SYSTEME MONDIAL D'INFORMATION ET D'ALERTE RAPIDE SUR L'ALIMENTATION ET L'AGRICULTURE DE LA FAO
PROGRAMME ALIMENTAIRE MONDIAL

RAPPORT   SPÉCIAL

MARCHÉS, PRIX, SITUATION ALIMENTAIRE ET PERSPECTIVES AU BÉNIN, AU NIGER ET AU NIGÉRIA

Établi sur la base d'une Mission conjointe CILSS/FAO/FEWSNet/SIMA/PAM d'évaluation des marchés au Bénin, au Niger et au Nigéria

9 avril 2008

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RÉSUMÉ

Une Mission conjointe CILSS/FAO/FEWSNet/SIMA/PAM d'évaluation des marchés s'est rendu sur des marchés céréaliers clés du Bénin, du Niger et du Nigéria du 13 février au 9 mars, afin d'estimer les stocks actuels et le niveau des prix ainsi que le flux des échanges au sein des pays et entre eux, et d'analyser les implications pour la sécurité alimentaire des pays les plus vulnérables.

Production vivrière, stocks et prix des produits alimentaires

Dans les trois pays, la production agricole de 2007 a été touchée par l'arrêt précoce des pluies en septembre. Au Nigéria, la situation a été aggravée par un manque d'accès aux engrais. Alors que l'incidence globale de l'irrégularité des précipitations a été limitée au Bénin et au Niger, l'évaluation menée sur le terrain par plusieurs organismes publics nigérians a mis en évidence un recul de 20 pour cent de la production de sorgho. Les pertes prévues concernent aussi le maïs (10 pour cent), le riz (10 pour cent), le niébé (10 pour cent) et les arachides (10 pour cent). Les cultures pratiquées à l'échelle nationale, qui sont concentrées au centre et au sud du pays et sont moins tributaires des engrais, telles que le manioc, le taro, les ignames et le soja, n'ont pas été touchées de manière significative.

Suite à la production céréalière réduite de 2007/08 au Nigéria et en d'autres endroits de la sous-région, les stocks des négociants sont bas dans les trois pays et les prix des céréales se sont envolés. Sur le marché céréalier international de Dawanau (Nigéria), qui est le plus important du pays, le prix du sorgho - céréale la plus commercialisée au Nigéria - a fait un bond, passant de 2 750 NGN le sac de 100 kg en septembre 2007 à 5 300 NGN le sac de 100 kg en février 2008, soit une augmentation de 92 pour cent en 5 mois. Sur la même période, les prix du mil ont gagné 116 pour cent, tandis que pour le maïs, les prix constatés en février 2008 étaient en hausse de 96 pour cent par rapport à août 2007. Une tendance similaire a été constatée sur tous les marchés examinés au Bénin, au Niger et au Nigéria. Dans le cas du maïs, par exemple, les hausses de prix en 2008 par rapport à 2007 vont de 3 pour cent à Malanville, dans le nord du Bénin, à 165 pour cent à Minna, dans le centre-nord du Nigéria.

Alors qu'au Bénin et au Niger, la demande de céréales est dictée pour l'essentiel par la demande et la consommation effectives des ménages, au Nigéria elle est due à la vitalité du secteur de la volaille, des industries de transformation des aliments et des brasseries. Dans le sud et le centre-nord du Nigéria, la demande de maïs et de sorgho émanant des entreprises de transformation, des fabricants d'aliments pour volaille et des brasseries serait restée élevée, selon les rapports, d'octobre à décembre. La demande de maïs par les producteurs d'aliments pour animaux a été particulièrement forte, ce qui semble indiquer une reprise du secteur de la volaille.

Rôle du marché international des produits de base

Selon les prévisions, les importations céréalières du Nigéria devraient encore s'élever à plus de 4,5 millions de tonnes en 2008 (blé et riz essentiellement), mais ce volume ne représente que 15 pour cent de l'utilisation totale de céréales du pays. La dépendance à l'égard des importations de céréales est encore plus faible dans le cas du Bénin et Niger, à savoir environ 5 pour cent. Par ailleurs, tant le franc CFA1 (Bénin et Niger) que le naira (Nigéria) ont fortement gagné en valeur au cours des dernières années, et le pétrole de production nationale est subventionné au Nigéria, ce qui atténue les répercussions de la hausse des cours internationaux sur les économies intérieures. L'impact de la hausse des cours du blé, du maïs et du riz sur les marchés intérieurs de ces pays est donc limité, même si certains phénomènes de substitution ont pu se constater. Les prix intérieurs des céréales sont déterminés pour l'essentiel par la situation de l'offre et de la demande au niveau régional , qui elle-même dépend des facteurs suivants:

Commerce transfrontalier et perspectives

Les marchés alimentaires sont fortement intégrés en Afrique de l'Ouest, les prix pratiqués dans plusieurs pays étant déterminés dans une grande mesure par l'évolution de certains marchés régionaux clés. Dans la partie orientale de la sous-région, il existe un fort degré d'intégration entre le Niger, le Bénin et le Nigéria. Les années normales, le Nigéria et le Bénin exportent des céréales à destination des zones déficitaires du Niger voisin. Les années où la production est insuffisante, toutefois, le Bénin et le Nigéria utilisent une part plus importante de leur production intérieure et importent quelquefois des céréales du Niger, ce qui accentue le déficit de ce pays. La parité des prix des produits importés à partir des marchés régionaux est donc un facteur déterminant pour les approvisionnements vivriers de tous les pays.

En dépit du relèvement significatif des prix dans toute la sous-région, il y a eu des variations suivant les marchés et les pays, d'où un bouleversement de la structure des échanges. Alors que les prix du mil ont augmenté sur les marchés frontaliers de Matameye et de Maradi (au Niger), respectivement de 23 pour cent et de 32 pour cent, en février/mars 2008 par rapport à la même période en 2007, il a progressé de 78 pour cent sur le marché régional de Dawanau dans le nord du Nigéria, ce qui entraîne un prix de parité défavorable à l'importation au Niger; En outre, la hausse significative des prix dans le centre et le sud du Nigéria fait que les échanges vers le sud au sein du pays deviennent plus attrayants, ce qui limite les flux commerciaux entre le Niger et le Nigéria. Les importations de céréales se poursuivent du nord du Bénin au sud-ouest du Niger, car les prix dans la première région sont plus bas. Par conséquent, les zones centrales et orientales du Niger, qui dépendent plus des importations en provenance du Nigéria, sont les plus durement touchées par les déficits céréaliers et la hausse des prix. En ce qui concerne le Niger, les prix les plus bas sont relevés actuellement dans la région de Gaya (à l'ouest), tandis que les régions de Zinder et de Diffa à l'est enregistrent les prix les plus élevés.

Implications pour la sécurité ALIMENTAIRE ET RECOMMANDATIONS

Dans le nord du Nigéria, quelques ménages d'agriculteurs qui produisent d'ordinaire suffisamment de nourriture pourraient connaître des pénuries avant la prochaine récolte, en raison de l'insuffisance des précipitations. Du fait de la hausse des prix provoquée par la diminution des disponibilités, les populations vulnérables, en particulier dans l'extrême-nord du pays, devraient avoir du mal à accéder à la nourriture.

Au Niger, les prix du bétail sont demeurés à un niveau relativement élevé, mais le centre et l'est du pays pourraient connaître une grave insécurité alimentaire si la tendance à la hausse des prix des produits alimentaires persiste. À partir d'avril, les régions orientales seront les plus touchées, à moins que des mesures spécifiques ne soient prises en temps voulu. Compte tenu des disponibilités vivrières actuelles et des perspectives moroses concernant les importations en provenance du Nigéria, la Mission estime que la situation est non seulement grave mais qu'elle risque d'empirer dans ces régions du Niger. Par conséquent:

1. INTRODUCTION

L'intégration des marchés est très forte en Afrique de l'Ouest et les fluctuations de prix dues aux chocs de l'offre et de la demande se répercutent souvent dans les pays voisins. Plus précisément, toute réduction de la production céréalière du Nigéria, dont l'économie et le secteur agricole sont de loin les plus importants de la région, entraîne en général une envolée des cours céréaliers régionaux, ce qui a des incidences néfastes sur la sécurité alimentaire des pays voisins.

En 2007, la production céréalière a fortement diminué dans le nord du Nigéria sous l'effet de plusieurs facteurs, parmi lesquels les précipitations tardives et mal réparties ainsi que l'insuffisance des disponibilités d'engrais et la cherté de ceux-ci. Le Ghana a aussi accusé d'importantes pertes de cultures en raison de la vague de sécheresse prolongée qui a sévi pendant la campagne agricole 2007. Dans la région du Sahel, la production céréalière a été estimée supérieure à la moyenne dans la plupart des pays, mais des pertes de récolte localisées dues aux inondations ou à l'irrégularité des pluies ont affecté les moyens d'existence des agriculteurs en plusieurs endroits.

Les effets de ces chocs dus aux aléas météorologiques sur les marchés ont été aggravés en 2007/08 par la hausse des cours des produits constatée actuellement sur le marché international, qui a resserré le marché alimentaire de la sous-région. À l'époque même de la récolte, en septembre 2007, le prix des céréales était déjà en forte hausse dans toute la sous-région, ce qui suscitait des préoccupations quant aux perspectives de la sécurité alimentaire. Par conséquent, une Mission conjointe CILSS/FAO/FewsNet/SIMA/PAM d'évaluation des marchés s'est rendue sur les principaux marchés céréaliers de quelques pays d'Afrique de l'Ouest du 14 février au 9 mars pour établir une estimation des stocks et des prix, ainsi que des échanges entre les pays et dans les pays, et analyser ainsi les implications pour la sécurité alimentaire dans les pays les plus vulnérables.

La Mission s'est répartie en trois équipes. La première équipe a couvert le nord du Bénin et le Niger, ainsi que les marchés transfrontaliers du Nigéria. La deuxième s'est attachée principalement à la région productrice de maïs, de mil et de sorgho composée des États du centre-nord, Kaduna et Kano, ainsi que de certains marchés dans le sud, où la demande de céréales et de niébé est forte. La troisième équipe a évalué la situation des marchés au Mali et au Burkina Faso.

Dans chaque pays, la Mission s'est rendue sur les principaux marchés céréaliers et s'est entretenue avec des parties prenantes clés - négociants, producteurs et consommateurs - pour recueillir des données et des renseignements pertinents sur le niveau des prix, la situation des stocks, l'offre et la demande et les flux commerciaux. La Mission a aussi rencontré plusieurs hauts fonctionnaires et des représentants locaux des Ministères de l'agriculture, de l'élevage et de la sécurité alimentaire. Le présent rapport expose brièvement les conclusions des équipes d'évaluation qui se sont rendues dans le nord du Bénin, au Niger et au Nigéria, en mettant l'accent sur les perspectives concernant le commerce transfrontalier au Niger, pays le plus vulnérable.

2. PRODUCTION VIVRIÈRE DE 2007

En 2007, la production agricole a souffert dans les trois pays de l'arrêt précoce des précipitations en septembre, situation aggravée au Nigéria par le manque d'accès aux engrais.

- Au Bénin, en dépit de l'impact des pluies irrégulières sur les rendements en certains endroits, la production céréalière totale de 2007 a été estimée à 1,2 million de tonnes, volume record en hausse de quelque 14 pour cent par rapport à la moyenne.

- Au Niger, l'arrêt précoce des pluies en septembre 2007 a eu une incidence négative sur les céréales en plusieurs endroits, mais son impact global a été limité. Suite à la publication des chiffres définitifs concernant la production céréalière de 2007, les estimations se situent à quelque 3,778 millions de tonnes au total, ce qui est moins que pour la récolte exceptionnelle de 2006 mais quelque 7 pour cent de plus que la moyenne des cinq années précédentes.

- Au Nigéria, la production a été touchée en 2007 par trois principaux facteurs:

Tout d'abord, plusieurs États du nord du pays ont enregistré un régime pluviométrique défavorable, caractérisé par des vagues de sécheresse prolongée et un brusque arrêt des pluies (en particulier à l'extrême-nord) au cours de la première semaine de septembre, alors que la plupart des cultures, maïs et sorgho en particulier, devaient encore mûrir en vue de la récolte. Les pluies torrentielles et les inondations qui ont touché les terres agricoles, en particulier dans la zone du centre-nord, ont aussi entraîné des pertes de cultures localisées. La production de céréales et de légumineuses à grain (sorgho, mil, maïs, riz, arachides et niébé), dont la culture se pratique essentiellement dans ces régions du pays, a été la plus touchée.

En second lieu, la productivité des cultures céréalières continuent de pâtir, au Nigéria, de l'insuffisance des disponibilités d'engrais et de semences améliorées, ainsi que de la fourniture et de la distribution tardives des intrants agricoles. La distribution d'engrais subventionnés par l'administration fédérale ou celle des États couvre moins de 30 pour cent des besoins. Il en résulte habituellement une perturbation du marché, des pénuries et une augmentation des prix. Le problème a été aggravé l'an dernier par la hausse des cours mondiaux de cet intrant. Les prix de l'urée et des engrais ternaires ont grimpé jusqu'à respectivement 3 500 NGN et 3 000 NGN le sac de 50 kg en 2007, et en février 2008, le prix moyen de ces engrais est passé à 5 000 NGN le sac de 50 kg. Par conséquent, en ce qui concerne les cultures très sensibles aux engrais, telles que le maïs, le riz et le sorgho, la production a été négativement touchée.

Enfin, l'effet dévastateur de la grippe aviaire sur le secteur de la volaille en 2006 a entraîné une chute radicale de la demande de produits avicoles, laquelle s'est traduite à son tour par un recul de la demande de maïs, qui représente habituellement quelque 80 pour cent des aliments pour animaux. Étant donné que par ailleurs la production céréalière a été bonne dans les pays du Sahel voisins, les prix de cette céréale sont restés à un bas niveau tout au long de septembre 2007. Bien que cela n'ait pas entraîné une diminution des superficies consacrées au maïs, l'utilisation d'intrants pourrait avoir été affectée.

Du fait de ces évolutions négatives, la production alimentaire du Nigéria a fortement reculé en 2007. L'étude sur le terrain menée en 2007 conjointement par le National Agricultural Extension and Research Liaison Service (NAERLS), la National Food Reserve Agency (NFRA) et Ministère fédéral de l'agriculture et les rapports de terrain reçus par la suite par le NAERLS en décembre 2007 faisaient état d'un recul de 20 pour cent de la production de sorgho. Des pertes sont aussi prévues dans le cas du maïs (10 pour cent), du riz (10 pour cent), du niébé (10 pour cent) et des arachides (10 pour cent). Les cultures pratiquées à l'échelle nationale, qui sont concentrées au centre et au sud du pays et sont moins tributaires des engrais, telles que le manioc, le taro, les ignames et le soja, n'ont pas été touchées de manière significative.

3. NIVEAUX DES STOCKS ET SITUATION DES DISPONIBILITÉS VIVRIÈRES

En raison de la production céréalière réduite au Nigéria et en d'autres endroits de la sous-région, les stocks des négociants sont bas dans les trois pays.

- Maïs: la production de maïs a été adéquate au Bénin, mais les quantités produites dans le pays ne suffisent pas à compenser le fort déficit enregistré au Nigéria. Par conséquent, les réserves sont au plus bas au Niger et au Nigéria. Dans ce dernier pays, les stocks de maïs sont particulièrement réduits, se situant selon les estimations à environ 50 pour cent de la moyenne à Pushit (Jos), à Lafia (Nassarawa) et à Mile 12 (Lagos). Les stocks sont relativement bas à Mina et à Guiya. Les réserves disponibles ne suffiront pas à répondre à la forte demande des brasseries, des usines de transformation, des producteurs d'aliments pour animaux et des ménages.

- Mil: la production de mil a été satisfaisante tant au Niger qu'au Nigéria2, car elle résiste davantage la sécheresse et parvient à maturation rapidement. Toutefois, au Niger, la Mission a constaté que les stocks étaient au plus bas sur les marchés de Maradi, Zinder, Gaya et d'autres grandes zones productrices. Des réserves considérables ont été constatées uniquement sur certains marchés ruraux à Dakoro et à Tanout, sans qu'elles suffisent à compenser le déficit enregistré à l'échelon national. Au Nigéria, les stocks de mil sur les marchés étaient aussi plus réduits que d'ordinaire à Gombe, Borno et Nassarawa, où ils étaient toutefois adéquats. Les stocks étaient très bas sur les marchés frontaliers de Mai Gatari, Ilela, Mai Adua et Jibia.

- Sorgho: la production de sorgho a souffert dans les trois pays, en dépit d'une bonne récolte rentrée en certains endroits, notamment dans le nord du Bénin et dans l'État de Borno au Nigéria, en particulier dans le bassin du lac Tchad. Par conséquent, le niveau des stocks était très bas sur la plupart des marchés inspectés au Niger. En dépit de la préférence de la population pour le mil, l'important déficit de sorgho pourrait avoir une incidence négative sur l'apport calorique de certaines catégories de consommateurs.

Au Nigéria, le stock de sorgho était là aussi limité, mais pas aussi bas que celui de maïs. Des stocks suffisants ont été constatés à Gombe et sur le marché international de Dawanau dans le Kano. Bien que les réserves de sorgho et de mil sont relativement plus élevées que celles de maïs au Nigéria, le délaissement de cette dernière céréale par les consommateurs et les transformateurs au profit du sorgho et du mil devrait accélérer l'épuisement des stocks existants et entraîner un relèvement des prix de ces produits. Les stocks de sorgho du Bénin étaient adéquats, tout en se situant au-dessous du niveau de la dernière campagne.

- Niébé: Les stocks de niébé sont abondants dans les trois pays, ce qui tient pour l'essentiel aux immenses réserves constituées lors de la récolte de l'année précédente. Au Nigéria, des stocks très importants ont été relevés dans les États de Kano, Gombe et Borno.

Outre les réserves des négociants constatées sur les marchés, des stocks de céréales considérables seraient disponibles ailleurs, comme suit:

4. DEMANDE ET PRIX

Alors qu'au Bénin et au Niger, la demande de céréales est dictée pour l'essentiel par la demande et la consommation effectives des ménages, au Nigéria elle est due à la vitalité du secteur de la volaille, des industries de transformation des aliments et des brasseries. Par conséquent, le secteur céréalier devient de plus en plus commercial dans ce dernier pays, d'où la création de gros marchés en divers endroits qui facilitent les liens entre les millions de petits exploitants éparpillés et éloignés qui produisent les céréales et les acheteurs au Nigéria et en dehors. La figure 1 montre les prix mensuels moyens des céréales entre 2003 et 2008 sur le marché international de Dawanau dans le Kano, qui est le plus important du pays. Les prix des céréales secondaires et du niébé ont considérablement augmenté depuis l'époque de la récolte en octobre 2007. Le prix du sorgho, qui est la céréale la plus vendue au Nigéria, est passé de 2 750 NGN le sac de 100 kg en septembre 2007 à 5 300 NGN le sac de 100 kg en février 2008, soit un bond de 92 pour cent en cinq mois. Sur la même période, le prix du mil a augmenté de 116 pour cent, tandis qui, en février 2008, celui du maïs avait dépassé de 96 pour cent son niveau d'août 2007.

Même en termes réels, les variations de prix sont notables. Entre août 2007 et janvier 2008, les prix réels du maïs et du sorgho ont fait un bond de plus de 80 pour cent et 54 pour cent respectivement. Par conséquent, l'inflation moyenne au Nigéria, qui était tombée selon les estimations à 5,4 pour cent en 2007 en raison de la baisse des prix des denrées alimentaires et d'une meilleure politique monétaire, a recommencé à monter. Le taux d'inflation d'une année sur l'autre a été estimé à 8,6 pour cent en janvier 2008, ce qui est dû principalement à la hausse des prix dans le secteur alimentaire, dans lequel le taux d'inflation d'une année sur l'autre est passé de -0,10 pour cent en janvier 2007 à 12,60 pour cent en janvier 2008. Les prix des produits alimentaires sont l’un des principaux facteurs responsables du taux d'inflation et pèsent considérablement sur l'indice des prix à la consommation dans toute la sous-région.

Une tendance analogue a été constatée sur tous les marchés inspectés au Bénin, au Niger et au Nigéria. En ce qui concerne le maïs, la hausse des prix en 2008 par rapport à 2007 va de 3 pour cent à Malanville, dans le nord du Bénin à 165 pour cent à Minna, dans le centre-nord du Nigéria (voir figure 2). D'autres tendances intéressantes se dégagent de la figure 2. Les marchés situés dans le nord du Bénin (Malanville, Nikki) ont enregistré les hausses de prix les moins importantes, tandis que celles-ci ont été très marquées dans le sud et le centre-nord du Nigéria (Minna, Abuja, Kaduna, etc). Le prix du maïs a lui aussi grimpé sur les grands marchés de Maradi et Zinder au Niger, mais dans une moindre proportion qu'au sud et au centre-nord du Nigéria, où une très forte demande de maïs et de sorgho émanant des usines de transformation, des fabricants d'aliments pour volaille et des brasseries a été signalée d'octobre à décembre. La demande de maïs parmi les producteurs d'aliments pour animaux a été particulièrement forte, laissant entrevoir une nette reprise de l'industrie de la volaille. De janvier à février 2008, tant les ventes que la demande de maïs, de sorgho, de mil et de niébé ont diminué par rapport aux mois précédents, les réserves étant limitées et les prix élevés.

L'écart de prix relevé entre le Niger, le nord du Nigéria et le sud du Nigéria, associé au relèvement de la demande effective dans ces dernières régions, indique que le commerce de céréales du centre-nord et de l'extrême-nord vers le sud est plus important que vers le Niger. Cette situation explique en partie les prix plus élevés enregistrés dans le centre et l'est du Niger, qui commercent habituellement avec le nord du Nigéria. Les prix les plus bas sont enregistrés dans l'ouest, qui a des liens commerciaux avec le Bénin.

5. QUELLES SONT LES PRINCIPALES CAUSES DU NIVEAU ÉLEVÉ DES PRIX DANS LA SOUS-RÉGION ET QUEL EST LE RÔLE DU MARCHÉ INTERNATIONAL DES PRODUITS DE BASE

Au Nigéria, les importations céréalières ont tendu à la hausse ces dernières années, du fait principalement de la croissance rapide de la population urbaine, de l'évolution des habitudes de consommation, de l'utilisation fourragère accrue pour le secteur de la volaille en plein essor et de l'expansion soutenue des capacités de transformation du pays. En dépit du resserrement des contrôles sur les entrées illégales de riz et de blé, des effets négatifs de l'épidémie de peste aviaire sur le secteur de la volaille et de la vigueur des cours céréaliers sur le marché international, les importations de céréales devraient se maintenir au-dessus de 4,5 millions de tonnes en 2008, principalement de blé et de riz. Ce volume ne représente néanmoins que 15 pour cent de l'utilisation céréalière totale du pays. La dépendance à l'égard des importations de céréales est encore plus faible dans le cas du Bénin et du Niger, à savoir environ 5 pour cent. Par ailleurs, tant le franc CFA3 (Bénin et Niger) que le naira (Nigéria) ont fortement gagné en valeur au cours des dernières années, et le pétrole de production nationale est subventionné au Nigéria, ce qui atténue les répercussions de la hausse des cours internationaux sur les économies intérieures. L'impact de la hausse des cours du blé, du maïs et du riz sur les marchés intérieurs de ces pays est donc limité, même si certains phénomènes de substitution ont pu se constater. Les prix intérieurs des céréales sont déterminés pour l'essentiel par la situation de l'offre et de la demande au niveau régional, qui elles-mêmes dépendent des facteurs suivants:

6. COMMERCE TRANSFRONTALIER ET PERSPECTIVES

Les marchés alimentaires sont fortement intégrés en Afrique de l'Ouest, les prix pratiqués dans plusieurs pays étant déterminés dans une grande mesure par l'évolution de certains marchés régionaux clés. Dans la partie orientale de la sous-région, il existe un fort degré d'intégration entre le Niger, le Bénin et le Nigéria. Les années normales, le Nigéria et le Bénin exportent des céréales à destination des zones déficitaires du Niger voisin. Le marché de Malanville au Bénin et ceux de Jibia, Illela et Mai Adua au Nigéria ont une influence significative sur plus de 75 pour cent des marchés nigériens, selon une étude récente (Aker, 20074). Les années où la production est insuffisante, toutefois, le Bénin et le Nigéria utilisent une part plus importante de leur production intérieure et importent quelquefois des céréales du Niger, ce qui accentue le déficit de ce pays. La parité des prix des produits importés à partir des marchés régionaux est donc un facteur déterminant pour les approvisionnements vivriers des différents pays. En 2007 et au début 2008, les variations de prix sur les marchés au Bénin, au Niger et au Nigéria étaient les suivantes:

Pour tenter de maîtriser la hausse persistante des prix des produits alimentaires et en atténuer l'impact sur les consommateurs, le Gouvernement fédéral du Nigéria a décidé de mettre sur le marché des céréales puisées dans la réserve céréalière stratégique. Environ 80 000 tonnes devraient être vendues par le gouvernement fédéral au cours des trois prochains mois (avril-juin). Cette opération devrait viser les États du nord et les populations les plus durement touchées par les pertes de cultures, ainsi que les éleveurs de volaille et les meuniers d'aliments pour animaux. Plusieurs gouvernements des États devraient prendre des mesures analogues. La situation du commerce transfrontalier au cours des prochains mois dépendra de l'évolution des prix après la mise en vente des céréales prélevées sur la réserve stratégique. Si, comme prévu, les prix des céréales venaient à fléchir au Nigéria, les exportations vers le Niger reprendraient.

7. IMPLICATIONS POUR LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE ET RECOMMANDATIONS

Dans le nord du Nigéria, quelques ménages d'agriculteurs qui produisent d'ordinaire suffisamment de nourriture pourraient connaître des pénuries avant la prochaine récolte, en raison de l'insuffisance des précipitations. Du fait de la hausse des prix provoquée par la diminution des disponibilités, les populations vulnérables, en particulier dans l'extrême-nord du pays, devraient avoir du mal à accéder à la nourriture. Toutefois, la production de racines et de tubercules n'a guère été touchée, ce qui permet de recourir à quelques substitutions. En outre, si les mesures du gouvernement pour stabiliser les prix visent les États du nord et les populations vulnérables, et si les prix reculent comme prévu, l'impact des pénuries vivrières sur la sécurité alimentaire devrait être limité.

Au Niger, les prix du bétail sont demeurés à un niveau relativement élevé, mais le centre et l'est du pays pourraient connaître une grave insécurité alimentaire si la tendance à la hausse des prix des produits alimentaires persiste. À partir d'avril, les régions orientales seront les plus touchées, à moins que des mesures spécifiques ne soient prises en temps voulu. Compte tenu des disponibilités vivrières actuelles et des perspectives moroses concernant les importations en provenance du Nigéria, la Mission estime que la situation est non seulement grave mais qu'elle risque d'empirer dans ces régions du Niger. Par conséquent:

Le présent rapport a été établi par Jean Senahoun sous la responsabilité du Secrétariat de la FAO, sur la base de renseignements de sources officielles et officieuses tirés d'une évaluation conjointe des marchés CILSS/FAO/FEWSNet/SIMA/PAM, avec la participation des personnes ci-après: Maty Ba Diao (CILSS), Jean Senahoun (FAO), Ibrahim Laouali (FEWSNet Niger), Tahirou Yahaye (FEWSNet Nigéria), Lawan Tahirou (PAM Niger), Laouali Sani Addoh (SIMA Niger), Goye (NAMIS Nigéria) et Alphonsus Onwuemeka (FAO Nigéria). La situation pouvant évoluer rapidement, prière de s'adresser au soussigné pour un complément d'information, le cas échéant:

Henri Josserand
Chief,SMIAR, FAO
Télécopie: 0039-06-5705-4495
Courriel: [email protected]

Veuillez noter qu'il est possible d'obtenir le présent Rapport spécial sur le site Internet de la FAO à l'adresse suivante: http://www.fao.org/giews/

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1. La valeur du franc CFA est alignée sur celle de l'euro (655,955 franc CFA = 1 euro) et celui-ci a considérablement gagné du terrain par rapport au dollar ces dernières années.

2. La production de mil du Bénin est limitée: elle est estimée à environ 45 000 tonnes par an.

3. La valeur du franc CFA est alignée sur celle de l'euro (655,955 CFA = 1 euro), lequel a considérablement gagné du terrain par rapport au dollar ces dernières années.

4. Aker, Jenny. 2007. Monitoring regional markets for early warning of food crises in western Africa (Suivi des marchés régionaux pour prévenir les crises alimentaires en Afrique de l'Ouest). Document présenté lors d'un atelier organisé par la FAO à Rome, en décembre 2007.