Les grains et leur structure

Table des matières - Précédente - Suivante

Les grains de sorgho et de mil se caractérisent par une diversité considérable de couleurs, de formes, de dimensions et de certains éléments anatomiques (tableau 2).

La structure de base des grains est analogue dans le sorgho et les différents mils. Les principaux éléments anatomiques sont le péricarpe, le germe ou embryon et l'endosperme. Dans l'éleusine, le millet commun et le millet des oiseaux, le péricarpe est comme un sac, lié par un seul point d'attache à l'endosperme. Dans ces grains de type utricule, le péricarpe se détache facilement, laissant l'endosperme intérieur protégé par l'enveloppe de la graine ou testa. Les grains de sorgho et de mil chandelle sont du type caryopse, où le péricarpe est complètement fusionné avec l'endosperme. La distribution relative des trois principaux éléments varie. Pour le sorgho, la répartition selon le poids est de 6 pour cent pour le péricarpe, 84 pour cent pour l'endosperme et 10 pour cent pour le germe (Hubbard, Hall et Earle, 1950). Dans le mil chandelle, le péricarpe représente 8,4 pour cent, I'endosperme 75 pour cent et le germe 16,5 pour cent (Abdelrahman, Hoseney et Varriano-Marston, 1984). Dans le mil chandelle, le rapport endosperme/germe est de 4,5:1, tandis que dans le grain de sorgho il est de 8,4:1. Dans l'éleusine et le millet commun, le germe est très petit, et par conséquent le rapport endosperme/germe est beaucoup plus élevé que dans le sorgho, soit 11:1 et 12:1.

TABLEAU 2 - Caractéristiques structurelles des graines de sorgho et de certains mils

Graine Type Forme Couleur Pois de 1000 graines (g)
Sorgho Caryopse Sphérique Blanc, jaune, rouge, brun 25 30
Mil chandelle Caryopse Ovoïde, hexagonale, globeuse Gris, blanc, jaune, brun, pourpre 2,5-14
Eleusine Utricule Globeuse Jaune, blanc, rouge, brun, violet 2,6
Millet commun Utricule     4,7-7,2
Millet des oiseaux Utricule     1,86
 

Enveloppe de la graine

Aleurone

Graine Nombre de couches Pygmantée Epaisseur (µm) Nombre de couches Dimension des cellules (µm)
Sorgho 1 Parfois 0,4 1  
Mil chandelle 1 Parfois 0,4 1 16 30 x 5-15
Eleusine 5 Oui 10,8-24,2 1 18 x 7,6
Millet commun 1 Non 0,2-0,4 1 12 x 6
Millet des oiseaux 1     1  
 

Granules d'amidon

Corps protéiques
Graine Diamètre (µm) Zone périphérique (µm) Zone cornée (µm) Zone farineuse (µm) Type Dimension (µm) Localisation
Sorgho 20-30       Simple 0,3-3 Toutes zones
Mil chandelle 10-12 6,4 6,4 7,6 Simple 0,6-0,7 Toutes zones
Eleusine 3-21 8-16,5 3-19 11-21 Simple/ composé 2,0 Périphérique/ cornée
Millet commun 2-10 3,9 4,1 4,1 Simple 0,5-1,7 Périphérique
Millet des oiseaux 10            
Graine

Germe

  Dimension (µm) Rapport endosperme/germe
Sorgho   8,4 :1
Mil chandelle 1 420 x 620 4,5:1
Eleusine 980 x 270 11:1
Millet commun 1 100 x 310 12:1
Millet des oiseaux   12:1

Péricarpe

Le péricarpe est la structure extérieure du caryopse et se compose de trois souscouches: l'épicarpe le mésocarpe et l'endocarpe L'épicarpe est lui-même divisé en épiderme et hypoderme. Dans le caryopse du sorgho, l'épiderme est composé de cellules épaisses, allongées et rectangulaires, dont la surface extérieure est revêtue de cutine. Un pigment est souvent présent dans l'épiderme. L'hypoderme est composé de cellules légèrement plus petites que l'épiderme, et son épaisseur varie entre une et trois couches de cellules. Le mésocarpe est la partie intermédiaire et la couche la plus épaisse du péricarpe de sorgho, mais son épaisseur varie beaucoup selon les génotypes. La résistance du sorgho à la moisissure est fonction de la finesse du mésocarpe. Les grains qui présentent un mésocarpe épais sur un endosperme dur sont choisis de préférence lorsqu'on veut décortiquer en pilant à la main. L'endocarpe, sous-couche intérieure du péricarpe, se compose de cellules transversales et d'une couche de cellules tubulaires qui transportent l'humidité dans le grain. Au cours de la mouture à sec du sorgho, il y a rupture à l'endroit des couches de cellules transversales et tubulaires.

Le péricarpe du caryopse de mil chandelle se compose aussi d'un épicarpe comportant des couches d'une ou deux cellules, d'un mésocarpe dont l'épaisseur varie selon les facteurs génétiques et d'un endocarpe composé de cellules transversales et tubulaires. La couche du mésocarpe du mil chandelle ne contient pas de granules d'amidon, qu'on ne trouve que dans le mésocarpe du sorgho. Au cours du décorticage ou du broyage, le péricarpe du mil chandelle se rompt à l'endroit des couches de cellules transversales et tubulaires, et il se peut que des fragments d'endocarpe restent attachés à l'endosperme.

Enveloppe de la graine ou testa

Juste en dessous de l'endocarpe, on trouve la couche dite testa ou enveloppe de la graine. Dans certains génotypes de sorgho, le testa est fortement pigmenté. La présence de pigment et la couleur représentent un caractère génétique. L'épaisseur de la couche n'est pas uniforme. Elle est épaisse près de la couronne du grain et fine près de l'embryon. Dans certains génotypes. il y a un testa partiel, tandis que dans d'autres on ne le voit pas ou bien il est absent. Dans le mil chandelle, la couche de testa est fine et parfois pigmentée. Dans les autres mils, le testa est toujours pigmenté et n'a qu'une seule couche d'épaisseur. Dans l'éleusine, le testa est très épais, avec des couches de cinq cellules, et il est également pigmenté.

Endosperme

L'élément le plus volumineux du grain de céréale est l'endosperme, qui est un important tissu de réserve. Il se compose d'une couche d'aleurone ou assise protéique et de zones périphériques cornées et farineuses. Dans tous les mils et le sorgho, I'aleurone est constitué d'une seule couche de cellules, qui se situe juste en dessous de l'enveloppe de la graine ou spermoderme. Les cellules d'aleurone sont riches en sels minéraux, en vitamines du complexe B et en huile; elles contiennent quelques enzymes hydrolysantes.

L'endosperme périphérique se distingue par ses longues cellules rectangulaires qui forment un ensemble compact et contiennent des granules d'amidon et des corps protéiques imbriqués dans la matrice protéique. L'amidon de ces cellules n'est donc pas facilement disponible pour la digestion par les enzymes, à moins que la protéine qui lui est associée soit également réduite (Chandrashekar et Kirleis, 1988). La matrice protéique est en général une glutéline soluble dans l'alcali, et les corps protéiques sont des prolamines solubles dans l'alcool, qui représentent la plus forte proportion des protéines totales du grain.

Les corps protéiques dans l'endosperme du sorgho et d'autres mils sont sphériques; leur dimension diffère selon les espèces et également à l'intérieur de l'endosperme du même grain de mil. Dans le sorgho, le nombre de corps protéiques diminue en proportion inverse du contenu d'amidon, depuis la zone périphérique vers le noyau central où se trouve l'endosperme farineux. Dans le mil chandelle, les corps protéiques sont plus nombreux dans la zone farineuse que dans la zone cornée. Adams, Novellie et Liebenberg (1976) ont signalé la présence de plusieurs enzymes dans les corps protéiques du sorgho, notamment protéases, triglucosidases, trigalactosidases et phosphatages. Les corps protéiques du sorgho, du mil chandelle et de l'éleusine contiennent également du phosphore, du calcium, du potassium et du magnésium.

Les granules d'amidon de l'endosperme corné sont polyhédriques et de taille différente selon les espèces de mil. Dans l'endosperme farineux, les granules d'amidon sont sphériques et relativement plus gros que les granules d'amidon de la zone cornée. Dans la zone farineuse, l'amidon est plus facile à digérer par les enzymes. Dans le mil chandelle et l'éleusine, les granules d'amidon de l'endosperme farineux sont sphériques et gros. L'amidon du mil chandelle est hydrolysé plus lentement que celui du sorgho par l'amylase pancréatique du porc (Sullins et Rooney, 1977).

Les proportions d'endosperme corné et d'endosperme farineux déterminent la texture du grain de mil. Dans les grains à texture tendre, il y a plus d'endosperme farineux que d'endosperme corné; en revanche, les grains à texture dure contiennent plus d'endosperme corné à forte densité que d'endosperme farineux. Le millet des oiseaux contient très peu d'endosperme farineux et possède une texture cornée et dure. Avec un endosperme également divisé en zones cornée et farineuse, les grains de millet commun et d'éleusine sont de texture intermédiaire. Dans le mil chandelle et le sorgho, la texture varie beaucoup, d'un endosperme entièrement farineux très tendre à un endosperme entièrement corné, très dur ou vitreux.

La texture du grain est l'un des paramètres les plus importants de la qualité alimentaire et de transformation du sorgho et des mils (Rooney, Kirleis et Murty, 1986). Une fois décortiqué, le sorgho à endosperme dur donne moins de grains brisés et plus de grains entiers que le sorgho à endosperme plus tendre (Desikachar, 1982). Avec le procédé de mouture à sec, le rendement de farine est plus élevé dans les types cornés que dans les types farineux tendres. En revanche' dans la mouture humide, le rendement d'amidon est plus élevé dans les génotypes à endosperme tendre. Dans la préparation de porridge épais, on préfère les variétés possédant une proportion plus élevée d'endosperme vitreux. Ces variétés conviennent également pour être grillées (Chandrashekar et Desikachar, 1986; Murty, Patil et House, 1982). Pour la confection de pain, fermenté ou non, la farine du sorgho à endosperme tendre est très nettement préférable (Rooney, Kirleis et Murty, 1986).

Germe

L'axe embryonnaire et le scutellum sont les deux parties principales du germe. Le scutellum est un tissu de réserve riche en lipides, protéines. enzymes et sels minéraux. Dans le mil chandelle, la proportion de germe par rapport à l'endosperme est plus forte que dans le sorgho et les grains des autres mils. L'huile présente dans le germe de sorgho est riche en acides gras polyinsaturés et analogue à l'huile de maïs (Rooney, 1978).


Chapitre 2 - Production et utilisation

Les données sur la production et la consommation du sorgho et des mils ne peuvent être considérées que comme les meilleures estimations disponibles, car, quel que soit le pays, il est difficile d'obtenir des chiffres pour la production des petites exploitations de subsistance. Il est également probable que la distribution et la consommation de ces céréales varie beaucoup dans les régions tropicales semi-arides selon les saisons, les communautés et les familles. Il n'existe pour le moment que peu ou pas de données détaillées et fiables sur la variété des produits dérivés du sorgho et des mils et l'importance de leur utilisation. Une des raisons de ce manque d'informations est que leur collecte nécessite de vastes enquêtes. Or, avant de procéder à de telles enquêtes, il faut envisager différents facteurs tels que le coût, le temps, la main-d'oeuvre, le transport et l'accessibilité des villages dans les zones rurales. Dans plusieurs pays en développement, l'insuffisance de l'infrastructure et d'autres limitations ont contribué au manque d'informations sur la consommation du sorgho et des mils.

Production de sorgho

En 1990, la production totale de sorgho dans le monde s'est élevée à 58 millions de tonnes, c'est-à-dire moins que les 60 millions de tonnes de l'année 1989 et les 62 millions de tonnes de 1988 (FAO, 1991). On a signalé une diminution du rendement de 1340 kg/ha en 1989 à 1 312 kg/ha en 1990, alors que pour ces deux années la superficie est restée stable autour de 44 millions d'ha. Le tableau 3 indique la superficie, le rendement et la production de sorgho dans diverses régions du monde.

Les cinq plus gros producteurs de sorgho dans le monde (tableau 4) sont les Etats-Unis (25 pour cent), l'Inde (21,5 pour cent), le Mexique (près de 11 pour cent), la Chine (9 pour cent) et le Nigéria (près de 7 pour cent).

TABLEAU 3 - Superficie, rendement et production de sorgho par régions, 1990

Région

Superficie

Rendement (kg/ha)

Production

  (milliers d'ha) (% du total)   (milliers de tonnes) (% du total)
Amérique du Nord et Amérique centrale 5 970 13,5 3 572 21 325 36,7
Asie 18 451 41,6 1 023 18 867 32,4
Afrique 17 799 40,1 718 12 784 22,0
Amérique du Sud 1 353 3,1 2614 3 537 6,1
Océanie 407 0,9 2 298 934 1,6
Monde (1990) 44 352   1 312 58 190  
Monde (1989) 44 695   1 340 59 991  

Soudce FAO, 1991.

TABLEAU 4 - Principaux producteurs de sorgho, 1990

Pays

Superficie

Production

  (Milliers d'ha) (% du total) (Milliers de tonnes) (% du total)
Etats-Unis 3 674 8,3 14 516 25,0
Inde 15300 34,5 12500 21,5
Mexique 1 830 4,1 6230 10,7
Chine 1 900 4,3 5 310 9,1
Nigéria 6 000 13,5 4 000 6,9
Argentine 688 1,6 2 016 3,5
Soudan 2 925 6,6 1 502 2,6
Ethiopie 870 2,0 1 000 1,7
Australie 406 0,9 933 1,6
Burkina Faso 1 250 2,8 917 1,6
Total 34 843 78,6 48 924 84,1
Monde 44 352 100 58 190 100

Source: FAO, 1991.

Ensemble, ces cinq pays représentent 73 pour cent du total de la production mondiale.

Sur la superficie totale consacrée au sorgho dans le monde, plus de 80 pour cent se situent dans les pays en développement. En Afrique, le sorgho est cultivé dans une large ceinture qui s'étend de l'Atlantique à l'Ethiopie et à la Somalie, bordée par le Sahara au nord et la forêt équatoriale au sud. Cette zone s'étend à travers les parties les plus sèches de l'Afrique orientale et australe, où les précipitations sont trop faibles pour que la culture du maïs réussisse. En Afrique subsaharienne, le sorgho est la deuxième céréale en importance après le maïs.

Grâce à leur rendement plus élevé par unité de superficie, ce sont l'Amérique du Nord et l'Amérique centrale qui produisent la plus forte quantité de sorgho (37 pour cent de la production totale). En Amérique centrale et du Sud, le sorgho est cultivé dans les parties les plus sèches du Mexique, d'EI Salvador, du Guatemala et du Nicaragua, dans les plaines sèches de l'intérieur de l'Argentine, les zones sèches du nord de la Colombie, le Venezuela, le Brésil et l'Uruguay. En Amérique du Nord, le sorgho est cultivé dans certaines parties des plaines du centre et du sud des États-Unis où les précipitations sont faibles et irrégulières. Le Kansas, le Texas, le Nebraska et l'Arkansas sont les principaux Etats producteurs, avec environ 80 pour cent de la production totale des Etats-Unis.

En Asie, le sorgho est largement cultivé en Inde, en Chine, au Yémen, au Pakistan et en Thaïlande. En Europe, sa production est limitée à quelques régions de France, d'Italie, d'Espagne et de pays du sud-est. En Océanie, l'Australie est le seul producteur important: la culture se concentre dans le Queensland et le nord du New South Wales, qui produisent environ 95 pour cent de la quantité totale.

La production mondiale de sorgho est passée de 40 millions de tonnes au début des années 60, à 66 millions de tonnes en 1979-1981, mais elle est redescendue à 58 millions de tonnes en 1990, bien que pendant la même période la superficie cultivée en sorgho n'ait que légèrement diminué, passant de 45,6 à 44,4 millions d'ha. La réduction de la production en 1979-1981 a été essentiellement due à un recul dans les deux principaux pays producteurs - les Etats-Unis et la Chine. Pour ces deux pays, la baisse a été de 6,2 millions de tonnes, soit 85 pour cent de la réduction de la production mondiale. Il y a plusieurs raisons à cela: une répartition imprévisible et erratique des précipitations (la majeure partie du sorgho est cultivée en sec), une baisse de la fertilité du sol, l'inefficacité des systèmes de production utilisés dans certains pays, les stress biotiques et abiotiques et le recul de la demande.

La croissance de la demande alimentaire (2,9 pour cent) pendant la période 1980-2000 dans 90 pays en développement dépassera de façon marginale la croissance projetée de la production agricole (2,8 pour cent) (FAO, 1981). Le déséquilibre sera cependant plus prononcé en Afrique (croissance de la demande, 3,4 pour cent; croissance de la production, 2,6 pour cent). Dans les pays les moins avancés, la croissance de la production sera probablement inférieure de 25 pour cent à celle de la demande.

En 1987-1989, les produits végétaux fournissaient l'essentiel de l'énergie alimentaire (90 pour cent ou davantage) et plus de 80 pour cent de la ration protéique quotidienne totale de quatre des dix plus gros producteurs mondiaux, à savoir l'Inde, la Chine, le Nigéria et le Burkina Faso (tableau 5). Au Mexique et au Soudan, ils fournissaient plus de 80 pour cent de l'énergie alimentaire.


Table des matières - Précédente - Suivante