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Chapitre 1. Qu'est-ce que la décentralisation?


OBJECTIF

Ce chapitre d'introduction a pour but d'expliquer en quoi les services agricoles sont importants, le rôle joué par le secteur public dans sa prestation et les raisons pour lesquelles il est apparu nécessaire, au cours des années 1980, de mettre en place des réformes institutionnelles visant à réduire la place accordée aux administrations centrales dans la fourniture de ces services. On y définit la notion de décentralisation et on y étudie les relations éventuelles entre la décentralisation, l'amélioration de la gouvernance et l'efficacité accrue des mécanismes de prestation. Ce chapitre examine également les différentes formes prises par la décentralisation, à savoir la déconcentration, la délégation, la dévolution, le partenariat ou la privatisation. Il se conclut par une analyse des bénéfices potentiels de la décentralisation et des risques et enjeux de la diversification de l'offre de services.

POINTS CLÉS

· La notion de services agricoles est extrêmement hétérogène. Elle englobe tous les biens immatériels et qui ne peuvent être stockés, qui sont fournis aux agriculteurs afin d'augmenter leur productivité.

· Durant la période qui a suivi les indépendances, les états centraux ont assumé une position dominante ou même de monopole dans l'offre de services agricoles.

· Les inefficacités et les bouleversements économiques et politiques des années 1980 ont rendu nécessaire la mise en place de réformes radicales des institutions et de procédures de décentralisation des responsabilités - notamment en matière de fourniture de services agricoles - depuis le secteur public central vers d'autres niveaux de gouvernance des secteurs publics, privés et associatifs.

· Les principales formes de décentralisation sont la déconcentration, la délégation, la dévolution, le partenariat avec les Organisations de la société civile (OSC) et la privatisation.

· La décentralisation peut aider à mettre en œuvre une bonne gouvernance, à améliorer la fourniture de services et à conduire à une démocratisation politique.

1.1 Introduction

1.1.1 La diversité et l'importance des services agricoles

La grande diversité des services agricoles

Même si ce document porte sur la décentralisation des services agricoles, il faut bien reconnaître qu'il est difficile de donner une définition précise de ce qu'on appelle les «services». Ceux-ci sont en effet extrêmement hétérogènes[1], aucune frontière exacte ne permettant de distinguer aisément les «biens» des «services». Plutôt que de chercher une limite, il est donc plus utile de concevoir la production «pure» de biens et la production «pure» de services comme les deux extrêmes d'un éventail. Du côté des «biens», l'accent porte plutôt sur la fourniture de produits matériels (par exemple, la distribution de fertilisants) et du côté des «services», plutôt sur la conduite de l'activité (par exemple, apporter un conseil pour la gestion de l'exploitation agricole). Le niveau d'interaction avec le consommateur augmenterait donc à mesure que l'on se déplace vers le côté «service» tandis que la composante produit matériel irait, elle, en décroissant[2]. Toutefois, aussi bien la distribution de fertilisants que le conseil en gestion d'exploitation font partie des services agricoles. Dans ce document, on considérera donc que les services agricoles englobent tous les biens immatériels et qui ne peuvent être stockés mais qui sont fournis aux agriculteurs afin qu'ils augmentent, directement ou non, la productivité des moyens engagés dans les processus de production de leur exploitation agricole.

La plupart de ces services concernent la commercialisation d'intrants et de produits (matériels) agricoles. A cet égard, toutes les activités associées à la transformation ou au transfert des produits, dans le temps ou dans l'espace, depuis l'unité de production jusqu'au consommateur, ont un impact sur la productivité des moyens de production de l'exploitation et constituent par conséquent des services agricoles. En outre, peuvent être intégrées dans le cadre de cette définition des activités relevant de la législation, de la réglementation, de la finance, de l'assurance, du développement de nouvelles techniques, du conseil technique et de gestion, ou encore des mesures de contrôle sanitaire et phytosanitaire. Lorsqu'on prend en compte les effets indirects sur la productivité agricole, on peut même élargir le concept de services agricoles de façon à inclure:

1.1.2 Le développement du rôle du secteur public dans la fourniture des services agricoles

L'intervention du secteur public dans l'économie

Lorsqu'ils ont acquis leur indépendance, la plupart des pays en développement ont tenté de consolider cette nouvelle indépendance politique par une stratégie d'indépendance économique. Leurs dirigeants considérèrent alors que la meilleure façon d'y parvenir passait par le contrôle des forces économiques susceptibles de s'y opposer, à savoir les investisseurs internationaux, les compagnies commerciales étrangères et les entreprises économiques nationales qui bénéficiaient de liens étroits avec l'étranger[3]. Pour y parvenir, de nombreux pays adoptèrent une approche interventionniste, indépendantiste et socialiste du développement. L'état se devait dès lors d'instaurer un contrôle non seulement des variables macro-économiques telles que les taux de change et taux d'intérêt, mais aussi des prix unitaires des biens et services. Il devait également imposer des restrictions quantitatives aux échanges et jouer un rôle considérable dans la production et la fourniture d'une large gamme de biens et de services, dont ceux considérés comme des biens privés[4].

Dans le secteur agricole, la croissance de la production agricole fut considérée comme l'une des principales priorités. On avança donc que, pour permettre cette croissance potentielle, il fallait proposer tout un ensemble intégré de services comprenant notamment l'identification et la vulgarisation de nouvelles techniques, la distribution d'intrants, l'équipement et le crédit, et la construction d'infrastructures de production et de transport. Concernant les services agricoles, compte tenu de la quasi inexistence des entreprises locales et du sous-développement de la plupart des marchés, l'état est apparu, dans la majorité des cas, comme le seul agent capable de fournir rapidement des services adéquats aux petits paysans[5]. Des encouragements financiers furent en outre proposés aux agriculteurs sous forme de subventions aux équipements et aux intrants les plus modernes, de crédits à taux bonifiés, de financements publics aux transferts de technologies et aux réseaux de distribution des intrants.

Le développement des services de recherche et de vulgarisation

Au cours des années 1960 puis 1970, le secteur public et les bailleurs investirent lourdement dans des programmes de recherche agricole, ce qui déboucha sur des découvertes capitales en matière d'amélioration des rendements de la plupart des principales cultures vivrières. Le secteur public a investi également dans l'application de ces découvertes sous forme de «paquets technologiques» s'appuyant sur l'emploi conjoint de semences, fertilisants, traitements chimiques, outils améliorés et nouvelles pratiques culturales. Des organismes publics furent alors créés, ou fortement renforcés, afin de diffuser ces paquets technologiques par le biais de démonstrations et de formations visant à convaincre les agriculteurs de les adopter. Ce mouvement fut à l'origine du développement d'énormes services de vulgarisation agricole, employant des milliers de personnes dans le secteur agricole et chargés de promouvoir les transferts de technologies, la distribution d'intrants, l'amélioration des équipements et, souvent aussi, le recours au crédit. Les services de vulgarisation nationaux avaient donc comme rôle d'assurer le lien entre la recherche agricole et l'ensemble des producteurs ruraux. La recherche agricole étant concentrée dans les organismes du secteur public, la relation avec les agriculteurs devint du domaine quasi-exclusif des personnels de terrain des différents ministères de l'agriculture.

Les banques et coopératives agricoles

Outre ces importants services de vulgarisation, le secteur public a aussi créé deux instruments visant à fournir aux agriculteurs des intrants à crédit. Il s'agit concrètement des coopératives paysannes et des banques agricoles. Dans plusieurs pays, l'offre d'intrants et la commercialisation et transformation des principaux produits agricoles ont également été prises en charge par l'état. Cette intervention et ce contrôle de l'état furent généralement plus marqués dans le cas des cultures d'exportation, celles-ci constituant bien souvent la principale source de devises et une source essentielle de rentrées fiscales. D'autres raisons expliquent cette place écrasante dans les circuits de commercialisation des produits agricoles, notamment la volonté de promouvoir de nouvelles cultures d'exportation et d'amortir les fluctuations des cours afin de réduire l'impact négatif de l'instabilité des prix sur les producteurs et les consommateurs.

La création de monopoles

La plupart des organismes publics liés à l'agriculture (services de vulgarisation, coopératives, offices de commercialisation, banques agricoles, etc.) ont comme caractéristique commune d'avoir presque toujours bénéficié d'un droit de monopole sur les facteurs de productions considérés comme nécessaires à leur activité. Des postes, tels que l'achat des productions domestiques et les importations d'intrants ou encore l'accès aux subventions gouvernementales et aux emprunts à taux nul ou bonifié destinés à financer les crédits des agriculteurs, ont ainsi pu être concernés. Le secteur public a fourni le capital et les budgets de fonctionnement de ces organismes et a pris en charge leurs déficits courants lorsque les coûts n'étaient pas couverts par le produit des ventes. Avec le temps, les subventions aux intrants et aux équipements et la charge budgétaire en coûts de capital et coûts récurrents des organismes agricoles commencèrent cependant à jouer, dans nombre de pays, un rôle de plus en plus important dans le creusement des déficits budgétaires nationaux et dans l'accroissement du poids des emprunts internationaux servant à couvrir ces mêmes déficits.

Progressivement, ces politiques eurent aussi pour conséquence de donner le jour à d'énormes organismes publics, exempts de toute contestation possible et souvent dirigés par un personnel nommé pour des raisons politiques et n'ayant guère à répondre de ses résultats. Dans nombre de pays, cela déboucha sur du clientélisme, la taille de ces organismes fournissant en effet de multiples occasions d'offrir des emplois directs et de sélectionner les clients auxquels seraient accordés des avantages financés par l'argent public. Pour les hommes politiques qui soutenaient cette politique d'intervention dans le secteur agricole, ce système se transforma rapidement en une véritable source de légitimité, la base faisant corps autour de ses propres intérêts. La consolidation de cette base en termes de nombre d'emplois contrôlés et de privilèges acquis est ainsi devenue le réel dénominateur commun réunissant politiciens, dirigeants administratifs et personnel des services publics de vulgarisation, des monopoles de distribution d'intrants, des banques agricoles et des coopératives, ce qui a fini par boucler le cercle vicieux. Tant que des organismes internationaux ont, directement ou indirectement, continué de financer par le biais de l'aide extérieure le coût de ce système que le secteur public ne pouvait pas assumer avec ses recettes fiscales, il n'y avait guère de raison d'en changer. Mais à la longue, le climat économique et politique se dégrada et les réformes devinrent nécessaires.

1.2 Le processus de réformes institutionnelles des années 1980

1.2.1 La crise de la dette

Relativement forte durant les années 1960, la croissance mondiale commença à ralentir au cours des années 1970 et 1980. Ceci s'explique assez bien par l'irruption de deux événements majeurs, à savoir les deux fortes hausses des prix du pétrole en 1973 et 1979-1980 et la crise de la dette qui éclata en conséquence courant 1982. On rappellera brièvement qu'en 1972-1973, une expansion de la demande agrégée des pays industrialisés enclencha une forte poussée inflationniste dans le monde industrialisé, provoquant une forte hausse des cours des matières premières en 1972-1974 et offrant ainsi l'occasion aux pays de l'OPEP[6] d'augmenter leurs prix à trois reprises. Ce choc entraîna une chute de la croissance réelle des pays de l'OCDE[7] alors même que les conditions inflationnistes se maintinrent jusqu'à la fin de la décennie. Un nouveau triplement des prix du pétrole en 1979-1980 précipita les pays de l'OCDE dans une profonde récession. Ces fortes tendances récessionnistes furent accentuées par l'arrivée au pouvoir de dirigeants conservateurs bien décidés à éliminer l'inflation du système économique quel qu'en soit le prix à payer en termes de chômage. Lorsque les pays industrialisés réduisirent leur offre monétaire dans le but d'éliminer cette inflation, la hausse parallèle des taux d'intérêts réels provoqua un très sérieux renchérissement des coûts des emprunts. Les pays industrialisés vécurent alors une période de récession économique, et ce jusqu'en 1986 lorsque les cours du pétrole retombèrent à un niveau plus réaliste.

La profonde crise de la dette qui éclata en 1982 est une conséquence directe des décisions prises par les pays de l'OCDE au cours des années 1970, permettant au système bancaire privé de recycler, sous forme de prêts accordés aux états du tiers monde, les énormes excédents des balances de paiements des pays de l'OPEP résultant des hausses des prix du pétrole. L'essentiel de cet argent n'avait en effet pas été employé de façon rentable et les politiques agricoles mises en œuvre par la plupart des pays en développement n'avaient alors fait que renforcer leurs déséquilibres macro-économiques.

La hausse des taux d'intérêts internationaux a en outre coïncidé avec la chute des cours des produits d'exportation des pays en développement induite par la récession des pays de l'OCDE. La combinaison de la détérioration des termes de l'échange et de la hausse inattendue des sorties financières dues au titre de la dette eurent comme effet de créer une forte pression sur la balance des paiements des pays en développement. Mais à ce moment, les banques privées n'étaient plus du tout disposées à prêter de nouveaux «pétro-dollars» à ces pays sur-endettés. Les aides financières des pays de l'OCDE chutant également, l'étau fiscal ne fit que se resserrer. Les pays endettés n'eurent dès lors plus d'autre solution que de chercher auprès du FMI l'appui nécessaire pour rééquilibrer leur balance des paiements.

1.2.2 Les programmes de stabilisation du FMI

Les programmes du FMI qui furent alors mis en place visaient à corriger les déséquilibres des paiements en imposant une baisse de la demande intérieure par le biais d'une restriction du crédit et d'une politique de «réduction» et de «réorientation» de la consommation.

Les effets des politiques de réduction de la consommation sur l'agriculture

Les politiques de «réduction de la consommation» visent généralement le secteur public, considéré comme étant à l'origine de l'essentiel de l'excès de la demande. La diminution du déficit budgétaire permet de réduire la pression inflationniste mais débouche généralement sur une compression des services productifs et des activités sociales ayant un effet négatif sur la production et la distribution du revenu. Les principaux outils d'une politique de réduction de la consommation, à savoir les restrictions au crédit domestique et les réductions des dépenses publiques et des subventions, sont eux aussi susceptibles d'avoir un impact important sur l'activité agricole. A défaut d'accorder un caractère prioritaire au secteur agricole, une forte contraction du crédit intérieur peut en effet peser de façon sensible sur la trésorerie à court et moyen terme des exploitations et donc sur leurs disponibilités saisonnières ou à plus longue échéance. Les facteurs limitants structurels permettant d'améliorer la productivité agricole risquent dès lors de ne plus être levés. Dans le même temps, la baisse des dépenses publiques courantes risque d'entraîner des négligences dans l'entretien des infrastructures rurales telles que les routes secondaires, et éventuellement aussi des compressions de personnel ou encore des baisses de l'efficacité des services de vulgarisation agricole, etc. Les tentatives visant à transférer les coûts de ces services initialement assumés par le secteur public à la charge des agriculteurs par le biais de programmes de «recouvrement des coûts» risquent par ailleurs d'entraîner une baisse de leur utilisation. Les efforts d'ordre fiscal, comme par exemple l'augmentation des droits d'importation et des taxes à l'exportation ou sur la valeur ajoutée, risquent enfin d'affecter directement le secteur agricole soit par le biais d'une hausse des prix des intrants, soit par une baisse des prix des produits, soit encore par une hausse des prix des biens de consommation subventionnés.

Les politiques de réorientation de la demande

Les politiques de «réorientation de la demande» visent à réduire le déséquilibre des comptes courants en augmentant la demande nationale et internationale de biens domestiques et en favorisant la production de biens faisant l'objet d'échanges internationaux au détriment des biens non-échangeables. Les instruments habituels de ces politiques sont la dévaluation du taux de change et la levée du contrôle de prix et des restrictions commerciales qui favorisent les biens étrangers aux dépens des productions nationales. De telles politiques peuvent s'avérer profitables pour les agriculteurs qui produisent des biens échangeables au niveau international mais il faut noter qu'elles peuvent aussi entraîner une hausse des prix des intrants faisant l'objet d'échanges internationaux.

Dans la mesure où les autres bailleurs bilatéraux et multilatéraux conditionnèrent l'octroi de leurs crédits à l'adhésion par les pays emprunteurs aux programmes du FMI, les difficultés à satisfaire aux conditions imposées par ce dernier ne firent qu'accentuer les difficultés de ces pays à croître et s'adapter.

«Dégraisser l'état»

Les crises économiques des années 1970 déclenchèrent également une profonde transformation des analyses théoriques et des attitudes politiques[8] qui annoncèrent une acceptation plus partagée de l'approche monétariste de la stabilisation macroéconomique. Ce changement coïncida et se mélangea avec l'élaboration d'un programme et d'orientations politiques d'ordre néo-libéral mis en avant par les gouvernements conservateurs du début des années 1980. L'idée maîtresse de ce nouveau programme politique consistait à accorder la priorité à la libéralisation économique indépendamment de toute autre considération. En ce sens, il s'agissait de «dégraisser l'état» tant en matière d'actifs financiers détenus qu'en ce qui concerne ses fonctions de réglementation commerciale, industrielle, agricole ou financière, y compris sur le plan des investissements en capitaux étrangers. Les arguments économiques avancés pour soutenir ce programme centraient leurs attaques sur l'impossibilité pour l'état de créer un bon système de soutien, compatible avec le fonctionnement d'une économie efficace. L'ampleur des interventions publiques dans le secteur agricole de nombreux pays et la faiblesse de leurs résultats étaient souvent citées comme la preuve manifeste de cette incapacité[9]. Les mécanismes de correction qui furent dès lors préconisés s'appuyaient sur les privatisations et de profondes dérégulations, et reposaient sur le credo selon lequel le libre fonctionnement des marchés favoriserait l'utilisation la plus efficace des ressources les plus rares. Il était également avancé que la libéralisation économique améliorerait la justice sociale dans la mesure où la population plus pauvre était justement celle qui tirait le moins d'avantages des politiques interventionnistes alors en vigueur.

1.2.3 La Banque mondiale et les programmes d'ajustement structurel

Les prêts politiquement conditionnés

Au cours des années 1970, la Banque mondiale avait accordé une forte attention à la réduction de la pauvreté et avait substantiellement augmenté ses prêts par projet dans des domaines tels que le développement rural des zones de petite paysannerie. A la fin de cette décennie, la Banque mondiale commença cependant à se pencher sur les perspectives de croissance à long terme des pays en développement et sur leurs besoins de réaliser un ajustement structurel de leurs économies. En outre, elle fit sien le programme néo-libéral de libéralisation économique[10]. Pour ce faire, la Banque mondiale modifia progressivement les modalités de son aide, délaissant les prêts par programme qui avaient souvent servi à soutenir la fourniture de services d'appui à l'agriculture au profit de prêts politiquement conditionnés visant à réaliser des ajustements structurels.

L'expérience avait également démontré que l'approche conventionnelle de la «stabilisation» par le FMI était en elle-même totalement inacceptable et impropre à résoudre les problèmes de la plupart des pays en développement. Premièrement, parce que les problèmes de balance des paiements affrontés par nombre de ces pays étaient chroniques et non conjoncturels. Deuxièmement, parce qu'en même temps que les restrictions aux importations et aux investissements provoquaient une réduction des niveaux de production et d'emploi et retardaient la croissance à long terme sans pour autant corriger automatiquement les déséquilibres extérieurs, toute tentative de réduction de la consommation globale risquait de fait de compromettre le niveau de vie déjà faible de secteurs entiers de la population. Troisièmement, parce que les économies étaient confrontées à de multiples problèmes structurels, notamment celui du secteur agricole, et que ceux-ci rendaient en particulier inopérantes les politiques de réorientation de la demande.

Les ajustements structurels avec la croissance

La combinaison de ces différents éléments conduisit à définir une nouvelle approche «d'ajustements structurels avec la croissance» qui tentait de réaliser l'ajustement des déséquilibres macroéconomiques et structurels de façon suffisamment ordonnée pour stimuler la croissance tout en replaçant la balance de paiements dans une situation tenable à moyen terme. Au cours des années 1980, la Banque mondiale développa donc un programme de Prêts à l'ajustement structurel (PAS) consistant à octroyer, indépendamment des projets, des crédits venant en appui aux programmes, politiques et institutions et visant l'ajustement structurel et la libéralisation économique. Le FMI modifia également son approche et mit en place une Facilité d'ajustement structurel (FAS) dont la mise en œuvre nécessite qu'un document cadre complet portant sur trois ans soit formulé conjointement par l'autorité gouvernementale concernée, la Banque mondiale et le FMI. Ce document précise les objectifs macroéconomiques et structurels de l'ajustement, les stratégies, les instruments et les besoins financiers ainsi qu'un programme d'ajustement conçu afin d'obtenir dans le délai prévu des résultats substantiels en matière de viabilité extérieure.

La décentralisation: un des éléments du processus de réforme

Durant les années 1980, des mesures commencèrent également à être envisagées afin de décentraliser l'économie par le biais de la privatisation de certaines entreprises publiques, de la déconcentration des administrations publiques les plus centralisées, et du renforcement des collectivités territoriales auxquelles furent concédées diverses fonctions auparavant assumées par les services centraux du secteur public. Les bailleurs et les états reconnurent alors l'importance du rôle joué par les organisations non gouvernementales (ONG) dans la fourniture de services aux petits paysans et commencèrent à envisager des moyens et méthodes permettant de les associer de façon coordonnée au travail de développement rural, dans le cadre de politiques nationales de décentralisation.

Un nouveau programme politique

Vers la fin des années 1980, on peut dire que la nouvelle orientation des politiques de développement rural, qui s'inspirait principalement des principes de libéralisation et de décentralisation, était déjà parvenue à une certaine cohérence dans la plupart des pays. Durant les années 1990, ces politiques furent mises en œuvre de diverses façons et plus ou moins intensément dans pratiquement tous les pays en développement. Les nouvelles politiques transformèrent les stratégies de développement en matière de recherche agricole, fourniture d'intrants, commercialisation des produits, vulgarisation, services vétérinaires, services financiers ruraux, gestion des ressources hydriques, etc. En fait, l'ensemble des activités de développement rural s'en est trouvé modifié.

1.3 Définition de la décentralisation

Le transfert des compétences

Il a été expliqué à la fin du paragraphe 1.2.3 comment la décentralisation avait été mise à l'ordre du jour des politiques dans le courant des années 1980. Mais qu'entend-on exactement par décentralisation? L'encadré 1.1 en présente une définition couramment acceptée qui se réfère à un vaste processus de réformes institutionnelles visant à améliorer la gouvernance par le transfert de compétences depuis le secteur public central vers d'autres niveaux de gouvernance. Les implications de cette définition en termes de compétences organisationnelles sont par ailleurs illustrées dans le schéma 1.1.

Encadré 1.1 Une définition de la décentralisation

«le transfert des compétences en matière de planification, gestion, mobilisation et affectation des ressources depuis le secteur public central vers:

(a) les unités de terrain des ministères et organismes publics centraux,

(b) les unités et niveaux subordonnés de l'administration,

(c) les entreprises et organismes publics autonomes,

(d) les instances territoriales ou spécialisées, et

(e) les organisations du secteur privé et du secteur associatif».

Source: Rondinelli, D. (1981). L'élément (e) a été modifié par rapport à la définition originale de façon à intégrer les entreprises privées et la totalité du secteur associatif.

Les réformes de décentralisation portent sur:

Les différents niveaux de gouvernance

Lorsqu'on définit la décentralisation, on est constamment amené à mentionner différents «niveaux» du système de gouvernance. Pour l'administration publique, on distingue ainsi habituellement cinq niveaux[11], à savoir:

Schéma 1.1 La décentralisation des compétences depuis le secteur public central

Définition de l'administration centrale

Les ouvrages sur la décentralisation emploient aussi couramment des termes tels que «administration centrale» et «collectivités territoriales». A grands traits, on peut dire que la notion d' «administration centrale» renvoie à toutes les instances de l'administration publique qui dépendent hiérarchiquement du gouvernement et de ses ministres en charge des différentes instances de l'administration centrale. Ces instances peuvent tout aussi bien se trouver localisées au siège des ministères de l'administration centrale qu'en différents endroits du territoire. Elles ont des compétences diverses selon qu'elles opèrent au niveau régional, provincial, départemental ou en deçà. Dans le cas des états fédéraux, l'administration centrale correspond normalement à l'administration fédérale. Toutefois, les administrations des différents états jouissent souvent d'une large autonomie sur différents domaines et opèrent donc par rapport à ces domaines en tant qu'administrations centrales sur leur propre territoire. Normalement, elles n'ont pas besoin de l'autorisation de leur autorité supérieure pour entreprendre leurs activités.

Définition des collectivités territoriales

Le terme «collectivités territoriales» renvoie aux instances de l'administration qui ne dépendent pas hiérarchiquement de l'administration centrale pour remplir les fonctions qu'elles ont autorité à exercer de façon autonome. Le bon exemple correspond souvent aux instances départementales mais certains pays accordent également d'importantes marges d'autonomie au niveau des régions, provinces et municipalités. Ceci étant, au niveau municipal ces collectivités n'existent bien souvent que dans les zones urbaines d'une certaine importance, la décentralisation des compétences s'arrêtant, dans le cas des zones rurales, au niveau départemental. Certains pays, tels que la Bolivie, le Mali ou encore le Cap-Vert, ont aussi transféré des compétences au niveau municipal dans les zones rurales. D'autres pays, comme l'Inde, ont par ailleurs créé des administrations rurales locales au niveau des villages (les panchayat).

Les personnes responsables des collectivités territoriales peuvent, selon les cas, être élues localement ou bien rémunérées par l'administration centrale. Mais le terme de collectivités territoriales tend de plus en plus à être associé à l'existence d'un processus démocratique de sélection. Il est en outre important de ne pas confondre les instances locales de l'administration centrale et les administrations des collectivités territoriales. Même si ces deux types d'administrations opèrent sur une même circonscription administrative, leurs modes de fonctionnement sont généralement différents. Les premières sont comptables de leurs actes devant les dirigeants politiques de l'administration centrale, les secondes devant les dirigeants politiques des collectivités territoriales. En dernier ressort, elles sont donc responsables devant deux types distincts d'électorat ayant confié ces deux niveaux de pouvoir à différents hommes et femmes politiques.

Les organisations de la société civile (OSC)

Outre les administrations publiques, les OSC font également partie du système de gouvernance d'un pays. Elles réunissent l'ensemble des personnes organisées autour d'un intérêt commun, généralement avec des objectifs définis. Les OSC peuvent opérer à très bas niveau, au niveau de la base, mais aussi former des collectifs d'organisations. Ceux-ci opèrent au niveau infra-départemental, départemental, régional ou national, voire même au niveau international.

Les organisations communautaires

Généralement, le niveau communautaire n'est pas pris en compte dans la structure de l'administration publique. Il joue pourtant un rôle important en zone rurale. Le terme de «communauté» est employé aussi bien au niveau du système de gouvernance de la société civile qu'au niveau d'une organisation sociale[12]. Ce qui caractérise une communauté, c'est l'existence d'une unité de résidence socio-économiquement indépendante. Même si, dans certains pays, de toutes petites unités administratives publiques de type «municipal» peuvent coïncider avec une «communauté», la communauté correspond à un niveau bien spécifique, inférieur à celui du département ou de la municipalité. Au-delà de la connotation géographique et de la multiplicité de leurs objectifs, les organisations communautaires se distinguent des OSC en ce qu'elles sont supposées agir dans l'intérêt de l'ensemble de leurs membres. Il est cependant tout à fait normal d'y trouver aussi différents groupes d'intérêts, éventuellement unis sous forme de fractions réunissant certains membres de la communauté[13].

Les OSC et la fourniture de services agricoles

En zone rurale, les systèmes non-gouvernementaux de gouvernance régis depuis la société civile, par des groupes de personnes ou des communautés ont une énorme importance. Les groupements d'individus organisés autour d'un pôle commun d'intérêt sont en effet très courants. Des groupes d'agriculteurs, hommes et femmes, se constituent ainsi très souvent pour mettre en œuvre un projet de micro-irrigation, pour gérer une réserve villageoise de céréales ou encore pour s'approvisionner en fertilisants. De la même façon, les femmes se réunissent souvent en groupements pour entreprendre des activités génératrices de revenus, pour payer quelqu'un qui surveillera leurs enfants pendant qu'elles iront travailler ou pour créer un fonds rotatif d'épargne et de crédit. Dans de nombreuses sociétés rurales, des groupes de solidarités qui soutiennent les infirmes et les malades ou récoltent de l'argent pour organiser des funérailles font partie de la structure sociale traditionnelle. Les gens forment ces groupes lorsqu'ils se rendent compte qu'ils ne peuvent pas atteindre un objectif à partir de leurs seules forces individuelles. Lorsque le groupe est stable et poursuit durablement un objectif, il arrive qu'il se constitue en association formelle conformément aux lois en vigueur dans le pays. Des organisations professionnelles telles que les associations locales de planteurs de coton ou les associations de producteurs de cacao peuvent ensuite former des organisations pyramidales au niveau régional ou national. Lorsqu'elles se constituent d'une façon spontanée, les Chambres d'agriculture rentrent aussi dans cette catégorie. Ce n'est par contre pas le cas lorsque c'est l'état qui les crée pour fournir des emplois à des fonctionnaires retraités ou renvoyés du Ministère de l'agriculture.

Résumé

Pour résumer, on s'est référé ici de manière conceptuelle à quatre niveaux différents au sein de la pyramide de la gouvernance d'un état-nation: les niveaux national, régional, municipal et communautaire. Les noms et les compétences correspondant à ces niveaux peuvent varier fortement d'un pays à l'autre. Le cas des états fédéraux est un peu plus compliqué. Dans certains cas, d'autres niveaux doivent par ailleurs être rajoutés mais cela n'a finalement guère d'importance théorique. Enfin, différentes unités de l'administration publique et des OSC fonctionnent à des niveaux différents avec des compétences différentes. Le schéma 1.2 présente de manière simplifiée ces divers niveaux d'un système de gouvernance dans le cas d'un état-nation.

En général:

Schéma 1.2 Les niveaux de gouvernance

N.B. Les flèches en gras indiquent des chaînes de commandement descendantes et les chaînes avec des tirets les initiatives ascendantes des organisations. Les chaînes en pointillés correspondent aux démarches mixtes qu'on trouve dans les réseaux ruraux d'institutions de services financiers.

1.4 Les formes de décentralisation

Introduction

Le transfert des compétences et des moyens requiert l'instauration d'un nouveau type de relations entre l'administration centrale et les organisations au bénéfice desquelles est réalisé ce transfert. Les caractéristiques de ces relations et les objectifs du transfert déterminent en conséquence la nature du processus de décentralisation mis en œuvre. Il est dès lors utile d'opérer une distinction entre les cinq principales formes de décentralisation (voir le schéma 1.3), à savoir:

Schéma 1.3 Les cinq principales formes de décentralisation

Les différences entre les diverses formes de décentralisation administrative s'expliquent mieux à partir de trois variables[14] relatives aux objectifs visés par les politiques de décentralisation mises en œuvre:

Les différentes formes de décentralisation mettent l'accent sur ces trois variables de différentes façons.

La déconcentration

L'objectif principal peut être d'améliorer l'efficacité de la production de l'administration tout en renforçant l'impact des services fournis en tant qu'objectif secondaire. Ceci peut être réalisé en introduisant des changements administratifs et culturels au sein des structures unitaires existantes et en transférant, exclusivement dans le cas des activités de tutelle, la responsabilité, le processus de décision et les moyens aux chefs de ces unités locales. La prestation du service et son financement public sont donc assurés par une même administration. En outre, le droit du travail et les règles des marchés publics propres à l'administration centrale continuent de s'appliquer. Dans de tels cas, la décentralisation prend la forme d'une déconcentration.

La déconcentration ré-attribue certaines tâches et fonctions spécifiques jusqu'alors exécutées par le personnel du siège de l'administration centrale à des fonctionnaires basés en différents endroits du pays. Le personnel, l'équipement, les véhicules et les ressources budgétaires sont transférés à des unités de services départementaux ou régionaux. L'autorité de décision nécessaire à la conduite autonome des opérations est confiée aux responsables de ces services alors qu'auparavant ces décisions devaient être prises au siège de l'administration centrale ou tout au moins avalisées par celui-ci.

La délégation

Des objectifs similaires en matière de productivité ou d'efficacité de la répartition peuvent également être atteints en séparant la production ou la prestation d'un service public particulier de son financement et en modifiant la structure existante de l'administration publique. La responsabilité et les moyens nécessaires à la mise en œuvre de tâches spécifiques et à la prestation de certains services sont transférés à un organisme public, une entreprise publique, une entreprise privée ou une ONG dans le cadre d'un contrat qui offre une certaine autonomie d'interprétation des tâches qui y sont consignées. Dans ce cas, la décentralisation prend la forme d'une délégation. A titre d'exemple, on peut citer le cas d'une entreprise publique de distribution d'eau qui se voit confiée la responsabilité de planifier, construire et faire fonctionner les réseaux de distribution (au-delà d'une certaine taille) à l'échelle du pays ou encore le cas d'une agence de développement d'un bassin hydraulique, celui d'un institut de recherche agricole, d'un entrepôt céréalier stratégique ou bien d'un organisme de gestion de projets. La plupart de ces organismes bénéficiant d'une délégation de pouvoir ne sont pas tenus de suivre les procédures administratives publiques concernant la gestion des ressources humaines et des marchés. La délégation peut être appliquée à tout niveau de l'administration et ne concerne pas exclusivement la fourniture de services publics.

La dévolution

Lorsque l'objectif principal est d'améliorer l'efficacité de la répartition (et en second lieu seulement d'améliorer l'efficacité de la production), une façon de procéder consiste à ouvrir le système aux usagers du service fourni. L'objectif principal nécessite en effet que des usagers participent - généralement par le biais de représentants élus au niveau des administrations locales - à la planification et l'évaluation des services concernés. Dans de tels cas, des changements significatifs doivent être apportés à la structure de l'administration publique et la décentralisation prend alors la forme d'une dévolution. Les administrations locales se voient confiée la responsabilité de décider quels sont les services prioritaires et à qui ils doivent profiter. La représentation des usagers est assurée par des mécanismes électifs. Il y a coïncidence entre les instances publiques qui assurent la prestation du service - production ou fourniture - et celles qui assurent son financement mais, en règle générale, les unités administratives des niveaux inférieurs ne reçoivent de l'administration centrale qu'une partie des moyens financiers dont elles ont besoin et doivent donc équilibrer leur budget par l'instauration de taxes locales ou de mécanismes de recouvrement des coûts.

La dévolution requiert des modifications d'ordre politique et fiscal. Les administrations locales auxquelles sont confiés les moyens et responsabilités acquièrent une capacité autonome d'initiative et de décision concernant la définition de leurs propres règles, buts et objectifs. Elles acquièrent également une capacité d'élaboration et de mise en œuvre de leurs politiques et stratégies et une capacité d'affectation des ressources entre leurs différentes activités au sein du domaine de compétence qui leur est assigné. En outre, elles sont souvent mandatées pour trouver des ressources financières soit par des taxes, soit même, dans certains cas, en empruntant sur les marchés financiers.

La dévolution peut être plus ou moins forte selon le degré de responsabilité (de contrôle) que conserve l'administration centrale sur les administrations locales. Cela concerne en particulier l'emploi des ressources transférées depuis le centre mais également d'autres moyens tels que les fonctions confiées aux représentants de l'administration centrale nommés à un niveau régional ou départemental (commissaires, préfets, chefs de cercle, etc.). Si le mécanisme de responsabilisation - autrement dit le contrôle de l'administration centrale - interfère avec l'autonomie de décision des administrations locales, ou si le transfert des ressources est visiblement insuffisant face au transfert de compétences, on pourra dire que la dévolution est insuffisante.

Dans cette perspective, il est dès lors utile d'analyser les trois différentes formes de décentralisation de l'administration publique en fonction de la combinaison du degré d'autonomie et de la localisation des responsabilités. C'est ce qu'illustre le tableau présenté dans le schéma 1.4.

Schéma 1.4 Autonomie, responsabilité et formes de décentralisation

RESPONSABILITE

AUTONOMIE

Faible

Forte

Centrale

Déconcentration

Délégation

Locale

Dévolution insuffisante

Dévolution effective

Source: De Muro et al. (1998).

Le partenariat

Il est possible de se fixer des objectifs similaires en matière d'efficacité de la production et de la répartition, mais avec un niveau supérieur de décentralisation, par le biais d'un transfert des compétences de planification et de fourniture des services auprès des OSC. Même si la dévolution des services publics aux collectivités territoriales constitue un véritable pas en avant pour se rapprocher des gens, la «distance» qui sépare un village d'une administration départementale reste en effet toujours considérable lorsqu'on l'envisage du point de vue des habitants. Or, les administrations départementales et municipales traitent en priorité les problèmes communs à plusieurs localités comme c'est le cas de la garantie d'accès à l'éducation primaire, aux soins, à la distribution de l'eau, aux places de marché, ou encore de l'entretien des routes secondaires qui desservent plusieurs villages. Cette hiérarchisation tend à concentrer la fourniture des services aux centres urbains et aux localités rurales les plus importantes. Les capacités limitées des collectivités territoriales se retrouvent donc souvent surchargées sous le poids des responsabilités ce qui, en définitive, ne fait que renforcer la tendance à négliger les besoins de la population de base. L'influence dans les administrations départementales et municipales de personnalités actives et énergiques peut certes s'avérer alors utile mais pas toujours dans le sens d'un renforcement des services proposés aux communautés villageoises. En outre, certains services tels que la formation, l'organisation communautaire, la promotion des services financiers ruraux, le financement de projets d'entraide ou l'appui aux activités génératrices de revenus, sont souvent bien mieux conçus et assurés par des organisations différentes des collectivités territoriales.

Les mesures de dévolution impliquant les OSC vont bien au-delà du niveau des collectivités territoriales et touchent la portion du système de gouvernance qui reste hors d'atteinte des différents niveaux de l'administration publique et des organismes délégués. Compte tenu de l'importance de leur contribution au développement économique, social et humain, le rôle que les OSC sont susceptibles de jouer dans la décentralisation peut dès lors s'avérer considérable, en particulier dans les zones rurales. Des mécanismes de partenariat peuvent donc reposer sur une ONG chef de file ou sur un acteur intermédiaire de nature plus complexe (tel qu'une association de droit privé) au travers duquel les différents groupes d'intérêts locaux, les diverses associations, les ONG travaillant dans la zone et les représentants des collectivités territoriales se réuniront en tant que membres ayant des droits égaux.

Délégation ou partenariat?

La démarche évoquée ci-dessus se distingue nettement de celle qui consisterait à déléguer à des ONG la responsabilité de fournir des services spécifiques planifiés par l'administration dans le cadre d'un contrat. Dans le cas présent, ce sont en effet les OSC qui formulent elles-mêmes leurs propres stratégies et projets afin d'atteindre les objectifs mentionnés dans le cadre général des politiques publiques; ce sont donc elles qui décident des services et projets dont elles seront responsables. Dans ce cas, les financements publics constituent une contribution à une prestation privée. L'administration centrale se contente de transférer une partie du financement nécessaire, le reste étant constitué de contributions volontaires des membres des OSC et d'autres fonds privés mobilisés par les OSC. La réglementation du travail propre à l'administration et ses procédures de passation de marchés ne s'appliquent pas. Dans de telles situations, appropriées au développement rural, la dévolution prend la forme d'un partenariat au développement.

Ces organisations intermédiaires planifient l'allocation des ressources disponibles qui doit alors être approuvée par la totalité des membres. Elles canalisent également, à destination des organisations de base, les fonds transférés par l'administration centrale ou collectés par des organismes privés. Ces organisations de base mettent alors en œuvre leurs propres projets et assurent les formations et autres services d'appui. Le partenariat constitue pour les administrations un mécanisme efficace pour atteindre des groupes cibles de population qui, dans le cadre de la dévolution aux collectivités territoriales, ne pourraient être touchés sans influer sur leurs propres priorités et donc sans risque pour l'efficacité de la répartition de la dévolution. L'administration doit concevoir des instruments spécifiques leur permettant d'abord d'allouer aux OSC des ressources égalant celles que ces dernières auront mobilisé auprès de leurs membres, et ensuite de les appuyer dans la mise en œuvre des activités servant à atteindre les objectifs communs aux OSC et à l'administration.

Privatisation

Si l'administration centrale souhaite abandonner toute participation directe aux activités de formulation et de contrôle, elle peut enfin essayer d'améliorer la productivité et l'efficacité de la répartition par un transfert de la propriété et/ou du contrôle des actifs des services publics à destination du secteur privé. Dans ce cas, la décentralisation prend la forme d'une privatisation. Généralement, la privatisation équivaut à placer les services dans le cadre des échanges marchands, l'usager devenant un consommateur payant le service proposé. L'administration peut toutefois continuer de subventionner ou de taxer certains de ces services afin d'atteindre ses propres objectifs.

Dans le sens où elle est définie par Adam et al. (1992), la «privatisation» peut être obtenue par:

«(i) la vente totale ou partielle de ses actifs par l'état;

(ii) le transfert des actifs publics au secteur privé dans le cadre de baux locatifs; et

(iii) l'introduction de mesures contractuelles de gestion» (p.6).

1.5 Les bénéfices potentiels de la décentralisation

Décentralisation et gouvernance

La décentralisation concerne la gouvernance. Le terme gouvernance a deux significations. La première se réfère à «l'ensemble des institutions et organisations qui régulent la vie de la société»[15]. Elle renvoie donc aux règles (lois formelles et coutumières, règlements internes aux organisations, devoirs moraux, obligations contractuelles, etc.) et aux institutions sociales (famille, église, municipalité, associations professionnelles, partis politiques, institutions financières, entreprises, coopératives, cours de justice, gouvernement, parlement). La seconde renvoie à l'action de gouverner, c'est-à-dire à la façon d'établir des institutions (par exemple comment une loi est proposée puis édictée) et à la façon selon laquelle les organisations se comportent, gèrent leurs affaires et gouvernent la population. Ces deux sens sont englobés dans la notion de «bonne gouvernance».

Au cours des années 1990, une attention croissante a été accordée à la question de la bonne gouvernance c'est-à-dire à tout ce qui est nécessaire pour atteindre des objectifs sociaux tels que la stabilité, la croissance, l'équité, la justice ou l'efficacité et à la pratique de ceux qui font fonctionner des organisations en vue d'atteindre des objectifs de ce type. Dans le présent document, les questions de bonne gouvernance sont abordées dans la perspective un peu plus étroite de fournir efficacement des services d'appui à l'agriculture.

L'analyse et la réforme des institutions qui étayent la structure politique culturelle et administrative d'un pays sont souvent nécessaires à la mise en œuvre d'une bonne gouvernance. La décentralisation - au sens le plus large du terme - apparaît alors comme un élément clé de la nouvelle approche.

Décentralisation et amélioration des services offerts

La décentralisation a également pour objectif que le système économique et politique réponde mieux aux besoins et priorités de la population. En jetant un pont sur le fossé qui sépare les producteurs des utilisateurs de biens et de services, les politiques de décentralisation sont en effet censées permettre d'atteindre les trois principaux objectifs suivants:

Décentralisation et démocratisation

Par les changements d'affectation des compétences et des ressources qu'elle implique entre les différents niveaux et agents de la fonction publique, la décentralisation de l'administration centrale peut également être rattachée au processus de démocratisation[16] politique. Lorsqu'un gouvernement est librement élu par la population, on peut en effet s'attendre à ce que les liens entre les élus au pouvoir et leur électorat soient d'autant plus forts qu'on s'adresse à un bas niveau de la structure gouvernementale. Le débat politique devrait, par conséquent, porter plus précisément sur des problèmes locaux et être finalement beaucoup plus accessible aux électeurs. La relation plus étroite entre citoyens et hommes politiques et le caractère plus concret du débat politique devraient en outre renforcer l'obligation des dirigeants à rendre des comptes à ceux qui les élisent. Ce mouvement devrait donc contribuer à:

L'ensemble de cette analyse et, avec elle, le paradigme[17] de la décentralisation peuvent être synthétisés à l'aide du diagramme suivant (schéma 1.5).

Schéma 1.5 Le paradigme de la décentralisation

1.6 Risques et enjeux de la diversite de l'offre de services

On verra dans les chapitres qui suivent que l'ampleur de la décentralisation des activités vers le secteur privé et les OSC et vers les différents niveaux de l'administration et des diverses instances publiques est une question essentiellement empirique. Cette ampleur varie énormément en fonction des capacités de gouvernance, de la taille du pays et du type de services considérés. La diversité de l'offre de services présente de nombreux avantages. Elle permet de tester différentes méthodes, d'accroître le volume des ressources et de multiplier les expériences et perspectives. Elle peut cependant être aussi à l'origine de différences de traitement, de redondances et parfois même de conflits. Dans certains cas, différents systèmes d'aide sont mis en place dans une même zone. Une partie de ceux-ci peuvent alors empêcher l'émergence d'une dynamique de développement durable ou la répartition efficace des ressources. C'est par exemple le cas lorsque des banques publiques ou des ONG accordent des crédits à taux bonifiés alors qu'un réseau de crédit mutuel tente dans le même temps de promouvoir la constitution d'associations d'épargne et de crédit financièrement durables. C'est aussi le cas lorsqu'une administration construit et entretient un réseau de distribution d'eau sans chercher à rentabiliser ses coûts tandis que des OSC tentent de mobiliser des avances de trésorerie auprès des bénéficiaires qui doivent entretenir eux-mêmes leurs infrastructures.

Des buts identiques mais des priorités et stratégies différentes

L'administration centrale, les collectivités territoriales et les OSC peuvent partager les mêmes objectifs sans pour autant être d'accord sur les stratégies et priorités. Dans le cas d'une déconcentration ou d'une délégation, cela ne créera généralement pas de difficultés car, en théorie, l'administration centrale dirige fermement le processus. Mais les difficultés commencent à apparaître avec la dévolution et le partenariat. Que doit alors faire l'administration centrale lorsque les collectivités locales et les OSC affichent des hiérarchisations distinctes des priorités en se targuant chacune du soutien de la population à ses propres initiatives? Et que se passe-t-il lorsque la hiérarchisation locale des priorités diffère sensiblement des priorités de l'administration centrale identifiées dans le cadre d'un plan de développement?

Dans le but d'améliorer le niveau de vie en milieu rural, l'administration centrale peut par exemple accorder une place prioritaire au développement des infrastructures de transport, à la diffusion de nouvelles techniques d'agriculture vivrière, à la diversification et à la commercialisation des cultures d'exportation ou à la distribution et au traitement de l'eau dans les agglomérations rurales. Les collectivités locales auront par contre une stratégie distincte d'amélioration des conditions de vie. Elles accorderont ainsi une place prioritaire à l'éducation, aux centres médicaux et aux hôpitaux de taille moyenne, le même niveau de priorité que l'administration centrale en matière de traitement et distribution d'eau, mais une priorité moindre à la vulgarisation agricole. Les OSC manifesteront quant à elles le même intérêt pour l'éducation et une priorité plus forte pour la formation technique, l'accès à l'eau dans les villages, l'existence de dispensaires villageois, l'aide aux femmes enceintes au niveau villageois, l'appui à la culture maraîchère irriguée destinée à l'autoconsommation et au marché local. Les administrations centrales seront par ailleurs plus enclines à promouvoir des activités telles que la vulgarisation, la construction de chemins ruraux et l'établissement de services sociaux dans les zones à fort potentiel car ces activités auront un impact supérieur sur la production, un moindre coût par habitant desservi et elles offriront de meilleures possibilités de couvrir les dépenses. La plupart des collectivités territoriales et des OSC souhaiteront par contre une répartition géographique des services nettement différente.

L'administration peut dès lors aborder ces problèmes de différentes façons, par exemple:

Dans certaines expériences de décentralisation, on a commencé par limiter l'indépendance des collectivités territoriales avant d'initier ensuite une réelle dévolution. Au Ghana, par exemple, un système tripartite a été mis en place au sein des assemblées départementales (AD). Une partie des membres de ces AD est élue. Le reste se scinde en deux groupes dont l'un rassemble les chefs traditionnels de la zone et l'autre des fonctionnaires seniors des services déconcentrés des principaux ministères, ce dernier groupe exerçant une influence considérable. Les capacités des assemblées ont par ailleurs été renforcées afin de planifier et gérer le budget de développement du département et pouvoir assumer la responsabilité de leurs résultats auprès de leur électorat. Tout cela est essentiel. L'expérience montre en effet que les dirigeants s'impliquent d'autant plus dans les affaires publiques qu'ils participent effectivement aux processus de décision.

Une réelle dévolution nécessite de la part de l'administration centrale le respect de la diversité des priorités et des stratégies. Une décision fondamentale doit donc être prise concernant le montant des ressources que l'administration centrale est disposée à transférer aux collectivités territoriales et aux OSC pour qu'elles puissent décider ce qu'elles feront avec. Cette décision doit également porter sur les principes généraux selon lesquels ces ressources seront allouées aux différentes organisations. Il est tout à fait normal que le processus de dévolution débouche sur une modification significative des modalités et de la répartition géographique des dépenses publiques.

Des objectifs différents

Du fait de l'existence de différents objectifs, différentes stratégies seront éventuellement mises en œuvre. Elles risquent cependant de poser de sérieux problèmes. Comment, dans ce cas, l'administration centrale peut-elle être certaine que les ressources transférées aux organisations locales contribuent à atteindre les principaux objectifs de la politique publique comme, par exemple, la réduction de la pauvreté? Comment peut-elle être sûre également que des activités telles que la vulgarisation agricole ou la protection de l'environnement seront effectivement prises en charge par la population locale? Dans quelles circonstances la délégation ou la déconcentration constitueront-elles la meilleure des solutions? Il est en effet évident que les fonctions de l'administration dans le développement rural ne se prêtent pas toutes, ni en toutes circonstances, à être déléguées.

Services à la production ou services sociaux?

Les collectivités territoriales ont tendance à négliger les services de production agricole et à se centrer sur la prestation de services sociaux (voir encadré 1.2) tels que la distribution d'eau, l'éducation et la santé, les voies de communications rurales ou l'électrification. Il s'agit là de leurs domaines traditionnels d'intervention. Les résultats en la matière y sont en effet plus visibles et plus populaires auprès de l'électorat que la prestation de services à la production. De leur côté, les ONG semblent également accorder une place prioritaire à divers types de services sociaux mais certaines d'entre-elles n'hésitent pas non plus à proposer des services liés à la production agricole. Il y a plusieurs raisons à cela. Une d'entre-elles tient à ce que les interventions concernant les biens collectifs locaux, comme par exemple la question de l'accès à l'eau potable ou aux chemins ruraux, sont déjà largement dominées par l'administration centrale. Une autre tient à ce qu'une grande partie de la population considère généralement qu'elle ne bénéficiera pas des services d'appui à la production agricole (Smith, 1997). C'est par exemple le cas dans des villages où les paysans les plus riches possèdent l'essentiel du cheptel et seront, de fait, quasiment les seuls bénéficiaires de l'installation de pédiluves communaux. En ce qui concerne les collectivités territoriales, le caractère non prioritaire des services d'appui à la production s'expliquerait par le fait que les bénéfices attendus à courts termes sur l'électorat sont considérés comme aléatoires. La prestation de ce type de services reste en conséquence bien souvent du ressort de l'administration centrale, à moins d'être assurée par des organismes spécialisés du secteur privé.

Encadré 1.2 Le manque d'intérêt accordé aux services d'appui à la production agricole

«Les procès verbaux de nombreuses instances élues d'Afrique et d'Asie auxquelles des pouvoirs ont été dévolus montrent l'existence d'une tendance forte à réorienter les ressources vers des activités d'intérêt public qui n'ont que peu de liens avec la productivité agricole. C'est une bonne nouvelle pour tous ceux qui se plaignent que les programmes de développement rural se préoccupent trop des questions de productivité.»

Source: Manor (1997).

1.7 Conclusions

Dans de nombreux pays en développement, l'offre de services publics d'appui à l'agriculture a fortement augmenté à l'issue des indépendances, généralement avec l'appui des bailleurs de fonds. Mais bien souvent, les monopoles qui ont été créés à l'époque pour proposer ces services se sont embarqués dans des activités improductives et sont devenus un véritable fardeau pour les budgets publics. Les bouleversements économiques et politiques des années 1980 ont donc rendu nécessaire la réalisation de profondes réformes institutionnelles.

Une partie de ce processus de réforme met l'accent sur les mécanismes de décentralisation qui transfèrent les compétences depuis l'administration centrale vers d'autres niveaux de gouvernance. Les principales formes qu'adopte cette décentralisation sont la déconcentration, la délégation, la dévolution, le partenariat avec les OSC et la privatisation. Chacune a ses propres caractéristiques en matière de productivité, d'efficacité de la répartition et de modalités de financement des services proposés. Potentiellement, la décentralisation peut aider à mettre en œuvre une bonne gouvernance, à améliorer l'offre de services et à promouvoir la démocratisation. L'éclosion de la diversité qui accompagne la décentralisation comporte toutefois aussi des risques et enjeux qui méritent d'être soigneusement analysés.


[1] Huppert, W. et Urban, K. (1998).
[2] Ibid. citant le travail de Lovelock, C.H. (ed.) (1984).
[3] Mosley, P., Harrigan, J., et Toye, J. (1991).
[4] Pour une définition précise, voir le paragraphe 2.1.
[5] Westlake, M.J. (1994).
[6] Organisation des pays exportateurs de pétrole.
[7] Organisation de coopération et de développement économiques.
[8] Mosley et al. (1991) op. cit.
[9] Voir par exemple sur ce point le fameux «Rapport Berg» (Banque mondiale (1981)).
[10] Ceci apparaît clairement dans le Rapport Berg (op. cit.).
[11] La terminologie peut ici varier fortement selon la langue employée et les dispositions constitutionnelles des différents pays.
[12] On notera que le terme «communauté» est aussi employé pour définir des groupes de population ayant des liens ethniques ou religieux éventuellement indépendants d'un territoire géographique. Ce n'est cependant pas le cas dans ce document. Ce mot est aussi utilisé pour se référer à l'ensemble d'une nation.
[13] Dans le langage courant, le terme «communauté» (au sens de village) est souvent aussi utilisé comme synonyme de groupe de population établi à un niveau «communal». Ce sens provoque des confusions car il a tendance à oblitérer le fait qu'une communauté peut regrouper plusieurs groupes d'une population ayant souvent des intérêts contradictoires.
[14] Litvack et al. (1998).
[15] Dans le langage courant, les termes «institutions» et «organisations» sont utilisés comme synonymes. Par contre, dans la terminologie de la Nouvelle Economie Institutionnelle (NEI), les «institutions sont constituées par les règles du jeu d'une société ou, plus précisément encore, par les contraintes conçues par les gens et qui modèlent leurs interrelations. Les institutions ont par conséquent un rôle structurant dans la motivation des rapports humains, que cela soit au niveau politique, social ou économique» (North (1990), p.1). Les institutions consistent en des règles formelles et informelles. Les lois, les statuts, les accords internationaux ou les contrats sont ainsi des exemples de règles formelles. Les conventions sociales et les codes de comportements sont par contre des exemples de règles informelles. Les «organisations» sont définies comme étant les regroupements d'individus liés par un dessein commun pour atteindre des objectifs précis. Il y a toutefois une forte interaction entre les institutions et les organisations car les différents types d'organisations existantes sont fortement influencés par les institutions en place (p.ex. une entreprise par actions ou une société à responsabilité limitée ne peut exister sans la législation et les «institutions» afférentes). Mais de façon symétrique, les organisations existantes influencent elles aussi l'évolution du cadre institutionnel.
[16] Cela concerne principalement les cas où la décentralisation implique une dévolution effective des pouvoirs aux collectivités locales. La déconcentration des compétences n'a par contre guère d'effets sur le processus de démocratisation.
[17] Un paradigme est un modèle pour la réflexion, c'est-à-dire un système d'hypothèses et d'associations d'idées que les gens utilisent pour interpréter un phénomène, discuter d'un problème ou décider de l'orientation d'une action.
[18] Ce concept est expliqué au paragraphe 3.1.3.

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