C 2003/INF/5-Corr.1

Conférence

Trente-deuxième session

Rome (Italie), 29 novembre – 10 décembre 2003

DISCOURS DU DIRECTEUR GÉNÉRAL À
LA TRENTE-DEUXIÈME SESSION DE LA CONFÉRENCE DE LA FAO

Monsieur le Président de la Conférence,
Monsieur le Président indépendant du Conseil,
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Excellences,
Mesdames et Messieurs,

Les Sommets mondiaux de l’alimentation tenus en 1996 et 2002, ont fixé et reconfirmé l’objectif de réduction de moitié, d’ici 2015, du nombre de personnes qui ont faim. Face à l’inacceptable persistance de la sous-alimentation dans un monde où les ressources abondent, et des risques de n’atteindre cet objectif qu’en 2150, il faut mobiliser la volonté politique des décideurs nationaux et l’énergie de la société civile, ainsi que les moyens bilatéraux et multilatéraux.

C’est dans cette perspective que devraient se situer les travaux de la trente-deuxième session de la Conférence.

État de l'insécurité alimentaire

Si dans 19 pays en développement le nombre des personnes souffrant de la faim a diminué de plus de 80 millions au cours de la dernière décennie, il a malheureusement augmenté dans beaucoup d’autres.

Les pays qui ont obtenu un bon résultat se trouvent dans toutes les régions en développement: un au Proche-Orient, cinq en Asie et dans le Pacifique, six en Amérique latine et dans les Caraïbes et sept en Afrique subsaharienne. Il s’agit aussi bien de grands pays relativement prospères comme le Brésil et la Chine, dans lesquels les niveaux de sous-alimentation de départ étaient modérés, que de pays plus petits où la faim était plus généralisée, tels que la Guinée, la Namibie, le Sri Lanka et le Tchad.

Mais au niveau mondial le nombre des personnes sous-alimentées n’a baissé que de 19 millions entre 1990-92 et 1999-2001. Pour atteindre l’objectif du Sommet mondial de l’alimentation il faudrait donc accélérer le rythme annuel des réductions à 26 millions par an, soit plus de 12 fois la cadence actuelle, qui est de 2,1 millions.

Cet effort est d’autant plus nécessaire qu’il semble que le nombre des personnes sous-alimentées dans le monde en développement ait cessé de diminuer et tende plutôt à augmenter. Dans la première moitié des années 90, le nombre des personnes qui souffraient de faim chronique avait diminué de 37 millions. Mais depuis 1995-1997, plus de 18 millions de personnes sont venues s’ajouter au rang des affamés.

Dans le monde en 1999-2001, 842 millions de personnes étaient sous-alimentées, dont 798 millions dans les pays en développement, 34 millions dans les pays en transition et 11 millions dans les pays développés.

Il est possible d’identifier plusieurs facteurs qui différencient les pays qui ont obtenu de bons résultats dans la lutte contre la faim de ceux dont les efforts ont échoué. Les pays qui sont parvenus à réduire la faim ont bénéficié d’une croissance économique plus rapide, surtout dans le secteur de l’agriculture, d’un accroissement plus lent de la population et de niveaux moins élevés d’infection par le VIH/SIDA. Ils étaient aussi mieux classés selon l’Indice du développement humain du PNUD.

Production et commerce agricoles et alimentaires

En 2003/04, la récolte mondiale de céréales évaluée à 1 874 millions de tonnes restera inférieure aux besoins prévus. En 2004, pour la quatrième année consécutive, il faudra à nouveau prélever sur les stocks.

Comme dans les années précédentes, la réduction des stocks mondiaux sera essentiellement imputable à une diminution des réserves en Chine. À lui seul, ce pays a contribué pour près de 80 pour cent à la réduction globale des stocks céréaliers (288 millions de tonnes depuis 1999), en raison de politiques nationales visant expressément à réduire les réserves de céréales par une augmentation des exportations.

Les prix des produits agricoles de base ont plutôt fléchi dans la seconde partie de la décennie, malgré un raffermissement du cours de certaines denrées, comme le blé et les oléagineux, entre 2001 et 2002.

Les exportations totales de produits agricoles ont fléchi, en valeur, entre 1997 et 2001, portant à moins de 7 pour cent la part des échanges agricoles dans le commerce total de marchandises, et confirmant ainsi la tendance à long terme dans cette direction.

Il reste encore beaucoup à faire pour corriger les déséquilibres et les iniquités du commerce des produits agricoles et alimentaires. Même les pays dont les échanges commerciaux ont fortement augmenté, n'ont vu aucune amélioration de leur croissance générale et de leur produit intérieur brut. Il s'agit là d'une question sur laquelle la communauté internationale doit se pencher.

Les gains de productivité considérables que l'agriculture moderne rend possibles, et les puissants systèmes de soutien et de subventions mis en place dans les pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), ont exercé une pression à la baisse sur les cours mondiaux des céréales. Si le fléchissement du prix des denrées alimentaires a eu quelques effets positifs pour les importateurs, il a toutefois souvent contribué à appauvrir les petits exploitants agricoles dans les pays en développement.

Lors de la récente réunion de l'Organisation mondiale du commerce tenue à Cancun, au Mexique, la FAO a invité les pays à supprimer les obstacles à un commerce international équitable. Elle a à nouveau attiré l'attention de la communauté internationale sur la double nécessité de réduire la pauvreté et renforcer la sécurité alimentaire, et sur l'importance du commerce multilatéral pour atteindre ces objectifs. Les négociations dans le cadre multilatéral sont indispensables pour aboutir à des solutions plus justes. L’Organisation encourage donc les pays à reprendre rapidement les discussions qui ont rencontré des difficultés à Cancun.

Production animale et commerce des produits de l'élevage

La production mondiale estimée en 2003 à 249,1 millions de tonnes de viande et 599,1 millions de tonnes de produits laitiers, continue de croître bien plus rapidement que la production agricole dans son ensemble, et représente aujourd'hui 45,2 pour cent du PIB agricole total (1 290 milliards de dollars EU en 2002). Cependant les échanges commerciaux sont souvent perturbés par des épidémies de maladies infectieuses.

Production halieutique et commerce des produits de la pêche

La production mondiale de poissons s'établit aujourd'hui à près de 130 millions de tonnes, dont environ 30 pour cent sont issues de l'aquaculture, un sous-secteur en constante expansion. Le commerce mondial de poisson et de produits de la pêche a atteint une valeur à l'exportation de 55 milliards de dollars EU, soit 8 pour cent depuis 1998. Cet accroissement est dû en grande partie à une augmentation du volume des échanges. Les prix des principaux produits de la pêche ont toutefois légèrement fléchi, tandis que ceux des aliments pour poissons ont marqué un net recul. D'autre part, les importations de poisson ont atteint un nouveau record de 60 milliards de dollars EU, dont plus de la moitié est le fait des pays en développement.

Forêts

L'évaluation mondiale des ressources forestières 2000 de la FAO fait état d'une nouvelle diminution du couvert forestier mondial. Cette perte, qui a représenté 9,4 millions d'hectares, soit 0,2 pour cent du total, entre 1990 et 2000, a été concentrée principalement en Afrique et en Amérique du Sud.

Le commerce des produits forestiers apporte une contribution importante au commerce international. La valeur des exportations mondiales en 2001 était de 141 milliards de dollars EU et celle des importations de 131 milliards de dollars. Les aspects économiques, sociaux et environnementaux d'une gestion durable des forêts font l'objet d’approches novatrices qui tiennent compte des multiples fonctions de la forêt. Un grand intérêt est porté aux travaux en cours sur les critères et indicateurs et sur la certification des pratiques de gestion durable des forêts et des produits forestiers faisant l'objet d'échanges internationaux.

La FAO a entrepris avec des partenaires internationaux une analyse de l'interface entre le commerce et le développement de la foresterie. Cette étude devra déterminer la façon dont les échanges commerciaux peuvent promouvoir les pratiques de gestion durable dans le secteur forestier. Il faudra revoir celles provoquant des distorsions sur le marché et réduire les obstacles non tarifaires pour améliorer l'accès au marché. Les pays producteurs, notamment ceux des zones tropicales, doivent être encouragés et soutenus dans leurs efforts pour utiliser de manière durable les ressources forestières dont ils disposent, afin d’encourager le développement économique.

Il faut souligner par ailleurs que le renforcement de la foresterie communautaire et des industries forestières locales peut lui aussi contribuer de manière significative à la réduction de la pauvreté.

Crises et situations d'urgence

En octobre 2003, les pays confrontés à de graves pénuries alimentaires et nécessitant à ce titre une aide internationale, étaient au nombre de 38. Vingt-trois d'entre eux se trouvaient en Afrique, huit en Asie, cinq en Amérique latine et deux en Europe. Bien que des conditions atmosphériques défavorables soient souvent à l'origine de ces situations d'urgence, les catastrophes dues à l'homme jouent elles aussi un rôle important. Les troubles intérieurs ou la présence de populations déplacées à l'intérieur d'un pays sont responsables de plus de la moitié des crises alimentaires signalées en Afrique aujourd'hui. Ces mêmes facteurs ont affecté également deux pays d'Europe.

Le rapport 2003 sur l’état de l’insécurité alimentaire dans le monde montre que 65 à 80 pour cent des urgences alimentaires sont dues à la sécheresse et aux inondations, d’où l’importance des petits ouvrages de collecte d’eau, d’irrigation et de drainage dans les pays en développement, surtout en Afrique et dans les Caraïbes.

Le Système mondial d'information et d'alerte rapide sur l'alimentation et l'agriculture et le Programme alimentaire mondial (PAM) préviennent la communauté internationale lors de situations d'urgence. Cela a été le cas en Afrique australe et orientale en 2003, où le PAM a mobilisé – en dehors des filières habituelles - un volume de 584 000 tonnes (345 millions de dollars EU) pour l'Afrique australe et de 837 000 tonnes (430 millions de dollars) pour l'Afrique orientale.

En Iraq ce mois-ci, parallèlement à l’achèvement du programme « Pétrole contre nourriture », la FAO termine ses activités de terrain dans les trois Gouvernorats du Nord. Au sud et au centre, les contrats passés par l'ancien gouvernement de l'Iraq pour la fourniture d'intrants agricoles, d'une valeur de 711 millions de dollars EU, ont été renégociés. La FAO a également mis en route des projets de fourniture d'engrais, d’herbicides et de fongicides destinés aux cultures de blé et d'orge, et de distribution de plus de 18 millions de doses de vaccin pour prévenir de graves épizooties, de 17,5 millions d'œufs à couver et de 72 000 tonnes d’aliments pour soutenir le secteur avicole.

Mais quelle est l’importance de cette assistance pour le pays en termes de développement agricole à long terme? Un programme sur trois ans a été élaboré pour le rétablissement de l'agriculture dans les trois Gouvernorats du Nord afin de passer de l'aide d'urgence à des activités de renforcement du secteur agricole et de soutien aux personnes y travaillant, notamment les groupes les plus vulnérables. Une stratégie a aussi été mise au point pour assurer la transition entre la phase de secours, de réhabilitation et de reconstruction et le développement agricole durable en Iraq, tandis qu'une évaluation complète des besoins a été réalisée concernant la sécurité alimentaire, les ressources en eau et l'agriculture. Cette évaluation, entreprise dans le cadre du Groupe des Nations Unies pour le développement et en coopération avec les ministères iraquiens compétents, le PAM, la Banque mondiale et certaines organisations régionales, a été présentée par la FAO à la Conférence des donateurs qui s'est tenue à Madrid les 23 et 24 octobre 2003.

Dans le contexte du lancement de l’appel global des Nations Unies pour la Cisjordanie et la Bande de Gaza en novembre dernier, la FAO a sollicité une contribution de la communauté internationale. Les actions de la FAO sont destinées à prévenir une nouvelle dégradation de la situation nutritionnelle de la population et à empêcher un effondrement de l’économie agricole. Pour compenser l’absence de revenus suffisants à l’échelle des ménages, la FAO intégrera des activités génératrices de revenus et d’emploi, dans ses efforts de réhabilitation de la production agricole.

En Afghanistan, la FAO réalise actuellement 21 projets à court terme et 8 projets de longue durée pour une valeur totale de près de 41 millions de dollars EU financés par 12 donateurs et par le Programme de coopération technique de l'Organisation. La FAO a livré 4 000 tonnes de semences de blé et plus de 6 000 tonnes d'engrais pour permettre à 83 000 ménages de reprendre leurs activités agricoles et les aider à obtenir la meilleure récolte de blé des deux dernières décennies.

Un programme de vaccination national couvre 8 millions d'animaux d'élevage – ovins, caprins et bovins, notamment. Près de 100 000 hectares de terre infestés par le criquet marocain ont été traités, malgré les difficultés du travail sur le terrain du fait en particulier de la présence de mines. La FAO participe également à la remise en état des systèmes d'irrigation communautaires.

Des fonds additionnels sont nécessaires pour pouvoir mettre en œuvre un programme de relèvement général qui puisse lutter contre la sous-alimentation et la malnutrition, et permettre de maîtriser les maladies du bétail, fièvre aphteuse en particulier.

Sommet mondial de l’alimentation: cinq ans après: engagements pris et suite donnée au Sommet

Dans le cadre du suivi des Sommets mondiaux de l'alimentation, l’Organisation apporte son concours aux États Membres pour la préparation de stratégies à l’horizon 2015 et de programmes à moyen terme de sécurité alimentaire et de développement agricole. En outre, en collaboration avec les institutions financières, elle appuie la préparation de projets bancables pour accélérer le renversement des tendances négatives des ressources destinées à l’agriculture.

Face à la baisse des financements en faveur de l'agriculture dans les pays en développement, la FAO a décidé d’organiser plusieurs Tables Rondes lors de ses prochaines Conférences régionales en Afrique, Asie et Pacifique, et Amérique Latine et Caraïbes, en collaboration avec les pays concernés, y compris les ministères de l’agriculture et des finances, et les institutions financières régionales et internationales afin de d’identifier les raisons du déclin des investissements dans le secteur agricole et les mesures à même de renverser cette tendance. En outre, ces Tables Rondes devraient permettre de formuler des propositions d’action permettant aux États membres, à la FAO et aux agences de financement d’étudier à nouveau leurs engagements.

Plusieurs réunions internationales ont mis l'accent sur la nécessité d’augmenter les ressources destinées à l’agriculture. La Conférence internationale sur le financement du développement, le Sommet mondial sur le développement durable, l'Assemblée générale et le Conseil économique et social des Nations Unies ont tous souligné la nécessité de mettre au premier plan l'investissement dans l'agriculture et la sécurité alimentaire. En septembre dernier, la troisième Conférence internationale sur le développement de l’Afrique, TICAD III, tenue au Japon, a, elle aussi, reconnu la nécessité de donner priorité à l'agriculture et au développement rural.

D'importantes initiatives ont également été lancées dans toutes les régions en vue d’améliorer la sécurité alimentaire et d’encourager les investissements dans l’agriculture.

En juillet 2003, les chefs d'État et de gouvernement africains ont ainsi adopté la Déclaration de Maputo sur l'agriculture et la sécurité alimentaire, par laquelle ils se sont engagés à allouer au moins 10 pour cent de leurs budgets nationaux au développement agricole et rural, dans un délai de cinq ans.

En Amérique latine, le Brésil, le Mexique et l'Uruguay ont mis en route d'ambitieux programmes nationaux de sécurité alimentaire. Au moment de son investiture, le Président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a lancé le programme « Faim zéro », avec le plein appui de la FAO. Il a proposé par la suite de diffuser l'expérience brésilienne à d’autres pays et de constituer un Fonds mondial contre la faim prévoyant la participation des pays développés et en développement, des institutions privées et de la société civile.

En Asie, le Pakistan et la Chine ont annoncé leur décision de lancer des programmes nationaux d’amélioration de la sécurité alimentaire. De même, au Proche-Orient, l'Algérie a constitué un fonds fiduciaire unilatéral de 30 millions de dollars EU pour l'élaboration d'un programme national de développement agricole et pour la sécurité alimentaire, rattaché au Programme spécial de la FAO pour la sécurité alimentaire (PSSA).

Je suis certain que d'autres nations chercheront à suivre les exemples remarquables donnés par ces pays dans la lutte contre la faim.

Dans le même temps, la coopération entre la FAO, la Banque mondiale et d'autres institutions financières internationales s’est renforcée. La FAO a permis aux hauts responsables de ces institutions de se retrouver pour partager leurs réflexions sur les moyens de relancer l'investissement dans l'agriculture et le développement rural. La FAO a par ailleurs, à l’invitation de la Banque mondiale, contribué à la formulation et à la mise en œuvre de sa nouvelle stratégie de développement rural.

La collaboration avec les institutions financières a conduit à la formulation de 117 projets d'investissement en 2001-2002 par le Centre d'investissement de la FAO, pour un montant total de plus de 4,7 milliards de dollars EU, dont quelque 3,4 milliards de dollars sous forme de prêts.

Suite au Sommet mondial de l’alimentation: cinq ans après (SMA:caa) et autres réunions internationales majeures, la position de nombreux donateurs bilatéraux a évolué. Au Canada, par exemple, l’ACDI s’est doté d’un cadre de réflexion pour planifier ses programmes pour l’agriculture et le développement rural, et a décidé de renforcer son soutien à ce secteur. Au total, les investissements de l’ACDI dans le secteur agricole devraient ainsi passer de 95 millions de dollars canadiens en 2001/2002 à 300 millions en 2005/2006 et franchir les 500 millions en 2007/2008.

L’un des autres résultats du SMA:caa a été le démarrage des travaux du Groupe de travail intergouvernemental chargé de la rédaction de directives volontaires pour la réalisation progressive du droit à l'alimentation. Une fois adoptées, ces directives permettront aux pays membres de la FAO d’établir les bases juridiques pour la réalisation de la sécurité alimentaire pour tous et de définir les responsabilités des différents acteurs dans la mise en œuvre de politiques appropriées.

Assistance aux politiques

L'assistance aux politiques que la FAO offre aux pays en développement vise à renforcer la cohérence entre les stratégies, les politiques et les programmes de terrain. Elle cherche aussi à aider les pays à prendre les meilleures décisions possibles en matière d'investissement, afin d’utiliser au mieux les ressources financières et humaines limitées dont ils disposent. Plus récemment, la FAO a mis l’accent sur la mobilisation des ressources afin de mieux répondre aux besoins spécifiques de chaque pays.

À la suite du SMA:caa, la FAO a organisé plusieurs réunions avec les banques régionales de développement et les organisations économiques régionales, pour définir conjointement des stratégies concrètes en vue de la réalisation des objectifs du Sommet. Plusieurs programmes nationaux pour la sécurité alimentaire ont été élaborés et certains d'entre eux sont déjà opérationnels.

La FAO a soutenu le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) dès sa constitution en 2001. En 2002, la FAO a contribué à la préparation par les gouvernements, en consultation avec les différents partenaires, d’un Programme détaillé pour le développement de l'agriculture africaine (PDDAA). Ce Programme donne un cadre pour les investissements prioritaires en faveur de l'agriculture sur le continent. L’Organisation aide aussi le Secrétariat du NEPAD à établir des priorités entre les nombreuses actions à mettre en oeuvre.

La FAO est prête à collaborer avec les pays membres, les institutions régionales de financement et les partenaires au développement dans d’autres régions du monde pour élaborer des stratégies et programmes régionaux de développement agricole et rural et des projets bancables.

Programmes spéciaux de la FAO

Au cours du biennium, la FAO a poursuivi ses programmes opérationnels afin d'apporter un soutien aux pays membres dans leur lutte contre la faim. Toutefois, les besoins des pays dépassent largement les capacités du programme ordinaire de la FAO. Il est donc essentiel d'aider les pays à mobiliser d’autres ressources humaines et financières pour assurer le développement de la production agricole et animale, des forêts et des pêches.

Le Fonds fiduciaire de la FAO pour la sécurité alimentaire et la sécurité sanitaire des aliments a été établi en 2002 pour accroître le flux des ressources destinées à la lutte contre la faim. L’Italie s’est déjà engagée à contribuer à ce Fonds à hauteur de 100 millions de dollars EU (50 millions ont déjà été reçus), de même que le Nigeria pour 10 millions de dollars, le Fonds de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) pour 700 000 dollars, et la Libye pour 9,3 millions de dollars (déjà reçus). Une contribution d’un million de dollars a aussi été versée à titre d’avance par l’Arabie Saoudite.

Par ailleurs, la FAO a développé des accords spécifiques de coopération avec d'autres partenaires, notamment avec l'Agence américaine pour le développement international (USAID), l'Union européenne, les Pays-Bas ainsi qu'avec diverses institutions financières.

Le Fonds spécial de la FAO pour la sécurité alimentaire et la sécurité sanitaire des aliments soutient le Programme régional pour la sécurité alimentaire dans les Caraïbes, les Îles du Pacifique Sud, la région des Grands Lacs et le Sahel en Afrique, et au Proche-Orient. Il finance également trois projets de lutte contre les maladies des animaux et des plantes en Europe de l'Est et en Asie centrale.

Le Programme spécial de la FAO pour la sécurité alimentaire (PSSA), lancé en 1995 avec un budget initial de 3,5 millions de dollars EU, a mobilisé à ce jour près de 548 millions de dollars EU, dont plus de la moitié (60 pour cent) provient des budgets nationaux des pays en développement. Aujourd’hui, 89 pays participent au PSSA.

L’évaluation récente du Programme a montré son efficacité notamment en ce qui concerne la promotion de la prise en charge nationale et l’établissement de processus participatifs. L’équipe d'évaluateurs indépendants a également formulé des recommandations visant à l’amélioration du Programme, notamment par la mise en place d'un système de suivi et d'évaluation. Les recommandations formulées sont actuellement mises en œuvre, y compris le système de suivi et d'évaluation, d'ores et déjà opérationnel.

Dans le cadre du PSSA, la coopération Sud-Sud de solidarité a permis de mettre, à un coût marginal, des techniciens sur le terrain pour travailler au sein des communautés rurales au profit des agriculteurs pauvres. Les accords signés avec les pays partenaires ont permis la mobilisation de 2 800 experts et techniciens pour des missions de terrain. À ce jour, 684 experts et techniciens de pays du Sud ont effectué ou réalisent actuellement des missions dans ce cadre. Au 1er Décembre 2003, 284 seront en poste. Ainsi des experts et de techniciens chinois travaillent actuellement au Nigeria pour améliorer la maîtrise de l'eau, intensifier la production végétale et le petit élevage, et développer la pêche artisanale et l'aquaculture. Des fonds additionnels sont nécessaires pour poursuivre cette coopération Sud-Sud et aider les pays les moins développés et les petits États insulaires en développement à s’y associer.

Le Système de prévention et d'alerte rapide contre les ravageurs et les maladies transfrontières des animaux et des plantes (EMPRES) continue d’avoir un impact réel grâce à l’alerte ainsi lancée, la réaction rapide et l’activation du réseau des meilleurs centres de recherche dans ces domaines. Les principales maladies concernées sont notamment la fièvre aphteuse, la peste porcine, la peste bovine, et la fièvre de la vallée du Rift.Le volet de lutte contre le criquet pèlerin a été extrêmement efficace autour de la mer Rouge grâce à la formation d'équipes locales chargées d'améliorer la surveillance pour maîtriser les invasions de criquets avant qu'elles n'échappent à tout contrôle.

Les donateurs ont contribué au renforcement des capacités locales et régionales afin que des images satellite plus précises, des systèmes de communication électronique plus efficaces et d'autres méthodes de surveillance améliorées puissent permettre la transmission rapide des informations recueillies sur le terrain jusqu'aux bureaux nationaux chargés du suivi, et de là, aux bureaux régionaux et au siège de la FAO. Par ailleurs, les techniques d'épandage de pesticide ont été perfectionnées afin de réduire les quantités nécessaires à un contrôle efficace.

Le volet de lutte contre le criquet pèlerin va être étendu à la région occidentale de l'Afrique. Des pluies exceptionnelles ont été enregistrées cet été sur un vaste territoire offrant un habitat favorable au criquet, s'étendant de la Mauritanie au Soudan ainsi que le long de la frontière indo-pakistanaise. Une extrême vigilance sera donc nécessaire pour ne pas se laisser surprendre par une infestation de criquets.

D'importantes récentes épidémies de maladies animales comme la fièvre aphteuse, la peste porcine et la fièvre de la Vallée du Rift, ont causé des pertes économiques dévastatrices. Le renforcement du volet « Élevage » d'EMPRES s'impose. La FAO a préparé conjointement avec l'Office international des épizooties (OIE) et dans le cadre d'un vaste processus de consultation, un Cadre mondial pour l'éradication progressive de la fièvre aphteuse et d'autres maladies animales transfrontières. Cette initiative vise à lutter contre ces infections à la source, qui se trouve le plus souvent dans les pays en développement, et profitera donc également aux pays exempts de ces maladies.

Ce Cadre contribuera aussi au Programme mondial d'éradication de la peste bovine dont l’objectif est d'éradiquer totalement cette maladie de la planète d'ici à 2010. Les progrès considérables réalisés jusqu'à présent doivent être consolidés. L'Asie est aujourd'hui considérée comme exempte de la maladie et la seule région encore suspecte est la Corne de l'Afrique. Si le soutien nécessaire est fourni, l'éradication mondiale de cette maladie, la deuxième maladie virale après la variole, est à portée de main et la FAO fera tout son possible pour que ceci devienne une réalité.

En dépit de ces succès et du dynamisme remarquable du secteur de l’élevage au cours des dernières années, qui a permis à des centaines de millions de personnes de bénéficier d'une alimentation plus riche et diversifiée, de nombreuses menaces pèsent sur son essor. C’est pourquoi la FAO s’attache en particulier à porter assistance aux pays pour lutter contre les maladies infectieuses du bétail afin de favoriser une croissance durable du secteur.

La Conférence a reçu, pour approbation, le texte d'un accord révisé de collaboration entre la FAO et l'Organisation internationale des épizooties (OIE) concernant les épizooties et la sécurité sanitaire des aliments d'origine animale. En effet, l'accord actuel, qui date de 1954, ne reflète plus les rôles respectifs de la FAO et de l'OIE tels qu'ils ont évolué au cours du demi-siècle écoulé. Le nouvel accord devrait offrir une base solide pour renforcer la synergie entre les deux institutions.

Aménagement des eaux

L'aménagement et la maîtrise des ressources en eau sont au cœur de la plupart des programmes de développement agricole et prioritaires dans le Programme spécial pour la sécurité alimentaire. Les trois principaux axes d’intervention sont la mise en place de petits systèmes d’irrigation, de drainage et de collecte des eaux au niveau des villages, la modernisation des systèmes d'irrigation déjà existants, et la promotion d'un aménagement intégré des eaux.

Dans le cadre de l'Initiative régionale pour l'approvisionnement en eau, lancée en Afrique à la suite de sécheresses récurrentes dans la Corne de l'Afrique, mais aussi au Sahel et en Afrique du Sud, la FAO s'attache à renforcer les capacités nationales en matière d'aménagement des eaux. Cette assistance comprend la formation des groupes vulnérables, et notamment des femmes, aux techniques de gestion de l'eau.

La stratégie générale est de mettre en place de petits ouvrages peu coûteux de collecte d’eau, d’irrigation et de drainage réalisés avec la main d’œuvre locale; d’améliorer la gestion et les infrastructures des grands barrages et projets d’irrigation existants; et de réaliser des programmes d’aménagement des grands bassins fluviaux et des lacs par l’établissement d’institutions techniques et politiques, communes aux pays concernés. Les techniques de désalinisation de l’eau de mer sont aussi prometteuses et il conviendra de les étudier et de les développer.

En mars de cette année, déclarée Année internationale de l'eau douce, la ville de Kyoto a accueilli le Forum mondial de l'eau. À cette occasion, le rôle fondamental joué par l'eau dans la sécurité alimentaire a été mis en évidence, ainsi que l’importance d’une approche intégrée des ressources en eau pour lutter contre la pauvreté.

Programmes normatifs de la FAO

Au cours du biennium, d'importants progrès ont été réalisés et des accords passés dans divers domaines.

En juin de cette année, la Commission du Codex Alimentarius a adopté de nouvelles directives pour l'évaluation des risques liés aux aliments dérivés des biotechnologies. Cinquante nouvelles normes de sécurité sanitaire et de qualité des aliments ont également été établies. D'autre part, à l'issue d'une évaluation globale conduite lors des deux dernières années, la Commission du Codex a modifié ses modalités de travail et est aujourd'hui en mesure de fournir des avis aux gouvernements des pays membres d'une manière plus rapide et plus efficace.

Un Fonds fiduciaire multi donateurs a été créé pour assurer une participation plus efficace des pays en développement aux processus d'élaboration de normes du Codex.

La FAO assure le Secrétariat de la Convention internationale pour la protection des végétaux (CIPV). Avec la croissance des échanges mondiaux, la Convention revêt de plus en plus d’importance en contribuant à l'élaboration de normes internationales et à l’identification de mesures pour empêcher la propagation et l'introduction d'organismes nuisibles constituant une menace pour les végétaux. La Convention a fait l’objet d’amendements en 1997 et sa version révisée a été ratifiée par 52 des États ayant ratifié la version antérieure.

La CIPV est également reliée à la Convention sur la diversité biologique. Un Fonds fiduciaire spécial a été constitué pour assurer la participation des pays en développement aux principales activités liées à cette Convention. La FAO espère que les pays qui ne l'ont pas encore fait enverront sous peu leur instrument d'acceptation du texte révisé de la CIPV.

Des progrès importants ont été faits en ce qui concerne la Convention de Rotterdam sur la procédure de consentement préalable en connaissance de cause, qui vise à protéger l'homme et l'environnement contre les produits chimiques dangereux, notamment les pesticides. Elle a été ratifiée le 26 novembre par un cinquantième État et pourra donc entrer en vigueur en février 2004.

D'autre part, sept ateliers régionaux et sous-régionaux ont été organisés pour définir une nouvelle stratégie d'assistance technique qui apporte une meilleure réponse aux besoins des pays membres dans les domaines évoqués ci-dessus. Cette stratégie s’appuiera sur une coopération étroite avec le Programme des Nations Unies pour l'environnement.

La version révisée du Code international de conduite pour la distribution et l'utilisation des pesticides a été approuvée l'an dernier par les gouvernements, l'industrie des pesticides, des organisations non gouvernementales, des experts et autres parties prenantes. Il s'agit d'un document d'orientation générale sur la gestion des pesticides.

L'adoption du Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture a constitué un événement marquant en mettant en place un cadre international strict pour la conservation et l'utilisation durable des ressources phytogénétiques. Le Traité assure un accès facilité à ces ressources en tenant compte des besoins spécifiques de l'agriculture. Il permet de minimiser les coûts de transaction tout en évitant les pratiques monopolistiques et en assurant un partage juste et équitable des avantages apportés par ces ressources. Le Traité contient également des dispositions pour la protection des droits des agriculteurs et fournit un cadre pour la gestion des ressources génétiques détenues en fiducie par le Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (GCRAI).

En novembre 2003, 33 instruments de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion avaient déjà été déposés auprès du Directeur général de la FAO. Le Comité intérimaire du Traité a également pris des dispositions pour la mise au point des arrangements institutionnels relatifs au règlement intérieur de l'organe directeur. Ces arrangements comprennent notamment les moyens à mettre en œuvre pour favoriser le respect du Traité et la définition des clauses d'un accord pour le partage du matériel génétique des principales cultures (Accord type sur le transfert de matériel).

La FAO accueille actuellement le Secrétariat intérimaire du Fonds mondial pour la conservation de la diversité végétale, une initiative conjointe de la FAO et du GCRAI. Ce Fonds permettra d'assurer un financement durable pour la conservation à long terme des collections végétales dans les banques de gènes des pays en développement, et des collections détenues en fiducie pour la communauté mondiale dans les centres internationaux de recherche du GCRAI. La diversité génétique de ces collections est d’une importance capitale pour l'avenir de l'agriculture et la sécurité alimentaire mondiale. Le Fonds financera également le renforcement des capacités dans les pays en développement. Son objectif initial est de mobiliser 260 millions de dollars EU sous forme de dons.

Sous la conduite de la Commission des ressources génétiques pour l'alimentation et l'agriculture, la FAO assure la supervision du processus mondial qui aboutira au premier rapport sur l'état des ressources zoogénétiques dans le monde et à la définition des mesures à prendre en priorité pour une meilleure utilisation et conservation de ces ressources. À ce jour, 152 gouvernements, y compris certains pays non membres de la FAO, notamment la Russie, ont officiellement annoncé leur contribution à ce processus. Il s'agit là d'un signe encourageant de la détermination de la communauté internationale à ralentir la diminution rapide de la diversité zoogénétique. Ce rapport devrait être soumis à la Conférence de la FAO en 2007, avec les plans d'ensemble des interventions prioritaires.

La FAO continue de travailler avec ses partenaires à l’application du Code de conduite pour une pêche responsable. Le Code établit des principes et des normes internationales pour des pratiques de pêche responsables, y compris en aquaculture. Les rapports nationaux indiquent que sa mise en oeuvre est en bonne voie, notamment par les ONG.

L'Accord visant à favoriser le respect par les navires de pêche en haute mer des mesures internationales de conservation et de gestion est entré en vigueur en avril de cette année. Partie intégrante du Code de conduite, cet Accord représente un élément important de l'aide qui est fournie aux nations pour la réglementation des pratiques de pêche et la prévention de la surexploitation.

La FAO apporte également son soutien au plan d'action contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée. La pêche illicite, non déclarée et non réglementée peut représenter dans certaines pêcheries jusqu'à 30 pour cent des captures totales et constitue l'une des causes principales de la surexploitation de certains stocks de poissons rares. C'est la durabilité des ressources halieutiques mondiales qui est en jeu et cette question est soumise à l'attention de la Conférence afin d’identifier les mesures à prendre pour parer à cette menace.

La FAO préside le Partenariat de collaboration sur les forêts et à ce titre l’Organisation a collaboré avec les autres partenaires à la promotion de pratiques forestières durables et à l'élaboration d'un guide d'information sur le financement destiné à relier les projets aux sources de financement disponibles. La FAO a lancé un portail Internet pour faciliter la consultation des rapports nationaux sur les forêts et l'harmonisation des définitions concernant les forêts employées dans les conventions internationales.

Renforcement des capacités

Grâce à un soutien considérable des donateurs, la FAO va bientôt lancer la deuxième phase du Programme cadre de formation sur le commerce mondial des produits agricoles. Ce Programme aide les pays et les acteurs de la société civile à mieux comprendre le nouvel environnement commercial et à participer sur un pied d'égalité aux négociations commerciales mondiales.

Au cours de la première phase de ce Programme de renforcement des compétences dans le domaine du commerce des produits agricoles, plus de 800 responsables de 150 pays ont participé à des ateliers organisés pour faciliter la compréhension des accords de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) touchant les échanges de produits agricoles. Les thèmes des mesures sanitaires et phytosanitaires, des obstacles techniques au commerce et des droits de propriété intellectuelle ont été traités en priorité.

La FAO a collaboré avec les pays pour l'application des principes d'analyse des risques, fourni des avis en matière de législation alimentaire, formé des inspecteurs des denrées alimentaires, modernisé les laboratoires de contrôle des aliments et diffusé des informations aux agriculteurs, aux consommateurs et au personnel de l'industrie alimentaire. En 2002, la FAO a tenu au Maroc, conjointement avec l'Organisation mondiale de la santé, un Forum mondial des responsables de la sécurité sanitaire des aliments. Un deuxième forum se tiendra en Thaïlande en 2004.

La FAO a aussi préparé un programme de renforcement des capacités dans le domaine de l'analyse des politiques et de la recherche sur les biotechnologies, donnant ainsi suite aux demandes d’assistance reçues dans ce secteur.

Programme de bourses

Depuis sa création, le Programme de bourses de la FAO a permis d'organiser plus de 10 000 programmes de formation couvrant un large éventail de domaines techniques. La FAO a apporté un soutien à de nombreux pays pour mettre en contact les boursiers avec les instituts de formation appropriés. À cet égard, le programme de renforcement des capacités nationales grâce aux bourses, lancé en 1997, et qui prévoit le partage des coûts entre le pays demandeur et celui qui dispense la formation, a permis de multiplier les possibilités d'obtention de bourses.

La formation à distance

L’utilisation de techniques d’enseignement à distance permet à la FAO d’étendre aux universités agraires et aux instituts de formation ses activités de renforcement des capacités. La FAO a aidé à établir des partenariats entre ces institutions dans les pays développés et en développement afin de permettre l’échange et l’adaptation de curricula, ressources techniques et matériel de recherche. Le personnel formé par ces institutions sera essentiel pour la mise en oeuvre des stratégies et programmes agricoles nationaux.

Programme de réforme de la FAO

Un plan détaillé a été établi en 1994 pour recentrer, réorganiser et revitaliser l'Organisation. Avec l'engagement et le soutien des organes directeurs, des objectifs clairs de modernisation, de réduction des coûts et de simplification des procédures ont été fixés. La FAO a ainsi engagé une action de restructuration de grande envergure. Pendant la période 1994-2002, la FAO a réduit ses effectifs de près de 30 pour cent, passant de 5 560 fonctionnaires à moins de 4 000. Cet effort a consisté notamment à réduire les niveaux hiérarchiques ainsi que le nombre des postes de rang supérieur, et à accroître la proportion des cadres de rang inférieur. Cette stratégie a permis de réduire de 34 pour cent les postes de direction et d'augmenter de 64 pour cent les postes de catégorie inférieure.

Grâce aux mesures mises en œuvre pour rationaliser les procédures et améliorer l'efficience, et à la décentralisation des activités, il a été possible de réaliser des économies de l'ordre de 55 à 62 millions de dollars EU par an au cours de la période 1994-2002.

La réforme de la gestion des ressources humaines a été un élément important de ce programme. En 1994, 32 pour cent des États Membres ne comptaient aucun ressortissant parmi le personnel du cadre organique de l'Organisation. Aujourd'hui, ce chiffre est tombé à 16 pour cent, malgré l'augmentation du nombre des pays membres de la FAO (qui sont passés de 169 en 1994 à 183 en 2002). Il faut noter en particulier la nomination de trois femmes au poste de Sous-Directeur général en 2000, les premières femmes nommées à ce niveau dans l'histoire de la FAO.

Décentralisation

Pour rapprocher les opérations du lieu où elles sont les plus nécessaires, l'Organisation a créé cinq nouveaux bureaux sous-régionaux comprenant des équipes multidisciplinaires et desservant des groupes de pays présentant des caractéristiques similaires. Cette décentralisation, d’une grande ampleur, a abouti à une augmentation de 81,5 pour cent des postes décentralisés de la catégorie du cadre organique. La proportion du personnel professionnel en poste dans les bureaux décentralisés par rapport aux effectifs du siège, est passée de 20,6 pour cent en 1994 à 31 pour cent en 2002. À l’issue du biennium 2002-2003, la FAO était représentée dans 131 États Membres, contre 106 en 1994. Les liens au niveau national ont été ultérieurement renforcés par le recrutement de ressortissants nationaux qualifiés à des postes du cadre organique, et cela à des coûts nettement inférieurs à ceux du personnel international.

La décentralisation a renforcé la capacité des bureaux régionaux et des bureaux nationaux de la FAO de mener à bien les opérations du programme de terrain. L'Organisation en suit les résultats de près et a engagé une évaluation des bureaux régionaux afin de déterminer les gains d'efficience et les économies susceptibles d'être réalisés.

Les bureaux de la FAO dans les pays sont désormais les principaux responsables de l'exécution des projets. Ils ont assuré en 2003 la mise en œuvre de plus de 50 pour cent des projets de coopération technique. Si la capacité d'exécution a été améliorée, un effort reste en revanche à faire pour améliorer l'efficience de la mise en œuvre des projets, grâce à l’usage des techniques de télécommunication, à des procédures simplifiées et à une augmentation limitée des effectifs.

Le niveau d'exécution en 2003 du programme de terrain devrait être légèrement supérieur à celui qui avait été enregistré en 2002 (189 millions de dollars EU). En revanche, les projets d'aide d'urgence ont atteint cette année un niveau sans précédent, de l'ordre de 250 millions de dollars, en raison d'une augmentation exceptionnelle de l'aide fournie en Iraq au titre du programme « Pétrole contre nourriture ». De ce fait, la valeur globale de l'exécution du programme de terrain en 2003 pourrait être de l'ordre de 440 millions de dollars EU, soit un niveau nettement supérieur à celui de 2002 (340 millions de dollars).

Modernisation

Comme beaucoup d'autres institutions des Nations Unies, la FAO a mis en place des systèmes modernes de bureautique et de communication qui ont permis à l'Organisation de réaliser des économies considérables. La communication entre le siège et les bureaux dans les pays est bien meilleure et bon nombre de ces bureaux sont désormais dotés de leur propre site Web. Au siège, l'utilisation des technologies de l'information s’est accrue grâce à la normalisation du matériel et des logiciels et l’emploi du courrier électronique.

Les salles de réunion, les salons et les lieux de restauration ont été remis à neuf. Ces travaux ont été financés par de généreuses contributions de nombreux États Membres. Ces espaces ont donc aujourd'hui un âge moyen de 10 ans à peine, contre 26 ans il y a une décennie. Nous procédons également à la rénovation de la Bibliothèque David Lubin, et il convient de remercier notre pays hôte, le Gouvernement italien, pour le financement de ce projet.

Gestion, contrôle et surveillance

La FAO a mis au point des processus et des systèmes de gestion modernes et cohérents, notamment un système avancé de planification stratégique et de budgétisation axée sur les résultats, et des systèmes d'évaluation indépendants afin d'examiner la pertinence et l'efficacité de l'exécution des programmes de l'Organisation.

Les principes de contrôle interne sont rigoureusement appliqués. Ces mesures sont renforcées par les activités de vérification, d'inspection et d'enquête internes du Bureau de l'Inspecteur général. La vérification extérieure des comptes est assurée par le Commissaire aux comptes, nommé par les États Membres et auxquels il rend compte.

Forger de nouveaux partenariats

La FAO a accordé une importance particulière à la mise en place de partenariats pour améliorer l’assistance fournie aux pays membres. Au cours des deux dernières années, l’Organisation a continué d’accroître ses efforts de coopération avec divers partenaires régionaux et internationaux.

La collaboration avec les agences dont le siège est à Rome, y compris le Programme alimentaire mondial (PAM), l'Institut international des ressources phytogénétiques (IPGRI) et le Fonds international de développement agricole (FIDA), progresse de façon tout à fait satisfaisante. De nombreuses consultations ont eu lieu entre les agences pour améliorer la coordination de leurs activités. La FAO et le PAM étudient activement les moyens de renforcer la coopération au niveau des pays. De fait, outre les missions d'évaluation des récoltes et des disponibilités alimentaires qui sont déjà réalisées conjointement par les deux institutions, de nombreuses autres activités pourraient être menées en collaboration. La FAO trouve d'excellents motifs d'encouragement dans la volonté manifestée par le PAM d'explorer ces possibilités de travail conjoint et cette coopération devrait, dans les années à venir, aboutir à une augmentation importante des initiatives conjointes.

La FAO, en collaboration avec le FIDA, encourage les organisations africaines d'agriculteurs à contribuer à la formulation des politiques et des programmes agricoles du NEPAD, en faisant connaître leur point de vue.

En outre, de nouvelles approches ont été adoptées pour resserrer les liens avec les autres organisations du système des Nations Unies, les institutions de développement et de financement comme la Banque mondiale et les banques régionales de développement, ainsi que l’OCDE et l’Union européenne. Des partenariats ont été établis dans le cadre des Objectifs de développement du Millénaire, des stratégies de réduction de la pauvreté, et des stratégies nationales pour la sécurité alimentaire.

L'Organisation a également conclu de nouveaux accords avec les gouvernements et les institutions, notamment dans le cadre de la Coopération technique entre pays en développement et de la Coopération technique entre pays en transition. Des accords de coopération ont aussi été conclus avec des établissements universitaires et des instituts de recherche, ainsi que pour l'utilisation d'experts retraités. Une nouvelle unité a été mise en place pour renforcer la coopération avec le secteur privé et les organisations non gouvernementales.

La coopération avec la Commission européenne et avec le Japon a été renforcée grâce à l'établissement de bureaux de liaison à Bruxelles et à Yokohama. La collaboration de la FAO avec les pays de l'OCDE se poursuit par des échanges dans des domaines d'intérêt commun comme la sécurité sanitaire des aliments, la pêche et l'environnement.

La FAO et l'Union européenne ont récemment signé un accord destiné à renforcer leur partenariat en engageant notamment un dialogue plus étroit. Cet accord devrait conduire à de meilleures perspectives de financement à long terme pour les programmes de développement. La FAO s’est ainsi engagée à adhérer à l'accord-cadre financier et administratif de l’Union européenne, qui comporte un ensemble de directives devant permettre de réduire les coûts et de renforcer l'efficacité des programmes communs.

En juillet 2002, un nouveau Protocole d'accord a été signé avec le Fonds pour l'environnement mondial (FEM), destiné à renforcer la collaboration du Fonds avec la FAO. La FAO et le Secrétariat du FEM ont convenu d'élaborer un premier programme de travail dans six domaines prioritaires: les polluants organiques persistants, la biodiversité agricole, la biosécurité, l'utilisation d'énergies renouvelables dans les secteurs productifs, la gestion intégrée des écosystèmes et le développement durable des ressources productives de l’environnement.

La collaboration avec les organisations non gouvernementales et la société civile a été renforcée. Un programme d’action a été adopté suite au Sommet mondial de l’alimentation. Il a conduit à plusieurs activités concrètes, notamment la participation d’organisations d’agriculteurs à la préparation du Programme agricole du NEPAD, de représentants de la société civile au développement de lignes directrices pour la mise en œuvre du droit à la nourriture, et à la définition des modalités de fourniture d’aide agricole en situations d’urgence.

Le partenariat de la FAO avec le secteur privé a aussi été étendu au cours des deux années écoulées, surtout dans le cadre du Forum économique global (WEF). La FAO a ainsi travaillé en collaboration étroite avec plusieurs entreprises privées, notamment Adobe, DeLaval, l'Association internationale d'alimentation animale, Parmalat, Publicis et Volkswagen, qui ont apporté leur soutien technique et financier à l'Organisation et à divers pays membres.

Visibilité et activités médiatiques

Au cours du biennium 2002-2003, la FAO a poursuivi sa collaboration avec les médias pour attirer l'attention au niveau international sur le problème de la faim dans le monde. Le site Internet de l’Organisation est accessible aux utilisateurs du monde entier. Il enregistre aujourd’hui environ 40 millions de contacts par mois. Le succès de ce site témoigne du développement rapide du programme WAICENT de collecte et de diffusion des informations produites par les différents Départements techniques de l’Organisation. En 1999, le site de la FAO offrait 6,5 millions de pages d'information. En 2003, cette offre a dépassé les 48 millions de pages.

La FAO diffuse également des informations sous d’autres formats, telles que des publications imprimées, des CD-roms, des cassettes radio et vidéo, ainsi que des produits multimédia. Ce matériel donne accès à des informations techniques importantes pour les décideurs, spécialistes et autres publics n’ayant pas la possibilité d’utiliser l’Internet. En outre, la FAO a produit en 2003, dix-neuf présentations multimédia et une brochure intitulée « La FAO au service de ses membres » qui présente de façon synthétique ses principaux programmes, le budget et les réformes effectuées pour améliorer son efficacité.

La Journée mondiale de l'alimentation a été célébrée dans plus de 150 pays. Des célébrités du monde du spectacle et de la science se sont aussi jointes à l'Organisation en qualité d'Ambassadeurs de bonne volonté, pour soutenir ses efforts de communication et attirer l’attention du public et des média sur le problème de la faim.

En 2002, la FAO a conduit la campagne de sensibilisation de l'Année internationale de la montagne, qui visait à souligner l'importance de la protection des écosystèmes montagneux et de l'amélioration des conditions de vie des montagnards. Des comités nationaux ont été constitués dans 78 pays pour promouvoir une action à long terme en faveur de la mise en valeur durable des montagnes. Le 11 décembre 2003 marquera la première Journée internationale de la montagne, qui sera célébrée ici même, au siège de la FAO. Le Partenariat international pour la mise en valeur durable des régions de montagne a demandé à la FAO d'accueillir son Secrétariat. L'Organisation continuera donc, en collaboration avec les ONG, les gouvernements et le secteur privé, à promouvoir le renforcement des moyens d'existence des montagnards et notamment des 270 millions de personnes qui vivent en montagne dans les pays en développement et en transition, et sont menacées par l'insécurité alimentaire.

La FAO se prépare également activement pour la célébration en 2004 de l'Année internationale du riz. La FAO a en effet répondu positivement à l'invitation de l'Assemblée générale des Nations Unies d’assurer la direction des activités de cette célébration, en collaboration avec les parties prenantes nationales et internationales. Les gouvernements, agriculteurs, consommateurs et spécialistes de l'environnement auront ainsi une occasion unique d'unir leurs efforts pour promouvoir des systèmes de production basés sur le riz et une stratégie de consommation visant à renforcer la sécurité alimentaire, améliorer les moyens d'existence des ruraux pauvres, protéger le paysage et préserver le patrimoine culturel.

La campagne de sensibilisation du programme TeleFood contre la faim et la malnutrition continue à prendre de l'ampleur, en termes de reconnaissance et en portée. En 2002 et en 2003, plus de 70 pays ont organisé des événements destinés à recueillir des fonds. Ces événements ont ainsi permis au message de la FAO de parvenir à plus de 500 millions de personnes au travers de quelque 80 chaînes de télévision et de radio.

Les dons recueillis, 11 millions de dollars EU au total, ont permis de financer la réalisation dans 114 pays de plus d'un millier de petits projets en faveur de la sécurité alimentaire.

Budget et finances

Le budget du Programme ordinaire de la FAO a diminué de 15 pour cent en valeur réelle depuis 1994. Le budget de l'Organisation pour l'exercice biennal 1994-1995 s'élevait à 673 millions de dollars EU, mais il était tombé à 650 millions dollars pour la période 1996-1997. Il n'y a plus eu aucun accroissement avant l'exercice biennal 2002-2003, au cours duquel le budget a été augmenté de 1,8 million de dollars EU. D'un autre côté, une augmentation des contributions volontaires des gouvernements, des agences des Nations Unies et des institutions financières internationales, comme la Banque mondiale, a été enregistrée. Au cours de la période 2002-2003, les projets exécutés par l'Organisation devraient être financés par des contributions volontaires à hauteur de 726 millions de dollars EU au moins, contre 474 millions de dollars en 1994-1995.

Concernant les résultats financiers de la FAO, le solde déficitaire du Fonds général et des fonds apparentés n'a que légèrement augmenté depuis le dernier exercice biennal, passant de 75,4 millions de dollars EU à 75,5 millions de dollars. À cet égard, il convient de rappeler que la décision prise par les organes directeurs de ne plus dégager de fonds pour couvrir les dépenses relatives à l'Assurance maladie après la cessation de service, occasionnera une augmentation de 14 millions de dollars EU du déficit du Fonds général, d'ici la fin de l'exercice. Les pays Membres doivent prendre des mesures fermes au cours de cette Conférence pour éviter une nouvelle aggravation de ce déficit.

Ordre du jour de la Conférence

Je voudrais maintenant passer à l'ordre du jour de cette importante session de la Conférence. La Commission I examinera les initiatives prises par la FAO pour lutter contre la faim, afin d'avoir une vue d'ensemble de ce qui a été fait pour mettre en œuvre les engagements du Sommet mondial de l'alimentation et réaliser les objectifs du Millénaire pour le développement. Cette Commission se penchera également sur les progrès réalisés dans l'exécution du Plan d'action parité hommes-femmes, ainsi que sur les mesures prises pour promouvoir l'intégration des femmes dans le développement. Le principal point à examiner par la Commission II est le Programme de travail et le budget pour 2004-2005. La Commission II s'occupera également du Plan d'action international visant à prévenir, à contrecarrer et à éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée.

Des Tables rondes ministérielles auront lieu lundi, mardi et mercredi. Diverses intéressantes manifestations parallèles sont prévues du 1er au 4 décembre 2003.

Programme de travail et budget

Trois propositions ont été faites pour le budget. Deux d’entre elles sont contenues dans le document sur le budget. La première préconise un taux de croissance réelle de 5,5 pour cent par rapport à l'actuel budget approuvé. La seconde proposition décrit les implications d’une absence de changement du budget en termes réels, encore appelée « croissance réelle zéro » ou « scénario CRZ ».

En dépit des demandes d’assistance de la FAO, certains pays membres ont demandé, lors de la dernière session du Conseil, qu’un troisième scénario soit présenté, consistant en une proposition de croissance nominale zéro (CNZ). Celle-ci est contenue dans un document spécifique du Conseil. Cette troisième proposition, sous l’élégance de ce libellé, représente une nouvelle compression du budget de 35,2 millions de dollars EU pour le biennium 2004-05.

Comme mentionné précédemment, le budget de la FAO n'a pas augmenté en termes réels depuis une décennie. Le budget actuel de 651,8 millions de dollars EU pour 183 États Membres est inférieur de 21,4 millions de dollars à celui de 673,1 millions de dollars de 1994-95 au moment où l’Organisation ne comptait que 169 Membres. Pendant la même période, l'inflation cumulée en Italie a atteint 35 pour cent. Les programmes les plus importants ont pourtant été maintenus, mais ceci n'a été possible que grâce à des gains d'efficience sans précédent et une gestion prudente du risque lié au taux de change.

Il n’est pas possible de refaire ce qui tient du prodige après la réalisation de gains d'efficience de l'ordre de 50 à 60 millions de dollars EU.

D'autre part, nous sommes exposés à un énorme risque, celui des effets d'un affaiblissement du dollar EU.

Vous êtes invités à examiner une proposition du Comité des finances de mise en recouvrement fractionnée des contributions en dollars EU et en euros. L’avis des experts m’a convaincu qu'il s'agit là du seul moyen viable de réduire les risques liés aux fluctuations des taux de change.

Mon devoir est de vous donner une image fidèle de ce que l'Organisation deviendrait dans un scénario de croissance nominale zéro alors qu’elle a déjà subi une diminution de postes de 30 pour cent depuis 1994. Les effets ne se limiteraient pas aux réductions des dépenses globales engagées par l'Organisation pour la mise en œuvre des programmes sur la pêche ou les forêts dans les pays. Ils se traduiraient aussi par une réduction de près de 160 postes sur l'ensemble des effectifs de l'Organisation et 650 en l’absence de recouvrement fractionné en deux monnaies des contributions.

Peu de domaines d'activité n'échapperaient à ces coupes. Les renforcements que vous avez demandés dans certains domaines prioritaires comme la CIPV et le Codex, s'en ressentiraient au même titre que la plupart des autres programmes, y compris le Code de conduite pour une pêche responsable, la gestion des forêts ou encore le soutien aux conventions internationales. Toutes les activités devraient être réduites.

Aussi la proposition d'envisager un scénario de croissance réelle zéro ne me paraît-elle pas réaliste dans de telles conditions, ni ne semble correspondre, d'après ce que j'ai compris, aux souhaits d'une grande majorité des Membres. Il revient toutefois aux représentants des États Membres réunis ici, pour cette Conférence, de faire le meilleur choix possible, sachant les implications. Pour sa part, le Secrétariat se conformera aux décisions qui seront prises par la Conférence.

Je souhaite aussi souligner que de telles restrictions budgétaires ne frappent pas toutes les institutions des Nations Unies. Les données révèlent que la FAO a reçu le plus mauvais traitement de toutes les institutions ayant un budget annuel de plus de 100 millions de dollars EU Si l’on considère un index de 100 pour l’année 1993, la FAO a chuté à un index 96, en comparaison aux valeurs suivantes pour diverses agences:

Au moins deux agences ont bénéficié d’une croissance de leurs budgets en termes réels pour le biennium 2004-05, y compris l’UNESCO et l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Une croissance réelle zéro (CRZ) a été approuvée pour l’OIT mais ceci se traduit en fait par un accroissement du budget de 95 millions de dollars EU.

Il est d’autant plus surprenant que les gouvernements choisissent de traiter ainsi la FAO alors qu'ils s’accordent sur le fait que l'agriculture est la force motrice du développement dans les pays en développement.

Un regard sur l'avenir: les grands défis pour la FAO

La production alimentaire mondiale est aujourd'hui largement suffisante pour assurer à tous une alimentation adéquate, et pourtant 842 millions de personnes – soit près d'une sur sept – ne mangent pas à leur faim. Le fait que la faim soit aujourd'hui encore un problème d’une telle ampleur est d’autant plus inacceptable. À l'échelle mondiale, on dispose des technologies pour que les agriculteurs produisent des quantités suffisantes de nourriture. Des systèmes d'information nous permettent de savoir où la nourriture manque, et nous disposons des moyens nécessaires pour transporter rapidement les vivres partout dans le monde.

L'existence de la faim dans un monde d'abondance n'est pas seulement un scandale moral, c'est aussi le résultat de politiques économiques à courte vue. Ceux qui ne mangent pas à leur faim ne peuvent travailler correctement, ils sont plus vulnérables aux maladies, et meurent jeunes. Les enfants dénutris n'apprennent pas et les mères sous-alimentées donnent le jour à des enfants mal nourris dont les capacités physiques et mentales sont amoindries. La révolte contre la sous-alimentation et la pauvreté favorise les exploitations extrémistes qui parfois poussent au crime et à la déstabilisation des États. Il est donc dans l'intérêt de chacun, riche ou pauvre, de combattre la faim, l’injustice et l’exclusion.

Nous savons qu'il est possible de réduire rapidement l'incidence de la faim chronique dans les pays en développement si l'on parvient à mobiliser la volonté politique nécessaire. Il faut pour cela jouer sur deux tableaux, en combinant la promotion d'une croissance agricole rapide engageant les petits exploitants, avec des programmes ciblés visant à garantir un accès à une nourriture suffisante aux personnes sous-alimentées qui n'ont ni la possibilité de produire les aliments dont elles ont besoin, ni les moyens de les acheter. Ces deux démarches se renforcent mutuellement, car les programmes visant à améliorer l'accès direct et immédiat à la nourriture offrent de nouveaux débouchés pour la production. Les pays qui ont suivi cette approche ont pu en voir les avantages.

Il est essentiel, pour assurer le succès des investissements effectués sur ces deux fronts, de créer un cadre, à la fois international et national, propice à une croissance économique générale. Au plan international, cela suppose des mesures qui renforcent la paix et à la stabilité politique et économique, et un environnement commercial, notamment pour les échanges de produits agricoles, qui protège et soutienne les intérêts des pays en développement en matière de sécurité alimentaire et de développement.

Réduire la faim signifie aussi veiller à ce que les pays en développement qui se sont engagés à réaliser les objectifs du Sommet mondial et les objectifs du Millénaire, puissent mobiliser les ressources nécessaires, au niveau national et auprès des donateurs. Un investissement additionnel, estimé à 24 milliards de dollars EU par an, pourrait mettre ces pays sur la voie de la réalisation de l'objectif du Sommet mondial de réduire de moitié le nombre des personnes souffrant de la faim, d'ici à 2015. On estime que les bénéfices de cet investissement s'élèveront au moins à 120 milliards de dollars EU par an.

Il faut que l’Organisation puisse bénéficier du soutien de l’opinion publique et des décideurs politiques de ses États Membres. L’accroissement des ressources financières des partenaires au développement est indispensable pour relever les défis du siècle nouveau.

·  La protection de la biodiversité et des ressources naturelles

Le maintien des ressources génétiques et du patrimoine naturel est essentiel pour assurer la sécurité alimentaire à long terme. Il s’agira de protéger les ressources végétales et animales (y compris en empêchant la pêche illicite), de lutter contre la déforestation et les feux de forêts, de protéger la qualité des eaux, et d’analyser les effets de l’utilisation des biotechnologies. À cet effet, la FAO sera amenée à intervenir dans les secteurs législatif, technique, scientifique, commercial, la formation et l’information, tant aux niveaux international et national, que local.

·  La stabilisation et la croissance de la production alimentaire.

La FAO devra appuyer les pays pour:

      1. augmenter les investissements;
      2. développer des activités sources de revenu en milieu rural, en amont et en aval de l’agriculture; et
      3. renforcer les systèmes formels et informels permettant l’accès à la nourriture des groupes les plus vulnérables.

L’amélioration de la maîtrise et de l’utilisation des ressources en eau est cruciale pour l’augmentation de la production agricole. Outre la mise en place de petites structures locales de collecte, d’irrigation et de drainage, la réhabilitation des grands ouvrages et l’aménagement des bassins fluviaux, l’Organisation devra encourager les efforts de recherche sur les techniques visant à la désalinisation de l’eau de mer.

·  L’équilibre entre l’accroissement de la production et la protection de l’environnement

L’Organisation devra porter une attention accrue à l’équilibre entre la nécessaire croissance de la production, notamment par l’utilisation d’intrants, et la protection des ressources naturelles. En effet, l’emploi d’intrants est encore limité dans certaines régions où l’accroissement de la production et de la productivité est nécessaire, et il sera donc amené à augmenter.

·  L’amélioration de la consommation alimentaire dans le contexte de la mondialisation des échanges.

La FAO devra notamment renforcer les capacités des pays à participer aux négociations pour limiter les barrières techniques au commerce et les soutiens qui entraînent une distorsion au niveau des échanges internationaux de produits agricoles.

·   La protection des consommateurs et la qualité et la sécurité sanitaire des aliments

Assurer la qualité et la sécurité sanitaire des aliments est fondamental pour la lutte contre l’insécurité alimentaire mondiale. Pourtant, le monde est confronté à un nombre croissant de crises liées aux effets de nouvelles pratiques agricoles et agro-industrielles qui exigent des mesures législatives et réglementaires, institutionnelles et scientifiques.

·   La prévention des effets de l’infection par le VIH/SIDA et des pathologies liées à l’alimentation sur la population en milieu rural notamment.

L’infection par le VIH/SIDA a des effets dévastateurs en milieu rural notamment. On estime à 8 millions le nombre d’actifs dans le secteur agricole qui sont déjà décédés du SIDA et à 16 millions le nombre de ceux qui pourraient décéder d’ici à 2020. La FAO devra continuer à identifier les dimensions agricoles du phénomène et les mesures à prendre au niveau de ses programmes et projets, notamment en coopération avec l’Organisation des Nations Unies pour le SIDA.

Elle devra aussi continuer sa collaboration avec l’OMS pour faire face aux maladies liées à l’alimentation telles que l’obésité, le diabète, les maladies cardiovasculaires et certains cancers, souvent coexistantes avec les pathologies de la sous-nutrition dans les pays en développement.

·   La sécurité alimentaire dans les écosystèmes de montagne

Au moins 245 millions de personnes vivant en zones rurales de montagne dans les pays en développement et en transition sont des groupes à risque ou qui souffrent d’insécurité alimentaire et de la faim. La FAO, qui assure le Secrétariat du Partenariat de la montagne établi lors du Sommet mondial sur le développement durable en 2002, devra poursuivre ses activités pour répondre aux besoins de ces populations tout en protégeant les écosystèmes de montagne.

·  Le développement agricole et rural durable

Près de 70 pour cent des pauvres dans le monde vivent dans des zones rurales et dépendent de l’agriculture pour leur survie. L’agriculture apporte du travail à 40 pour cent de la population, soit 2,5 milliards de personnes, dans les pays en développement. Il est donc clair qu’il ne peut y avoir de réduction de la faim et de la pauvreté sans le développement agricole et rural durable qui assure revenus et emplois. La FAO coordonne les activités du programme d’action pour l’Agriculture et le développement rural durable (ADRD) adopté lors du Sommet de la terre tenu à Rio en 1992. Le Sommet mondial du développement durable à Johannesbourg en 2002 a réaffirmé la pertinence et la nécessité de ce programme afin d’identifier et de mettre en œuvre les politiques et pratiques bénéfiques au développement agricole et rural telles que la protection intégrée contre les ravageurs des cultures, l’utilisation de la bioénergie, et la gestion participative des forêts et autres ressources naturelles des communautés. La FAO devra continuer ses efforts avec les États, les partenaires au développement et les institutions financières pour assurer les investissements nécessaires.

·   L’Année internationale du riz

La FAO a été chargée de coordonner la préparation des évènements pour la célébration de l’Année internationale du riz en 2004. Le riz est l’aliment de base de la moitié de la population mondiale. L’augmentation de la production et de la productivité des systèmes rizicoles peut donc jouer un rôle capital dans la lutte contre la faim et l’insécurité alimentaire.

·   Défis institutionnels

Sur le plan institutionnel, la FAO devra continuer à appuyer les efforts du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies pour une meilleure coordination et intégration des différents partenaires du système multilatéral.

L’Organisation devra aussi trouver un équilibre adéquat, mais souple, entre les programmes normatif et opérationnel et aussi avec les activités d’assistance aux politiques nationales et régionales.

L’Organisation devra aussi veiller à répondre aux besoins spécifiques de ses pays membres qui se trouvent à différentes étapes de développement, en particulier les pays les moins avancés, les États en développement des petites îles, et les pays enclavés. À cet égard, le renforcement des ressources humaines est une priorité. L’Organisation a maintenant à sa disposition les techniques modernes de formation à distance qui seront mises en œuvre dans le cadre de la coopération avec certaines universités de ses États Membres.

Le défi immédiat pour la FAO et ses Membres c’est de trouver les moyens pour réduire la faim et assurer le droit humain fondamental à la nourriture. Il faut agir résolument et dès maintenant afin que toutes les parties prenantes, dans les pays et au niveau international, puissent déployer des efforts concertés à cet effet, dans le cadre d’une Alliance internationale contre la faim.