Page précédente Table des matières Page suivante


Cadres institutionnels


Les principes cités dans le premier chapitre se prêtent à une analyse éthique des pêches tenant compte des dimensions diverses et complexes du secteur qui sont décrites brièvement dans le deuxième chapitre. Toutefois, ces principes n'ont aucune valeur en euxmêmes; ils doivent être resitués dans le contexte complexe de la réalité économique et sociale des pêches. La première étape importante consiste à examiner les principaux instruments intéressant les pêches qui ont été formulés par les institutions internationales compétentes.

Le point de départ naturel d'un engagement éthique en faveur des questions de développement est la Déclaration universelle des droits de l'homme. Les dispositions générales relatives aux droits civils, culturels, économiques, politiques et sociaux ont par la suite été explicitées et mises en oeuvre. Les dispositions générales de la Déclaration universelle fournissent la motivation et le cadre conceptuel nécessaires. Depuis une vingtaine d'années, une action diplomatique et intellectuelle est en cours dans le domaine des pêches.

Les divers instruments et directives d'un cadre de gouvernance pour les pêches sont notamment la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982, l'Accord d'application de la FAO[6] de 1993 et l'Accord des Nations Unies sur les stocks de poissons[7] de 1995. Dans le cadre de la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement (CNUED), de la Déclaration de Rio et de la Convention sur la diversité biologique (CDB) de 1992, les pays se sont engagés à utiliser les ressources naturelles de manière durable.

Les pêcheurs peuvent devenir des partenaires du développement et non de simples bénéficiaires de services

FAO/12101/T. FENYES

Le Sommet mondial pour le développement durable (SMDD), de 2002 a formulé un programme pour les pêches invitant à rétablir les stocks de poissons de toute urgence et si possible avant 2015[8]. À sa dix-neuvième session, en 1991, le Comité des pêches de la FAO (COFI), a souligné la nécessité de pêches plus responsables. En 1992, la Conférence internationale sur la pêche responsable est revenue sur le concept initial de «responsabilité» qui a été développé ultérieurement en 1995 dans le Code de conduite pour une pêche responsable de la FAO. En 2001, la Conférence de Reykjavik sur la pêche responsable dans les écosystèmes marins a abouti à l'adoption de l'approche écosystémique des pêches dans le cadre de la mise en oeuvre du Code.

Le Code de conduite pour une pêche responsable

Le Code de conduite pour une pêche responsable a été adopté à l'unanimité le 31 octobre 1995 par la Conférence de la FAO. Le Code est conforme aux instruments susmentionnés. Il établit, sur une base non contraignante, les principes et les normes applicables à la conservation, à la gestion et au développement de tous les types de pêches, sous toutes les juridictions. Il fournit le cadre nécessaire aux efforts nationaux et internationaux visant à assurer l'exploitation durable des ressources aquatiques vivantes, dans le respect de l'environnement. Le Code énonce les principes et les normes internationales de comportement des pratiques responsables visant à garantir la conservation, la gestion et le développement efficaces des ressources aquatiques vivantes. Ces principes et ces normes tiennent compte de tous les aspects pertinents sur le plan biologique, technologique, économique, social, environnemental et commercial et garantissent le respect de l'écosystème et de la biodiversité.

Principaux articles du Code de conduite pour une pêche responsable

· Article 6.1. Les États et les utilisateurs des ressources bioaquatiques devraient conserver les écosystèmes aquatiques. Le droit de pêcher implique l'obligation de le faire de manière responsable afin d'assurer effectivement la conservation et la gestion des ressources bioaquatiques.

· Article 6.2. L'aménagement des pêcheries devrait promouvoir le maintien de la qualité, de la diversité et de la disponibilité des ressources halieutiques en quantités suffisantes pour les générations présentes et futures, dans un contexte de sécurité alimentaire, de réduction de la pauvreté et de développement durable...

· Article 6.13. Les États devraient veiller à ce que... les processus de décisions soient transparents et permettent de résoudre en temps voulu des questions urgentes. Conformément aux procédures appropriées, lors de la prise de décision relative à l'élaboration des lois et des orientations de politiques concernant l'aménagement et le développement des pêcheries, ainsi que l'assistance et les prêts internationaux, les États devraient faciliter la consultation et la participation effective de l'industrie, des travailleurs du secteur, des organisations environnementales et autres organisations intéressées.

· Article 6.18. Reconnaissant l'importance de l'apport de la pêche artisanale et de la pêche aux petits métiers en matière d'emploi, de revenu et de sécurité alimentaire, les États devraient protéger de manière adéquate les droits des pêcheurs et des travailleurs du secteur de la pêche, particulièrement de ceux qui pratiquent une pêche de subsistance, artisanale et aux petits métiers, à des conditions de vie sûres et justes ainsi que, le cas échéant, à un accès préférentiel à des fonds de pêche traditionnels et aux ressources se trouvant dans les eaux relevant de la juridiction nationale.

Tenant compte des accords internationaux et des avancées techniques, le Code se propose d'établir des critères pour la mise en oeuvre des politiques nationales et d'apporter des améliorations au cadre juridique et institutionnel nécessaire pour l'exercice de la pêche responsable. Le Code traite de l'utilisation responsable des ressources (et des questions d'environnement connexes), ainsi que des répercussions sur les collectivités humaines. Il met en lumière les aspects économiques, sociaux, environnementaux, culturels et nutritionnels, associant explicitement les pêches, la sécurité alimentaire et la qualité des aliments. Il porte également sur la promotion du commerce dans le respect des règles internationales et sur l'avancement de la recherche et, de façon générale, fixe des normes de conduite.

Le Code met tout particulièrement l'accent sur les besoins nutritionnels des collectivités locales et sur les liens entre les pêches et la sécurité alimentaire et la qualité des aliments. Un autre aspect essentiel du Code est l'importance accordée à la transparence des processus de prise de décisions et à la résolution rapide des problèmes urgents, en facilitant la participation des parties directement intéressées ou de leurs représentants.

Pour d'ultérieures informations sur le Code de conduite pour une pêche responsable, voir: http://www.fao.org/fi/agreem/codecond/codecon.asp

L'approche écosystémique

À l'issue de la Conférence de Reykjavik sur la pêche responsable dans les écosystèmes marins de 2001, le concept d'une approche écosystémique des pêches a été adopté par la FAO, et les directives préliminaires pour sa mise en application au sein du Code ont été établies (FAO, 2003a). Ces directives présentent l'approche écosystémique comme un élargissement du paradigme et des pratiques traditionnelles de gestion des pêches et sont conformes aux dispositions du Code visant la prise en considération des écosystèmes.

Ces directives ne traitent pas directement de l'éthique de l'environnement, mais elles répondent à la demande de la société qui souhaite un comportement plus responsable du secteur des pêches (et des secteurs connexes) vis-à-vis des écosystèmes marins. Dans ce sens, elles contiennent des éléments d'éthique environnementale intéressant tout particulièrement les pêches.

L'approche relative aux moyens d'existence durables

La FAO et les organismes compétents ont défini et s'efforcent de mettre en oeuvre une approche des pêches basée sur les moyens d'existence durables. Ce concept s'applique essentiellement aux pêches artisanales, mais il intéresse aussi de nombreuses communautés pratiquant une pêche sur grande échelle. Cette approche encourage les communautés à envisager leurs biens, leurs atouts et leurs débouchés comme un tout. Elle vise à jeter les bases d'un projet communautaire dans le cadre duquel les pêcheurs, en particulier les pêcheurs artisanaux pauvres, ne sont pas uniquement des bénéficiaires de services mais deviennent des partenaires du développement. L'objectif est d'aider ces communautés, marginalisées par la pauvreté, l'analphabétisme et l'isolement, à devenir des partenaires à part entière de la société.

On examinera ci-après la manière dont les pêches et leur gestion influent sur les moyens d'existence des sociétés humaines, en reliant la dimension morale aux facteurs socioéconomiques en général, et à la pauvreté et l'inégalité sociale en particulier. L'accent est mis sur la présentation d'une façon de concevoir les questions éthiques relatives à la pêche qui auront une incidence sur la manière dont les principes du Code seront appliqués.


[6] Accord visant à favoriser le respect par les navires de pêche en haute mer des mesures internationales de conservation et de gestion.
[7] Accord des Nations Unies visant l’application des dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 relative à la conservation et à la gestion des stocks de poissons chevauchants et des stocks de grands migrateurs.
[8] Paragraphe 30(a) du Plan d’application du Sommet mondial pour le développement durable.

Page précédente Début de page Page suivante