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Avant-propos


Les incendies de forêts dans les zones sub-humides sèches, semi-arides ou arides de l'Afrique soudano-guinéenne et sahélienne, mieux connus sous l'appellation plus exacte de feux de brousse, apparaissent comme une fatalité qui affecte chaque année toutes les formations végétales, des forêts claires aux steppes à acacia. Ils se révèlent comme les plus puissantes contraintes à la conservation et à la gestion durable de ces ressources. Que ce soit les forêts et savanes boisées naturelles, les plantations forestières, ou même les cultures, la végétation soudano-sahélienne paie chaque année un lourd tribut aux feux de brousse; et lorsqu'ils débordent sur les habitations, ils se traduisent malheureusement aussi par la perte de vies humaines.

Les forestiers ont eu tôt fait de réaliser l'immensité des efforts nécessaires pour s'attaquer de front aux incendies: les herbages très fournis à andropogonées en zone soudano-sahélienne brûlent en effet en dégageant énormément de chaleur et défient toute tentative d'extinction à mains nues en période sèche. C'est pourquoi les forestiers considèrent que la prévention, et notamment le brûlage contrôlé (feux précoces), même dans ses formes peu élaborées, demeure la principale arme. A partir des années 1970, des essais de lutte contre les feux de brousse utilisant des équipements modernes ont été réalisés dans de nombreux projets en Afrique: camions équipés de citernes, tracteurs à chenilles et niveleuses pour l'ouverture de pare-feu, pompes, etc... On s'est vite rendu compte des coûts trop élevés de la lutte mécanique, en particulier pour les économies fragiles des pays concernés. Ces projets ont cependant permis de tirer des leçons importantes: la nécessité incontournable de la participation des populations et des collectivités organisées; l'intérêt des petits équipements et outils manuels appropriés pour les individus, les groupements et les villages; l'éducation et la formation. Le feu de brousse doit être maîtrisé par des populations qui se sont approprié l'espace susceptible de brûler et qui doivent participer à l'aménagement de cet espace.

Le présent ouvrage est, plutôt qu'un guide, un compte rendu de l'expérience acquise dans la compréhension des relations entre les pluies, la température, la végétation, le sol et les hommes en matière de développement et du contrôle des feux de brousse en zones soudaniennes et sahéliennes. L'auteur principal de ce document, M. André Schmitz, a accumulé de longues années d'expérience dans le domaine du comportement du feu dans les forêts claires et les savanes boisées de nombreuses régions d'Afrique; il a suivi les essais et les recherches faites pour mieux connaître le comportement du feu, ses effets sur la végétation, le dynamisme et les "moyens" passifs ou actifs de défense de celle-ci, les conséquences des divers types de feux précoces ou tardifs et les possibilités d'utilisation contrôlée du feu. M. Abdoul Oumar Fall a apporté son expérience des écosystèmes plus secs de la zone sahélienne et sahélo-soudanienne, des essais de gestion sylvopastorale fondée sur l'aménagement des feux, des réseaux entretenus de pare-feu, des outils et équipements d'intervention, et des programmes correspondants d'éducation et de vulgarisation. M. Salah Rouchiche a contribué à la finalisation du document. M. El Hadji Sène, Chef du Service de la conservation, de la recherche et de l'enseignement forestiers de cette Division, a lancé et coordonné l'étude.

Cet ouvrage constitue en quelque sorte un recueil des expériences passées et des leçons qu'il faut en tirer. Il nous exhorte à ne pas se laisser aller au découragement dans le domaine de la maîtrise des feux de brousse, en montrant que celle-ci est possible avec des niveaux suffisants d'éducation, de participation et d'utilisation d'outils à la hauteur des moyens locaux.

Toutes les suggestions que la lecture de ce document inspire seront les bienvenues; le lecteur pourra les adresser à:

Service de la conservation, de la recherche et de l'enseignement forestiers Division des ressources forestières Département des forêts FAO Viale delle Terme di Caracalla

00100 Rome (Italie).
J.P. Lanly
Directeur
Division des ressources
Département des forêts


Introduction


Une longue carrière de forestier et botaniste en forêt claire et savane du Haut-Shaba (S.-E. du Zaïre) et plusieurs missions effectuées plus au sud ainsi que dans les régions orientale, soudanaise et sahélienne nous ont mis en contact direct avec le problème des feux de brousse.

La présente étude se veut donc pratique et basée davantage sur une expérience personnelle que sur une compilation de la littérature. Abondante et parfois peu précise, celle-ci décrit souvent des expériences en vase clos plutôt qu'un aménagement forestier tenant compte du feu.

Ceux qui gèrent la forêt claire et la savane parlent des feux précoces et de leurs avantages mais bien peu savent et osent les pratiquer, ignorant les règles élémentaires de leur utilisation. Risquant ainsi d'occasionner plus de dégât que de bien, ils hésitent à les allumer. C'est pourquoi cette étude tâchera de rester claire et simple afin que le forestier, l'éleveur et l'agronome de terrain puissent, sans difficulté, concevoir et réaliser un plan de lutte dans leur région. Quelques cas concrets seront développés en fin d'ouvrage.

L'importance du sujet est certes ressentie au niveau des forestiers de terrain, mais aussi au niveau des instances chargées de formuler les politiques et stratégies sous-régionales, régionales et internationales comme en témoignent les exemples suivants:

Les Conférences Forestières Interafricaines de décembre 1951 et février 1956, le voyage d'études aux Etats-Unis et au Mexique réalisé en 1975 grâce à l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), différentes sessions de la Conférence ministérielle pour une politique concertée de lutte contre la désertification et de protection de la nature (COMIDES) à Dakar (1985) et à Alger (1988), la rencontre des experts sahéliens et des pays forestiers en 1986 à Yamoussoukro organisée par le Bureau des Nations Unies pour le Sahel (UNSO), etc., se sont penchés sur les problèmes aussi vastes que complexes des feux de brousse et des incendies de forêts en zones tropicales relativement sèches et sur leurs graves conséquences sur la végétation, les sols, la faune, etc.

La FAO est particulièrement préoccupée par le contrôle et l'utilisation des incendies de forêts et des défrichements avec brûlis qui en détruisant progressivement les écosystèmes forestiers en zones arides, en aggravant la désertification et les déséquilibres écologiques qu'elle déclenche, menacent sérieusement les économies de nombreux pays.

Les feux de brousse, le déboisement avec brûlis, les pratiques culturales inadaptées, menacent les forêts à travers toute l'Afrique. Une référence fréquente à des zones connues du sud-est du Zaïre pour avoir fait l'objet d'observations suivies, est complétée par des exemples choisis de l'Afrique de l'Ouest sahélienne.

Des informations cohérentes, des avis et des conseils sur le phénomène feu sont indispensables pour une plus grande compréhension, une meilleure prise de conscience du sujet en vue de la mise sur pied de techniques visant son utilisation comme outil d'aménagement ainsi que des techniques de lutte contre ses effets destructeurs, susceptibles de faciliter la tâche aux techniciens et vulgarisateurs d'horizons divers.

Ce sont les objectifs que la présente étude sur les feux de brousse se propose d'atteindre afin de favoriser la conservation de la nature et le développement durable dans les pays des zones tropicales.


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