ARC/04/INF/6


VINGT-TROISIÈME CONFÉRENCE RÉGIONALE
POUR L’AFRIQUE

Johannesburg (Afrique du Sud), 1er – 5 mars 2004

INITIATIVE VISANT LA RÉVISION ET LA MISE À JOUR DES STRATÉGIES ET POLITIQUES NATIONALES AXÉES SUR LE DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL ET LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

Table des matières



I. CADRE GÉNÉRAL ET OBJECTIFS

1. Lors du Sommet mondial de l’alimentation qui s’est tenu à Rome en 1996, les chefs d’État et de gouvernement se sont engagés à réduire de moitié le nombre de personnes sous-alimentées d'ici 2015. Durant la période de suivi du Sommet, les pays membres de la FAO ont formulé leurs stratégies nationales pour la sécurité alimentaire et le développement agricole – Horizon 2010 avec l’appui de l’Organisation. Ces stratégies ont été approuvées au total par 117 pays dont 40 appartiennent à la région Afrique. Dans certains d’entre eux, les stratégies ont été approuvées par le Parlement, tandis qu’ailleurs elles ont été avalisées par le chef de l’État ou du gouvernement. Elles ont ensuite été intégrées aux programmes nationaux et sectoriels de développement. Elles servent en outre de fondement aux stratégies et programmes régionaux en faveur de la sécurité alimentaire élaborés, avec l’aide de la FAO, par les Communautés économiques régionales qui sont au nombre de neuf en Afrique.

2. Entre 2000 et 2001, la FAO a proposé de procéder à la mise à jour de ces stratégies et plus de 100 gouvernements ont reçu un soutien technique en vue de l’organisation d’ateliers d’une journée réunissant de multiples parties prenantes chargées d’examiner et de réviser les stratégies nationales. Trente-trois ateliers de ce type ont eu lieu en Afrique avec la participation de représentants des gouvernements, d’associations d’agriculteurs, des ONG, des établissements de recherche, des universités, des associations de consommateurs, du Parlement et des bailleurs de fonds.

3. Suite à l’adoption des Objectifs du Millénaire pour le développement et à la tenue du Sommet mondial de l'alimentation: cinq ans après en juin 2002, la FAO a lancé l’initiative visant la révision et la mise à jour des stratégies et politiques nationales axées sur le développement agricole et rural et la sécurité alimentaire dans le but de réexaminer les visions nationales à long terme du développement agricole et de la sécurité alimentaire, de prolonger les stratégies en place jusqu’à l’horizon 2015 et donc, de les aligner sur les Objectifs du Millénaire pour le développement.

4. La FAO a apporté son concours aux pays membres tout au long de ce processus, avec les objectifs spécifiques suivants:

5. La Déclaration de l’Union africaine (Maputo, 2003) et le Programme détaillé du NEPAD pour le développement de l'agriculture africaine (PDDAA) ont donné à cette initiative en faveur de l’Afrique un nouvel élan et un cadre rajeuni. Au plan national, les stratégies, processus, programmes et cadres stratégiques existants, tels que les documents stratégiques nationaux de la Banque africaine de développement, les stratégies d’aide aux pays de la Banque mondiale, les documents d’opportunités stratégiques nationales du FIDA et de l’UNDAF, offrent eux aussi une base saine à cette entreprise.

6. Les arguments fondamentaux justifiant la révision proposée sont que la faim est à la fois une cause et une conséquence de la pauvreté et que la majorité des victimes de la pauvreté et de l’insécurité alimentaire vivent en zones rurales. En conséquence, pour réduire massivement et durablement la pauvreté, il faut s’attaquer directement à la faim afin d'accroître la productivité et le potentiel de production des victimes de la faim et de stimuler le développement agricole et rural qui est essentiel pour la croissance économique globale et l’atténuation durable de la pauvreté en zones rurales. On espère que les stratégies nationales révisées porteront sur l’espace rural tout entier et tiendront compte des liens spatiaux, sectoriels ainsi qu’à l’échelon micro- et macro-, de la dimension de l’insécurité alimentaire en zones urbaines et des questions intersectorielles comme la réforme du secteur public, la décentralisation, le commerce, le VIH/SIDA et les réformes macroéconomiques. Cette approche va dans le droit fil du Programme détaillé du NEPAD pour le développement de l'agriculture africaine (PDDAA).

7. Ce document vise à informer la Conférence régionale du processus adopté en vue de l’actualisation et de la révision des stratégies nationales pour la sécurité alimentaire et le développement agricole, à lui communiquer certains des résultats clés d’ores et déjà obtenus et à examiner la marche à suivre pour renforcer les processus d’élaboration des stratégies dans les pays de la région.

II. LE PROCESSUS

8. L’Assemblée des Chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine réunie à Maputo (Mozambique), en juillet 2003, a adopté une « Déclaration sur l’agriculture et la sécurité alimentaire en Afrique » qui souligne la nécessité de revitaliser l’agriculture, notamment les secteurs de l’élevage, des forêts et des pêches. À cet effet, il conviendra de mettre en œuvre des politiques et des stratégies spéciales au profit des petits agriculteurs traditionnels des zones rurales et de créer les conditions propices à la participation du secteur privé, en mettant l’accent sur le développement des capacités humaines et en levant les obstacles à la production et à la commercialisation des produits agricoles, notamment le manque de fertilité des sols, la mauvaise gestion des ressources en eau, l’insuffisance des infrastructures, les ravageurs et les maladies. La Déclaration vient en outre réitérer l’engagement des chefs d’État et de gouvernement africains qui entendent placer en tête de leurs priorités la lutte contre la faim et la levée des obstacles à la production agricole, au commerce des produits agricoles et au développement rural. Les chefs d’État et de gouvernement africains se sont déclarés résolus à adopter des politiques rationnelles en faveur de l’agriculture et du développement rural et se sont engagés à allouer, d’ici cinq ans, 10 pour cent au moins des ressources budgétaires nationales à leur application.

9. Lors d’une réunion sur la mise en oeuvre du Programme détaillé du NEPAD pour le développement de l'agriculture africaine, organisée par la FAO, à Rome, en septembre 2003, les représentants de 18 ministères de l’agriculture de pays africains membres du Comité de mise en oeuvre du NEPAD et du Comité directeur du NEPAD ainsi que les représentants des institutions internationales de financement et de développement et de la société civile ont fait valoir que l’exécution du Programme détaillé du NEPAD à l’échelon national devrait s’appuyer sur des stratégies et des politiques nationales, notamment des Documents stratégiques pour la réduction de la pauvreté (DSRP); ils ont par ailleurs reconnu qu’il était important de remédier aux contraintes d’ordre politique et institutionnel et de replacer les projets dans le contexte des stratégies et des programmes.

10. Les pays participant aux réunions ministérielles sur la mise en oeuvre du Programme détaillé du NEPAD organisées à Rome les 5 et 6 décembre 2003 ont déclaré qu’ils s’employaient à remanier progressivement leurs stratégies nationales afin d’accorder un rang élevé de priorité à l’agriculture et à la sécurité alimentaire. À cet égard, ils ont fait bon accueil au soutien apporté par la FAO pour l’élaboration et l’actualisation des stratégies nationales et la préparation des programmes à moyen terme (ou leur mise à jour s’ils existent déjà), ainsi qu’aux projets susceptibles de bénéficier d'un appui financier. Ces réunions de haut niveau ont contribué à amplifier l’importance et l’urgence que revêtent l’examen et l’actualisation des stratégies et des politiques nationales, offrant ainsi une meilleure assise à cette entreprise.

11. Depuis septembre 2003, la FAO prête son concours à ce processus, par le truchement de la Division de l’assistance aux politiques, en respectant les étapes ci-dessous:

12. Par ailleurs, la FAO s’est employée à dresser l’inventaire des instruments et processus stratégiques et politiques nationaux actuellement en vigueur dans le monde, notamment en Afrique, et a préparé des profils politiques de pays en étroite collaboration avec ses représentants et en concertation avec les gouvernements. Au total, 105 profils politiques ont été élaborés dont 29 pour des pays d’Afrique. Ces profils permettent de dresser un état des lieux des stratégies et politiques en faveur de la sécurité alimentaire et du développement agricole dans les pays membres de la FAO et de mettre en lumière l’assistance requise en vue de leur examen et de leur mise à jour. Une fois parachevés, les profils permettront d’adapter l’assistance aux politiques fournie aux pays selon le degré de développement de leurs politiques nationales et les processus en vigueur. Les profils auront également pour effet de favoriser la mise en réseaux des politiques et de bien cadrer les interventions sur l’agriculture, un secteur essentiel pour la lutte contre la pauvreté dans la plupart des pays.

III. RÉSULTATS PRÉLIMINAIRES

13. À ce jour, le processus engagé dans la région Afrique a permis l’actualisation de 47 projets de résumés de stratégies nationales pour la sécurité alimentaire et le développement agricole ; une fois finalisés en concertation avec les gouvernements membres, ils fourniront le cadre stratégique global des programmes d’investissement à moyen terme et des projets bancables qui seront élaborés en vue de l’exécution du Programme détaillé du NEPAD. De plus, les 29 profils politiques de pays mettront en évidence les principaux domaines dans lesquels les pays membres jugent nécessaire de renforcer leurs capacités d’élaboration de politiques et de stratégies.

Les processus politiques en cours dans les pays membres

14. Selon l’inventaire dressé par la FAO, les pays membres de la région disposent en moyenne de six instruments stratégiques ou politiques officiellement approuvés qui contribuent à la définition de leurs politiques en matière d’agriculture et de sécurité alimentaire. Il s’agit généralement d’instruments récents (dont les deux tiers ont été formulés entre 2000 et 2003). Ils portent principalement sur la sécurité alimentaire, la pauvreté, l’agriculture et le développement rural. Environ 30 pour cent des instruments en vigueur sont des documents de politique générale. Les stratégies et politiques en sont à des stades d’application divers. En outre, on compte dans la plupart des pays au moins deux processus politiques ou stratégiques qui ont démarré depuis 2002. Trente-deux pays africains ont engagé un processus stratégique de lutte contre la pauvreté et 18 pays ont achevé leur DSRP. Les ONG ainsi que d’autres organisations de la société civile participent à plus de la moitié des interventions politiques. Les autorités et les collectivités interviennent aussi activement dans les deux tiers des processus politiques examinés. La multiplicité des processus et des documents en vigueur met en évidence l’utilité des mécanismes interministériels afin de garantir la complémentarité et la cohérence des actions, tant au stade de la formulation que de la mise en œuvre, notamment lorsqu’il s’agit de questions intersectorielles.

Principaux objectifs des stratégies et politiques examinées

15. L’étude engagée a également permis une analyse de la teneur et des principaux objectifs des interventions publiques en faveur de la sécurité alimentaire et du développement agricole. Les résumés d’instruments stratégiques nationaux traitent quasiment tous des problèmes d’eau (irrégularité des précipitations et sécheresse) et du développement insuffisant des institutions publiques et du financement rural. Nombre d’entre eux évoquent aussi les mesures visant à favoriser l’accès aux technologies appropriées et leur adoption, la commercialisation des intrants et des produits agricoles, les autres services agricoles et les infrastructures en zones rurales. La dégradation des ressources naturelles, en particulier les ressources en eau et en terre, est également discutée dans ces stratégies. Enfin, étant donné le grand nombre de conflits qui agitent le continent, près de la moitié d’entre elles abordent le problème de la reconstruction.

16. L’amélioration des rendements est un sous-secteur prioritaire dans la quasi-totalité des résumés de stratégies nationales; c’est aussi le cas du développement de l’élevage dans les deux tiers des documents, du secteur de la pêche dans deux documents sur trois, et des secteurs forestier et agroalimentaire dans la moitié des cas environ. S’agissant des besoins d’investissement, les stratégies mettent l’accent sur les infrastructures, notamment routières, dans presque tous les pays, sur la gestion des ressources hydriques, l’irrigation et la gestion durable des ressources naturelles.

17. En ce qui concerne la production agricole et son écoulement, les options envisagées dans les stratégies de la grande majorité des pays visent l’amélioration des filières de commercialisation intérieure des produits, tandis que le développement des cultures d’exportation et la diversification de la production sont proposés dans la moitié environ des documents. Le commerce et l’intégration régionale y jouent également un rôle considérable, reflétant les engagements régionaux et internationaux des pays en tant que membres des organisations économiques régionales et de l’OMC.

Possibilités de consolidation du processus de formulation et de mise en oeuvre des politiques

18. S’agissant du processus d’élaboration et d’exécution des stratégies et des politiques, on distingue d’emblée trois grands aspects:

19. Pour ce qui est de la teneur de ces instruments, on voit émerger une volonté nouvelle de concevoir des stratégies et des politiques axées sur le développement rural tout entier. Près de la moitié des pays examinés considèrent que cet aspect mérite d’être renforcé, notamment pour dégager des synergies entre les différentes stratégies sectorielles et aborder d’importantes questions intersectorielles comme les institutions rurales, les problèmes de parité hommes-femmes, les activités rémunératrices (notamment hors exploitations agricoles), le développement des zones exposées à la sécheresse et des autres zones marginales et le VIH/SIDA. Les questions sous-sectorielles telles que le crédit, les régimes fonciers et les politiques relatives aux produits de base ont aussi été mentionnées.

20. On constate par ailleurs une participation croissante de la part d’autres intervenants – appartenant notamment à la société civile et au secteur privé – au processus de formulation des politiques. Pour assurer leur pleine et entière contribution, il conviendra d’améliorer leur capacité à prendre part au dialogue et de développer la capacité des gouvernements, en particulier, afin que ces processus complexes de participation soient gérés de manière à faciliter la convergence des opinions et l’élaboration des consensus. Environ un quart des pays examinés signalent que cet aspect doit être consolidé.

21. La mise en oeuvre des politiques et des stratégies approuvées est un domaine qui pourrait grandement être amélioré de l’avis de presque deux pays sur trois. Elle est souvent freinée par l’absence des ressources nécessaires à l’application de nouvelles mesures. C’est principalement le cas du manque de fonds, dû aux affectations budgétaires insuffisantes ou au soutien limité fourni par les bailleurs. Les ressources humaines sont souvent elles aussi un facteur limitant, les organismes publics ne disposant pas des capacités opérationnelles et techniques nécessaires et le personnel étant insuffisamment formé. On pourrait en partie résoudre ce problème au moyen d’activités adaptées de renforcement des capacités, notamment pour la formulation et l’application des politiques. La défaillance des mécanismes interministériels de coordination et les difficultés liées à la résolution des conflits constituent encore d’autres freins institutionnels à la mise en oeuvre des politiques. Dans certains cas, une meilleure planification mettrait davantage en lumière les responsabilités des intervenants concernés et permettrait d’établir des calendriers précis d’exécution.

22. La FAO s’attache à fournir une assistance aux politiques à ses pays membres dans la région. Vingt-neuf pays ont ainsi tiré profit de son aide dans le cadre de projets récents ou en cours. Il convient cependant que les partenaires du développement intensifient leur soutien, notamment la FAO, le PAM, le FIDA, la Banque mondiale et la Banque africaine de développement, afin de remédier aux obstacles mis en évidence lors de ce processus d’examen.

IV. L’AVENIR

23. Depuis son lancement il y a environ un an, l’initiative visant la révision et la mise à jour des stratégies et politiques nationales axées sur le développement agricole et rural et la sécurité alimentaire a enregistré des progrès très appréciables. Dans la région Afrique, des projets de résumés des stratégies nationales pour la sécurité alimentaire et le développement agricole – Horizon 2015 sont maintenant disponibles pour la plupart des pays membres et ils sont actuellement finalisés en concertation avec les gouvernements membres. L’examen des processus politiques engagé par la FAO avec la collaboration des gouvernements montre néanmoins qu’il reste encore un énorme travail à faire pour rationaliser les documents politiques et stratégiques actuels et remédier aux obstacles identifiés dans le processus de formulation et de mise en oeuvre des politiques et des stratégies. La FAO et les autres partenaires du développement des pays membres doivent prendre les dispositions nécessaires pour apporter le soutien que nécessite cette entreprise et mobiliser les ressources humaines et financières qui l’achemineront vers le succès, avec la pleine participation de toutes les parties concernées.

24. La préparation des profils politiques de pays et le processus d’examen et d’actualisation ont permis de mettre en évidence les principaux objectifs des stratégies en vigueur et d’identifier de manière systématique les problèmes clés auxquels se heurtent les pays membres de la région qui s’attachent à développer l’agriculture et à améliorer la sécurité alimentaire. Les informations recueillies confirment les orientations données au Programme détaillé du NEPAD et guideront utilement le travail normatif effectué par la FAO et les autres organisations afin de mieux répondre aux besoins des pays membres. Cette entreprise montre ainsi son utilité, tout en révélant les avantages qu’il y aurait à faire de ce processus d’examen et d’actualisation un exercice permanent. Les résultats obtenus pourraient être périodiquement examinés à l’époque de la Conférence régionale et guider la définition des priorités régionales. L’une des possibilités envisageables consisterait à mettre au point des programmes axés sur les thèmes prioritaires pour la région, en les associant au travail normatif, sur la mise en commun des expériences des pays de la région et des succès remportés dans d’autres régions, sur le renforcement des capacités et l’assistance technique. Différents thèmes sont suggérés par l’analyse des profils politiques de pays, notamment: les synergies intersectorielles; les stratégies de développement rural; les stratégies et politiques de gestion de l’eau et des zones exposées à la sécheresse; les réformes institutionnelles; les stratégies de lutte contre le VIH/SIDA en zones rurales; les stratégies de développement des zones défavorisées et marginales; le transfert des résultats de recherche et des technologies; les politiques d’investissement, notamment celles visant à promouvoir l’investissement privé et la diversification.

25. Les participants à la Conférence régionale sont invités à présenter leur avis sur le bien-fondé du processus en cours, ainsi que sur les moyens et méthodes qui permettraient de renforcer la formulation et la mise en oeuvre des stratégies en faveur de la sécurité alimentaire et de développement agricole et de mieux répondre aux besoins identifiés en la matière.