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FIDJI[31]


1 INTRODUCTION

Les Fidji sont une petit pays, relativement isolé, qui a néanmoins réussi à assurer à sa population un niveau de vie raisonnable. Actuellement le PIB par habitant est d’environ 1 200 dollars E.-U.; plus de 90 pour cent de la population sait lire et écrire; l’espérance de vie est d’environ 72 ans; la mortalité infantile est de 22 pour mille; et le niveau de sécurité alimentaire est acceptable. Tout cela a été remis en cause en mai 2000, un groupe d’hommes armés ayant investi le Parlement. Malgré le retour d’un gouvernement constitutionnel en septembre 2001, les niveaux d’investissement et de croissance économique restent faibles compte tenu de l’instabilité politique et le secteur du sucre est en crise.

Les Iles Fidji, (environ trois cents) occupent approximativement 18 400 km2. Les deux îles principales, à elles seules, représentent 88 pour cent de cette superficie. Environ 16 pour cent des terres sont adaptées à l’agriculture et en outre 43 pour cent des superficies disponibles peuvent être affectées aux plantations d’arbres et aux pâturages.

Le climat des îles Fidji, généralement clément, est ponctué de phénomènes météorologiques extrêmes: ouragans, inondations et périodes de sécheresse qui ont des répercussions importantes sur les modalités d’utilisation des sols. On a enregistré environ 136 cyclones aux Fidji au cours des 120 dernières années. On relève aussi, occasionnellement des périodes d’extrême sécheresse, comme en 1997/98 (la plus forte du siècle).

La population, qui compte environ 800 000 habitants, dont environ 51 pour cent d’autochtones. Les indo-fidjiens (pour l’essentiel des descendants des travailleurs indiens conduits pour travailler dans les plantations de canne à sucre) représentent environ 44 pour cent de la population. Le taux de croissance de la population est inférieur à un pour cent par an, et sa densité moyenne est faible, selon les critères mondiaux. Toutefois, le système de distribution des terres a créé des inégalités importantes dans la répartition des terres. Les îles Fidji ont évolué et sont passées d’une société agraire à une société semi-urbaine, dans laquelle, au moins la moitié de la population vit en zone urbaine ou péri-urbaine. L’exode rural a été plus marqué dans les îles les plus éloignées et dans les zones de plantations de la canne à sucre.

1.1 Structure du secteur agricole et contribution à l’économie

La part du secteur agricole dans le PIB total a baissé, passant de 19 pour cent en 1989 à 10 pour cent en 2001; le tourisme et le secteur textile l’ont dépassé. Les recettes en devises du secteur agricole sont restées pratiquement constantes en termes réels au cours des décennies, et ce secteur reste la principale source d’emploi. Malgré une aide publique importante et des dépenses importantes affectées à divers projets de développement agricole, la structure globale de la production a peu évolué. La structure des différents sous-secteurs agricoles, leurs résultats et leur contribution à l’économie sont présentés au tableau 1.

Tableau 1. Étude d’ensemble des résultats obtenus par le secteur agricole aux Fidji, et contribution à l’économie

Sous-secteur

Valeur de la production et tendances

Recettes du commerce international ou économies de devises

Situation de l’emploi

Agriculture de subsistance

30-40 pour cent du PIB - croissance régulière

Économies de devises substantielles

Population économiquement active majoritaire

Sucre

250-300 millions dollars E.-U. - devrait dinimuer

250-300 millions de dollars E.-U.

23 000 producteurs sous contrat - mais en recul avec le non renouvellement des baux.

Diverses cultures d’exportation en vrac (coprah et cacao)

4-8 millions de dollars E.-U. - en recul

4-8 millions de dollars E.-U.

Grand nombre de personnes ayant un faible revenu

Horticulture et cultures d’exportation spécialisées

50 millions de dollars E.-U.
Devient significative et progresse très rapidement

25 millions de dollars E.-U.

250 000 journées de travail pour le gingembre - plus ou moins pareil pour les exportations de taro

Culture commercial et alimentaire

120 millions de dollars E.-U.- croissance rapide

Équivaut à la valeur de la production

70% des exploitations ne cultivent pas la canne à sucre

Riz

6 millions de dollars E.-U. et en recul

Essentiel de la production en culture pluviale; valeur correspondant pratiquement à la valeur de la production

12 000 agriculteurs cultivent du riz, la plupart du temps en rotation avec la canne à sucre

Élevage

Volaille (35 millions de dollars E.-U. - en augmentation)
Produits laitiers (23 millions de dollars E.-U. - en recul)
Viande bovine (1 600 tonnes - en recul)
Viande porcine (800 tonnes - en progression)

Économies nettes de devises réduites pour la volaille et la viande porcine et élevées pour les produits laitiers et la viande bovine

2000 exploitations laitières, 2000 élevages industriels de bovins; 1 800 14 500 élevages de porcs (note: les élevages industriels de porcs ne sont pas pris en compte 1 000 élevages de volailles

Source: D’après les données mises à jour de la BAD (1996).

1.2 Résultats obtenus par le secteur, au cours des deux dernières décennies

Cultures traditionnelles

Une quantité et une variété incroyable de cultures alimentaires traditionnelles sont cultivées aux Fidji, dans l’ensemble du pays. Elles sont considérées comme la «force cachée» de l’économie (Banque asiatique de développement [BAD], 1996). Cependant seulement 40 pour cent des besoins en énergie sont couverts par les denrées cultivées dans le pays (FAO, 1999, p. 6). Les importations vivrières sont encore relativement faibles par rapport à d’autres petits États insulaires en développement. Ces importations ont chuté légèrement en tant que pourcentage des importations totales au cours de la dernière décennie malgré la déréglementation. Cela indique que les disponibilités alimentaires ont pu augmenter pour satisfaire l’accroissement de la demande d’une population urbaine en rapide expansion. Les investissements publics consacrés à l’infrastructure routière ont eu un effet décisif dans ce processus (BAD, 1996, p.4).

Figure 1. Pourcentage du PIB agricole par activité (prix courants aux coûts des facteurs)

Source: Bureau statistique des Fidji.

La contribution de la production de subsistance au PIB est similaire à celle du sucre (moyenne de 40 pour cent du total du PIB agricoles aux prix courants) comme indiqué à la figure 1. Les systèmes d’exploitation et les cultures n’ont pas change au cours des deux dernières décennies. D’un point de vue stratégique, la sécurité alimentaire du pays dépend du maintien de l’agriculture de subsistance et de sa transformation actuelle en agriculture semi commerciale, secteur dans lequel les Fidji bénéficient d’un avantage comparatif.

Sucre

Le secteur du sucre est d’une importance fondamentale pour l’économie. La canne à sucre occupe plus de 50 pour cent des terres cultivées et 13 pour cent de la main d’œuvre travaille directement dans ce secteur qui contribue à hauteur de 9 pour cent au PIB et représente quelque 30 pour cent des exportations totales du pays (BAD, 2000). La fuite des importations lié à la culture et à la transformation de la canne à sucre reste relativement faible et, du fait de la structure du secteur agricole reposant sur de petites exploitations, l’effet multiplicateur est plus favorable, par rapport à la plupart des autres secteurs permettant d’obtenir des devises[32]. Ce secteur, et partant l’économie des Fidji, est maintenant confronté à une crise importante. La production a été gravement affectée par le non renouvellement des baux de nombreux agriculteurs indo-fidjiens. Les aléas liés aux prix et aux contingents du sucre vendu à l’UE, au titre des accords préférentiels, ont également joué leur part.

Production arboricole traditionnelle

Le coprah, culture commerciale traditionnelle des îles les plus éloignées, a connu un déclin progressif au cours des dernières décennies. Il a été tenté à plusieurs reprises de diversifier l’industrie, mais sans succès. La production de coprah varie en fonction des cours, mais la tendance à la baisse se confirme. Une grande partie des terres consacrées à la noix de coco ont maintenant été abandonnées. Le cacao, dont la culture a été encouragée en vue d’une diversification des cultures et qui a bénéficié d’importants financements publics, a pratiquement disparu.

Exportations de produits horticoles

La situation des cultures horticoles d’exportation est plus encourageante. Ce sous-secteur qui repose exclusivement sur de petites exploitations, concerne le gingembre, les fruits tropicaux, les racines et les légumes. L’horticulture, après des années difficiles représente maintenant la part la plus dynamique du secteur agricole, amis il est entravé par les contraintes liées aux politiques de quarantaine trop strictes appliquées par les pays importateurs. Les exportations de fruits auraient pu progresser davantage si le marché australien n’était pas resté fermé aux produits susceptibles d’abriter la mouche du fruit. La croissance constante des exportations de ce créneau a confirmé la compétitivité de ce secteur dans l’agriculture des Fidji, bien que cela n’ait pas été suffisant pour compenser le recul de plus en plus net, du secteur du sucre.

Produits de substitution aux importations

Pendant de nombreuses années, le secteur des produits de substitution aux importations aux Fidji (riz, produits laitiers, volaille, bœuf, porc et tabac) a été protégé par une série complexe de contingents, de droits de douane et de subventions. Depuis le début des années 90, la suppression des licences s’est étendue, et l’on a assisté à une réduction progressive du niveau global de protection tarifaire. Ces réformes n’ont pas eu les effets négatifs que l’on prévoyait sur le secteur des produits de substitution aux importations.

1.3 Changements d’orientation et programmes, au cours des deux dernières décennies

Pendant les deux décennies qui ont suivi l’indépendance (1970), les pouvoirs publics ont adopté des politiques visant à remplacer les importations et effectué d’importants investissement directs. Les coûts de cette approche ont été élevés et les progrès enregistrés par la production non durables.

La politique de substitution des importations est axée sur les produits locaux, qui devraient remplacer les produits importés (riz, bœuf, produits laitiers, volailles, et céréales pour l’alimentation du bétail). On a également assisté à un mouvement en direction du développement de nouveaux produits d’exportation, notamment le cacao. Les pouvoirs publics ont décidé cette politique et ils ont aussi fourni les directeurs de projets, le personnel de vulgarisation et le personnel administratif nécessaires à la mise en place. Le rôle des agriculteurs (secteur privé) était essentiellement de bénéficier des avantages fournis et d’accroître la production.

Pour réduire la concurrence des aliments importés et pour permettre aux producteurs locaux de «bénéficier d’une juste rémunération de leur travail», les importations ont été limitées soit par des droits de douane, soit par des licences. Les pouvoirs publics ont aussi participé à la transformation et à la commercialisation de certains produits (riz et cacao) pour combler l’écart enregistré dans la commercialisation des produits agricoles.

En 1989, la politique économique nationale a subi une importante réorientation, de nombreuses réformes économiques ayant été adoptées. Ces réformes visaient à réduire les coûts en prévoyant des prix flexibles, et en exposant les entreprises nationales aux cours internationaux. Les contrôles sur les licences et les importations ont été remplacés par une protection tarifaire, avec une réduction progressive des droits de douane. Les contrôles sur les licences d’importation ont été supprimés sur 34 denrées alimentaires, et le niveau général de la protection tarifaire a été réduit. Le monopole du National Trading Corporation (entreprise parapublique) a été supprimé.

La déréglementation a représenté un pas décisif pour le secteur agricole, qui a connu des décennies de protectionnisme et de projets d’investissements publics. Le secteur privé, qui était dans une situation de dépendance, vis-à-vis des pouvoirs publics s’est trouvé confronté à des responsabilités jusqu’alors inconnues. Le secteur privé (agriculteurs, transformateurs et exportateurs) doivent maintenant ouvrir la voie et donner une impulsion au secteur (choix des cultures, des marchés). Dans l’ensemble, le secteur a répondu de manière positive aux possibilités offertes.

En 1996, la BAD (Agricultural Sector Review) a attribué l’amélioration des résultats du secteur agricole au mouvement de privatisation. Les résultats de cette étude, ont été intégrés au Plan stratégique de 1999, qui a en fait reconnu les objectifs de sa politique agricole:

Malgré le succès apparent de la nouvelle orientation politique, on a assisté au cours de la fin des années 90 à un important retour en arrière (développement agricole tributaire du secteur public). Un remaniement ministériel a engagé le gouvernement dans un programme quadriennal d’investissement, le Commodity Development Framework (CDF). Cet accroissement des dépenses publiques visait à «stimuler» ce secteur important pour la situation de l’emploi. Le programme CDF a été fortement controversé, tant au sein du gouvernement que par le public. La valeur de toute augmentation de la production n’a jamais été proche du niveau de dépenses du programme CDF, et encore moins de l’augmentation de 1,71 milliards de dollars E.-U. des recettes d’exportation prévue avant la fin de l’an 2000.

Un nouveau gouvernement, instauré en mai 1999, a décrété le retour à la protection du secteur du riz. Un programme de restrictions quantitatives, de droits accrus et de subventions aux intrants a été élaboré. Le gouvernement a été renversé en mai 2000, avant que l’essentiel du programme soit mis en place. À la suite de l’intervention de l’armée, une gestion intérimaire a pris le relais en attendant les nouvelles élections de septembre 2001.

Dans la course aux élections de 2001, une gestion intérimaire a adopté une politique agricole interventionniste similaire à celle du programme CDF, axée sur les villages indigènes, dans des zones politiquement sensibles. Ce nouveau programme (Farm Assistance Scheme- FAS), avait pour objectif une «Action positive» en faveur des conditions de vie des Fidjiens. Selon les estimations, 25 millions de dollars ont été consacrés à la distribution d’intrants gratuits à de nombreux villageois (matériel végétal pour le taro, chainsaws et moteurs de hors-bord).

Après les élections, le nouveau gouvernement a indiqué qu’il souhaitait poursuivre la politique d’«Action positive» du programme FAS - avec toutefois un contrôle financier plus strict. Les pouvoirs publics ont aussi indiqué qu’ils souhaitaient à nouveau participer activement à la commercialisation agricole des produits des villageois. Le Ministre des entreprises publiques, dans son premier discours au Parlement, a mentionné l’intention du gouvernement de réhabiliter le National Trading Corporation, à cet effet.

1.4 Participation des Fidji aux efforts d’intégration régionale et internationale

Les Fidji ont participé de manière active aux efforts d’intégration régionale, qui ont vu le jour en 1981 avec l’Accord de coopération commerciale et économique pour la région du Pacifique Sud (SPARTECA). Le SPARTECA est un accord préférentiel non réciproque entre les Pays insulaires membres du Forum d’un côté et l’Australie et la Nouvelle-Zélande de l’autre côté. Certains produits peuvent entrer en franchise de droits sur le marché australien et néo-zélandais, sans restrictions quantitatives. Le SPARTECA n’a pas favorisé de manière significative les exportations agricoles, les pays concurrents ayant aussi un accès en franchise de droits. Les principaux obstacles aux échanges agricoles, avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande, ont été les mesures de quarantaine.

En 1996, les Fidji ont rejoint le Groupe de pays mélanésiens fer de lance, un accord commercial conclu entre la Papouasie-Nouvelle-Guinée, les îles Salomon, Vanuatu et les Fidji. Le Groupe des pays mélanésiens fer de lance permet l’accès en franchise de droits sur ces marchés, pour plus de 150 articles. En 1998, les Fidji ont conclu un accord commercial avec les Tonga, qui donnent un accès réciproque en franchise de droits à environ 50 articles. Le sucre des Fidji, les oignons et la vanille des Tonga sont couverts par l’accord.

Les Fidj ont stimulé la création d’une zone de libre échange entre les Pays insulaires du Pacifique. La plupart des avantages devraient concerner l’économie fidjienne, beaucoup plus diversifiée, dont la structure tarifaire est dans l’ensemble plus faible.

Les Fidji ont signé l’Accord de Cotonou, conclu entre l’Union européenne et les États ACP en l’an 2000, en prolongement de la Convention de Lomé, jusqu’en 2007. L’Union européenne a obtenu une dérogation de l’OMC pour la prolongation de l’accord de Lomé. À partir de 2007, les échanges préférentiels entre les états ACP et l’UE seront réciproques, au titre d’un accord de libre- échange. Les Fidji bénéficient nettement du Protocole sur le sucre de la Convention de Lomé. À ce titre, les Fidji ont obtenu un contingent de 174 000 tonnes pour le sucre vendu à l’UE. Le prix obtenu est indexé au prix d’intervention versé aux cultivateurs de l’UE. Au cours des deux dernières décennies, ce prix a été de deux à quatre fois supérieur aux cours mondiaux du marché (soit un transfert moyen net d’environ 90 millions de dollars fidjiens par an pour le secteur du sucre des Fidji).

Les Fidji sont signataires du GATT, depuis novembre 1993 et membre à part entière de l’OMC, depuis janvier 1996. Le premier Examen des politiques commerciales a eu lieu en 1996, et l’on envisage maintenant d’en effectuer un deuxième.


[31] Étude préparée pour la FAO par Dr Andrew McGregor du Trade Development Office, Suva Fiji. L’auteur remercie pour leur aide et leur participation Mr Sakiusa Tubuna (économiste principal auprès du Ministry of Agriculture, Sugar and Land Resettlement), Mr Waisiki Gonemaituba (occupant les functions d’èconomiste principal auprès du Ministry of Agriculture, Sugar and Land Resettlement) et Ms Joann Young (Economiste principal, Ministry of Agriculture, Sugar and Land Resettlement).
[32] La dernière estimation de l’effet multiplicateur des revenus créés par le secteur du sucre figure dans une étude de 1985 de la BAD (Agricultural Sector Study). L’effet multiplicateur “total” pour le secteur du sucre était de 2,04 au coût des facteurs et de 2,23 aux prix du marché (BAD, 1985, p. 13). Les valeurs respectives pour le secteur du tourisme étaient de 1,41 et de 1,58. L’étude de secteur, en 1985, estimait que les fuites des importations directes du secteur du sucre étaient de 18,2 pour cent (p. 19).

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