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Annexe 5.2 Etablissement de prix virtuels pour les apports (ou facteurs de production)

Introduction

Nous verrons dans cette annexe une méthode permettant d'établir des prix virtuels pour les apports des projets. Comme le montre la figure 5.3, on peut pour l'estimation empirique des prix virtuels classer les apports (facteurs de production) des projets en cinq grandes catégories:

1. Facteurs de production qui sont importés sans contingentement;
2. Facteurs de production qui auraient été exportés s'ils n'avaient pas été utilisés dans le projet;
3. Facteurs de production d'origine locale et non exportables;
4. Facteurs de production importés pour lesquels il existe des contingents d'importation;
5. Ressources (terre et main-d'oeuvre).

Chacune de ces catégories est discutée séparément dans les sections qui suivent. Comme dans le cas des produits, il y a plusieurs catégories de facteurs de production qui mettent en jeu des devises étrangères. Les applications particulières du TCR seront discutées lorsqu'il y aura lieu.

Facteurs de production importés sans contingentement

Les facteurs de production dont l'importation n'est pas limitée par des contingents sont évalués sur la base de la valeur locale des devises étrangères nécessaires pour les importer. Celle-ci se mesure par la valeur CAF multipliée par le TCR. Il y a deux exceptions à cette méthode.

1. Dans certains cas, les apports sont financés par un don qui est lié au projet, c'est-à-dire qui ne peut être dépensé qu'en important le bien ou service considéré pour l'usage exclusif du projet. Si tel est le cas, il n'y a pas de différence dans la disponibilité totale de devises pour d'autres usages avec ou sans le projet. Par conséquent, aucun autre bénéfice n'est sacrifié du fait de l'emploi de devises pour importer le facteur de production. Le coût économique du bien ou service financé par un don conditionnel pour l'économie nationale est égal à zéro.

2. Lorsque l'apport est financé par un prêt conditionnel, le coût économique ne se concrétise pas au moment du paiement (de l'importation), étant donné qu'il n'y a pas d'autre emploi possible (pas de coût d'opportunité) du prêt étranger. Le coût apparaît au moment du remboursement du prêt, alors que d'autres importations auraient pu être financées par les devises utilisées pour payer la dette (principal et intérêt).

Facteurs de production d'origine locale exportables

Si le bien ou service utilisé par le projet aurait effectivement été exporté en l'absence du projet, la valeur soustraite à l'économie en l'utilisant dans le projet est représentée par la réduction de disponibilité de devises étrangères. La volonté de payer locale pour les importations de biens et services auxquelles on a ainsi renoncé est la mesure correcte du coût économique de l'emploi de ce bien ou service dans le projet. Elle est évaluée à partir du prix FOB du bien ou service (le gain en devises auquel on a renoncé) convertie en prix locaux de biens ou services importés en utilisant le TCR.

Facteurs de production d'origine locale non exportables

La mesure de valeur appropriée pour un facteur de production d'origine locale non exportable (c'est-à-dire dont le prix local de production est supérieur à la valeur FOB, ou dont l'exportation est interdite) sera différente selon que son emploi dans le projet réduit ou non sa disponibilité totale pour l'économie (catégories C1 et C2 de la figure 5.3).

Il faut noter que si l'emploi du bien ou service dans le projet suscite une importation supplémentaire ou nouvelle de ce bien ou service pour l'utiliser ailleurs dans l'économie du pays, il pourra pour les besoins de l'évaluation être traité comme un bien ou service importé, autrement dit c'est le coût en devises (valeur CAF) qui devient la mesure appropriée de la valeur économique, en le convertissant en prix locaux à l'aide du TCR (Ce cas est analogue à celui d'un produit du projet utilisé localement qui suscite l'exportation de ce même produit par d'autres producteurs).

Facteur de production importé pour lequel existe un contingent d'importation

S'il y a un contingentement d'importation pour un facteur de production importé, sa valeur doit être mesurée en fonction de la volonté de payer pour sa contribution à la valeur d'autres biens ou services qui auraient pu être produits ailleurs dans l'économie du pays en l'absence du projet. Le raisonnement est que la totalité du contingent autorisé aurait été importée avec ou sans le projet, et que dans ces circonstances il n'y aura pas soustraction nette de devises par le projet. Si les importations sont inférieures au contingent, celui-ci n'est pas effectif et, du point de vue de l'analyse, il n'existe pas. En conséquence, c'est la valeur CAF du bien ou service qui doit être utilisée comme base d'évaluation.

Ressources: main-d'oeuvre

L'objectif de l'évaluation de la main-d'oeuvre est de parvenir à une mesure de la valeur des bénéfices auxquels on a renoncé en employant la main-d'oeuvre dans le projet plutôt que dans le meilleur autre emploi possible. Si la main-d'oeuvre recrutée est détournée d'un autre travail productif et qu'il y ait peu de chômage dans la région du projet, la valeur de la main-d'oeuvre dans cet autre travail, ou salaire de marché, fournit une mesure acceptable du coût d'opportunité pour l'analyse économique. Nous discuterons dans cette section de situations où ces conditions ne sont pas réunies, c'est-à-dire où le salaire de marché ne reflète pas convenablement le coût d'opportunité.

Main-d'oeuvre non qualifiée

Les principales questions à considérer pour établir le prix virtuel de la main-d'oeuvre non qualifiée se rapportent aux situations suivantes:

1. La main-d'oeuvre recrutée par le projet provient du réservoir de chômeurs de la région du projet. La valeur de ces travailleurs sans emploi est égale à la production à laquelle on a renoncé en les engageant dans le projet. S'ils produisaient chez eux de la nourriture ou autres matières pour leur propre consommation, et s'ils doivent y renoncer en travaillant au projet, la valeur de ce à quoi ils renoncent est une mesure appropriée du coût d'opportunité. S'ils ne produisaient rien (ce qui est un cas exceptionnel), on peut utiliser un prix virtuel proche de zéro. Le coût ne sera vraisemblablement jamais nul, étant donné qu'il y a généralement certains frais de formation, de logement et autres qui interviennent pour la prise en charge de cette main-d'oeuvre non qualifiée restée sans emploi pendant un certain temps. Ces frais doivent être entrés quelque part dans les comptes en tant que coûts.

2. La main-d'oeuvre recrutée par le projet est détournée d'autres emplois productifs, mais il y a du chômage dans la région du projet (c'est-à-dire des personnes désireuses et capables de travailler dans des emplois rémunérés). Dans ce cas l'hypothèse généralement adoptée est que même si le projet débauche des travailleurs d'autres emplois, ces autres emplois maintenant vacants absorberont de nouveaux travailleurs provenant du réservoir de chômeurs. Par conséquent, le projet aura pour résultat indirect de réduire le chômage, et la main-d'oeuvre employée dans le projet devra donc être évaluée de la même façon qu'en (1). L'application du test avec et sans démontre la logique de cette approche.

3. La main-d'oeuvre n'est employée qu'à temps partiel dans le projet. Dans le cas de main-d'oeuvre non qualifiée saisonnière, il est en général désirable de tenir compte des périodes générales d'emploi et de chômage saisonniers. Tout d'abord, l'analyste peut déterminer par l'observation, ou à partir de documents existants, les périodes générales de chômage saisonnier qui existent dans la zone de marché du travail intéressant la main-d'oeuvre qui sera employée dans le projet. Il pourra ensuite comparer ces périodes aux périodes pendant lesquelles le projet aura besoin de main-d'oeuvre temporaire. Dans la mesure où ces deux périodes ne se recouvrent pas, l'analyste pourra pour évaluer la main-d'oeuvre saisonnière non qualifée employée par le projet utiliser le salaire virtuel calculé comme ci-dessus, étant donné que par définition cette main-d'oeuvre est sans emploi durant la morte-saison. En revanche, si les besoins du projet se recouvrent avec la période générale d'emploi saisonnier (récoltes, semailles, etc.), et s'il n'y a pas de chômage général durant cette dernière, l'analyste doit attribuer à la main-d'oeuvre saisonnière employée par le projet un prix virtuel égal au salaire réel payé pour la main-d'oeuvre saisonnière dans l'économie régionale.

Une étude de cas en Corée montre comment cela a été réalisé dans le cas d'un projet de plantation de bois de feu.[21] Du fait que les besoins de main-d'oeuvre pour le reboisement se recouvraient dans une certaine mesure avec les besoins agricoles, on a utilisé un salaire virtuel moyen établi à partir du taux de plein salaire saisonnier et des revenus de morte-saison (en argent et en nature) de la main-d'oeuvre villageoise non qualifiée. La pondération était faite en fonction de la proportion d'emploi dans le projet se recouvrant avec la période de plein emploi saisonnier général.

Lorsqu'on a affaire à ces trois types de situation, il convient d'examiner la nature du marché de l'emploi et de distinguer entre le chômage au sens économique et le fait que l'on constate que les gens ne font rien. Dans une analyse économique c'est le chômage au sens économique qui importe. On le déterminera à la fois par l'offre et par la demande. A titre d'exemple, supposons une situation telle qu'indiqué dans l'encadré A.5.9.

Dans les cas où il existe un sous-emploi en raison d'une politique ou d'une réglementation de salaires minima, il faut établir un taux de salaire virtuel sur la base de la production à laquelle on renonce, et ce taux sera vraisemblablement plus bas que le salaire minimum réglementé. Par exemple, si un salaire minimum fixé par le gouvernement est effectif, on pourra peut-être détecter un marché libre concurrentiel du travail dans les zones rurales où les salaires effectivement payés sont au-dessous du minimum fixé. Il fournira une approximation du taux de salaire Virtuel à appliquer. S'il ne peut déceler de marché libre du travail, l'analyste devra s'appuyer sur des estimations approximatives de ce à quoi les chômeurs renonceraient sous forme d'autres productions possibles s'ils étaient employés dans le projet. Cette information pourra être obtenue par des enquêtes auprès des ménages des communautés locales.

Il s'élève parfois une confusion si les chômeurs qui seront maintenant employés dans le projet touchaient des indemnités de chômage. Celles-ci constituent un paiement de transfert, ou un transfert de consommation de certains membres de la société à d'autres. S'il est légitime de l'inclure dans une analyse financière effectuée du point de vue du gouvernement, il n'a pas sa place dans une analyse économique, où l'analyste cherche à estimer le coût d'opportunité de la main-d'oeuvre, ou la valeur de la consommation à laquelle on renonce en employant la main-d'oeuvre dans le projet analysé.

Encadré A.5.9 Prix virtuel de la main-d'oeuvre non qualifiée

Dans la région du projet il y a actuellement un millier de personnes de la catégorie main-d'oeuvre non qualifiée qui sont employées. Une centaine de personnes sont sans emploi en ce sens qu'elles ne travaillent pas dans des emplois rémunérés (autrement dit qu'elles ne touchent pas de salaire). Le projet aura besoin de 10 travailleurs non qualifiés à plein temps. Comment doit être établi leur prix virtuel? La réponse dépendra en partie de ce pour quoi les travailleurs apparemment sans emploi sont disposés à travailler (c'est-à-dire ce à quoi ils renoncent en allant travailler au projet). Il se peut très bien qu'ils produisent chez eux des denrées pour leur propre consommation. S'ils vont travailler au projet il se peut qu'ils doivent renoncer à cette production (consommation). S'il y a un marché du travail concurrentiel (et pas de salaire minimum fixé par le gouvernement ou les syndicats), il n'y a pas chômage dans un sens économique. Ceux qui ne travaillent pas estiment que passer leur temps à faire autre chose est au moins aussi intéressant pour eux que le salaire minimum payé sur le marché concurrentiel. Par conséquent, ce salaire minimum fournira une mesure valable de la valeur marginale de la main-d'oeuvre (ou du coût d'opportunité pour la main-d'oeuvre).

Cadres et main-d'oeuvre qualifiée

La plupart des projets nécessitent des cadres supérieurs et des employés qualifiés. Dans de nombreux pays en développement il y a une pénurie aiguë de ces catégories de personnel. Il est fréquent également, dans ces pays, que les autorités imposent des limites aux augmentations de traitements et salaires (plafonds de salaires). Comme dans tous les cas où un prix maximum effectif est imposé, le résultat est que les employeurs peuvent être disposés à payer la main-d'oeuvre qualifiée à un taux supérieur au taux de salaire en vigueur. Il se peut que les travailleurs qualifiés soient pleinement employés, mais qu'ils soient moins payés que ce que les producteurs sont disposés à donner, c'est-à-dire que leur coût d'opportunité réel. Dans un tel cas l'analyste pourra choisir d'utiliser un niveau de salaire virtuel supérieur au niveau du marché.

S'il y a dans l'économie du pays des travailleurs qualifiés ou des cadres sans emploi, on pourra les traiter exactement de la même façon que la main-d'oeuvre non qualifiée, à savoir les évaluer en fonction de leur coût d'opportunité sans le projet.

Ressources: la terre

La mesure appropriée de la valeur de la terre est le revenu net le plus élevé qui aurait pu être effectivement obtenu de la terre en l'absence du projet. L'analyste doit donc estimer ce que serait le revenu net avec la meilleure autre utilisation possible de la terre, et qui sera le prix virtuel à utiliser.

Pour estimer le coût d'opportunité de la terre, l'analyste peut obtenir une information par des entretiens et à partir des données sur l'utilisation des terres dans la région du projet, notamment si celles-ci se rapportent à la disponibilité et à la mise en valeur de terres comparables à celles de la zone de projet proposée.

Lors de cette évaluation, l'analyste doit se garder de surévaluer le coût de la terre du fait des erreurs suivantes:

Chacun de ces points est discuté plus en détail dans les sections qui suivent.

Dans de nombreux cas, il y a peu d'autres utilisations effectivement possibles des terres affectées aux projets forestiers. La raison peut en être la qualité médiocre des sols pour d'autres utilisations, mais il se peut aussi qu'il n'y ait pas de pression sur les terres dans la zone de projet, et qu'il y ait abondance d'autres terres se prêtant à ces autres utilisations (voir encadré A.5.10).

Encadré A.5.10 Prix virtuel de la terre: exemple 1

Supposons par exemple deux grands terrains en friche, A et B. Il est proposé d'affecter le terrain A au projet forestier. L'élevage bovin est en expansion dans la région du projet. L'analyste estime que la zone de projet pourrait fournir par le pâturage un revenu net de 10 $/ha/an pendant la durée du projet, de même que le terrain B. Si ce dernier, actuellement en friche, est susceptible d'absorber la demande prévisible de terres de pâture pendant la durée du projet, si celui-ci est entrepris il n'y aura pas de coût pour la société en affectant le terrain A au projet forestier et en utilisant le terrain B pour l'extension des pâturages. Par conséquent, le coût d'opportunité de l'affectation du terrain au projet sera égal à zéro. En revanche, si l'expansion prévisible de l'élevage requiert une surface plus grande que B - c'est-à-dire si l'on prévoit une demande sur le terrain A au cours de la durée du projet -, il faut attribuer au terrain A un coût en l'affectant au projet forestier, étant donné que l'on renoncera ainsi à une certaine valeur nette de pâturage. Le temps auquel ce coût d'opportunité s'appliquera devra être déterminé en fonction de l'époque à laquelle le terrain A serait effectivement nécessaire pour le pâturage.

Une autre erreur possible de surévaluation à éviter est de supposer qu'un terrain sur lequel on envisage un projet forestier aurait une autre utilisation possible qui resterait viable pendant toute la durée prévue pour le projet (voir encadré A.5.11).

Une troisième erreur de surévaluation possible se rapporte à ce qui est inclus dans les calculs de prix d'opportunité. C'est la valeur nette, et non la valeur totale de la production à laquelle on a renoncé, qui doit être prise comme coût d'opportunité. En conséquence, si dans une situation particulière un projet de reboisement soustrait des terres à la production agricole et que la valeur totale ou brute de la récolte à laquelle on renonce soit de 100 $/ha/an, l'analyse doit pour avoir un prix virtuel correct de la terre soustraire tous les coûts (autres que celui de la terre) nécessaires pour produire cette valeur brute de 100 $. Il se peut que, par suite d'une baisse des prix due à une surproduction de cette culture, ces coûts s'élèvent à 100 $, auquel cas le coût d'opportunité de la terre sera égal à zéro vis-à-vis du projet forestier. La société ne renoncerait à aucun bénéfice de consommation, étant donné que les coûts seraient égaux aux bénéfices et la valeur nette à laquelle on renoncerait serait nulle.

Encadré A.5.11 Prix virtuel de la terre: exemple 2

Considérons le cas d'un terrain en zone tropicale avec des sols pauvres, dont en l'absence du projet on aurait pu tirer un revenu immédiat sous forme de cultures annuelles. Cette autre utilisation possible, qui aurait effectivement eu lieu sans le projet, fournit une mesure de valeur appropriée pour la période durant laquelle elle se serait poursuivie. Une personne connaissant peu de chose sur les sols tropicaux pourrait proposer d'utiliser la valeur estimée de la culture annuelle initiale à laquelle on renoncera comme coût annuel de la terre pendant toute la durée du projet forestier - 15 ans par exemple. En règle générale, cependant, sur la plupart des sols tropicaux et dans la grande majorité des conditions écologiques, il n'est pas possible d'avoir une production continue de cultures annuelles sur un même sol sans interventions radicales telles qu'un apport massif d'engrais qui accroîtra les coûts et réduira le revenu net potentiel (c'est-à-dire le coût d'opportunité). Le coût de cet engrais et autres mesures nécessaires sera tel que la valeur nette de la récolte (coût d'opportunité) se réduira à zéro après seulement quelques années. Pour évaluer correctement le prix virtuel de la terre, l'analyste pourra établir un calendrier indiquant le prix virtuel de la terre pour chaque année, comme dans le tableau hypothétique ci-dessous. Noter que les calculs donneraient une réponse toute différente si l'on supposait simplement que le coût d'opportunité annuel soit le même pendant toute la durée du projet, et égal au coût d'opportunité à la première année.

Calendrier de la valeur nette des récoltes auxquelles on renonce, en vue d'établir le prix virtuel de la terre*

Année

Prix virtuel établi à partir de la valeur nette des cultures auxquelles on renonce ($/ha)

0

75 $

1

75 $

2

70 $ - les rendements commencent à baisser

3

65 $

4

50 $ - apport massif d'engrais

·

·

·

·

9

0 $ - la valeur de l'engrais nécessaire est égale à l'accroissement net de valeur de la récolte

10

0 $ - tous les éléments nutritifs ont été enlevés; le sol est devenu stérile, et inapte à toute culture annuelle

·

·

·


·


n (fin du projet)


* Données hypothétiques.

Changements dans le temps des prix virtuels

Comme on l'a indiqué au chapitre 5, lorsqu'il utilise les prix de marché comme base d'évaluation des prix virtuels, l'analyste ne doit pas oublier que les coûts d'opportunité associés aux facteurs de production peuvent changer au cours de la durée du projet, et il devra tenir compte de ces changements éventuels.

De même, s'il a des raisons de penser que la situation de l'emploi telle qu'elle se présente au début du projet ne se maintiendra pas pendant toute la durée du projet, par exemple que le chômage diminuera en raison de l'amélioration générale des conditions économiques même sans le projet, l'analyste pourra faire des ajustements dans le taux de salaire virtuel pour les dernières années du projet. Encore une fois, cela reste une affaire de jugement. Si la situation est très incertaine, l'analyste pourra simplement considérer de telles possibilités dans l'analyse de sensibilité.

Encadré A.5.12 Changements dans le temps des prix virtuels

Dans le cas de la terre, par exemple, il se peut très bien qu'il n'y ait pas d'autres utilisations possibles de la terre au moment de l'évaluation du projet, mais que des possibilités se développent au cours du déroulement du projet. Dans un projet forestier normal, la période en jeu peut être importante - 20 ans ou plus. L'analyste doit donc se préoccuper de l'évolution qui est susceptible de se produire au cours de la durée du projet, et qui pourrait donner de la valeur à la terre pour d'autres utilisations. Par exemple, même de faibles changements dans les prix agricoles peuvent rendre une terre jusque là en friche intéressante pour la production agricole ou animale, donc faire passer le coût d'opportunité d'une valeur nulle à une valeur positive. Dans la mesure du possible, en appliquant le principe avec et sans, l'analyste doit s'efforcer d'anticiper de telles utilisations futures et de les évaluer, de façon à pouvoir les entrer comme coût pour le projet. Il faut noter toutefois que cela ne signifie pas que toutes les ressources actuellement inexploitées auront des utilisations productives dans l'avenir. Il est très possible qu'un prix virtuel égal à zéro soit approprié. Le point important est que l'analyste doit considérer l'éventualité qu'un coût d'opportunité entre en jeu au cours de la durée du projet. Dans des cas de grande incertitude, il pourra se contenter de tester diverses hypothèses possibles dans une analyse de sensibilité (chapitre 7).



[21] Etude de cas n°2, FAO (1979).

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