SYSTEME MONDIAL D'INFORMATION ET D'ALERTE RAPIDE SUR L'ALIMENTATION ET L'AGRICULTURE DE LA FAO
PROGRAMME ALIMENTAIRE MONDIAL

RAPPORT  SPÉCIAL

MISSION CONJOINTE FAO/PAM D'ÉVALUATION DES RÉCOLTES ET DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE EN ÉTHIOPIE

(Phase 2)

Intégration de l'évaluation des récoltes et des disponibilités alimentaires et de l'évaluation de la sécurité alimentaire dans des conditions d'urgence

20 mars 2008

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Faits saillants

La Mission FAO/PAM d'évaluation des récoltes et des disponibilités alimentaires (phase 2) s'est efforcée d'intégrer les résultats de deux évaluations qui se sont déroulées presque simultanément en novembre et décembre 2007, à savoir celle de la Mission FAO/PAM d'évaluation des récoltes et des disponibilités alimentaires (phase 1) et celle de la Mission d’évaluation interinstitutions de la sécurité alimentaire dans des conditions d’urgence pour la campagne meher, menée sous l'égide du gouvernement. Cette étude a permis de dégager les faits saillants suivants:

Production alimentaire, marchés et prix

  • La production globale de céréales et de légumineuses de la campagne meher dépasserait d'environ 7 pour cent les estimations formulées l'année précédente après la récolte - marquant la quatrième bonne récolte consécutive. Si l'on se base sur des estimations prudentes pour la production belg de 2008, les disponibilités intérieures totales de céréales et de légumineuses atteindraient en 2008 quelque 22 millions de tonnes. Même si la consommation annuelle estimative par habitant augmente fortement (pour passer à 196 kg en équivalent céréales et légumineuses) et si les échanges informels transfrontaliers s'intensifient, ces résultats dépassent les besoins prévus au total pour la consommation intérieure.

  • L'Éthiopie connaît depuis 2002 une croissance économique sans précédent, et son produit intérieur brut a progressé de 48 pour cent en valeur réelle, suite à d'importantes dépenses et investissements publics, aux investissements privés faisant appel aux ressources financières nationales, à l'accroissement du volume des envois de fonds en provenance de l'étranger et au crédit intérieur. Par conséquent, l'indice général des prix à la consommation est en hausse constante. Les prix des denrées alimentaires ont augmenté plus rapidement que ceux des autres produits au cours des quelques dernières années; d'après les éléments disponibles, cette situation est due à un phénomène inflationniste classique et à l'évolution du comportement des agriculteurs qui produisent des excédents et de celui des consommateurs, plutôt qu'à l'adoption par les négociants de stratégies et de pratiques de maximisation des revenus. Au contraire, la fluidité et l'efficacité accrues des réseaux intérieurs de commercialisation des produits de base ont atténué la hausse des prix des denrées alimentaires. Néanmoins, la flambée exceptionnelle des prix des denrées alimentaires, associée à la forte dépendance des ménages pauvres à l'égard du marché, se traduisent effectivement par de graves difficultés d'accès à la nourriture parmi les pauvres en milieu rural et urbain.

Compte tenu des disponibilités vivrières intérieures totales et sachant que les prix des céréales se situent toujours au-dessous de ceux pratiqués sur la plupart des marchés voisins, il est possible de gérer soigneusement les achats locaux pour répondre en partie ou en totalité aux besoins des populations touchées par l'insécurité alimentaire. De même, l'importation (à plus grand frais) de quantités considérables de vivres permettrait de satisfaire les besoins d'aide alimentaire des populations les plus touchées par l'insécurité alimentaire. Toutefois, ce supplément aux disponibilités intérieures entraînerait une disparité plus marquée entre les prix intérieurs et ceux pratiqués de l'autre côté de la frontière, incitant davantage à exporter des céréales. Dès lors, deux grandes options stratégiques sont envisageables: dépenser les ressources publiques soit au profit des producteurs excédentaires et des consommateurs nécessiteux (par le biais d'achats locaux et d'importations), soit au profit des consommateurs nécessiteux et des exportateurs transfrontaliers informels (en s'appuyant exclusivement sur les importations pour répondre à tous les besoins).

Sécurité alimentaire des ménages et besoins d'urgence

  • Malgré une production en général bonne, la situation de la sécurité alimentaire dans la région des Somalis et en certains autres endroits - en particulier les basses-terres de Borena - est grave et risque de se détériorer dans les prochains mois. D'autres régions ont aussi besoin d'aide en raison d'aléas climatiques localisés (inondations, giboulées ou pluies irrégulières). La situation nutritionnelle est mauvaise et se dégrade en certains endroits dans le région des Somalis, où elle doit faire l'objet d'un suivi attentif. C'est également le cas dans le Borena, l'Afar et d'autres régions où la situation a été qualifiée de grave par les équipes d'évaluation.

  • L'évaluation de la sécurité alimentaire dans des conditions d’urgence pour la campagne meher s'est achevée à la mi-décembre 2007, mais aucun rapport de synthèse n'était disponible lors du séjour de la Mission à Addis-Abeba du 21 janvier au 2 février 2008. Pour certaines régions, la Mission a appuyé ses analyses sur des données de base concernant l'économie des ménages et sur des tableurs analysant l'impact sur les moyens de subsistance au niveau des ménages et des woredas. Pour d'autres, elle a suivi l'approche "traditionnelle". Les données sous-tendant les estimations de la population ayant besoin d'une aide d'urgence dans les différents woredas sont présentées sous diverses formes, ce qui rend encore plus complexe leur synthèse et leur interprétation.

  • Un résumé concernant les populations touchées et les besoins d'aide alimentaire a été publié le 21 février 2008 par la DPPA. Les données qui y figurent ont été incorporées dans les additifs au présent rapport - section 4 et annexe I dans la version anglaise. Toutefois les besoins recensés dans le document de la DPPA portent uniquement sur les woredas où le dispositif de sécurité productif n'est pas opérationnel.

Sur la base des renseignements disponibles, la Mission estime ce qui suit:

  • Dans la région des Somalis: la situation est grave et risque de se détériorer: les niveaux de malnutrition sont déjà en hausse. Compte tenu des renseignements disponibles, la Mission estime que la perturbation des marchés due à l'insécurité et aux opérations anti-insurrectionnelles constitue une grave menace pour la sécurité alimentaire des populations en de nombreux endroits de la région, aggravant les effets des pénuries d'eau, des pertes agricoles et du mauvais état des parcours. Il convient par conséquent de prendre toutes les mesures possibles pour assurer la livraison et la distribution de secours alimentaires à environ 700 000 personnes dont la survie est menacée; selon les estimations de la DPPA, ces populations ont besoin de 38 000 tonnes de céréales et d'environ 9 000 tonnes d'aliments composés, d'huile et de légumes secs. Il faudra prendre des mesures pour surmonter les obstacles qui ont retardé les livraisons et les distributions d’aide alimentaire dans la région au cours des derniers mois. Dans la mesure du possible, il faudra aussi prendre des mesures pour surmonter les obstacles qui entravent les échanges de céréales et de bétail et aggravent l'insécurité alimentaire dans la région. Par ailleurs, des décisions devront être prises s'agissant de la fourniture d'une aide adéquate à environ 840 000 autres personnes dont les moyens de subsistance sont menacés. La sécurité alimentaire et l'état nutritionnel dans l'ensemble de la région devraient être suivis de près au cours des six prochains mois.

  • Dans les woredas non couverts par le Dispositif de sécurité productif: les équipes d'évaluation de la campagne meher ont constaté que 51 woredas avaient besoin de secours d'urgence, en particulier dans la région d'Oromiya mais aussi d'Amhara, de Benshangul et de Gambella. La liste des besoins dressée par la DPPA comprend 38 woredas et 280 000 personnes. Des mesures devraient être prises en vue de mobiliser et de distribuer l'aide requise, estimée par la DPPA à 25 000 tonnes de céréales et 6 000 tonnes d'aliments composés, d'huile et de légumes secs.

  • Dans les woredas couverts par le Dispositif de sécurité productif: les équipes d'évaluation de la campagne meher ont constaté que 101 woredas avaient besoin de secours d'urgence, essentiellement dans les régions d’Afar, d'Amhara et d'Oromiya, ce qui représente au total quelque 830 000 personnes. La situation est extrêmement grave et semble se détériorer rapidement en certains endroits de la région de Borena. Elle est également préoccupante dans la région l'Haraghe oriental. Comme il est prévu apparemment de fournir une aide à toutes les personnes nécessiteuses ayant besoin de secours d'urgence dans les woredas couverts par le Dispositif de sécurité productif, il convient de prendre des mesures conformes aux procédures régissant l'utilisation des ressources de réserve du Dispositif. Les besoins sont estimés à environ 55 000 tonnes de céréales et 12 000 tonnes d'aliments composés, d'huile et de légumes secs. Dans le cas des woredas où les besoins de ressources d’urgence dépassent de 5 pour cent le budget annuel du Dispositif de sécurité productif (notamment les woredas de la région de Borena mais aussi un bon nombre d'autres), Ies institutions responsables doivent prendre des mesures d'urgence, que ce soit au niveau du kebele ou à celui de l'administration régionale, afin de solliciter, de vérifier et d'approuver le prélèvement des ressources nécessaires sur la réserve d'urgence du Dispositif de sécurité productif au profit des woredas concernés. Il convient également de prendre des mesures afin de déterminer les modalités de fourniture des produits non céréaliers (huile, légumes secs et aliments composés) aux personnes en situation d'urgence.

  • Dans toutes les régions: les exercices de vérification et de programmation pour chacun des woredas devraient mettre l'accent sur «les domaines où des contrôles pourraient être utiles» (voir la section 4.1 dans la version anglaise).

  • S'agissant des régions où l'approche basée sur l’économie des ménages a été appliquée, il convient de prendre des décisions sur le type d'aide à fournir aux personnes dont les moyens de subsistance sont menacés.

Recommandations à l'intention des futures Missions d'évaluation des récoltes et de la sécurité alimentaire et des évaluations connexes des campagnes meher

  • Par souci d'harmonisation entre la phase 1 de la Mission d’évaluation des récoltes et de la sécurité alimentaire et les évaluations de la sécurité alimentaire dans des conditions d'urgence pour la campagne meher, les méthodes d'enregistrement et d'analyse des données relatives aux récoltes de la phase 1 de la Mission devraient être remaniées et le calendrier prévu pour l'une et l'autre évaluation devrait être revu de manière à ce que les équipes d'évaluation de la campagne meher disposent des données recueillies au cours de la phase 1 avant de se rendre sur le terrain.

  • Par souci de synchronisation entre la phase 2 de la Mission d’évaluation des récoltes et de la sécurité alimentaire et les évaluations de la sécurité alimentaire dans des conditions d'urgence pour la campagne meher et entre les processus de prise de décision ultérieurs, les membres des futures missions de la phase 2 devraient arriver plus tôt pour participer aux réunions du groupe de travail de l’alerte rapide auquel les équipes d'évaluation des campagnes meher rendent compte de leurs conclusions.

  • Par souci de continuité entre les phases 1 et 2 de la mission d’évaluation des récoltes et de la sécurité alimentaire, il faudrait soit affecter un membre de l'équipe de la phase 1 à la mission de la phase 2, soit prendre des dispositions pour veiller à ce que les membres de la phase 1 puissent être contactés lors de la phase 2.

  • Pour réduire les disparités s'agissant des modèles utilisés pour rendre compte des besoins évalués, il faudrait actualiser les directives concernant les Missions d'évaluation de la sécurité alimentaire dans des conditions d'urgence pour les diverses campagnes, et ce si possible avant la prochaine évaluation prévue dans ce cadre. Il faudrait au moins établir des modèles de rapport révisés à l'usage des équipes qui adoptent l'approche basée sur l’économie des ménages, et d'autres modèles pour l'approche traditionnelle.

  • Les rapports des équipes d'évaluation interinstitutions de la campagne meher devraient être révisés et publiés rapidement. Les décisions du gouvernement quant aux interventions requises devraient être annoncées et expliquées au plus vite, mais pas nécessairement au même moment.

  • La DPPA et le groupe de travail de l’alerte rapide devraient rassembler et passer en revue les recommandations consignées par les équipes d'évaluation dans leurs rapports de décembre 2007 et prendre les mesures appropriées.

On trouvera à l'annexe II dans la version anglaise des observations et des suggestions sur d'autres questions concernant les évaluations de la campagne meher et les interventions, notamment pour ce qui est de la clarification (et la rationalisation si possible) des procédures à mettre en œuvre pour répondre aux besoins d'urgence immédiats par le biais du Dispositif de sécurité productif, l'incorporation de considérations relatives à la situation et aux besoins des pauvres en zone urbaine, à la poursuite des efforts visant à améliorer la qualité et l'objectivité des évaluations de la sécurité alimentaire dans des conditions d’urgence pour la campagne meher, ainsi que la mise au point d'une stratégie intégrée et de directives pour les évaluations de vérification, les évaluations saisonnières, l'alerte rapide, le suivi concernant la sécurité alimentaire et la mobilisation de l’aide.

 

 

Le présent rapport a été établi par Henri Josserand, Getachew Diriba, Prisca Kathuku et Ron Ockwell, avec l'aide d’Elliot Vhurumuku et de Sonali Wickrema, sous la responsabilité des Secrétariats de la FAO et du PAM, à partir d'informations provenant de sources officielles et officieuses. La situation pouvant évoluer rapidement, prière de s'adresser aux soussignés pour un complément.

Henri Josserand
Chef, SMIAR, FAO
Télécopie: 0039-06-5705-4495
Mél: [email protected]
Susana Rico
Directrice régionale pour l’Afrique orientale et australe
Fax: 00256-31242500
Mél: [email protected]

Veuillez noter qu'il est possible d'obtenir le présent Rapport spécial sur le site Internet de la FAO à l'adresse suivante: http://www.fao.org/giews/

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