CFS:2001/2


 

COMITÉ DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE MONDIALE

Vingt-septième session

Rome, 28 mai - 1er juin 2001

ÉVALUATION DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE MONDIALE

Table des matières



I. RÉSUMÉ

1. Ce document débute par un examen de la situation actuelle de l'alimentation et de la nutrition dans les pays en développement. Puis, on passe brièvement en revue les variations de la prévalence et du nombre de personnes sous-alimentées, par sous-région, depuis 1979-81, pour ensuite les comparer aux deux périodes triennales les plus récentes, à savoir 1995-97 et 1996-98. Ces deux dernières périodes illustrent la situation prévalant à l'époque du Sommet mondial de l'alimentation et juste après. À l'exception de deux sous-régions, on constate une augmentation des valeurs absolues dans sept sous-régions, et des poussées de la prévalence comme du nombre absolu de personnes souffrant chroniquement de la faim dans trois sous-régions. Pendant ces deux périodes, les données pour les autres indicateurs - état de la consommation alimentaire, état sanitaire et état nutritionnel - mettent en évidence une grave détérioration de la diversité des régimes alimentaires, un indicateur étroitement lié à la sécurité alimentaire, dans plusieurs pays d'Afrique subsaharienne. C'est aussi l'unique région où l'espérance de vie semble décliner en dépit d'une faible amélioration du taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans.

2. On passe ensuite en revue les principaux endroits où sévissait la faim début 2001. Sur les 35 pays qui sont cette année confrontés à des crises alimentaires, 16 se trouvent en Afrique subsaharienne. De très graves problèmes persistent toutefois en Afghanistan, en Mongolie et en République populaire démocratique de Corée en raison de la sécheresse et de l'hiver particulièrement rude et froid qui sévit dans ces trois pays, sans compter les troubles civils qui perdurent en Afghanistan.

3. Puis vient un examen des perspectives des disponibilités alimentaires et de l'accès aux vivres, ainsi que de la sécurité sanitaire des denrées alimentaires sur la base des dernières informations disponibles. Globalement, les indications laissent présager un léger fléchissement de l'offre dans les pays importateurs de céréales au cours de la campagne 2000/01, atténué par de nouveaux prélèvements sur les stocks et des cours relativement faibles. Les perspectives de la croissance économique sont généralement bonnes, avec une hausse du revenu par habitant dans les régions en développement qui devrait se situer entre 6 pour cent en Asie orientale et 1,5 pour cent en Afrique subsaharienne. Ces taux pourront-ils effectivement être atteints dans le contexte mondial de contraction économique? Comment cette croissance sera-t-elle distribuée? Ces questions pèsent lourdement sur la lutte contre la sous-alimentation. Suite à la crise de l'ESB en Europe, tout un ensemble de questions touchant à l'innocuité des produits alimentaires reçoivent une attention nouvelle tant dans les pays développés que dans les régions en développement.

4. Deux questions sont plus amplement traitées dans la dernière partie du document. On explique tout d'abord pourquoi le rapport entre les stocks céréaliers mondiaux de fin de campagne et l'utilisation mondiale n'a pas été pris en compte. Enfin, on soumet au Comité pour adoption une proposition visant l'utilisation des autres indicateurs de référence dans les futurs documents d'évaluation.

II. SITUATION DE L'ALIMENTATION ET DE LA NUTRITION

A. SITUATION ACTUELLE

5. À sa vingt-sixième session tenue en septembre 2000, le Comité a approuvé une liste de sept indicateurs pour le suivi mondial de la sécurité alimentaire et notamment l'état de la consommation alimentaire, l'état sanitaire et l'état nutritionnel. Les informations disponibles pour chacun des pays en développement/pays en transition sont présentées au Tableau I de l'Annexe pour six indicateurs - pourcentage de la population sous-alimentée, disponibilité énergétique alimentaire moyenne par personne (DEA); part des céréales, des racines et tubercules dans la DEA totale; espérance de vie à la naissance; mortalité des enfants de moins de cinq ans et proportion d'enfants de moins de cinq ans présentant une insuffisance pondérale. Il existe trop peu de données sur le pourcentage d'adultes ayant un indice de masse corporelle (IMC) < 18,5 et elles ne sont donc pas présentées dans ce tableau.

6. Au cours des dix-sept ans écoulés entre 1979-81 et la période qui a immédiatement succédé au Sommet de l'alimentation mondiale (1996-98), on a enregistré une baisse de 11 points de la prévalence des personnes sous-alimentées dans les pays en développement. C'est là une réduction importante, quelle que soit la référence utilisée. Par sous-région, l'Asie de l'Est, l'Asie du Sud-Est, l'Asie du Sud, l'Amérique du Sud, l'Afrique du Nord et l'Afrique de l'Ouest obtiennent les meilleurs résultats. Les Caraïbes, le Proche-Orient, l'Afrique centrale, l'Afrique de l'Est et l'Afrique australe ont, en revanche, accusé une hausse de la prévalence de la sous-alimentation. Dans les autres régions, les niveaux ne se sont pas ou guère modifiés.

7. À l'échelon régional, le Tableau 1 montre que l'Afrique subsaharienne - qui compte le plus fort pourcentage de personnes sous-alimentées - a peu progressé pendant les trente dernières années du point de vue de la réduction de la prévalence de la sous-alimentation. Les deux régions d'Asie ont au contraire enregistré de bons résultats, lors même que dans la période 1969-71, elles comptaient l'une et l'autre des pourcentages de sous-alimentation supérieurs à ceux de l'Afrique subsaharienne. La situation au Proche-Orient et en Afrique du Nord, ainsi qu'en Amérique latine et dans les Caraïbes, est restée assez constante depuis 1979-81, d'importantes réductions ayant été enregistrées dans ces deux régions lors de la décennie précédente.

Tableau 1: Pourcentage de personnes sous-alimentées dans les régions en développement

Région

Pourcentage de personnes sous-alimentées

  1969-71 1979-81 1990-92 1996-98
Afrique subsaharienne

Proche-Orient et Afrique du Nord

Asie de l'Est et du Sud-Est

Asie du Sud

Amérique latine et Caraïbes

34

25

43

38

19

37

9

29

38

13

35

8

17

26

13

34

10

13

23

11

Ensemble des régions en développement 37 29 20 18

8. Le nombre de personnes sous-alimentées dans les pays en développement, qui s'établissait à 792 millions en 1996-98, ne s'est guère modifié par rapport à la précédente moyenne triennale et la prévalence des personnes sous-alimentées dans les pays en développement est restée stationnaire à 18 pour cent. Le tableau 2 récapitule les changements de prévalence et des chiffres absolus de la sous-alimentation, par sous-région, entre les deux périodes triennales. Seules deux sous-régions - l'Asie de l'Est et l'Afrique du Sud - ont obtenu une réduction effective tant du pourcentage que du nombre absolu de personnes sous-alimentées. Dans sept sous-régions, le nombre des personnes sous-alimentées a augmenté lors même que le taux de prévalence n'a pas bougé. Quatre sous-régions accusent une légère aggravation tant des chiffres absolus que de la prévalence. Il s'agit de l'Amérique centrale, de l'Amérique du Nord (le Mexique), du Proche-Orient et de l'Afrique centrale.

Tableau 2: Comparaison des estimations de la sous-alimentation pour 1995-97 et 1996-98

  1995-97 1996-98
Sous-région Nombre de personnes sous-alimentées Prévalence de la sous-alimentation Nombre de personnes sous-alimentées Prévalence de la sous-alimentation
  (en millions) (en %) (en millions) (en %)
Réduction du nombre et de la prévalence

Asie de l'Est

Afrique australe

176,8

35,0

14

44

155.0

34.5

12,6

42

Augmentation du nombre

Asie du Sud-Est

Asie de l'Est

Caraïbes

Amérique du Sud

Afrique du Nord

Afrique de l'Est

Afrique de l'Ouest

63,7

283,9

9,3

33,3

5,4

77,9

31,1

13

23

31

10

4

42

16

64,7

294,2

9,6

33,6

5,6

79,9

33

13

23

31

10

4

42

16

Augmentation du nombre et de la prévalence

Amérique centrale

Amérique du Nord

Proche-Orient

Afrique centrale

5,6

5,0

27,5

35,6

17

5

12

48

6,6

5,1

30,3

38,5

20

6

13

50

9. Le pourcentage de calories provenant des féculents (céréales, racines et tubercules) fournit des informations supplémentaires sur la qualité du régime alimentaire moyen d'une population. Un pourcentage élevé signale un régime peu diversifié et donc assez pauvre, et une probabilité plus forte de sous-alimentation chez un grand nombre des personnes ainsi nourries, tant en raison du volume total d'aliments à leur disposition, que de la carence en oligoéléments nécessaires à la santé. Par catégories de revenus, ce sont les nantis qui ont une alimentation variée tandis que les pauvres subsistent avec des régimes plus uniformes. Un régime alimentaire est jugé adéquat lorsque les féculents constituent de 55 à 75 pour cent de la disponibilité énergétique alimentaire totale (DEA), ce qui permet une composition très variée de l'alimentation d'une saison à l'autre et d'une culture à l'autre, sans répercussion néfaste sur l'état nutritionnel. Lorsque les féculents représentent plus de 70 à 75 pour cent de la DEA totale, il y a matière à s'inquiéter. Au Tableau 3 sont récapitulées des informations sur les pays où la proportion de féculents est aujourd'hui égale ou supérieure à 70 pour cent de la disponibilité énergétique alimentaire totale par personne. Il est intéressant de noter qu'il y a souvent une relation inverse entre un niveau adéquat de disponibilité énergétique alimentaire totale par personne, et la diversité du régime alimentaire (SOFI, 2001). Les personnes pauvres ayant un apport alimentaire insuffisant ont également une moindre variété de denrées et donc, un faible apport calorique et une nutrition médiocre.

Tableau 3: Pays au régime alimentaire constitué à 70% ou plus de céréales, de racines et de tubercules en 1996-98

Asie du Sud-Est

Cambodge (79)
Indonésie (70)
République démocratique
   populaire lao (82)
Myanmar (78)
Viet Nam (76)

Asie du Sud

Bangladesh (84)
Népal (80)

Proche-Orient

Afghanistan (82)

Afrique centrale

République démocratique
   du Congo (75)

Afrique australe

Lesotho (80)
Madagascar (74)
Malawi (74)
Namibie (79)
Zambie (79)

Afrique de l'Est

Érythrée (78)
Éthiopie (79)

Afrique de l'Ouest

Bénin (74)
Burkina Faso (75)
Ghana (75)
Mali (73)
Niger (74)
Togo (77)

10. Les données anthropométriques constituent une autre mesure de l'accès aux denrées alimentaires et de leur bonne utilisation nutritionnelle. Chez les enfants, la malnutrition entrave le développement physique et cognitif et provoque une moindre résistance à la maladie. L'insuffisance pondérale (poids trop faible par rapport à l'âge) chez les enfants de moins de cinq ans est un bon indicateur de la malnutrition chez les jeunes enfants. En se fondant sur cette mesure, on estime que pendant la période 1996-98, 174 millions d'enfants de moins de cinq ans vivant dans les pays en développement souffraient de malnutrition.

11. À l'heure actuelle, plus des deux tiers des enfants dénutris de la planète vivent en Asie (et notamment en Asie du Sud), suivie par l'Afrique et l'Amérique latine. L'Organisation mondiale de la santé1 estime que plus de la moitié des jeunes enfants vivant en Asie du Sud souffrent de carences en protéines et en calories, soit environ cinq fois la prévalence enregistrée en Occident, au moins trois fois celle du Moyen-Orient et plus de deux fois celle d'Asie de l'Est. Les estimations pour l'Afrique subsaharienne situent la prévalence à environ 30 pour cent.

12. Le taux de mortalité des nourrissons constitue un bon indicateur de l'état nutritionnel des mères, tandis que celui des enfants de moins de cinq ans traduit davantage l'état nutritionnel de l'enfant lui-même. Les objectifs internationaux de développement (OID) appellent à une réduction des deux tiers de ces deux indicateurs d'ici 2015. Les données réelles et projetées de la mortalité infantile montrent une amélioration entre 1990 et 1998 dans l'ensemble des régions. La baisse de 10 pour cent de la mortalité infantile enregistrée dans les pays en développement sur les huit dernières années paraît cependant trop lente pour atteindre la cible fixée par les objectifs internationaux de développement (OID) pour 2015. Certains pays ont perdu du terrain au cours des années 90. En République démocratique de Corée, le taux de mortalité infantile est passé de 45 à 54, au Kenya de 61 à 74, et au Zimbabwe de 52 à 73. Entre 1970 et 1998, l'écart entre les taux de mortalité des pays de l'OCDE et des pays en développement s'est creusé en valeur absolue (de 87 en 1970 à 53 en 1998) mais a augmenté en valeur relative: en effet, la mortalité infantile qui, en 1970, était environ 5 fois plus élevée dans les pays en développement que dans les pays de l'OCDE est désormais dix fois plus forte.

13. C'est aujourd'hui un fait reconnu que la malnutrition est responsable de 6,6 millions sur les 12,2 millions de décès d'enfants de moins de cinq ans, soit 54 pour cent de la mortalité des jeunes enfants dans les pays en développement. Les taux de mortalité infantile baissent eux aussi trop lentement pour parvenir à la réduction des deux tiers visée en 2015: les taux auraient dû chuter de quelque 30 pour cent au cours des années 90, or la baisse n'a été que de 14 pour cent. Entre 1990 et 1998, 17 pays en développement sont parvenus à réduire leur taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans à une cadence suffisamment rapide pour satisfaire les objectifs internationaux de développement. Pendant la même période, 14 pays ont cependant accusé une aggravation de leur situation, notamment la République démocratique de Corée où le taux de mortalité infantile a augmenté de 35 à 68, et le Zimbabwe, où il est passé de 76 à 125.

Tableau 4: Tendances de la mortalité chez les enfants de moins de cinq ans, pour certaines années de la période 1970-1998 (pour 1 000)

Régions 1970 1980 1990 1997 1998 Réduction
1990-1998
Asie de l'Est et Pacifique 126 82 55 46 43 22%
Europe et Asie centrale n.d. n.d. 34 29 26 24%
Amérique latine et Caraïbes 123 78 49 41 38 24%
Moyen-Orient et Afrique du Nord 200 136 71 58 55 22%
Asie du Sud 209 180 121 100 89 26%
Afrique subsaharienne 222 188 155 153 151 3%
Pays en développement 167 135 91 84 79 14%
OCDE 26 14 9 6 6 30%

Source: Base de données de la Banque mondiale sur l'analyse et la gestion de l'information statistique (SIMA).
Note:
n.d. Non disponible

14. Parce que la faim et la malnutrition abrègent la vie, l'espérance de vie est au plus bas dans les pays où la prévalence de la sous-alimentation est la plus forte. La tendance à long terme montre certes une amélioration: l'espérance de vie des personnes vivant dans les pays en développement est passée d'une moyenne de 55 ans en 1970, à 65 ans en 1998; elle n'en demeure pas moins très en deçà de celle des pays de l'OCDE qui se situait à 78 ans en 1998. Trente-deux pays ont accusé un recul de leur espérance de vie depuis 1990. Il s'agit pour la plupart de pays frappés par l'épidémie de SIDA. Neuf pays ont perdu plus de trois ans: le Botswana (-10,7); la Zambie (-6,6); le Kenya (-6,1); le Zimbabwe (-5,2); l'Ouganda (-4,3); le Kazakhstan (-3,7); la Côte d'Ivoire (-3,7); la République centrafricaine (-3,2) et la Namibie (-3,1).

Tableau 5: Tendances de l'espérance de vie, 1970-1998 (nombre d'années de vie)

Régions 1970 1982 1993 1997 1998
Asie de l'Est et Pacifique 59 66 68 69 69
Europe et Asie centrale n.d. 68 69 69 69
Amérique latine et Caraïbes 61 65 68 70 70
Moyen-Orient et Afrique du Nord 53 60 65 67 68
Asie du Sud 49 55 60 62 62
Afrique subsaharienne 44 48 50 51 50
Pays en développement 55 61 64 65 65
OCDE 71 75 77 78 78

Source: Base de données de la Banque mondiale sur l'analyse et la gestion de l'information statistique (SIMA).
Note:
n.d. Non disponible

B. LA FAIM DANS LE MONDE

15. En mars 2001, quelque 60 millions de personnes étaient confrontées dans 35 pays à des crises alimentaires d'intensités diverses. L'Afrique subsaharienne était la plus durement touchée, avec 16 pays qui subissaient de graves pénuries alimentaires résultant principalement de catastrophes naturelles et de troubles civils. En dépit d'une récente amélioration des conditions météorologiques, les conséquences de la sécheresse qui a frappé l'Afrique de l'Est se font toujours sentir en Éthiopie, en Érythrée, au Kenya, au Soudan et en Tanzanie, où les organismes internationaux de secours continuent à fournir une aide alimentaire d'urgence à quelque 18 millions de personnes. Le nombre de réfugiés et de personnes déplacées à l'intérieur de leur pays du fait des troubles civils ne cesse de croître, notamment en Afrique centrale et en Afrique de l'Ouest. En Afrique australe, les graves inondations qui ont affecté certaines régions - le Mozambique et le Malawi tout particulièrement - ont provoqué des pertes de vies humaines ainsi que des dégâts aux biens, aux infrastructures et aux cultures.

Tableau 6: Pays confrontés à des crises alimentaires au début 2001 et raisons sous-jacentes

Afrique

Angola: Troubles civils et déplacements de populations Burundi: Troubles civils et insécurité
République démocratique du Congo: Troubles civils, réfugiés et personnes déplacées à l'intérieur du pays République du Congo: Troubles civils antérieurs
Érythrée: Personnes déplacées à l'intérieur du pays, rapatriés et sécheresse Éthiopie: Sécheresse, personnes déplacées à l'intérieur du pays
Guinée: Troubles civils, déplacements de populations Kenya: Sécheresse
Libéria: Troubles civils antérieurs, pénurie d'intrants Madagascar: sécheresse/cyclones
Malawi: Inondations Mozambique: Inondations
Rwanda: sécheresse en divers points du pays Sierra Leone: Troubles civils, déplacements de populations
Somalie: sécheresse, troubles civils Soudan: Troubles civils dans le sud, sécheresse
Tanzanie: Déficits alimentaires dans plusieurs régions Ouganda: Troubles civils en divers points du pays, sécheresse

Asie/Proche-Orient

Afghanistan: Sécheresse, troubles civils Arménie: Sécheresse, difficultés économiques
Azerbaïdjan: Sécheresse, difficultés économiques Cambodge: Inondations
Géorgie: Sécheresse, difficultés économiques Iraq: Sanctions, sécheresse
Jordanie: Sécheresse RPD de Corée: Mauvaises conditions météorologiques, problèmes économiques
Mongolie: Problèmes économiques, hiver rigoureux Tadjikistan: Sécheresse
Ouzbékistan: Sécheresse au Karakalpakstan  

Amérique latine

Haïti: Problèmes économiques structurels Honduras: Mauvaises conditions météorologiques antérieures
Nicaragua: Mauvaises conditions météorologiques antérieures El Salvador: Séismes

Europe

Fédération de Russie: Troubles civils en Tchétchénie et groupes vulnérables République fédérale de Yougoslavie: Groupes vulnérables et réfugiés

16. Avec environ 25 millions de personnes dépendantes de l'aide alimentaire, l'Asie a vu se lever en Afghanistan une grave crise alimentaire causée par la persistance des troubles civils, la succession des sécheresses et des hivers rigoureux. En Mongolie, un grand nombre de bêtes ont succombé à un nouvel hiver particulièrement rude, ce qui a encore aggravé l'insécurité alimentaire des éleveurs nomades qui ont déjà perdu des milliers de bêtes l'an dernier. Les approvisionnements alimentaires demeurent serrés en République populaire démocratique de Corée du fait de la sécheresse, des difficultés économiques et de l'hiver le plus froid enregistré depuis des décennies. L'Arménie, la Géorgie et le Tadjikistan sont tous trois confrontés à des difficultés d'approvisionnement en raison de la sécheresse de l'année dernière. Au total, 11 pays d'Asie sont aux prises avec des crises alimentaires.

17. En Amérique centrale, les approvisionnements alimentaires en El Salvador subiront en 2001 le contrecoup des dégâts occasionnés aux infrastructures par les tremblements de terre qui ont ravagé le pays au début janvier et à la mi-février. En Tchétchénie et dans les républiques voisines, les personnes déplacées continuent à dépendre de l'aide alimentaire de la Russie. Dans cinq pays - l'Afghanistan, l'Arménie, la Géorgie, la Jordanie et le Tadjikistan - les perspectives des campagnes en cours sont par ailleurs défavorables.

III. SUIVI DES AUTRES DIMENSIONS DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

A. DISPONIBILITÉS ET STABILITÉ DE L'OFFRE ALIMENTAIRE

18. Le Tableau 7 présente sept indicateurs individuels de la sécurité alimentaire qui ont été élaborés suite à la crise alimentaire du milieu des années 70. Bien qu'ils ne concernent que les céréales, ils donnent une bonne idée de la situation alimentaire mondiale, actuelle et future. L'un d'eux - le ratio entre les stocks mondiaux et les tendances de la consommation céréalière mondiale - n'a pas été calculé cette année car la fourchette minimum de sécurité jusqu'ici adoptée comme référence par la FAO - à savoir le ratio nécessaire pour garantir la sécurité alimentaire dans le monde - ne peut plus être utilisée aux fins habituelles. On expose à la section IV les raisons pour lesquelles cet indicateur a été écarté. Le Secrétariat s'emploie à le remplacer et a déjà commencé à travailler à l'élaboration d'autres indicateurs traduisant plus précisément la situation des marchés.

19. Le deuxième indicateur mesure la capacité des cinq principaux pays exportateurs de céréales à satisfaire la demande d'importations de blé et de céréales secondaires. C'est le rapport entre la somme de leur production, de leurs importations et de leurs stocks d'ouverture, et la somme de leur utilisation intérieure et des exportations céréalières2. Sur la base des indications de l'offre et de la demande pour 2000/01, ce rapport est estimé à 1,18, soit en légère baisse sur l'an passé, mais en augmentation par rapport à la moyenne de 1,15 enregistrée au milieu des années 90. S'agissant de l'offre, on estime que la production céréalière totale des principaux pays exportateurs s'est améliorée en 2000, mais leurs stocks d'ouverture cumulés sont moins importants que l'année passée. Pour ce qui est de la demande, il est probable que l'utilisation intérieure et les exportations seront en hausse par rapport à l'an passé.

20. Le troisième indicateur est le ratio entre le volume des stocks céréaliers de clôture détenus par les principaux exportateurs de blé, de céréales secondaires et de riz, et l'utilisation totale de ces céréales (consommation intérieure plus exportations). Sur la base des plus récentes estimations pour 2000/01, on escompte, pour l'ensemble des céréales, un rapport inférieur de 2 points à celui de la précédente campagne, mais légèrement plus fort que celui de la période 1993/94-1997/98. Les ratios concernant le blé et le riz accuseront sans doute les baisses les plus marquées, principalement en raison de la diminution des stocks en fin de campagne et d'une augmentation de l'utilisation intérieure et des exportations, surtout pour le blé. Hormis la CE et le Canada, on estime que la production de blé des trois autres grands pays exportateurs a chuté en 2000, ce qui contribue au faible volume des stocks de report. Du côté du riz, la baisse de la production de la Chine, après deux années consécutives de récoltes exceptionnelles, explique dans une large mesure les prélèvements escomptés de près de 6 millions de tonnes qui ont été opérés sur ces stocks. Les stocks de clôture des céréales secondaires dans les principaux pays exportateurs pourraient demeurer inchangés à 77 millions de tonnes, mais on s'attend en 2000/01 à un accroissement de l'utilisation intérieure et des exportations. Les très bonnes récoltes engrangées en Argentine, dans la CE et aux États-Unis ont permis de maintenir les stocks de céréales secondaires à un niveau suffisant pour satisfaire une demande intérieure et mondiale en augmentation.

Tableau 7: Évolution des indicateurs de la sécurité alimentaire ayant une incidence sur les disponibilités et la stabilité de l'offre

  Moyenne
1993/94 - 1997/98

1998/99

1999/2000

2000/01*
1. Stocks céréaliers mondiaux en pourcentage des tendances de la consommation céréalière mondiale

On se reportera à la section IV où l'abandon du rapport entre les stocks céréaliers et leur utilisation est expliqué

2. Rapport entre les disponibilités et les besoins des cinq grands exportateurs de céréales**

1,15

1,22

1,20

1,18

3. Stocks de clôture en pourcentage de l'utilisation totale pour les principaux exportateurs de céréales:  
Blé ** 17,0 23,5 22,4 19,1
Céréales secondaires ** 13,2 19,6 17,7 17,2
Riz # 64,3 64,6 64,7 61,5
Total 31,5 35,9 34,9 32,6
  Taux de croissance tendanciel annuel Pourcentage de variation par rapport à l'année précédente
  1990-1999 1998 1999 2000
4. Variations de la production céréalière en Chine, en Inde et dans la CEI

-0,14

-4,92

2,22

-5,11

5. Variations de la production céréalière dans les PFRDV

1,98

3,26

0,85

-5,54

6.Variations de la production céréalière dans les PFRDV, à l'exception de la Chine et de l'Inde

2,58

5,82

1,01

-1,68

    Pourcentage de variation par rapport à l'année précédente
    1998/99 1999/2000 2000/2001!
7. Mouvements des prix à l'exportation Blé (juillet/juin) -15,8 -6,3 13,3
  Maïs (juillet/juin) -15,6 -3,9 -4,6
  Riz (jan,/déc,) · 0,5 -10,7 -25,5
Source: FAO
* Prévisions.
& Englobe le blé et les céréales secondaires
** Argentine, Australie, Canada, CE et États-Unis.
# Chine, Pakistan, Thaïlande, États-Unis et Viet Nam.
† Blé : U.S. no.2 Hard Winter; Maïs: U.S. no.2 Yellow; Riz Thai Broken (A1 Super).
· Les prix du riz sont basés sur l'année civile indiquée en premier lieu.
! Pour le blé et le maïs, les variations des prix sont basées sur des moyennes établies sur sept mois seulement (juillet/janvier) par rapport à la période correspondante en 1999/2000.

21. Le quatrième indicateur mesure l'évolution de la production céréalière des principaux pays importateurs de céréales que sont la Chine, l'Inde et la CEI par rapport à la tendance et à l'année précédente. Pour 2000, cet indicateur donne une baisse de plus de 5 pour cent après l'amélioration enregistrée en 1999. La Chine est principalement à l'origine du fléchissement de la production constaté en 2000 dans ce groupe de pays. Après plusieurs récoltes exceptionnelles, la production de la Chine - toutes catégories de céréales confondues - s'est affaissée suite à des changements de politiques et aux conditions météorologiques défavorables. Les républiques de la CEI ont enregistré des résultats contrastés tandis que la Fédération de Russie, qui est le plus grand producteur céréalier de cette catégorie, a largement amélioré sa production en 2000 après de maigres récoltes pendant deux années consécutives. L'Inde engrange cette année encore des récoltes records, notamment pour le blé, ce qui pourrait en faire en 2000/01 un exportateur net de blé pour la première fois depuis six ans.

22. Le cinquième indicateur est axé sur les changements de la production céréalière totale dans les pays à faible revenu et à déficit vivrier (PFRDV), à savoir environ 80 pays en développement considérés comme les plus vulnérables aux fluctuations des approvisionnements alimentaires et des cours internationaux. En 2000, la production céréalière totale dans ce groupe de pays a chuté de plus de 5 pour cent par rapport à l'année précédente. Cette contraction est principalement imputable à la Chine et à certaines régions d'Afrique. Comme la production de la Chine et de l'Inde ont une forte incidence sur le niveau de cet indicateur, le sixième indicateur mesure l'évolution de la production céréalière totale dans les PFRDV, à l'exclusion de la Chine et de l'Inde. On constate alors que la baisse de la production céréalière totale dans ce groupe de pays n'est pas aussi brutale (-1,7 pour cent) que lorsque la Chine et l'Inde sont prises en compte (-5,5 pour cent). En fait, de nombreux PFRDV d'Asie ont engrangé en 2000 des récoltes céréalières records et notamment le Bangladesh, l'Indonésie, le Pakistan et les Philippines.

23. Le septième indicateur est une comparaison des prix à l'exportation des principales céréales. À l'exception du blé, les cours internationaux des céréales ont poursuivi leur tendance à la baisse pendant la campagne 2000/01. Les cours internationaux du blé se sont affermis depuis le début de la campagne, traduisant un renforcement de la demande commerciale d'importations et la baisse escomptée des stocks de report des principaux pays exportateurs. L'augmentation globale des prix s'est toutefois révélée modeste en raison du fort volume de l'offre à l'exportation dans divers pays qui n'exportent généralement pas, comme l'Inde et le Pakistan. En outre, dans certains pays importateurs de blé, tels que la Chine, la diminution de la production intérieure a essentiellement été compensée par d'importants prélèvements sur les stocks plutôt que par des importations. Du côté des céréales secondaires, malgré l'expansion annoncée de la demande mondiale d'importations, l'association de l'offre abondante dans les principaux pays exportateurs, des ventes importantes de la Chine et des amples approvisionnements de blé fourrager a maintenu les cours internationaux du maïs sous pression pendant la première moitié de la campagne. Les cours internationaux du riz ont accusé une tendance à la baisse en 2000 en réponse aux récoltes exceptionnelles engrangées dans nombre de pays généralement importateurs. Du fait de l'offre abondante à l'exportation, la morosité du marché a intensifié la concurrence entre les exportateurs, ce qui a fortement déprimé les cotations internationales du riz.

24. Les informations concernant la production, les échanges et la position des stocks des principaux produits alimentaires de base sont récapitulées au Tableau II de l'Annexe. Globalement, les perspectives laissent présager une situation un peu moins favorable dans les pays importateurs de céréales, le tableau général de l'offre et de la demande donnant une nouvelle contraction des stocks à la fin des campagnes de commercialisation 2001. Au positif, les prix internationaux des céréales pourraient demeurer assez bas, ce qui allégerait le fardeau financier des pays en développement qui dépendent des importations. Il se pourrait que la poursuite de ventes importantes de maïs par la Chine, surtout dans le contexte de la production de maïs génétiquement modifié du Japon et de la République de Corée, continue à freiner toute pression des prix internationaux à la hausse pendant le reste de la campagne.

25. Étant donné la faible demande mondiale d'importations, les prix internationaux du riz devraient continuer à subir une pression à la baisse, au moins jusqu'à la mi-2001, quand les perspectives de la production rizicole dans l'hémisphère Nord seront annoncées. Par ailleurs, les mesures politiques à l'étude en Inde pour stimuler les exportations, et celles envisagées par l'Indonésie, la Malaisie et le Nigéria pour renforcer les restrictions à l'importation pourraient peser encore davantage sur les prix internationaux du riz. Dans de telles circonstances, on ne saurait envisager une reprise substantielle des prix pendant au moins une campagne supplémentaire, et seulement dans l'éventualité d'un sensible recul de la production céréalière en 2001.

26. De manière générale, les prix des produits agricoles, plutôt bas ou en baisse en 2000, se sont traduits par des réductions de la valeur en dollars3 des importations alimentaires des pays en développement à faible revenu et à déficit vivrier, tendance qui s'était amorcée après le sommet atteint en 1996. En revanche, si l'on omet le léger tassement enregistré en 1996, du fait des cours très élevés de la plupart des produits alimentaires de base, la croissance du volume des importations alimentaires4 s'est, dans l'ensemble, maintenue au même niveau pendant les années 90. Cette évolution traduit sans doute une amélioration générale de la sécurité alimentaire à l'échelon national pour ces différents groupes de pays; bien des pays, et nombre de leurs groupes vulnérables, restent cependant confrontés à de graves problèmes de sécurité alimentaire.

Tableau 8: Valeur de la facture des importations alimentaires des pays à faible revenu et à déficit vivrier (en milliards de dollars E.U.)

 

1995/96

1997

1998

1999*

2000*

         
Total - Pays en développement 65,3 65,0 63,6 61,7 59,6
Dont:          
Céréales 31,1 28,6 28,5 25,7 24,1
Viande 6,8 7,3 6,8 8,5 9,2
Produits laitiers 8,4 7,7 7,3 6,9 8,1
Huiles et oléagineux 19,1 21,4 21,0 20,6 18,3
           
Total - PFRDV 30,5 29,4 29,4 27,6 25,7
Dont:          
Céréales 15,2 12,3 13,2 11,8 11,3
Viande 2,8 3,0 2,9 3,6 3,7
Produits laitiers 2,9 2,8 2,6 2,3 2,4
Huiles et oléagineux 9,6 11,3 10,8 9,9 8,4

* Les valeurs indiquées pour 1999 et 2000 sont préliminaires et sont fondées sur l'estimation du volume des échanges et les prix commerciaux.

B. ACCÈS AUX DISPONIBILITÉS ALIMENTAIRES

27. Le Comité ayant demandé des informations supplémentaires sur l'accès aux aliments lors de sa dernière session, on a complété les données concernant le PNB par habitant par des données sur la croissance du PNB par habitant en prix constants et sur le PNB par habitant à parité du pouvoir d'achat. Les informations relatives à la répartition des revenus sont présentées par un indice de Gini, tandis que la prévalence de la pauvreté a été mesurée à l'échelon national comme international. Les informations concernant ces indicateurs sont présentées par pays au Tableau III de l'Annexe. Les chiffres du chômage ne sont pas fournis car il est difficile de réunir des données fiables et comparables sur cette question dans les pays en développement.

28. Il est communément admis qu'il y a une forte corrélation entre la pauvreté et la sécurité alimentaire, la majorité des pauvres étant sous-alimentés ou vulnérables. Les objectifs communs du Sommet mondial de l'alimentation et du Sommet du millénaire organisé par les Nations Unies - à savoir la réduction de moitié de la sous-alimentation et de la pauvreté d'ici 2015 - sont étroitement associés et interdépendants. Il y a donc lieu d'examiner les progrès enregistrés en matière de lutte contre la pauvreté afin de mieux évaluer la situation générale de l'accès aux denrées alimentaires.

29. Au Tableau 9, on compare les estimations du nombre de personnes sous-alimentées provenant de la FAO à celles issues d’une récente étude de la Banque mondiale (2000)5 sur la pauvreté en matière de consommation, à savoir le pourcentage de personnes vivant dans des ménages dont la consommation se situe à moins de 1 dollar par jour à parité du pouvoir d’achat. Pendant la période de 1987 à 1998, l’incidence de la pauvreté a chuté en Asie, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. On a effectivement enregistré dans ces régions une réduction sensible de la prévalence de la sous-alimentation. Cette étude de la Banque mondiale signale en outre que la baisse nette de l’incidence de la pauvreté en matière de consommation n’a cependant pas été suffisante pour réduire le nombre total de pauvres. Les auteurs attribuent cette situation à l’association de la faible croissance économique de nombreux pays en développement, et des inégalités persistantes qui empêchent les plus pauvres de prendre part au développement là où il intervient, comme l’attestent les coefficients de Gini qui se situent entre 28,9 pour le Rwanda et l’Égypte, et 62,9 pour la Sierra Leone.

Tableau 9: Comparaison de données sur la pauvreté et la sous-alimentation

 

1998

1996-98

1996-98

1998

Région

Personnes vivant dans des ménages consommant moins de 1$/jour

Proportion de personnes sous-alimentées

Nombre de personnes sous-alimentées

Nombre de personnes pauvres

 

(en %)

(en %)

(en millions)

(en millions)

Asie de l’Est

Europe de l’Est et Asie centrale

Amérique latine et Caraïbes

Moyen-Orient et Afrique du Nord

Asie du Sud

Afrique subsaharienne

15,32

5,14

 

15,57

 

1,95

 

39,99

46,30

12

6

 

11

 

10

 

23

34

155,0

26,4

 

54,9

 

35,9

 

294,2

185,9

278,32

23,98

 

78,16

 

5,55

 

522,00

290,87

30. Au cours des deux prochaines années, on prévoit un ralentissement de la croissance par rapport au sommet conjoncturel enregistré au début 2000, mais toutes les régions en développement devraient voir leur revenu par habitant poursuivre sa remontée en 2001, avec des valeurs allant de près de 6 pour cent en Asie de l’Est à environ 1,5 pour cent au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et en Afrique subsaharienne. En 2001/02, la croissance en Asie de l’Est devrait commencer à s’affaiblir pour s’orienter vers un schéma de croissance à long terme. En Asie du Sud, on prévoit un ralentissement de la croissance moyenne de la région qui devrait s’établir à 5,5 pour cent en 2001/02. L’Amérique latine est sur le point d’entrer dans une nouvelle phase, caractérisée par une croissance modérée et soutenue tout au long de la prochaine décennie.

31. En Afrique subsaharienne, on escompte une augmentation annuelle de 1,3 pour cent du revenu par habitant pendant la prochaine décennie, ce qui représente une réelle amélioration par rapport à la baisse continue des années 90, mais un tiers à peine du taux moyen des pays d’Asie. Le VIH/SIDA pèsera très lourdement sur plusieurs pays de l’Afrique subsaharienne qui compte près de 70 pour cent des 34,3 millions de cas de SIDA répertoriés dans le monde et 12,1 des 13,2 millions d’orphelins engendrés par le SIDA. Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, l’activité économique devrait afficher une modeste reprise pour s’établir à 3,8 pour cent en 2001 et 3,6 pour cent en 2002.

C.  SÉCURITÉ SANITAIRE DES DENRÉES ALIMENTAIRES

32. La première phrase de la Déclaration de Rome sur la sécurité alimentaire mondiale réaffirme "le droit de chaque être humain d'avoir accès à une nourriture saine et nutritive conformément au droit à une nourriture adéquate et au droit fondamental de chacun d'être à l'abri de la faim". Cette référence à une nourriture saine et nutritive implique un élargissement du concept de sécurité alimentaire à celui de sécurité sanitaire des aliments, question qui revêt une importance certaine depuis que l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) ou "maladie de la vache folle" a commencé à se propager en Europe. La sécurité sanitaire des denrées alimentaires couvre toutefois un ensemble bien plus vaste de risques et de questions que ceux qui attirent aujourd’hui l’attention du public. On trouvera au document CFS:2001/Inf.9 une description plus complète de ces questions et des initiatives récemment lancées par la FAO pour y répondre.

IV.  QUELQUES QUESTIONS ESSENTIELLES

A.  RAPPORT ENTRE LES STOCKS ET LEUR UTILISATION

33. Pendant de nombreuses années, la FAO s’est appuyée sur une fourchette-repère du ratio stocks céréaliers de fin de campagne/utilisation mondiale, dans le but d’avertir la communauté internationale des baisses imminentes ou probables de l’offre céréalière mondiale. Cette fourchette de référence était fixée à 17-18 pour cent6. Le ratio n’est tombé en dessous de ce seuil qu’à deux reprises depuis l’époque où il a été approuvé comme indicateur de la sécurité alimentaire: au milieu des années 70, il a chuté à 14-15 pour cent (1973-76) puis, au milieu des années 90, à 14-16 pour cent (1996-97)7 . Bien que cette mesure ne tienne compte que des disponibilités physiques de l’offre mondiale, elle s’est aussi affirmée, au cours de ces deux périodes, comme un bon prédicteur des poussées soudaines des cours céréaliers mondiaux ainsi que des problèmes potentiels d’accès aux vivres pour les groupes vulnérables.

34. Lors même que la raison d’être de cet indicateur était de fournir une mesure de la disponibilité effective de l’offre mondiale, il s’est avéré pendant des années un bon prédicteur de l’évolution des cours internationaux. La corrélation entre ce ratio-repère et les prix céréaliers mondiaux n’a cependant pas toujours été stable. Pendant les périodes 1979-80 et 1988-89 où le ratio était bien supérieur au seuil minimum des 17-18 pour cent, les cours céréaliers mondiaux ont augmenté et sont restés forts en dépit d’une offre réelle adéquate. Plus récemment, le ratio des stocks céréaliers de report à leur utilisation en 2001 a chuté en dessous du seuil de référence pour se stabiliser à un niveau comparable à ceux enregistrés lors des brusques flambées des prix enregistrées au milieu des années 70 et des années 908. Or, les cours céréaliers mondiaux sont restés bas pendant la première moitié de la campagne et sont même tombés dans certains cas.

35. En outre, les données anciennes concernant les soldes céréaliers de la Chine ont récemment fait l’objet d’une révision majeure qui a eu pour effet d’augmenter fortement les estimations des stocks céréaliers de la Chine et, par conséquent, l’estimation des stocks céréaliers mondiaux9. Le bien-fondé du ratio de référence comme indicateur de la sécurité alimentaire mondiale en a été d’autant plus affecté. On pourrait bien sûr conserver un ratio de référence en procédant à un nouveau calcul du seuil minimum de sécurité, sur la base du volume révisé des stocks céréaliers de la Chine et de la méthodologie d’origine, mais cela ne paraît pas opportun. Le Secrétariat s’est en effet rendu compte que la méthodologie d’origine ne tient pas directement compte de certaines caractéristiques plus évocatrices des indicateurs commerciaux actuels – les prix par exemple – et qui ont une influence directe sur les questions liées à l’accès aux aliments. Face à l’évolution des marchés céréaliers mondiaux qui atteste une plus grande transparence des politiques et des signaux des marchés, à l’amélioration des communications et à la plus grande fluidité des produits de base dans les échanges internationaux, le Secrétariat convient qu’il y a lieu d’élaborer des indicateurs plus sensibles aux fluctuations des marchés afin d’évaluer l’évolution des facteurs ayant une incidence sur la sécurité alimentaire mondiale. Dans l’intervalle, on dispose d’autres indicateurs pertinents, tels que ceux présentés à la section II. A ci-dessus, pour estimer la sécurité alimentaire mondiale. Le Comité peut être assuré que le Secrétariat poursuit son action de suivi et qu’il prend les mesures nécessaires à la définition et à l’élaboration de mesures nouvelles de la sécurité alimentaire mondiale.

B.  SÉLECTION ET SUIVI DES INDICATEURS DE RÉFÉRENCE

36. Pour procéder à des comparaisons interpays et constituer un jeu de données utiles au suivi des progrès réalisés dans le monde à l’égard des objectifs du Sommet mondial de l’alimentation, le CSA a examiné à sa vingt-sixième session une liste d’indicateurs de base réunissant un ensemble de variables que l’on estime aujourd’hui très étroitement corrélées à la sécurité alimentaire, à la nutrition et à la vulnérabilité.

37. Pour constituer l’ensemble d’indicateurs à partir duquel serait effectuée la sélection définitive, on a procédé à un examen complet des différentes listes d’indicateurs utilisées ou à l’étude aux fins du suivi des objectifs du développement dans diverses institutions internationales. Ces listes sont présentées au Tableau IV de l’Annexe et classées selon les quinze domaines ou modules d’information de la base de données des indicateurs principaux (KIDS) actuellement en voie d’élaboration au titre de l’initiative mondiale du SICIAV. À la première colonne, on énumère les indicateurs issus de l’ensemble des sources consultées. La deuxième colonne reprend la liste des indicateurs proposés par le Groupe de travail interinstitutions sur les SICIAV, tandis que la troisième récapitule les indicateurs utilisés par la FAO pour la rédaction des documents d’évaluation de 1999 et 2000 à l’intention du CSA, pour L’état de l’insécurité alimentaire dans le monde 1999 et 2000, et pour une liste provisoire du Secrétariat de la FAO destinée à l’élaboration d’indices et au suivi du programme Action 21. La liste d’indicateurs ANDI figurant à la troisième colonne vise à garantir l’accès à des données de qualité en vue du suivi des tendances de la nutrition dans les pays d’Afrique.

38. Les autres colonnes présentent les indicateurs des listes de référence dressées par l’OCDE dans le cadre du programme "Progrès réalisés dans l'accomplissement des objectifs internationaux de développement", par le Groupe des Nations Unies pour le développement et l’évaluation commune des pays, au titre du Plan-cadre des Nations Unies pour l’aide au développement (UNDAF), et par la Société internationale pour le développement, avec le soutien du PAM, pour le suivi des facteurs pesant sur la pérennité des moyens d’existence.

39. Les différentes priorités assignées aux modules d’information reflètent la diversité des cadres conceptuels de ces listes. On notera toutefois que certains indicateurs figurent à la fois dans les listes du système des Nations Unies et dans l’une au moins des listes des SICIAV, ce qui atteste une réelle convergence de vues entre les différentes institutions. On notera que la liste de l’OCDE ne comporte à l’heure actuelle aucun indicateur renvoyant explicitement au Sommet mondial de l’alimentation, bien que plusieurs des indicateurs donnés pour le suivi d’autres objectifs de développement mondiaux – notamment ceux qui concernent le Sommet social – demeurent très pertinents. Suite à divers échanges très constructifs entre les Secrétariats de la FAO et de l’OCDE, il est probable qu’un ou deux des objectifs directement liés au Sommet mondial de l’alimentation seront ajoutés à la liste de l’OCDE lors de sa prochaine révision. L’objectif majeur du Sommet du millénaire organisé par les Nations Unies en septembre 2000 est de: "réduire de moitié, d’ici 2015, la part de la population mondiale dont le revenu est inférieur à un dollar par jour et la proportion de personnes qui souffrent de la faim..."

40. La pénurie de données pertinentes est un véritable obstacle au suivi régulier des indicateurs sélectionnés par le CSA. Les tableaux de l’Annexe fournissent les données nécessaires pour la dernière année disponible dans les bases de données internationales et en précisent l’origine. Cependant, pour plusieurs des indicateurs énumérés, la couverture internationale des bases de données et la périodicité de leurs mises à jour sont actuellement insuffisantes pour que l’on puisse régulièrement rendre compte des changements.

41. À sa vingt-sixième session, le CSA a approuvé les sept indicateurs mentionnés au Tableau 10 aux fins du suivi de la situation de l’alimentation, de la santé et de la nutrition. Aucune décision n’a pour l’instant été prise pour la sélection des indicateurs de suivi des facteurs sous-jacents.

Tableau 10: Indicateurs de base recommandés pour le suivi des progrès réalisés au regard des objectifs du Sommet mondial de l’alimentation

Catégories d’indicateurs de situation

Situation de la consommation alimentaire

État sanitaire

État nutritionnel

Voir propositions préliminaires dans le document CFS:2000/2

  • Principal groupe d'aliments en % du régime alimentaire total
  • Pourcentage de la population sous-alimentée
  • Espérance de vie à la naissance
  • Taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans
  • Proportion d’enfants de moins de cinq ans présentant une insuffisance pondérale, un retard de croissance ou un dépérissement
  • Pourcentage d'adultes présentant un indice faible de masse corporelle

Indicateurs approuvés par le CSA à la vingt-sixième session

  • Disponibilité énergétique alimentaire moyenne par habitant (DEA)
  • Part des céréales, racines et tubercules dans la DEA, en %
  • Pourcentage de la population sous-alimentée
  • Espérance de vie à la naissance
  • Taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans
  • Proportion d'enfants de moins de cinq ans présentant une insuffisance pondérale
  • Pourcentage d’adultes présentant un indice de masse corporelle inférieur à 18,5

42. Au cours de cette session, le Comité est invité à examiner les catégories d’indicateurs figurant au Tableau IV de l’Annexe et récapitulés au Tableau 11, et à se prononcer sur cette proposition du Secrétariat: les documents d’évaluation du CSA ne couvriront désormais que les domaines suivants: conditions économiques; risques, dangers, chocs; disponibilités alimentaires; accès aux vivres; et stabilité des approvisionnements alimentaires, et seront fondés sur les indicateurs figurant aux colonnes 2 et 3 du Tableau 11. On pourra ultérieurement envisager d’ajouter des indicateurs relevant d’autres catégories si leur suivi paraît utile aux délibérations du Comité. Sauf indication contraire, les informations communiquées pour chacun des indicateurs mentionnés correspondront soit à la dernière année disponible, soit à la plus récente moyenne triennale.

Tableau 11: Catégories d’indicateurs et liste des indicateurs envisageables pour le suivi des conditions structurelles ayant une incidence sur la situation de l’alimentation et de la nutrition

Catégories d’indicateurs des facteurs de vulnérabilité mentionnées au Tableau IV de l’Annexe Indicateurs utilisés dans le document CFS: 2001/2 Autres indicateurs du Tableau IV de l’Annexe dont l’ajout est proposé dans les futurs documents d’évaluation du CSA
Conditions démographiques    
Conditions environnementales    
Conditions économiques
  • PNB par habitant
  • Taux de croissance du PNB par habitant
  • PNB par habitant à parité du pouvoir d’achat
 
Conditions politiques    
Conditions socio-culturelles    
Risques, dangers, chocs
  • Nombre de pays confrontés à des crises alimentaires
  
Disponibilités alimentaires
  • Volume de production, utilisation des denrées alimentaires, échanges, évolution des stocks des produits alimentaires de base, par groupe de produits et par groupe de pays
  • Ratio offre/besoins des cinq principaux exportateurs céréaliers
  • Indice de la production vivrière
Accès aux vivres
  • Indice de Gini de répartition des revenus
  • Personnes vivant au-dessous du seuil national de pauvreté
  • Personnes vivant avec moins de 1 dollar par jour
  
Stabilité des approvisionnements alimentaires et accès aux vivres
  • Évolution de la production céréalière de la Chine, de l’Inde et de la CEI
  • Évolution de la production céréalière dans les PFRDV
  • Évolution de la production céréalière dans les PFRDV moins la Chine et l’Inde
  • Mouvements des prix à l’exportation du blé, du maïs et du riz
  • Indice de variabilité de la production vivrière
  • Variabilité des prix des aliments
Caractéristiques des ménages    
Santé et hygiène     
Soins et pratiques alimentaires    

 

___________________________

1  OMS (1998), Fiche d’information 119, Genève

2  Un rapport d’une valeur égale à 1 signalerait un épuisement total des inventaires céréaliers des cinq principaux pays exportateurs de céréales pour les années de commercialisation correspondantes.

3  On notera toutefois que la valeur des importations de viande et de produits laitiers de ces deux groupes de pays a augmenté au cours de cette même période.

4  Évaluation fondée sur les prix en dollars É.U. des différents produits de base en 1998.

5  Shaohua Chen et Martin Ravallion (2000), How did the world's poorest fare in the 1990s?, Groupe de recherche sur le développement, Banque mondiale. L’étude de la Banque mondiale exclut près de la moitié de la population du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, ce qui explique le nombre plus important de personnes sous-alimentées que de personnes pauvres dans cette région.

6  On trouvera une description de la méthodologie d’origine dans Vers la sécurité alimentaire mondiale, Étude FAO: Développement économique et social, No. 32, Chapitre II, pp. 19-37, Rome, 1983. L’établissement de ce plancher de sécurité faisait suite à la grave crise alimentaire du milieu des années 70 où l’association de productions déficitaires dans les principaux pays importateurs et exportateurs et d’importations imprévues de la part de l’ex-URSS avait déclenché une flambée des cours céréaliers internationaux.

7  Sur la base des estimations ex-post. En tant qu’indicateur, le ratio stocks/utilisation est une mesure ex-ante qui permet de comparer les prévisions des stocks de report à une estimation de l’utilisation pendant la campagne suivante. En situation ex-post, les stocks réels sont comparés à leur utilisation effective.

8  FAO, Perspectives de l’alimentation, novembre 2000.

9  On trouvera des informations détaillées sur cette révision dans Perspectives de l’alimentation, février 2001, No.1, pp.17-19.

 

 


Table des matières Page suivante