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L'enseignement forestier en Afrique Nouvelles orientations

Laurence Roche

Laurence Roche a écrit le présent article alors qu'il était professeur de sylviculture et chef du département forestier de l'université d'Ibadan, au Nigeria. Il quittait ce poste en octobre pour prendre celui de chef du Department of Forestry and Wood Sciences, University College of North Wales, Bangor.

Comment l'enseignement forestier évolue-t-il et est-il appelé à évoluer dans les universités d'Afrique? Non pas, dit l'auteur, selon le modèle des écoles forestières des pays développés. Les programmes en sont dictés par les impératifs sociaux et écologiques et les réalités propres à l'Afrique. L'auteur décrit les nouvelles orientations dans lesquelles on s'engage et en explique le pourquoi.

L'homme est appelé à jouer en Afrique un rôle de premier plan, il est au centre de la scène et maintes options - philosophiques, écologiques, sociales et économiques - s'offrent encore à lui, qu'il s'occupe actuellement d'examiner. Sur une toile de fond faite de changements sociaux, d'innovations institutionnelles et de développement, j'essaierai de décrire dans leurs grandes lignes les tendances et les problèmes de l'enseignement forestier en Afrique, tel que, de loin, je les vois. J'insisterai cependant davantage sur le rôle de la foresterie dans le développement socio-économique et l'équilibre écologique de l'environnement humain en Afrique, car ce n'est qu'en en saisissant bien le rôle que l'on peut donner tout leur sens aux projections quantitatives en matière d'enseignement forestier en Afrique.

L'examen des tendances et des problèmes de l'enseignement forestier en Afrique ne saurait être dissocié des réalités écologiques, sociales et économiques qui caractérisent généralement les sociétés non industrialisées. Si la chose était possible, il suffirait que nous formions des diplômés qui passeraient le reste de leur vie à produire et à transformer de la cellulose au lieu de préparer des hommes et des femmes à participer plus largement à l'édification de leur nation.

Bien que le principe de cette préparation soit des plus judicieux, on peut arguer que c'est là tout son mérite et qu'il n'aide en rien à produire de la cellulose, encore moins des hydrates de carbone et des protéines. Cependant, on peut aussi soutenir qu'un tel principe n'est pas qu'un bel idéal mais bien une option pratique pour l'enseignement forestier dans les Etats modernes d'Afrique. C'est ainsi que, pour ma part, je l'entends. On trouve dans l'ouvrage de Barbara Ward et René Dubos, intitulé Nous n'avons qu'une terre et commandé à l'origine par la Conférence des Nations Unies sur l'environnement, un chapitre édifiant sur les politiques de croissance dans les sociétés non industrielles. Cet ouvrage, qui fait état des points de vue de plus de soixante-dix personnalités scientifiques et intellectuelles appartenant à cinquante-huit pays développés et en développement, devrait être lu par tous les étudiants en aménagement des ressources naturelles. L'extrait qui en est donné ci-après touche à mon avis de très près l'enseignement forestier en Afrique:

Partout où un capital rare et concentré remplace une main-d'œuvre abondante, la situation est économiquement et écologiquement malsaine, et cela pour une quantité de raisons. Tout d'abord, on a constaté dans plusieurs pays en voie de développement très divers - l'Inde, le Brésil, le Kenya, la Colombie - que le petit propriétaire qui emploie sa propre main-d'œuvre sur les terres familiales obtient un rendement par hectare plus élevé que le gros colon, Quelques-uns des rendements les plus élevés ont été enregistrés dans les pays où une limitation du droit de propriété avait été strictement édictée. Cette productivité n'est pas assurée par de lourdes machines qui consomment de l'essence et peuvent facilement endommager un sol fragile, mais par un travail manuel doublé d'un équipement léger qui, par définition, est moins enclin à déterminer des risques écologiques. Les engrais et les pesticides sont moins largement utilisés, l'humus et les déchets animaux plus soigneusement employés. Du fait d'un plus grand soin personnel apporté aux travaux, les terrassements sont maintenus en bon ordre, des arbres destinés à produire de l'ombre sont plantés, des rigoles sont creusées. Et les gains ne sont pas dépensés, comme c'est si souvent le cas dans l'économie semi-féodale, pour acquérir de nouvelles terres à utilisation extensive, ce qui fait monter le prix du terrain et contribue à éloigner de plus en plus de cultivateurs actifs de la terre. Ces gains ne sont pas non plus détournés de l'économie rurale pour développer des normes «occidentales» de consommation.

Les auteurs font ensuite observer: La «révolution verte» doit s'effectuer dans le cadre social d'une réforme agraire et d'une participation populaire qui assure le maximum d'emplois et une distribution optimale des gains découlant de la nouvelle productivité. D'autre part, ses méthodes très élaborées, quelles qu'elles soient, doivent être «emboîtées» dans un contexte qui implique des services plus étendus, une recherche agricole, des centres de formation agraire, l'alphabétisation des adultes et une supervision énergique: c'est par exemple ce qui a permis au Danemark, au dix-neuvième siècle, de développer l'agriculture la plus rentable d'Europe autour de petites fermes, de coopératives et d'écoles pour tous.

En outre, tout cet ensemble de connaissances techniques doit être profondément enraciné dans les conditions réelles de l'environnement: nature des sols locaux, climat, espèces végétales; il faut tenir compte de toute la sagesse traditionnelle que la culture pratique a accumulée au cours des millénaires. Le type de combinaisons écologiques nécessaires n'est pas de celles qu'on peut apporter toutes faites en provenance des systèmes agraires hautement mécanisés des pays tempérés.

Il s'agit bien plutôt d'un mélange de science moderne, d'ingéniosité locale et de responsabilité des indigènes, laquelle est en définitive au centre de tout équilibre écologique vraiment efficace et durable.

Si un forestier diplômé en Afrique s'en tient à la fabrication ou à la transformation de la cellulose, il va de soi que son rôle dans le développement socio-économique de son pays est des plus limités. Pourtant, il n'en reste pas moins que, aussi erronée, aussi éloignée qu'ait été sa formation des réalités, écologiques, sociales et économiques du pays dans lequel il vit, ces réalités l'obligent, une fois diplôme, à aborder un large éventail de tâches davantage en rapport avec l'aménagement des ressources naturelles qu'avec la foresterie au sens le plus étroit du terme.

C'est ainsi qu'au sortir de leurs études, les diplômés du département de l'aménagement des ressources forestières de l'université d'Ibadan peuvent être appelés, à établir et aménager des réserves de gibier; à diriger les semailles de grandes quantités de maïs et de manioc puis la récolte, la transformation et la commercialisation de ces produits en provenance des systèmes taungya officiels, à établir des plantations de bois à pâte et à papier dans la région de, la forêt humide, ou encore à mettre sur pied des rideaux-abris dans les ragions de savane du nord. Dans l'accomplissement de leur mission, ils sont immanquablement amenés à exécuter des tâches auxquelles les formes traditionnelles de l'enseignement forestier les préparent insuffisamment et qui exigent, pour être menées à bien dans le contexte africain, ce mélange de science moderne, de responsabilité et d'ingéniosité qu'évoquent Ward et Dubos.

Environnement agricole et forestier

La grande majorité des populations africaines vit encore dans un environnement agricole et forestier et quelles que soient leurs fonctions, c'est en général dans cet environnement que se retrouvent les forestiers en quittant l'université. Il est donc bien rare que ces derniers puissent se dissocier des problèmes quotidiens de subsistance qui assaillent les populations rurales.

Le rôle que le forestier diplômé peut jouer dans le développement de cet environnement est désormais évident, les gouvernements africains reconnaissant de plus en plus la nécessité de centres contrôlés de croissance rurale étayés sur des industries variées faisant appel aux ressources naturelles, comme par exemple les industries forestières. La preuve étant faite que l'expansion d'un ou deux grands complexes industriels urbains excluant la terre, ses ressources et la population, et s'appuyant sur une technologie t une structure étrangères, ne permet pas une distribution équitable des fruits du développement dans de nombreux pays du monde, dont l'Afrique (voir Mabogunje, 1974, pour une analyse édifiante de ce problème au Nigeria), on tend nettement à présent à développer l'économie rurale.

Les options de développement sont donc encore très largement ouvertes en Afrique, et l'enseignement forestier dans les pays africains devrait s'en ressentir de façon sensible.

Des experts étrangers

L'enseignement forestier au niveau universitaire est d'institution très récente en Afrique; il est encore dans son enfance et se limite à un très petit nombre de pays. Aussi n'est-il pas possible d'envisager sur ce continent diverses méthodes de procéder à cet enseignement. Les départements forestiers actuellement établis en Ouganda, en Tanzanie et au Zaïre n'en sont encore qu'aux tout premiers stades de développement, dépendent toujours largement, à l'exception de l'Ouganda, d'experts étrangers, et sont loin d'être prêts à accepter et à mettre en application une philosophie préconçue de l'enseignement dans ce domaine. Bien que l'école forestière du Libéria soit une institution plus ancienne, on peut dire qu'elle en est aussi aux premiers stades de croissance et de développement.

Le département de l'aménagement des ressources forestières d'Ibadan a dépassé le stade de l'établissement, il est entré dans une phase vigoureuse d'expansion et de diversification grâce à l'impulsion donnée par un personnel à prédominance nigériane, au recrutement accru d'étudiants et aux sollicitations de quatorze départements forestiers étatiques et fédéraux. Ce département constitue l'une des trois grandes divisions de la faculté d'agriculture, de foresterie et de science vétérinaire. Le Sénat a approuvé récemment une proposition visant à remplacer l'ancienne désignation «département forestier» par celle de «département des ressources forestières».

Le département attire des étudiants de toute l'Afrique, à la fois pré-universitaires et universitaires, et aussi de certains pays d'outre-mer. Actuellement, il compte 93 inscrits. Il comprend 20 chaires d'enseignement supérieur dont moins de la moitié concerne la foresterie, le reste embrassant des disciplines très variées de l'aménagement des ressources, dont l'aménagement de la faune, des parcours et des pêches en eau douce. Ce personnel enseignant est renforcé de temps a autre par des professeurs itinérants provenant d'autres universités; l'établissement dispose aussi d'un effectif de 24 personnes au niveau subalterne et intermédiaire.

Une porte ouverte

Il serait donc bon d'expliquer dans leurs grandes lignes certains des aspects des tâches d'enseignement et de recherche dans le département d'Ibadan, tels que mes collègues et moi les voyons. Il n'est pas question d'examiner tous les aspects des disciplines de foresterie et d'aménagement des ressources dont s'occupe le département, mais seulement de se pencher sur ceux d'entre eux qui illustrent les possibilités de la foresterie et des disciplines qui s'y rattachent comme instruments de développement et de prospérité rurale au Nigeria. C'est ainsi, par exemple, qu'au lieu d'examiner les problèmes bien connus et d'importance capitale que pose l'aménagement de vastes plantations industrielles d'une seule espèce d'exotiques, comme on est en train d'en installer au Nigeria et dans beaucoup d'autres régions d'Afrique (et qui sont, bien entendu, une partie essentielle du programme d'enseignement et de recherche du département), on étudiera la possibilité d'établir et d'aménager quelques-unes au moins de ces plantations de manière qu'elles profitent davantage et plus immédiatement au développement socio-économique et à l'équilibre écologique de l'environnement au Nigeria.

DES ÉTUDIANTS DU NIGERIA S'INITIENT A L'EMPLOI DU THÉODOLITE un regard vers l'avenir

Agro-sylviculture

La création de grandes plantations d'une seule espèce d'arbres exotiques a lieu dans toute l'Afrique et presque toujours aux dépens de la haute futaie riche en espèces ou des formations boisées de la savane. Ces plantations sont en général mises en place par l'Etat dans les réserves forestières. Dans les Etats méridionaux du Nigeria, l'agriculteur peut cultiver dans la réserve s'il nettoie les parcelles forestières exploitées, mais encore fortement boisées en général, et plante des espèces forestières exotiques à croissance rapide, en même temps que ses cultures agricoles. Au bout de trois ans environ, selon les espèces utilisées, la voûte foliaire du peuplement se referme; l'agriculteur se voit alors attribuer un autre terrain et le cycle recommence. C'est ainsi que plus de 8000 hectares de réserves forestières sont chaque année mis à la disposition de l'agriculture. On désigne traditionnellement ce système sous l'appellation de taungya, son nom birman.

Dans l'Etat du Sud-Est, des politiques ingénieuses ont permis d'intégrer le système taungya sur la base du rendement soutenu dans les plans d'aménagement des plantations industrielles de Gmelina arbores destiné à la fabrication de la pâte et du papier. Le travail étant effectué par la main-d'œuvre départementale, la division des forêts est de ce fait le plus gros producteur alimentaire de l'Etat

Tel qu'il se pratique dans l'Etat du Sud-Est, le taungya peut être considéré comme un système de culture mixte dans lequel prédominent les essences forestières productrices de bois. A Ibadan, ce système est étudié de très près, en coopération avec la division des forêts de l'Etat et les notables locaux, afin d'en démontrer l'intérêt aux petits cultivateurs opérant en dehors des réserves. Pour le moment, rien ne permet de penser qu'il soit impossible de pratiquer une exploitation forestière commerciale (pour le bois) à courte révolution (moins de dix ans) sur les superficies à jachère arbustive en dehors des réserves.

Si l'on arrive à prouver que l'opération est possible, le retentissement sur le développement rural pourrait être énorme. L'entreprise forestière privée serait aussi étendue aux petits exploitants qui, pour des raisons historiques, considèrent la foresterie comme un monopole du gouvernement, et la jachère arbustive, si gaspilleuse de terres, serait remplacée par une culture commerciale sous forme de bois vendable, qui pourrait donner ce surcroît d'impulsion économique nécessaire pour arracher l'agriculteur à son économie de subsistance. Le département des forêts d'Ibadan examine la question sous tous ses angles, notamment sous ceux du mélange approprié d'espèces, de la longueur de la rotation des coupes, de la fertilité du sol après abattage, des incidences socio-économiques et de l'implantation de petites industries du bois telles que fabriques de charbon de bois, scieries, etc., qui pourraient être intégrées dans les parcelles boisées privées.

Le développement d'un agro-écosystème tropical à rendement soutenu (Jansen, 1973), comme celui dont il est question ici, demande avant tout une approche globale à laquelle ne se prête pas le cadre de la pratique forestière traditionnelle, mais qui devrait être la règle dans les écoles forestières des pays non industrialisés comme ceux d'Afrique.

La faune sauvage, source de protéines

Charter (1973) a analysé les statistiques sur la valeur économique de la faune sauvage au Nigeria. Les moyennes générales de production de denrées animales dans les régions rurales du sud du Nigeria montrent que 19 pour cent environ de ces denrées proviennent d'animaux sauvages, 60 pour cent du poisson et seulement 21 pour cent de l'élevage. La consommation nationale de viande de gibier a été évaluée à 20,4 millions de naira (34 millions de dollars U.S.) par an, et celle de toutes les viandes fournies par les animaux domestiques à 26 millions de naira (43,3 millions de dollars). Les pourcentages les plus élevés de consommation de viande de gibier sont le fait des région, situées à l'intérieur ou à proximité des réserves forestières (par exemple: Benin 82 pour cent, Uyo 84 pour cent, Calabar 80 pour cent et Ondo 67 pour cent).

Ces statistiques présentent un certain nombre de caractéristiques frappantes sur lesquelles nous ne nous étendrons pas ici. Il suffira de faire remarquer que si une ressource naturelle non aménagée, qui a fait l'objet de destructions massives, peut fournir l'essentiel des protéines consommées par une large fraction de la population rurale, on peut escompter un rendement bien supérieur si on l'aménage. Il en va de même pour les ressources halieutiques.

UN COURS DE FORESTERIE A L'UNIVERSITÉ D'IBADAN venus de toutes les régions d'Afrique

Protection de la faune sauvage

L'établissement de réserves de gibier ainsi que la protection et l'aménagement des animaux sauvages sont actuellement une préoccupation majeure des divisions forestières de chacun des douze Etats du Nigeria; il semble certain que le patrimoine de faune sauvage du Nigeria sera sauvegardé et aménagé de façon durable mais à l'intention de qui, telle est la question que nous nous posons à Ibadan. C'est ainsi que tout en s'intéressant beaucoup à la conservation et à l'aménagement de la vie sauvage sous la plupart de ses aspects, le département porte une attention particulière aux domaines qui se rattachent au développement rural, tels que la domestication des petits mammifères qu'on utilise déjà largement pour: L'alimentation dans les zones rurales, et la production animale des réserves à gibier au bénéfice des populations locales.

De l'étude des bilans alimentaires de nombreux pays non industrialisés, il ressortirait que la quantité et la qualité des aliments disponibles pour la consommation soient loin d'être ce qu'il faudrait pour assurer une bonne santé. Cependant, il est non moins courant de constater que les habitants de beaucoup de ces pays, en particulier en Afrique occidentale, ne paraissent pas souffrir de la faim et de la malnutrition (Nicol, 1972). Cela tient à ce que, en réalité, l'abondance des ressources naturelles des forêts, des bois, des lacs et des rivières, dans les régions qui en sont dotées, fournit de grandes quantités de protéines et d'hydrates de carbone dont ne tiennent pas compte ces bilans alimentaires et que négligent généralement les plans visant à intensifier la production alimentaire sous les tropiques. On a déjà évoqué cette possibilité à propos de la faune sauvage, source de protéines, mais il ne faut pas oublier non plus les récoltes quotidiennes de fruits, de noix, de feuilles, de pousses et d'écorces, tous ingrédients qui entrent couramment dans une quantité de plats traditionnels africains.

C'est dans cet esprit que le département d'Ibadan entreprend des études génétiques sur les arbres producteurs d'aliments au Nigeria. Okafor (1974), qui au Nigeria a fait figure de pionnier dans ce domaine, signale la place importante qu'occupent, dans le régime des populations rurales, les fruits et les graines d'arbres tels que Chrysophyllum albidum, Dacryodes edulis, Irvingia gabonensis, Pentaclethra macrophylla et Treculia africana, et fait observer que leur production à grande échelle ne peut qu'accroître la production alimentaire du pays. Ces études seront ultérieurement étendues aux arbres nourriciers des régions de savane plus sèche du nord, par exemple, Butyrospermum parkii, Parkia clappertoniana, et aux autres, essences qui fournissent des produits commerciaux d'une certaine importance pour l'économie rurale du nord.

L'objet de ces études est de réunir des données essentielles sur leur distribution, leurs cycles de végétation et de reproduction, et l'importance des variations génétiques à l'intérieur des espèces, ce qui constitue un préalable indispensable à leur domestication.

Voilà donc des exemples pris dans le programme d'enseignement et de recherche du département afin d'illustrer la manière dont on peut mettre en pratique quelques-uns des principes abordés dans cet article. Il convient toutefois de souligner qu'il ne s'agit là que de certains aspects du programme du département, lequel embrasse une gamme de disciplines intéressant la forêt et ses ressources renouvelables, trop vaste pour être examinée ici.

Il est évident que la mise en œuvre d'un programme d'enseignement et de recherche sur l'aménagement des ressources naturelles renouvelables, qui se proposerait de couvrir effectivement des activités telles que celles qui ont été esquissées ici, demanderait un cycle d'études étalé sur quatre ans et non sur trois comme c'est actuellement le cas à Ibadan. Pendant la quatrième année, on pourrait dispenser une combinaison de cours sur chacune des grandes disciplines en matière d'aménagement des ressources pour lesquelles le département dispose de la compétence nécessaire. Wyatt-Smith (1966) a amorcé l'examen de cette question, aujourd'hui bien avancé, et un programme de formation sur quatre ans sera prochainement introduit à Ibadan.

Des connaissances techniques

Le présent article s'attachant à traiter les tendances et problèmes de l'enseignement forestier en Afrique plutôt que l'enseignement forestier en soi, il passe nécessairement sous silence certains aspects importants de cet enseignement. Il faut souligner cependant que l'Afrique aura toujours plus besoin de connaissances techniques poussées dans tous les domaines de la sylviculture, de l'aménagement des grandes plantations industrielles, de l'aménagement des écosystèmes forestiers naturels subsistants, de l'utilisation du bois, de l'économie et l'ingénierie forestière. L'effort principal d'un programme universitaire d'enseignement et de recherche dans ces domaines devra être d'assurer ces connaissances.

L'université d'Ibadan possède un institut de sciences appliquées et de technologie, qui délivre des diplômes de technicien du bois et d'ingénieur forestier. Ces études exigent des connaissances solides en mathématiques et physique. Le département de l'aménagement des ressources forestières peut donc se concentrer d'une part sur les sujets (par exemple, anatomie du bois) touchant au bois en tant que produit de biologie industrielle, c'est-à-dire influencé par la sélection, le traitement de la station, l'espacement et la provenance, et d'autre part sur les sujets qui se rattachent au rendement soutenu et à la stabilité de l'écosystème naturel ou artificiel.

Cette division du travail est souhaitable en Afrique dans toute la mesure possible, la technique du bois et l'ingénierie forestière relevant davantage d'un ingénieur que d'un spécialiste de la sylviculture et des ressources naturelles renouvelables. Il ne s'agit pas pour autant d'exclure du programme d'études du département des forêts les sujets touchant aux sciences du bois et aux opérations forestières qui sont à cheval sur la biologie et la physique, et dont il est question dans le dernier paragraphe.

Des industries forestières hautement efficaces et compétitives peuvent être créées dans les pays d'Afrique et le seront. Mieux encore, elles peuvent l'être tout en tenant compte des aspects capitaux de la foresterie gui touchent de si près aux réalités socio-économiques et écologiques des nations africaines, ainsi qu'à la qualité professionnelle et à la conscience sociale des jeunes hommes et des jeunes femmes que forment les universités africaines dans ce domaine.

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