CCP: CI 03/3


COMITÉ DES PRODUITS

GROUPE INTERGOUVERNEMENTAL SUR LES AGRUMES

Treizième session

La Havane (Cuba), 20-23 mai 2003

PROBLÈMES PHYTOSANITAIRES DU SECTEUR DES AGRUMES ET POLITIQUES DE LUTTE



Table des matières


I. INTRODUCTION

1. L’Accord sur l’Agriculture conclu dans le cadre des négociations du Cycle d’Uruguay a abouti à l’établissement d’un système de réglementations concernant l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires 1.

2. Des procédures phytosanitaires ont été définies par la Convention internationale pour la protection des végétaux (CIPV) pour réduire le risque phytosanitaire associé aux mouvements de marchandises: agrumes et autres produits. En gros, on recourt habituellement à trois types de mesures pour s’attaquer aux problèmes sanitaires et phytosanitaires:

    1. Les zones exemptes de maladies et les régions à risque faible. La CIPV a publié des directives qui ont pour but d’aider les pays à déclarer comme telles les zones exemptes de maladies ou d’organismes nuisibles. Le pays exportateur doit posséder une solide infrastructure car le processus de vérification est long et coûteux, tandis que le pays importateur doit être assuré que les régions déclarées exemptes le demeureront.

Le renforcement de la vigilance aux ports d’entrée. Pour pouvoir intercepter des produits infestés (maladie ou organismes nuisibles) aux ports d’entrée, le pays importateur doit disposer de ressources suffisantes. En cas de détection d’une maladie ou d’un organisme nuisible, le produit doit être traité dans la mesure du possible en fonction de la gravité du problème, ou réexporté vers un autre pays dont les exigences sont moins contraignantes, ou détruit. Le surcoût de ces mesures est supporté par le pays exportateur.
L’utilisation de programmes de pré-agrément qui permettent d’inspecter et de traiter le produit dans le pays exportateur, avant son exportation.

3. L’objectif d’un pays importateur est de disposer de mesures phytosanitaires suffisantes et efficaces pour empêcher l’entrée et l’établissement d’agents pathogènes ou d’organismes nuisibles de quarantaine. Dans le projet du 27 juillet 2000, la CIPV propose et définit une stratégie d’intégration de différentes mesures de gestion du risque phytosanitaire qui comprend au moins deux procédures indépendantes de réduction de ce risque pouvant être chacune associée à d’autres mesures. Par effet cumulatif, l’association de ces mesures permet d’assurer le niveau de protection adéquat défini par le pays importateur. Deux de ces mesures au moins doivent avoir un effet indépendant sur la réduction du risque d’introduction d’un organisme nuisible. Cette stratégie d’intégration ressemble à une méthode de gestion phytosanitaire intégrée visant à réduire la menace posée par les maladies ou les organismes de quarantaine. Les stratégies de lutte peuvent commencer par l’application de procédures avant la plantation et l’utilisation de programmes de certification, et comprendre la prospection pour détecter les organismes nuisibles, l’application de traitements tout au long de l’année, ainsi que des procédures appliquées à différentes étapes: traitement pendant et après la récolte, stockage, expédition et distribution.

II. FACTEURS À PRENDRE EN COMPTE POUR CLASSER LES AGENTS PATHOGÈNES OU ORGANISMES NUISIBLES EXOTIQUES PAR ORDRE DE PRIORITÉ

4. En pratique, il est difficile pour un pays qui possède un secteur des agrumes d’identifier et de classer les agents pathogènes ou les organismes nuisibles qui représentent une grave menace pour ce secteur. Il faut prendre en compte plusieurs facteurs avant d’établir ce classement: l’introduction, l’établissement, les conséquences économiques potentielles, la dissémination, la facilité de détection et la lutte.

Introduction

Existence d’agents pathogènes ou d’organismes nuisibles dans le pays exportateur.

 

Existence d’agents pathogènes ou d’organismes nuisibles dans la région d’origine du produit.

 

Nature de l’inoculum (spores, tissu végétal, etc.).

 

Méthode d’entrée dans le pays importateur (vent, trafic touristique, commerce des agrumes).

 

Probabilité de détecter l’agent pathogène ou l’organisme nuisible au point d’entrée.

 

Disponibilité de méthodes de diagnostic au point d’entrée.

   

Établissement

Analogies climatiques entre les pays exportateur et importateur.

 

Pénétration du produit dans les zones rurales (par rapport aux zones urbaines).

 

Disponibilité d’autres formes de plantes hôtes dans le pays importateur.

 

Survivance d’inoculum dans les produits importés (jours, mois, années).

 

Décalage chronologique entre l’infection pathogène et l’identification des maladies.

   

Dissémination

Méthode de transmission (vecteur, vent, etc.).

 

Existence de vecteurs dans le pays importateur.

 

Plantes hôtes de prédilection du vecteur et présence de vecteurs préférentiels dans le pays importateur.

 

Efficacité de la transmission de l’agent pathogène par le vecteur.

 

Persistance de l’agent pathogène dans le vecteur.

 

Possibilité d’une transmission de l’agent pathogène par voie transovarienne à la descendance de l’insecte vecteur.

 

Existence d’ennemis naturels ou d’agents pathogènes du vecteur dans le pays importateur.

 

Probabilité que l’agent pathogène se propage par les détritus, le matériel ou sur le fruit.

 

Probabilité de dissémination des spores par le vent.

 

Conditions de germination des spores.

 

Probabilité que l’agent pathogène se propage par le déplacement de matériel végétal de pépinière.

 

Existence de programmes de certification de conformité sanitaire des greffons.

 

Variétés d’agrumes attaquées par l’agent pathogène (orange, pomelo, mandarine, lime)

Détection

Disponibilité de méthodes de détection fiables, appropriées et précises des agents pathogènes ou des organismes nuisibles.

 

Possibilité d’utiliser des méthodes de détection aux ports d’entrée.

 

Validité des méthodes de détection utilisables à grande échelle.

 

Coût du diagnostic.

 

Disponibilité d’informations précises sur le cycle de vie de l’agent pathogène ou de l’organisme nuisible permettant des essais efficaces.

 

Si l’organisme nuisible est un insecte, existe-t-il des méthodes précises permettant de détecter sa présence ou sa population?

   

Lutte

Mesures de lutte mises en œuvre dans le pays exportateur.

 

Possibilité d’appliquer les mesures de lutte des pays exportateurs dans les pays importateurs et coût de ces mesures.

 

Existence de mesures de lutte contre l’agent pathogène ou l’organisme nuisible dans le pays importateur.

 

Possibilité de lutter contre l’agent pathogène ou l’organisme nuisible par l’application de produits phytosanitaires ou l’utilisation de programmes de certification de greffons.

 

Disponibilité de variétés d’agrumes tolérantes ou résistantes dans le pays d’importation.

 

Disponibilité de programmes de sélection de variétés tolérantes ou résistantes dans le pays d’importation.

 

Probabilité d’améliorer la résistance génétique à l’agent pathogène et délais pour y parvenir.

III. EXEMPLES DE NOUVELLES MALADIES DES AGRUMES QUI ENTRAVENT LE COMMERCE ET LIMITENT LA PRODUCTION

A. HUANGLONGBIN (HLB)

5. Les synonymes de la maladie du “dragon jaune” ou Huanglongbin (HLB) sont les suivants: verdissement des agrumes, tige jaune, likubin, marbrure des feuilles et dégénérescence des tubes criblés du phloème. Cette maladie est due à une bactérie située exclusivement dans les tubes criblés du phloème des plantes atteintes, Candidatus Liberobacter. Il existe deux formes de HLB qui s’attaquent à une gamme de plantes identique mais se distinguent par la température à laquelle leurs symptômes sont les plus virulents. Les symptômes de la forme africaine, Candidatus L. africanus se manifestent à des températures basses, ceux de la forme asiatique, Candidatus L. asiaticus apparaissent à des températures élevées. En général, les symptômes des formes asiatiques sont plus virulents que ceux des formes africaines. La bactérie du HLB infecte presque tous les hybrides, cultivars et espèces d’agrumes ainsi que certaines espèces proches des agrumes. Si l’orange douce, la mandarine et les hybrides de la mandarine sont les plus sensibles à la maladie, le citron, le pomelo et le pamplemousse présentent une sensibilité moindre. La lime du Mexique, l’orange trifoliée, le citrange et le citrumelo, plus tolérants, présentent souvent des symptômes foliaires mais le dépérissement de leurs rameaux est peu important. La forme australienne de dépérissement des agrumes (ACD) est peut-être une maladie identique au HLB.

6. Les symptômes de la forme asiatique du HLB sont la chlorose des feuilles. En général, les premiers symptômes n’apparaissent que sur un secteur ou une branche de l’arbre. La chlorose se répand et présente des symptômes proches de ceux d’une carence en zinc. On constate un dépérissement des rameaux et l’arbuste contaminé dépérit jusqu’à devenir non productif. Le fruit est petit, asymétrique, sa base reste souvent verte, et les graines avortent. Le goût du fruit est amer. Les symptômes de la forme africaine du HLB sont identiques mais ils se manifestent à des températures plus basses; les feuilles présentent généralement une marbrure, surtout les jeunes pousses qui croissent à de faibles températures.

7. Le HLB est transmis par greffe. La distribution de la bactérie du HLB dans l’arbre infecté pouvant être irrégulière, seuls certains bourgeons contiennent la bactérie ou transmettent la maladie. Plus la présence d’inoculum dans les tubes criblés du phloème est importante, plus la probabilité d’une transmission par greffe est élevée.

8. La bactérie du HLB est transmise par deux psylles: Trioza erytreae et Diaphorina citri. Le premier vecteur, Trioza erytreae, vit en Afrique, au Yémen et dans les îles de l’océan indien et est associé à la forme africaine du HLB. La forme asiatique du vecteur, Diaphorina citri, est plus adaptée aux climats humides et chauds et vit en Asie, dans le sous-continent indien, en Arabie Saoudite à la Réunion dans l’île Maurice et en Amérique du Sud. Elle a été signalée plus récemment dans plusieurs îles des Caraïbes et certaines régions de l’Amérique centrale et de la Floride. Il a été démontré que ces deux psylles transmettent les formes africaine et asiatique du HLB. La transmission de la bactérie au psylle est persistante et s’accompagne d’une phase de latence pendant laquelle l’insecte infecté ne transmet pas maladie; la bactérie se multiplie dans le psylle vecteur. En raison de la phase de latence, la plupart des psylles ne peuvent transmettre le HLB que lorsqu’ils sont parvenus au dernier stade de la nymphe ou devenus adultes. Dès qu’ils sont contaminés, les psylles peuvent transmettre le HLB pendant toute leur durée de vie. Les espèces d’agrumes sont les principales plantes hôtes et sources de nourriture des deux espèces de psylles. Les tissus des jeunes pousses constituent l’alimentation préférée des psylles. Les plantes hôtes vigoureuses qui produisent constamment de jeunes pousses, tels que le citronnier, le limettier et M. paniculata, sont des plantes hôtes idéales pour rechercher la présence de psylles.

9. La méthode la plus rapide et la plus fiable pour détecter et diagnostiquer le HLB consiste à soumettre la source infectieuse, c’est-à-dire le tissu symptomatique, à une analyse PCR (réaction en chaîne de la polymérase). L’indexage biologique est souvent difficile car les souches du virus tristeza des agrumes se développent dans la plupart des zones où l’on trouve le HLB, et les symptômes de la tristeza peuvent masquer la présence du HLB. Le développement des symptômes des formes africaines du HLB exige des conditions de serre froide, de 24 à 27° C, celui des formes asiatiques est observé à des températures plus élevées, de 30 à 37° C. La croissance asymétrique des jeunes feuilles, surtout sur les plantes indicatrices de serre, révèle la présence du HLB et vient s’ajouter aux symptômes de marbrure des feuilles pour les formes africaines et de carence en zinc pour les formes asiatiques. Le pomelo et le citronnier sont des plantes indicatrices utiles qui présentent des symptômes manifestes dans des conditions de serre. Le mandarinier peut être une plante indicatrice utile lorsque des souches sévères de la tristeza sont présentes. En effet, le mandarinier étant tolérant au virus de la tristeza, la plupart des symptômes manifestés sont dus au HLB. Parmi les autres méthodes d’analyse dont il est fait état, citons l’utilisation de la microscopie électronique par transmission (TEM), méthode qui ne convient pas pour un grand nombre d’échantillons, et les essais de détection de la présence d’acide gentisique, méthode moins précise et sensible que le PCR mais qui n’exige pas de matériel complexe.

10. L’exclusion est le meilleur moyen de lutter contre le HLB. Les symptômes du HLB pouvant être confondus avec ceux d’autres maladies, tels que le dépérissement des agrumes et le virus de la tristeza, il peut se passer un certain temps avant que les infections dues au HLB ne soient constatées et attribuées à une nouvelle maladie, ce qui rend l’établissement de cette maladie exotique plus probable. Dans des zones où le HLB s’est établi, les moyens de lutte dont on dispose pour réduire les pertes sont, en particulier, la multiplication de plants exempts de HLB pour la plantation, l’élimination des espèces vigoureuses qui produisent des pousses en permanence, ce qui permet de diminuer les populations de psylles, l’application d’insecticides lorsque les niveaux de seuil de population sont atteints, la taille des secteurs infectés sur l’arbre. L’utilisation de parasites pour maîtriser les populations de psylles a donné de bons résultats à la Réunion et dans d’autres régions. Avant la mise au point de méthodes de microgreffage d’apex pour éliminer les agents pathogènes transmissibles par greffe, la thérapie consistait à traiter le greffon à une température élevée, jusqu’à 60 °C, pendant quelques minutes, avant la multiplication.

11. Le HLB est l’une des maladies les plus destructrices des agrumes. Dès qu’elle est établie, lutter contre la maladie pour maintenir une production continue d’agrumes s’avère difficile et coûteux. Lorsque le psylle vecteur est présent et qu’il jouit de conditions climatiques idéales, le HLB peut rapidement détruire des plantations d’agrumes productives. Les arbres infectés lorsqu’ils sont jeunes ne produisent souvent aucun fruit par la suite.

RÉPERCUSSIONS AU NIVEAU DES POLITIQUES DE VERDISSEMENT DES AGRUMES:

Verdissement des agrumes – Mise en œuvre de mesures de lutte dans plusieurs pays

Importance économique

Le verdissement des agrumes a été signalé dans 29 pays d’Asie et d’Afrique. Les pertes dues à cette maladie ne sont pas faciles à évaluer. En effet, dans certains cas, seuls certains secteurs de l’arbre sont infectés et les pertes sont alors réduites. Dans d’autres cas, des arbustes entiers sont attaqués et la perte de la récolte est totale. Des pertes économiques importantes ont été signalées en Inde, aux Philippines, où sept millions d’arbres ont été infectés, ce qui a réduit la surface plantée de plus de 60 pour cent, ainsi qu’en Thaïlande et à Taïwan, « République de Chine », où la maladie a détruit quelque trois millions d’arbres. En Indonésie et en Arabie Saoudite, soit les plantations ont été abandonnées, soit elles ont périclité ou disparu intégralement.

Réponses et politiques dans quelques pays

Il est possible de lutter contre le verdissement des agrumes en s’appuyant sur des mesures intégrées, telles que l’éradication du matériel végétal infecté, l’introduction de sujets de pépinières sains et l’élimination des insectes vecteurs. Le traitement des arbustes infectés par l’injection d’antibiotiques atténue les symptômes mais ne guérit pas les plantes malades. L’élimination rapide des arbustes contaminés est fortement recommandée.

Il est d’une importance capitale de multiplier et de planter des plants sains provenant de souches d’origine obtenues par thermothérapie, microgreffage d’apex, indexage sanitaire ou sélection nucellaire. En Afrique du Sud, un système de quarantaine interne interdit tout déplacement d’arbres depuis les zones contaminées par le verdissement jusqu’aux autres régions du pays. De plus, l’Afrique du Sud privilégie la lutte contre les vecteurs, qu’elle associe à la suppression des branches et des arbres contaminés. Les arbres qui présentent de 50 à 70 pour cent de symptômes du verdissement sont supprimés, la suppression des branches étant recommandée pour des niveaux d’infection plus faibles. L’injection de PMT (N-méthyl pyrrolidinone tétracycline) n’est recommandée que pour les arbustes âgés de plus de dix ans et présentant plus de 40 pour cent de verdissement. La Chine utilise un système analogue. A l’évidence, la lutte intégrée sera la méthode la plus efficace.

À la Réunion, la méthode combinée qui consiste à introduire des parasites, traiter les arbres avec des antibiotiques et cultiver des plants sains a donné de bons résultats. En Inde, l’emploi d’insecticides, l’injection d’hydrochlorure de tétracycline, la thermothérapie du greffon et l’usage de porte-greffes sains a réduit les pertes. En Chine, où l’utilisation d’antibiotiques n’a pas encore été largement adoptée, il est recommandé d’associer la quarantaine, la multiplication des plants sains, la thermothérapie, la microgreffe d’apex sains, la suppression des arbustes contaminés, surtout dans les zones où l’incidence de psylles est faible, et l’utilisation d’insecticides. Dans les conservatoires d’espèces d’agrumes des Philippines, la méthode consistant à associer l’utilisation de variétés tolérantes, l’éradication d’arbres malades, la replantation de plants sains et la pulvérisation d’insecticides sur les psylles a montré qu’il est toujours possible de produire des agrumes dans les zones contaminées par le verdissement.

Répercussions au niveau des politiques

Les connaissances techniques et l’information sont des facteurs essentiels pour résoudre le problème que pose une maladie. Cependant, il faut prendre en compte d’autres ressources si l’on veut mettre la technologie à la portée des producteurs et dynamiser un programme de lutte intégrée. Il faut avant tout disposer d’une main d’œuvre qualifiée suffisante pour effectuer le travail d’une manière coordonnée et organisée. Une main d’œuvre qualifiée est particulièrement indispensable pour produire des plants sains, surveiller les vecteurs, détecter rapidement et détruire les plants infectés et procéder au lâcher d’ennemis naturels.

De plus, les politiques gouvernementales doivent appuyer le programme de lutte par des financements adéquats et des réglementations pertinentes. Ces lois sont indispensables pour que la lutte contre les ravageurs s’inscrive dans un cadre réglementaire. Elles imposent la destruction des sources d’inoculum (plantes contaminées et vecteurs) et créent un système de certification de plants exempts de maladie. Il est évident que l’argent seul ne peut pas résoudre tous les problèmes, mais il rend les choses beaucoup plus faciles.

Enfin, il faut intégrer et gérer non seulement les techniques de lutte et l’information, mais aussi la main d’œuvre, le budget et le cadre réglementaire, afin de renforcer les synergies.

L’application de mesures phytosanitaires rigoureuses aux frontières est importante car l’exclusion de greffons infectés est la meilleure manière de procéder pour empêcher toute introduction de la maladie.

Empêcher l’introduction du verdissement des agrumes préoccupe les pays qui ont jusqu’ici échappé aux ravages causés par cette maladie. Au Brésil, le danger est probablement plus grand qu’ailleurs car le vecteur, D. citri, est déjà présent. En cas de pénétration, le reste de l’Amérique du Sud, puis l’Amérique du Nord, seraient menacés. La migration vers le nord de l’aphide vecteur de la tristeza des agrumes, Toxoptera citricidus, illustre ce danger potentiel. La présence de la maladie et de ses vecteurs au Pakistan et dans la péninsule arabe représente un danger analogue pour les pays méditerranéens. Il existe un danger réel que le vecteur asiatique, D. citri, se déplace depuis l’Arabie, ou la Réunion et l’île Maurice, et gagne, via Madagascar, le continent africain, pour s’y établir en compagnie de la forme africaine existante. Dans ce cas, la production d’agrumes dans les zones plus chaudes et sèches serait à son tour menacée.

B. CHLOROSE VARIÉGUÉE DES AGRUMES (CVA)

12. Les symptômes de la CVA commencent généralement par une chlorose qui s’apparente à une carence en zinc et se manifeste sur un secteur de l’arbre. La face inférieure de la feuille présente une lésion renflée gommeuse tandis que la face supérieure est atteinte d’une chlorose jaune correspondante. Puis la maladie se répand, les nouvelles feuilles raccourcissent, la plupart pointant vers le haut. Les rameaux dépérissent, la taille du fruit diminue considérablement et son écorce devient dure. La teneur en sucre du fruit infecté est supérieure à celle du fruit non contaminé et il parvient plus vite à maturité. L’arbuste contaminé par la CVA devient totalement improductif au bout de trois ans et sa croissance est réduite. Les arbustes plus jeunes sont plus sensibles à la CVA que les arbres qui ont un âge égal ou supérieur à dix ans. La manifestation des symptômes et l’incidence de la CVA semblent plus marquées dans les climats plus chauds. Toutes les variétés d’orange douces sont sensibles à la CVA. En général, le citron, la lime, la mandarine, les hybrides de mandarine, tels que Murcott et Sunburst, le kumquat, l’orange trifoliée et le pomelo ne présentent pas de symptômes de la CVA mais permettent une certaine multiplication de la bactérie.

13. La bactérie de la CVA est transmise par plusieurs espèces d’insectes piqueurs-suceurs communs dans les zones de production d’agrumes du Brésil. L’efficacité varie selon les espèces. Les études d’ultrastructure montrent que la bactérie peut se fixer à l’intérieur du stylet, de l’organe de pompage (cybarium et pré-cybarium) du piqueur-suceur. L’insecte perd sa capacité à transmettre X. fastidiosa à chaque exuvie. L’adulte contaminé par X. fastidiosa conserve toute sa vie sa capacité à transmettre la bactérie. Au Brésil, on a identifié au moins 11 espèces de piqueurs-suceurs capables de transmettre la CVA. Les vecteurs brésiliens les plus importants sont Acrogonia terminalis, Dilobopterus costalimai, et Oncometopia fascialis. Parmi les autres vecteurs communs, citons Sonesimia grossa, Hortensia similis, Ferrariana subsp. et Molomea subsp. Il a été démontré que Homoladisca coagulate, insecte piqueur-suceur aux ailes translucides présent dans le sud-est des États-Unis et récemment signalé en Californie, est capable de transmettre la CVA.

14. Sur le terrain, le diagnostic de la CVA peut être confondu avec celui d’autres maladies de dépérissement des agrumes. Soumis à un essai d’injection, les arbustes infectés par la CVA absorbent l’eau injectée par une seringue, ce que les arbustes infectés par le dépérissement des agrumes ne font pas. Les symptômes qui permettent de diagnostiquer la CVA sur le terrain sont la petite taille du fruit, sa teneur élevée en sucre, l’existence d’une lésion gommeuse sur la face inférieure des feuilles et la présence de petites feuilles pointues au sommet de l’arbre. Les méthodes de détection de laboratoire comprennent l’analyse sérologique, la culture de souches bactériennes, la microscopie et le PCR. Le problème posé par la plupart de ces méthodes de détection est qu’il est difficile de distinguer la souche de la CVA des autres souches de X. fastidiosa. L’existence de méthodes de PCR permettant la détection précise de la souche de la CVA a été signalée.

15. En ce qui concerne les régions exemptes de CVA, l’exclusion est le meilleur moyen de lutter contre la maladie. L’utilisation de programmes de certification de greffons d’agrumes s’avère bénéfique. Au Brésil, la lutte contre la CVA repose sur la multiplication de matériel végétal sain, la pulvérisation d’insecticides pour réduire les populations de vecteurs et la taille régulière des secteurs de l’arbre présentant les premiers symptômes de la maladie. À long terme, les méthodes fondées sur le génie génétique permettront de renforcer la résistance de l’orange douce à la CVA.

POLITIQUE DE LUTTE CONTRE LA CHLOROSE VARIÉGUÉE DES AGRUMES (CVA)
AU BRÉSIL
ÉTUDE DE CAS

Coût de la mise en œuvre: importance économique de la production de plants de pépinière sains

Au Brésil, chaque année, la chlorose variéguée des agrumes (CVA), le chancre des agrumes ainsi que d’autres maladies et organismes nuisibles obligent à arracher des millions d’arbres. Une quantité importante de ces plantes n’ont même jamais produit d’oranges pour la simple raison qu’elles étaient déjà porteuses d’une de ces maladies lorsqu’elles sont arrivées à la plantation. En fait, elles étaient déjà contaminées lorsqu’elles ont quitté la pépinière. On sait que le meilleur moyen d’empêcher la contamination des plants de pépinières est de construire des serres. La technologie employée dans la construction d’une serre augmente considérablement le prix des plants issus de pépinières. Cependant, le prix du plant de pépinière ne représente que deux pour cent de toutes les dépenses supportées par le producteur d’agrumes, de l’aménagement initial de la plantation à la fin de vie utile de celle-ci.

Au moment où la production de plants de pépinière sains est devenue une urgence, on constate que la quantité de matériel végétal de multiplication ne répond pas à la demande. Le Brésil a besoin chaque année de 15 millions de plants sains. A l’heure actuelle, la production de plants sains est de l’ordre de cinq millions.

Réponse de FUNDECITRUS

Au Brésil, le réaménagement du programme national d’enregistrement des plantes de souche et la production de plants de pépinière certifiés devraient accroître l’offre de plants sains.

FUNDECITRUS propose une assistance technique aux pépiniéristes depuis 1997. La première étape a consisté à dénombrer les pépinières et les serres existant dans la région agrumicole et à identifier les conditions phytosanitaires dans lesquelles les plants de pépinières étaient produits. Une étude effectuée en 1998 recensait 998 pépinières. Cette étude a servi de base à une série d’initiatives en matière d’information et d’assistance technique, tels que des conférences et des sessions de formation, et de cadre permettant de conseiller l’agrumiculteur.

FUNDECITRUS procède aussi à des inspections mensuelles de pépinières. Au cours de ces visites, les techniciens de FUNDECITRUS recommandent fortement aux pépiniéristes d’adopter les mesures de lutte contre les ravageurs et les maladies, telles que l’utilisation de serres et l’application régulière et méthodique de pesticides. Ces actions forment une partie du « kit technologique » proposé pour lutter contre la chlorose variéguée des agrumes (CVA), le chancre des agrumes et autres organismes nuisibles et maladies qui attaquent les cultures d’agrumes.

Le 27 janvier 1998, le secrétariat de l’agriculture de l’État de São Paulo a publié des règles strictes concernant la production de plants de pépinières et délivrera un certificat de qualité aux pépiniéristes qui investissent dans la technologie.

Jusqu’à maintenant, la CVA s’est limitée au Brésil. Cependant, les propos qui suivent du Dr Chester Roistacher, secrétaire de l’Organisation internationale de virologie des agrumes (IOCV) sont intéressants si l’on se réfère aux politiques formulées par d’autres pays producteurs d’agrumes: « Je crois que nous nous berçons d’illusions si nous croyons que notre industrie agrumicole est protégée contre n’importe laquelle de ces maladies et si nous persistons à croire que nous ne serons pas touchés. Nous le serons ! Malheureusement, ce n’est pas la technologie pour détecter et éliminer ces maladies de nos plants qui nous fait défaut. Le problème principal est politique ! Comment convaincre les autorités de ce qui nous attend si elles n’apportent pas leur contribution financière. Je crois fermement que chaque dollar investi dans un programme de certification peut permettre de gagner ou d’épargner mille dollars en empêchant telle ou telle maladie de détruire petit à petit notre industrie agrumicole. » Le Dr Roistacher lance un appel pour que les secteurs public et privé s’engagent de manière active à résoudre ces problèmes, dont les conséquences sont si importantes pour les industries agrumicoles.

C. LÉPROSE DES AGRUMES (CILV)

16. La léprose des agrumes (CiLV), causée par une forme de rhabdo-virus non caractérisée, a pris beaucoup d’importance au Brésil et dans certaines régions d’Amérique du Sud. Les virions du CiLV sont de forme ovale et n’ont pas d’enveloppe. Leur longueur est de 100 à 110 nm et leur largeur d’environ 30 nm. Le virus n’est pas systémique car il n’est pas distribué systématiquement dans toute la plante. En fait, les particules virales apparaissent lentement à l’extrémité des sites où s’alimente l’acarien vecteur. On trouve généralement les virions dans le noyau des cellules infectées. Les corps d’inclusion présents dans le cytoplasme des cellules infectées apparaissent sous la forme de viroplasmes et ne contiennent pas de virions. Les variations de taille et de forme des virions et les différences constatées dans les propriétés du viroplasme ont laissé supposer que plusieurs virus étaient responsables des symptômes couramment associés au CiLV. Les toxines secrétées par l’acarien vecteur peuvent aussi causer des dommages mais les lésions de la léprose sont bien distincts, contiennent des virions et sont différentes des taches créées par les piqûres d’acariens.

17. La CiLV est transmise par les acariens vecteurs du genre Brevipalpus, communément appelés acariens plats ou acariens fausse araignée. Parmi eux, B. phoenicis est signalé comme étant le plus efficace; B. californicus et B. obovatus ont été aussi associés à la propagation sur le terrain.

18. La CiLV infecte toutes les variétés d’orange douce et elle a été signalée sur le citron et la mandarine. Le pomelo serait tolérant à la CiLV.

19. La CiLV se manifeste initialement par des lésions sur les feuilles, le fruit et les rameaux. La présence de la CiLV sur le fruit entraîne sa chute prématurée. Les lésions se nécrosent en leur centre à mesure qu’elles évoluent. Les lésions présentes sur les rameaux s’élargissent progressivement et cernent le rameau qui finit par dépérir. La CiLV tue l’arbre si on ne lutte pas contre les acariens.

20. La chlorose « zonate » produit des lésions foliaires analogues à celles de la CiLV, mais la zone nécrosée du centre de la lésion ne se développe pas. Le lien entre la CiLV et la chlorose « zonate » n’a pas été étudié.

21. Le diagnostic de la CiLV passe par l’observation des symptômes caractéristiques sur le terrain. La microscopie par électronique de transmission (TEM), qui donne la possibilité de visualiser les virions ovales, est la seule méthode de confirmation actuellement disponible. En effet, il n’existe à ce jour ni analyse sérologique ni test d’acide nucléique permettant d’effectuer des analyses ou des études à grande échelle.

22. La lutte contre la CiLV inclut l’application d’acaricides et la suppression des branches infectées sur l’arbre. Au Brésil, les applications d’acaricides représentent à l’heure actuelle le coût de production principal des agrumes. Des travaux de recherche en cours au Venezuela suggèrent que la CiLV transite par les pépinières, les lésions foliaires ne se développant que lorsque les plants infectés sont plantés.

23. Avant 1925, la léprose avait des conséquences négatives sur la production d’agrumes en Floride. Puis, vers 1926, l’incidence de la léprose en Floride a considérablement diminué, et ce déclin a coïncidé avec l’introduction d’acaricides efficaces à base de soufre pour lutter contre une forme d’acarien, le phytopte des agrumes. La léprose a été signalée en Floride pour la dernière fois au milieu des années 1960.

24. Au Venezuela, c’est vers 1990 que la léprose a commencé à poser un problème lorsque sa prévalence a augmenté, ce qui a peut-être coïncidé avec l’abandon de nombreuses plantations comprenant des porte-greffes de l’orange amère détruits par le virus tristeza des agrumes. Les restrictions à l’importation de fruits frais en provenance du Venezuela imposées par les pays voisins illustrent les conséquences économiques potentielles de cette maladie. La CiLV a été signalée dans la zone Nord du Panama, ce qui est apparemment une conséquence de l’importation de greffons du Brésil. Récemment, la présence de la CiLV au Guatemala a été confirmée par la microscopie par électronique de transmission (TEM). Au Honduras, la présence de la maladie a été signalée à plusieurs reprises mais non confirmée.

D. LA TACHE NOIRE DES AGRUMES

25. La maladie de la tache noire des agrumes, dont l’agent responsable est Guignardia citricarpa (synonyme: Criptosporiopsis citri Johnston & Fuller), est l’une des maladies cryptogamiques les plus importantes des agrumes. La maladie se développe dans les climats subtropicaux aux pluies d’été dominantes, en Amérique du Sud, Asie, Afrique et Australie. Elle provoque des lésions sur le fruit qui rendent celui-ci invendable sur le marché des fruits frais et entraînent sa chute prématurée.

26. Les climats humides et chauds favorisent la maladie de la tache noire. Les ascospores produites sur les feuilles mortes tombées sur le sol sont la principale source infectieuse. Ces spores sont libérées lorsque le tissu végétal est humide. Le fruit est sensible à l’infection pendant 4 ou 5 mois après sa formation. La tache noire caractéristique se développe lorsque le fruit est proche de la maturité, mais l’infection se produit longtemps avant le développement de la tache noire. Quatre types de lésion au moins ont été décrites. Les lésions de type A et D sont les plus évidentes et directement associées à la maladie de la tache noire. Les autres lésions décrites présentent des aspects tacheté et tavelé de couleurs plus claires.

27. Les citrons et les oranges douces à maturité tardive sont les plus sensibles à la tache noire. Tous les cultivars des agrumes peuvent être infectés par la maladie. Les arbres âgés sont plus sensibles que les arbres jeunes.

28. La tache noire peut être identifiée sur le terrain par les symptômes caractéristiques qui apparaissent sur le fruit. Le champignon peut être cultivé à partir de tissus infectés, mais la différentiation entre les isolats pathogènes et non pathogènes exige un test de pathogénicité. Les fongicides peuvent être un moyen de lutte efficace et préventif contre l’infection, à condition de respecter scrupuleusement le calendrier des traitements. Il faut parfois appliquer jusqu’à cinq traitements pour protéger le fruit pendant sa période de sensibilité. L’application de fongicides doit être raisonnée pour empêcher la tolérance du champignon à ces produits. L’élimination des feuilles mortes tombées sous les arbres est utile pour réduire l’incidence de l’inoculum. La dissémination à longue distance de la maladie de la tache noire est liée au déplacement de matériel végétal infecté issu de pépinière. Si l’on peut craindre que l’introduction de la maladie de la tache noire dans de nouvelles régions soit favorisée par le transport des fruits, cette menace reste peu probable, sauf si l’on prend des mesures délibérées pour déclencher l’infection.

E. LE CHANCRE DES AGRUMES

29. Le chancre des agrumes est une maladie pathogène causée par Xanthomonas axonopodis pv. citri, [synonymes: Pseudomonas citri, Xanthomonas, Xanthomonas campestris pv]. Plusieurs pathotypes de chancre des agrumes ont été décrits. Le pathotype le plus destructeur est le type « A » ou chancre asiatique des agrumes. Le pomelo, la lime acide, l’orange trifoliée sont extrêmement sensibles au chancre « A ». L’orange douce, l’orange amère et le citron y sont modérément sensibles, les mandarines étant les moins sensibles. Parmi les autres pathotypes, citons le type « B », qui infecte principalement le citron, la lime acide, l’orange amère et le pamplemousse, le type « C », qui attaque essentiellement la lime acide, et la « maladie bactérienne de la tache sur les feuilles », causée par Xanthomonas campestris pv. aurantifolii, qui produit des taches sur les feuilles des plantes trifoliées cultivées en pépinières.

30. Le chancre des agrumes est essentiellement une maladie qui produit des taches sur les feuilles et provoque des lésions sur les feuilles, les tiges et le fruit. Les premières lésions apparaissent sous la forme de petites taches chlorotiques qui se transforment, en s’élargissant, en lésions présentant des centres nécrosés entourés d’un halo chlorotique. Les lésions anciennes ont souvent l’aspect du liège. La taille de la lésion dépend de l’âge du tissu végétal lorsque la lésion commence et de la sensibilité du cultivar. La prévalence de lésions chancreuses entraîne l’abcission de la feuille, la chute du fruit et le dépérissement du rameau.

31. Le chancre des agrumes est disséminé sur de longues distances par le déplacement de plants ou de tissus végétaux infectés, ou de matériel contaminé. Les vents pluvieux propagent la maladie sur les arbres proches. Les nouvelles infections ne se produisent que dans les tissus jeunes et exigent une certaine hygrométrie et une pénétration par les stomates. Les galeries creusées dans les feuilles par la mineuse des agrumes, Phyllocnistis citrella Stainton, procurent au chancre des agrumes d’excellentes voies de pénétration et de circulation dans la feuille et rendent la lutte contre cette maladie plus difficile. Des recherches récentes montrent que, pendant des orages violents, de nouvelles infections du chancre des agrumes peuvent se produire à 607 mètres de la source d’inoculum la plus proche.

Méthodes de détection du chancre des agrumes

32. Les lésions sur les feuilles sont plus faciles à visualiser que les lésions sur les rameaux et les branches, mais il est difficile d’identifier les arbres infectés qui n’ont que quelques feuilles présentant des lésions. Si l’apparence liégeuse des lésions entourées d’un halo chlorotique permet de diagnostiquer la maladie sur le terrain, il faut utiliser une méthode de laboratoire pour confirmer sa présence. Il existe une série de méthodes de détection disponibles: l’analyse sérologique, l’analyse des acides gras, le typage des bactériophages, l’analyse de l’ADN et le PCR.

Lutte contre le chancre des agrumes

33. L’exclusion et l’éradication sont les principaux moyens de lutte contre le chancre des agrumes dans les régions où il n’est pas endémique. Le succès de l’éradication dépend de l’ampleur de l’infestation et de la volonté des résidents ou des agrumiculteurs de coopérer. Il faut disposer de ressources pendant une durée prolongée pour détecter et éliminer les arbres infectés. En Floride, au cours des six dernières années, plus de 200 millions de dollars EU ont été investis dans une campagne d’éradication du chancre des agrumes. Cette maladie a été introduite en Floride trois fois au cours des 100 dernières années et éradiquée deux fois avec succès. Dans les régions où le chancre des agrumes est endémique, la lutte consiste à changer les pratiques culturales pour réduire la gravité de la maladie. Parmi les pratiques culturales recommandées, citons: l’utilisation de coupe-vents pour réduire la vitesse du vent, le renforcement du couvert végétal pour réduire l’érosion éolienne et la présence de débris, notamment des feuilles, propices à l’introduction de la bactérie, et la pulvérisation de produits à base de cuivre pendant les périodes de sensibilité du tissu végétal.

LUTTE CONTRE LE CHANCRE DES AGRUMES

Étude de cas en Floride – Mise en œuvre des mesures de lutte

Le chancre des agrumes a été décrit pour la première fois lorsqu’il a été découvert aux États-Unis dans les États du golfe en 1915. On pense qu’un chargement de plants de pépinières infectés provenant d’Asie est à l’origine du foyer infectieux découvert. L’inspection des vergers et des pépinières, la mise en quarantaine et la destruction par le feu, sur place, des arbres infectés auraient permis d’éliminer la maladie dans les États du golfe.

De 1985 à 1992, treize foyers de chancre des agrumes ont été détectés en Floride. On pensait qu’une campagne d’envergure d’inspection et de destruction des arbres malades était parvenue à éradiquer la maladie. Celle-ci réapparut dans les plantations commerciales du comté de Manatee (Floride), en juin 1997, là où l’éradication avait eu lieu auparavant. L’âge des plus anciennes lésions trouvées indiquait que la maladie était présente depuis 1 an à 1 an et demi. Ce foyer a été éliminé en grande partie par la destruction de plusieurs centaines d’hectares de plantations commerciales d’agrumes infectés.

Un nouveau foyer important a été découvert en 1995 dans les propriétés résidentielles de la zone urbaine de Miami (Floride). Ce foyer s’est développé depuis sa découverte en septembre 1995. La présence de lésions plus anciennes dans la région de Miami indiquait que la maladie était présente dans cette région depuis deux ou trois ans avant sa découverte. Au cours de ces dernières années, Miami a dû affronter des conditions météorologiques tropicales très perturbées, notamment des cyclones, des orages tropicaux, des tornades et de nombreuses pluies accompagnées de vents violents. Ces perturbations ont propagé la maladie au plan local et considérablement aggravé l’épidémie.

Impact

Le chancre des agrumes est une maladie coûteuse. La conséquence la plus grave des infestations de chancre des agrumes est son impact négatif sur le commerce qui découle de l’application de mesures de restriction à l’encontre du transport entre les États, du transport international et du commerce de fruits provenant des zones infestées. Aux États-Unis, des millions de dollars sont consacrés chaque année à l’éradication et des effectifs de plusieurs centaines de personnes sont affectés aux programmes de lutte et d’éradication. Malgré ces investissements considérables, la maladie continue de s’étendre dans la région de Miami (Floride).

Mise en oeuvre du programme de lutte contre la maladie

Exclusion: la première ligne de défense contre le chancre des agrumes est l’exclusion. Le chancre n’existe pas encore dans certaines parties de la Floride bien que les conditions climatiques soient favorables. Ceci est probablement dû aux restrictions sévères qui frappent les importations dans ces régions de matériel végétal de multiplication et de fruits provenant de zones contaminées.

Éradication: dès qu’il est introduit dans une région, l’élimination de l’inoculum par la suppression et la destruction des arbres exposés et infectés est la pratique la mieux acceptée. Pour y parvenir, les arbres sont déracinés et brûlés. Dans les zones urbaines, les arbres sont coupés et broyés, et les déchets sont placés dans une décharge.

La maladie étant disséminée localement par le vent et la pluie, on peut lutter contre la maladie en réduisant l’exposition au vent. On peut aussi augmenter le couvert végétal entre les rangées d’arbres pour réduire les dommages causés par l’érosion éolienne et planter des coupe-vents pour diminuer la vitesse du vent.

Implications de la politique de lutte

L’application par les États-Unis de contrôles phytosanitaires stricts sur les importations de végétaux et de tissus végétaux constitue un obstacle à l’introduction du chancre. La mise en œuvre de cette politique limite le commerce de ces produits. Les importations de fruits en souffrent dans la mesure où elles exigent des inspections plus rigoureuses, des traitements et éventuellement des « quarantaines », ce qui augmente les coûts qui risquent d’être imputés, au moins en partie, à l’exportateur d’origine.

IV. RECOMMANDATIONS

34. Dans le cadre de l’expansion du commerce mondial des agrumes, la stratégie qui associe des réglementations, la mise en vigueur de mesures phytosanitaires d’une manière ouverte et transparente et l’affectation de ressources financières adéquates par les secteurs public et privé, est choisie de préférence pour résoudre les problèmes liés à cette maladie.

35. Il faut que le pays exportateur s’engage de manière systématique pour défendre la place de son secteur agrumicole sur le marché mondial. Les pays importateurs doivent utiliser leurs ressources pour appliquer l’exclusion dans la mesure du possible et/ou mettre en place un agrément préalable à l’exportation pour protéger leur secteur agrumicole. Les agents pathogènes et les vecteurs ignorent les frontières. Par conséquent, les mesures qui améliorent l’état phytosanitaire des membres, si peu nombreux qu’ils soient, d’un groupe de partenaires commerciaux d’une région bénéficient à l’ensemble des membres du groupe.

A. ÉLÉMENTS FONDAMENTAUX – UNE STRATéGIE RÉGIONALE

36. Au niveau le plus fondamental, la lutte contre la maladie commence par la plantation de plants sains exempts de maladie. Les programmes obligatoires de certification des agrumes fournissent à chaque pays un cadre élémentaire lui permettant de lutter sur place contre toutes les maladies transmissibles par greffe et de réduire la propagation d’agents pathogènes. Cependant, les pays en développement qui ont des secteurs agrumicoles de petite taille ont des difficultés pour trouver les ressources exigées pour mettre en œuvre et pérenniser un programme de certification des agrumes. La mise en place de ressources régionales accessibles à plusieurs pays en développement peut réduire le coût d’établissement de programmes de certification dans le pays et de programme de formation du personnel phytosanitaire. Les programmes régionaux de production de matériel végétal exempt de maladies pourraient donner lieu au transfert d’expertise et à la formation du personnel chargé de la quarantaine et de la certification au plan national. De plus, un centre régional pourrait servir de conservatoire de secours pour réapprovisionner en végétaux sains les pays ayant subi des désastres, tels des cyclones, dans le cadre des programmes de certification nationaux.

37. Le besoin de formation est une préoccupation chronique, en particulier la formation du personnel travaillant dans les programmes de certification, la formation d’inspecteurs aux points d’entrée et la formation d’inspecteurs menant des campagnes de préservation des zones exemptes d’agents pathogènes ou chargés d’examiner l’état sanitaire des végétaux avant leur entrée. De même, il est indispensable que les inspecteurs, qui sont souvent les « yeux » les mieux placés pour voir les nouveaux ravageurs, soient familiarisés avec toutes les maladies potentiellement dangereuses, et pas simplement avec une ou deux maladies à priorité élevée. Autre préoccupation chronique: le diagnostic précis et fiable d’agents pathogènes de quarantaine à caractère spécifique. La plupart de ces problèmes pourraient être résolus si l’on utilisait les centres régionaux pour l’indexage de laboratoire et la préservation de matériel génétique d’agrumes sains, qui pourrait être fournis aux programmes de certification nationaux.

V. CONCLUSION

38. Les outils qui permettent de s’attaquer aux problèmes des maladies transfrontalières sont disponibles, même s’ils ne sont pas parfaits. Des contributions publiques aux niveaux local, régional et national sont exigées pour compléter les initiatives privées. Les connaissances scientifiques doivent être étayées par des investissements financiers appropriés et par un système de réglementation et de mise en application. Les accords de l’OMC SPS offrent de nouvelles possibilités d’affronter les problèmes commerciaux qui découlent des préoccupations phytosanitaires. Comme le montrent les études de cas du présent document, des stratégies intégrées associant différentes techniques peuvent permettre d’affronter les problèmes à la source, d’empêcher potentiellement la propagation de la maladie au plan international et, par conséquent, d’éviter les problèmes commerciaux. Cependant, il faut que la vigilance et l’attention portées aux maladies épidémiques qui menacent le secteur mondial des agrumes puissent être préservées au plus haut niveau si l’on veut que le commerce se développe et que les pays en développement producteurs d’agrumes puissent bénéficier de l’expansion du commerce.

1 Voir CCP: CI 98/7 “Mesures sanitaires et phytosanitaires appliquées à l’industrie et au commerce des agrumes septembre 1998, www.fao.org/unfao/bodies/ccp/citrus/98/98-7f.htm