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Un projet innovateur de lutte contre la trypanosomiase animale au Togo

G. Hendrickx et A. Napala

Les auteurs peuvent être contactés à l'adresse du projet: Projet de lutte contre la trypanosomiase, GCP/TOG/013/BEL, BP 114, Sokodé, Togo. Tél: (00228) 500007; fax: (00228) 500429.

Le Projet de lutte contre la trypanosomiase animale au Togo (GCP/TOG/013/BEL) s'est montré innovateur dans le domaine de la récolte de données. La méthode utilisée consiste à diviser le territoire national en carrés ayant un huitième de degré (soit 13,6 km) de coté. Les différentes variables sont récoltées dans chacun des 311 carrés ainsi obtenus.

Un premier type de variables concernant la maladie, les tsé-tsé et le bétail sont récoltées au cours d'enquêtes de terrain menées par les équipes du projet. A cette banque de données s'ajoutent, venant de sources diverses, des variables météorologiques, géographiques et topographiques mesurées au sol, ainsi que des données concernant la végétation et la température des nuages mesurées par satellite (projet FAO: Africa Real Time Environmental Monitoring Information System [ARTEMIS]). Enfin, on peut également incorporer, des données concernant la population humaine et l'utilisation des sols.

La banque de données ainsi constituée permet une meilleure compréhension de l'épizootiologie et de l'impact de la maladie à l'échelle du pays. Elle forme la base d'un Système d'information géographique (SIG), capable de produire des informations géographiques spatiales, de les manipuler et de les interpréter statistiquement. C'est un outil d'analyse puissant pour la planification de la lutte: il permet de diviser le Togo en zones d'action et de définir les approches de lutte adaptées à chaque zone. Il permet enfin la modélisation du problème et l'exécution de simulations rendant le modèle dynamique et l'introduction de questions du type «What if...?».

La résolution utilisée et la taille suffisamment grande des échantillons récoltés permettent également d'utiliser la banque de données en vue de prédire la présence de la maladie et de ses vecteurs (en collaboration étroite avec l'Université d'Oxford), ce qui sera utile pour les pays limitrophes, au climat similaire. Les prédictions basées sur les résultats du Togo remplaceront, en grande partie, au niveau du SIG, les données récoltées au cours d'enquêtes de terrain demandant un important investissement en temps, en personnel et en argent. N'ayant plus qu'un rôle de contrôle dans les zones à risque, ces enquêtes pourront être limitées dans le temps et l'espace.

1. Densités de bovine au Togo, d'après des équipes de prospection menées sur le terrain en 1993/94 - Cattle densities in Togo as recorded by ground survey teams in 1993/94 - Densidad de ganado vacuno en Togo registrada por equipos de encuesta sobre el terreno en 1993/94

2. Pourcentage de bovine au Togo présentant des caractéristiques baoulé (taurines), d'après des enquêtes sur le terrain effectuées en 1993/94 - Percentages of cattle in Togo showing Baoulé (taurine) characteristics, based on ground surveys carried out in 1993/94 - Porcentajes del ganado vacuno de Togo con características de Baoulé (bovino), basados en encuestas sobre el terreno revisadas en 1993/94

3. Pourcentages de la superficie totale (y compris les jachères) entrant dans le cycle de culture au Togo en 1987, à partir des cartes de couvert végétal établies par le PNUD et la FAO - Percentages of total land area (including fallow land) in the cultivation cycle in Togo in 1987, based on UNDP/FAO land cover maps - Porcentajes de la superficie total de sierra (barbecho inclusive) en el ciclo de cultivo de Togo en 1987, basado en los mapas de la cubierta vegetal terrestre del PNUD/FAO

4. Point d'abreuvement près de la frontière du Burkina Faso, où le bétail de type zébu est de plus en plus nombreux - Watering point near the Togo-Burkina Faso border, where zebu cattle are becoming increasingly numerous - Abrevadero cerca de la frontera entre Togo y Burkina Faso, donde el ganado de tipo cebú es cada vez más numeroso

Photo/Foto: David Rogers

En combinant ces résultats avec ceux obtenus par des essais pilotes de lutte, portant tant sur la faisabilité technique que sur l'acceptabilité socioéconomique des méthodes étudiées par le projet ou par d'autres stations de recherche dans la sous-région (Centre de recherche trypanosomose animale-Centre international pour la recherche-développement en zone subhumide [CRTA-CIRDES]), le projet est en mesure de proposer un programme de lutte intégrée contre la maladie adapté aux différentes situations rencontrées au Togo.

Le succès à plus long terme d'un tel programme de lutte dépend non seulement de son acceptation mais surtout de sa prise en charge par les bénéficiaires. A cet effet, le projet a entamé une vaste campagne nationale de sensibilisation des éleveurs. Dans une première phase de démonstration, au niveau de zones pilotes, la méthode est appliquée par les agents du projet. Par la suite, elle est reprise par des agents vétérinaires, d'Etat ou privés, à charge des éleveurs. Ces zones d'intervention seront progressivement étendues pour, finalement, couvrir un maximum du territoire national.

En vue d'assurer la poursuite de ces activités après l'arrêt du projet, celui-ci aide activement à l'installation de jeunes docteurs vétérinaires en pratique rurale. Cette opération cadre avec la politique générale de privatisation du secteur par le gouvernement. Pour ce faire, le projet met de jeunes vétérinaires en contact avec un bailleur de fonds, la Caisse française de développement (CFD), qui octroie des prêts individuels dans le cadre de son Programme d'assistance aux initiatives productrices de base (AIPB). Un accord est établi entre ces vétérinaires et le projet, engageant les deux parties:

· Les vétérinaires s'engagent à organiser des tournées de terrain pour promouvoir et appliquer les méthodes de lutte applicables dans leur zone ainsi que pour en obtenir la prise en charge financière par les éleveurs. Au cours de ces tournées, ils s'occupent également de tout autre problème de santé ou production animale en agissant comme vétérinaires privés indépendants.

· Le projet aide les vétérinaires à constituer leur dossier, les forme, les suit sur le terrain, et les rémunère selon les visites effectuées (permettant ainsi l'installation de tournées rurales). Les vétérinaires reçoivent une prime supplémentaire par éleveur «modèle» ayant accepté un suivi régulier et prenant tous les traitements à sa charge.

L'objectif est l'utilisation des tournées de lutte contre la trypanosomose, quelle que soit la méthode utilisée, pour obtenir une amélioration générale du suivi zoosanitaire des troupeaux. Cette activité n'en est qu'à ses débuts, mais elle a déjà suscité un grand enthousiasme parmi les bénéficiaires, éleveurs et vétérinaires.

La banque de données générée par le projet continuera d'être gérée par un comité national au sein des services de l'élevage, qui aura comme tâches principales la centralisation de l'Information en vue de sa mise à jour et la diffusion auprès des bénéficiaires (les vétérinaires privés et d'Etat et les éleveurs) de l'évolution de la situation sur le terrain et des méthodes de lutte.

Les résultats obtenus à ce jour sont très encourageants et montrent que des apports hautement technologiques (satellites, logiciels, SIG, etc.) peuvent être au service direct des éleveurs. Bien que tous les objectifs n'aient pas encore été atteints, le projet est déjà cité en exemple pour la sous-région.

Dans ce cadre, un programme régional de lutte contre la trypanosomose dans les zones récemment libérées de l'onchocercose sera mis en route par la FAO. Actuellement, ce programme est à la recherche de financement auprès de plusieurs bailleurs de fonds. La première phase du programme devra, sur le modèle de ce qui a été fait au Togo, dresser l'inventaire de la situation dans les pays de la région et démarrer des formations et des essais pilotes.

Les données satellites utilisées par le projet: Indices de végétation normalisés (NDVI), Nuages froids (CCD [Cold Cloud Duration] servant à estimer la pluviométrie) et données thermiques au sol, sont disponibles sur demande (par décade et à une résolution de 8 km) au Bureau régional de la FAO à Accra (Projet ARTEMIS, FAO, Accra).

Le projet diffuse régulièrement ces résultats; il participe à des conférences internationales et à des réunions de fonctionnaires de liaison, et publie dans diverses revues. Il entretient des contacts suivis avec d'autres institutions européennes (Institut tropical d'Anvers, Université d'Oxford, Université de Dublin) et de la sous-région (CRTA-CIRDES, Bobo Dioulasso) dans le cadre de programmes de recherche et de formation; il organise également des visites auprès d'autres projets. Le projet envisage, dans un avenir proche, d'établir des contacts sur le terrain avec de jeunes vétérinaires privés d'autres pays en vue d'échanger leurs expériences; il souhaite donc entrer en contact avec toutes personnes intéressées.


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