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4. Quels ont été les effets du développement rural consécutifs à une mise en œuvre réussie de l’ADRD?

Amélioration du statut des femmes et des enfants

RÉSUMÉ

Onze cas ont été sélectionnés pour montrer les résultats positifs du développement rural qui résultent de l'application des normes du développement agricole durable.

Kenya: Bénéfices concernant la santé et la nutrition des enfants

L’association pour une meilleure gestion des terres (ABLH) promeut des méthodes à faibles coûts d’agriculture conservatoire pour réduire la pauvreté, améliorer les conditions de vie des familles rurales et conforter l’économie locale. Cette approche est connue sous le nom de «investissement quasi nul». Le principe de base est que les familles rurales pauvres ne disposent pas des moyens financiers nécessaires pour investir dans l’amélioration de la production agricole. Ce dont elles ont besoin, ce sont des stratégies permettant d’améliorer leur productivité et leurs revenus grâce à une utilisation optimisée des ressources naturelles et humaines disponibles. La construction de billons associée à l’utilisation de compost et l’application d’engrais verts et de fumier améliore le sol. Une meilleure capacité de rétention en eau du sol et une augmentation de sa teneur en matière organique signifient que ces terres seront plus productives, les cultures plus diversifiées et que les légumes pourront être cultivés plus tard durant la saison sèche. Une fois que ces investissements sont réalisés, aucun autre investissement ne sera plus nécessaire pendant les 2 ou 3 années suivantes. Plusieurs espèces de légumes et d’arbres fruitiers son installés, incluant le chou vert, les oignons, les tomates, le chou pomme, les fruits de la passion, le pois cajan, les épinards, le poivre, les haricots verts et le soja.

Les groupes d’entraide estiment que la sécurité alimentaire des ménages a été considérablement améliorée depuis l’adoption de pratiques agricoles conservatoires. Auparavant, ils devaient acheter du maïs et des légumes lorsqu’il y avait pénurie alimentaire pendant la saison sèche. Ils étaient obligés de vendre leur force de travail, de dépendre des envois d’argent d’autres membres de la famille travaillant ailleurs dans le pays ou de vendre la récolte de leurs cultures de rente. Ils étaient obligés de procéder ainsi alors que le prix des aliments était élevé et ceux de la main-d’œuvre et des récoltes de leurs cultures de rente étaient bas. Plusieurs familles comptent aussi sur les produits de la nature ramassés dans la forêt. Mais elles se sont rendues compte actuellement qu’en travaillant sur leurs propres exploitations au lieu de vendre leur force de travail, elles améliorent leurs revenus. Elles ont compris que l’investissement en capital naturel sur leurs propres exploitations procure des revenus agricoles plus importants. La vente de force de travail a pratiquement disparu. Les enfants ont été les grands bénéficiaires du changement, leur santé a été améliorée grâce à une plus consommation importante de légumes et au raccourcissement des périodes de déficit alimentaire. Selon une étude réalisée sur 26 communautés dans six districts, 75 pour cent de ménages sont délivrés de la faim pendant l’année et la proportion de ménages qui achètent les légumes est passé de 85 à 11 pour cent.

Source: Jim Cheatle, ABLH, Kenya <[email protected]>

Ouganda: Développement du cheptel familial

Le «Projet international génisses» (HPI) a introduit la pâture zéro pour la production laitière en Ouganda. Ceci implique de maintenir à l'étable des vaches laitières de bonne qualité, en coupant les fourrages et en les transportant à l'étable. Le système comprend la production de fourrages de graminées et à partir d'arbres légumineux. La plupart de ces graminées et des arbres fourragers sont cultivés en billon et intercalés avec les cultures vivrières et commerciales, protégeant ainsi le sol et préservant son humidité. Le système améliore également la sécurité alimentaire et la nutrition familiale. Le bétail constitue une source de revenus et de nourriture intéressante pendant la saison sèche et, par ailleurs, les ruminants peuvent utiliser divers sous-produits des cultures et de la transformation des aliments. La collecte du fumier et du compost sur l'exploitation en pâture zéro fournit une source permanente de fertilisants organiques et permet un recyclage rapide des nutriments sur les terres de l'exploitation. Le renforcement des groupes communautaires leur permet d'assurer un soutien et une formation mutuels, ce qui constitue un autre avantage appréciable.

Les génisses laitières sont fournies comme un prêt en espèces. Les agriculteurs remboursent leur emprunt en élevant des veaux femelles qui sont ensuite transférés à un autre agriculteur de la communauté. Le groupe se constitue ainsi un capital qui, de par sa croissance, bénéficie à l'ensemble du programme. Le système de pâture zéro a été introduit en Ouganda par le «Projet international génisses» (HPI) en 1983 et il s'est maintenu malgré les problèmes d'ordre économique et politique. Il a ensuite été adopté par de nombreuses agences, incluant le Ministère de l'agriculture de l'Ouganda et des ONG internationales.

Source: Carolee Black, HPI

Zimbabwe: Le Projet de sécurité alimentaire de Chivi

Ce projet du Groupe de technologies intermédiaires (ITDG) est localisé au sud du Zimbabwe, dans une zone qui est classée dans la dernière catégorie pour ce qui est du potentiel agricole et où la sécheresse sévit 3 années sur 5. L’approche a combiné l’utilisation de technologies régénératrices peu coûteuses et un renforcement de la capacité des agriculteurs à participer aux processus de la recherche et de la vulgarisation au sein même du groupe. Actuellement, les agriculteurs annoncent que depuis 1991, date de mise en place du projet, leurs rendements ont plus que doublé (jusqu’à 100 pour cent d’augmentation). Les principales technologies sont la collecte d’eau (diguettes en damier et fosses d’infiltration) et l’adoption de tuyaux en argile avec des jonctions en ciment armé pour l’irrigation sub-superficielle des jardins potagers des femmes. Environ 35 clubs de «jardins potagers de femmes» produisant et vendant des légumes fonctionnent actuellement et les familles ont assuré leur sécurité alimentaire grâce à une grande diversité des productions et à leur échelonnement sur toute l’année. Selon certains membres de la communauté, «la sécurité alimentaire n’est plus un problème».

Les bénéfices multifonctionnels résultant du projet sont divers. Ainsi, les agriculteurs ont acquis de nouveaux savoir-faire en matière de production alimentaire et la capacité des institutions locales à résoudre ses problèmes a été améliorée. L'apprentissage a augmenté la confiance entre les agriculteurs, en particulier au sein des groupes les plus pauvres. Les femmes se sont davantage engagées dans les processus de prise de décisions au niveau de la communauté. Les agriculteurs sont davantage en mesure de formuler leurs besoins aux institutions chargées de leur fournir des services et les systèmes de recherche et de vulgarisation prennent mieux en compte leurs besoins.

Plus de 5 000 familles ont bénéficié directement d’une amélioration des revenus et de l’alimentation, avec comme conséquences une amélioration spectaculaire de l’habitat et du taux de scolarisation. Environ 10 000 hectares de terres ont été améliorés grâce au développement de petites exploitations de production laitière durables. Plus de 50 groupes communautaires ont été renforcés et ils constituent un moteur pour le développement rural. Le statut des femmes a été amélioré, dans la mesure où plus de la moitié des propriétaires de bétail sont des femmes, dont un certain nombre sont des veuves ayant une famille nombreuse.

Source: Intermediate Technology Development Group

Emplois ruraux et modèles de migration

Inde: Le Projet indo-britannique d’agriculture pluviale (Ouest)

Le projet participatif de conservation des sols et de l’eau est soutenu par DFID et se situe dans les hautes terres du Gujarat, du Rajasthan et du Madhya Pradesh. La dégradation des sols est sévère, les sols sont pauvres et la production des cultures s’avère insuffisante pour subvenir aux besoins alimentaires de la plupart des familles. Le projet travaille avec des groupes locaux composés de 15 à 25 ménages sur les techniques de collecte d’eau, la plantation d’arbres et sur l’amélioration des pâturages. Il existe actuellement 232 groupes dans 70 villages et les fonds collectés par chacun d’entre eux s’élèvent en moyenne à 650 Rs. Ce fonds est généré grâce à l’augmentation de la production agricole (qui représente un total de 151 000 Rs).

Les rendements des cultures de grains pour l’alimentation de base (riz, blé, pois d’Angole et sorgho) sont passés de 400 kg/ha à 800-1 000 kg/ha. L’amélioration de la production de cultures fourragères sur les talus des terrasses a également été très appréciable. L’amélioration de la conservation de l’eau (les niveaux de la nappe phréatique ont été relevés d’un mètre durant les 34 dernières années) a permis une culture en rabi (en saison sèche) pour de nombreux agriculteurs, transformant ainsi une saison improductive en une saison productive, ce qui a entraîné une diminution des migrations saisonnières.

Source: P.S. Sodhi, GVT, Udaipur <[email protected]>

Italie: La culture multifonctionnelle de l’olive crée des emplois locaux

Les oliviers sont cultivés le long des côtes méditerranéennes depuis deux millénaires. Ils contribuent aux moyens d’existence locaux et fournissent des habitats nombreux et variés à la faune. Mais durant les dernières décennies, la région de Cilento a souffert d’une émigration massive de jeunes qui ne veulent plus être des oléiculteurs. La concurrence de la Tunisie, où les coûts de production sont plus bas, joue également et fait qu’actuellement le système est menacé.

Le projet CADISPA coordonné par l'université de Strathclyde collabore avec des groupes locaux dans un grand nombre de pays pour relancer les économies locales. Dans le Cilento, CADISPA-Italie a commencé à travailler avec une coopérative locale de production d'huile d'olive, Nuovo Cilento, pour introduire l'agriculture biologique et de nouvelles méthodes de commercialisation. Actuellement, 130 agriculteurs situés dans le Parc national du Cilento ont adopté l'agriculture biologique. Ils utilisent une large gamme de pratiques de conservation des ressources pour réduire l'utilisation d'intrants et pour recycler comme fertilisant organique des sous-produits de la fabrication de l'huile d'olive. Ils produisent à présent le Cilento Verde, une huile extra-vierge, biologique et de haute qualité. Depuis la relance réussie de la production d'olives, les entreprises coopératives ont diversifié leurs activités, se lançant dans la production de farine de châtaignes sauvages et dans l'écotourisme. Ces nouvelles entreprises sont majoritairement dirigées par de jeunes entrepreneurs, toujours plus nombreux à se fixer dans le Cilento et à mettre en valeur leurs compétences pour produire des biens et des services de haute qualité.

Source: Pretty (1998). La terre vivante

Mexique: Le commerce équitable du café ISMAM

Un exemple d’initiative partie du niveau local, et qui a bénéficié d’une reconnaissance au niveau national se situe au Mexique. « Indigenas de la Sierra Madre de Motozintla » (ISMAM) constitue un groupe d’indiens maya produisant du café biologique dans le Chiapas. L’ISMAM a été créé par de petits producteurs de café pour résoudre des problèmes de faible productivité, de conditions défavorables de commercialisation et d’une pauvreté extrême des familles rurales. En adoptant les techniques biologiques et en améliorant la qualité, la coopérative a surmonté les problèmes posés par la dégradation du sol et par la faiblesse des rendements, pour exploiter une niche du marché qui rentabilise leurs efforts pour l’obtention d’une production correcte du point de vue environnemental. Grâce à une gestion saine et participative et à un travail intense, l’ISMAM a été capable de capitaliser son entreprise, de surmonter les obstacles constitués par le désintérêt initial du gouvernement et par la répression pour devenir une entreprise agro-alimentaire importante, avec ses propres moyens de traitement du café et un accès direct à des marchés d’exportation vers les Etats-Unis, l’Europe et le Japon.

Ils ont commencé à produire des mélanges et du café soluble pour le marché national, en diversifiant leur production agricole pour améliorer la sécurité alimentaire. Non seulement leurs affaires se développent, mais une partie des bénéfices de l’ISMAM est reversée aux comités régionaux de la coopérative pour être investie dans des activités sociales. En 1995, l’ISMAM a reçu le Prix National de l’Agro-exportation des mains du Président du Mexique. La coopérative jouit à présent d’un crédit remarquable, elle bénéficie de l’appui du gouvernement et elle a diversifié ses activités dans un grand nombre de domaines, y inclus l’écotourisme.

Source: Ronald Nigh

Niger: Conservation du sol et de l’eau

Le projet de conservation du sol et de l'eau dans le district d'Illéla est financé par le Fonds international de développement agricole (FIDA). Il constitue un exemple de technologie-clé d'agriculture durable multifonctionnelle, dont l'un des nombreux avantages est l'amélioration de terres anciennement dégradées ou abandonnées. 5 800 ha de terres abandonnées et dégradées des exploitations agricoles d'environ 6 000 ménages appartenant à 77 villages ont bénéficié de l'adoption des «tassas» (technique également connue sous le nom de «zaï» au Burkina Faso). Les interventions à grande échelle en vue de contrôler l'érosion des sols n'avaient pas été concluantes dans la région.

Les tassas sont des trous creusés dans un sol recouvert d’une croûte de battance, fine couche de terre durcie par l’action du vent et de l’eau. Leur profondeur varie de 20 à 30 centimètres. Etant donné que la croûte de battance empêche l’infiltration de l’eau, ces terres sont généralement abandonnées, dépourvues de végétation, parsemées d’affleurements de cuirasses ferrugineuses et elles sont souvent les premiers sites à subir une érosion superficielle. Les trous sont remplis avec du fumier, car dans cette région, les sols manquent de matière organique. Le fumier stimule l’activité des termites pendant la saison sèche, permettant ainsi une meilleure infiltration de l’eau. Lorsqu’il pleut, les trous se remplissent d’eau et les agriculteurs plantent le millet et le sorgho. Les tassas sont normalement utilisés en combinaison avec des cordons de pierres construits en récupérant celles que les agriculteurs enlèvent lors des plantations. Ces méthodes de conservation des sols et de l’eau ont été apprises par les agriculteurs d’Illéla lors d’une visite effectuée au Yatenga, au Burkina Faso, où sur le seul plateau central, environ 100 000 ha ont été ainsi réhabilités. Chacun d’eux produit à présent entre 700 et 1 000 kg de céréales par an. Selon Hassan (1996), les rendements du millet sans tassas, ni demi-lunes ni cordons de pierres en courbes de niveau sont de l’ordre de 150 à 300 kg par ha. Ils atteignent 400 kg par ha avec du fumier les années de faibles précipitations et de 700 à 1 000 kg par ha lors des années pluvieuses. L’utilisation de fertilisants augmente encore les rendements, qui atteignent jusqu’à 650 kg/ha pendant les années de faibles précipitations et entre 1 400 et 1 500 kg/ha les années de bonnes précipitations.

Cette amélioration du sol a permis à la région d’obtenir des rendements moyens du millet de 480 kg/ha, rendements pouvant atteindre 700 kg/ha quand des engrais minéraux sont utilisés (une pratique encore peu répandue). En comparaison, des champs de qualité similaire produisent seulement 130 kg/ha. Selon le FIDA, la disponibilité alimentaire des ménages utilisant cette technique s’est accrue de 20 à 40 pour cent, en fonction des précipitations. Reij (1996) indique que la famille moyenne du Burkina Faso et du Niger utilisant ces technologies d’agriculture durable est passée d’un déficit annuel en céréales de 644 kg (soit l’équivalent de 6,5 mois de déficit alimentaire) à un surplus de production de 153 kg.

Les tassas sont mieux adaptés aux exploitations où une main-d’œuvre familiale est disponible ou lorsque existe la possibilité d’embaucher des ouvriers agricoles locaux. Le système a suscité la mise en place d’un réseau de jeunes journaliers qui maîtrisent cette technique, et qui, au lieu de migrer, vont de village en village pour satisfaire les demandes croissantes de main-d’œuvre des agriculteurs. Il existe des cas de terres rachetées par des agriculteurs qui ont su reconnaître suffisamment tôt le profit qui pouvait découler de l’utilisation de cette technique.

Trois facteurs ont contribué au développement et à la diffusion de cette technologie dans la communauté agricole:

® une approche de recherche/action qui combine la flexibilité, l’ouverture aux initiatives des agriculteurs, une attitude positive et la volonté de négocier;

® une technologie qui combine les bénéfices essentiels de l’innovation: des résultats immédiats, la simplicité, la capacité d’être intégrée dans les systèmes de cultures existants et la transmissibilité;

® un ensemble technologique adaptable à un contexte local changeant.

Source: Alberta Mascaretti, IFAD; Reij (1996)

Etats-Unis: Des entreprises vertes dans le bassin de Willapa au nord-ouest de la côte pacifique

Au cours de ces dernières années, le choix entre la protection de l’environnement ou celle des emplois locaux a constitué un véritable dilemme dans le nord-ouest de la côte pacifique. De graves disputes ont éclaté concernant le hibou moucheté. Après 1990, quand il a été déclaré espèce en danger, le volume de bois coupé dans l’Oregon et dans l’Etat de Washington a chuté de moitié. Mais maintenant, de nouveaux partenariats entre des groupes autrefois opposés ont vu le jour, montrant ainsi à quel point la gestion durable des ressources naturelles et de l’agriculture peut contribuer à la croissance économique locale.

Le bassin versant de Willapa s’étend sur 275 000 ha sur la côte de l’Etat de Washington. Il est riche en ressources naturelles telles que des huîtres, des palourdes, des crabes, des esturgeons, du saumon et de vastes forêts. Mais les quatre comtés qui constituent le bassin versant sont extrêmement pauvres et sont classés «économiquement sinistrés» par l’Etat. De plus, les ressources naturelles se sont amenuisées. Ainsi, les remontées de saumons ont fortement diminué, l’esturgeon a presque disparu, la taille des huîtres s’est fortement réduite et les forêts séculaires ont été remplacées par des plantations de sapins. Un lien étroit existe entre l’état des ressources et la pauvreté locale. Les ressources ont été exploitées et exportées, générant en chemin quelques emplois et de modestes revenus.

Le défi à relever consistait à créer des entreprises et des produits qui permettent une utilisation durable des ressources naturelles et produisent de la valeur ajoutée. Ecotrust, un groupe environnemental basé à Portland, a favorisé la création d’un nouveau partenariat entre des agriculteurs, des éleveurs d’huîtres, des pêcheurs, des petits commerçants, des groupes d’indigènes américains et d’autres acteurs. Cette «Alliance de Willapa» a commandité des études concernant l’utilisation des ressources et les atouts locaux disponibles et elle a développé un plan de gestion commun. Il était clair qu’existaient déjà de nombreux projets de création d’entreprises, mais les savoir-faire et l’accès aux marchés et au crédit étaient insuffisants. Ecotrust a ensuite contacté une banque communautaire à Chicago, la South Shore Bank, qui avait investi 345 millions de dollars EU dans des zones communautaires à faibles revenus depuis les années 70. Avec le soutien de la Fondation Ford et de la South Shore Bank, l’Alliance Willapa a stimulé le développement de facilités bancaires dans le bassin versant. Cette aide a permis la création d’une série d’entreprises locales qui produisent de la valeur ajoutée lors de la valorisation des ressources naturelles. Ainsi:

® les huîtres de WILLAPA sont à présent commercialisées localement au lieu d’être exportées pour la vente en gros;

® les cultivateurs de canneberge produisent un grand choix de produits, alors qu’auparavant toutes les canneberges étaient exportées;

® les champignons sont ramassés dans les forêts et commercialisés;

® l’aulne est coupé dans les forêts secondaires et utilisé pour la fabrication de produits en bois de haute qualité;

® les poissons et les crabes sont commercialisés sous le label NW des aliments sains;

® le tissage de l’herbe Spartina dans de la toile de jean permet de fabriquer des chaussures d’été pour femmes. La Spartina est une mauvaise herbe des bancs de coquillages et sans cette utilisation, il aurait fallu l’éliminer à l’aide de désherbants.

De telles initiatives ont donné à la population locale de nouveaux moyens d’existence. Ainsi, le groupe tribal «Shoalwater Bay» a maintenant créé une entreprise ostréicole sur 300 hectares de zones intertidales. Après de nombreuses années de succès croissant, une nouvelle plate-forme de développement s’est constituée. Actuellement, le groupe de travail de Willapa a conçu un plan ambitieux pour un développement régional basé sur l’utilisation durable des ressources naturelles.

Source: Pretty (1998). La terre vivante

Santé diététique et reproductive

Bolivie: Programme intégré de développement Voisins du Monde dans le nord du Potosi (PRODINPO)

Depuis les années 1980, Voisins du Monde travaille dans les hautes montagnes de Bolivie (2 800 à 4 000 mètres d’altitude) dans le nord du Potosi pour améliorer la productivité de la pomme de terre. Les sols sablo-limoneux sont exposés à une forte érosion et la densité de population très élevée a conduit à exploiter des terres dont les pentes atteignent jusqu’à 50 degrés. Le taux élevé d’illettrisme, l’insuffisance des services de recherche et de vulgarisation agricoles et une profonde méfiance locale ont constitué des défis difficiles à relever pour le projet. De plus, le taux de mortalité infantile local était de 200 pour 1 000, le taux de mortalité maternelle à l’accouchement atteignait 100 pour 1 000 et l’espérance de vie était seulement de 36 ans.

Au départ, le but du projet était d’améliorer l’élevage du bétail et la production de maïs. Mais, après quelques échecs, les agriculteurs ont demandé à l’équipe du projet de concentrer les efforts sur la production des pommes de terre. Ils ont souhaité tester de nouvelles variétés susceptibles d’améliorer la sécurité alimentaire tout en continuant à utiliser des pratiques agricoles traditionnelles. Le rendement des cultures varie significativement d’un versant à l’autre et d’une ravine à l’autre, apprendre à tenir compte de cette variabilité constituait une composante-clé du projet. Ce dernier a entrepris de renforcer la capacité des agriculteurs à expérimenter par eux-mêmes de nouvelles technologies et à les adapter aux conditions locales. Les membres de la communauté élisent leurs agriculteurs-promoteurs qui diffusent les technologies pour lesquelles ils ont été formés. Les agriculteurs ont testé plusieurs variétés de pomme de terre sur leurs propres exploitations, ils ont adopté des espacements uniformes et la plantation à plus grande profondeur. Ils ont également expérimenté l’utilisation d’engrais verts (en particulier le lupin) et de fumier et testé l’effet de variations de la grosseur de la semence de pomme de terre. Environ 2 000 agriculteurs ont fait passer les rendements de 4 000 kg/ha à 10-15 000 kg/ha.

L'adoption du lupin dans la rotation des cultures est un exemple de rupture avec les pratiques agricoles couramment préconisées par les centres de recherche. La diffusion de la macuna (velvet bean) en Amérique Centrale et son impact phénoménal sur le rendement du maïs ont incité Voisins du Monde à envoyer au Honduras 13 animateurs ruraux de la Bolivie et du Pérou. La macuna ne pousse pas au-dessus de 2 800 mètres d’altitude et aurait été détruit lors du buttage de la pomme de terre dans la période qui précède la récolte. Mais Milton Flores a découvert le lupin comme alternative - il peut fixer 200 kg d’azote à l’hectare chaque année et il enrichit le sol quand il lui est incorporé comme engrais vert. Au début, les agriculteurs se sont montrés sceptiques, mais leur longue expérience d’une expérimentation fructueuse les a persuadés d’essayer la pratique proposée. Immédiatement, le rendement de la pomme de terre associée au lupin est passé de 1 780 kg/ha à 8 500 kg/ha, et il a même atteint 13 000 kg/ha lorsque du fumier de mouton était incorporé. La dépense pour la semence du lupin est de 18 dollars EU/ha à comparer avec la dépense de 170 dollars EU/ha pour un une fertilisation inorganique équivalente.

Le projet a produit de nombreux bénéfices sociaux, en particulier une amélioration de l’autosuffisance alimentaire et de la santé. Une fois les rendements améliorés, de nombreux agriculteurs réduisent la surface cultivée de l’exploitation, quelquefois jusqu’à 90 pour cent, afin d’intensifier leurs efforts. Cette réduction de la surface cultivée a entraîné de grands bénéfices pour les femmes, en leur facilitant la gestion de l’exploitation agricole lorsque leurs maris émigrent vers les villes pour y chercher du travail.

Source: Ed Ruddell, pers. com. Ruddell (1995)

Chine: Les systèmes riz - poisson au bénéfice de la santé dans la Province de Jiangsu

La culture associant le riz et le poisson procure de nombreux bénéfices multifonctionnels aux ménages ruraux, à l’économie et à l’environnement. Actuellement, seulement 136 000 ha de rizières irriguées (sur une surface totale des 21 millions d’hectares) sont utilisés pour l’aquaculture en Asie du Sud-Est. Dans la province de Jiangzu en Chine, plus de 30 millions de mu (soit 2 millions d’hectares) sont cultivés en riz et un tiers de cette surface est consacré à l’association riz-poisson. Le «Projet de vulgarisation à grande échelle de techniques associant riz et aquaculture à hauts rendements et à forte efficience de la Province de Jiangzu» a été développé par le gouvernement provincial au milieu des années 90, avec des objectifs multifonctionnels. Il s’agissait de développer l’association riz/aquaculture en même temps qu’étaient restaurés et améliorés les rizières à faible rendement, les étangs et les terres arables hydromorphes, de façon à améliorer la production alimentaire et les revenus en favorisant l’essor de l’économie rurale et l’enrichissement des agriculteurs.

Il en a résulté une extension des aires d’aquaculture associée au riz, la surface concernée passant d’environ 5 000 ha en 1994 à 68 973 ha en 1997. De plus, la zone de l’association riz/crabe a atteint 36 113 ha et la zone de l’association riz/crevette a atteint 13 867 ha. Les retombées économiques de l’association riz/aquaculture sont remarquables. En 1997, les bénéfices communs des champs de riz et de l’aquaculture étaient 2,86 fois plus importants que ceux de la monoculture du riz. L’association riz/aquaculture nécessite des dépenses modestes et procure des retombées économiques rapides. Elle constitue une source supplémentaire de nourriture et de revenus dans les zones rurales, produisant 50 kg de poisson par mu.

L’association riz/aquaculture maintient également l’équilibre biologique des écosystème des rizières. L’environnement rural peut être amélioré par la pratique d’une agriculture non polluante et l’utilisation agricole de produits chimiques est fortement réduite. L’association riz/poisson aide également à éliminer les larves de moustiques nuisibles à la santé humaine. L’encéphalite japonaise et la malaria sont transmises par les moustiques qui se trouvent dans une vaste zone de l’Asie. Des interventions écologiques permettent de contrarier la reproduction des moustiques dans les rizières. L’association riz/poisson permet de contrôler l’incidence des moustiques. Dans le comté de Quanzhou, l’incidence de la malaria a chuté de 11,6/100 000 à 0,1/100 000 pendant que les surfaces en riz/poisson sont passées de 0 à 43 pour cent en une décennie.

Source: Li Kangmin (1998)

Ethiopie: Le projet de développement rural intégré de Cheha

Il s’agit d’un exemple de projet intégré relativement modeste qui a eu un impact important pour la sécurité alimentaire au niveau régional. Ce projet a été mis en œuvre dans le sud-est de l’Ethiopie après la sécheresse de 1984 et il a introduit de nouvelles variétés de cultures (légumes) et d’arbres (fruitiers et forestiers). Il a également promu l’utilisation du fumier pour améliorer la fertilité du sol et celle de plantes pour lutter contre les ravageurs et il a développé des services vétérinaires. Environ 12 500 familles rurales ont adopté l’agriculture durable sur 5 000 hectares. Il en est résulté une amélioration de 70 pour cent des indicateurs du niveau global de l’alimentation dans la zone du projet, ainsi qu’une augmentation de 60 pour cent du rendement des cultures. Plusieurs agriculteurs ont obtenu des excédents de production pour leurs cultures et leur vente sur les marchés locaux a amélioré les revenus des familles. Ainsi, une zone qui était totalement dépendante de l’aide alimentaire d’urgence est devenue capable de satisfaire par elle-même ses besoins alimentaires et dispose de surplus pour la vente. L’impact du programme réside aussi dans le fait que les agriculteurs diffusent de leur propre initiative les nouvelles pratiques agricoles, y compris vers des agriculteurs situés hors de la zone du projet, là où, dans un premier temps, les agriculteurs avaient été encouragés à participer par les programmes «aliments contre du travail».

Source: Fondation contre la faim


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