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4. Le secteur des pêches maritimes au Maroc et la réforme fiscale pour la promotion de la croissance et l'aménagement durable

par

Hassan El Filali[13]
Hachim El Ayoubi[14]

Introduction

Au Maroc, la pêche joue un rôle important dans la vie économique et sociale depuis le début du siècle dernier. A partir de 1914 déjà, plusieurs embarcations artisanales pêchaient la sardine et approvisionnaient les conserveries installées par les industriels espagnols et français dans les régions côtières.

Toutefois, le secteur des pêches maritimes n'a connu son plein essor qu'à partir du début des années 60. Le potentiel biologique important que recèle la zone économique exclusive (ZEE), étendue en 1981 à 200 miles, d'une part, et la demande mondiale croissante pour les produits de la mer, d'autre part, ont offert de grandes possibilités d'investissements rentables pour les opérateurs publics et privés.

Ces deux facteurs ont beaucoup changé les pratiques et les structures du secteur sur tous les plans; de la gestion des ressources à la commercialisation, en passant par les techniques d'exploitation, la valorisation et des organisations institutionnelles. En l'espace de 40 ans, l'activité est passée d'une pêche exclusivement artisanale et semi-artisanale ciblant principalement des espèces pélagiques, notamment la sardine, destinées en priorité aux conserveries, à une activité plus industrialisée ciblant des espèces de plus grande valeur ajoutée orientées vers l'exportation.

Ce développement ne pouvait se réaliser sans l'intervention massive de l'Etat à travers l'investissement public dans les infrastructures et l'incitation à l'investissement privé. Le secteur a été considéré parmi les priorités des plans de développement quinquennaux de 1973-1977, 1978-1980, 1981-1985 et 2000-2004. En outre, à partir de 1973 un code d'encouragement aux investissements maritimes a été promulgué. L'Etat a, par ailleurs, conclu des accords de pêche avec l'Union européenne, la Russie et le Japon dont les contreparties financières et techniques ont contribué au développement du secteur.

Cette politique expansionniste n'a pas tardé à produire les effets économiques et sociaux positifs escomptés, aussi bien au niveau du secteur lui-même, que de l'économie nationale en général. Ainsi la production est passée de 200 000 tonnes au début des années 60 à plus d'un million de tonnes en 2001. La flotte de pêche a atteint environ 3 000 bateaux de pêche côtière et hauturière et 25 000 barques artisanales. Les exportations des produits de la mer rapportent annuellement à l'économie un milliard de dollars et représentent 15 pour cent de la valeur totale des exportations. En outre, 400 000 personnes vivent, directement ou indirectement, de la pêche qui constitue la principale activité économique dans plusieurs régions rurales.

Cet attrait économique et social a eu, pour conséquence, une pression accrue sur l'exploitation des ressources halieutiques et a abouti à des situations de surexploitation des principaux stocks de poisson et, avec l'intensification de l'effort de pêche, à la chute drastique de la rentabilité des investissements. Vers la fin des années 80, l'état de la ressource nécessitait de prendre des dispositions urgentes.

Les politiques des pêches de la décennie 90 ont tenté d'y apporter des solutions par la mise en place d'un arsenal de mesures législatives et réglementaires. Ainsi, en plus des droits d'accès à la pêche, institués en 1973, à l'obtention d'une licence de pêche, plusieurs mesures visant la limitation de l'effort de pêche ont été instaurées au fur et à mesure (la taille marchande, les engins de pêche, le repos biologique). A partir de 1992, un gel des investissements nouveaux dans la flotte a été décrété et en 1995, les régimes dérogatoires des codes des investissements ont été abrogés.

L'ensemble de ces mesures a permis d'atténuer l'intensité des problèmes que connaît le secteur, mais les questions de préservation des ressources et de gestion de l'effort de pêche à long terme doivent toujours retenir l'attention. En 2002, un nouveau mode de gestion basé sur les prises totales autorisées (PTA) a été instauré pour la pêche du poulpe.

L'introduction de ce nouveau système a posé le problème de financement des coûts de sa gestion, relatifs à la recherche scientifique, au contrôle, à la surveillance et à l'information, et par conséquent, la nécessité pour l'Etat de récupérer une partie de la rente du secteur.

La nouvelle stratégie de développement du secteur des pêches maritimes qui se dessine depuis quelques années a pour objectif de créer les conditions d'un développement durable et harmonieux qui repose sur:

Caractéristiques du secteur des pêches maritimes marocain

1. Les ressources halieutiques

Les caractéristiques hydroclimatiques dont jouit la zone atlantique du Maroc, notamment le régime des vents alizés auquel elle est soumise toute l'année ainsi que la remontée des eaux froides profondes riches en nutriments (upwelling), ont fait de cette région l'une des plus productives au monde.

On distingue quatre zones de pêche dont l'importance relative en termes d'activité a connu un grand changement au fil du temps et des rythmes d'exploitation. La zone méditerranée et atlantique Nord jusqu'à ElJadida (35°45'-32° de latitude Nord), la zone A de Safi à Sidi Ifni (32°N-29°N), la zone B de Sidi Ifni à cap Boujdor(29°N-26°N) et la zone C de Boujdor à Lagouira (26°N au Sud).

Les ressources halieutiques marocaines sont très diversifiées. Les stocks exploités sont toutefois dominés par des petits pélagiques et des céphalopodes. Dans ces deux familles, la sardine et le poulpe constituent les espèces les plus importantes dans les prises totales.

Les ressources des petits pélagiques sont sujettes à des fluctuations inter-annuelles en termes de composition et de répartition géographique selon les conditions hydroclimatiques. La biomasse de sardines évolue de manière irrégulière d'une année à l'autre, avec toutefois une tendance générale à la baisse qui est plus ou moins prononcée suivant les zones de pêche.

Ainsi, les captures de sardines dans la zone Nord sont passées de 24 000 tonnes en 1993 à moins de 5 000 tonnes en 1999, pour pratiquement le même effort de pêche. Dans la zone A, les captures sont en diminution constante depuis le début des années 90. Le stock de la zone B présente des signes de surexploitation en raison d'une concentration de l'effort de pêche. Seul le stock C est en reconstitution continue.

Selon les données de l'Institut national de recherche halieutique (INRH), le potentiel annuel exploitable des petits pélagiques serait estimé à 1,1 million de tonnes, dont 450 000 tonnes de sardines.

Dans cette famille des petits pélagiques, d'autres espèces d'importance variée sont exploitées. Il s'agit notamment de l'anchois, du maquereau et du chinchard.

Concernant les céphalopodes, l'exploitation est relativement récente comparativement aux petits pélagiques. La pêche commerciale n'a vraiment commencé qu'à partir du début des années 60, dans la région sud du Maroc entre le cap Juby (27°30'N) et le cap Blanc (21°N).

Le poulpe, la seiche et le calmar constituent la quasi-totalité des captures, avec une prédominance du poulpe. Les débarquements de ce dernier (y compris ceux des navires communautaires) ont doublé entre 1980 et 2000, passant de 53 000 à 1 050 000 tonnes.

L'effort de pêche important déployé sur ces stocks a fini par aboutir à une situation de surexploitation qui s'est traduite par une régression de l'abondance globale des ressources, une modification de leur composition, un rétrécissement des zones de pêche et une diminution de la taille moyenne des espèces. En parallèle, les rendements de la flottille céphalopodière ont brutalement chuté à partir de 1980, ce qui a incité les pouvoirs publics à instituer en 1989 une période de repos biologique durant le mois d'octobre.

L'INRH estime le potentiel exploitable des captures annuelles des céphalopodes à environ 123 000 tonnes, dont 88 000 tonnes pour le poulpe.

Les eaux marocaines recèlent par ailleurs, des ressources diversifiées à des niveaux d'exploitation différents ainsi que des pêcheries peu ou pas exploitées qui présentent un potentiel de développement important et des possibilités de redéploiement de l'effort de pêche actuel afin d'alléger la pression sur les stocks surexploités.

2. La flotte de pêche

Trois secteurs de pêche se partagent l'exploitation des ressources halieutiques marocaines: pêche artisanale, côtière et hauturière.

La flotte artisanale est constituée d'embarcations en bois de 5 à 6 m équipées de moteurs hors-bord. Leur nombre a augmenté de manière significative à partir des années 80, passant de 3 600 barques en 1981 à 25 000 recensées en 2000.

La flotte de pêche côtière est composée de 2 500 unités représentant une capacité globale de 84 366 tonnes de jauge brute (tjb). Elle est répartie en senneurs, chalutiers, palangriers et unités mixtes, de 15 à 25 m de longueur, fabriquées localement en bois. Cette flotte, caractérisée par sa vétusté et son faible niveau de technicité, joue un important rôle économique et social tant au niveau national que régional. Elle représente par ailleurs, le principal fournisseur du marché local de poisson frais et des conserveries.

La flotte hauturière a connu un développement rapide à partir de 1973 grâce aux encouragements de l'Etat. Elle compte actuellement 446 unités pour une capacité globale de 144 369 tjb. Elle est composée principalement de chalutiers congélateurs. Cette flotte cible les céphalopodes (poulpe, seiche et calmar). Sa production est exclusivement orientée vers le marché extérieur.

3. L'exploitation

La production halieutique totale en volume connaît une tendance régulière à la hausse. Elle est passée de 200 000 tonnes environ au début des années 60 à 1,1 million de tonnes en 2001.

Au cours des 13 dernières années, les débarquements ont augmenté au taux annuel moyen de 4 pour cent, compte non tenu des captures de la flotte étrangère qui opérait dans les eaux marocaines dans le cadre des accords de pêche, d'une partie des débarquements de la pêche artisanale et du circuit informel.

Evolution de la production halieutique (Source Mer en chiffres)

Durant cette période la production a enregistré deux pics, en 1995 (852 000 tonnes) et en 2001 (1,1 million de tonnes), deux années qui ont suivi le retrait de la flotte communautaire, à la fin du 3e et du 4e accord de pêche.

La pêche côtière constitue 80 pour cent des débarquements totaux. En 2002, sa production a atteint 892 865 tonnes, celle de la pêche hauturière a enregistré 56 451 tonnes et 10 771 tonnes ont été produites par les activités littorales, dont l'aquaculture pour 1 047 tonnes.

La structure de la production par espèce est dominée par l'importance de la sardine qui représente 88 pour cent des débarquements de la pêche côtière et 80 pour cent de la production totale. Le poulpe vient en seconde position avec 80 pour cent des captures de la pêche hauturière.

4. La transformation et la structure des marchés

Les industries de transformation des produits de la mer regroupent des unités de conserve, de semi-conserve, de congélation, de conditionnement du poisson frais, de farine et d'huile de poisson et de transformation des algues. En 2002, ces unités ont traité 732 000 tonnes des captures de la pêche côtière, soit plus de 80 pour cent.

Ces établissements au nombre de 360, réalisent un chiffre d'affaires de 8 milliards de dirhams (DH) et emploient 39 000 personnes, constitués principalement de femmes.

La structure des activités de valorisation des produits de la mer est dominée par les unités de fabrication de farine et d'huile de poisson, qui traitent 40 pour cent des débarquements de la pêche côtière pour un chiffre d'affaires de 450 millions de DH et 1 000 emplois, contre les industries de conserves et semi-conserves qui traitent moins de 20 pour cent des captures pour un chiffre d'affaires et des emplois, respectivement de 7 et 27 fois supérieurs.

Cette répartition est déterminée par le triptyque qualité-prix-disponibilité, notamment en ce qui concerne la sardine. Les usines des sous-produits bénéficient d'un approvisionnement important durant la saison de pointe des débarquements qui dure environ 4 mois par an. La sardine de qualité est vendue à des prix nettement plus élevés pour le marché de consommation locale que pour les conserveries.

Le marché local de poisson frais est approvisionné par la pêche côtière et, dans une faible mesure par la pêche artisanale. En 2002, 300 000 tonnes de poisson ont été vendues localement. La consommation par habitant est estimée entre 9 et 12 kg.

Les exportations des produits de la mer se chiffrent à environ 1 milliard de dollars EU et représentent 15 pour cent de la valeur totale des exportations et 50 pour cent de celle des exportations agro-alimentaires.

Les principaux produits en terme de quantité et de valeur, exportés par le Maroc sont les céphalopodes congelés, en particulier le poulpe et les conserves et semi-conserves. Ces deux familles de produits procurent à eux seuls 88 pour cent des recettes d'exportation. Les principaux clients du Maroc sont la France, l'Italie, l'Espagne, l'Allemagne et le Japon.

Evolution des politiques publiques de pêche

L'intérêt accordé au secteur des pêches maritimes dans les politiques de développement de l'Etat tire sa légitimité de ses impacts économique et social sur l'économie nationale. Représentant 2,5 pour cent du produit intérieur brut (PIB), le secteur présente un apport en devises d'un milliard de dollars annuellement et emploie, directement et indirectement, 400 000 personnes. Cet intérêt est d'autant plus important que la pêche constitue, pour certaines régions rurales, la principale activité génératrice de revenus et d'emplois pour les populations.

Ces effets positifs ont valu au secteur d'être considéré parmi les secteurs prioritaires dans les plans de développement quinquennaux de 1973-1977, 1978-1980, 1981-1985 et récemment, 2000-2004.

Les décennies 70 et 80 ont été caractérisées par l'effort financier important consenti par l'Etat, en vue de mettre en place les structures de base et les conditions nécessaires à l'exploitation des ressources marocaines par les opérateurs nationaux.

Sur le plan juridique, le dahir de 1973 formant loi sur les pêches maritimes a institué l'étendue des eaux territoriales à 12 milles marins et la subordination de l'exercice du droit de pêche à l'obtention d'une licence de pêche. En 1981, la zone économique exclusive a été élargie à 200 milles et la même année, un département ministériel des pêches maritimes a été créé.

Cette phase de l'évolution du secteur a vu la promulgation des codes des investissements maritimes en 1973. Au titre de ce texte les investisseurs privés marocains bénéficiaient, entre autres avantages, de la garantie de l'Etat pour les crédits à concurrence de 70 pour cent du coût total de l'acquisition des navires, de ristournes sur le taux d'intérêt, de primes de démolition de navires vétustes, de primes d'équipement, de prime sur l'emploi et des exonérations d'impôts et de taxes sur les importations et sur l'activité. Ces incitations financières et fiscales ont relancé l'investissement dans la flotte de pêche et permis à la flottille hauturière de faire son apparition.

Les contrecoups de ses mesures expansionnistes n'ont pas tardé à se manifester au niveau de la ressource à partir de la fin des années 80. La pêche des céphalopodes a particulièrement souffert de l'intensification de l'effort de pêche qui a accompagné la hausse des investissements maritimes. Les captures de poulpes ont régressé de manière régulière entre 1993 et 1997, passant de 100 000 tonnes à environ la moitié de ce tonnage. Les rendements ont chuté de 9 tonnes par jour à une tonne et les entreprises de pêche hauturière ont connu une crise financière aiguë, dont seule la relative stabilité des cours internationaux a permis d'en réduire l'intensité.

En 1989, l'Etat marocain a institué une période de repos biologique d'un mois (octobre) pour les céphalopodes et les espèces associées entre cap Boujdor et cap Blanc.

L'institution d'une période de repos biologique représentait les prémisses d'une politique prudente et précautionneuse de l'Etat, inaugurée au début des années 90. Ce repos biologique d'un mois a progressivement été étendu à 7 mois par an. A cette mesure sont venus s'ajouter le gel des investissements nouveaux dans la flotte de pêche décrété à partir de 1992 et l'abrogation du code des encouragements aux investissements maritimes.

Sur le plan institutionnel, la recherche halieutique a été renforcée par la création en 1997 de l'INRH et l'organisation des professionnels s'est consolidée par la mise en place de quatre chambres des pêches maritimes et leur fédération, représentant les collèges de pêche artisanale, côtière et hauturière. Ces actions ont été couronnées par l'institution d'un Conseil supérieur pour la sauvegarde et l'exploitation des ressources halieutiques.

Les résultats de l'ensemble de ces mesures ont été d'atténuer l'intensité du problème de la surexploitation à court terme, mais sans le résoudre à long terme. Le repos biologique a contribué au redressement de la productivité du poulpe. Toutefois, la stratégie de pêche des opérateurs est devenue rythmée par la production des marées suivant la période d'arrêt, ce qui a conduit à une exploitation de plus en plus importante du stock des juvéniles, qui ont constitué jusqu'à 40 pour cent de la production totale du poulpe.

Ce mode de gestion de la ressource s'est avéré inadapté et n'offrait pas un mécanisme de régulation qui concilie l'impératif biologique et la rentabilité économique, du fait qu'il se base sur la maximisation des captures au lieu de la minimisation des coûts.

Aussi, à partir de mai 2001, un plan d'aménagement de la pêche au poulpe, basé sur le système des prises totales autorisées (PTA) a été instauré. Ce système prévoit un plafond annuel de capture de 88 000 tonnes réparti entre les trois secteurs de pêche, à savoir: la pêche hauturière, artisanale et côtière.

L'introduction de ce nouveau mode de gestion a ouvert le champ pour une gestion de la ressource par des instruments qui reposent beaucoup plus sur l'efficacité économique et l'utilisation optimale de l'effort que sur la maximisation des captures. Elle a, toutefois, posé avec plus d'acuité le problème du financement des investissements et des services publics liés à la gestion de ce système, notamment la recherche scientifique, le contrôle, la surveillance et le système d'information.

La fiscalité des pêches

Caractéristiques de la fiscalité des pêches

Le secteur de la pêche maritime au Maroc fait l'objet d'une multitude de prélèvements, environ une trentaine, qui ont un caractère fiscal ou parafiscal, social correspondant à la rémunération de services.

Les prélèvements liés à l'accès et à l'exploitation de la ressource concernent la délivrance et le renouvellement de la licence de pêche, les concessions de madragues ou de fermes aquacoles auxquelles s'ajoutent une taxe additionnelle de licence de pêche et une taxe pour la recherche halieutique (taxe pour service public prélevée au profit de l'INRH et généralisée depuis le 9 octobre 2002 à tout bénéficiaire d'une licence de pêche).

En plus de ces taxes, les navires céphalopodiers et crevettiers s'acquittent d'une redevance supplémentaire.

Ce système de prélèvement se compose globalement de trois types de prélèvements:

1. Prélèvements liés à l'investissement
2. Prélèvements liés à l'exploitation de la ressource
3. Prélèvements liés à l'activité de pêche

Prélèvements liés à l'investissement

Prélèvements liés à l'exploitation de la ressource

Prélèvements liés à l'activité de pêche

Þ Impôts et taxes communs à l'ensemble des activités (taxe urbaine, patente, IGR, IS, ...).

Þ Prélèvements spécifiques (application, détermination).

Le montant total des droits et taxes pour l'accès aux ressources halieutiques dans les eaux marocaines a atteint 36,5 millions de dirhams en 2002 (3,65 millions de $EU). Ce montant a été de 40,8 millions de dirhams (4,08 millions de $EU), au cours du premier trimestre 2003, depuis la généralisation de la taxe de la recherche. Ce chiffre représente 2 pour cent de la valeur totale des captures.

Par ailleurs, le secteur est soumis à un ensemble de prélèvements (parafiscaux et sociaux) au stade de la commercialisation. Pour la flotte côtière, le total de ces prélèvements opérés sur les ventes brutes (le volume de production) représente près de 17 pour cent de leur chiffre d'affaires.

Analyse du système fiscal

Les prélèvements fiscaux et parafiscaux actuels répondent beaucoup plus à des besoins budgétaires à court terme qu'à une stratégie de gestion de la ressource par une ponction sur la rente économique.

Les produits de ces prélèvements ont contribué directement ou indirectement au financement du secteur des pêches, notamment dans les domaines des infrastructures, des villages de pêcheurs et de la recherche scientifique.

Toutefois, en tant qu'instrument de politique de pêche, le système fiscal présente certaines contraintes qui le rendent peu efficient dans les mesures de gestion de la ressource et encouragent les sous-déclarations et les ventes hors circuits officiels. Ces contraintes ont trait, entre autres, à la multitude des prélèvements, aux taux appliqués, aux assiettes retenues et à la qualité des services rendus.

La révision de la fiscalité du secteur envisagée par le Ministère des pêches maritimes présente une double finalité. Parallèlement à son rôle traditionnel en tant que source de recette budgétaire, elle doit constituer un facteur important dans la politique de gestion du secteur.

La fiscalité, en permettant de prélever tout ou partie de la rente générée par le secteur des pêches maritimes, soit sous forme de redevance pour licence ou quota, soit de taxes sur les revenus, constitue un instrument économique de régulation de l'effort de pêche. Théoriquement, ces prélèvements rendent les activités marginales déficitaires et obligent les entreprises en difficulté à se retirer. L'effort de pêche se trouve ainsi diminué.

Dans la pratique, ce résultat n'est pas aussi automatique dans la mesure où les possibilités de redéploiement du capital et du travail dans d'autres secteurs sont faibles. La réaction des ces entreprises risque même de s'avérer contraires aux attentes du fait que leur situation les pousserait à augmenter leur capacité de pêche pour éviter la crise.

Ainsi les prélèvements fiscaux ne peuvent être considérés que comme un appoint utilisé en parallèle avec des mesures directes de limitation de l'effort. Ils pourraient procurer à l'Etat, notamment, les moyens financiers pour subventionner et encourager le retrait des entreprises des pêcheries surexploitées et leur redéploiement ailleurs.

Conclusion

Le mode de gestion basé sur les droits de propriété que le Ministère des pêches maritimes a inauguré par la mise en place du système des quotas admissibles de capture depuis 2000, nécessite en parallèle des réformes réglementaires, institutionnelles et économiques qui assurent sont succès.

Les principales réformes engagées par le Ministère ont concerné le renforcement des mécanismes de concertation avec les professionnels par la création des Chambres des pêches et du Conseil supérieur de la sauvegarde et de l'exploitation des ressources halieutiques, le renforcement du statut et des moyens de la recherche halieutique et la mise en œuvre d'une nouvelle loi sur la pêche et la préservation des écosytèmes marins.

Il y a un an que les travaux ayant trait à la réforme de la fiscalité du secteur des pêches ont commencé en se donnant comme objectif l'identification des différentes distorsions et leurs impacts économiques et sociaux. Une proposition de projet de réforme sera ensuite formulée.


[13] Ministère des pêches, Maroc
[14] Ministère des pêches, Maroc

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