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Politique de régularisation foncière pour une agriculture durable en République Démocratique Populaire Lao 1


Politique de régularisation foncière pour une agriculture durable en République Démocratique Populaire Lao 1

(1 Cet article constitue une version abrégée du rapport final du projet SAT - LAO/92/01/T. La version intégrale est disponible auprès de M. Groppo.)

Paolo Groppo

Mohamed Ali Mekouar

Gilles Damais

Ketkeo Phouangphet 2

(2 Paolo Groppo est fonctionnaire au Service de la réforme et colonisation agraires de la FAO: Mohamed Ali Mekouar est fonctionnaire au Bureau juridique de la FAO; Gilles Damais est consultant auprès de l'Institut de recherches et de application de méthodes de développement (IHAM) (Paris): Keikeo Phouangphet est consultant national Lao.)

Bien que le Laos soit un pays encore peu peuplé, la pression foncière s'exerçant notamment sur les plaines alluviales s'est accrue durant les 10 dernières années. Face à l'épuisement des réserves en terres non appropriées, les échanges fonciers s'y vent multipliés. L'éclosion d'un marché foncier monétarisé et souvent de type spéculatif, susceptible de provoquer, à terme, une réduction des champs et des espaces fourragères au préjudice de l'agriculture paysanne, a amené le Gouvernement de la République démocratique populaire lao à demander une expertise de la part de la FAO en vue de la formulation d'un document de base et des orientations politiques portent sur une utilisation durable des ressources foncières dans le secteur agricole. Un diagnostic systémique a été réalisé dans deux zones prioritaires périurbaines proches de Vientiane, en fonction des questions d'accès aux ressources foncières et de leur utilisation. Deux grandes forces s'y rencontrent: d'une part, le développement de la ville elle-même qui, bloquée au sud, va s'élargir dans les seules directions possibles, le nord et le nord-est; d'autre part, I'arrivée par ce même réseau routier de migrants provenant de plusieurs régions du pays en quantité croissante. Les conclusions et recommandations élaborées par les auteurs couvrent, à la fois, les aspects politico-juridiques en matière agrofoncière et les mesures d'accompagnement d'ordre technico-économique.

L'objectif de cette étude était d'aider le Gouvernement de la République démocratique populaire lao à formuler un document de base et des orientations politiques portent sur une utilisation durable des ressources foncières dans le secteur agricole, au profit de la petite paysannerie. Les interrogations qui ont surgi des premiers entretiens avec la contrepartie nationale ont amené à focaliser l'attention sur les deux points suivants:

Compte tenu de la localisation du travail de terrain réalise, il faut cependant insister sur la limitation du domaine de validité géographique de l'étude, circonscrit à la plaine de Vientiane, notamment dans un rayon périurbain d'une trentaine de kilomètres autour de la ville.

CADRE GÉNÉRAL DE L'ÉTUDE

Bien que le Laos soit un pays encore relativement peu peuplé, la pression foncière s'exerçant notamment sur les plaines alluviales où se pratique la riziculture inondée s'est accrue durant les 10 dernières années. Face à l'épuisement des réserves en terres non appropriées, les échanges fonciers stylent multipliés. Par ailleurs, la politique économique de libéralisation poursuivie par le gouvernement s'accompagne d'une volonté explicite d'organiser le marché foncier, dans le triple objectif:

Méthodologie

L'approche méthodologique utilisée dans ce projet est celle cite «systémique.. L'attention ne porte pas seulement sur l'analyse des éléments constitutifs de la réalité agraire, mais plutôt sur leurs interactions, leurs origines et effets, pour arriver à proposer une stratégie d'action par objectifs clairement identifiés et hiérarchisés.

Tout d'abord, la mission s'est entretenue avec des témoins privilégiés de la situation agraire (fonctionnaires, experts d/institutions et de projets dont les activités sont liées à l'objet de l'étude, techniciens agricoles et chefs de villages) avec, pour objectif, I'élaboration d'une préhypothese de typologie paysanne.

Finalement, un échantillon raisonné a été sélectionné dans les deux zones choisies (voir Les deux zones de travail p. 65). Les entretiens ont été menés avec les chefs de famille et, quand cela était possible, avec leurs épouses et/ou autres membres de la famille. Des entretiens complémentaires ont ensuite été effectués avec les chefs de huit villages, eu égard aux utilisations des espaces villageois et aux modalités des transactions foncières.

Les hypothèses retenues pour l'analyse économique des données. Dans le cadre de ce projet, il a été décidé de retenir les conditions les plus ordinaires de production, celles qui, dans l'esprit des paysans interviewés, pouvaient être considérées comme «normales». Bien que la production agricole soit par définition aléatoire, soumise à un grand nombre de variables physico-économiques, tout producteur raisonne à partir d'itinéraires techniques normaux, dont la succession ordonnée doit amener à des résultats plus probables que d'autres. Le jugement fanal sur le résultat obtenu étant alors un compromis entre les attentes initiales et les modifications survenues pendant la saison productive.

En ce qui concerne l'analyse économique, les concepts utilisés vent essentiellement ceux de marge brute et de marge nette, rapportées tant à l'unité de surface (ha) qu'à l'unité de travail (actif agricole).

Les résultats: critères de différenciation et nombre de type identifiés. Les critères retenus pour la différenciation des types vent essentiellement lies aux performances économiques de leurs systèmes de production. Pour ce qui est du nombre de types identifiés et retenus, le souci de rendre opérationnelles les recommandations qui sortiront du diagnostic nous a amené à réduire le nombre total de types à moins d'une dizaine. Ces types vent décrits et analysés en détail à la page 73.

LES DEUX ZONES DE TRAVAIL

Le milieu agroécologique

Le district de Xaythani est situé dans la partie nord de la préfecture de Vientiane, à une distance moyenne d'une quinzaine de kilomètres, le long de la RN 13 Sud, entre 17°59' et 18°18' de latitude nord et á 103°06' de longitude est. La superficie totale du district est d'environ 137 635 ha. Le district de Naxaythong est situé dans la partie nord-est de la préfecture de Vientiane, à une distance moyenne d'environ 20 km sur la RN 13 Nord, entre 18°18' et 18°20' de latitude nord et entre 102°37' et 102°15' de longitude est. La surface totale du district est d'environ 90 800 ha.

La plaine alluviale de Vientiane présente un relief mollement ondulé, avec des pentes variant entre 0 et 6 pour cent, borde, vers la partie est et nord-est, par des collines de piémont. La plaine de Vientiane présente deux cours d'eau principaux: le Mekong et un des ses amurants plus importants, le Nam Ngum, qui a donné lieu aux terrasses alluviales de la partie sud de la plaine. En se basant sur le peu d'informations disponibles, notamment la carte FAO-UNESCO, les sols seraient essentiellement des Acrisols gleyiques et des Gleysols eutriques. Sur les terrasses alluviales, on trouve également des Acrisols ferriques et des Cambisols ferriques. Les Acrisols ferriques vent essentiellement des sols de fertilité pauvre et possèdent un faible potentiel agricole, ce qui est du principalement à la présence de gravier latéritique dans le profil et, parfois, à leur faible profondeur.

La plaine de Vientiane présente un climat tropical très largement influencé par un régime de mousson. qui s'étend de mai à septembre/octobre, et qui apporte une pluviométrie importante (entre 1 500 et 2 000 mm, en augmentation en passant du sud-ouest au nord-est) mais aussi assez irrégulière, dans l'espace comme dans le temps. La température et l'humidité de l'air ne vent pas des contraintes pour la production végétale annuelle. En effet, la température moyenne pendant la saison esche est d'environ 22 á 24 °C, alors quelle se situe autour de 27 °C pendant la saison des pluies. Pour ce qui est de l'humidité relative, elle varie entre 60 et 70 pour cent en saison sèche, pour monter à 75-85 pour cent en saison de pluies.

La surface agricole est constituée par les champs de riz, situés sur les terrasses basses, les bas-fonds inondés, les bassins collégiaux et sous les diptérocarpes des surfaces érodées. Sur les bourrelets de berge, on cultive la canne à sucre, le tabac, le manioc et des légumineuses alimentaires. Concernant la production agricole, le riz inondé est largement dominant. Pour ce qui est de la production animale, I'augmentation la plus sensible, dans les deux zones, concerne la volaille qui a plus que doublé en moins de 10 ans. Pour les bovine, la tendance de fond dans les deux zones est celle d'une augmentation en termes absolus, en parallèle avec l'ouverture économique du pays, mais avec une certaine stagnation si on rapporte le cheptel à la population totale du district.

Les caractéristiques de ce milieu ont deux conséquences majeures sur l'agriculture pratiquée dans la zone:

Une dynamique de colonisation agricole récente

L'essentiel de la colonisation agricole des deux régions étudiées a démarré dans les années 50. Les chefs de village ont joué un rôle central dans ce processus de colonisation. Lorsque des nouveaux migrants vent arrivés dans la région, ils se vent fait attribuer des étendu es importantes de terre (parfois 10 ha et plus) prises sur la réserve villageoise (terres communales non exploitées). qu'ils ont progressivement défrichées et cultivées en paddy; les surplus fournis par cette culture du paddy ont été investis dans des troupeaux de buffles et de bovine.

Jusqu'au début des années 80, là où subsistait suffisamment de terre libre dans la réserve communale, chaque nouveau foyer créé lors du mariage pouvait se voir attribuer par le chef du village. sur la base d'un mécanisme similaire, un droit` d'exploitation sur une parcelle qui lui permettait de nourrir sa famille après défriche. La terre effectivement exploitée par cette famille devenait progressivement possession familiale et elle était transmise par héritage aux générations suivantes. Mais il ne s'agit pas d'un droit de propriété. Toute terre non exploitée pouvait théoriquement être récupérée par le chef de village et réatribuée, temporairement dans un premier temps, à une famille qui en avait fait la demande.

Les terroirs villageois: occupation et utilisation de l'espace

Les chefs de village semblent connaître les limites extérieures des terroirs villageois, mais ils en ignorent l'extension géographique, même approximative. Cela peut s'expliquer, probablement, par le fait qu'en dehors des rizières les autres catégories de terres n'ont pas encore été inventoriées, ou ne l'ont été que très partiellement, dans la plupart des cas Dans l'espace villageois, on trouve généralement quatre catégories de terres:

L'espace occupé par les rizières, dans l'ensemble du village, est partout connu avec précision. Une des explications semble être d'ordre fiscal. Auparavant, les rizières ont été recensées pour lever impôt agricole. Aujourd'hui, avec l'instauration d'un impôt de type foncier, assis en grande partie sur la surface cultivée, les superficies des rizières devraient être connues avec une précision croissante.

Les superficies des autres espaces agricoles possédés par la famille - en fores claire ou en prairie marécageuse - sont le plus souvent ignorées par les chefs de village. Assez rapidement, toutefois, la déclaration foncière à des fins fiscales devrait remédier à ce flou, même dans l'hypothèse d'une carence de l'administration. Pour éviter le risque d'une «`dépossession" sanctionnant l'absence de déclaration, on peut penser que les paysans hésiteront de moins en moins à la faire.

Les espaces collectifs, qu'il s'agisse de la fores claire communautaire ou, surtout, de la fores dense villageoise vent encore plus méconnus en termes de surface. A défaut d'inventaires précis, et faute en l'occurrence de palliatif fiscal - les espaces collectifs n'étant pas imposés -, cette situation risque de perdurer.

Quant à la forêt dense proche du village, son potentiel en surface est difficilement évaluable car la superficie exacte n'en est connue que dans deux cas Sur cinq forets cites, "villageoises'', deux vent en fait partages - en indivision - avec des villages voisins. II apparaît donne que l'espace collectif villageois est globalement fort réduit, quand il n'est pas inexistant.

La répartition du foncier en possession individuelle. L'examen des tailles des terres possédées par une même famille révèle des variations de grandeur le plus souvent considérables entre les plus petites parcelles et les plus gros patrimoines: 1/130 (écart maximum); 1/S (écart minimum). Selon toute vraisemblance, ces décalages vent appelés à se creuser davantage sous l'influence conjuguée: (i) d'une accentuation du morcellement des parcelles induite par les transmissions successorales; et (ii) d'une augmentation rapide des ventes de terre aux citadins de la capitale.

Déjà, dans la plupart des villages visités, une nouvelle catégorie commence à apparaître dans les deux zones, celle des familles sans terre. Pour ces familles, les chances d'accès à la propriété foncière dans leurs espaces villageois respectifs semblent quasiment nulles. Sauf acquisitions aux prix du marché - nettement prohibitifs pour la grande majorité des paysans -, la seule manne qui reste envisageable pour ces familles est la traditionnelle allocation de terre par le chef de village.

Les règles d'accès aux espaces collectifs. Aussi limités scient-ils, ces espaces collectifs ne vent pas tous librement accessibles aux villageois. Ainsi, les forets denses vent partout légalement protégées: les usages coutumiers (ramassage du bois mort, pâturage, chasse éventuellement) y vent tolérés, mais la coupe d'arbres et la mise en culture y vent interdites. Bien quelles recèlent parfois quelques champs «clandestine» en défriche-brûlis, une expansion ouverte de l'agriculture ne peut donne y être actuellement envisagée.

Certaines caractéristiques communes concernant l'accès à l'espace ont été décelées. A la question de savoir si, en saison des pluies. un champ non cultivé est librement accessible aux animaux pour se nourrir, stil n'est pas clôturé, la réponse a été invariablement et résolument positive. II y a donne là un espace fourrager potentiel, bien que fort réduit car, d'une part, les champs en possession des villageois vent pour la plupart cultivés; et, d'autre part, les terres acquises par les citadins, bien que le plus souvent laissées incultes, vent en majeure partie clôturées ou en vole de l'être.

Inversement, á la même question mais concernant des champs clôturés, la réponse est toujours négative, quand bien même ils ne porteraient aucune culture. L'argument avance pour justifier cette affirmation est que le «propriétaire est libre» ou «a le droit» de se clore. d'autant plus qu'il paye un impôt foncier. Mais la question parait souvent incongrue car. en pratique, très rares vent les villageois qui pensent à clore leurs champs incultes, à la fois parce qu'ils n'en perçoivent pas l'intérêt et, surtout, en raison du coût important de la clôture. Seuls les riches. en particulier les citadins, peuvent se permettre cette dépense. Néanmoins, dans un village, trots parcelles ont été clôturées par des paysans, afin d'y alimenter leur bétail pendant la saison des pluies. Deux enseignements semblent pouvoir être tirés de ces réponses:

La mise en valeur des terres agricoles étant une obligation légale, la question a été posée de savoir ce qu'il advient d'une terre laissée inculte par son propriétaire, qu'il soit du village ou nouvel acquéreur. S'agissant des villageois, les réponses ont été de divers ordres:

En ce qui concerne les citadins nouveaux acquéreurs, on observe la même diversité de réponses, notamment: (i) laisser une terre inculte «ne pose pas de problème: il suffit de payer impôt»; (ii) si impôt n'est pas payé pendant plus de trots ans, le propriétaire «risque de perdre sa terre»; ou encore (iii) «elle doit lui être confisquée».

Les modes d'exploitation actuels du milieu

Des systèmes de production centrés sur la culture du riz et l'élevage. Bien que la densité de la population au Laos soit relativement faible, il n'en demeure pas moins vrai qu'il existe, déjà aujourd'hui, une pression démographique importante sur les terres cultivées en riz. En prenant les zones enquêterais, nous trouvons des valeurs supérieures ou égales à cinq personnel par hectare de riz cultivé; de là les signes de dégradation des terres, d'épuisement des sols et de destruction de la fores rencontrés dans les districts visités au cours des missions réalisées.

La majorité des familles possède entre deux et 10 ha de terre, essentiellement consacrés à la culture du riz inondé en saison des pluies, deux à 20 fêtes de bétail (buffles de travail et bovine pour le trait et la production de viande), ainsi que, en plus des outils manuels traditionnels, une charrue ou araire et une herse. Les buffles vent utilisés pour la préparation du sol de la parcelle de paddy dès le mois de mai, lorsque celle-ci est suffisamment ameublie par les premières pluies.

Le riz est repiqué dès que le niveau d'eau recouvrant la parcelle le permet. Les paysans jouent, á la fois, sur la diversité variétale (cinq á 15 variétés cultivées) et sur les dates de repiquage pour étaler la récolte du paddy sur au moins deux mois (novembre et décembre) et limiter les risques liés aux fluctuations de l'alimentation en eau de la plante. La production est d'abord destinée à l'autoconsommation familiale, seuls les excédents étant vendus. Des cultures maraîchères, éventuellement vendues, vent réalisées dans le jardin près de la maison d'habitation.

Le bétail est alimenté essentiellement par les bordures des champs et des routes, en saison des pluies; par la paille et la vaine-páture sur les chaumes de riz et dans les quelques espaces forestiers ou pastoraux en indivis qui subsistent encore, pendant la saison sèche. C'est de lui que provient l'essentiel des revenue monétaires des familles. Il constitue également la principale source d'épargne. En saison des pluies, la pèche devient une activité fondamentale; elle se pratique jusque dans les rizières, puisque les petite étangs, les rivières et les rizières vent finalement tous inondés par une même lame d'eau continue.

La reproduction de la fertilité. Mis á part les quelques agriculteurs utilisant de l'engrais chimique, la reproduction de la fertilité semble être assurée par les mécanismes complémentaires suivants:

Une différenciation croissante. La différenciation des systèmes de production trouve son origine dans le processus même de colonisation de la région. Les premiers migrants (entre 1945 et 1965) se vent fait attribuer des étendues importantes de terre, qu'ils ont progressivement défrichées et cultivées en paddy; les surplus fournis par cette culture du paddy ont été investis dans des troupeaux de buffles et de bovine; dans certains cas, la revente d'une partie des troupeaux a même permis l'achat de surfaces supplémentaires à partir de la fin des années 80. Au contraire, les migrants tardifs (fin des années 60) n'ont pas été en mesure de réserver de grandes parcelles; leur accumulation s'en est trouvée fort réduite. Certains doivent toujours consacrer l'essentiel des ressources familiales en force de travail à des activités salariées non agricoles.

Cette dynamique de différenciation paraît se renforcer dans les deux zones analysées. Cela semble lié à l'intégration croissante des paysans au marché:

Cette différenciation repose en première instance sur la possibilité ou non qu'ont les paysans de vendre une partie de leurs terres, et du prix auquel elles vent vendues, lui-même souvent fonction de l'accessibilité du terrain, de sa proximité de la route goudronnée et, éventuellement, des perspectives de son urbanisation. Une fois transformée en monnaie, cette ressource foncière est investie par le paysan en capital de production, selon des stratégies différentes: (i) achat de matériel agricole (tracteur, motoculteur, batteuse, etc.) ou de matériel de transformation (décortiqueuse) pour la prestation de service dans le village; (ii) diversification agricole et investissement dans des cultures destinées au marché, plantations d'ananas, par exemple, sur la base du travail salarié; (iii) diversification vers le commerce du bétail, enfin, pour un petit nombre d'entre eux.

LE DÉVELOPPEMENT D'UN MARCHÉ FONCIER: QUEL IMPACT SUR LES SYSTÈMES DE PRODUCTION?

Face à l'éclosion d'un marché foncier monétarisé et souvent de type spéculatif, susceptible de provoquer, à terme, une réduction des champs et des espaces fourragères au préjudice de l'agriculture paysanne, la mission a inclus, parmi ses réflexions, les modes d'accès et de tenure foncière, ainsi que les possibles répercussions sur l'économie paysanne d'une politique de titularisation foncière.

L'hypothèse avancée est la suivante: en milieu rural au Laos, on ne possède pas la terre en tant qu'individu, mais la revendication individuelle sur une terre dépend de l'insertion dans des réseaux plus vastes, variables dans le temps. Une erreur serait de considérer ceux-ci comme statiques. Et cette dynamique s'applique aux personnel comme à l'espace physique: tour à tour, les friches peuvent être définies comme vacantes ou appropriées. Ce que signifie la notion de terre comme bien marchand (commodity) ne trouve pas toujours son équivalent sur le terrain: les agents appartiennent simultanément à de multiples groupements, volontaires ou non, qui définissent des droits différents.

La superposition et l'interconnexion de plusieurs droits est un trait récurrent. Les droits coutumiers et les titres enregistrés entreraient ainsi en compétition; la résolution des conflits s'effectuant en fonction des capacités d'accès à tel ou tel groupe dont chacun dispose, il en découlerait une marginalisation grandissante de l'économie agricole familiale (la partie la plus faible) dans les zones analysées.

Le développement des transactions foncières

A l'heure actuelle, les transactions foncières qui se réalisent dans la zone enquêterai vent principalement représentées par les ventes de parcelles villageoises à des acquéreurs citadins. Mis à part ce type de cessions, en nette progression, il n'y a pas d'autres formes notables de transactions foncières, si ce n'est quelques locations de parcelles agricoles.

Les ventes immobilières. Afin d'estimer l'évolution quantitative récente des ventes immobilières dans les espaces villageois, il a été demandé aux chefs de village d'indiquer les superficies des parcelles vendues au cours, respectivement. des cinq et des deux dernières années. Dans cinq villages sur huit, les superficies des terres cédées pendant les cinq dernières années vent inconnues. En revanche, dans tous les villages visités, elles vent chiffres avec précision pour ce qui concerne les deux dernières années.

Pour ce qui est du type de terres vendues, il s'agit aussi bien de rizières que de forets claires, avec une certaine prédominance spatiale de ces dernières. En général, les parcelles cédées ont une caractéristique commune: celle être situées en bordure ou á proximité des routes. Cela s'explique par la nature essentiellement spéculative de ces transactions: en effet, acheter des parcelles enclavées constituerait un lourd handicap pour de futures mises en valeur foncières, en particulier dans l'immobilier périurbain. Ces motivations largement spéculatives semblent acte stress par l'affectation des terres achetées. C'est manifestement le cas des parcelles, fort nombreuses, qui sont simplement mises en réserve, sans aucune réaffectation productive.

S'agissant des acquéreurs des terres cédées, ce vent presque tous des citadins, qui proviennent toujours de la proche capitale Vientiane. Un seul village fait exception á cette tendance générale. L'explication est. clairement, d'ordre économique: alors que certains citadins ont acquis un pouvoir d'achat - ou une capacité d'endettement - qui leur permet d'accéder au marché de l'immobilier, les paysans n'en ont guère les moyens. car en général ils vent démunis, même strict ont parfois un réel besoin de terres agricoles pour assurer leur propre subsistance.

Eu égard aux modalités formelles des opérations de vente, elles vent très semblables d'un village à l'autre. En pratique, la vente est toujours précédée par une autorisation du chef de village. Le plus souvent, I'autorisation est accordée sans difficulté, après vérification par le chef de village de la réalité et de la régularité du droit de propriété de la parcelle destinée à la vente. II arrive cependant qu'elle soit refusée, soit pour des raisons d'opportunité (par exemple, le candidat vendeur n'aurait plus assez de terres pour subvenir à ses besoins), soit plus généralement pour des raisons de légalité. L'autorisation semble ainsi remplir une fonction utile de filtre des transactions douteuses.

L'acte former attestant la cession est constitué par un certificat de transfert, établi par des fonctionnaires du district du lieu de la vente. L'opération commence par une déclaration de possession de la parcelle par le vendeur, suivie par l'enquête et l'autorisation du chef de village. Les fonctionnaires du district procèdent ensuite au mesurage de la parcelle et portent ses limites extérieures sur un croquis, qui est annexé au certificat de transfert. Ce dernier est enfin délivre aux intéressés, après acquittement des frais afférents au coût administratif de l'opération. II peut s'agir d'un montant forfaitaire ou d'une somme proportionnelle à la superficie de la parcelle. Dans les deux cas, ces frais (généralement payés par l'acheteur) vent fixés au niveau des villages et vent plus ou moins élevés d'une localité à l'autre.

Locations de terres. Dans deux villages sur huit, aucune terre n'a été mise en location. Dans les six autres villages, les parcelles louées représentent des superficies fort réduites et ne concernent que quelques rares familles. Les locations en cours peuvent être classées en deux catégories: celles conclues entre des villageois et des paysans extérieurs au village, d'une part, et celles conclues entre des habitants du même village, d'autre part, les secondes étant relativement plus fréquentes que les premières.

Dans deux de ces six villages, toutes les parcelles louées l'ont été au profit d'exploitants non-villageois. Pourtant, dans les deux cas, les familles sans terre vent nombreuses, mais cela n'a pas empêché que des paysans extérieurs au village viennent y occuper, en le louant, le peu d'espace agricole disponible. Dans les quatre autres villages, en revanche, toutes les parcelles prêtées ont été données en location à des paysans qui y résident. Dans deux de ces villages, Ies terres louées appartiennent à des personnel qui, n'habitant plus le village, ne peuvent pas les exploiter elles-mêmes. Au total, les superficies louées ne dépassent guère une trentaine d'hectares, ce qui représente un espace de culture assez marginal.

Les terres louées sont, pour la plupart, des rizières déjà aménagées, que leurs propriétaires n'ont pas intérêt à laisser longtemps en friche. Le prix du foyer, variable selon les villages, est en principe convenu d'un commun accord entre bailleur et locataire. Le foyer est presque toujours déterminé et payé en nature (riz). En général. il est exprimé en pourcentage de la production (de 10 á 20 pour cent). II s'agit donne d'une certaine forme de métayage, plutôt qu'une simple location.

Développement du marché foncier, privatisation de l'espace fourrager et crise des systèmes de production

Le développement du marche foncier se traduit concrètement par deux phénomènes pouvant contribuer à affaiblir la paysannerie de la plaine de Vientiane.

Spéculation et accroissement de la différenciation sociale. La différenciation sociale tend á s'accroître dans les zones visitées. Les paysans qui disposent déjà de surfaces fonciers importantes (5 á 10 ha) et qui, en outre, ont la possibilité de vendre á un prix très élevé, vent en mesure d'accroître rapidement leur capital de production, tout en conservant une surface agricole suffisante. Ils pourraient vite devenir de véritables entrepreneurs agricoles utilisant de la main-d'_uvre salariée.

A l'opposé, les familles disposant des surfaces les plus réduites (I à 2 ha). ne pouvant pas vendre une partie de leur exploitation, arrivent probablement á peine à satisfaire leurs besoins minimaux sur l'exploitation. Dans le contexte lao actuel d'intégration croissante au marché et de libéralisation progressive de l'économie, il est probable qu'il leur sera difficile de résister longtemps á la prolétarisation. Entre 1992 et 1993, le prix du paddy payé au producteur est passé de 110 kip (fin 94 1 dollar valait 720 kips) á moins de 70 kip, en raison de la concurrence du riz thaï importé à Vientiane. Le risque existe donne de voir grandir les flux de main-d'_uvre vers Vientiane en quête de travail salarié.

Or les perspectives de développement à moyen terme de l'industrie à Vientiane ne sont, semble-t-il, pas suffisantes pour que cet afflux de main-d'_uvre supplémentaire à la recherche d'un emploi ne soit pas préoccupant. Les secteurs aujourd'hui en expansion à Vientiane vent essentiellement les services (commerce, hôtellerie), fables consommateurs de main-d'_uvre, dont le fulgurant développement ces dernières années est un effet direct de l'ouverture du pays. Une fois que ce processus sera achevé et que le retard en matière hôtellerie et de commerce sera rattrapé, on peut craindre un ralentissement rapide de la demande en main-d'oeuvre non qualifiée.

Réduction des espaces fourragers, crise de l'élevage, crise de la fertilité des parcelles. La mise en place de clôtures entraîne une réduction progressive de l'espace fourrager villageois. Aussi bien pendant la saison sèche que pendant la saison des pluies, les parcelles vendues et clôturées ne vent plus accessibles au bétail villageois. Les producteurs qui disposent d'un espace fourrager propre leur paraissant suffisant pour alimenter leur troupeau vent de ce fait incités eux aussi à clore leurs parcelles. Cette réduction de I'espace fourrager villageois induit une hausse du chargement des parcelles non closes. Le «prélèvement. réalisé par les animaux des voisins sur les parcelles fourragères des producteurs possédant un nombre réduit d'animaux s'en trouve accru. Lorsqu'il devient excessif et que, dans un certain nombre de villages, des problèmes de déficit fourrager surviennent, les producteurs commencent á clôturer leurs parcelles en saison des pluies, pour en réserver l'usage à leurs propres animaux.

Globalement, I'alimentation du bétail est aujourd'hui effectivement plus difficile qu'il y a quelques années, d'autant plus que le taux d'accroissement en termes absolus du troupeau entre 1982 et 1993 a été de 40 pour cent. Ces difficultés ont sans doute des répercussions sur la mortalité dans les troupeaux, qui peut parfois dépasser les 50 pour cent. Or les herbivores jouent un rôle essentiel dans les systèmes de production de la région:

La généralisation des clôtures, parce quelle entraînera une raréfaction des ressources fourragères, risque donne de plonger les systèmes de production villageois dans une cerise profonde. Cette probable crise de l'élevage risque d'accentuer davantage la différenciation paysanne et les tendances à la migration vers la ville en quête d'un emploi salarié permanent.

Cependant, si l'enclosement des parcelles permet une intensification et le développement de véritables cultures fourragères (historiquement freiné par les règles d'utilisation collective du sol), il peut néanmoins être bénéfique. Certaines pratiques en ce sens ont été décelées dans la région étudiée: maintien d'espèces arborées spécifiques, semis et entretien de prairies.

C'est pour affiner ces conclusions et formuler des recommandations les plus adaptes possibles en matière de soutien á la petite paysannerie qu'une typologie des systèmes de production des deux zones étudiées a été réalisée à partir d'une série d'entretiens approfondis avec des familles paysannes.

TYPOLOGlE DES SYSTEMES DE PRODUCTION AGRICOLE: FONCTIONNEMENT ET ÉVOLUTION

Les entretiens approfondis réalisés au cours du travail de terrain ont été analysés, conformément á la problématique générale de l'étude, dans l'objectif d'identifier, d'une part, la situation de l'exploitation relativement á la question de l'enclosement des espaces fourragères - le producteur a-t-il intérêt à une appropriation individuelle de l'ensemble de l'espace fourrager ou, au contraire, risque-tout de s'en trouver pénalisé?; et d'autre part, le niveau d'accumulation et la reproductibilité du système.

On a ainsi élaboré une typologie en trots grands types de systèmes de production, chaque type se subdivisant à son tour en différents sous-types. Ces trots types peuvent être repérés sur la base d'un critère économique synthétique: la marge nette agricole par actif. Dans la figure 1, on a situé les 32 exploitations en fonction de la superficie disponible et de la marge nette par actif. On a situé les limites entre types á 120 et 240 dollars annuels de marge nette par actif:

Les différents types de système

Le type I: les petite paysans. Les producteurs de type I sont soit des migrants récents, arrivés il y a moins de 20 ou 30 ans dans la plaine de Vientiane en provenance de Savanakhèt, de Champassak ou de Thaïlande; soit des jeunes qui viennent de s'installer sur une partie des terres familiales obtenues par mariage ou héritage. Ils disposent de peu de terre agricole: 0,64 ha/actif (0,63 á Xaythani et 0,65 á Naxaythong). Certains vivent uniquement du salariat agricole journalier et ne disposent que de quelques mètres carrés de jardin autour de leur maison d'habitation. Les superficies en paddy vent réduites - en moyenne 0,41 ha/ actif - et la terre est de mauvaise qualité; les rendements moyens du riz vent de 1,13 tonne à l'hectare (1,01 à Xaythani et 1,2 à Naxaythong). lls n'ont en général pas d'espace fourrager propre: les animaux vent essentiellement nourris sur les chaumes de paddy et en vaine-pâture. On peut distinguer trots sous-types à l'intérieur de ce type 1:

Le sous-type la: les prolétaires ou semi-prolétaires (enquêtes 2, 6, 10, 12, 15, 16). Ils vivent essentiellement du travail salarié, en zone urbaine (district de Naxaythong) ou dans d'autres exploitations agricoles (district de Xaythani), ainsi que de la location annuelle de champs de paddy (de 0,5 à 2 ha selon la disponibilité du moment dans le village), afin d'assurer une partie de leurs besoins alimentaires. Lorsqutils ont des animaux, ces producteurs vent très pénalisés par la raréfaction de l'espace fourrager indivis. Les paysans de ce sous-type se rencontrent beaucoup plus fréquemment dans le district de Naxaythong que dans celui de Xaythani.

Figure 1: Typologie des producteurs (répartition par types)

Dans l'exploitation type, on essaie d'utiliser au maximum la main-d'_uvre familiale disponible; on bat le paddy manuellement. Malgré une certaine intensification du système de production, I'absence de possession de terre fragilise ce type d'exploitation. La marge nette par actif est très faible (il faut payer un foyer sur la terre) et la part de revenu provenant d'un travail hors-exploitation - donc sans sécurité - est d'autant plus grande que la surface louée une année donnée est réduite. Certains paysans du sous-type Ia ne trouvant pas de terre á louer se consacrent exclusivement au salariat dans le village (travail journalier) ou à Vientiane (emploi permanent d'un des membres de la famille).

Le sous-type Ib: les petite paysans (enquetes 11, 13. 19, 23, 32). Ils vent mieux dotés en moyens de production que les précédents. Ils disposent notamment d'un peu de bétail (un à trots buffles), mais pas des surfaces en paddy suffisantes pour être en mesure de vivre essentiellement de l'agriculture, laquelle ne représente qutentre 40 et 70 pour cent de leur revenu total. La surface disponible dans ces exploitations varie de 0,6 à 0,85 ha/actif. Disposant de très peu de ressources fourragères propres, leurs animaux vent essentiellement nourris sur la base de la vaine-pâture. Ils n'ont sans doute pas intérêt á voir se généraliser les clôtures dans la région, car en contraignant á une réduction du nombre d'animaux qu'il serait possible de maintenir sur la parcelle, cela accroîtrait la tendance à la prolétarisation du groupe.

Ces agriculteurs cherchent à diversifier leurs activités productives, afin d'assurer le meilleur emploi possible de la main-d'ocovre disponible: mais le manque de moyen, et notamment l'exiguïté des surfaces, ne leur permet pas de vivre uniquement de l'agriculture.

Le sous-type Ic: les petits agriculteurs-entrepreneurs (enquêtes 29, 30). Les paysans de ce sous-type ont très peu de terre disponible (0,4 et 0,7 ha/actif) et une surface en paddy très limite (0,2-0,3 ha/ actif). Pour faire face aux faibles possibilités de développement de l'agriculture sur de telles parcelles, ils ont choisi d'investir dans du matériel agricole et d'essayer de se recycler en tant que petite entrepreneurs (notamment à Xaythani). Ce vent des agriculteurs immigrants, qui ont en général démarré avec un capital de départ, et possèdent aujourd'hui encore quelques animaux. Bien souvent, c'est la vente à bon prix d'un partie du foncier qui fournit les ressources nécessaires à l'investissement.

Le type II: les paysans moyens. Les producteurs du type II vent généralement des anciens migrants (provenant d'autres régions ou de Thailande). Leurs systèmes de production montrent une bonne complémentarité entre riz et élevage. Ils disposent en moyenne de 0,7 ha/actif de paddy (0,85 á Naxaythong et 0,63 à Xaythani), avec des rendements moyens de 1,48 tonne à l'hectare (1,37 à Xaythani et 1,68 á Naxaythong). La surface totale est en moyenne de 1,1 1 ha/actif (1,23 à Xaythani et 0,95 à Naxaythong), ce qui témoigne de la présence d'une certaine resserve forestière. II est possible de distinguer cinq sous-types de systèmes à l'intérieur du type

Le sous-type Ila: les riziculteurs intensifs avec revenu complémentaire (enquêtes 18, 20). Ces producteurs vent situés dans le district de Naxaythong. Ils consacrent l'essentic) des faibles surfaces disponibles (1,5 ha et 4,5 ha) á la culture du riz. Pour profiler de la disponibilité en eau pendant la saison sèche et/ou de la qualité de la terre, ils réalisent une double culture de riz, soit sur leur propre exploitation, soit sur une parcelle louée à cet effet. Ils réalisent occasionnellement des journées de travail salarié à l'extérieur de l/exploitation.

Leur système de production est très intensif. En fait, il s'agit d'un type de transition entre le I et le II, entre petite et moyens paysans. Ce vent des petite paysans qui, ayant l'opportunité de réaliser une intensification importante (double culture de riz), ont réussi à dépasser le seuil de référence de 120 dollars EU de marge nette par actif et par an. L'accès au crédit semble également déterminant pour que la double culture puisse être réalisée. II permet de financer à la fois la préparation du sol et les engrais chimiques utilisés. N'ayant pas de ressources fourragères propres, les producteurs de ce sous-type profitent des espaces collectifs pour le maintien des animaux de travail, dont ils disposent ou de ceux qu'ils ont pris en métayage. Ils seraient ainsi fortement pénalisés par une généralisation des clôtures dans la région, puisqu'ils perdraient la possibilité de bénéficier de transferts de fertilité vers leur parcelle par la vaine-pâture.

Le cas typique est effectivement un cas limite entre les producteurs des types I et II qui ne disposent pas des surfaces suffisantes pour accumuler à partir d'une production de riz accrue. L'autre producteur de type lla rencontré à Naxaythong pratique exactement le même système de production (riz en double culture, animaux en métayage, crédit bancaire), mais sur la base de 0,8 ha par actif contre 0,33 ha par actif. Grâce à un meilleur emploi de la force de travail, la marge nette dégagée passe ainsi de 143 á 186 dollars EU par actif.

Le sous-type IIb: les éleveurs-riziculteurs avec revenu complémentaire (enquêtes 9, 25). Les producteurs de ce sous-type ont l'opportunité de se consacrer à une activité non agricole spécialisée bien rémunérée par exemple charpentier -, notamment pendant la saison sèche, qui représente près de la moitié du revenu global du ménage. Malgré la taille réduite de la parcelle exploitée et l'exiguïté des espaces fourragères en possession individuelle, ces producteurs ont eu pour stratégie d'accumuler en bétail et de développer l'élevage bovin, moins exigeant en travail que la riziculture. Le troupeau vivant essentiellement des ressources fourragères collectives, il est clair que ce type de producteur sera menacé par une généralisation des clôtures dans la région et devra, le cas échéant, réorienter son système de production.

Dans le cas typique, la priorité est apparemment donnée aux revenue extérieurs. L'exploitation souffre d'un déficit de main-d'_uvre pour l'agriculture: on ne fertilise pas trop le riz pour éviter á avoir à le désherber; on utilise deux attelages de buffles pour préparer plus rapidement les parcelles aménagées. Ce déficit est en vole de se résorber avec l'arrivée à l'âge adulte des enfants. Par rapport au problème de l'alimentation du bétail, il est probable que l'exploitation devienne de plus en plus rizicole (achat de parcelles supplémentaires de paddy en 1994) et supporte de moins en moins d'élevage. Le chargement des terres en possession diminuera de facto puisque l'achat de terres entraînera la vente d'une partie du cheptel.

Le sous-type llc: les agriculteurs-éleveurs en vote de décapitalisation (enquêtes 4, 7). Ce vent tous des allochtones (Savanhakhèt, Thaïlande), arrivés récemment dans la région. De ce fait, ils disposent de peu de terre, des champs de paddy de qualité moyenne et, surtout, ils ont très peu de ressources fourragères (en dehors des chaumes de paddy) pour nourrir les animaux souvent acquis au départ grâce à des économies provenant d'activités antérieures. Parce que ces systèmes vent fortement fragilisés, il s'agit du sous-type sans doute le plus directement menacé par une généralisation des clôtures. Leur avenir á moyen terme parait incertain: il est possible qu'ils deviennent des producteurs de type I et aient à recourir de plus en plus au travail salarié, comme le fait déjà le producteur présenté ci-dessous.

Le sous-type IId: les agriculteurs-éleveurs en accumulation (enquêtes 5, 8, 22, 24, 28). Les producteurs du sous-type lld vent généralement arrivés dans la région il y a plusieurs décennies. C'est pourquoi ils disposent de surfaces importantes (1,47 ha par actif en moyenne), une proportion importante de ces terres étant encore couverte de forets ou de prairies (de 40 á 70 pour cent). Ils disposent ainsi de réserves fourragères suffisantes pour alimenter leur troupeau en vole de constitution. Compte tenu de cette disponibilité fourragère, ce sous-type de producteurs ne serait pas pénalise par une généralisation des clôtures; dans certains cas, il pourrait même y trouver intérêt. A moyen terme, ils ont pour stratégie de défricher davantage et de développer leur élevage. Certains d'entre eux parlent même de cultures fourragères pour l'alimentation des animaux (entretien de parcelles de parcours en forêt claire). Le riz apparaît pas comme une culture prioritaire.

La conduite de l'exploitation est beaucoup plus extensive que dans le cas des producteurs de type llc: rapportée à l'hectare, la marge brute y est nettement plus faible. En souhaitant développer les cultures fruitières, on cherche á maintenir un espace fourrager propre suffisant pour alimenter ses animaux: il aura á terme intérêt á clore ses parcelles.

Le sous-type lIe: les entrepreneurs agricoles (enquêtes 21, 22, 26). Comme les producteurs du sous-type Ic - mais avec davantage de moyens - les «entrepreneurs agricoles» ont choisi de diversifier leurs activités en investissant dans du matériel agricole leur permettant de travailler en tant que prestataires de service dans la région. Ils ont acheté, selon les cas, un motoculteur, un tracteur (d'occasion), une batteuse, une décortiques ou même un camion pour le transport. L'exploitation agricole ne représente que 30 á 65 pour cent du revenu du ménage. Le crédit est largement utilisé pour financer ces investissements, qui se développent á partir de 1 990.

L'un de s trots producteurs du sous-type lle analysés représente le «cas extrême» d'entrepreneur agricole, puisqu'il ne cultive plus sa propre parcelle: il loue chaque année les 8 ha de paddy qu'il possède et travaille, avec un salarié á temps complet, dans le décorticage à façon et dans le transport des produits. II accumule en bétail nourri sur l'indivis villageois les éventuels excédents obtenus; les buffles vent également loués avec les parcelles en paddy à ceux qui les cultivent. Mais, en 1993, le revenu net final n'était que de 300 dollars KU, en raison d'un poids très important des amortissements. Il s'agit d'une activité moins créatrice de richesse que l'agriculture pratiquée par les paysans de type II, qui génère du travail pour 4 à 6 actifs et des revenue annuels de près de 1 000 dollars EU (voir la description du type lId).

Le type III: les paysans aisés. Les producteurs du type III vent soit arrivés les premiers dans la région, soit ont hérité de surfaces importantes de leurs parents, eux-mêmes arrivés tôt dans la région. De ce fait, les premiers ont été en mesure de réserver des étendues importantes de terre et la deuxième génération en bénéficie encore aujourd'hui. Ils disposent de 1,2 á 2,5 ha de terre par actif et ont accumulé des moyens importants (motoculteur, bétail). On peut distinguer deux sous-types de systèmes de production.

Le sous-type Illa: les agriculteurs en vole de spécialisation (enquêtes 1, 3, 27). Ils ont mis en culture de riz l'ensemble des surfaces exploitées. Ils disposent de 1,1 à 1,5 ha de paddy par actif, qu'ils cultivent en utilisant de la main-d'oeuvre salariée relativement abord ante pour le repiquage et la récolte. Ils ont fait le choix d'une certaine spécialisation en agriculture, qui se manifeste par la vente d'une grande partie du troupeau et l'achat d'un motoculteur dans l'un des cas enquêtes.

Compte tenu de leur stratégie de spécialisation agricole (monoculture de riz, achat de matériel), ces producteurs ne seront guerre pénalisés par une éventuelle généralisation des clôtures dans la région, et ils disposent de toutes faucons de moyens suffisants pour réagir en conséquence. A moyen terme, ils pourraient même y avoir intérêt puisque l'éventuelle réduction du nombre de buffles dans la zone pourra accroître le besoin de recours aux motoculteurs pour la préparation des parcelles de paddy. Le marché de la prestation de services pourrait ainsi se renforcer á moyen terme.

Le sous-type IlIb: les polyculteurs-éleveurs (enquêtes 14, 17, 31). Ces producteurs disposent d'une importante surface agricole par actif [de 1,5 á 2 ha), dont la moitié est consacrée à la riziculture, le reste étant réservé à l'alimentation du troupeau. Les activités productives vent diversifiées, avec notamment l/exploitation de plusieurs étangs creusés dans les terres disponibles. La pèche - avec vente du poisson - fournit aujourd'hui plus de 20 pour cent des revenue annuels du foyer. Les surplus vent accumulés dans le bétail, qui semble être appelé à se développer dans l'exploitation.

Comme dans le cas des producteurs de type IId, ces polyculteurs-éleveurs du type IIIb ne seront pas pénalisés par une généralisation des clôtures car ils disposent de ressources fourragères propres importantes. Ils pourraient même avoir intérêt á une privatisation complète du foncier afin de pouvoir gérer au mieux la conduite de leur troupeau personnel.

Reproductibilité et évolution des types de système

La typologie ci-dessus donne une représentation de la situation de la paysannerie dans la région analysée en 10 types de système de production. Compte tenu de la méthode utilisée. celle d'un échantillon raisonné, les études de cas approfondies réalisées ne vent statistiquement pas représentatives de l'univers étudié: les proportions dans l'échantillon des producteurs de type I, II et III ne correspondent pas à celles observables dans la réalité. Une estimation des poids respectifs des différents types et sous-types est néanmoins possible, mais elle demande un travail complémentaire, qui consiste á croiser données statistiques et critères structurels caractéristiques issus de la typologie. Les statistiques agricoles actuelles vent cependant insuffisantes pour procéder à une telle estimation.

En outre, par rapport à la problématique de départ de l'étude, à savoir la recherche d'une consolidation de l'économie paysanne dans la région, tous les sous-types ne doivent pas faire l'objet du même degré d'attention:

Compte tenu des éléments précédents, trots sous-types paraissent devoir retenir en priorité l'attention du gouvernement: les sous-types Ia, Ib et IIc. qui vent aujourd'hui les plus fragiles, alors qu'ils constituent le cocu même de la paysannerie de la plaine de Vientiane. II convient ainsi de s'interroger en premier lieu sur les conditions qui permettraient de garantir la reproductibilité de ces systèmes, en supposant qu'elle est atteinte á partir d'un revenu net de 120 dollars EU par actif (seuil de reproduction simple).

Réflexion sur les systèmes les plus directement menacés. Pour cela, on a réalisé des modélisations simples de ces trots systèmes, sur la base des données correspondent aux archétypes décrits dans la typologie. Les figures 2 á 6 doivent être lues de la manière suivante:

A partir de la situation actuelle décrite sur les figures, deux projections de ces systèmes de production ont été effectues:

Ces premières projections permettent d'asseoir sur des bases concrètes le problème de la consolidation et de la reproductibilité des systèmes de production paysans dans les deux zones de travail.

Résultats des projections. Sous - type la: Prolétaire ou semi-prolétaire (figures 2 et 3). L'archétype présenté ici utilise actuellement une surface totale de 0,5 ha par actif. Cette surface coïncide avec la surface en riz, sa priorité étant d'assurer, autant que possible, ses besoins alimentaires. Ces producteurs constituent les premiers utilisateurs des ressources fourragères communes en vue du maintien des animaux de trait. Les chaumes de paddy contribuent aussi á l'alimentation du peu d'animaux qu'ils possèdent. Pour cette raison, I'activite «bovine, volaille» est. dans la figure, partiellement superposée à la surface en paddy. Le résultat total par actif n'étant pas en mesure de garantir leur survie économique, ils vent de plus en plus obligés d'aller chercher du travail à l'exterieur, en zone urbaine (district de Naxaythong) ou dans d'autres exploitations agricoles (district de Xaythani). La projection de leur système actuel nous donne les résultats suivants:

Figure 1: Sous-type Ia: prolétaire (situation actuelle et projection)

K = consommation annuelle de capital fixe (20 dollars/actif)

a-b = surface additionnelle nécessaire (0,26 ha/actif)

c-d = coûts proportionnels additionnels (12 dollars/actif)

Les paysans du sous-type Ia vent par ailleurs les plus fragiles, parce qu'ils n'ont en général aucune sécurité sur la terre qu'ils cultivent, la majorité d'entre eux l'obtenant d'habitude en location. Le sentiment de la mission est que ce type de producteur sera le premier à souffrir d'une pression foncière grandissante dans les deux zones étudiées, tant de la part de la ville de Vientiane que des nouveaux migrants. Les terres disponibles pour la location vont devenir plus rares et plus chères et le degré de prolétarisation de ces producteurs risque ainsi de s'accentuer, avec une activité agricole de plus en plus résiduelle, á moins que des mesures radicales ne soient prises en matière foncière visant á sécuriser la tenure foncière de cette catégorie de paysans.

Figure 1: Sous-type Ia: prolétaire ou semi-prolétaire (projection avec amélioration technique)

K = consommation annuelle de capital fixe (20 dollars/actif)

Elevage = réduction du taux de mortalité de 40% à 20%

Riz = augmentation du rendement de 10%

Sous-type Ib: Les petite paysans (figures 4 et 5). La situation évoquée ci-dessus du groupe des petite paysans laissait entrevoir quelques possibilités supplémentaires par rapport au groupe précédent. L'archétype présenté dans le graphique suivant dispose d'une surface totale de 0,88 ha par actif, avec le riz venant en tête des activités productives, suivi par d'autres cultures (piments), en plus de l'élevage (bovine, porcine et volailles). Le niveau de capitalisation reste faible. La stratégique productive est d'assurer le meilleur emploi de la main-d'oeuvre familiale disponible, en misant sur une diversification productive. S'il n'est pas atteint, le seuil de reproduction simple n'est cependant guère éloigné (voir figure 4). La projection du système actuel donne les résultats suivants:

Figure 4: Sous-type Ib: petit paysan (situation actuelle et projection)

K = consommation annuelle de capital fixe (20 dollars/actif)

a-b = surface additionnelle nécessaire (0,17 ha/actif)

c-d = coûts proportionnels additionnels (12 dollars/actif)

Figure 5: Sous-type Ib: petit paysan (projection avec amélioration technique)

K = consommation annuelle de capital fixe (20 dollars/actif)

Elevage = réduction du taux de mortalité de 40% à 20%

Riz = augmentation du rendement de 10%

II existe donne un potentiel de récupération important, d'autant plus qu'à la différence du sous-type Ia, la situation de départ est relativement proche du seuil de reproduction. Cependant, comme les mesures foncières vent politiquement complexes à mettre en oeuvre et que les mesures techniques nécessitent du temps pour être développées et répercutées à la base et comme, en outre, la valeur du seuil de reproduction simple tend à augmenter avec le temps, il est sans doute plus raisonnable d'envisager une intervention combinant aspects fonciers et aspects techniques.

Sous-type llc: agriculteurs-éleveurs en voie de décapitalisation (figure 6). L'archétype présenté pour illustrer le sous-type IIc dispose de 0,75 ha de surface totale par actif et de peu de capital de production, I'essentiel de l'activité actuelle étant la culture du paddy. L'élevage permet au producteur de dépasser le seuil de reproduction simple, notamment l'élevage de pores qui génère une marge brute importante pour une très faible surface utilisée. Par rapport á ce type de producteur, I'objectif immédiat n'est donne pas de chercher à augmenter la marge nette par actif (déjà supérieure au seuil de reproduction simple), mais plutôt de trouver les moyens de consolider la situation actuelle, en sécurisant au mieux la production et en renforçant dans la mesure du possible l'élevage, base d'une éventuelle future accumulation.

RECOMMANDATIONS ET PROPOSITIONS

Deux grandes forces opèrent de façon déterminante dans la zone périurbaine de Vientiane: d'une part, le développement de la ville elle-même qui, bloquée au sud, va s'élargir dans les seules directions possibles - grâce à l'infrastructure routière déjà existante -, le nord et le nord-est; d'autre part, I'arrivée par ce même réseau routier de migrants provenant de plusieurs régions du pays en quantité croissante. Ces deux forces exercent une forte pression sur le milieu naturel dans les deux districts: déjà aujourd'hui, par la seule force migratoire, accentuée par un taux de croissance démographique situé entre 2,6 et 2,9 pour cent par an, des mesures urgentes s'imposeraient pour consolider une production paysanne qui, á l'avenir, ne pourra plus se développer sur la base de la colonisation de nouvelles portions de territoire, comme cela a pu être le cas dans la plaine de Vientiane entre 1950 et 1980.

Les paragraphes suivant détaillent les mesures qui, à la lumière du travail de terrain effectué, semblent être les plus pertinentes et réalistes dans le cadre de la situation socio-politique actuelle.

Figure 6: Sous-type IIIc: agriculture-éleveur en voie décapitalisation (situation actuelle)

K = consommation annuelle de capital fixe (20 dollars/actif)

Recommandations en matière de politique foncière

Les espaces collectifs dont disposent les villages, tant en forêt claire communautaire qu'en forêt dense villageoise, vent globalement fort réduits, quand ils ne vent pas inexistants. II y a là un sérieux handicap pour le développement futur voire la viabilité actuelle - de l'agriculture et de l'élevage dans le cadre villageois. Au niveau familial, I'accès à la terre semble de plus en plus difficile dans la zone enquêtée. Les tailles des parcelles vent déjà très inégales et ces écarts de grandeur vent appelés à se creuser sous l'innuence tant du morcellement consécutif aux transmissions successorales que de l'augmentation des ventes de terre aux citadins. II risque de s'ensuivre une fragmentation et une réduction accrues de l'espace agro-pastoral villageois, ainsi qu'un accroissement des familles dépourvues de toute terre productive.

Actions foncières de la paissance publique.

Le problème d'exiguïté des espaces collectifs villageois pourrait, en partie, trouver un élément de solution par la mise en _uvre d'un texte récent, le Décret 169 de 1993 relatif à la gestion et á l'utilisation des forets et des terres forestières. En ses articles 15 et 16, il prévoit en effet la possibilité de conclure des contrats de gestion forestière, avec des villages ou des familles, par lesquels des portions de forêt leur vent confiées en vue d'y mener, sur la base d'un plan d'aménagement, des activités non seulement sylvicoles, mais également pastorales. Des parcelles de forêt pourraient ainsi être consacrées à une exploitation fourragère, ce qui permettrait de faire face, par endroits, à la pénurie d'espaces fourragères.

L'Etat pourrait par ailleurs, á condition qu'il en ait les moyens financiers, faire usage de ses prérogatives de puissance publique pour mobiliser des terres agricoles au profit des paysans qui en ont besoin pour améliorer la reproductibilité de leur système, c'est-à-dire essentiellement ceux des types Ia et Ib. A cet effet, il pourrait avoir recours, notamment: (i) au déclassement d'une partie des terres domaniales pour des utilisations agro-pastorales, suivi de leur distribution aux agriculteurs nécessiteux, contre paiement éventuel d'un prix de cession très réduit par rapport aux prix de marché; (if) à l'exercice d'un droit de préemption à l'occasion des ventes immobilières, au bénéfice des paysans villageois, pour l'acquisition de terres agricoles, afin d'éviter qu'elles ne soldent cédées á des investisseurs urbains.

Libre accès au bétail des champs après récolte.

Selon la coutume en vigueur dans la zone enquêtée, tous les animaux du village peuvent, après-récolte, vaquer librement sur l'ensemble des champs. Comme nous l'avons mis en évidence dans l'analyse de la typologie, cette pratique est aujourd'hui encore essentielle pour la majorité des producteurs de la région. Mais comme la tendance actuelle est à l'enclosement des parcelles vendues, même en saison sèche, il s'ensuit une réduction progressive de l'espace fourrager villageois. Afin de contrecarrer cette évolution préjudiciable au développement de l'agriculture comme de l'élevage, il convient de: (i) légaliser la pratique incontestée du libre accès des champs non clôturés après récolte (ce qui ne devrait pas soulever d'objection, car il n'y aurait là qu'une confirmation de la coutume); (ri) instituer une sorte de servitude fourragère par laquelle les propriétaires de parcelles clôturées - exploitées ou non - seraient tenus, en saison sèche, d'aménager des ouvertures pour ne pas entraver l'acces aux animaux du village.

Obligation de mise en valeur effective des terres.

Cette obligation, que le Décret de 1992 sur les terres énonce en termes trop vagues, devrait faire l'objet d'une réglementation plus précise, qui en définisse le contenu et détermine des critères objectifs de constatation et d'évaluation de la mise en valeur, ainsi que des sanctions pour défaut ou insuffisance de cette dernière. Ainsi, le détenteur d'une terre qui négligerait de l'exploiter pendant un certain temps (de l'ordre de deux ou trots ans) pourrait: (i) être contraint de la donner en location (pour une durée minimale et selon une tarification fixée par le district); (ii) être tenu de s'acquitter d'un impôt foncier majoré (par exemple, le double du montant normal en année 2, le triple en année 3, etc.).

Restrictions au changement d'affectation des terres agricoles.

Selon la vocation actuelle et future des terres concernées, on peut envisager soit l'interdiction, soit la réglementation de la désaffectation des terres agricoles, notamment á la suite des opérations de vente. Ainsi, pour décourager les cessions immobilières spéculatives, I'acquéreur d'une parcelle pourrait, en raison de sa vocation/localisation, être assujetti à une obligation consistent: (i) soit á ne pas changer son affectation agricole pendant une durée déterminée (de 10 á 20 ans); (ri) soit á obtenir une autorisation des services de l'agriculture pour procéder á sa désaffection, dont la délivrance serait alors conditionnée par la prise en compte des intérêts de l'agriculture paysanne.

Vers un système d'enregistrement allégé et non obligatoire.

La question des titres fonciers revêt, dans les villages enquêtes, beaucoup moins d'importance qu'on ne le prétend généralement. Aucune parcelle agricole n'y a été jusqu'ici immatriculée. Les paysans ne vent pas vraiment intéressés par l'obtention d'un titre foncier, trop coûteux pour leurs bourses (ifs ne le prendraient que stil leur était fourni gratuitement). La raison en est clairement l'absence de toute insécurité foncière ou, tout au moins, le sentiment qu'un titre de propriété ne renforcerait guère la nature des droits réels détenus sur les terres, tant par les paysans que par les citadins. II y a donne la, pour l'heure, un faux problème qu'on se pose inutilement. II semble que l'immatriculation foncière n'est pour l'instant ni possible, ni indispensable pour les raisons suivantes:

En conséquence, il n'apparaît pas prioritaire d'introduire un système d'immatriculation foncière obligatoire dans la zone enquêtée. C'est d'ailleurs ce qutenvisage le Décret N° 99 de 1992 sur les terres: les individus qui possèdent régulièrement une terre, prévoit-il, ont le «droit de recevoir un titre foncier» (art. 6 de Land title). C'est done une faculté que la loi leur reconnaît, non une obligation qu'elle leur impose. De plus, ce texte ne précise pas les modalités d'établissement des titres fonciers et rien ne laisse supposer qu'il s'agit de la procédure d'immatriculation du type Torrens (cadastre foncier). Le Décret de 1992 est. partant, suffisamment flexible pour que son application soit conduite d'une manière souple, consistent notamment:

Les mesures d'accompagnement nécessaires

Au-delà du traitement de la question foncière, ces propositions ont pour objectif de renforcer la capacité de résistance des systèmes de production en améliorant leur reproductibilité. Elles vent articulées en fonction des besoins et possibilités spécifiques de chaque type.

L'élevage des herbivores (buffles et bovine). Compte tenu des résultats du diagnostic, la priorité doit évidemment être accordée à l'élevage des herbivores, avec deux sous-thèmes prioritaires: sur le long terme, I'alimentation des animaux, notamment en saison séché; et sur le moyen terme, I'amélioration de l'état sanitaire du troupeau.

La réduction des espaces fourragères est d'ores et déjà un facteur limitant dans la majorité des types de systèmes identifiés, notamment les types Ib, IIc et IId. Face aux risques d'aggravation, il est nécessaire d'identifier précisément chez les paysans qui ont commencé à intensifier la conduite de leur troupeau les pratiques d'affouragement existantes (arbres fourragères, espèces herbacées sélectionnées), de contribuer á leur amélioration et à leur appropriation par les agriculteurs.

Sur le plan sanitaire, il sera difficile de réduire le taux de mortalité actuel (40 pour cent en moyenne) sans une intervention en parallèle sur l'alimentation du troupeau. Diminuer la mortalité se traduirait en effet par une hausse du chargement moyen, donne à une réduction des disponibilités fourragères par tette de bétail. Si un appui vétérinaire est effectivement nécessaire (et facile à mettre en couvre), il ne sera pas suffisant pour améliorer la production de l'élevage. Une approche globale du système de production devra être privilégiée.

L'élevage de porcs. Pour tous les producteurs qui ont soit une forte limitation de surface (et ne peuvent consacrer une partie de leur exploitation aux cultures fourragères), soit un accès très limité au capital de production, les perspectives de développement de l'élevage d'herbivores peuvent être limitées. II s'agit notamment du cas des producteurs Ia et IIc.

Pour les paysans de ce type, une relance de l'élevage de pores est à envisager. Elle passe sans doute par la recherche de sources d'alimentation moins onéreuses. II faut notamment chercher à abaisser le coût du son du paddy autoconsommé. Actuellement, l'agriculteur ne paye pas le décorticage du paddy stil laisse le son à la décortiques, ce que font la majorité des producteurs, qui devraient payer 500 kips par sac décortiqué dans le cas contraire. Le développement de décortiqueuses villageoises permettrait peut-être de faciliter la récupération du son par les paysans. Par ailleurs, d'autres sources d'alimentation possibles doivent être explorées, notamment celles concernant la valorisation de tubercules (utilisables à la fois pour l'alimentation hum aine et animale), comme le manioc.

La poursuite des efforts actuels sur le riz, en parallèle. Les recherches menées depuis un certain nombre d'années par différents organismes sur la culture du riz concernent l'ensemble des producteurs de la région. Les enquêtes réalisées permettent d'affirmer que si la culture de riz irrigué constitue effectivement une réponse à une limitation forte en surface (le type IIa est un type de transition entre les types I et II), il n'en reste pas moins qu'elle exige des conditions favorables de mise en couvre, parmi lesquelles se trouvent celles-ci:

Ces conditions minimales vent aujourd'hui loin d'être généralisées dans la région. L'irrigation ne peut donc concerner tous les agriculteurs et tous les types de systèmes de production.

La diversification vers les cultures fruitières et légumières. Les deux zones de travail, et notamment celle de Naxaythong, vent suffisamment proches de Vientiane pour offrir des perspectives de développement des cultures fruiteries et maraîchères. Un marché pour ces produits existe déjà: il recèle un potentiel de croissance important, compte tenu de la politique gouvernementale actuelle d'ouverture et de développement économique. Le petit maraîchage de contre-saison (saison sèche) est appelé á croître plutôt sur les bourrelets de berge du Mekong (en raison de la disponibilité en eau). Par contre, la production de fruits pourrait concerner des zones plus éloignées. Des parcelles destinées á la fois à la production fruitière et à l'alimentation fourragère des animaux (notamment en saison sèche) constitueraient une réponse adéquate aux différents facteurs limitatifs des systèmes de production de la région. Ce type de projet concerne plutôt les producteurs des types II et III, qui disposeront de ressources foncières plus abondantes.

Le crédit pour faciliter la capitalisation, La mise en _uvre par les paysans de la plupart des mesures proposées ci-dessus exige de leur part un investissement: plantation d'arbres (fourragères ou fruitiers), élevage de pores, achat d'intrants, etc. L'objectif recherché est effectivement celui d'une capitalisation (ou recapitalisation dans le cas des systèmes de type IIc) des systèmes de production concernés. Sur le plan économique, cette capitalisation peut se réaliser de deux manières:

La mise en place d'un système de crédit sera ainsi nécessaire pour que les améliorations proposées soient appropriantes par les paysans. Un tel système devra être á la fois:

Le maintien d'un contexte macroéconomique favorable. Les différentes propositions précédentes visent à améliorer la reproductibilité des systèmes de production paysans de la région étudiée. Pour qu'elles soient effectives, il est cependant nécessaire que, à court terme, le contexte économique général dans loque elles pourraient être mises en place ne soit pas trop défavorable. En particulier, il paraît important de veiller á ce que l'écart entre prix agricoles et prix des produits non agricoles, notamment le prix des intentes, ne s'accroisse pas davantage.

Elevage et crise: genèse d'un développement non durable en Amérique centrale

Cet article décrit et analyse les effets de l'expansion de l'élevage bovin par l'examen des interrelations entre l'élevage bovin et l'utilisation de la terre, des forêts et de l'environnement; entre l'élevage bovin, I'emploi rural et les migrations; et, enfin, entre l'élevage bovin, la sécurité alimentaire et la nutrition Chacun des processus mentionnés est défini d'une façon plus précise en relation avec les cas spécifiques du Honduras et du Nicaragua - qui commencent par les relations entre l'expansion des pâturages et l'utilisation des terres, et la concentration foncière et sa valeur au Honduras Sont aussi analysées les relations qui ont ouvert la vole au chômage agricole et à la migration des populations, ainsi que les composantes du rapport capital/travail dans l'élevage. Les flux migratoires au Honduras et au Nicaragua vent abordés en fonction de l'expansion de la frontière agricole, de l'urbanisation, de la déforestation et de la dégradation de l'environnement. L'impact de tous ces facteurs sur le pouvoir d'achat, la consommation de nourriture et la sécurité alimentaire est également examiné.

Ganadería y crisis: el inicio del desarrollo no sostenible en América Central

Se describen y analizan los impactos de la expansión de la ganadería a través de un examen de las interrelaciones entre la ganadería, el uso de la sierra, los bosques y el me dio ambiente; entre la ganadería, el empleo rural y la migración; y entre la ganadera, la seguridad alimentaria y la nutrición. Cada una de las relaciones mencionadas se aplican al cave de Honduras y de Nicaragua, comenzando con la relación entre la expansión del área de pastoreo y la utilización, concentración y valor de la sierra en Honduras. Se analizan también las relaciones entre el desempleo rural y la migración de la población, así como los determinantes de la relación capital/trabajo en la ganadería. Se discuten los flujos migratorios en Honduras y Nicaragua en relación a la expansión de la frontera agrícola, la urbanización, de forestación y degrado del medio ambiente. Finalmente se tratan los impactos de todas estas variables sobre el poder adquisitivo, el consumo de alimentos y la seguridad alimentaria.

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