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3. ADMINISTRATION ET INSTITUTIONS CONCERNEES PAR LA PECHE ET LA PISCICULTURE

3.1 Administration des pêches et de la pisciculture

Administration centrale

En dépit d'une contribution importante à l'économie nationale, le secteur des pêches et de la pisciculture est faiblement représenté sur le plan institutionnel, en particulier au niveau central. Depuis le début des années 80, diverses initiatives ont été prises en vue de renforcer l'administration centrale des pêches, mais en vain. A ce titre, on peut notamment mentionner que la Conférence Nationale (juillet-août 1991), puis les Etats Généraux du Monde Rural (décembre 1991), ont recommandé qu'une réflexion soit conduite sur la nécessité de renforcer le Service des Pêches et de la Pisciculture. En 1993, des textes relatifs à la création d'un Service renforcé, basé à Bamako, et rattaché par le canal d'une Section Pêche à la Direction nationale des eaux et forêts (DNEF) ont été élaborés. Cependant, cette initiative n'a pas abouti en raison d'un remaniement ministériel.

Jusqu'au début de l'année 1995, l'administration des pêches et de la pisciculture était représentée, au niveau central, par une Division pêches et pisciculture (DPP), rattachée à la DNEF du Ministère du développement rural et de l'environnement (MDRE). La DPP disposait alors d'un effectif de six personnes. La DNEF est ensuite devenue la Direction nationale des ressources forestières, fauniques et halieutiques (DNRFFH), organisée en quatre divisionsdont la Division de l'aménagement des ressources, qui regroupe tous les différents sous-secteurs du secteur "forestier" (forêts, faune, pêches). La structure nationale en charge de la pêche et de la pisciculture est dès lors devenue une Section Aménagement des Ressources Piscicoles, composée de deux personnes uniquement, dont un chef de section chargé de la pêche et un chargé de pisciculture.

Dans ce contexte, l'administration centrale n'a malheureusement pas été en mesure jusqu'à présent de mettre pleinement en oeuvre la politique nationale de gestion décentralisée des ressources halieutiques, et en particulier de jouer son rôle de partenaire auprès des différents opérateurs économiques de la filière. Par ailleurs, compte tenu du manque de capacités techniques, financières et logistiques en matière de conception, mise en oeuvre et suivi-évaluation des programmes et projets de développement en faveur de la pêche et de la pisciculture, l'administration n'a pas été non plus réellement en mesure de pouvoir contribuer à une utilisation optimale des ressources financières, pourtant limitées, de l'Etat.

En parallèle, et suite à l'adoption du Schéma directeur du développement rural en 1992, le Gouvernement malien s'est engagé dans un processus de restructuration du MDRE, sur la base d'un Plan d'action du Ministère (PMDRE). La restructuration en cours des services du MDRE vise à traduire les différentes options politiques suivantes: recentrer le rôle de l'Etat sur des missions pérennes exclusives (législation, contrôle, planification, protection contre les risques majeurs) et non-exclusives (conseil technique, animation et organisation du monde rural...); séparer au sein des services les missions de police de celles d'appui-conseil; désectorialiser l'appui-conseil (approche systèmes de production) et l'adapter en permanence aux besoins des producteurs et opérateurs des différentes filières; et déléguer les plus larges compétences possibles aux structures décentralisées.

Dans ce contexte général, si certaines structures centrales devraient être maintenues, telles que la Direction administrative et financière, la Cellule de planification et statistique et l'Institut d'économie rurale (recherche), de nouvelles directions nationales à caractère fonctionnel (et non plus sectorielles) devraient être créées. Il s'agit de la Direction nationale de l'appui au monde rural (DNAMR), de la Direction nationale de l'aménagement et de l'équipement rural (DNAER) et de la Direction générale de la réglementation et du contrôle (DGRC). Des avant-projets de décret relatifs à chacune de ces directions ont été préparés par la Cellule d'appui à la mise en oeuvre du plan d'action du MDRE (CAMOPA).

La mission de la DNAMR devrait consister à élaborer les stratégies, politiques et programmes du MDRE, notamment dans les domaines suivants: conseil rural et vulgarisation agricole; formation, information et communication; promotion des filières agricoles; et organisation et animation du monde rural.

La DNAER devrait être compétente dans le domaine de la planification du développement des ressources naturelles, et de l'aménagement et de l'équipement du monde rural. La DNAER devrait notamment être chargée de: l'élaboration des schémas et plans directeurs d'aménagement du territoire ayant un caractère national, ainsi que l'appui aux collectivités territoriales en la matière; l'élaboration de méthodologies et de systèmes de gestion rationnelle et durable des ressources naturelles; et l'étude et le suivi de la mise en oeuvre des projets et programmes d'investissement dans les domaines de l'aménagement et de l'équipement rural, ainsi que l'appui en la matière aux collectivités territoriales.

La DNAER devrait comprendre trois Divisions, dont la Division aménagement et gestion des ressources naturelles, elle-même subdivisée en quatre Sections dont la Section aménagement et gestion des ressources halieutiques. La Division aménagement et gestion des ressources naturelles devrait être chargée, en particulier, d'élaborer, ou suivre l'élaboration, des contrats de gestion par lesquels l'Etat confie la gérance des domaines forestier, faunique pastoral et piscicole (halieutique) aux collectivités territoriales ou autres personnes. La Division devrait également être mandatée pour appuyer les structures régionales et les collectivités territoriales pour le renforcement de leurs capacités de gestion des ressources naturelles dont elles ont la charge.

La DGRC devrait avoir pour mission générale de définir l'environnement juridique et sanitaire pour supporter les activités du secteur du développement rural. A ce titre, elle devrait être notamment chargée de la définition d'une législation et réglementation adaptées (ex. textes sur la protection et la gestion des ressources halieutiques), et du contrôle de l'exécution de celles-ci par l'organisation, la coordination et le suivi des services régionaux et locaux de police des ressources naturelles.

Services déconcentrés de l'administration

Sur le terrain, l'encadrement de la pêche était effectué jusqu'à présent par des agents assermentés des eaux et forêts, relevant directement de neuf Directions régionales des eaux et forêts, subdivisées elles-mêmes en cantonnements et postes des eaux et forêts. Les agents de terrain remplissaient surtout une fonction coercitive. Conformément à l'esprit du PMDRE, une certaine catégorie d'agents devrait cependant à l'avenir être uniquement investie de fonctions de conseiller aux producteurs dans tous les domaines relatifs à l'appui au monde rural et/ou à l'aménagement et l'équipement rural. Cette réorientation n'est cependant pas sans poser de nombreux problèmes de qualification.

En ce qui concerne la pisciculture, la situation de l'encadrement technique sur les zones de production est relativement satisfaisante à l'heure actuelle. Celle-ci devrait du reste logiquement être renforcée dans le cadre de la mise en oeuvre de l'approche système, la pisciculture, lorsqu'elle est pratiquée, s'adressant avant tout à des agriculteurs désireux de diversifier leurs activités. Ainsi, dans la région de Ségou, les activités des agents forestiers s'orientent déjà vers une aide au développement piscicole villageois. La situation de la station d'Etat de Molodo est en revanche assez précaire. Avec un effectif de 9 agents de la DNRFFH, dont 5 encadreurs en permanence sur le terrain, la station de Molodo tente de maintenir ses prestations de producteur d'alevins, de formateur et de vulgarisateur sans moyens financiers mais, semble-t-il, avec l'appui des populations rurales concernées.

Par ailleurs, le dispositif d'encadrement sur le terrain est complété dans la zone du Delta Central par l'Opération pêche de Mopti (OPM). L'OPM est à l'origine un projet de développement rural financé par le FED (1972). Après trois modifications de statut sur le plan juridique, l'OPM est aujourd'hui (c'est à dire avant la restructuration des services du MDRE) un service rattaché à la DNRFFH, ne disposant par conséquent plus d'autonomie financière comme auparavant. La mission générale de l'OPM est d'assurer l'encadrement technique des pêcheurs, notamment par la promotion de la production piscicole et l'amélioration de leur cadre de vie. Ses effectifs sont néanmoins encore importants, puisqu'ils comprenaient 20 agents détachés du MDRE et 39 contractuels en 1995.

Sur le plan de l'encadrement, les activités de l'OPM s'articulent autour de la lutte contre les pertes après captures, par la diffusion de fours améliorés de type Chorkor et la vente auprès des pêcheurs de produits insecticides, la promotion d'aquacultures extensives, et la collecte de statistiques de commercialisation à partir du marché de gros de Mopti. Par ailleurs, l'OPM est associée au Programme régional de valorisation des captures, financé par le FED, et pourrait être associée prochainement à la gestion d'un système d'information sur les prix (projet SICOPECHE sur financement canadien).

Dans le cadre de la restructuration en cours du Ministère, l'action des trois Directions nationales du MDRE devrait être relayée, au niveau régional, par les Directions régionales de l'appui au monde rural (DRAMR), de l'aménagement et de l'équipement rural (DRAER), et de la réglementation et du contrôle du secteur du développement rural (DRRC). Les missions dévolues à la DRAMR devraient notamment viser à la structuration des activités productives au niveau régional en traduisant les stratégies et politiques nationales en matière d'appui au monde rural sous forme de programmes régionaux, et en assurant le suivi de ces programmes. La DRAER devrait concentrer ses missions dans des actions et réalisations d'intérêt communautaire (ex. appui aux populations et collectivités territoriales décentralisées en matière d'élaboration et mise en oeuvre de schémas concertés d'aménagement du territoire). La DRRC devrait pour sa part assurer un double rôledans les domaines, d'une part, du conseil, surveillance et contrôle, et, d'autre part, de l'aide à l'arbitrage en cas de litiges.

Au niveau du cercle, les actions de la DRAMR et de la DRAER devraient se poursuivre au sein d'un Service local unique, le Service de l'appui-conseil, de l'aménagement et de l'équipement rural. Les Services locaux devraient notamment être pourvus de conseillers techniques spécialisés chargés d'apporter un soutien aux agents de base, et de spécialistes en statistique et suivi-évaluation. La DRRC devrait pour sa part être représentée par un Service local de la réglementation et du contrôle.

A l'échelon communal, ou inter-communal, une Antenne d'appui-conseil, d'aménagement et d'équipement devrait représenter les différentes structures du Ministère

et apporter un soutien administratif aux conseillers agricoles et de vulgarisation polyvalents. La DRRC ne devrait plus quant à elle être représentée au niveau communal. Des agents chargés du contrôle devraient néanmoins être organisés en poste de contrôle et/ou en brigades mobiles.

3.2 Autres institutions concernées par la pêche et la pisciculture

L'Office pour l'exploitation des ressources hydrauliques du Haut Niger (OERHN) est un organisme public qui finance, depuis sa création, un petit laboratoire de terrain en charge de la surveillance de la qualité des eaux et des ressources halieutiques du barrage de Sélingué. Malgré des moyens limités, ce laboratoire a effectué de nombreux travaux dont la diffusion n'a malheureusement pas toujours été faite. Jusqu'en 1990, différentes missions d'experts sont venues compléter ces études. L'OERHN collecte également des statistiques de pêche et de commercialisation sur la retenue de Sélingué. Par ailleurs, sous l'impulsion du projet de développement aquacole PNUD-FAO MLI/86/01, l'OERHN a financé en partie des bassins, ce qui a permis de conduire divers essais d'élevage. Dans le cadre de la restructuration en cours du MDRE, l'OERH pourrait devenir un service rattaché du ministère ayant pour mission spécifique le développement rural intégré sur l'ensemble de la zone de Sélingué. L'OERHN devrait du reste devenir l'Office de développement de Sélingué (ODS).

L'Organisation de mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS) est une institution internationale compétente en matière de coopération sous-régionale. Créée en 1972, l'OMVS a pour objectifs généraux de développer le bassin du fleuve Sénégal, en particulier à travers la construction de réservoirs et barrages. Au Mali, l'OMVS intervient notamment dans la gestion du barrage de Manantali à travers la Structure provisoire d'exploitation du barrage. En 1989, une Cellule de limnologie a été créée dans le but d'assurer un suivi physico-chimique des eaux du lac et d'effectuer quelques observations sur la commercialisation de poisson. Cette structure assure également le recensement des campements de pêcheurs, ainsi que l'inventaire des populations de poisson en aval du barrage.

L'Office du Niger (ON) a signé en 1990 un protocole d'accord avec la DNEF (actuelle DNRFFH), d'une durée de trois ans, dans les domaines de la conservation de l'environnement et de la pisciculture dans sa zone d'intervention (région de Niono notamment). En matière de pisciculture, il s'agit de dégager des synergies entre les deux partenaires, l'ON intervenant dans l'identification et la gestion du foncier, l'approvisionnement régulier en eau et la fourniture de sous-produits de l'agriculture, et la DNRFFH assurant l'approvisionnement en alevins, la formation des exploitants et le suivi technique pour la conduite de l'élevage.

Organisations de producteurs

Le Mali a une longue expérience en matière de mouvement associatif (Organisations associatives, coopératives et mutualistes). Selon le dispositif législatif en vigueur, des coopératives peuvent être créées dans tous les domaines d'activités. En milieu rural, les "Tons villageois" constituent depuis 1982 la principale forme d'organisation de type coopératif. Les Tons sont définis comme étant une association à caractère coopératif et mutualiste fondée sur la solidarité et le volontariat des membres, et sont placés sous la tutelle du ministère chargé de l'agriculture. Ils constituent des organisations économiques de base au sein du village et à ce titre gèrent le développement économique, culturel et social du terroir villageois. Dans le passé, les Tons étaient néanmoins animés, dans les faits, par les comités de base du parti unique. A l'heure actuelle, la plupart d'entre eux ne sont plus fonctionnels. En parallèle, des associations villageoises se sont multipliées (environ 2 000 en 1993), mais celles-ci ne possèdent aucun statut juridique.

La démocratisation de la vie politique malienne a profondément modifié l'environnement dans lequel évoluent les organisations associatives, coopératives et mutualistes. A cet égard, des débats régionaux et nationaux sur la relecture de la législation portant sur ce type d'organisations ont été récemment organisés par le MDRE. Il en ressort que le nouveau cadre juridique devra s'articuler, entre autres, autour des points suivants: dotation de la personnalité morale et de l'autonomie de gestion pour chaque organisation; possibilité de bénéficier de l'aide et de l'encouragement de l'Etat, des établissements publics, des collectivités territoriales ou des partenaires extérieurs à condition que cela n'implique pas de "main-mise" sur ces organisations; adhésion libre et volontaire des membres sans discrimination d'aucune sorte; autonomie et indépendance vis-à-vis du Gouvernement ou de toute autre organisation...

Il existe par ailleurs un syndicat de pêcheurs, l'Association des pêcheurs résidant au Mali (APRAM). L'APRAM est une association professionnelle, créée en 1991 à l'initiative des pêcheurs de Bamako, puis généralisée aux pêcheurs de l'ensemble du pays. Elle se définit pour objet la défense des intérêts des pêcheurs adhérents, la promotion du développement économique de la pêche et de la pisciculture, et la contribution à l'amélioration des conditions sociales des communautés de pêcheurs (éducation, formation, santé...). L'APRAM est une organisation syndicale susceptible de constituer une instance de concertation importante entre les pêcheurs et les pouvoirs publics. Elle compterait aujourd'hui près de 24000 adhérents parmi les pêcheurs de différentes régions, avec des représentations dans tout le pays à différents niveaux (Cellules de base, Comités, Comité local de Cercle, Coordinations régionales, et Comité directeur dont le siège est basé à Bamako). L'association siège par ailleurs dans toutes les Chambres d'agriculture régionales, à l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture, et au Conseil économique, social et culturel.

3.3 Recherche et formation

La recherche halieutique a débuté au Mali depuis une cinquantaine d'années. Les premiers travaux ont eu pour origine une inquiétude des autorités coloniales quant à l'état de santé des stocks deltaïques, en raison de la sécheresse qui provoque une récession des captures. On s'interroge alors sur les causes exactes de cette situation, et diverses craintes, qui réapparaîtront de façon récurrente par la suite, sont déjà évoquées: influence de l'accroissement démographique des pêcheurs, influence d'une évolution technologique des méthodes de captures... Un contingentement des captures est alors envisagé, tandis qu'un programme d'observations biologiques et ethnologiques de détail est initié. Un biologiste de l'IFAN, Jacques Daget, est recruté, et un laboratoire est créé en juillet 1946 à Diafarabé. En 1960, un nouveau local est construit sur la digue de Mopti: le laboratoire d'Hydrobiologie de Mopti. En quinze ans, une somme de connaissances sans équivalent à l'époque aura été constituée dans les domaines de la biologie et de la pêche. Diverses études montrent notamment que loin d'être épuisés, les stocks halieutiques du Delta Central sont encore largement sous-exploités, et que les modes de partages des ressources pratiquées par les pêcheurs révèlent une certaine efficacité tant technique que sociale.

A partir de 1963, les crédits affectés sont trop faibles pour permettre un travail de terrain effectif. Par ailleurs, presque totalement isolée des autres laboratoires de recherche, et sans moyens de fonctionnement, la recherche hydrobiologique malienne est rapidement marginalisée et ne participe presque plus aux prises de décision concernant la gestion du secteur halieutique. Ce n'est qu'en 1983, en situation de crise, que le Gouvernement envisage de relancer les études scientifiques, avec le concours de l'ORSTOM (projet d'études halieutiques du Delta central du Niger), pour rechercher les causes exactes de cette crise et définir des solutions propres à un retour à la paix sociale et à une production équilibrée.

Les recherches entreprises, débutées en 1986, ont pour caractéristiques majeures d'être pluridisciplinaires et limitées dans le temps. Les recherches sont menées conjointement par l'ORSTOM et l'Institut de recherche zootechnique, forestière et hydrobiologique, qui deviendra l'IER (Institut d'économie rurale). Ces recherches ont abouti à une centaine de publications et à l'édition d'un ouvrage en deux volumes sur la pêche deltaïque et sa gestion. Les deux principales conclusions de ces travaux concernent, d'une part, l'état des stocks et de leur gestion, et, d'autre part, la nature des ressources à préserver. Les recherches mettent également en évidence le fait que les causes de la crise ne proviennent pas directement de facteurs biologiques, mais d'un modèle de gestion, imposé par l'Etat dans les années soixante, et inadapté au contexte biologique local ainsi qu'à la culture des sociétés de pêcheurs (manque d'association des pêcheurs aux processus de gestion des pêcheries notamment).

Il existe actuellement au Mali un large consensus pour reconnaître l'importance de la recherche dans la gestion des pêcheries, et des initiatives ont d'ores et déjà été prises pour rapprocher les structures de recherche et les administration dans un processus de dialogue et de coopération. L'IER a pour sa part entrepris une profonde restructuration, et initie actuellement de nouvelles dynamiques de recherches favorables aux études halieutiques, aux niveaux national et de la région du Delta central du Niger à travers le Centre de recherche agronomique (CRA) de Mopti. Le CRA Mopti est notamment en train de développer deux principaux axes de recherche, avec le concours de l'ORSTOM: un programme de mise en place d'un observatoire des pêches dans le Delta central, qui pourrait conduire à terme à la mise en place d'un système d'information géographique; et la conduite d'études socio-anthropologiques sur la pêche.

Par ailleurs, malgré quelques problèmes d'effectifs (uniquement un biologiste et un anthropologue), le laboratoire de Mopti dispose désormais d'informations et de savoir-faire reconnu en matière de recherche pour le développement durable des pêcheries.

Dans le domaine de la formation des cadres et techniciens, il existe différentes filières pour le secteur "forestier". Les cadres de conception sont formés à L'institut Polytechnique Rural de Katibougou(IPR), qui relève du Ministère de l'éducation nationale. La formation se déroule sur cinq ans après le baccalauréat, dont deux années préparatoires et trois années de spécialisation sanctionnées par la rédaction d'un mémoire de fin de cycle. L'Institut Supérieur de Formation et de Recherche Appliquée (ISFRA), qui relève également du Ministère de l'éducation nationale, dispense aussi une formation à l'attention des cadres de conception. L'ISFRA permet ainsi aux ingénieurs d'obtenir un Diplôme d'Études Approfondies en deux ans ou un Doctorat de troisième cycle en cinq ans.

Les cadres intermédiaires sont formés par l'IPR, en quatre ans, dont un tronc commun en première année, puis une formation spécialisée de deux ans théorique et pratique, et une dernière année de stage/rédaction d'un rapport. Les cadres et techniciens de terrain sont formés par le Centre de formation pratique forestier de Tabakoro, placé sous la tutelle du MDRE. La formation dure trois ans et prépare les futurs Agents techniques des eaux et forêts.

Le Laboratoire d'hydrobiologie de Mopti est associé au cas par cas aux enseignements, et encadre des stages. Dans le passé, l'OPM a également dispensé des cours de formation pour les moniteurs et les agents de vulgarisation, ainsi que des cours d'alphabétisation fonctionnelle. Cependant, dans ces différents enseignements, la part réservée à l'étude des écosystèmes aquatiques, du poisson, de la pêche ou de la pisciculture reste relativement faible. Jusqu'à présent l'acquisition de compétences réelles dans ces différents domaines a toujours nécessité des séjours à l'étranger, ou des spécialisations obtenues dans le cadre de projets. Le projet pisciculture MLI/86/001 a notamment conduit des stages de formation entre 1992 et 1994 pour un montant global estimé à 3,3 millions FCFA.

Les nouvelles orientations politiques concernant la gestion décentralisée des ressources naturelles ont conduit le gouvernement malien à mener une réflexion approfondie sur les besoins de la formation forestière. Un premier document a été élaboré sur ce sujet en 1994 (Diagnostic de la Formation Forestière au Mali), qui souligne notamment l'inadaptation actuelle des filières de formation à l'évolution des besoins du pays et de l'économie, et la place insuffisante laissée aux élèves issus du monde rural. Le document révèle également un besoin clairement exprimé de recyclage et de formation permanente, notamment en planification, gestion de projets et aménagement des terroirs. Les techniciens et les agents de terrain, pour leur part, sont demandeurs de compléments de formation en matière d'animation et de vulgarisation, de législation, et de conservation des eaux et des sols.

3.4 Crédit

Il n'existe à l'heure actuelle aucune forme de crédit institutionnel dans le secteur de la pêche et de la pisciculture au Mali. Le financement des activités repose par conséquent, en dehors de l'autofinancement, sur des formes de crédit informel parmi lesquelles le crédit commerçant qui correspond à une vente à crédit de matériel par des commerçants ambulants, remboursable en cours de campagne. Les intérêts du crédit sont compris dans le prix de vente du matériel, dont le montant peut avoisiner 40% du prix du marché. Le crédit commerçant est souvent invoqué pour expliquer la faiblesse des revenus des ménages de pêcheurs. Toutefois, cette assertion n'a jamais pu être clairement argumentée.

Plusieurs expériences de crédit rural institutionnel ont été menées depuis les années 70, dont certaines concernaient les systèmes de financement de la pêche, mais les résultats ont été mitigés. Depuis la fin des années 80, des systèmes de financement existent qui reposent sur des contrats passés entre la Banque nationale de développement agricole (BNDA) et des organisations villageoises (associations villageoises, tons, coopératives), sur la base du principe de la caution solidaire. Cependant, hâtivement mis en place à partir d'associations villageoises et autres structures coopératives initiées par l'Etat, ces systèmes ont donné lieu à de nombreux dysfonctionnements et se sont soldés par des échecs aussi bien en milieu agriculteur qu'en milieu pêcheur (environ 150 à 200 millions FCFA de prêts impayés au niveau de la zone du Delta Central). Ces systèmes sont actuellement remis en cause en raison des impayés, et de l'effritement de la confiance des agriculteurs envers le système coopératif.

En parallèle, des ONGs ont développé des systèmes de crédit gérés au sein de micro-projets (caisse d'épargne et de crédit, crédit mutuel), mais ces expériences concernent peu la pêche.

Une réflexion est actuellement menée au sein du MDRE pour définir une nouvelle politique dans le domaine du crédit rural, qui tienne compte du bilan des expériences du passé. Un Séminaire a été notamment organisé en juin 1996. Dans ce contexte, une distinction dans les systèmes de crédit pourrait être faite entre la dimension villageoise (projets communautaires) et la dimension purement économique (ex. projet d'un groupe d'individus dans un secteur particulier), la caution solidaire ne se plaçant par conséquent plus forcément au niveau du village.

Si aujourd'hui, il paraît vivement souhaitable d'améliorer les conditions de financement des activités de pêche, il convient de reconnaître néanmoins que le système informel, qui repose par ailleurs sur une culture et des rapports sociaux méconnus des organismes de prêts officiels (Kassibo, 1988), a permis jusqu'à présent de soutenir l'activité de pêche en dépit d'un environnement économique peu favorable à l'investissement. La pêche est en effet un secteur économique qui fait largement appel à du capital-risque, compte tenu du caractère aléatoire de la production et donc de la difficulté à planifier les investissements. Par conséquent, tout processus de mise en place d'un système de crédit institutionnel devrait être précédé d'une étude approfondie, non seulement des conditions de faisabilité économique, mais aussi des conditions d'acceptabilité culturelle et sociale.

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