1.1.2 Situation actuelle de la végétation ligneuse
Surfaces actuelles
Malgré son importance forestière le pays ne dispose malheureusement pas de statistiques forestières d'ensemble utilisables. Tous les documents consultés utilisent des données qui, si elles ne sont pas toujours celles élaborées avant la deuxième guerre mondiale (cf.(1)), en dérivent plus ou moins directement. C'est ainsi, par exemple, que la surface de la forêt nayumbeayant été sous-estimée à 240 000 hectares en 1937, (alors que Donis (3) citant Humblet, indique en 1948 un chiffre de 500 000 hectares) ce chiffre erroné refait surface régulièrement (par exemple dans (16) et (33)). On peut, bien sûr, rétorquer que ce chiffre va finir par être exact et même surestimé du fait des défrichements culturaux dans cette région densément peuplée du pays :
Pour cette étude, un point de départ de l'estimation des surfaces des différentes formations ligneuses du Zaïre est constitué par le planimétrage de la “Carte de la végétation” au 1/5 000 000ème de R. Devred annexée au document (12) et, à une échelle réduite au document (11). Cette carte au tracé relativement précis utilise une légende détaillée convenant 44 classes de végétation plus quatre signes additionnels indiquant la présence de peuplements particuliers (forêts denses sèches “Muhulu”, bambousaies à Oxytenanthera abyssinica, formations herbeuses marécageuses et présence de Borassus aethiopium). Les objectifs de cette carte et l'échelle utilisée n'ont pas abouti cependant à la représentation des jachères forestières et jeunes forêts secondaires telles qu'elles existaient au moment de l'élaboration de la carte (1960).
Certaines informations utiles ont pu être recueillies dans l'Inventaire Forestier Mondial de 1958 (surfaces couvertes par les eaux, surface des “autres terres” - zones herbeuses ou sans végétation, infrastructures, agglomérations - terres agricoles). A partir des statistiques agricoles détaillées de 1976 (32) on a cherché à reconstituer les surfaces occupées par l'agriculture permanente et l'agriculture itinérante à la fin de 1957.
Les informations de la carte de végétation et de l'Inventaire Forestier Mondial de 1958 et les statistiques agricoles “reconstituées” de 1957 jointes à de nombreuses données éparses glanées dans la littérature étudiée (notamment sur la culture itinérante) 1 ont été interprétées d'une manière minutieuse pour aboutir à l'estimation des surfaces des formations ligneuses à la fin de 1957.
L'étude de l'évolution, pendant la période 1957–1980, de l'agriculture itinérante, cause essentielle de la déforestation, et de l'exploitation forestière (pour la détermination des surfaces de forêt vierge) (cf. paragraphe 2.1) ont conduit au tableau suivant des surfaces estimées des formations ligneuses à la fin de 1980, où l'on a arrondi les surfaces à 10 000 ha près, compte tenu de l'imprécision d'une grande partie des estimations.
Surfaces de végétation ligneuse naturelle estimées à la fin de 1980
(en milliers d'ha)
NHCf1uv | NHCf1uc | NHCf1(u) | NHCf2i | NHCf2r | NHCf2 | NHCf | NHCa | |
79740 | 380 | 80120 | 19840 | 5690 | 25530 | 105650 | 7800 | |
NHc/NHO 1 | NHc/NHO2i | NHc/NHO2r | NHc/NHO2 | NHc/NHO | NHc/NHOa | nH | ||
59160 | 10630 | 2050 | 12680 | 71840 | 10600 | 11300 | ||
NHBf1uv | NHBf1uc | NHBf1(u) | NHBf2i | NHBf2r | NHBf2 | NHBf | NHBa | |
(90) | (10) | (100) | (100) | (ε) | ||||
N.f1uv | N.f1uc | N.f1(u) | NHBf2i | N.f2r | N.f2 | N.f | N.a | |
79740 | 380 | 80120 | 19930 | 5700 | 25630 | 105750 | 7800 |
Les remarques suivantes sont utiles pour une meilleure compréhension du tableau précédent:
les forêts denses productives exploitées (NHCf1uc) ont peu augmenté depuis 1957 car, d'une part, elles sont considérées comme les plus exposées aux défrichements par l'agriculture itinérante et, d'autre part, la partie de l'exploitation forestière s'effectuant au Mayumbe (de 80% en 1958 à 50–60% en 1980) concerne des forêts, en grande partie déjà exploitées et ne participe que peu à la réduction des surfaces de forêts vierges;
les forêts denses improductives pour des raisons physiques (NHCf2i) sont essentiellement l'ensemble des forêts édaphiques de la cuvette centrale (“forêts édaphiques, liées aux sols hydromorphes, marécageuses et périodiquement inondées”, et “mangrove” de la carte de Devred) auxquelles il faut ajouter la moitié de ce qui reste des forêts denses montagnardes et submontgnardes (moins celles incluses dans les parcs nationaux qui sont classées en NHCf2r); forêts sur sol hydromorphe, mangroves et forêts montagnardes/submontagnardes improductives interviennent pour 92%, 0,3% et 7,7% respectivement;
les surfaces de forêts denses improductives pour des raisons réglementaires (NHCf2r) sont celles qui se trouvent à l'intérieur des 7 parcs nationaux du Zaïre (dont la surface totale couvre 8 026 000 ha); la même considération s'applique aux formations arborées mixtes forestières et graminéennes (NHc/NHO);
les surfaces de jachères forestières (NHCa et NHc/NHOa) ont été estimées à partir d'une analyse province par province des surfaces de cultures de subsistance pratiquées en agriculture itinérante (telles qu'elles sont données dans le document (32)), en supposant actuellement une période de culture moyenne de 2,5 ans (chiffres extraits du document FAO “Shifting cultivation and soil conservation in Africa”), et en utilisant un taux moyen annuel d'accroissement de la population pratiquant l'agriculture itinérante de 2,0%;
on a séparé les formations arborées mixtes forestières et graminéennes telles qu'elles sont représentées sur la carte de végétation entre formations productives au sens de cette étude (NHc/NHO1) et improductives pour des raisons physiques (NHc/NHO2i), en fonction de ce que l'on sait de leur nature et composition: on a ainsi abouti à une proportion de 85% des premières et 15% des secondes. Il est certain cependant que ces proportions devront être vérifiées lorsque l'on disposera d'une carte de la végétation du pays à plus grande échelle. Compte-tenu d'une part de la pluviométrie relativement élevée (peu de zones à pluviométrie inférieure à 1 000 mm) et, d'autre part, d'une densité relativement faible de population dans les zones de savane (par exemple 5 habitants ruraux par km2 en moyenne sur l'ensemble de la province du Shaba), on peut certainement considérer que la part des formations ouvertes arborées pouvant produire du bois d'oeuvre d'une façon soutenue (NHc/NHO1) est certainement de cet ordre de grandeur:
les estimations de surfaces de bambousaies restent très sommaires, du fait notamment qu'on ne connait pas l'importance des peuplements d'Oxytenanthera abyssinica. C'est pourquoi les chiffres correspondants sont indiqués entre parenthèses.
Finalement la répartition actuelle de l'ensemble du territoire du Zaïre entre les différentes classes de végétation et d'utilisation des terres pourrait donc être la suivante:
Catégorie | Code | Surface (en milliers d'ha) |
Formations forestières denses (bambousaies incluses) | N.f | 105 750 |
Formations forestières ouvertes | NHc/NHO | 71 840 |
Formations arbustives | nH | 11 300 |
Jachères de formations forestières | NHCa NHc/NHOa | 18 400 |
Agriculture1 | - | 5 120 |
Zones de végétation herbeuse avec synusie ligneuse faible ou sans synusie ligneuse, zones sans végétation (y compris agglomérations et infrastructures) | - | 14 350 |
Total (terres) | - | 226 760 |
Propriété
Le document (16) reconnaissait en 1965 les formes suivantes de propriété forestière:
les forêts domaniales sont les forêts reconnues libres ou libérées de droits d'occupation tels que définies par le décret du 3 juin 1906. L'occupation de ces forêts a été ou sera déterminée conformément à la procédure fixée par le décret du 31 mai 1934. Ces forêts ont été définies normalement au cours de leur “classement” durant lequel elles ont été définitivement reconnues à vocation forestière. Les forêts déjà classées sont maintenant, selon la Constitution, la propriété des provinces de la fédération de la République;
les forêts concédées sont les terrains boisés domaniaux mais concédés en amphythéose ou frappés d'un droit de superficie. Des dispositions spéciales doivent être établies pour cette catégorie de “propriété”;
les forêts communales sont les terrains boisés propriétés des communes, conformément aux dispositions légales et aux règles coutumières régissant l'appropriation du terrain. Quelques forêts ont été classées pour des collectivités mais cette forme de propriété, spécialement reconnue comme telle, n'est pas encore très répandue;
les forêts privées sont la propriété enregistrée d'une personne ou ont fait l'objet d'un contrat de cession à une personne privée par le gouvernement ainsi que les boisements effectués spontanément et à titre privé par des nationaux, conformément aux règles coutumières régissant l'appropriation du terrain. Ces boisements sont assimilés à des propriétés privées. Cette catégorie aussi est encore peu répandue;
les forêts occupées par les collectivités pour lesquelles l'occupation a été ou sera déterminée selon les règlements;
les forêts indivisées qui n'ont pas fait l'objet d'un contrat déterminant leur caractère domanial ou d'occupation. Elles constituent les propriétés forestières les plus répandues dans la République.
L'Inventaire Forestier Mondial de 1958 indiquait la répartition suivante des forêts accessibles:
Type de propriété | Surface | |
(en milliers d'ha) | % | |
Forêts d'Etat | 517 | 0,55 |
Autres forêts publiques (dont forêts communales) | 53 | 0,06 |
Forêts privées | 383 | 0.40 |
Forêts de propriété non déterminée | 93826 | 98,99 |
Total forêts accessibles | 94779 | 100,0 |
Les forêts privées étaient constituées d'après ce même document de 283 000 ha de “forêts appartenant aux entreprises traitant des produits forestiers”, 10 000 ha de “forêts appartenant à des particuliers, des familles ou des sociétés exerçant principalement des activités agricoles”, et 90 000 ha de forêts appartenant aux autres entreprises, à des institutions etc… (10) mentionne que les boisements (plantations) privés couvraient en 1957 près de 50 000 ha.
Il n'a pas été trouvé dans la littérature d'informations plus récentes sur les régimes de propriété forestière et les surfaces forestières respectives. D'après la nouvelle loi foncière affectant toutes les terres à l'Etat (27) toutes les forêts “indivisées” ou de “propriété non déterminée” devraient être maintenant classées comme domaniales.
Statut légal et aménagement
Les forêts classées libérées des droits de tiers doivent constituer le noyau de forêts domaniales ou communales de protection et de production. En 1959 la plupart des forêts classées étaient domaniales. Les forêts classées de production (“réserves forestières de production”) couvraient 489 000 ha et 528 000 ha étaient en projet: 250 000 ha en zone de forêt dense et 238 000 ha en zone de savane boisée ou de forêt claire (16).
Le gouvernement zaïrois poursuit une politique active en matière de conservation de la nature (24) (28) (30). Avant l'Indépendance trois parcs nationaux existaient, à savoir:
le parc national des Virunga (ex-parc Albert) créé en 1925 couvrant 809 000 ha entre les altitudes 900 et 5 100 mètres dans les provinces du Kivu et du Haut-Zaïre, le long de la frontière avec le Rwanda et l'Ouganda et enserrant le lac Edouard;
le parc national de la Garamba (26), créé en 1938, couvrant une surface de 492 000 ha dans les savanes guinéennes et soudaniennes et les galeries forestières du Haut-Zaïre, à la frontière avec le Soudan;
le parc national de l'Upemba, créé en 1939, sur les hauts plateaux du Shaba entre les altitudes de 500 et 1 800 mètres, couvrant 1 173 000 hectares de forêts claires, savanes boisées, savanes inondables à acacias, forêts galeries et savanes herbeuses.
A partir de 1970 quatre nouveaux parcs nationaux ont été mis en place à savoir:
le parc national de la Salonga (25), couvrant une surface immense (3 656 000 ha) de forêts denses, principalement sur sols hydromorphes, au milieu de la cuvette centrale;
le parc national de la Maïko, également en zone de forêt dense, sur 1 083 000 ha aux confins du Haut-Zaïre et du Kivu dans la zone la plus pluvieuse du Zaïre;
le parc national du Kahuzi-Biega de 600 000 ha dans la province du Kivu, couvrant notamment des forêts de montagne avec le bambou Arundinaria alpina et des peuplements d'Hagenia;
enfin, le parc national des Kundelungu de 220 000 ha dans le Shaba, près de la frontière zambienne, couvert principalement de forêts claires et de savanes boisées zambéziennes (du type “miombo”).
On a estimé sommairement à 5 390 000 ha la surface de forêt dense incluse dans les parcs nationaux (NHCf2r) - dont plus de 60% dans le seul parc de la Salonga - à 2 050 000 ha celle de formations arborées mixtes forestières et graminéennes (NHc/NHO2r), et à 10 000 ha celle des bambousaies (NHBf2r).
Il existe également un certain nombre de “domaines de chasse réservée” (de la Bili Uéré (23), des Azandes, de Gangala-na-Bodio, des Mondo-Missa et de la Rutshuru) couvrant plus de 6 millions d'ha mais on n'a pas jugé qu'elles devaient être classées dans les zones interdites à l'exploitation forestière. Dans différents documents de l'Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources (UICN) il est aussi fait mention de deux “réserves de la biosphère” (réserve floristique de Yangambi de 250 000 ha et réserve forestière de la Luki de 33 000 ha) et de la réserve du mont Oyo, mais des informations manquent notamment sur leur végétation.
Des dispositions d'aménagement forestier existaient jusqu'en 1959. Dans le plan décennal 1950–59 étaient prévus des enrichissements de forêt sur 5 000 ha par an pour la production de bois d'oeuvre en plus des plantations (10), qui devaient intervenir dans les 1 334 000 hectares de “forêts aménagées avec règlements d'exploitation” indiquées par l'Inventaire Forestier Mondial de 1958. (18) indique que “en 1960 la gestion des forêts s'exerçait.… sur environ 1 250 000 ha comprenant environ 675 000 ha de forêts classées (dont 46 500 ha de forêts aménagées)…” On peut donc considérer qu'en 1960 l'aménagement forestier intensif (au sens de cette étude, impliquant des traitements sylvicoles et des plans d'aménagement) s'exerçait sur 45 000 ha environ de forêts situées probablement dans utilisées étaient les suivantes (16):
par layons (“méthode française”) au moyen d'essences économiques pour la région, la densité visée étant de 50 arbres adultes par ha, ce qui donne 250 m3 exploitables;
par layons purs en laissant intact des couloirs forestiers entre les layons (6);
par régénération naturelle (plutôt à titre d'essais);
par placeaux denses (méthode Anderson), à titre expérimental seulement;
par la méthode sylvo-bananière (uniquement au Mayumbe);
par “l'enrichissement par le haut”, en essayant de transformer des forêts qui se prêtaient à ce traitement spécial en peuplements plus uniformes en essences de valeur, en âge et en structure.
Parallèlement des recherches étaient menées par l'INEAC, à Yangambi notamment, dont un aperçu est donné dans (20). La méthode par layons purs et surtout la méthode sylvobananière ont abouti à l'établissement de plusieurs milliers d'hectares de plantation de limba au Mayumbe et sont évoqués au paragraphe 1.2. Ces recherches semblent avoir été abandonnées maintenant. Il convient cependant de signaler l'implantation de “parcelles-échantillons permanentes” en forêt dense, par le Service permanent d'inventaire et d'aménagement forestiers (SPIAF).
Tant en forêt qu'en zone de savane on ne peut pas dire qu'il y ait actuellement d'aménagement intensif au sens de cette étude et les surfaces de formations forestières intensivement aménagées sont donc considérés comme nulles (NHC f 1m=NHc/NHO1m=0).
Exploitation forestière
Bois en grumes
L'exploitation et l'exportation de grumes de bois d'oeuvre ont commencé vers 1895 dans le Haut-Mayumbe (2). Après la première guerre mondiale l'essor de l'exploitation devint important, notamment au Mayumbe où se constituent plusieurs grandes sociétés dont l'Agrifor (2) (7), et également le long du fleuve et dans le Kasai occidental (société Exforka près de Demba sur le chemin de fer Ilebo-Kananga-Lumumbashi). Les exportations de grumes se multiplièrent dans les années 30 passant de 8 400 tonnes en 1931 à près de 82 000 tonnes en 1937 (2). En 1939 le Mayumbe intervenait, avec 60 000 m3, pour 80% dans les exportations totales de bois d'oeuvre (3). Le limba représentait à cette période 80% des exportations totales, les autres espèces étant le kambala (Chlorophora excelsa ou iroko du commerce), correspondant à 10% des exportations, les 10% restants étant partagés entre le ngulu maza (Nauclea diderrichii ou bilinga du commerce), les Entandrophragma (lifaki, tchimaye, kalungi, mubangu), le diambi (Guarea spp.), le kamashi ou sussumenga (Staudtia gabonensis ou niové du commerce), le dimpampi (Baillonella toxisperma ou moabi du commerce), le wenge (Milletia laurentii), le n'gula (Pterocarpus spp.), l'ébène (Diospyros spp.), le limbali (Gilbertiodendron dewevrei), le bonkole (Lophira procera ou azobé du commerce), le fuma (Ceiba pentandra), le mukulungu (Autranella congolensis), etc.…
Après la deuxième guerre mondiale l'exploitation et l'exportation des grumes ont repris et augmenté régulièrement (4). En 1956 et 1957 le volume total abattu était de 813 000 et 828 000 m3 respectivement (10). (15) donne pour 1959 un volume de 750 000 m3 environ (dont 120 000 m3 pour la seule Agrifor). Aux essences déjà citées s'ajoutent, l'agba (Gossweilerodendron balsamiferum), le n'safu-nkala (Dacryodes sp.), le lolako (Pycnanthus angolensis ou ilomba du commerce) et des espèces moins connues du commerce comme le mubangu (Julbernadia seretii), wulo (Petersia africana), tschilunga (Mammea africana), kantate (Morus mesozygia), wamba (Tessmania claessensii) etc… Le limba reste l'essence la plus exploitée et la plus exportée, représentant, à la fin des années cinquante, 55–60% en volume et 65–70% en valeur des exportations de grumes. Une certaine surexploitation de cette essence s'étant produite, un contingentement fut instauré en 1954 et renouvelé en 1960 limitant son abattage à des quantités de l'ordre de 45 000 m3 à 75 000 m3 (15) (16) (17).
Au début des années 60, la production de bois d'oeuvre régresse quelque peu (461 000 m3/an en moyenne entre 1961 et 1965 d'après l'annuaire FAO des produits forestiers et la même moyenne exactement entre 1966 et 1970 d'après “Forest Resources of Africa” par R. Persson, malgré un dépassement du quota fixé pour le limba (17). Le Bas-Zaïre (Mayumbe surtout) continue à contribuer à la production totale pour une part significative mais qui lentement décroît jusqu'à 50% et moins. L'exploitation atteindra un maximum relatif de 565 000 m3 en 1973 date à partir de laquelle la production officiellement recensée est redescendue à 334 000 m3 en 1975, 272 000 m3 en 1976, 303 000 m3 en 1977 (dont environ 200 000 m3 au Mayumbe) (33) (35) (36). Ces chiffres sont sans doute inférieurs à la réalité (36). On continue à assister à un déplacement progressif du centre de gravité de l'exploitation forestière du Mayumbe vers la cuvette centrale avec comme conséquences un écrêmage plus sélectif du fait du côut plus important des transports (36) et l'appariton de nouvelles espèces comme le Mitragyna stipulosa (abura du commerce) et le Guibourtia demeusei (bubinga du commerce), essences particulièrement abondantes dans la cuvette (31).
La méthode d'exploitation au Zaïre est identique à celle utilisée dans les pays de forêt dense voisins. Les opérations d'abattage sont effectuées à la hache ou à la scie mécanique, le façonnage des grumes abattues se faisant au passe-partout ou à la scie mécanique. Le débardage est réalisé au tracteur à chenilles ou sur pneus et le transport jusqu'a l'usine de transformation ou au port par camion-grumier, barge ou chemin de fer. Certains auteurs signalent cependant le retard technologique de l'exploitation forestière zaïroise (33) (36). Actuellement “sept entreprises produisent plus de 10 000 m3 par an, quelques dizaines de petites entreprises et quelques centaines de tout petits exploitants travaillant vraisemblablement tige par tige” (33).
Les volumes extraits à l'hectare ont varié dans le temps et avec les forêts exploitées. Si (10) peut citer un “cube exploitable… en moyenne de 25 à 35 m3 de grumes à l'hectare”, il semble qu'il n'en soit pas tout à fait ainsi actuellement. D'un part les forêts du Mayumbe qui sont actuellement l'objet d'exploitation ont été déjà parcourues une ou plusieurs fois et le volume extrait est de l'ordre de 6 à 10 m3/ha seulement (33). Les grosses exploitations de l'intérieur (Siforzal, Forescom, Exforka) extraient entre 12 et 22 m3 par hectare. Pour l'ensemble des forêts denses productives non exploitées du Zaïre (NHCf1uv) on a adopté un chiffre de volume exploitable à l'ha (VAC) de 15 m3. Actuellement la surface couverte annuellement par l'exploitation est donc de l'ordre de 20 à 30 000 hectares.
Autres produits forestiers.
(10) donne pour 1956 et 1957 une production de bois de chauffage de l'ordre de 3,8 millions de stères représentant une consommation relativement faible de 0,28 stère/personne/an, laquelle correspondrait actuellement à une consommation totale d'environ 8 à 8,5 millions de stères, nettement inférieure à l'estimation de l'annuaire FAO des produits forestiers (18,5 millions de m3 en 1978).
L'approvisionnement en charbon de bois des grandes villes et notamment de Kinshasa est difficile (33). (29), après une analyse minutieuse, évalue à 125 000 tonnes en 1976–77 la consommation annuelle de la capitale pour une demande qui devrait être de l'ordre de 200 000 tonnes soit un déficit annuel de 75 000 tonnes. Cette demande pourrait être multipliée par un facteur de 3,3 à 4,8 d'ici 2 000 (29) (33). C'est cet état de chose qui a conduit les autorités à faire entreprendre des reboisements autour de la ville (cf. paragraphe 1.2.1).
La production de bois de service (poteaux et perches surtout) est estimée actuellement à 1 800 000 m3 environ dans l'annuaire FAO des produits forestiers.
Aucune information n'a été trouvée sur les menus produits si ce n'est une référence dans (10) au copal tiré du Guibourtia demeusei de la cuvette centrale.
1.1.3 Situation actuelle des volumes sur pied
Les seules informations quantitatives précises trouvées sur les volumes bruts sur pied des formations forestières zaïroises sont celles données par le document (31) pour la cuvette centrale et par (3) pour le Mayumbe. A cela s'ajoutent des indications de surface terrière pour les différents types de forêts de la province du Kivu (19). Le premier document donne un résumé des résultats d'un inventaire au sol portant sur les 3 450 000 hectares de forêt de terre ferme d'un périmètre de 53 000 km2 situé dans la région de l'Equateur, et qui constitue à ce jour le seul inventaire forestier important réalisé durant ces vingt dernières années. En utilisant les résultats de cet inventaire pour les forêts semi-décidues et les forêts sempervirentes séparément on a abouti à un volume (VOB) des forêts primaires ou vieilles secondaires sur sol ferme (NHCf1uv) égal à 250 m3/ha environ. Le volume des forêts déjà exploitées (NHCf1uc) a été déduit en soustrayant du chiffre précédent deux fois le volume des billes extraites (VAC=15 m3). Le volume par hectare des forêts improductives pour des raisons physiques - NHCf2i (8,1% de forêts de montagne, 0,3% de mangroves et 91,6% de forêts sur sols hydromorphes) - a été estimé par pondération à 100 m3. Le volume par hectare des forêts improductives pour des raisons de statut (NHCf2r) est plus élevé puisqu'une grande majorité de ces dernières sont des formations vierges sur sol ferme.
Par analogie avec les formations mixtes forestières et graminéennes productives (NHc/NHO1) des pays voisins (Angola, Zambie) et dans l'ignorance de données correspondantes pour le Zaïre on a adopté provisoirement les chiffres de 25 m3 et 2 m3 pour le volume brut (VOB) et le volume exploitable (VAC) moyens à l'hectare de ces formations sur l'ensemble du territoire.
Les volumes moyens et totaux pour l'ensemble du pays se présentent sommairement de la façon suivante:
Volumes sur pied estimés à la fin de 1980
(totaux en millions de m3)
NHCf1uv | NHCf1uc | NHCf2 | NHc/NHO1 | ||||||||
VOB | VAC | VOB | VOB | VOB | VAC | ||||||
m3/ha | total | m3/ha | total | m3/ha | total | m3/ha | total | m3/ha | total | m3/ha | total |
250 | 19935 | 15 | 1196 | 220 | 79 | 130 | 3319 | 25 | 1480 | 2 | 118 |
Il y a eu interruption des mesures d'accroissement des peuplements naturels entreprises par l'INEAC jusqu'en 1960, à Yangambi notamment (20), et l'on n'a pas trouvé de donnés dendrométriques correspondantes. Le SPIAF entreprend de suivre l'évolution des peuplements par des parcelles-échantillons permanentes inventoriées dans la cuvette centrale (35). On peut espérer que des premières estimations d'accroissement en volume pourront être ainsi disponibles dans quelques années.
1.2 Plantations
1.2.1 Introduction
Le limba (Terminalia superba) aurait été planté dès 1905 et de nouveau en 1935–1936 comme essence d'ombrage au-dessus des cacaoyères dans le Bas-Zaïre. En 1939–40 le service forestier signait un contrat avec une compagnie privée aux termes duquel celle-ci était autorisée à planter des bananiers à l'intérieur d'une réserve forestière à condition qu'y soit planté en même temps des limba. Après une interruption due à la deuxième guerre mondiale, ce système agro-sylvicole de plantations sylvo-bananières fut repris en 1945. Un premier contrat important entre le service forestier et le secteur privé concernait 2 000 hectares de réserve forestière à convertir en plantations mixtes de bananiers et de limba lesquelles devaient retourner au domaine forestier au bout d'une période de 10 ans. En 1951 le gouvernement prenait lui-même à sa charge la réalisation de ces plantations sylvo-bananières au Bas-Zaïre (33). Au moment de l'Indépendance (1960) elles couvraient environ 6 200 hectares (18) (sur un total de plantations du service forestier de l'ordre de 45 000 à 46 500 ha (10) (33)).
Des plantations avaient été entreprises avant 1960 dans d'autres provinces du pays et dans des buts divers, soit par l'Etat, soit par les communautés, soit encore par les privés. Ces boisements avaient pour but soit la production de bois d'oeuvre ou de bois de chauffage, soit la protection des terrains de montagne contre l'érosion (“mission antiérosive”), ou des savanes boisées contre les feux de brousse (sous la forme de bandes boisées jouant le rôle de coupe-feux). Il n'a pas été trouvé malheureusement de statistiques détaillées sur les surfaces par essence et par objectif de plantation. (10) donne les surfaces totales de boisements de production et de protection en 1957, que l'on reproduit ci-dessous:
Surfaces des boisements en 1957
(en hectares)
Type de boisement | Etat | Communautés | Privés | Total | ||
“Boisements de production” | ||||||
- en forêt (“forêts aménagées”) | 27852 | 3052 | 7053 | 37957 | ||
- en savane | 8061 | 14548 | 13928 | 36537 | ||
Total | 35913 | 17600 | 20981 | 74494 | ||
“Boisements de protection” | ind. | ind. | ind. | 110991 |
1 Surface des bandes boisées, la surface protégée étant de l'ordre de 255 000 hectares.
Le limba semble se tailler la part du lion dans les boisements de production en forêt, non seulement au Bas-Zaïre mais dans les autres provinces forestières également. D'autres essences forestières de bois d'oeuvre mentionnées sont le fromager ou fuma (Ceiba pentandra et Bombax flammeum), les Entandrophragma, le dibétou ou lifaki muindu (Lovoa trichilioides). D'autres essences utilisées sont introduites comme les eucalyptus, Grevillea robusta, le filao (Casuarina equisetifolia), Cupressus spp., etc…
De 1960 à 1962 il y eut pratiquement un arrêt total des plantations qui furent reprises progressivement sur une petite échelle entre 1963 et 1970 environ. Quelques détails sur les réalisations de cette période sont donnés dans les documents (17) et (18) pour le Bas-Zaïre et (16) pour l'ensemble du pays. 57 000 hectares sont indiqués comme surface totale de plantation en 1965 au “Colloque mondial sur les peuplements artificiels et leur importance industrielle”, un chiffre probablement exagéré qui ne saurait représenter les plantations bien venantes à cette époque, du fait de l'abandon d'une grande partie des plantations privées et des coupes importantes réalisées au début des années 60 (16).
En 1969 démarrait un programme de plantation aux environs de Kinshasa avec l'assistance de la FAO, du Programme Alimentaire Mondial et de l'assistance bilatérale américaine, pour l'alimentation en bois de feu de la capitale. Des difficultés opérationnelles n'ont pas permis l'établissement de grandes surfaces, mais le projet a pu identifier des espèces prometteuses (Eucalyptus camaldulensis, E. tereticornis et Acacia auriculifornis) et mettre au point les techniques de pépinière et de plantation pour des réalisations à grande échelle (21) (22) (33) (36). Il apparait en fait que les seuls efforts systématiques de plantation réalisés dans les années 70 l'ont été dans les environs de Kinshasa et dans le Bas-Zaïre (plantations sylvo-bananières) (33).
1.2.2 Surface des plantations réalisées
Les documents consultés cités dans la bibliographie, notamment (10), (16), (17), (18) (22) et (33), donnent des informations quelque peu contradictoires sur les surfaces plantés totales mais ne renseignent en aucune mesure sur la répartition entre espèces et classes d'âge dans la période précédant l'Indépendance. De nombreuses hypothèses ont du être faites pour établir les tableaux ci-dessons, concernant notamment les éléments suivants:
les boisements des communautés et des privés réalisés jusqu'en 1960 ayant été soit abandonnés, soit surexploités, on a considéré comme négligeable ce qu'il en reste de valable actuellement; on a fait la même hypothèse pour les boisements de protection;
seuls ont été retenus parmi les plantations antérieures à 1960 les boisements de l'Etat (dont la surface non corrigée s'élevait en 1957 à 35 913 ha et à 45 000–46 500 ha en 1960); leurs surface restante actuellement a été déterminée en appliquant des taux de survie sévères qui tiennent compte du manque d'entretien (18), des coupes abusives (16) et dans certains cas de l'aliénation des terrains plantés à l'agriculture. Il convient d'insister sur le fait que les chiffres indiqués sont censés correspondre à ce qu'il reste de plantations “exploitables” (ou “de rapport” ou encore “n'étant pas dans un état de dégradation avancée et de productivité très faible”, pour reprendre des expressions utilisées dans le cas du Burundi et du Rwanda). Par suite ils ne sauraient être égaux (de même que pour tous les autres pays étudiés) à ceux qui résultent de la simple addition des surfaces plantées depuis les années 30;
on a supposé que toutes les plantations d'eucalyptus sont destinées à la production du bois de chauffage et de charbon de bois (P..2). 5 000 ha étaient indiqués en 1965 (“Colloque mondial sur les peuplements artificiels et leur importance industrielle”). Le document en portugals “Os eucalyptos” de 1977 parle de 25 000 ha dont 18 000 dans la province du Kivu. Ce dernier chiffre inclut sans doute les plantations villageoises dont on n'a pas tenu compte ici. Toutes les autres essences ont été rangées dans la catégorie des plantations industrielles (P..1).
Plantations industrielles
Surfaces estimées des plantations industrielles réalisées à la fin de 1980
(en milliers d'ha)
Catégorie | Essences | Années | 76–80 | 71–75 | 66–70 | 61–65 | 51–60 | 41–50 | Avant 41 | Total |
Classe d'âge | 0–5 | 6–10 | 11–15 | 16–20 | 21–30 | 31–40 | > 40 | |||
PH.1=PHL1 | Terminalia superba et divers1 | 0,3 | 0,1 | 2,0 | 2,7 | 10,2 | 2,7 | ε | 18,0 | |
PS.1 | Cupressus spp. Pinus spp. | 1,0 | ε | 1,0 | ||||||
P..1 | Total plantations industrielles | 0,3 | 0,1 | 2,0 | 2,7 | 11,2 | 2,7 | ε | 19,0 |
Autres plantations
Surfaces estimées des plantations non-industrielles réalisées à la fin de 1980
(en milliers d'ha)
Catégorie | Essences | Années | 76–80 | 71–75 | 66–70 | 61–65 | 51–60 | 41–50 | Avant 41 | Total |
Classe d'âge | 0–5 | 6–10 | 11–15 | 16–20 | 21–30 | 31–40 | > 40 | |||
P..2=PHH2 | Eucalyptus spp. | 0,1 | 0,2 | 2,5 | 0,5 | 0,2 | 3,5 |
Toutes plantations
Le tableau suivant résulte de la cumulation des deux tableaux précédents.
Surfaces estimées des plantations réalisées à la fin de 1980
(en milliers d'ha)
Catégorie | Essences | Années | 76–80 | 71–75 | 66–70 | 61–65 | 51–60 | 41–50 | Avant 41 | Total |
Classe d'âge | 0–5 | 6–10 | 11–15 | 16–20 | 21–30 | 31–40 | > 40 | |||
PHL(=PHL1) | Essences feuillues autres que celles à croissance rapide | 0,3 | 0,1 | 2,0 | 2,7 | 10,2 | 2,7 | ε | 18,0 | |
PHH(=PHH2) | Essences feuillues à croissance rapide | 0,1 | 0,2 | 2,5 | 0,5 | 0,2 | 3,5 | |||
PH | Sous-total essences feuillues | 0,4 | 0,3 | 4,5 | 3,2 | 10,4 | 2,7 | ε | 21,5 | |
PS | Essences résineuses | 1,0 | ε | 1,0 | ||||||
P | Total toutes plantations | 0,4 | 0,3 | 4,5 | 3,2 | 11,4 | 2,7 | ε | 22,5 |
1.2.3 Caractéristiques des plantations
Des données dendrométriques existent certainement sur les plantations réalisées au Zaïre, mais elles n'ont pas été trouvées dans les documents consultés. Le document (20) donne une idée de l'importance et de la diversité des expérimentations sylvicoles réalisées à Yangambi par la Division Forestière de l'ex-Institut National pour l'Etude Agronomique du Congo (INEAC). Cependant la recherche forestière semble être actuellement au point mort (33) et les estimations récentes restent très approximatives. Dans le document (17), on table sur une coupe finale de 300 m3/ha pour les plantations de limba du Bas-Zaïre. C'est un chiffre quelque peu différent (10 m3/ha/an sur une révolution de 35 ans) qui est donné pour ces mêmes plantations (système sylvo-bananier) dans le document (33) où l'on précise qu'il s'agit d'un écartement à 8m × 12m. Pour les plantations d'eucalyptus dans les environs de Kinshasa (plateau de Batéké) le même document propose une estimation de l'accroissement annuel moyen égale à 15 m3/ha/an sur une révolution de 7 ans. Ce même chiffre est utilisé par (29) sur une révolution de 9 ans pour suggérer un programme annuel de reboisement en eucalyptus de 250 ha sur le plateau de Batéké.
2. Tendances actuelles
2.1 Végétation ligneuse naturelle
2.1.1 Déforestation
Forêts denses
En 1937, Leplae (1) indiquait que les cultivateurs abattaient annuellement 400 000 ha de forêt (forêt dense humide et “forêt dense sèche” du Shaba) pour l'agriculture de subsistance. “Des arbres, disait-il, repoussent immédiatement sur ces défrichements et reconstituent un couvert”. Il s'agit de l'agriculture itinérante traditionelle analysée en détail par Tondeur (8) et qui constitue encore maintenant pratiquement le seul système d'agriculture de subsistance utilisé au Zaïre (World Atlas of Agriculture).
A part quelques remarques ici ou là sur la déforestation due à l'agriculture itinérante, il n'a pas été trouvé d'étude sérieuse sur l'impact de celle-ci sur la végétation ligneuse du Zaïre. Il a donc fallu, à partir des statistiques agricoles détaillées (notamment celles fournies par (32)) et des indications fournies par le document (8) et la publication FAO “Shifting cultivation and soil conservation in Africa”, essayer de chiffrer globalement l'accroissement annuel de l'emprise de l'agriculture itinérante sur le domaine forestier. Un chiffre comme celui de Leplae, mis à part le fait qu'il est très ancien, ne renseigne pas en effet sur la réduction nette annuelle de surface de forêt dense primaire ou “reconstituée” après culture (NHCf) ou de formation ouverte (NHc/NHO). En effet les 400 000 ha sont pris en partie dans le domaine des jachères forestières au sens large (NHCa) c'est-à-dire l'ensemble du domaine de l'agriculture itinérante (recrûs, jeunes forêts secondaires, “forêts dégradées”) et, en partie, dans des massifs extérieurs à ce domaine, vierges ou déjà exploités pour le bois d'oeuvre (et dont certains ont pu déjà être, mais longtemps auparavant, soumis à l'agriculture itinérante et puis abandonnés - “vieilles forêts secondaires”).
Il serait trop long de reproduire l'ensemble des calculs ayant conduit à l'estimation des surfaces déforestées annuellement par l'agriculture itinérante et à celle des surfaces de jachère forestière. On se bornera à donner la valeur des quelques paramètres clés ayant servi à cette estimation:
dimension des parcelles de culture itinérante en zone de forêt dense: 0,55 ha/famille au Bas-Zaïre, 0,49 ha/famille dans le reste du Zaïre;
durée de culture: 2 à 3 ans;
durée moyenne de jachère: 12 à 13 ans;
80% des défrichements annuels dans les zones déjà couvertes par l'agriculture itinérante (NHCa), 20% dans les forêts non récemment affectées par celle-ci (NHCf); ces proportions prennent en compte le regroupement de la population le long des axes de communication et l'ouverture relativement limitée de nouvelles forêts par l'infrastructre publique ou de l'exploitation forestière;
2% d'augmentation annuelle du nombre des familles pratiquant l'agriculture itinérante;
1 625 000 hectares de cultures itinérantes à la fin de 1975 en zone de forêt dense (et 2 170 000 hectares en zone de savanes boisées et forêts claires). On est ainsi arrivé au chiffre de 135 000 ha de déforestation nette annuelle en zone de forêt dens dûe à l'agriculture itinérante (dont 8 000 ha au Bas-Zaïre et 127 000 ha dans le reste de la zone forestière.
D'autres facteurs de moindre importance entraîne une destruction des forêts denses. Il s'agit, d'une part, du renouvellement des cultures pérennes pour lesquelles on a adopté une révolution uniforme de 15 ans et un transfert pour moité en forêt et pour moitié en zone de jachère. 10 000 ha environ de déforestation annuelle s'ajoutent ainsi aux 135 000 ha détruits par l'agriculture itinérante. Il s'agit, d'autre part, des processus lents et progressifs de savanisation sur les lisières de la forêt dense. On a estimé que l'ordre de grandeur de la conversion nette annuelle de forêt dense à formation mixte au contact forêt-savane est de l'ordre de 20 000 hectares (ce qui correspond à une avancée théorique uniforme de 40 mètres sur les 5 000 kilomètres de pourtour du contact forêt-savane). Enfin il convient de signaler la déforestation autour des grandes villes provenant de la surexploitation pour le bois de feu. En zone de forêt dense cela concerne surtout Kinshasa. (21) cite une “Etude du rythme le déboisement de la ville de Kinshasa” sous la forme d'une mémoire présenté par M. Moyo Masemba à l'Université nationale du Zaïre et basée sur une étude comparative de quatre couvertures photographiques aériennes entre 1954 et 1968.
Du fait de l'accroissement régulier de la population agricole on a estimé que la déforestation due à l'agriculture s'accroîtrait au même rythme c'est-à-dire qu'elles augmenterait en moyenne de 10% entre les périodes 1976–80 et 1981–85.
Les considérations précédentes sont résumées dans le tableau suivant.
Déforestation annuelle moyenne
(en milliers d'ha)
Periodes
1976–80 | 1981–85 (projections) | |||||||||
NHCf1uv | NHCf1uc | NHCf1(u) | NHCf2(i) | NHCf | NHCf1uv | NHCf1uc | NHCf1(u) | NHCf2(i) | NHCf | |
145 | 20 | 165 | ε | 165 | 155 | 25 | 180 | ε | 180 |
Formations forestières ouvertes
La culture itinérante est la principale cause d'aliénation des savanes boisées et forêt claires à l'agriculture. En 1976 1 560 000 familles occupaient 2 170 000 hectares pour des cultures de subsistance dans la zone des savanes, soit 1,39 hectare/famille. En supposant une période de culture de 2 à 3 ans ceci représente un défrichement annuel par famille de 0,56 hectare. Si l'on suppose, comme en forêt dense, que 20% des défrichements se font en dehors des savanes déjà affectées par l'agriculture itinérante, on aboutit à un déboisement annuel de l'ordre de 180 000 hectares auxquels il convient d'ajouter 10 000 hectares défrichés pour les cultures pérennes (essentiellement en formations productives NHc/NHO1). Ces chiffres doivent être réduits pour tenir compte des surfaces de forêt dense “savanisées” pendant le même temps.
On aboutit finalement à des estimations de déboisement net des savanes de 155 000 ha en formations productives (NHc/NHO1), 15 000 hectares en savanes improductives (NHc/NHO2i) pendant la période 1976–80, chiffres que l'on peut accroitre d'environ 10% pour la période quinquennale suivante.
2.1.2 Dégradation
Les feux, et dans une moindre mesure la surexploitation pour le bois de feu (autour des agglomérations) et le surpâturage dans certaines régions sont les causes principales de dégradation des formations mixtes forestières et graminéennes, surtout dans le sud du pays. L'impact au niveau national ou provincial est difficile à estimer quantitativement d'autant plus qu'il s'agit de phénomènes régressifs très lents dont les manifestations les plus évidentes sont qualitatives et consistent en particulier dans les modifications de la composition floristique. Des travaux expérimentaux et à petite échelle avaient été réalisés par l'INEAC dans les années cinquante sur la mise en défens et l'utilisation des feux précoces en savane (notamment (13) et (14)) qui donnent des indications, a-contrario, sur l'impact des feux sur la végétation ligneuse et son accroissement.
2.1.3 Tendances dans l'exploitation forestière
Compte tenu de l'augmentation de la consommation locale en grumes industrielles et de l'impact recherché du développement du secteur forestier sur l'ensemble de l'économie, (31) avait fixé vers 1976 les objectifs suivants de production de grumes industrielles aux horizons 1980 et 1990 (en milliers de m3):
Débouchés | 1980 | 1990 |
Marché local | 600 | 750 |
Marché extérieur | 400 | 2 250 1 |
Total | 1000 | 3 000 |
Il ne semble pas que cet objectif sera atteint en 1980 puisque la production (du moins celle officiellement recensée) semble stagner entre 300 et 400 000 m3 à la fin des années 70 (33) (36). Dans une étude mondiale de tendances et perspectives du bois réalisée en 1978 la FAO avait envisagé une production de 800 000 m3 en 1980 et de 1 600 000 m3 en 1990, prévision qui s'avère elle aussi trop élevée, du moins en ce qui concerne 1980. D'ici 1985 il semble réaliste d'envisager une augmentation de 50% dans les 5 ans à venir, soit 600 000 m3 aux alentours de 1985, représentant une surface couverte annuellement par l'explicitation de 40 000 ha à cette date.
La consommation de bois de feu, charbon de bois et de bois de service devrait augmenter au rythme minimum de l'accroissement de la population rurale, soit 10% environ en 5 ans.
2.1.4 Surfaces et volumes sur pied à la fin de 1985
Les considérations des paragraphes précédents conduisent aux projections chiffrées des tableaux suivants.
Surfaces de végetation ligneuse naturelle estimées à la fin de 1985
(en milliers d'ha)
NHCf1uv | NHCf1uc | NHCf1(u) | NHCf2i | NHCf2r | NHCf2 | NHCf | NHCa | |
78805 | 415 | 79220 | 19840 | 5690 | 25530 | 104750 | 8550 | |
NHc/NHO1 | NHc/NHO2i | NHc/NHO2r | NHc/NHO2 | NHc/NHO | NHc/NHOa | nH | ||
58300 | 10550 | 2050 | 12600 | 70900 | 11450 | 11300 | ||
NHBf1uv | NHBf1uc | NHBf1(u) | NHBf2i | NHBf2r | NHBf2 | NHBf | NHBa | |
(80) | (10) | (90) | (90) | (ε) | ||||
N.f1uv | N.f1uc | N.f1(u) | N.f2i | N.f2r | N.f2 | N.f | N.a | |
78805 | 415 | 79220 | 19920 | 5700 | 25620 | 104 840 | 8550 |
Volumes sur pied estimés à la fin de 1985
(en millions de m3)
NHCf1uv | NHCf1uc | NHCf1 | NHCf2 | NHCf | NHc/NHO1 | ||
VOB | VAC | VOB | VOB | VOB | VOB | VOB | VAC |
19710 | 1183 | 79 | 19789 | 3319 | 23108 | 1455 | 116 |
2.2 Plantations
Il est vraisemblable que les efforts vont s'accroitre dans le domaine des plantations forestières dans les années 80, mais il est très difficile de les quantifier dans l'incertitude où l'on se trouve du financement des programmes prévus. Ceux-ci sont au nombre de deux à notre connaissance à savoir: le développement des plantations de bois de feu du plateau le Batéké à proximité de Kinshasa (eucalyptus essentiellement - PHH2) et celui des plantations sylvo-bananières de limba dans le Bas-Zaïre (PHL1) (33) (36). En supposant, pour l'ensemble de la période 1981–85, 1 700 ha de plantations réussies du premier type et 500 ha du second type on aboutit aux tableaux suivants:
Plantations industrielles
Surfaces estimées des plantations industrielles réalisées à la fin de 1985
(en milliers d'ha)
Catégorie | Essences | Années | 81–85 | 76–80 | 71–75 | 66–70 | 56–65 | 46–55 | Avant 46 | Total |
Classe d'âge | 0–5 | 5–10 | 11–15 | 16–20 | 21–30 | 31–40 | > 40 | |||
PH.1=PHL1 | Terminalia superba et autres | 0,5 | 0,3 | 0,1 | 2,0 | 8,3 | 7,3 | ε | 18,5 | |
PS.1 | Cupressus spp., Pinus spp. | ε | 0,7 | 0,3 | 1,0 | |||||
P..1 | Total plantations industrielles | 0,5 | 0,3 | 0,1 | 2,0 | 9,0 | 7,6 | ε | 19,5 |
Autres plantations
Surfaces estimées des plantations non-industrielles réalisées à la fin de 1985
(en milliers d'ha)
Catégorie | Essences | Années | 81–85 | 76–80 | 71–75 | 66–70 | 56–65 | 46–55 | Avant 46 | Total |
Classe d'âge | 0–5 | 5–10 | 11–15 | 16–20 | 21–30 | 31–40 | > 40 | |||
P..1=PHH 2 | Eucalyptus spp. | 1,7 | 0,1 | 0,2 | 2,5 | 0,6 | 0,1 | 5,2 |
Toutes plantations
Surfaces des plantations réalisées à la fin de 1985
(en milliers d'ha)
Catégorie | Essences | Années | 81–85 | 76–80 | 71–75 | 66–70 | 56–65 | 46–55 | Avant 46 | Total |
Classe d'âge | 0–5 | 5–10 | 11–15 | 16–20 | 21–30 | 31–40 | > 40 | |||
PHL(=PHL1) | Essences feuillues autres que celles à croissance rapide | 0,5 | 0,3 | 0,1 | 2,0 | 8,3 | 7,3 | ε | 18,5 | |
PHH(=PHH2) | Essences feuillues à croissance rapide | 1,7 | 0,1 | 0,2 | 2,5 | 0,6 | 0,1 | 5,2 | ||
PH | Sous-total essences feuillues | 2,2 | 0,4 | 0,3 | 4,5 | 8,9 | 7,4 | ε | 23,7 | |
PS=PS.1 | Essences résineuses | ε | 0,7 | 0,3 | 1,0 | |||||
P | Total toutes plantations | 2,2 | 0,4 | 0,3 | 4,5 | 9,6 | 7,7 | ε | 24,7 |