textes subséquents.

La Constitution italienne de 1948 (art. 117), actuellement en vigueur, ajoutée à d'autres textes postérieurs, ont transféré aux régions les compétences administratives en matière de forêts, y compris le pâturage et le développement des régions de montagne. Bon nombre de régions ont alors adopté leurs propres lois forestières. Toutefois, il existe encore un ministère au niveau central, mais ses fonctions sont limitées. Parmi les autres textes pertinents, on trouve des lois relatives à la protection des forêts contre les incendies ou aux infractions et sanctions (dont le code pénal).

Progressivement, la gestion des ressources forestières a été infléchie par une série de textes ayant trait à l'environnement et à d'autres secteurs. Des dispositifs adoptés dans des domaines tels que la nature et le paysage, le développement rural et les programmes consacrés aux régions de montagne ont eu des retombées considérables sur la gestion des forêts (Merlo et Pettenella, 1990). Ainsi, la loi de 1985 sur la nature et le paysage (Legge Galasso) a institué une planification régionale des paysages qui a eu des impacts sur les fonctions et la gestion des forêts. Le décret présidentiel de 1995 relatif à la protection et la gestion des bassins hydrographiques et le décret présidentiel de 1997 relatif à la protection de l'habitat rural et semi-rural et de la vie sauvage, par exemple, constituent aussi des illustrations récentes de ce type de textes réglementaires ayant des répercussions sur la gestion des forêts. Une autre évolution intéressante vient de l'impact croissant qu'exercent les réglementations communautaires en matière d'agriculture, ainsi que des aides accordées à certaines régions qui se matérialisent par des plans et projets spécifiques (Gajo et Marone, 1996). A cet égard, l'Italie donne l'exemple d'un pays où la foresterie est de plus en plus incluse dans des projets intégrés de mise en valeur des terres, réalisés avec des financements conjoints dans le cadre de différents programmes.

Liechtenstein: l'objectif principal de la loi forestière de 1991 est de préserver, planter et développer les forêts afin qu'elles puissent remplir leurs fonctions de manière durable. Elle est complétée par des dispositions réglementaires qui prévoient l'attribution d'indemnités et de contributions financières permettant de réaliser les objectifs de la loi.

Norvège: la loi relative aux forêts et à leur protection de 1965, telle que modifiée, détermine ses objectifs et son champ d'application, spécifie les attributions de l'administration forestière et régit certains aspects procéduraux, tels que la prise de décisions et les recours y afférents. Plusieurs dispositions réglementent l'exploitation, la régénération, le reboisement et les mesures à prendre en cas de dommages aux forêts dus à des causes accidentelles ou à une mauvaise gestion. Un chapitre spécifique est consacré aux inventaires forestiers et aux plans d'aménagement forestier. Un autre chapitre réglemente le classement et la gestion des «forêts de protection». Des dispositions détaillées traitent du fonctionnement du fonds forestier. La plupart des règlements forestiers ont été révisés en 1994 afin de mieux intégrer les aspects de conservation de la biodiversité forestière. En 1997, des mesures d'application de la loi forestière ont été proposées par le ministère de l'agriculture. Elles régissent principalement les dimensions environnementales de la législation forestière, les obligations des propriétaires forestiers en termes de production, de régénération et d'environnement, ainsi qu'en matière de renforcement des capacités environnementales des opérateurs forestiers.

Pays-Bas: la loi forestière de 1961 réglemente les coupes et le reboisement, les procédures et les recours, les subventions et les crédits. Elle institue un Conseil d'information forestière et détermine les infractions et leurs sanctions. A la faveur de la décentralisation, les provinces ont vu s'accroître leurs compétences en ce qui concerne tant la gestion des forêts que l'application de la loi forestière. Le «programme de gestion hollandais», approuvé par le parlement, prévoit la réforme des modalités d'achat et de gestion des espaces naturels et des forêts. Des conventions de gestion conclues entre l'Etat et les gestionnaires tendent à concilier les objectifs à atteindre et les moyens financiers. Une plus large participation des personnes privées à la gestion des espaces naturels et des forêts devrait être assurée moyennant des instruments orientés vers des résultats déterminés plutôt que des groupes cibles.

Portugal: la loi de base sur la politique forestière de 1996 consacre plusieurs de ces dispositions aux objectifs et principes devant déterminer la politique forestière. Elle prescrit également l'élaboration de plans régionaux d'aménagement forestier (pianos regionais de ordenamento florestal), dont elle définit le contenu, ainsi que d'autres plans d'aménagement. Elle fixe les responsabilités de l'Etat en matière forestière, au nombre desquelles figure la mise au point d'outils financiers appropriés. Elle confie ces tâches à l'administration forestière -dont les fonctions doivent être précisées par une autre loi- et elle institue une commission interministérielle et un organisme consultatif pour les questions forestières. Elle comprend aussi des dispositions sur la recherche et sur les aides aux associations de producteurs forestiers. Elle crée également un fonds forestier ayant des objectifs déterminés et prévoit la mise en place d'un système d'assurance obligatoire. Enfin, un aspect intéressant de la loi est constitué par ses dispositions relatives à la coordination des politiques relevant d'autres secteurs, tels que l'agriculture, l'industrie, l'environnement, la fiscalité et l'aménagement du territoire.

Royaume-Uni: les forêts sont principalement régies par les lois forestières de 1967 et 1979 et par la loi sur la protection des végétaux de 1967 (Plant Health Act). La loi de 1981 sur la faune et les paysages (Wildlife and Countryside Act), amendée en 1985, est également importante en la matière. Le ministère de l'agriculture d'Irlande du Nord s'acquitte de ses tâches conformément aux dispositions de la loi forestière de 1953 et de la loi sur la protection des végétaux de 1967, l'une et l'autre propres à ce pays, telles qu'amendées. La loi forestière de 1967 définit les fonctions essentielles des autorités forestières (commission forestière). Dans ce cadre, on a assisté à une réorganisation progressive de la commission, qui a entraîné la séparation des fonctions qu'elle exerce comme «autorité» et comme «entreprise», auxquelles correspondent des directions distinctes. La loi permet la conclusion de contrats forestiers, entre la commission forestière et des propriétaires privés, aux fins de reboisement et d'exploitation forestière à long terme. Elle réglemente aussi les coupes et prévoit la création d'organismes forestiers consultatifs. Les changements opérés dans le secteur forestier se fondent, pour une grande part, sur les déclarations ministérielles et les documents politiques, ainsi que sur des mesures restrictives et des initiatives d'ordre juridique, fiscal, financier ou éducatif. L'actuel document de politique forestière nationale a été rédigé en 1991 et a été suivi, en 1994, par l'adoption d'un programme de foresterie durable (Miller, 1996).

L'administration forestière a élaboré, entre 1990 et 1994, un ensemble de directives concernant les forêts et l'eau, la conservation des forêts naturelles, les forêts récréatives, l'aménagement des paysages forestiers et des bois communaux. Elles contiennent des normes prescrivant diverses mesures, telles que les méthodes d'aménagement forestier permettant de minimiser les atteintes à l'eau ou les demandes d'octroi de subventions. La possibilité d'obtenir des dégrèvements fiscaux pour la plantation d'arbres a existé jusqu'en 1988. Depuis lors, les subventions ont remplacé les dégrèvements fiscaux, car on estime qu'elles sont plus fonctionnelles. Avec le système des subventions en faveur des terres boisées, les agriculteurs peuvent obtenir des indemnités annuelles pour compenser leurs pertes de revenus agricoles. Il convient de souligner le rôle joué par les consultants forestiers, dont beaucoup ont passé des examens d'admission à l'Institut des forestiers agréés. Dès lors, ils sont inscrits sur la liste des consultants agréés et sont tenus au respect de l'éthique et des codes de conduite de cet institut professionnel.

Suède: en 1994, une nouvelle loi forestière est venue se substituer à celle de 1979, laquelle avait fait l'objet de modifications mineures dans les années 1980 (Svensson, 1994; Thelander, 1996). La loi définit les «terres forestières» et comporte des dispositions sur les coupes et sur l'obligation pour les propriétaires de réaliser de nouvelles plantations dans les forêts qui s'y prêtent. Une partie spécifique consacrée aux «forêts de feuillus sélectionnés de valeur» requiert que celles-ci soient protégées et régénérées en permanence. Une évaluation de l'impact environnemental de certaines activités forestières est également prescrite. Le conseil national et les conseils locaux des forêts sont habilités à imposer ou interdire certaines actions pour assurer le respect de la loi, ainsi qu'à requérir des garanties pour l'exécution des mesures de régénération applicables. La loi comprend aussi des dispositions procédurales telles que celles relatives aux recours contre les décisions administratives. Dans l'ensemble, elle est plus simple que la précédente, moins restrictive qu'elle et donne une plus grande liberté d'action pour la gestion des terres.

Fort intéressante à plusieurs égards, cette loi est le fruit d'importants changements d'orientation dans la politique forestière. L'un des aspects saillants de la nouvelle politique forestière nationale est que la protection de l'environnement et la production de bois sont désormais considérés comme des objectifs politiques prioritaires d'égale importance dans la gestion des ressources forestières. Les propriétaires de forêts ont l'obligation de prendre les mesures environnementales requises sur les terres utilisées pour la production de bois et doivent supporter les coûts y afférents. En revanche, l'Etat prend en charge les coûts relatifs aux parcs nationaux et aux réserves naturelles. Les services de vulgarisation et le transfert des connaissances et du savoir-faire ont pris de l'ampleur depuis que les responsabilités des propriétaires forestiers se sont accrues en matière de gestion des ressources forestières. Les subventions sont limitées aux activités permettant d'améliorer l'environnement forestier. En se basant sur les deux objectifs de la politique nationale -la production et l'environnement-, le conseil national des forêts a développé neuf sous-objectifs qui concernent: le reboisement, la sylviculture, l'exploitation, la protection des forêts, la protection des sols et de l'eau, la conservation de la nature et du patrimoine culturel, la protection des habitats de valeur, la planification de l'aménagement et les questions internationales. Un plan d'action relatif à la diversité biologique et la foresterie durable a été élaboré. Les effets de la nouvelle politique forestière ont été évalués en 1997. Il est apparu que certaines modifications sont nécessaires, mais aucun changement majeur n'est envisageable dans un avenir proche.

Suisse: après un long processus de révision, une nouvelle loi fédérale sur les forêts a été adoptée en 1991 par les deux chambres du Parlement (Schmithüsen, 1995). Comme la précédente, qui était en vigueur depuis 1902, cette dernière résulte de compétences constitutionnelles partagées dans le domaine des forêts. L'Etat fédéral a une compétence cadre axée sur la protection des terres forestières et sur le rôle protecteur des forêts dans les régions de montagne. Les cantons doivent adopter des dispositions plus spécifiques, que les autorités fédérales approuvent (art. 52). Les cantons sont également chargés de la mise en œuvre des règlements fédéraux. Ils possèdent en outre un large domaine de compétences propres, telles que la planification de la gestion forestière, les aides aux propriétaires forestiers publics et privés et l'organisation des services forestiers cantonaux. Après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi fédérale, les cantons ont modifié leurs lois forestières.

La loi fédérale sur les forêts réglemente les coupes claires, tout en déléguant aux cantons le pouvoir d'adopter des mesures de gestion plus spécifiques. Elle énonce des règles de base relatives à l'aménagement du territoire dans les régions comportant des forêts, ainsi que des prescriptions particulières concernant les permis de construire. Plusieurs dispositions ont trait au financement de la foresterie par la Confédération. La loi fait une place de choix à la conservation de la diversité biologique, en prévoyant des mesures pour sa protection dans l'ensemble des zones forestières. Les pratiques sylvicoles doivent être respectueuses du milieu naturel, c'est-à-dire tenir compte des conditions régnant dans le site, de la faune, de la flore et des paysages. La régénération naturelle doit être préférée partout où elle est possible et les plantations doivent être effectuées avec des espèces adaptées au site. Pour des raisons écologiques et afin de protéger les paysages, les cantons peuvent ne pas exploiter des zones forestières. Les coupes claires et l'usage de substances environnementalement dangereuses en forêt, tels que pesticides, herbicides et engrais, sont interdits. Les services forestiers cantonaux sont chargés d'exécuter ces règlements.

Turquie: la Constitution turque de 1982 spécifie les catégories de terre ne devant pas être considérés formellement comme des forêts. La loi forestière de 1956, telle qu'amendée, définit les forêts de façon détaillée et exclut d'autres types de terre de cette définition. Elle crée des commissions cadastrales forestières chargées de délimiter les forêts. Certaines dispositions concernent les communautés forestières villageoises, dont le déplacement est envisagé lorsque les conditions locales ne permettent pas d'assurer leur subsistance. Les activités interdites dans les forêts sont énumérées en détail et le classement des forêts de protection est organisé. La loi de 1995 portant spécialement sur le reboisement vise à développer les superficies forestières en incitant les institutions et les particuliers à planter des arbres. Les forêts ainsi constituées sont assujetties à la loi forestière, mais elles peuvent être exploitées librement, conformément aux dispositions de la même loi. Des dispositions particulières fixent les recettes devant être versées au «fonds de boisement», dont le ministre des forêts dispose pour assurer la mise en œuvre de ladite loi. La loi de 1991 sur le développement de la foresterie villageoise prévoit la réinstallation des villageois qui ont été contraints de se déplacer dans des zones situées en dehors des forêts de l'Etat en vertu de la loi forestière. Le septième plan quinquennal de développement (1995-1999) définit des politiques et des stratégies forestières basées sur les principes de gestion forestière durable et de conservation de la biodiversité.

II. TENDANCES MAJEURES DES LEGISLATIONS FORESTIERES NATIONALES

2.1. Gestion forestière durable

Comme dans d'autres régions du monde, les objectifs des lois forestières sont devenus plus diversifiés et globaux. Se démarquant d'une conception axée sur le bois comme ressource durable, les lois forestières régissent désormais une plus large gamme de produits et de valeurs publics et privés, accordant une égale importance à la production et à la conservation. De plus en plus, elles reconnaissent le rôle multifonctionnel des forêts, leur potentiel économique et leur importance environnementale, la singularité des écosystèmes et la nécessité de maintenir la biodiversité et de préserver les terres forestières afin de protéger la nature et les paysages. Les règles relatives à la gestion et à l'exploitation s'efforcent de concilier les exigences de la production ligneuse, des usages récréatifs et de la protection des forêts pour les besoins de la conservation des sols et de l'eau et la lutte contre les catastrophes naturelles.

Déjà en 1957, la loi forestière espagnole avait prescrit que l'exploitation des forêts devait être compatible avec leur conservation et leur développement. Des lois postérieures ont tenté d'élargir le concept de durabilité, allant au-delà du simple objectif de rendement soutenu pour y englober les multiples fonctions des forêts et la protection de la biodiversité. Cela était déjà perceptible dans la loi allemande de 1975, dont l'objectif premier est la protection et la gestion durable des forêts, en vue de maintenir leurs fonctions économiques autant que récréatives et environnementales (art. 1). La loi autrichienne de la même année est fondée sur le principe que les terres forestières doivent le demeurer et être gérées de manière à maintenir la productivité des sols et assurer la continuité de leurs fonctions pour les générations futures.

La loi suisse, plus récente (1991), énumère au titre des principes de gestion l'obligation de gérer les forêts de manière à garantir, à long terme, leurs fonctions protectrices, sociales et économiques (art. 1 et 20). Selon la loi turque de 1956, telle qu'amendée, l'Etat doit tenir compte des usages multiples des forêts dans l'exécution des activités d'exploitation forestière (art. 25). La loi danoise (1989) consacre une longue disposition à la définition de la «bonne utilisation forestière multiple» (art. 15). Le développement durable des ressources naturelles est également l'un des objectifs principaux énoncés par la loi espagnole sur la protection des espaces naturels et de la flore et la faune sauvages (1989). La loi portugaise (1996) fait expressément référence à la durabilité dans ses principes fondamentaux (art. 2-1c): les forêts et les ressources connexes doivent être gérées de manière durable en vue de satisfaire les besoins des générations actuelles et futures, dans un cadre de développement rural intégré. La politique forestière nationale est un élément essentiel pour assurer le développement durable des forêts (art. 1), qui doit être l'un de ses principaux objectifs (art. 4).

Bien qu'assez récente, la loi suédoise (1994) est davantage centrée sur les besoins de la régénération. Elle dispose que les coupes forestières doivent être effectuées de manière à promouvoir l'établissement de nouvelles plantations ou à favoriser le développement des boisements existants (art. 10) et que l'Etat peut fixer le pourcentage maximal d'une forêt pouvant être coupé durant une période donnée (art. 11). La loi finlandaise insiste également sur la nécessité de sauvegarder la biodiversité forestière par l'identification des habitats naturels à préserver à l'occasion de toute exploitation forestière (art. 10). Elle s'efforce de prévenir les conflits concernant les modes de gestion (en particulier d'exploitation), qui avaient tendance à survenir sous l'empire de l'ancienne législation (Vihervuori, 1998), en n'autorisant que deux modalités de coupe: la «coupe intermédiaire» (ou «d'amélioration»), qui permet la croissance des arbres non exploités; et la «coupe de régénération», qui suppose la réalisation de nouvelles plantations d'arbres (art. 5).

L'élargissement de la gamme de ces objectifs politiques se manifeste par une diversité croissante des stratégies normatives des législateurs forestiers contemporains. Les règles relatives à la protection mettent l'accent sur les préoccupations d'environnement et de biodiversité, sur la protection de la nature et des paysages, ainsi que sur les restrictions tenant aux valeurs culturelles et spirituelles. Les règles relatives à l'aménagement foncier traitent du zonage des terres forestières, de la lutte contre les défrichements de forêt, de la protection du domaine forestier permanent et de la réalisation de nouvelles plantations forestières. Les règles relatives à la gestion et l'exploitation déterminent les obligations des propriétaires forestiers en matière de la production durable de produits ligneux et non ligneux; elles se rapportent aussi à la protection des sols et des eaux, ainsi qu'à l'accès du public aux forêts, notamment à des fins de loisir.

On observe une nette tendance -explicitement reconnue par certaines lois récentes, comme celle de la Suisse- à favoriser les pratiques sylvicoles proches de la nature et à limiter les coupes claires. Lesdites pratiques sylvicoles constituent une forme moderne de gestion destinée à sauvegarder la diversité naturelle et la stabilité des forêts. Dans certains cas, les mesures financières publiques visent à promouvoir la préservation des forêts de feuillus et l'exécution de travaux sylvicoles de régénération, d'entretien et d'éclaircie dans les plantations de feuillus. De plus en plus, l'accent est également mis sur des mesures réglementaires telles que: (i) l'exigence d'une autorisation spéciale pour pouvoir planter dans les zones nécessaires à la conservation de la nature; (ii) l'obligation pour les propriétaires forestiers de rendre compte des mesures de protection incluses dans leurs plans de coupe; et (iii) l'imposition d'une étude d'impact environnemental des méthodes alternatives d'exploitation et de travaux sylvicoles et l'obligation de fournir des informations prouvant que la biodiversité est préservée.

2.2. Planification de la gestion forestière

L'élaboration de plans d'aménagement forestiers constitue très souvent une obligation légale, mais dont la nature et la portée diffèrent. La loi autrichienne, par exemple, prescrit l'élaboration d'un plan de développement forestier pour l'ensemble du pays; de plus, tout propriétaire doit établir un plan forestier technique (partie II). La loi espagnole dispose que les forêts inscrites au «registre» (celles déclarées d'utilité publique en vertu de l'article 6) doivent être gérées suivant des instruments de planification économique (art. 29). Les forêts privées d'importance significative peuvent être soumises à des plans d'aménagement ou à des plans techniques (art. 30-2). La loi finlandaise fait obligation aux centres forestiers régionaux d'établir des programmes pour les régions concernées, en collaboration avec les parties intéressées, fixant des objectifs pour la promotion de la gestion forestière durable et précisant les modalités de financement des activités correspondantes (art. 4). En Suisse, la loi fédérale charge les cantons de réglementer la planification de la gestion (art. 18). En Norvège, la chambre régionale d'agriculture peut exiger qu'un plan d'aménagement forestier soit établi pour une forêt ou une partie de forêt où des infractions aux règles de coupe ont été constatées. Un tel plan peut également être exigé suite à une gestion forestière inadéquate ou lorsque l'administration forestière entend marquer les arbres pendant une durée minimale de dix ans. Le plan doit être approuvé par ladite chambre (art. 30).

Cependant, les lois récentes n'imposent pas toutes des plans d'aménagement. En Suède, par exemple, l'administration a expérimenté des techniques de gestion novatrices qui ne nécessitent pas l'élaboration de plans pour chaque parcelle de forêt, et la loi ne prévoit aucune disposition particulière à cet effet.

Assez rarement, les lois disposent que les plans d'aménagement sont juridiquement contraignants. Ainsi, d'après la loi portugaise, des plans d'aménagement régionaux doivent être établis en collaboration avec les opérateurs concernés (art. 5-2). Les activités sylvicoles doivent s'exercer conformément aux plans d'aménagement approuvés, tant dans les forêts domaniales que dans les forêts privées excédant une certaine superficie (art. 5-5). Lorsque les propriétaires ne respectent pas les prescriptions des plans généraux d'aménagement forestier, les autorités forestières peuvent se substituer à eux d'office (art. 6-4). La loi espagnole sur la protection des espaces naturels et de la flore et la faune sauvages impose l'élaboration de plans de gestion pour toutes les ressources naturelles et précise leur contenu. Ces plans ont un effet contraignant et prévalent sur tout plan d'utilisation des sols ou d'une autre nature.

Traditionnellement, la mise en œuvre des plans d'aménagement, ou à tout le moins le contrôle de l'exploitation, s'opère moyennant des permis d'exploitation délivrés à la demande des personnes intéressées. En Grande-Bretagne, un permis est généralement requis quel que soit de statut des terres concernées (art. 9). Il peut être refusé «dans l'intérêt d'une bonne foresterie», de l'agriculture ou du district, ou encore pour permettre la mise en défens des jeunes plants (art. 10-2). La loi suisse assujettit généralement les coupes à une autorisation du service forestier, mais les cantons peuvent accorder des exceptions (art. 20). En Autriche, des permis du service forestier sont exigés pour les abattages qui laissent subsister moins de 60 pour cent du couvert. A Chypre, les droits d'exploitation de toute nature portant sur les forêts domaniales ne peuvent être obtenus que moyennant un permis délivré par le directeur des forêts (art. 8). La loi allemande n'impose pas d'autorisation formelle pour l'exploitation - sauf pour les défrichements - mais des dispositions plus restrictives peuvent être prises par les lois des Länder (art. 9). La loi forestière irlandaise fait obligation à toute personne qui entend déraciner un arbre de plus de dix ans d'âge ou abattre tout arbre d'en informer les autorités forestières compétentes (à moins que l'arbre ne soit déraciné ou abattu en vertu d'une licence de coupe); le ministre concerné peut alors s'y opposer en notifiant sa décision d'interdiction à l'intéressé (art. 39).

Parmi les lois les plus récentes, certaines appréhendent différemment la question des autorisations d'exploitation. En Finlande, les propriétaires doivent communiquer aux autorités leur intention d'exploiter. Si celles-ci ont des raisons de croire que les conditions légales pourraient ne pas être respectées ou que la régénération serait insuffisante, elles peuvent imposer des garanties, telles que des sûretés ou cautions, en vue d'assurer l'exécution des obligations liées à la régénération (art. 14 et 15). En cas d'échec de ce processus, l'activité peut être interdite (art. 16). En Norvège aussi, pour autant que la gestion forestière soit effectuée dans le respect de la loi, les propriétaires peuvent simplement marquer les arbres et les couper, sauf dans certains cas particuliers (art. 15 et 16). Si l'exploitation se fait en violation de la loi, le service forestier peut l'interdire ou imposer des conditions particulières (art. 21). En vertu de la loi suédoise, une autorisation est exigée pour les coupes dans les forêts protégées ou dans celles où la régénération est difficile (art. 16). Dans les autres cas, les propriétaires de forêts doivent seulement déclarer les coupes qu'ils entendent effectuer, en précisant de quelle manière ils veilleront aux intérêts de la conservation (art. 14). Enfin, selon le décret forestier flamand, les coupes prévues par les plans d'aménagement n'ont pas à être déclarées.

2.3. Participation de la population en matière de forêts

2.3.1 Participation dans le domaine de la politique et de l'administration forestières

Les lois forestières en vigueur en Europe occidentale, comme dans les autres régions du monde, consacrent une implication grandissante du public dans les institutions forestières et les processus d'élaboration des politiques forestières. Cette tendance se traduit dans les lois de diverses manières. Certaines prévoient la participation du public à l'élaboration des plans d'aménagement ou aux processus de délimitation des aires protégées. Par exemple, la loi autrichienne habilite les citoyens concernés à participer à la rédaction des «plans forestiers régionaux» et des «plans des zones de danger». Selon la loi fédérale allemande, les structures publiques et les propriétaires concernés doivent tous être consultés pendant l'élaboration des «plans-cadres forestiers» (art. 7). En Finlande, en préparant les plans-programmes forestiers, les centres forestiers doivent collaborer avec les parties concernées par les forêts dans la région considérée (art. 4). La consultation des propriétaires, municipalités et autres autorités est requise avant le classement par l'Etat des «forêts de protection» ou des «zones de protection» (art. 12).

En vertu de la loi portugaise, les autorités doivent encourager la participation des différents groupes sociaux, professionnels et socio-économiques à l'élaboration et la mise en œuvre de la politique forestière, et la participation des citoyens est expressément requise. Les autorités compétentes doivent veiller à concilier les intérêts conflictuels en présence lors de la mise en œuvre de la politique forestière (art. 3). Les plans régionaux d'aménagement forestier doivent être soumis à l'examen du public avant leur approbation (art. 5-2). La loi prévoit, en général, la mise en place d'incitations en faveur des associations de producteurs forestiers privés (art. 17). La loi espagnole sur la protection des espaces naturels et de la flore et la faune sauvages prescrit l'information et la consultation du public au cours du processus d'adoption des plans de gestion des ressources naturelles. Même pendant ce processus, les activités contraires aux objectifs du projet de plan ne peuvent pas être entreprises (art. 5-7). La loi suédoise prévoit la consultation des villages Sami concernés dans les cas où des coupes doivent être autorisées dans les zones d'élevage de rennes, afin de tenir compte des besoins spécifiques de ces derniers (art. 20 et 31).

En France, une modalité de participation des propriétaires forestiers aux actions de l'administration concernant leurs terres est prévue à travers la désignation des administrateurs des centres régionaux de propriétaires forestiers, qui sont compétents pour promouvoir le développement de la foresterie privée et approuver les plans d'aménagement. Le code forestier dispose que 2/3 des administrateurs sont élus par les propriétaires des forêts dépassant une certaine superficie et 1/3 par les organisations des propriétaires forestiers privés (art. L. 221-3). La loi norvégienne impose une obligation plus stricte à l'administration selon laquelle les personnes affectées par une décision quelconque des autorités forestières doivent pouvoir être entendues, sauf dans le cas où une action urgente est nécessaire (art. 12 et 13). Elle exige également que les projets de classement des «forêts de protection» soient soumis à l'examen du public pendant au moins quatre semaines (art. 32).

Même lorsque la participation du public n'est pas expressément requise par la législation forestière, elle peut être incluse, en pratique, dans les processus de décision en matière de forêts, ou encore résulter d'autres lois. En Suisse, par exemple, bien que la loi forestière fédérale n'en dise rien, en pratique les plans d'aménagement font toujours l'objet de consultations dans les cantons. Les règlements fédéraux pris pour l'application de la loi forestière fédérale font obligation aux cantons de tenir le public régulièrement informé des questions relatives à la planification de la gestion forestière (art. 18).

De multiples lois encouragent la participation des acteurs concernés aux processus décisionnels par la création d'organes consultatifs pour les questions forestières ou connexes. Un conseil forestier consultatif, au sein duquel les parties intéressées (industries forestières, associations d'agriculteurs, défenseurs de l'environnement, institutions de recherche, etc.) sont largement représentées, est institué par la loi portugaise (art. 15). De même, la loi danoise crée un conseil forestier ayant un rôle consultatif (art. 41 et 42). Un comité national et des comités régionaux, à statut consultatif, sont également institués par la loi britannique (art. 37 et 38). La loi belge habilite le gouvernement à créer, dans la région wallonne, une commission consultative comprenant les propriétaires, les usagers et les associations de protection de la nature (art. 186bis). La loi forestière irlandaise de 1946 autorise aussi le ministre compétent à instituer un comité consultatif composé d'experts en la matière, ainsi que d'un représentant des entreprises de reboisement et d'un propriétaire forestier (art. 10).

Cette évolution générale vers des processus de participation plus ouverts montre que l'accès à l'information et la transparence des procédures revêtent une importante croissante dans la législation forestière. Ceci concerne tant la circulation de l'information et les débats au sein des parlements ou d'autres enceintes politiques, l'échange d'informations et les processus d'arbitrage entre différents groupes d'intérêt, que le dialogue continu entre les propriétaires forestiers et les autorités publiques. On peut en dire autant s'agissant de la collecte et de la diffusion des informations techniques sur les forêts -les nouvelles lois prévoient des systèmes de contrôle et d'évaluation qui génèrent des informations sur la santé des forêts, leur composition ligneuse, l'impact de leurs utilisations sur les écosystèmes et la biodiversité. On assiste également à une plus forte demande d'informations sur les performances économiques des entreprises forestières et sur les coûts des services rendus au public. A des fins de rationalisation institutionnelle, on trouve des dispositions sur l'organisation des services et la définition des compétences, ainsi que sur la communication entre les services publics et les organisations non gouvernementales. Tout cela nécessite des règles procédurales pour la prise des décisions inter-institutionnelles, la désignation de services chefs de file, l'organisation d'auditions publiques, la réalisation d'études d'impact sur l'environnement et la mise en œuvre de procédures d'évaluation. Cela conduit aussi à distinguer les compétences en matière d'investissement et de développement de celles concernant la protection des ressources. D'où la tendance croissante à séparer plus nettement les fonctions normatives des services forestiers de leur rôle de gestionnaires de terres forestières.

2.3.2 Promotion des approches de gestion participative

La gestion participative (collaborative management) s'entend ici d'un ensemble de méthodes destinées à renforcer la participation des individus et des groupements à la gestion forestière à l'échelon local. Elles peuvent faire appel à la collaboration entre propriétaires ou usagers des forêts et entre des individus ou des communautés, d'une part, et l'administration forestière, d'autre part.

La gestion participative peut prendre des formes multiples. Ainsi, dans beaucoup de pays d'Europe occidentale, il y a une longue tradition de gestion forestière communale et il existe encore des forêts communales dans plusieurs pays. Toutefois, rares sont les dispositions légales explicites qui traitent de ces forêts ou qui encouragent la participation des individus ou des groupes locaux aux formes communautaires de gestion forestière. En vertu de la loi italienne de 1923, les communes propriétaires de forêts peuvent constituer des aziende speciali (entreprises spéciales) pour la gestion des forêts et des pâturages. Ces aziende sont créées par le conseil municipal, dont les membres sont élus par les citoyens, et supervisées par une commission composée d'experts désignés également par le conseil municipal (art. 139-149). La loi chypriote prévoit la possibilité de placer des forêts communales sous l'autorité de commissions villageoises, lesquelles sont habilitées à adopter des règles pour leur gestion, sous réserve d'approbation par le directeur des forêts. Les villageois peuvent récolter certains produites forestiers sans permis (art. 9). La loi turque permet d'allouer des terres forestières à des communautés villageoises aux fins de plantation, en fournissant une assistance technique et des plants à celles qui le souhaitent (art. 57). Dans les cinq ans qui suivent, ces plantations peuvent alors être inscrites au nom du planteur.

Plus communément, des lois récentes d'Europe occidentale mettent l'accent sur la collaboration entre les propriétaires de forêts privées, étant donnée l'importance de cette forme de tenure forestière dans la région. Par exemple, la création d'associations et de coopératives pour la réalisation d'activités forestières est souvent encouragée par les lois et les programmes de financement, y compris par ceux de la Communauté européenne décrits ci-dessous. En outre, il arrive que la loi organise la coopération ou envisage des accords spécifiques entre de telles entreprises forestières privées et la puissance publique.

En Allemagne, la loi fédérale consacre des dispositions détaillées aux «affiliations sylvicoles commerciales privées», que les propriétaires forestiers peuvent constituer en vue d'améliorer la gestion et de pallier les inconvénients du morcellement (art. 16-20). Pour être formellement reconnues, ces affiliations doivent, entre autres conditions, se doter d'une «charte» qui décrit leurs fonctions et prévoit des procédures disciplinaires en cas de non-respect de ses clauses par les membres. Des «organisations sylvicoles commerciales de droit public», ayant le statut d'entreprises publiques, peuvent être créées dans les régions les plus défavorisés par les propriétaires privés, à condition que les 2/3 au moins de ces derniers y consentent et lorsque l'autorité compétente les a vainement incités à constituer une affiliation sylvicole commerciale privée (art. 21-36). Les associations forestières que lesdites affiliations et organisations créent en vue d'adapter la production sylvicole aux exigences du marché peuvent également recevoir une reconnaissance formelle (art. 38 et 39).

En France, des centres régionaux de la propriété forestière sont établis dans le but de développer la productivité des forêts privées, la collaboration entre propriétaires et la vulgarisation, ainsi que pour l'élaboration de plans régionaux et l'approbation de plans simples de gestion. Ceux-ci doivent être établis par les propriétaires des forêts susceptibles d'être aménagées et exploitées régulièrement, et dont la superficie et d'autres caractéristiques sont fixées par l'administration (art. L.222). Les propriétaires doivent alors se conformer aux prescriptions du plan. Les forêts privées peuvent également être gérées sur la base de contrats passés avec l'Office national des forêts (art. L.224-6). La loi fédérale suisse prévoit aussi expressément la possibilité pour la Confédération d'assigner aux associations forestières des tâches liées à la conservation des forêts (art. 32).

En Italie, les lois forestières régionales prévoient de nombreuses mesures financières d'incitation aux actions entreprises collectivement. Ainsi, la loi du Friuli de 1970 accorde des subventions aux consortiums, coopératives ou autres entités qui s'engagent à mettre en place des infrastructures forestières. Bien que la gestion forestière collective à des fins multiples soit pratiquée de longue date en Italie, notamment dans le Nord, la loi forestière ne leur consacre que de rares dispositions. Par exemple, des aides financières publiques peuvent être consenties pour l'amélioration des pâturages dans les régions de montagne, y compris lorsque les travaux sont effectués par des associations d'usagers, indépendamment de la propriété des terres concernées (art. 93). Une assistance technique gratuite peut être fournie aux fins de protection des petits propriétaires forestiers et pour les encourager à créer des associations dans les régions de montagne (art. 105).

2.4. Réglementation et promotion de la foresterie privée

Eu égard aux forêts communales et privées, les lois forestières récemment adoptées ou modifiées tendent généralement à alléger les mesures de réglementation et de contrôle en matière de planification de la gestion, d'exploitation forestière et de commercialisation des produits forestiers. Dans cet esprit, elles fixent des conditions minimales et des critères de performance, confirmant les droits des propriétaires forestiers d'avoir recours aux services offerts par le secteur privé. Des lignes directrices sur les meilleures pratiques de gestion et sur les approbations tacites sont de plus en plus utilisées. En plus des aides au développement de la production forestière, de nouvelles incitations visent à promouvoir la protection de la biodiversité et la conservation de la nature. On assiste à un soutien accru en faveur des mesures destinées à remédier aux problèmes structurels par des encouragements à la recherche et au transfert de technologies, par une plus grande intégration du secteur forestier aux autres secteurs de la production primaire et par une amélioration de la compétitivité des industries du bois sur les marchés nationaux et internationaux.

La plupart des lois examinées imposent nombre de restrictions et d'obligations aux propriétaires forestiers privés, mais beaucoup d'entre elles leur reconnaissent le droit d'être indemnisés des pertes qu'ils subissent en conséquence. Bien souvent, ces limitations quant à l'utilisation des forêts privées ne résultent pas uniquement de la législation forestière; elles peuvent aussi être liées aux conditions d'accès aux financements (comme indiqué dans le paragraphe suivant).

La loi britannique exige un permis pour les coupes d'arbres en forêt privée, sauf en cas d'éclaircie ou lorsqu'il s'agit de petites quantités (art. 9). Cependant, une compensation peut être accordée aux propriétaires à qui un permis de coupe a été refusé (art. 11). Des terres privées peuvent être affectées à la foresterie en vertu de conventions conclues entre l'administration et le propriétaire concerné (art. 5). Dans ce cas, un plan de travail spécifique est approuvé et les demandes de permis de coupe, présentées conformément à ce plan, ne peuvent être rejetées que de façon exceptionnelle (art. 14). Aux termes de la loi chypriote, des forêts peuvent être volontairement placées sous la protection, le contrôle et la gestion de l'administration. Les dispositions relatives à la prise en charge des coûts, à la durée, etc. sont convenues d'un commun accord entre le propriétaire et de directeur des forêts (art. 10).

En Italie, la loi de 1923 permet aux propriétaires de terres à reboiser d'effectuer eux-mêmes les travaux requis et de demander ensuite le remboursement des dépenses engagées (art. 55). Aux fins d'exécution de travaux sur des terres soumises à des restrictions par application de la loi, l'administration forestière peut constituer des consortiums avec les autorités locales. En pareil cas, les propriétaires peuvent réaliser eux-mêmes les travaux ou confier leurs terres aux autorités pour la durée des travaux (art. 76). Ils peuvent aussi constituer des consortiums avec d'autres propriétaires dans le même but (art. 79). Un consortium peut également être créé d'office, auquel cas les propriétaires qui ne souhaitent pas en faire partie peuvent vendre leur terre au consortium ou en être expropriés par ce dernier (art. 79). S'agissant des anciennes associations établies par les propriétaires forestiers pour la gestion de leurs forêts, telles que les università agrarie, comunanze, etc., la loi dispose que les décisions sont prises à la majorité «des intérêts» en présence et au moins 1/3 des membres; elles sont donc applicables aux groupes minoritaires en dépit de leur éventuel désaccord.

En Espagne, en vertu de la loi de 1957, l'administration forestière peut réglementer ou limiter l'exploitation des forêts par leurs propriétaires. Lorsqu'une forêt de production privée est importante du point de vue économique ou social, l'administration forestière peut exiger qu'elle soit exploitée dans le respect du plan d'aménagement ou du plan technique correspondant. Les forêts inscrites sur la liste de zones de protection doivent dans tous les cas être gérées conformément aux plans techniques élaborés par le ministère de l'agriculture. L'administration forestière peut exiger de leurs propriétaires qu'ils établissent des plans d'amélioration, qui pourront bénéficier du maximum d'assistance financière prévu par la loi (art. 30). Il peut être envisagé de remembrer des forêts, qu'elles soient publiques ou privées, lorsque plusieurs aires forestières, mises ensemble, ont un grand potentiel productif et peuvent constituer des unités de gestion, lorsque leur regroupement présente un intérêt pour l'intégration des activités forestières et pastorales ou pour les besoins du reboisement. A cet effet, des associations peuvent être constituées volontairement (si au moins 60 pour cent de la superficie totale de la zone est concernée) ou d'autorité et elles peuvent obtenir des aides financières (art. 31). La direction générale des forêts peut aussi, après avis des communes concernées, engager la procédure de remembrement prévue par la loi spécifique y relative (art. 36). Les propriétaires peuvent être tenus de prendre des mesures phytosanitaires, pour lesquelles ils peuvent solliciter l'assistance financière prévue par la loi (art. 65). L'administration forestière peut également créer, avec les propriétaires forestiers, des associations pour le reboisement, en leur accordant des droits sur les plantations (art. 42). Le reboisement peut même être rendu obligatoire par décret lorsqu'il est d'utilité publique (art. 50).

En Turquie, la loi forestière de base dispose que les plans d'aménagement des forêts privées (dont la définition exclut celles qui ont moins de trois hectares) doivent être élaborés par les propriétaires ou, en cas de carence, par l'administration à leur frais (art. 51). Selon la loi portugaise, toute activité sylvicole réalisée dans une forêt d'une certaine superficie (définie par les plans régionaux) doit être conforme à un plan de gestion approuvé par l'autorité centrale (art. 5-5). Les aides publiques comprennent les indemnités pouvant être allouées par un fonds destiné à dédommager les propriétaires de terres situées dans des écosystèmes fragiles auxquelles des mesures restrictives ont été imposées, ainsi que la possibilité d'appuis pour la délimitation des forêts entre propriétaires (art. 18). Le décret forestier flamand fait obligation aux propriétaires de forêts supérieures à cinq hectares d'élaborer un plan de gestion. Une fois le plan approuvé, les coupes qu'il prévoit n'ont pas à être déclarées à l'administration.

Certaines lois scandinaves tendent à accorder un plus grand degré d'indépendance aux propriétaires forestiers. Comme indiqué plus haut, les législations finlandaise et norvégienne laissent les propriétaires maîtres du choix et de la coupe des arbres à exploiter, sans avoir à en informer l'administration, pour autant que, ce faisant, ils se conforment aux prescriptions de la loi. Les autorités peuvent, de leur propre initiative, interdire des activités déterminées ou requérir des informations spécifiques concernant la gestion. L'administration forestière peut demander un extrait du plan de gestion élaboré volontairement dans certains cas précis - notamment lorsqu'il y a soupçon de commission d'une infraction ou lorsque le propriétaire sollicite le marquage de ses arbres par le service forestier. Aux termes de la loi finlandaise, les propriétaires doivent réaliser de nouvelles plantations après les coupes de régénération (art. 9). La loi norvégienne impose plus généralement aux propriétaires de restaurer la productivité après les coupes (art. 16). Si la gestion d'une forêt, conçue de manière à préserver sa biodiversité, occasionne au propriétaire une perte significative, un permis spécifique destiné à minimiser la perte peut lui être délivré, à moins qu'un financement public ne lui soit alloué (art. 11). Si dans les forêts de protection même le ramassage du bois domestique est restreint, une indemnité compensatrice doit être allouée au propriétaire (art. 12-3). Les coupes dans les forêts de protection doivent être notifiées d'avance à l'administration, laquelle doit marquer les arbres concernés (art. 33).

En vertu de la loi suédoise, les propriétaires sont tenus de réaliser et d'entretenir les nouvelles plantations (art. 8) et d'informer le conseil forestier communal des opérations de coupe, des travaux de drainage et de la manière dont ils entendent «satisfaire aux intérêts de la conservation de la nature et de la protection du patrimoine culturel lors des coupes projetées» (art. 14). Au Danemark, le ministre compétent peut convenir de mesures sylvicoles avec les propriétaires forestiers (art. 21). Une disposition spécifique concernant le morcellement des propriétés charge le ministère de promouvoir le «regroupement» des parcelles ou l'adoption de mesures sylvicoles conjointes (art. 26). Il est aussi habilité à mettre en réserve et à gérer comme telles des aires avoisinant des forêts qui revêtent une importance particulière, même si elles sont privées (art. 7-2).

2.5. Aides financières publiques au secteur forestier

Les règles relatives au financement des activités forestières par l'Etat occupent une place importante dans la législation de plusieurs pays. Dans certains cas, les financements publics servent à indemniser des propriétaires dont les droits ont été restreints ou supprimés. Ainsi, déjà en 1923 la loi italienne disposait que lorsque des restrictions sont imposées à des propriétaires forestiers, ceux-ci doivent recevoir une compensation pour la perte financière qu'ils subissent (art. 17). De même, les propriétaires qui sont contraints d'exécuter des travaux particuliers sur leurs terres peuvent obtenir une indemnité annuelle (art. 50). Le plus souvent, cependant, les lois prévoient le financement d'actions déterminées, telles que la réalisation de plantations ou l'aménagement de forêts existantes.

La loi finlandaise sur le financement de la foresterie durable prévoit l'octroi d'aides publiques en faveur des actions visant à assurer la gestion durable des forêts, y compris leur protection (art. 1). Les aides sont accordées au vu d'un plan d'activités jugé satisfaisant (art. 3). La loi exclut expressément le financement des travaux occasionnés par la destruction des forêts ou qui constituent de toute façon une obligation du propriétaire (art. 4), réservant ainsi les aides à des actions plus entrepreneuriales. Les types de travaux autorisés sont définis et incluent notamment la régénération, l'entretien de jeunes forêts, la récolte du bois-énergie, la construction de routes (art. 5). Les aides peuvent prendre la forme de dons ou de prêts, selon le type d'action à financer (art. 8). Le pays est divisé en zones pouvant avoir droit à des pourcentages de financement différenciés (art. 9) et les conditions générales applicables aux prêts sont spécifiées (art. 12).

En Allemagne, la loi fédérale dispose que la foresterie doit être soutenue par l'Etat, en particulier dans le but de garantir la rentabilité des investissements relatifs à la conservation des forêts et à la gestion durable. Des aides peuvent être accordées aux associations forestières créées en vertu de ladite loi ou à des propriétaires privés (art. 41). La loi de 1990 relative au fonds forestier de commercialisation crée un fonds spécifique destiné à promouvoir les produits forestiers allemands et à développer leur commerce. Selon la loi suédoise, l'Etat peut accorder des subventions en vue d'assurer notamment la régénération des forêts de feuillus de grande valeur (art. 28).

La loi espagnole permet de fournir une assistance technique, des subventions et des avances pour les travaux d'améliorations des forêts lorsque certaines conditions sont réunies. Il faut notamment que le reboisement envisagé soit accessoire au traitement du couvert forestier principal, que des routes forestières soient prévues ou que l'objectif poursuivi soit le développement des pâturages (art. 32). Des dispositions similaires concernent les aides au reboisement et aux activités connexes (art. 43 et 44). Dans ce cas, les travaux envisagés doivent avoir un but économique et social précis ou contribuer à la protection des bassins versants. Lorsqu'une assistance technique est fournie pour le reboisement, les forêts concernées sont placées sous le contrôle de l'administration (art. 49). Des aides économiques particulières sont également prévues en faveur des travaux de conservation des sols sur les terres publiques autant que privées (art. 59).

La loi portugaise énumère les objectifs des activités forestières pouvant être soutenues par l'Etat, qui comprennent notamment le développement et l'extension du domaine forestier, l'amélioration du matériel de reproduction, la construction d'infrastructures, la formation et l'assistance technique (art. 9). Un fonds de financement est institué à cet effet (art. 18). La loi requiert aussi la mise en place d'un système d'assurance obligatoire, à des coûts raisonnables, qui doit être progressivement appliqué à toutes les activités forestières (art. 20). Un fonds forestier national est également institué par le code français, essentiellement pour couvrir les dépenses liées au boisement, au reboisement, aux travaux sylvicoles et à toutes activités visant à accroître la disponibilité des ressources forestières (art. L.531-1). Le ministre compétent doit veiller au respect de ces conditions, lesquelles s'imposent aux propriétaires privés ayant fait appel au fonds pour obtenir des financements. Les recettes dérivant de la fiscalité forestière sont versées dans ledit fonds (art. L.531-2). En France, d'autres fonds publics (pour le développement rural, la gestion des terres, etc.) peuvent octroyer des dons ou des prêts à faible taux d'intérêt au profit des activités forestières.

Un mécanisme particulier de financement des investissements forestiers, liés à des revenus déterminés provenant des forêts, est prévu par la loi norvégienne. Celle-ci crée un fonds forestier destiné à promouvoir la sylviculture, la production forestière et les activités profitant aux forêts sevrant à l'approvisionnement en bois et aux forêts appartenant à un même propriétaire (art. 46). Le fonds est alimenté par les produits des ventes et des expropriations d'arbres ou de bois, ou de leur exploitation par le propriétaire à des fins non agricoles ou non forestières (art. 41). La chambre locale d'agriculture peut prescrire des mesures visant à rétablir la productivité des forêts, à financer avec les ressources du fonds ou moyennant d'autres formes d'interventions publiques (art. 23-1).

Certaines lois prévoient des mesures visant à s'assurer que les projets ayant reçu un financement soient effectivement et convenablement mis en œuvre. C'est le cas de la loi danoise, qui permet d'accorder des subventions pour le développement de forêts de feuillus, en particulier aux fins de plantation, pour la régénération des réserves forestières, pour la production de semences et pour la recherche (art. 19). Le ministre concerné peut décider le remboursement des subventions si de fausses informations ont été fournies, si les conditions imposées n'ont pas été respectées ou si le projet n'est pas exécuté conformément à la demande initiale (art. 34).

En vertu de la loi italienne de 1923, les fonds disponibles pour le reboisement ou la restauration des forêts dégradées ne peuvent être entièrement versés que cinq ans après la pleine réalisation de la plantation (art. 90). La loi finlandaise décrit en détail les obligations incombant aux bénéficiaires des aides. En cas de prêt, la propriété est hypothéquée (art. 13). Les terrains ayant bénéficié de financements doivent être convenablement entretenus pendant au moins quinze ans. Les prêts doivent être immédiatement remboursés lorsque les terrains sont exploités à des fins commerciales en dépit de l'interdiction d'une telle exploitation (art. 15 et 16). Des dispositions spécifiques sont consacrées aux modalités de recouvrement des prêts (art.s 28-30).

2.6. Harmonisation avec les politiques et législations se rapportant aux forêts

Désormais, on s'accorde sur la nécessité de planifier et de gérer, de manière intégrée, les activités forestières et celles s'y qui rapportant, comme l'agriculture, le pâturage et celles pouvant s'exercer dans les terrains forestiers ou les espaces avoisinants. Dans les lois étudiées, on trouve rarement des dispositions consacrant ce concept en termes pratiques, en exigeant par exemple l'établissement de plans de gestion intégrée. La nécessité d'harmoniser la politique forestière avec d'autres politiques connexes est cependant prescrite par la loi portugaise qui prévoit, à cette fin, la création d'une commission interministérielle (art. 13). Dans les pays d'Europe occidentale, cette question est également évoquée par d'autres lois, en particulier par celles concernant l'environnement ou l'aménagement du territoire. Les lois italiennes relatives à la montagne et au développement régional de 1952 et 1971 traitent des comunità montane, entités locales ayant des compétences spécifiques en matière de gestion agro-sylvo-pastorale intégrée.

Il n'est pas rare de trouver, dans les lois forestières, des dispositions régissant les activités connexes à la foresterie, en particulier le pâturage. Ainsi, la loi italienne réglemente le pâturage sur des terres soumises à des restrictions pour des motifs hydrogéologiques et elle l'interdit dans les forêts jeunes ou dégradées (art. 9). La loi espagnole dispose que le pâturage doit être conçu de manière à être compatible avec la protection et la mise en valeur des forêts et à permettre le parcours du plus grand nombre possible de têtes de bétail. Dans les forêts entièrement couvertes d'arbres et les terres exposées au risque d'érosion, si les propriétaires n'exécutent pas les mesures de conservation prescrites par l'administration, le pâturage peut être limité ou interdit. Dans les forêts d'utilité publique, la priorité doit être donnée au bétail des riverains et à la satisfaction de leurs besoins, les pâturages en surplus pouvant être aliénés (art. 35).

La législation belge de 1854 réglemente les droits de parcours, entre autres droits d'usage, dans le sens de leur élimination progressive (art. 84 et 85) et habilite l'administration à fixer leur contenu et leurs conditions d'application (art. 93-102). Le pâturage est également réglementé par le code français (art. L.136 et 137).

Dans beaucoup de pays, la question de l'utilisation des terres forestières à d'autres fins se pose avec acuité et l'on se demande si, et comment, elle devrait être appréhendée par la législation forestière. Le plus souvent, cette dernière ne traite pas des aspects généraux de l'aménagement du territoire. La loi suisse aborde cependant cette question jusqu'à un certain point. Elle assujettit le défrichement des terres forestières à l'obtention d'une autorisation qui ne peut être délivrée qu'exceptionnellement lorsque: (a) l'activité projetée ne peut pas être entreprise ailleurs; (b) les conditions relatives à la gestion foncière sont réunies; et (c) le défrichement ne présente pas de risque sérieux pour l'environnement. Elle précise que les intérêts financiers ne peuvent pas prévaloir, que la nature et les paysages doivent être protégés et que, dans tous les cas, ces exceptions à l'interdiction générale de défricher ne peuvent être que temporaires (art. 5). Ces dispositions ont clarifié les rapports de la législation forestière avec celle relative à l'aménagement du territoire, en ce sens qu'aucune terre forestière ne peut être classée dans une zone constructible sans une autorisation préalable de l'autorité forestière. Les demandes de permis de déboiser et de construire doivent être traitées de manière coordonnée par les autorités respectivement compétentes (Petitpierre, 1999).

L'absence d'instruments adéquats d'aménagement du territoire peut être à l'origine de conflits préjudiciables aux forêts. En Turquie, la Constitution et la législation forestière donnent une définition détaillée des forêts, qui a été progressivement modifiée afin d'en exclure certaines catégories de terres. Cependant, on a tendance à délimiter les forêts sans tenir compte des autres usages concurrents du sol, même si les pressions de la spéculation immobilière se font souvent sentir. La plupart des amendements législatifs ont été largement critiqués, car ils ont conduit à légaliser le déboisement de vastes superficies. Cela a donné lieu à de nombreux litiges qui ont été portés devant les tribunaux.

2.7. Protection contre les incendies de forêt

Dans la législation étudiée, on trouve fréquemment des dispositions sur la protection contre les incendies de forêts. La loi espagnole contient un chapitre sur la protection contre les incendies et l'assurance forestière, chargeant le ministre compétent de certaines tâches en la matière, notamment de réaliser des études relatives aux méthodes de lutte contre les incendies. Lorsqu'une zone forestière est déclarée «zone à risques», les propriétaires privés concernés doivent créer et entretenir des coupe-feu (art. 70) et les feux agricoles y sont soumis à autorisation de l'autorité forestière (art. 71). En vertu de la loi norvégienne, lorsqu'une forêt a été endommagée par un incendie, un fléau ou une catastrophe naturelle, la compagnie d'assurance concernée pourra être tenue de réparer les dommages en versant directement au service forestier les coûts du reboisement et jusqu'à 30 pour cent du total de l'indemnité restante. S'il s'avère que les mesures sylvicoles permettant la régénération ne peuvent bénéficier d'aucun financement, la chambre locale d'agriculture peut décider qu'une partie des ressources du fonds forestier soient utilisées à cet effet (art. 22-2).

La loi italienne de 1975 sur la protection des forêts contre les incendies requiert l'élaboration de plans régionaux et inter-régionaux spécifiant dans quelles mesures les forêts risquent de brûler, indiquant les moyens de lutte contre les incendies et identifiant les mesures supplémentaires qui s'imposent (art. 1-3). Les administrations régionales doivent signaler, chaque année, les périodes pendant lesquelles les risques d'incendies sont les plus sérieux et au cours desquelles sont interdits les feux d'éclaircie et tous les actes pouvant entraîner leur propagation. Une disposition importante interdit les constructions sur les terres détruites ou endommagées par le feu afin de prévenir les incendies allumés à des fins de spéculation foncière. Cependant, par un amendement de cette disposition, il a été procédé au déclassement de cette infraction, qui n'est plus qu'administrative (après avoir été pénale). Quant à la loi portugaise susmentionnée, elle impose la mise en place d'un système d'assurance obligatoire couvrant, notamment, les dommages causés aux forêts par des incendies.


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