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CHAPITRE 6 - Infections du sang par des protozoaires endoparasites

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ILLUSTRATIONS:Planche 7 
ESPECES TOUCHEES:Cichlidés, nombreux genres de Siluridés, Cyprinidés, Mormyridés, Ophiocéphalidés, Mugilidés et Protopterus aethiopicus. 
SIGNES APPARENTS:Aucun; les infections par hémogrégarines sont associées à des proliférations lymphomatiques: des nodules blancs qui apparaissent dans divers viscères et dans l'hypoderme. Cette situation est inconnue jusqu'alors sur les poissons africains. 
CAUSE:Protozoaires parasites dans le sang: les flagellés Trypanosoma et Cryptobia (Tripanosomidés) les sporozoaires Dactylosoma (syn. Babesiosoma) (Hémosporidies, Babesiidés) et Haemogregarina (Coccidies, Hémogrégarinidés). 
DIAGNOSE:Les infections dans le sang peuvent être détectées dans des préparations sanguines sur des lames colorées au Giemsa. Des frottis desséchés sont fixés au méthylalcool absolu et ensuite colorés avec une solution de Giemsa au 1/10° diluée dans de l'eau distillée neutre tamponnée au phosphate 0,1M pH6,8. Les trypanosomes peuvent également être détectés dans des préparations en gouttes épaisses desséchées à l'air, qui sont hémolysées dans de l'eau distillée, séchées et traitées ensuite comme recommandé pour les frottis. La coloration est faite au Wright-Giemsa et au May-Grunwald Giemsa dans l'un et l'autre cas. Les trypanosomes peuvent être concentrés en mettant le sang collecté dans des capillaires héparinisés, pour qu'il sédimente; le liquide surnageant est examiné en recherche de trypanosomes. 
Les trypanosomes et Cryptobia sont extra-cellulaires. Les trypanosomes sont ovales, allongés et ont un seul flagelle provenant d'un petit kinetoplaste; il est attaché au corps par une membrane ondulante avec ou sans extrémité libre. Chez les Cryptobia, deux flagelles sont présents, originaires d'un grand kinetoplaste allongé; l'un d'eux est connecté à une membrane ondulante. Les hémogrégarines contenues dans les cellules sanguines apparaissent comme des plasmodes ovoïdes à vermiformes avec un grand nucleus distinct qui occupe un tiers à la moitié du volume du cytoplasme. Les formes en division, les schizontes, sont rarement vues dans les érythrocytes du sang périphérique mais, parfois, dans les monocytes. Les formes en division apparaissent surtout dans les cellules du tissu hématopoiétique. Dans les infections à prolifération lymphomatique, les tissus macrophages contiennent habituellement deux parasites ovales allongés. En comparaison avec les hémogrégarines, les dactylosomes ont un cytoplasme faiblement coloré et peu abondant et des noyaux; le plasmode et les mérozoïtes (formes en division) sont petits, emplissant une faible part de l'espace existant entre le nucleus et la périphérie de l'érythrocyte. Les schizontes produisent de quatre à seize (quatre chez D. mariae) mérozoïtes en quadrilatère ou en éventail. 
DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL:Les infections à protozoaires intracellulaires doivent être différenciées des structures intracellulaires et des inclusions de nature douteuse souvent observées dans les érythrocytes des frottis sanguins. De telles structures peuvent provenir de processus accidentels ou de changements cytoplasmiques dus à des causes  pathologiques inconnues ou même à des inclusions causées par une  infection virale. 
BIOCYCLE BIOLOGIE:Les sangsues (Hirudinés) sont l'hôte intermédiaire ou le vecteur de Trypanosoma, Cryptobia, Haemogregarina. L'invertébré, hôte vecteur de Dactylosoma, est inconnu. Les espèces de sangsues de la famille des Glossiphonidés comme des Piscicolidés, servent d'hôtes intermédiaires des trypanosomes, aussi bien que des hémogrégarines. 
Les trypanosomes comme les Cryptobia absorbés avec le sang du poisson par les sangsues subissent des changements morphologiques dans le tractus digestif de l'hôte (jusqu'au critidia) à travers de nombreuses divisions binaires successives et sont finalement transformés au cours de la phase infectieuse en trypanosomes métacycliques qui migrent alors dans le proboscis de la sangsue. L'infection du poisson se produit quand une sangsue en cours de succion injecte ces trypanosomes dans le sang du poisson. Les hémogrégarines subissent chez le poisson une succession de divisions schizogoniques dans les lymphocytes et dans les monocytes et, finalement, dans les érythrocytes. La schizogonie finale est suivie d'une gamètogonie et de la production de micro-et de macrogamètocytes dans les érythrocytes. Les mérozoïtes produits par schizogonie dans les cellules du sang chez quelques espèces d'hémogrégarines infecteront aussi le tissu macrophage. Par la suite, ces mérozoïtes subiront une division binaire ou endodyogénie, pour former un stade d'attente (cystozoïte) comme il en est ainsi chez d'autres coccidies telles que Hepatozoon ou Toxoplasma. Le tissu macrophage ainsi infecté se présente dans le tissu du poisson sous la forme d'agrégats enfermés dans une capsule fibreuse. Ces cystozoïtes peuvent être transmis par prédation sur un autre poisson porteur et, chez les hôtes convenables, infecteront les cellules du sang en circulation, où ils procèderont à leur développement au moyen d'une suite de schizogonies et de gamètogonies jusqu'au stade de gamètocyte dans les érythrocytes. Si des cystozoïtes sont ingérés par un hôte non convenable, les mérozoïtes exkystés se ré-établiront eux-mêmes en cystozoïtes dans les macrophages du nouvel hôte. Dans la sangsue, les micro-gamètocytes ingérés fertiliseront les macrogamètocytes ingérés. Le zygote formé après fertilisation se développera en oocyte qui, par sporogonie, produira des sporozoïtes lesquels seront éventuellement injectés dans le sang du poisson pendant l'action de prédation de la sangsue sur ce dernier. Chez Dactylosoma, la schizogonie a lieu dans les érythrocytes; les autres phases de développement sont inconnues38
EPIZOOTOLOGIE:Environ dix formes de trypanosomes ont été rencontrées sur des poissons en Afrique dont cinq ou six constituent des espèces valables. Trypanosoma mukasai a été signalé sur 52 % de Tilapia variabilis et T. esculenta du lac Victoria aussi bien que sur les quatre Bagrus étudiés (B. docmac). On l'a également rencontré dans le sang d'autres poissons de diverses familles (Mormyridés, autres Cichlidés, Schilbéidés, Protoptéridés) dans ce lac. La présence du même trypanosome sur Tilapia nilotica du lac George n'est que de 20 %. Ce trypanosome et apparemment d'autres espèces ne démontrent cependant pas un haut niveau de spécificité sur l'hôte. Une sangsue glossiphonidée du genre Batrachobdella est très commune sur Bagrus docmac du lac Victoria et a également été signalée sur Protopterus aethiopicus et Barbus altianalis dans le même lac. Des sangsues prises sur ce dernier hôte contenaient des trypanosomes en cours de division (critidia). Dactylosoma mariae a été trouvé dans des cichlidés et aussi dans Labeo victorianus. Dans le lac Victoria, l'incidence de l'infection sur Tilapia spp. a été de 58 % et, dans le lac George de 60 % sur T. nilotica. 
Des hémogrégarines (H. nili) ont été signalées dans les érythrocytes d'Ophicephalus obscurus du Nil, en Egypte, de Tilapia lata du Niger et dans les Mugilidés d'un estuaire d'Afrique du Sud (Swartkops River) ainsi que de l'Atlantique et de la mer Rouge. 
PATHOLOGIE:On ne sait pas jusqu'où un poisson peut être agressé par une infection grave due aux protozoaires du sang. Apparemment, la plupart de ces parasites ne sont pas pathogènes. 
Des anémies se sont manifestées lors d'infections par Cryptobia chez la carpe. Des changements pathologiques plus apparents sont causés quand les hémogrégarines infectent les cellules macrophages. Des lésions tumorales contenant des macrophages infectés sont apparues dans le tissu hématopoiétique. Dans des infections plus sévères ces lésions tumorales sont devenues très grandes et très nombreuses et ont proliféré dans l'ensemble du corps de l'animal. 39
CONTROLE:Les méthodes de traitement des parasites du sang sont inconnues. Le contrôle de la transmission de l'infection peut être assuré par l'élimination des sangsues vectrices. Les méthodes de lutte contre les sangsues sont discutées au chapitre 12. Il faut se souvenir que les infections par hémogrégarines impliquant le tissu macrophage peuvent être disséminées grâce à la prédation et à la nécrophagie, comme elles peuvent être transmise par des vecteurs. 
DISTRIBUTION GEOGRAPHIQUE CONNUE:Apparemment, les trypanosomes sont communs dans les poissons de toutes les eaux africaines; on les a signalés dans le Nil, les lacs de l'est africain, le Congo, le Niger, aussi bien qu'en Afrique du Sud. Les espèces individuelles ont également et apparemment une large distribution mais une évaluation taxonomique plus critique est nécessaire pour déterminer les relations taxonomiques entre les trypanosomes décrits dans les différents hôtes et les sites. Les données sur la distribution des dactylosomes et des hémogrégarines sont trop limitées actuellement pour une conclusion quelconque sur leur distribution. 
REFERENCES:12, 13, 47, 105, 106, 126, 139, 143, 185, 234, 243, 288. 

PLANCHE 7: PROTOZOAIRES ENDOPARASITES

  1. Trypanosoma (25–50 μm)
  2. Cystozoïtes d'Haemogregarina dans les tissus macrophages (x 1 200)
  3. Trophozoïte d'Haemogregarina dans un globule rouge (x 1 450)
  4. Division d'Haemogregarina dans un monocyte (x 1 450)
  5. Dactylosoma mariae dans des globules rouges (x 1 200)
  6. Hexamita (7–12 μm)
  7. Protoopalina (150–350 μm)
  8. Balantidium (40–60 μm)
PLANCHE 7

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