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SYNTHÈSE DES CONCLUSIONS DE VINGT-TROIS ÉTUDES DE CAS[2]


1 INTRODUCTION

1.1 Contexte

Comme stipulé à l’article 20 de l’Accord sur l’agriculture du Cycle d’Uruguay, des négociations ont été engagées, au début de l’an 2000, en vue de poursuivre le processus de réforme, pour parvenir à long terme, à une réduction progressive et substantielle du soutien et de la protection du secteur agricole, dans le cadre d’une réforme fondamentale. Ces négociations tiennent compte des résultats de la mise en oeuvre des engagements de réductions, au titre de l’Accord sur l’agriculture; des effets de ces engagements sur le commerce mondial des produits agricoles; des considérations autres que d’ordre commercial; du traitement spécial et différencié en faveur des pays en développement membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et de l’objectif de créer un système de commerce équitable, axé sur le marché ainsi que des autres objectifs mentionnés dans le préambule de l’Accord; tout comme les autres engagements nécessaires pour parvenir aux objectifs de l’Accord.

La Déclaration de Doha a fixé une date butoir (1er janvier 2005) à respecter pour la conclusion de presque toutes les négociations, y compris celles sur l’agriculture. Les modalités relatives aux modifications de l’Accord sur l’agriculture devront être établies d’ici fin mars 2003. Les participants présenteront leurs projets de Listes globales fondées sur ces modalités au plus tard lors de la cinquième session de la Conférence ministérielle de l’OMC, en septembre 2003. La Déclaration confirme aussi que les dispositions relatives au traitement spécial et différencié, pour les pays en développement, devraient faire partie intégrante des négociations, pour les nouveaux engagements des pays ainsi que pour toutes les règles ou disciplines nouvelles ou révisées. Elle indique en outre que les résultats devraient être appliquées et permettre aux pays en développement de satisfaire leurs besoins, notamment pour ce qui est de la sécurité alimentaire et du développement rural.

La participation des pays en développement à ces négociations devrait reposer sur une compréhension analytique et empirique des répercussions de l’Accord à ce jour. La FAO a entrepris en 1999 une tâche de grande envergure: évaluer les répercussions de l’Accord sur l’agriculture dans les pays en développement. Elle a commissionné quatorze études de cas et préparé un document de synthèse pour faire le point de ces expériences et en tirer les leçons qui s’imposent (FAO,2000). Cette étude a été mise à jour, en élargissant le nombre des pays examinés et en utilisant des données plus récentes. Au cours de l’été 2002, à la demande de la FAO, seize nouveaux pays ont été étudiés. Certains avaient déjà été examinés précédemment en 1999, d’autres sont venus s’ajouter à ce premier groupe. Le présent chapitre établit une synthèse qui repose sur l’ensemble des 23 études de cas réalisées à ce jour. L’accent est mis toutefois sur la deuxième série d’études portant sur 16 pays effectuée en 2002. Les références aux différents pays contenues dans le présent chapitre de synthèse reposent sur les études respectives, sauf indication contraire.

1.2 Pays sélectionnés

La sélection des 23 pays repose sur un certain nombre de considérations: équilibre géographique, nécessité d’englober différentes catégories de pays (pays les moins avancés; pays importateurs nets de produits alimentaires et exportateurs de produis agricoles) et disponibilité de consultants nationaux pour réaliser les études dans les délais requis. Le tableau 1 établit la liste des pays étudiés et sur lesquels repose le présent chapitre.[3]

L’agriculture joue un rôle important dans l’économie de tous les pays visés (tableau 2). Dans tous les pays sélectionnés, l’agriculture représente en moyenne 20 pour cent du PIB (de 4 pour cent au Botswana à 44 pour cent en Ouganda). En tant que source de moyens d’existence, son importance est encore croissante, puisqu’elle emploie en moyenne 46 pour cent de la main d’œuvre (de 17 pour cent au Brésil à 80 pour cent en Ouganda). La part de l’agriculture dans l’ensemble des recettes d’exportation des marchandises est en moyenne légèrement inférieure à 30 pour cent dans les pays sélectionnés (de moins de 3 pour cent au Bangladesh à 76 pour cent au Malawi).

Tableau 1. Pays sélectionnés figurant dans la présente étude

Pays

Études de cas disponibles

Appartenance à un groupement de pays (d’après les revenusa et/ ou le statut alimentaire)

1999b

2002

Afrique

Botswana

x




PDINPA

Pays à revenu moyen supérieur

Côte d’Ivoire


x

PFRDV


PDINPA

Pays à faible revenu

Kenya

x


PFRDV


PDINPA

Pays à faible revenu

Malawi


x

PFRDV

PMA


Pays à faible revenu

Sénégal

x


PFRDV

PMA


Pays à faible revenu

Ouganda


x

PFRDV

PMA


Pays à faible revenu

Zimbabwe


x




Pays à faible revenu

Asie et Pacifique

Bangladesh

x


PFRDV

PMA


Pays à faible revenu

Fidji


x




PRITI

Inde

x


PFRDV



Pays à faible revenu

Indonésie


x

PFRDV



Pays à faible revenu

Pakistan

x


PFRDV


PDINPA

Pays à faible revenu

Philippines


x

PFRDV



PRITI

Sri Lanka

x


PFRDV


PDINPA

PRITI

Thaïlande

x





PRITI

Amérique latine et Caraïbes

Brésil

x





Pays à revenu moyen-supérieur

Costa Rica


x




Pays à revenu moyen supérieur

Guyana

x





Pays à revenu moyen inférieur

Honduras


x

PFRDV


PDINPA

Pays à revenu moyen inférieur

Jamaïque

x




PDINPA

Pays à revenu moyen inférieur

Pérou

x




PDINPA

Pays à revenu moyen inférieur

Proche-Orient et Afrique du Nord

Égypte

x


PRFDV


PDINPA

Pays à revenu moyen inférieur

Maroc

x


PFRDV


PDINPA

Pays à revenu moyen inférieur

Notes: PMA: pays les moins avancés, selon la classification des Nations Unies; PFRDV: pays à faible revenu et à déficit vivrier (selon la définition de la FAO leur PNB par habitant était inférieur à 1 445 dollars en l’an 2000) importateurs nets de produits alimentaires (teneur en calories); PDINPA: pays en développement importateurs net de produits alimentaires, tels que définis par le Comité de l’agriculture de l’OMC.

a Classification de la Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde, CD-ROM 2002.

b Voir FAO (2000).

Tableau 2. Rôle de l’agriculture dans les pays sélectionnés

Pays

Part moyenne de l’agriculture dans le PIB 1998-2000 (%)

Emplois agricoles, par rapport à l’ensemble des emplois 1998-2000 (%)

Exportations agricoles par rapport aux exportations totales de marchandises (1998-2000) (millions de dollars E.-U.)

Bangladesh

24,8

56,6

2,5

Botswana

3,6

44,7

4,4

Brésil

7,7

17,1

27,1

Costa Rica

10,9

21,5

67,2

Côte d’Ivoire

27.5

50,3

53

Égypte

17,2

37,4

11,6

Fidji

18,4

40,4

27,3

Guyana

34,9

18

34,8

Honduras

17,6

35,6

47,7

Inde

26,3

54,1

12,8

Indonésie

18,2

44,8

9,5

Jamaïque

7

21

18,4

Kenya

23,3

75,9

62,4

Malawi

38,5

78

76,1

Maroc

15,3

37,3

11

Pakistan

26,9

51,4

13,6

Pérou

7,9

30,5

10,8

Philippines

16,7

40

4,4

Sénégal

17,9

74

13,1

Sri Lanka

20,4

46,6

20,5

Thaïlande

11,4

49,8

11,9

Ouganda

43,8

79,5

72,9

Zimbabwe

19,9

63,1

45,3

Source: FAOSTAT; et Indicateurs du développement dans le monde CD-ROM 2002.

1.3 Objectifs de la présente étude

La présent étude de synthèse et les chapitres qui suivent visent à répondre à quatre questions relatives à l’incidence de l’Accord sur l’agriculture dans les pays en développement:

1.4 Approche méthodologique

L’évaluation des effets de l’Accord sur l’agriculture, comme celle de tout accord de libéralisation des échanges, se heurte à un problème de méthodologie. Une simple comparaison des tendances (flux des échanges agricoles ou des indicateurs de sécurité alimentaire) avant et après l’application de l’Accord semble être la démarche la plus évidente mais elle ne tient pas compte de nombreux autres facteurs qui peuvent aussi agir sur ces tendances, et il peut être très difficile d’isoler les effets dus uniquement à l’Accord. Du point de vue de la méthode, il est possible de contourner ce problème de plusieurs façons.

Le recours à la modélisation pour simulation, qui utilise des modèles par pays est l’une des hypothèses envisageables.[5] Un modèle de simulation offre une représentation réaliste de la structure et de la situation du secteur agricole d’un pays. En utilisant le modèle pour simuler l’incidence de l’application de changements convenus au titre de l’Accord sur l’agriculture, il est possible d’évaluer leur incidence, tout en maintenant les facteurs à un niveau constant. Cette solution est séduisante en théorie mais les résultats des simulations sur modèles sont fortement déterminés par les hypothèses implicites sur le comportement économique. Les modèles par pays présentent aussi l’inconvénient d’être trop généraux pour capter les subtilités des négociations sur les lignes tarifaires.

Une autre approche consiste à adopter l’analyse statistique en coupe, pour examiner les rapports entre la libéralisation des échanges, les activités agricoles et la sécurité alimentaire. Dans un modèle statistique proprement défini, il est possible de contrôler les autres facteurs de manière à déterminer les relations entre ces variables. La précision des résultats dépendra de la justesse des données qui sous-tendent le modèle statistique (les hypothèses et les données sont souvent complexes).

Une troisième voie (celle utilisée dans la présente étude) s’appuie sur les études de cas, pour comprendre l’incidence de l’Accord. Les études de cas ont l’avantage de permettre l’examen des questions dans un contexte spécifique; de présenter des données non regroupées et de tirer parti des connaissances approfondies du pays de chaque consultant. Toutefois, cette démarche a elle aussi des limites dont il convient de tenir compte, à la lecture du présent chapitre de synthèse. Premièrement, il est important de choisir un échantillon représentatif d’études de cas: de nombreuses conclusions sont tirées à partir seulement d’un ou deux exemples bien choisis. Deuxièmement, malgré des cadres de référence pratiquement similaires, chaque étude de cas varie inévitablement dans les détails. Toutes les études de cas ne permettent pas de répondre à toutes les questions précédemment indiquées. Le fait par exemple, que les problèmes liés aux importations faisant l’objet de dumping ne soient pas envisagées dans une étude de cas ne signifie pas pour autant que ce problème n’existe pas. Troisièmement, les conclusions tirées d’une étude de cas dépendent de l’analyste et des bases de données choisies pour l’analyse. Cela dit, les études de cas permettent néanmoins d’examiner les questions relatives à l’incidence de l’Accord sur l’agriculture de manière très approfondie ce qui n’est envisageable ni avec les modèles de simulation, ni avec les démarches statistiques.

Le présent chapitre suit de près la présentation du chapitre correspondant dans le volume de la FAO publié en l’an 2000. La section 2 récapitule les expériences des pays relatives à la mise en œuvre des principales dispositions de l’Accord sur l’agriculture et les engagements pris par les pays, notamment pour ce qui est de l’accès aux marché, des mesures de soutien interne et des subventions à l’exportation. Il traite aussi succinctement du bilan des actions relatives aux Accords SPS et ADPIC. La section 3 se penche sur les résultats obtenus par les pays sélectionnés pour ce qui est des échanges de produits alimentaires et agricoles, avant et après l’application de l’Accord sur l’agriculture. La section 4 examine les tendances de la sécurité alimentaire et de la sous-alimentation au cours de la période d’application de l’Accord sur l’agriculture. Enfin, la section 5 tire des conclusions d’ordre général sur les intérêts spécifiques et les enjeux de chaque étude par pays, pour le secteur agricole, dans le cadre du cycle des négociations de Doha actuellement en cours.


[2] Le présent chapitre préparé par Alan Matthews (Trinity College, Dublin, Irlande) suit de près le plan d’une étude similaire élaborée par le secrétariat de la FAO, dans le volume d’études de cas publié en l’an 2000.
[3] Malgré la tentation d’extrapoler les conclusions à l’ensemble des pays en développement, il convient de bien noter que les leçons tirées ne concernent que vingt-trois études de cas, et qu’il convient donc d’en tenir compte.
[4] La FAO est en train d’entreprendre un projet parallèle sur les échanges et la sécurité alimentaire qui permettra de mieux approfondir la question.
[5] Les modèles de pays peuvent être construits de différentes façons, notamment sous forme de modèles de marchés polyvalents, des modèles économétriques pour le secteur agricole, des modèles informatiques d’équilibre général et des modèles de programmation mathématique. Les méthodologies différent du point de vue des hypothèses relatives au comportement des agents économiques et pour les données requises.

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