AVANT - PROPOS
La pisciculture de la Damalongo, répondant au toponyme du marigot qui l'alimente, a été construite fin 1983 et au cours du 1 er semestre 1984.
Ce site, ayant été abandonné jadis pour de multiples raisons, fut racheté par le Centre piscicole de Bambari - Bengué pour la somme de 26.000 f CFA. Il comprenait une dizaine de petits bassins familiaux de superficie individuelle inférieure à 1 are.
Il fut donné par la suite aux manoeuvres de la station Bengué sous certaines conditions précises d'exploitation. Nous disposons par ce biais de gens compétents par excellence pour construire une pisciculture artisanale avec Tilapia nilotica et démontrer le potentiel de ce type d'activité sur base de ressources rustiques et locales.
Une carte du site se trouve au début de l'annexe (confer tabl. 1)
Nous remercions le PAM pour son aide alimentaire et dont le seul souci est de coopérer dans ce type de programme communautaire.
Tableau 1 : les bassins, superficie et alimentation en eau
Bassins | Propriétaires | Surface (are) | Type d'alimentation |
DI | Renekouzou P. | marigot A en dérivation | |
DII | Endjikessé N. | 2,0 | marigot A en dérivation |
DIII | Endjikessé N. | 2,0 | marigot A en dérivation |
DIV | Benza B. Ngandremo P. | 5,0 | marigot A en dérivation et Damalongo |
DV | Endjikessé N. | 2,9 | en série DVI |
DVI | Endjikessé N. | 3,6 | Damalongo en dérivation |
DVII | Koyaguitrembi M. | 2,5 | Damalongo en dérivation |
DVIII | Endjikessé N. | Damalongo en dérivetion | |
DIX | Ngate B. | 2,4 | Marigot A en dérivation ou Damalongo |
DX | Ngate B. | 3,0 | Damalongo en dérivation |
UTP 1 | Union des travailleurs piscicoles | 3,8 | Damalongo en dérivation |
UTP 2 | " | 1,9 | en série UTP 1 |
UTP 3 | " | 1,8 | en série UTP 2 |
UTP 4 | " | 1,9 | marigot A en série DIX ou Damalongo |
S1 | bassin de stockage | 0,5 | Damalongo en dérivation |
33,3 ares |
1. Objectifs poursuivis
1.1. Outil didactique rural
Trop souvent, les résultats, bilans et démonstrations proposés pour vulgariser et rallier à la pisciculture de nouveaux paysans sont donnés sur base de rendements et de recettes obtenus dans des Centres Piscicoles Nationaux ou avec l'intervention de matériaux de construction (ciment, planches, élevages associés et leur infrastructure…) et de financements extérieurs.
Avant de débuter le travail à la Damalongo, nous nous sommes gardés de faire intervenir des fonds extérieurs et des matériaux, afin de maximiser les potentialités du milieu rural, tant soit au niveau de la construction des bassins qu'au niveau de leur gestion et de leur alimentation. Nos interventions se résument essentiellemnt à un solide encadrement, à l'utilisation du matériel piscicole Unicef des animateurs ruraux, ainsi qu'à l'aide alimentaire du PAM tout au long des travaux.
Cette pisciculture, tâchant de rassembler toutes les exigences recommandées en pisciculture rurale (construction, alimentation, gestion), nous sert actuellement d'outil didactique rural et de référence pratique entre autres lors des séances de formation et de recyclage du personnel d'encadrement. Les intéressés peuvent assister aux vidanges, visualiser les exigences de construction, constater la présence effective des compostiéres et disposer de résultats tangibles de production, de rendement et de vente du poisson.
1.2. Production piscicole
Outre l'aspect didactique, la station alimente le marché par ses ventes de poisson et supplée le centre de Bambari pour les fournitures d'alevins, les recettes de la vente revenant aux propriétaires respectifs.
2. Paramètres géo-physiques
La pisciculture est située à 3 kilomètres à l'Est de Bambari sur le tronçon de la Transafricaine menant à Alindao. Elle est distante de 2 km seulement de la Station Piscicole de la Bengué. Un accès automobile via l'abattoir de Bambari a été aménagé.
Le versant qu'occupe la pisciculture était initialement irrigué par un marigot A (Nguimanga, confer carte 1). De débit faible et saisonnier, il ne pouvait, malgré la propicité du site, alimenter une station, tout au plus trois bassins de 2ares. La Damalongo, d'un débit régulier et abondant, fut dérivée en amont de la station par un barrage et un canal de maniére à gagner 10 mètres de dénivellé par rapport au point le plus bas de la station et à changer de versant pour alimenter l'actuelle station.
nature du sol | : | versant argileux; graveleux et sableux à proximité du lit du marigot A |
pente du sol | : | pente douce et régulière de l'ordre de 4% sur les versants travaillés |
pluviométrie | : | Bambari connaît 2 saisons climatiques au cours de l'année. Le débit de la Damalongo dépasse largement la capacité de la surface piscicole exploitée: les problèmes de manque d'eau durant la saison sèche ne se posent pas. |
débit en eau disponible : | 1/sec | 1/sec |
saison sèche | saison des pluies | |
marigot A | 1,0 | 4,0 |
Damalongo | 20,0 | 50,0 |
3. Avantages intrinsèques au site
4. Réhabilitation du site
a) les propriétaires
La construction et l'exploitation des bassins a été confiée à 12 employés de la Station Piscicole de la Bengué avec, à leur tête, un responsable de chantier. En plus de ce dernier, l'animateur responsable de ce secteur qui possède aussi des bassins sur le site, assure la coordination avec la station.
Tous les travaux de construction se sont effectués volontairement et en dehors des heures de services.
b) travaux
Les travaux ont consistés en:
l'aménagement d'un barrage sur la Damalongo
la construction d'un canal de dérivation
le remembrement et l'aggrandissement des bassins existant initialement
la construction de nouveaux bassins
la construction d'un bassin de stockage (51, 0,5 ares). Un tuyau en PVC en guise de moine et une pêcherie en ciment y furent aménagés (½ sac de ciment)
un nouveau tracé pour le cours du marigot A
la mise en place de compostières et de déversoirs dans tous les bassins.
Ces travaux se sont effectués sur 8 mois.
En intégrant les bassins en construction actuellement (DI,DII,DIII et DVIII), la superficie totale de la station est de 38 ares.
c) conditions d'exploitation
Les superficies des bassins doivent être supérieures ou égales à 2 ares en fonction des possibilités offertes par le terrain.
Les profondeurs moyennes des bassins sont comprises entre 0,8 et 1,0 m, la cuvette étant en pente douce permettant une évacuation complète de celle-ci lors de la vidange.
Trop souvent des ruptures de bassins sont liées à la négligence lors de la construction des digues avec comme conséquence la perte du poisson, le découragement du pisciculteur et l'abandon du bassin. Nous avons particulièrement insisté sur ce point.
La présence d'une compostière permanente est obligatoire pour l'alimentation des poissons. De nombreuses ressources à proximité du site existent: graines de coton et déchets d'abattoir.
Une fois le site construit, il sera entretenu et exploité.
5. Gestion du site
a) résultats et discussion
Les résultats des vidanges contrôlées figurent au tableau 2.
Tableau 2 : premiers résultats d'exploitation
sup. (are) | date d' empoiss. | Pds à l'empoiss (kg) | date de vidange | Pds à vidange (kg) | Pds net (kg) | Nbre de jours de prod. | Rendement (kg/are/an) | |
2,9 | 9.11.83 | 6,0 | 16.4.84 | 86,0 | 80,0 | 159 | 63,4 | |
2,4 | 1.3.84 | 9,5 | 17.7.84 | 61,3 | 51,8 | 135 | 58,3 | |
3,8 | 18.2.84 | 27,0 | 27.7.84 | 104,0 | 77,0 | 160 | 46,7 | |
* | 2,5 | 21.3.84 | 9,0 | 24.7.84 | 38,9 | 29,4 | 125 | 34,3 |
1,9 | 21.6.84 | 9,0 | 17.9.84 | 51,1 | 42,1 | 88 | 91,9 | |
3,0 | 4.4.84 | 11,0 | 24.8.84 | 54,0 | 43,0 | 142 | 36,8 | |
2,9 | 21.6.84 | 8,0 | 13.12.84 | 64,8 | 56,8 | 175 | 41,6 | |
3,8 | 5.8.84 | 27,0 | 17.12.84 | 83,1 | 56,1 | 134 | 40,6 | |
* | 2,4 | 27.7.84 | 9,0 | 14.12.84 | 18,7 | 9,7 | 140 | (10,5) |
2,5 | 14.9.84 | 9,0 | 12.12.84 | 27,2 | 18,2 | 189 | 29,8 | |
3,0 | 19.10.84 | 3,0 | 15.12.84 | 25,7 | 22,7 | 57 | 48,5 | |
1,9 | 14.9.84 | 5,0 | 25.12.84 | 38,7 | 33,7 | 102 | 62,2 |
* : rupture de dïgue avec perte de poisson correspondant à une bais-se de rendement
Au cours du premier semestre 1985, ce site fut exploité pour une expérience de polyculture Tilapia nilotica - Clarias lazera avec alimentation à base de tourteau et fertilisation.
Nous pouvons constater que les rendements obtenus en pisciculture artisanale sont sensiblement pareils à ceux obtenus dans des centres piscicoles. Les frais d'investissement en main d'oeuvee et en aliments se résument à un peu de bonne volonté. Nous évaluons les rendements moyens de ce genre d'exploitation à 50 kg/are/an sur base de ces résultats et de ceux obtenus dans d'autres bassins à vocation artisanale dans la zone.
La Damalongo, avec ses 38 ares, serait en mesure de produire dans des conditions normales environ 1.900 kg de Tilapia par an. En nous référant au prix moyen de vante toutes catégories qui est de 505,2 f du kilo, cela constitue une recette annuelle de 959.880 f CFA pour les pisciculteurs de la Damalongo sans frais d'alimentation.
b) obstacles
Les obstacles en pisciculture rurale, lorsqu'ils ne sont pas d'ordre techniques, sont d'ordre ethnographique:
La présence de divinités animistes à proximité des points d'eau empêche les pisciculteurs d'habiter sur les sites piscicoles, favorisant ainsi les vols de poisson, les ruptures de digues et les débordements non contrôlés lors des crue (mamiwata).
La présence de la famille africaine au sens large constitue un facteur limitant pour le propriétaire dans ce type de pisciculture de rapport. Une différence non négligeable est généralement constatée entre la production nette vidangée et la part de poisson commercialisée: chaque vidange donne lieu, bon gré, mal gré, à une fête familiale aux frais du pisciculteur. Ce facteur limite fortement l'esprit d' entreprise dans les piscicultures de rapoort.
De nombreux autres facteurs d'ordre antropologique, difficilement perceptibles pour un expatrié sont présents et sont des facteurs entrant certainement en compte dans l'activité piscicole indépendamment de la résolution des problèmes techniques.
6. Conclusion et perspectives
Sur base de ces réalisations, nous confirmons les potentialités excellentes de la pisciculture du Tilapia nilotica en République Centrafricaine. Les centres piscicoles nationaux sont présents pour favoriser, sous forme de services divers, des exploitations de ce type. Obtenus sans réels investissements financiers, les rendements de la Damalongo sont à la portée de tous les pisciculteurs de bonne volonté pour peu qu'ils puissent bénéficier:
Le site de la Damalongo est loin d'être unique en R.C.A. .
En guise de perspectives, prenons un cas concret: un quidam consacre une partie de son temps à la construction de 7 bassins de 2 ares chacun. Il exploite ces 14 ares avec les rendements sus-mentionnés (50 kg/are/an) et produit annuellement 700 kg de poisson qu'il consomme et commercialise au marché et chez les autres pisciculteurs pour 505,2 f CFA. Deux vidanges par année et par bassin lui permettent de répartir correctement ses recettes sur l'année. Ses recettes mensuelles piscicoles s'élèveraient à 29.500 f CFA en espéces et en nature (consom mation du poisson par lui-même et sa famille). A titre indicatif, un manoeuvre du centre piscicole gagne de 10.000 à 17.000 f CFA par mois.