CCP:BA/TF 05/12



COMITÉ DES PRODUITS

GROUPE INTERGOUVERNEMENTAL SUR LA BANANE ET LES FRUITS TROPICAUX

Quatrième session

Guayaquil (Équateur), 19 – 23 septembre 2005

PERTES APRÈS RÉCOLTE (MANUTENTION)




Table des matières


INTRODUCTION

1. Étant donné qu’en règle générale, les prix des fruits tropicaux ont tendance à baisser à mesure que les approvisionnements augmentent et que la gestion de la filière d’approvisionnement est rationalisée, le Sous-Groupe sur les fruits tropicaux avait demandé que des études soient effectuées sur l’impact des pertes après récolte. Il a été décidé de commencer par rédiger le présent document, en collaboration avec le Réseau des fruits tropicaux (TFNet), dans le but de mettre en évidence les différents problèmes posés par la manutention après-récolte des fruits tropicaux, qui ont une incidence sur le rendement économique des exploitations. Le Sous-Groupe est invité à définir avec précision les priorités de recherche concernant l’impact économique des pertes dues à la manutention après-récolte des fruits tropicaux et d’étudier l’incidence de ces pertes sur le commerce et la sécurité alimentaire.

2. La production mondiale de fruits tropicaux a été estimée à 67,7 millions de tonnes en 2004, dont 98 pour cent ont été produites par des pays en développement. Les principaux fruits tropicaux produits et échangés sont la mangue, l’ananas, l’avocat et la papaye, suivis par les fruits « mineurs » que sont le ramboutan, le longane, le mangoustan, le litchi, la carambole, le fruit de la passion et la goyave. Les tropiques bénéficient d’une variété extraordinaire d’espèces de fruits comestibles, qui y poussent en grandes quantités, mais les conditions climatiques accélèrent souvent leur dégradation et altèrent leur qualité, en particulier après la récolte. De par leur nature particulièrement périssable, la plupart des fruits tropicaux ont une durée de conservation après-récolte limitée. Pour tous les fruits, les pertes après récolte peuvent être causées par des facteurs mécaniques, physiologiques ou pathologiques, qui peuvent être aggravés par des techniques après-récolte déficientes.

I. TECHNIQUES APRÈS-RÉCOLTE : PRINCIPES FONDAMENTAUX

3. L’application de techniques après-récolte aux fruits tropicaux vise principalement à en assurer la qualité (apparence, texture, goût et valeur nutritive), à garantir la sécurité sanitaire et à diminuer les pertes tout au long de la filière d'approvisionnement, de la récolte à la consommation.

4. Pour les cultures tropicales, les pertes après récolte sont principalement dues aux facteurs suivants:

5. En règle générale, les systèmes après-récolte sont articulés autour d’un grand nombre d'opérations interdépendantes, qui concernent principalement la manutention du produit lors des étapes suivantes : récolte, conditionnement, transport, entreposage, conditionnement, emballage et manutention à destination. Les opérations de contrôle de la température et de l’humidité relative, ainsi que de contrôle de la décomposition et des infestations d’insectes, sont intégrées dans les différentes étapes du système. En outre, chaque type de fruit tropical met en jeu des techniques différentes de manutention et de gestion après-récolte.

II. PERTES APRÈS RÉCOLTE

6. En ce qui concerne les fruits tropicaux, les pertes après récolte peuvent varier très fortement, de 10 à 80 pour cent, tant dans les pays développés que dans les pays en développement1. Les pertes ont lieu tout au long de la filière d’approvisionnement, pendant la récolte, le conditionnement, l’entreposage, le transport, la vente et la consommation. Dans la plupart des pays en développement, ces pertes sont principalement dues à la conjonction d’infrastructures déficientes, de mauvaises pratiques agricoles, de l’absence d’informations sur la manutention après récolte et de la complexité du système de commercialisation.

7. Dans les pays où l’agriculture est développée, comme le Japon, la République de Corée et la province chinoise de Taiwan, des pertes après récolte d’environ dix pour cent ont été signalées pour les fruits2. Aux Philippines, en règle générale, les pertes après récolte peuvent être de 15 à 35 pour cent. Cependant, selon les indications, pour des fruits comme la papaye, ces pertes peuvent atteindre 30 à 60 pour cent. Ces chiffres sont assez représentatifs des pertes moyennes après-récolte enregistrées dans la région de l’ANASE3.

8. Selon la Commission nationale pakistanaise chargée de l’agriculture, les imperfections et la médiocrité des installations de manutention après-récolte, de transport, d’entreposage et de commercialisation sont susceptibles d’entraîner 20 à 40 pour cent de pertes pour les fruits et les légumes. Ces pertes se chiffrent chaque année en millions de roupies. En conséquence, il est évident que les pertes après-récolte peuvent avoir une incidence sur l’état nutritionnel de la population et sur l’économie du pays4.

III. TECHNIQUES APRÈS-RÉCOLTE : PROGRÈS RÉCENTS

9. L’expansion des échanges internationaux de fruits et la croissance de la demande des consommateurs relative aux fruits tropicaux de qualité supérieure ont suscité un grand intérêt pour l’élaboration de techniques après-récolte nouvelles ou améliorées et stimulé les investissements dans ce domaine. Cette tendance est perceptible dans la plupart des pays en développement, où l’accent est très nettement mis sur la recherche et le développement dans le domaine des techniques après-récolte.

10. Lors de l’élaboration des programmes de recherche-développement, il convient de commencer par définir les priorités concernant les types de fruit et d’axer les travaux sur les techniques adaptées. D'un point de vue scientifique, la compréhension des processus biologiques et physiologiques est indispensable à l’étude de la manutention après-récolte de tous les fruits tropicaux. En règle générale, la plupart des fruits tropicaux sont climactériques (la fin de la maturation est marquée par une augmentation rapide et marquée de l’intensité respiratoire) et leur durée de conservation après-récolte est limitée. Chez les fruits climactériques, le pic de l’activité respiratoire peut avoir lieu avant, pendant ou après le pic de production d’éthylène. Cette particularité doit être connue pour les applications commerciales, comme le calcul de la charge calorifique et de la capacité de refroidissement et pour la gestion des chargements mixtes5.

11. En règle générale, les techniques après-récolte mettent l’accent sur la réduction de la vitesse de mûrissement, la diminution des blessures mécaniques en vue d’éviter la pénétration de pathogènes, les conditions d’entreposage et les emballages adaptés au marché d’exportation.

12. La diminution de la biosynthèse de l’éthylène, qui accélère le mûrissement des fruits, a fait l'objet de nombreux travaux de recherche. Des composés chimiques, comme la 1-amino-vinylglycine et le 1-méthylcyclopropène (MCP), ont été utilisés pour diminuer la production d’éthylène, ce qui ralentit le mûrissement et allonge la durée de conservation pour plusieurs fruits tropicaux, dont la banane6. Il a également été constaté que le 1-méthylcyclopropène, lorsqu’il est associé à une solution de chitosane hydrolysé par hydrolyse enzymatique, empêchait la croissance de champignons pathogènes et prolongeait réellement la durée de vie des fruits de 80 à 100 pour cent et ce, même à température ambiante7. Le recours aux rayonnements gamma a également été utilisé pour ralentir le processus de mûrissement et pour désinfecter et pasteuriser la surface du fruit. Des techniques comme l’enrobage à la cire ont également été utilisées pour ralentir le processus de mûrissement.

13. À l’heure actuelle, de nombreux travaux de recherche portent également sur le mûrissement lent induit par manipulation génétique. Ce secteur des biotechnologies intéresse tout particulièrement les chercheurs, qui tentent de juguler le problème des pertes dues à la faible conservabilité des fruits tropicaux.

14. Lors de l’entreposage à froid, le conditionnement sous atmosphère modifiée a été utilisé pour les fruits des régions tempérées. Parmi les fruits tropicaux, l’ananas semble réagir de façon positive, mais les conclusions ne sont pas probantes pour la mangue8. Il serait peut-être nécessaire d’entreprendre d’autres études sur le conditionnement sous atmosphère modifiée, avec film plastique perforé pour les fruits tropicaux, afin d’assurer une diminution des altérations causées par la réfrigération pendant l’exportation. Il a été constaté que les altérations causées par la réfrigération étaient moindres pour les mangues Tommy Atkins et Keith entreposées dans des sacs perforés à 12°C9.

15. Dans les pays développés, de nombreuses innovations dans le domaine des techniques après-récolte concernent des équipements de manutention haute technologie et des produits chimiques et sont conçues pour répondre au problème du manque de main-d’œuvre et à l’obsession du produit « parfait » d’un point de vue esthétique. Cependant, ces innovations ne sont pas forcément applicables dans les pays en développement, qui sont confrontés à de nombreux obstacles, comme la médiocrité des installations logistiques et des infrastructures. Dans ces pays, des techniques et des pratiques simples ont été utilisées avec succès pour diminuer les pertes et allonger la durée de conservation des fruits tropicaux. En témoigne la technique de l’entreposage à faible coût des fruits tropicaux dans une chambre froide d’énergie zéro, qui fonctionne selon le principe du refroidissement par évaporation d’eau, en utilisant des matériaux locaux comme la brique, le sable, le bambou, la paille, les sacs de jute et de l’eau10.

IV. OBSTACLES ENTRAVANT LA MISE EN ŒUVRE DES PRATIQUES APRÈS-RÉCOLTE 

16. Les pays en développement sont surtout confrontés à des problèmes d’infrastructures, comme l’absence de bonnes routes et d’électricité, deux facteurs pourtant indispensables pour diminuer l'impact des pertes après récolte, qui sont considérables. Cependant, ces facteurs peuvent être encore aggravés par l’absence d’informations et d’expérience relatives aux bonnes pratiques après-récolte. Pour que l’information soit diffusée de façon rationnelle, il convient de disposer d’un système efficace de vulgarisation. S’il existe une demande pour des produits agricoles de qualité, propres et sûrs, les intervenants du secteur seront contraints de faire face au problème de la qualité des fruits et des pertes après récolte. La complexité du circuit de commercialisation de certains fruits est également problématique, car ces derniers passent entre les mains d’agents collecteurs, d’intermédiaires, d’agents intervenant sur le marché et d’exportateurs, avant d’être mis à la disposition des consommateurs, or chaque étape implique une manipulation.

V. CONCLUSIONS

17. Dans les pays en développement, il a été constaté que les programmes après-récolte étaient surtout entravés par l’absence d’infrastructures et le manque d’expérience et d’information des agriculteurs. En principe, le développement des infrastructures relève du gouvernement, alors que le problème de l’absence d’information et d’expérience peut être résolu grâce à différents types de programmes de formation et grâce à la diffusion des informations. Les informations relatives aux différentes techniques après-récolte sont étayées par des travaux de recherche-développement effectués en priorité.

18. Comme mentionné dans l’introduction, le Sous-Groupe est invité à définir avec précision les domaines dans lesquels il conviendrait d’entreprendre des analyses approfondies de l’impact économique des pertes dues à la manutention après-récolte des fruits tropicaux, à classer ces domaines par ordre de priorité et à étudier l’incidence de ces pertes sur le commerce et sur la sécurité alimentaire. Afin d’orienter les débats du Sous-Groupe, plusieurs domaines ont été déclarés prioritaires par le Réseau sur les fruits tropicaux (TFNet), qui a estimé qu'ils pouvaient être étudiés plus en profondeur et bénéficier éventuellement d’un financement du Fonds commun pour les produits de base. Ces domaines sont notamment les suivants:

BIBLIOGRAPHIE
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1 R.Paull, 2001.

2 FFTC, 1993.

3 F.M. Arshad, 2003.

4 TelMed Pak Agriculture, 2005.

5 R.E. Paull, 1993.

6 E.W. Hewett, 2003.

7 W.T.H. Chang and J Yeh, 2003.

8 SC. Morris and J. Jobling, 2000.

9 Pesis et. al., 1999.

10 S.K. Mitra, 2003.