No.4  novembre 2006  
   Perspectives de récoltes et situation alimentaire

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Faits saillants

Le point sur les crises alimentaires

Dossier sur la situation mondiale de l'offre et de la demande de céréales

Aperçu général de la situation des disponibilités vivrières dans les pays à faible revenu et à déficit vivrier

Examen par région

Dossiers spéciaux

Annexe Statistique

Terminologie

Dossiers spéciaux

Situation des disponibilités et de la sécurité alimentaires en Mongolie

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À la demande du Ministère de l’alimentation et de l’agriculture de la Mongolie, une Mission conjointe des Nations Unies (FAO/UNICEF/PNUD) d’évaluation rapide de la sécurité alimentaire s’est rendue dans le pays du 2 au 20 octobre 2006.

Le contexte économique général est favorable à la sécurité alimentaire, avec une croissance économique régulière depuis 2004 et une augmentation considérable des exportations minières soutenue par un prix record des minerais. Le secteur agricole, basé sur le système traditionnel de l’agriculture nomade, continue de jouer un rôle important dans l’économie du pays: il représente près de 22 pour cent du PIB, emploie 40 pour cent de la main d’oeuvre totale et assure 44 pour cent des exportations totales. La population de la Mongolie était estimée à 2,562 millions d'habitants en 2005. Le pays a connu une urbanisation rapide ces dernières années avec une baisse de la population rurale entre 2001 à 2005, celle de la capitale augmentant à un taux moyen annuel de 4,5 pour cent. En 2005, 60 pour cent de la population étaient considérés comme urbains y compris les personnes vivant à Oulan-Bator et dans les capitales provinciales. La population rurale inclut des éleveurs nomades et des paysans (deux tiers de la population rurale) et les personnes vivant dans les capitales de zone.

Niveaux élevés d'auto-consommation en milieu rural

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La farine, la viande et les produits laitiers sont les principaux aliments de base en Mongolie. Selon des estimations faites dans le cadre de «l'enquête revenu et dépenses des ménages/enquête sur le niveau de vie des ménages 2002/03», ces trois produits couvrent 86 pour cent de l'apport calorique quotidien. Bien que la consommation des produits animaux soit parmi la plus élevée au monde, les céréales constituent la principale source d'énergie et fournissent 55 pour cent de la ration quotidienne. En dépit d’une augmentation rapide de la consommation de pommes de terre, de légumes et de fruits ces dernières années, en particulier en milieu urbain, le régime des Mongoliens reste déficitaire quant à ces produits. Il y a des disparités marquées dans les modèles de consommation entre les populations rurales et urbaines. Les familles nomades consomment un éventail de viandes et de produits laitiers usuels (il y a plus de 500 produits laitiers différents) qui sont préparés et stockés dans les ménages en utilisant des techniques de transformation traditionnelles. Avec un système alimentaire basé sur l’auto-consommation, les ruraux consomment en moyenne trois à cinq fois plus de lait et de produits laitiers que les habitants des villes, environ 50 pour cent de plus de produits à base de viande et seulement un peu moins de produits de farine. En conséquence, on estime que la ration calorique quotidienne en milieu rural est supérieure d’environ 15 pour cent à celle en milieu urbain. En revanche, la consommation des pommes de terre et des légumes en milieu rural est seulement entre le tiers et la moitié du niveau dans les villes.

Reprise de la production des principaux aliments de base pendant ces dernières années

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Le blé est la principale culture de la Mongolie. La production ne cesse de reculer depuis 1990 par suite de l'effondrement de l'Union soviétique et de la perte qui s'est ensuivie d'importantes subventions gouvernementales. Par conséquent, les importations de blé et de farine de blé, par voie commerciale et sous forme d’aide alimentaire, ont augmenté (Figure 7). Au cours des cinq dernières années, la production intérieure de blé a couvert en moyenne 40 pour cent des besoins de consommation.

Du fait de la sécheresse grave qui a sévi pendant la campagne agricole de 2005, la Mongolie n’a rentré que 74 000 tonnes de blé, soit le volume le plus bas jamais enregistré, et a importé 251 000 tonnes pendant la campagne commerciale 2005/06 (octobre/septembre). La production a enregistré une reprise cette année, par suite essentiellement du temps favorable qui a prévalu dans les grandes régions productrices. La Mission a visité les provinces productrices du centre-nord (Selenge, Bulkan, Tov et Darkhan-Uul), où les rendements sembleraient avoir doublé par rapport à l’an dernier. La production de 2006 est estimée provisoirement à 145 000 tonnes ce qui couvrirait 45 pour cent des besoins de consommation pendant la campagne commerciale 2006/07. Les besoins d’importation, y compris par voie commerciale et sous forme d’aide alimentaire, devraient diminuer pour atteindre 230 000 tonnes en 2006/07.

Perspectives de récoltes et situation alimentaire

 

Le secteur de l’élevage a souffert pendant plusieurs années consécutives d’hivers rigoureux et de sécheresses estivales (“dzud” dans la langue locale) de 1999 à 2002, qui ont entraîné la perte de près de 10 millions de chameaux, de chevaux, de têtes de bétail, de moutons et de chèvres, soit quelque 30 pour cent du cheptel total, provoquant ainsi une migration en grand nombre des populations rurales vers les villes. Ce secteur connaît une reprise depuis 2004 et selon des estimations préliminaires, la taille du cheptel en 2006 est identique à celle record de 1999. Cette situation tient essentiellement aux bonnes conditions hivernales consécutives, aux investissements pratiqués en réponse aux prix favorables et à la diminution de l’abattage du bétail. Il importe de noter, toutefois, qu’exprimé en bod1/, le nombre d’animaux est inférieur de quelque 30 pour cent à celui de 1999, en raison essentiellement de la part croissante des chèvres dans ce total, ce qui a suscité des inquiétudes par rapport à la pression sur des ressources fourragères (Table12).

Le pays est autosuffisant en viande et dispose d’un excédent exportable. Après le déclin brutal entre 2001 et 2003, la production de la viande a récupéré ces deux dernières années, mais en 2005 elle était encore inférieure de 38 pour cent par rapport au niveau de 2000, et les exportations sont très limitées. Ceci reflète principalement les stratégies de minimisation du risque des éleveurs qui cherchent à reconstituer le cheptel jusqu’à son niveau d’avant 1999, mais également un changement dans la composition des troupeaux (un plus grand nombre de petits animaux).

La Mongolie était autosuffisante en lait pendant la période socialiste. Comme le reste du secteur alimentaire, l'industrie laitière s'est effondrée pendant la transition brusque de la propriété d'état à la propriété privée au début des années 90. Le déclin du cheptel national entre 2000 et 2002 a eu comme conséquence la chute de la production laitière et l'importation de presque tout le lait et les produits laitiers vendus sur les marchés urbains. La production totale du lait a nettement récupéré depuis lors et en 2005 était inférieure seulement de 10 pour cent à son niveau de 2000. Tandis que la majeure partie du lait traité est encore importée en raison des liens limités entre producteurs et consommateurs urbains, le secteur formel de la laiterie se rétablit et la part de la production domestique de lait dans l'industrie laitière a progressé d'environ 3 pour cent en 2003 à environ 7 pour cent en 2005.

Tableau 12. Mongolie: Cheptel, production et commerce
de produits animaux

  1980 1990 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005
Cheptel (en milliers de têtes)         
Chameaux592537356323285253257257264
Chevaux1 9852 2623 1632 6612 1921 9891 9692 0052 029
Bovins2 3972 8493 8253 0982 0701 8841 7931 8411 964
Ovins14 23115 08315 19113 87611 93710 63710 75611 68712 885
Caprins4 5675 12611 03410 2709 5919 13510 65312 23813 267
Total 23 771 25 857 33 569 30 227 26 075 23 898 25 428 28 028 30 399
Total en équivalent bod*
(
en milliers de têtes )
8 208 9 067 11 430 9 837 7 876 7 165 7 270 7 707 8 193
Production animale (en milliers de tonnes, poids à l'abattage)      
Toutes viandes confondues 234 249 289 311 226 204 153 199 193
Viande de boeuf 71661051136761445249
Viande de mouton et de caprins11613212912010595819895
Lait 226316467376290277292329335
Oeufs ( en millions d'unités)21381078471621
Commerce des principaux produits animaux       
Importations de lait en poudre ( tonnes)nd1 0383653461 385835ndndnd
Exportations de viande
( en milliers de tonnes)
nd24151720231588
Exportations d'intestins
( en milliers de rouleaux)
nd2 1641 025870368316223278295
Exportations d'abats comestibles ( tonnes)ndnd3 1518123 4301 6298876404

*Voir la note de base de page 1 dans le texte.

Source: Rapport de la Mission conjointe FAO/UNICEF/PNUD.

La disponibilité des denrées alimentaires sur les marchés est bonne et les prix sont stables (sauf pour la viande)

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Les marchés de la Mongolie jouent un rôle particulièrement important dans l’accès aux aliments puisque la majorité de la population urbaine vit dans des agglomérations (quelque 60 pour cent) et achètent les produits alimentaires. Dans les zones rurales, les éleveurs sont autosuffisants en viande et en produits laitiers, mais ils doivent acquérir tous les autres produits alimentaires, en particulier la farine, composante importante de leur alimentation. La libéralisation des échanges a contribué à améliorer la disponibilité et stabilité des approvisionnements alimentaires. Les marchés dans tout le pays sont bien fournis de produits alimentaires, y compris la farine, le riz, les légumes et les fruits. Les prix des denrées de base, excepté la viande, sont restés stables ou ont baissé en termes réels depuis 2000. Bien que la chute des cours des denrées de base ait en général facilité l'accès à la nourriture, ce sont les prix des produits à base de farine et des légumes, les principales denrées de base des groupes à faible revenu de la population, qui ont le plus baissé. Cette évolution des cours des denrées alimentaires a entraîné une amélioration des termes de l'échange entre la viande/la farine et la viande/les pommes de terre, favorisant l'accès des éleveurs à ces produits.

Les cours de la viande sur les marchés intérieurs sont nettement inférieurs à ceux qui prévalent sur le marché mondial, mettant en évidence le potentiel d'exportation du pays, mais également les difficultés d'importation en période de crise. Les cours de la viande continuent d’augmenter considérablement pendant ces trois dernières années par suite de l’offre réduite de la viande. Comme conséquence de l’hiver long et froid dans le pays, il existe une variation saisonnière très marquée des prix: ceux de la viande et des légumes augmentent pendant le printemps, et ceux du lait augmentent en hiver (Figure 8).

Perspectives de récoltes et situation alimentaire

 

La consommation des denrées alimentaires est satisfaisante au niveau national

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Au niveau national, la situation de la sécurité alimentaire est satisfaisante. La consommation annuelle moyenne par habitant de produits alimentaires de base a augmenté depuis 20002/. Les taux de consommation en ce qui concerne la viande et les produits laitiers, respectivement 100kg/pc/an et 140 kg/pc/an, sont élevés par rapport aux normes régionales, tandis que le taux de consommation de la farine de blé est de 119 kg/pc/an. Les indicateurs nutritionnels font état de tendances positives dans l’ensemble, avec un déclin récent durant ces dernières années des taux de malnutrition chez les enfants, bien que des déficiences en micronutriments continuent.

Les personnes souffrant le plus d’insécurité alimentaire sont les pauvres qui vivent dans les villes

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Ce bilan très positif au niveau national masque la vulnérabilité et l’insécurité alimentaire d’une grande partie de la population. La partie plus frappée sont les ménages pauvres dans les villes: Oulan-Bator et dans les capitales des provinces et districts. Ces populations ne possèdent pas des animaux (ou en ont un nombre très limité) et leurs moyens de subsistance dépendent de leurs revenus en espèces. La principale cause de leur insécurité alimentaire est le pouvoir d’achat insuffisant pour accéderaux vivres. Les ménages pauvres sont ceux qui ont perdu des animaux et ont émigré vers les villes où les taux de chômage et du sous-emploi sont très élevés. Le manque d’éducation et de formation professionnelle des migrants de la campagne implique que ces personnes ne trouvent pas un emploi dans le nouveau milieu. Les ménages pauvres tirent leurs moyens de subsistance d'emplois temporaires et saisonniers et de la fourniture de services, ainsi que de prestations sociales et de dons de familles plus aisées. L’offre d’emploi suit des variations saisonnières; il y a moins de possibilités de travail en hiver alors que le coût de la vie augmente dû aux dépenses de chauffage, qui est autantnécessaire que les aliments pendant cette saison. Les ménages pauvres des villes ne peuvent pas se permettre de consommer de la viande ou du lait et leur nourriture est constituée de farine, pommes de terre et légumes. En plus, la consommation des produits alimentaires est instable parce que les stratégies de survie de ces populations comprennent de sauter les repas ou bien de manger un jour sur deux.

Les éleveurs et les agriculteurs ont en général une situation de sécurité alimentaire satisfaisante mais sont les plus vulnérables

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La situation de la sécurité alimentaire des éleveurs, qui représentent les deux tiers de la population rurale et quelque 28 pour cent de la population totale du pays, semble satisfaisante. En général, cette population consomme de produits alimentaires en quantité suffisante qui comprennent du blé, de la viande et du lait. Néanmoins, les éleveurs montrent des déficiences en micronutriments en raison d’un régime alimentaire peu diversifié. Les agriculteurs se concentrent dans les provinces du centre, où ils cultivent essentiellement du blé et des légumes sur une base commerciale. Leur situation du point de vue de la sécurité alimentaire est également satisfaisante. En même temps, le risque élevé de variations climatiques extrêmes, dzuds et sécheresse principalement, conjugué au manque de diversification des moyens de subsistance, fait cependant des éleveurs et des agriculteurs le groupe de population le plus vulnérable. De grandes portions de population peuvent devenir pauvres et en situation d’insécurité alimentaire d’une saison à l’autre en cas de perte de leurs animaux. C’est le cas en particulier des ménages pauvres (définis souvent comme possédant 25 têtes de bétail ou moins), qui représentent près d’un quart des éleveurs totaux. Les éleveurs pauvres souffrent également d’une insécurité alimentaire temporaire au début du printemps, lorsque les stocks d’hiver de viande et de produits laitiers sont épuisés et les pâturages pas encore régénérés.

Bien que les vulnérabilités et les risques encourus par les populations rurales et urbaines diffèrent, on note une continuité entre la vulnérabilité dans les zones agricoles et l’insécurité alimentaire dans les villes. Les personnes qui souffrent d’insécurité alimentaire dans les zones urbaines sont souvent des éleveurs vulnérables qui ont perdu leurs animaux et émigré vers les villes à la recherche d’un emploi, mais qui restent au chômage.


1.  L’échelle bod a pour but de calculer la taille d’un troupeau en transformant tous les animaux en équivalent chevaux. Un cheval est censé représenter la même chose qu’une tête de bétail (vache ou yak), 0,67 chameau, six moutons ou huit chèvres.

2.  National Statistic Office; “Mongolian Statistical Yearbook”, 2000 à 2005

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