ERC/00/4


 

VINGT-DEUXIÈME CONFÉRENCE RÉGIONALE DE LA FAO POUR L'EUROPE

PORTO (PORTUGAL), 24 - 28 JUILLET 2000

Point 7 de l'ordre du jour

EXAMEN DE LA SITUATION DE L'ALIMENTATION ET DE L'AGRICULTURE DANS LA RÉGION

 

Table des matières



 

I. RÉSUMÉ

1. Depuis le lancement des réformes au début des années 90, le nombre de personnes vivant au-dessous du seuil de pauvreté a augmenté dans tous les pays en transition. Vers le milieu des années 90, 28,1 millions de personnes vivaient au-dessous du seuil de pauvreté dans dix pays d'Europe centrale et orientale, plus la Moldova. En 1999 et au début de 2000, l'insécurité alimentaire, due principalement à la pauvreté et aux conflits locaux, touchait la plupart des pays ayant le PIB le plus bas par habitant ou ceux victimes de guerres locales (pays du Caucase et pays de l'ex-Yougoslavie). Ces conflits ont entraîné des déplacements massifs de populations et interrompu les activités agricoles normales. Dans ces divers cas, l'aide alimentaire a joué un rôle déterminant en évitant une réduction excessive de la ration alimentaire et en limitant les conséquences de la malnutrition.

2. Les récoltes ayant été médiocres en 1999, la production céréalière a régressé de 6 pour cent en Europe. À cause du mauvais temps qui a sévi dans les pays d'Europe centrale et orientale (PECO), la production de blé en particulier a chuté de près de 50 pour cent en Hongrie et en Croatie, et de 35 pour cent en République fédérative de Yougoslavie et en Slovaquie.

3. Malgré le recul de la production agricole intérieure en 1998-1999, en particulier dans les PECO, une forte pression à la baisse s'est exercée sur les prix agricoles en raison surtout du fléchissement des cours mondiaux de nombreux produits, conjugué aux effets de la crise financière russe sur le marché régional. En conséquence, les mesures nationales de soutien et les protections douanières ont été renforcées.

4. En octobre 1999, la Commission de l'Union européenne a proposé d'engager des négociations simultanées avec les dix pays d'Europe centrale et orientale et avec Malte et Chypre en vue de leur adhésion. La reconnaissance officielle de la candidature de la Turquie a été prise en considération dans cette proposition, que le Conseil d'Helsinki a approuvée.

II. NOTES LIMINAIRES

5. Le présent document contient une vue d'ensemble de la situation de l'alimentation et de l'agriculture en Europe en 1999 et au début de 2000. Étant donné que le sujet et la région sont vastes, il n'a pas pour objet d'être exhaustif. À plusieurs reprises, pour que le document soit plus concis, les faits nouveaux ont été illustrés par des exemples se rapportant uniquement à certains pays représentatifs, les cas concernant les pays restants n'étant pas exposés.

6. Le document couvre les pays européens membres de la FAO. Dans ce contexte, les quatre pays en transition se réfèrent uniquement à l'Arménie, l'Azerbaïdjan, la Géorgie et la République de Moldova. Les PECO comprennent l'Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Bulgarie, la Croatie, l'Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la République tchèque, la République fédérative de Yougoslavie, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie et l'ex-République yougoslave de Macédoine. Les PECO et les quatre pays en transition sont souvent désignés comme "pays en transition", afin de mettre en évidence leur passage d'une économie planifiée à une économie de marché, passage qui a eu de lourdes conséquences sur les résultats de l'agriculture et sur la sécurité alimentaire. Parmi les PECO et les quatre pays en transition, six pays sont à faible revenu et à déficit vivrier : l'Albanie, l'Arménie, l'Azerbaïdjan, la Bosnie-Herzégovine, la Géorgie et l'ex-République yougoslave de Macédoine. Leur production intérieure et l'évolution de leur commerce sont souvent examinés séparément mais, lorsque des chiffres récapitulatifs sont indiqués pour les PECO ou les quatre pays en transition, ils englobent les données concernant respectivement ces pays à faible revenu et à déficit vivrier.

III. LE POINT SUR LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE ET LA PAUVRETÉ
DANS LA RÉGION

7. Pendant la phase de transition, la part de la population vivant en Europe centrale et orientale et dans les quatre pays en transition a augmenté. Malgré un début de stabilisation, les inégalités de revenu n'ont diminué dans aucun pays jusqu'en 1999. Elles se sont accentuées surtout dans les quatre pays en transition.

8. Vers le milieu des années 90, 28,1 millions de personnes vivaient au-dessous du seuil de pauvreté dans dix PECO plus la Moldova, soit un accroissement de 3,9 millions depuis la fin des années 80. Elles étaient ainsi réparties : 8,1 millions en Europe centrale, 13,5 millions en Roumanie, 1,3 million en Bulgarie, 2,3 millions dans les pays baltes et 2,9 millions en Moldova (BERD, 1999).

9. Au-dessous du seuil officiel, la gravité de la pauvreté, exprimée en pourcentage, est calculée en divisant le revenu moyen (déclaré) de tous ceux qui sont concernés, par le revenu correspondant à ce seuil. Elle est très importante, dépassant généralement 20% et atteignant 43% en Moldova.

10. Étant donné que la gravité de la pauvreté est très variable dans l'ensemble de la région, il en va de même pour le déficit de pauvreté. En pourcentage du PIB, il est insignifiant dans les pays d'Europe centrale et en Bulgarie. Il est plus élevé dans les pays baltes, entre 2 et 4 pour cent, et est important en Roumanie et en Moldova, atteignant respectivement environ 5 et 7 pour cent du PIB.

11. En Europe, l'insécurité alimentaire régionale est principalement due à la pauvreté et aux conflits locaux. Elle touche la plupart des pays ayant les plus faibles PIB par habitant, ou ceux victimes de conflits locaux, à savoir les pays du Caucase et ceux de l'ex-République de Yougoslavie. Ces conflits ont entraîné des déplacements massifs de populations et compromis la production agricole. Dans ces divers cas, l'aide alimentaire a joué un rôle déterminant en évitant une réduction excessive de la ration alimentaire et en limitant les conséquences de la malnutrition. Les populations déplacées et économiquement vulnérables des Balkans, en particulier dans la province du Kosovo de la République fédérative de Yougoslavie, ont encore besoin d'importants programmes d'aide alimentaire. L'économie de la Bosnie-Herzégovine a également souffert, et le pays héberge un grand nombre de réfugiés (FAO, 2000a).

12. En 1999, les pays des Balkans ont été touchés à divers degrés par le conflit concernant la Province du Kosovo (République fédérative de Yougoslavie). Dès le début, la crise a entraîné un exode massif de réfugiés vers les pays voisins, parmi lesquels l'Albanie, qui a été particulièrement touchée. Début juin, au point culminant de la crise, on signalait qu'environ 440 000 réfugiés kosovars étaient installés dans des camps et dans des familles d'accueil dans le pays. L'une des conséquences les plus notables de la crise a été l'interruption du ravitaillement en vivres des campagnes vers les zones urbaines. Les vivres étant partagés avec les réfugiés (environ 60% des réfugiés vivaient dans des familles albanaises), les excédents commercialisables des ménages ruraux ont été réduits (OCDE, 1999). Par ailleurs, les actions militaires et les déplacements d'animaux ont eu des conséquences néfastes sur l'élevage, en particulier dans la région limitrophe de la Province du Kosovo. De plus, de nombreux habitants de ces régions ont été déplacés à l'intérieur du pays, d'où la désorganisation des activités agricoles de printemps. L'aide alimentaire destinée aux personnes sinistrées, qui est arrivée en temps voulu, a consisté essentiellement en denrées alimentaires importées. En dehors des conséquences de la crise du Kosovo, la pauvreté est la principale cause d'insécurité alimentaire en Albanie.

13. L'ex République yougoslave de Macédoine a subi de fortes pressions en raison de l'afflux important de réfugiés kosovars, estimés à 200 000, au cours du premier semestre de 1999. L'impact de la crise provoquée par les réfugiés sur les approvisionnements alimentaires et le prix des vivres a été limité grâce à l'assistance apportée en temps utile par la communauté internationale. Cependant, mis à part la crise provoquée par les réfugiés, la population de l'ex-République yougoslave de Macédoine a compté de tout temps des groupes vulnérables, notamment les habitants des zones montagneuses isolées et les communautés de tsiganes des zones urbaines. En 1999, 12 pour cent de la population totale, soit environ 63 000 ménages, ont bénéficié d'allocations en espèces calculées sur la base du minimum vital. Malgré la pauvreté, il ne semble pas que la ration alimentaire ait été fortement réduite. Pour la période juillet-décembre 1999, un consortium de donateurs et d'ONG a ajouté aux prestations sociales fournies par le gouvernement une aide alimentaire, comprenant des rations mensuelles de farine de blé, d'huile végétale, de légumineuses, de sucre et de sel.

14. Au lendemain du conflit du Kosovo et après plusieurs années successives de sanctions économiques, la République fédérative de Yougoslavie (Serbie et Monténégro) traverse elle aussi une crise économique aiguë. Début 2000, quelque 1,2 million de personnes vulnérables, dont des réfugiés et des personnes économiquement et socialement défavorisées vivant en Serbie (à l'exclusion de la Province du Kosovo), recevaient des secours alimentaires humanitaires. Dans la Province du Kosovo, en 1998 et 1999, la production vivrière intérieure a subi le contrecoup de l'insécurité. La FAO a estimé la récolte de blé de 1999 à 100 000 tonnes, alors que le niveau normal d'avant-guerre était d'environ 300 000 tonnes. Depuis la fin du conflit, les importants déficits vivriers ont été comblés grâce à l'aide alimentaire et aux importations commerciales. Ces dernières ont vite repris après la fin du conflit, mais le pouvoir d'achat limité des populations urbaines et rurales, conjugué au besoin urgent de produits de première nécessité non alimentaires, demeure un problème. Pendant tout le début de 2000, dans cette Province, environ un million de personnes ont reçu une aide alimentaire.

15. À la fin de 1999, la situation des revenus s'est dégradée en Bulgarie, les groupes les plus vulnérables à cet égard étant les personnes ayant le plus faible niveau d'éducation, les retraités et la communauté tsigane. Pour tous les types de ménages, la part des dépenses alimentaires dans le budget familial a été élevée et stable. Plus d'un tiers des ménages inclus dans une enquête par sondage ont indiqué qu'ils avaient produit plus de la moitié de leurs vivres chez eux (PNUD, 1999). La production familiale est une source importante d'approvisionnement alimentaire pour les ménages vulnérables. On n'observe aucun signe de malnutrition dans le pays, mais la pauvreté est un sujet majeur de préoccupation.

16. En Roumanie, la pauvreté est plus répandue et plus grave dans les campagnes. Selon la Banque mondiale, 3,8 millions de pauvres vivent dans les zones rurales du pays. Le déficit de consommation, qui mesure la consommation des pauvres vivant au-dessous du seuil de pauvreté, atteint 27 pour cent dans les zones rurales contre 24 pour cent dans les zones urbaines (Banque mondiale/ Commission nationale des statistiques). La plupart des habitants des campagnes sont tributaires de la terre pour leur subsistance. Les ménages ruraux pauvres appliquent des stratégies de production à faible risque et faible rendement. Les périodes de croissance du PIB en Roumanie ont permis de constater que même une croissance de courte durée pouvait sortir des millions de personnes de la pauvreté. En conséquence, la stratégie appliquée consiste à favoriser la reprise de la croissance et à prendre des mesures de développement rural. Cependant, quelques groupes vulnérables, comme les enfants dans les établissements d'accueil, ont besoin de mesures plus ciblées.

17. Dans les autres pays, s'il est vrai que les groupes vulnérables souffrent d'insécurité alimentaire, il n'y a généralement pas de pénuries de vivres ni dans les campagnes, ni dans les zones urbaines. En Azerbaïdjan, la production vivrière s'est accrue en 1999, mais elle est restée néanmoins faible malgré les bonnes conditions de végétation, la stabilité financière et les réformes de fond axées sur le marché, qui ont démarré en 1997. Le pays est doté d'un bon potentiel agricole mais, à court terme, la production est entravée par la perte de fertilité du sol, le manque crucial de crédit rural, l'insuffisance de l'infrastructure et le mauvais état des réseaux d'irrigation et de drainage. Par suite de la libéralisation du commerce, tout déficit des disponibilités intérieures est comblé par des importations. C'est la faiblesse du pouvoir d'achat de la majeure partie de la population (8 millions d'habitants) qui est préoccupante. Les dépenses alimentaires comptent pour 70 pour cent des dépenses totales des ménages les plus vulnérables. Ces dernières années, le nombre de personnes vulnérables a diminué, mais, on compte encore 860 000 réfugiés et personnes déplacées à l'intérieur du pays, en raison surtout du problème du Nagorno Karabakh qui n'est pas résolu. Au total, près de 500 000 personnes, appartenant pour moitié à la population déplacée, ont encore besoin d'une aide humanitaire. Le PAM, qui fournit une aide à l'Azerbaïdjan depuis 1993, continue à apporter son appui à 485 000 bénéficiaires au titre de l'intervention prolongée de secours et de redressement (IPSR), d'une durée de trois ans, qui a commencé en juillet 1999.

18. En Géorgie, la production agricole s'est nettement redressée en 1999, du fait surtout de l'amélioration très sensible des conditions de végétation, de la disponibilité accrue d'intrants et d'une meilleure gestion agricole. Cependant, les rendements agricoles moyens restent très inférieurs aux possibilités. L'accès aux marchés et aux ressources étant limité, le secteur agricole est encore en difficulté et manque de dynamisme, avec des systèmes d'exploitation à faible apport d'intrants - faible production. La principale cause d'insécurité alimentaire est la pauvreté. Les vivres continuent à représenter une grande part - jusqu'à 60-70 pour cent - des dépenses familiales, et un fort pourcentage de la population (entre 16 et 50%, selon le seuil de pauvreté retenu) reste pauvre. Officiellement, il n'y a pas de malnutrition aiguë, mais on observe parmi les enfants une tendance à la hausse, lente mais indéniable, de la malnutrition, malgré la distribution ciblée d'une aide alimentaire complémentaire. Au total, plusieurs centaines de milliers de personnes ont encore besoin d'une aide humanitaire, y compris les 182 000 bénéficiaires du PAM au titre de l'IPSR en cours.

19. En Arménie, la production céréalière a reculé en 1999 par suite de la concurrence exercée par les importations et de la réduction des emblavures. La consommation de pommes de terre, de fruits et de légumes est pratiquement couverte par la production intérieure, et la production animale se redresse. Cependant, la superficie de terre arable par habitant étant relativement limitée et la production céréalière ne bénéficiant d'aucun avantage comparatif, le pays doit importer des céréales. Bien qu'il n'y ait pas de malnutrition aiguë, il existe un risque d'insécurité alimentaire du fait de la pauvreté. En janvier 1999, un quart des familles arméniennes étaient inscrites auprès du Ministère des affaires sociales en tant que personnes vulnérables et bénéficiaient de prestations familiales (PNUD, 1999). Depuis, 25 à 30 pour cent des familles ont été rayées de ce registre. Malgré la progression du PIB par habitant enregistrée ces dernières années, le pouvoir d'achat des ménages reste faible et parfois insuffisant pour couvrir les dépenses relatives à l'assortiment des produits de consommation essentiels. Le niveau de vie a un peu baissé en 1999, ce qui s'explique par la diminution des envois de fonds des travailleurs employés en Fédération de Russie. En conséquence, les dépenses des ménages consacrées à la nourriture ont atteint en moyenne 67 pour cent en 1999 contre 57 pour cent en 1998. Au total, le PAM fournira une aide alimentaire à quelque 170 000 personnes vulnérables, dont 110 000 réfugiés et personnes vulnérables qui recevront des secours alimentaires et 60 000 autres qui participeront à des activités vivres-contre-travail communautaires, à l'appui du développement économique et social. Le programme, dont la durée prévue est de trois ans, sera revu chaque année.

IV. CADRE DIRECTEUR POUR L'AGRICULTURE - 1998-1999

20. Les agriculteurs européens ont eu une année difficile en 1999 en raison surtout de la faiblesse des cours mondiaux. A titre d'exemple, les revenus agricoles sont tombés à un niveau exceptionnellement bas au Royaume-Uni et, en République slovaque, on a estimé que les pertes du secteur agricole avaient été multipliées par quatre depuis 1998. Les agriculteurs de la République fédérative de Yougoslavie, dans l'impossibilité de se procurer des intrants par les circuits de commercialisation officiels, ont vu leurs revenus s'effondrer. Ces intrants ne pouvaient être obtenus qu'au marché noir, à un prix beaucoup plus élevé.

A. Politiques agricoles

21. Malgré le recul de la production agricole intérieure en 1998-1999, en particulier dans les PECO, les prix agricoles ont subi une forte pression à la baisse, due essentiellement au fléchissement des cours mondiaux de nombreux produits, conjugué aux effets de la crise financière russe sur le marché régional. En conséquence, les mesures nationales de soutien et les protections douanières ont été renforcées dans un certain nombre de pays de la région, ce dont rend compte l'accroissement des estimations du soutien à la production (ESP).

22. Ces estimations permettent d'évaluer le soutien des prix du marché et les divers paiements directs assurés aux agriculteurs au titre des politiques agricoles. Les rentrées agricoles (recettes) sont augmentées ou les dépenses réduites en fonction du montant du soutien accordé. Les estimations du soutien à la production peuvent être exprimées sous une forme monétaire, par pays ou par produit, ou en tant que proportion des recettes agricoles brutes, y compris le soutien budgétaire, exprimée en pourcentage. L'évolution de ces estimations en pourcentage pour l'ensemble du secteur agricole de certains PECO et de l'UE est présentée à la figure 1.

FIGURE 1 - Estimation du soutien à la production

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Source: OECD

23. En 1998, les estimations du soutien à la production ont augmenté dans tous les PECO, ainsi que dans l'UE. Cet accroissement important a également servi à parer à la chute des cours mondiaux, qui n'a pas été entièrement répercutée sur les marchés intérieurs. Dans une certaine mesure, le soutien accordé aux agriculteurs dans les différents PECO a convergé. Celui dont bénéficient les agriculteurs de l'UE au titre de la Politique agricole commune (PAC) reste nettement plus élevé que dans les PECO.

24. Le renforcement du soutien intérieur et des protections douanières enregistré en 1998 et 1999 dans les PECO a fait obstacle à la libéralisation des échanges agricoles dans le cadre des accords commerciaux régionaux, l'Accord de libre-échange d'Europre centrale (ALECE), et à leur développement dans le cadre de l'Accord de libre-échange des pays baltes (BAFTA). Les graves tensions entre divers membres de l'ALECE ont suscité des inquiétudes quant à l'avenir de la libéralisation du commerce agricole régional. Non seulement la poursuite de la libéralisation a été bloquée, mais certains avantages concédés bilatéralement dans le cadre de l'ALECE ont été abandonnés.

B. Élargissement de l'UE et agriculture: nouvelle stratégie en 1999

25. L'année dernière, un nouvel élan a été imprimé à l'élargissement de l'Union européenne. On a pris davantage conscience au sein de l'UE de l'aspect stratégique de cet élargissement en vue d'assurer la paix, la sécurité, la croissance et la prospérité dans l'ensemble de l'Europe (Commission européenne, 1999). En octobre 1999, la Commission de l'UE a proposé d'ouvrir des négociations parallèles avec les dix pays d'Europe centrale et orientale, avec Malte et avec Chypre en vue de leur adhésion, et non pas uniquement, comme il avait été décidé en 1997, avec les six favoris, Chypre, Estonie, Hongrie, Pologne, République tchèque et Slovénie. La proposition prenait en considération la reconnaissance officielle de la candidature de la Turquie. En décembre 1999, le Conseil d'Helsinki a approuvé la proposition de la Commission et, au début de 2000, les délibérations en vue de leur adhésion ont été officiellement engagées avec les pays du second groupe: Bulgarie, Lettonie, Lituanie, Malte, République slovaque et Roumanie.

26. Les négociations agricoles n'ont pas encore commencé officiellement. Les pays du premier groupe ont présenté leurs rapports et on attend la réponse de l'UE pour engager les négociations au cours du deuxième semestre de 2000. Trois domaines de litiges entre l'UE et les pays candidats ont été mis en évidence.

27. Premièrement, il est impossible que les PECO parviennent à s'aligner pleinement sur les normes de l'UE en matière d'hygiène et de santé d'ici leur adhésion. A titre d'exemple, la Pologne a demandé à bénéficier d'une période de transition pouvant aller jusqu'à quatre ans pendant laquelle elle pourra moderniser ses abattoirs, ses laiteries et ses installations de transformation. D'autres pays candidats ont formulé des requêtes analogues.

28. Deuxièmement, le niveau des quotas de production risque d'être une question épineuse. Dans les rapports présentés, la Hongrie et la République tchèque demandent des quotas de lait supérieurs à la production actuelle. La Slovénie a souhaité que tous ses quotas soient supérieurs aux niveaux actuels de production. Cependant, comme dans le cas du lait, si l'UE maintient ses mesures de soutien des prix, les nouveaux membres doivent accepter des quotas proches de leur niveau actuel de production afin d'éviter de produire des excédents non exportables et de dépasser les objectifs fixés dans le cadre de l'OMC pour l'Union européenne élargie.

29. Troisièmement, la question la plus délicate concerne la demande de paiements directs. L'UE souhaiterait éviter d'étendre les paiements directs, définis dans le cadre d'Agenda 2000, aux nouveaux membres afin de faire l'économie de la charge financière qu'ils représenteraient. Au début de 2000, certaines indications laissaient à penser que l'UE pourrait adopter une position plus souple à l'égard des paiements directs, accordant aux agriculteurs des nouveaux États membres une aide au moment de leur adhésion, tout en harmonisant pleinement le système des paiements à long terme.

C. Harmonisation des politiques agricoles

30. En partie pour minimiser les problèmes éventuels posés par l'adhésion, mais surtout pour des raisons de politique intérieure, les PECO ont progressivement harmonisé leurs politiques agricoles en allant dans le sens de la PAC. Ce résultat a été obtenu grâce à l'augmentation progressive susmentionnée du niveau de soutien accordé aux agriculteurs et, sur le plan général, grâce à la convergence des mécanismes de soutien aux agriculteurs entre les divers PECO, et entre ces derniers et l'UE.

31. La structure du soutien apporté par l'Union européenne a été sensiblement remaniée, avec un accroissement du recours aux paiements directs et une baisse correspondante des marchés subventionnés. Les PECO ont moins largement fait appel aux mécanismes de soutien des prix du marché, à l'exception de la Pologne. Certains pays ont davantage recours aux paiements directs, en particulier la Lituanie. En dehors de ces éléments de convergence avec l'UE, les PECO ont appliqué beaucoup plus fréquemment d'"autres" mesures de soutien, dont les subventions à l'achat d'intrants, en particulier les crédits subventionnés.

32. Par ailleurs, il existe des écarts importants entre les PECO et l'UE dans les niveaux de soutien accordés à des produits spécifiques. Dans l'Union européenne, les produits animaux provenant de ruminants (viande de bœuf, veau et lait) bénéficient d'aides plus élevées que les céréales (blé et maïs), et les produits de l'élevage intensif sont les moins soutenus. Les PECO ont tous des modalités d'aide différentes pour les divers produits. Le seul produit pour lequel le niveau de soutien et le classement sont analogues à ceux appliqués dans l'UE est le lait, fortement soutenu dans six PECO. Dans la plupart de ces pays, les volailles et le porc bénéficient d'un soutien plus important que dans l'UE. La future harmonisation des politiques agricoles des PECO avec celle de l'UE pourrait entraîner de nouvelles modifications importantes dans les pays candidats au cours des deux ou trois prochaines années.

V. ÉVOLUTION DE LA PRODUCTION AGRICOLE - 1995-1999

(Les résultats concernant la production agricole, y compris les données de 1999 et l'évolution de la production au cours de la période 1995-1999 pour les céréales (le riz est inclus dans la définition des céréales de la FAO), les graines oléagineuses, le cheptel et la production animale sont exposés dans la présente section.)

A. Céréales

33. De 1995 à 1999, la production agricole a augmenté en Europe, au taux annuel moyen de un pour cent (1,8 pour cent dans le sous-secteur céréalier). Au titre de la PAC, des mesures d'incitation ont été prises en faveur de la production agricole de l'UE, et des taux de croissance de 1,5 pour cent ont été annoncés pour toutes les cultures primaires (2,7 pour cent pour les céréales). Cependant, en 1999, d'après la dernière estimation de la FAO, la production céréalière globale de la région (UE, plus 10 PECO, plus 4 pays en transition) s'établit à 276 millions de tonnes, soit quelque 5 pour cent de moins que l'an dernier. Ce recul a été attribué à la réduction des emblavures et au mauvais temps. La production globale de blé de la région a chuté de 8 pour cent, passant à environ 126 millions de tonnes, tandis que celle de céréales secondaires a diminué d'environ 3 pour cent, tombant à 150 millions de tonnes. Dans les pays de l'UE, la production agricole a chuté de 1,3 pour cent, mais celle de céréales a baissé de près de 5 pour cent, avec notamment un recul de 6 pour cent pour le blé qui tombe à 97,6 millions de tonnes. Les emblavures sous céréales récoltées en 1999 ont été réduites en raison de l'augmentation des superficies mises hors production et de la baisse des rendements due au mauvais temps. Tandis que la plupart des PECO se sont redressés après l'effondrement de la production consécutif aux réformes, plusieurs pays ont engrangé des récoltes céréalières réduites en raison surtout du mauvais temps. La production de blé a diminué de près de moitié en Hongrie à cause des inondations, les plus graves de ces 50 dernières années. La production a également chuté de quelque 50 pour cent en Croatie, et elle est tombée à environ 65 pour cent du niveau de 1998 en République fédérative de Yougoslavie et en Slovaquie.

34. D'après les premières indications pour 2000, dans l'ensemble, la production de blé augmenterait dans l'UE et dans les PECO, grâce à des conditions météorologiques propices au développement des cultures. On estime que la superficie totale ensemencée en blé d'hiver dans l'UE a progressé de 5 pour cent, aux dépens principalement des graines oléagineuses. On estime également que les emblavures de blé d'hiver ont augmenté dans plusieurs PECO. Cependant, dans deux des principaux PECO producteurs - la Pologne et la Roumanie - la superficie aurait diminué. Dans les pays à faible revenu et à déficit vivrier, l'accès limité au crédit a empêché les petits exploitants d'acheter divers intrants et d'améliorer leur productivité. Malgré quelques signes d'amélioration en 1999, les rendements obtenus dans les PECO sont restés inférieurs à ceux de l'UE (figure 2).

FIGURE 2 - Rendements du blé

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Source: base de données de la FAO.

35. Dans les pays à faible revenu et à déficit vivrier, les taux de croissance ont été négatifs. La production céréalière totale de 1999 n'a pas dépassé 38 pour cent du niveau de 1995. La production a fléchi en Bosnie-Herzégovine en raison des prix de soutien peu rémunérateurs et du mauvais temps, et la récolte de blé a été particulièrement médiocre en Albanie, ce qui a aggravé la dépendance de ces deux pays à l'égard des importations céréalières. La production agricole a également reculé dans les 4 pays en transition. Le taux moyen de régression le plus élevé a été enregistré en Moldova. La production de blé a été réduite de près de moitié entre 1995 et 1999, passant de 1,3 million de tonnes à 800 000 tonnes. Outre ces pays, la Bulgarie, l'Estonie et la Roumanie ont également enregistré des taux de croissance moyens négatifs. À cause des problèmes économiques persistants et du mauvais temps, le Bélarus et l'Ukraine ont engrangé des récoltes de céréales très médiocres, au-dessous de la moyenne des cinq dernières années, de près de 40 pour cent pour le premier et de 17 pour cent pour le deuxième.

36. D'après les prévisions, les exportations céréalières totales (principalement blé et orge) de l'UE devaient augmenter d'environ 7 pour cent par rapport à la précédente campagne de commercialisation, pour atteindre quelque 26 millions de tonnes, par suite de la progression importante de la demande mondiale de céréales importées pendant la campagne 1999/2000 (juillet/juin) et de la diminution des disponibilités exportables de plusieurs petits pays exportateurs (dont la Hongrie et la Roumanie). Le marché d'exportation pour les céréales de l'UE a été en outre soutenu par la plus grande compétitivité de l'euro, du fait de sa faiblesse persistante par rapport au dollar E-U. Outre le recul de la production et l'accroissement des exportations, l'utilisation intérieure de produits d'alimentation animale a continué à progresser dans les pays de l'UE, bien qu'à un rythme plus lent qu'au cours des trois années précédentes. Il en est résulté une forte baisse des stocks céréaliers de l'Union européenne, qui sont passés de 41 millions de tonnes au début de la campagne de commercialisation 1999/2000 à environ 35 millions de tonnes en fin de campagne. Une réduction des stocks d'intervention était également prévue, ce qui est essentiellement la conséquence des importantes ventes d'orge à l'exportation provenant de ces réserves. Dans l'ensemble, en 1999/2000, on s'attendait à ce que les exportations céréalières totales des 10 PECO reculent de près de 2 millions de tonnes, tandis que les importations augmenteraient de près de un million de tonnes. Cependant, tout compte fait, la région resterait encore exportatrice nette de céréales en 1999/2000. La balance commerciale agricole a reflété ces mauvais résultats. Malgré la réduction des exportations et l'accroissement des importations, on prévoyait que les stocks céréaliers totaux des 10 PECO marqueraient un recul, le fléchissement le plus important concernant ceux de maïs. Même si un certain tassement de l'utilisation des produits d'alimentation animale était considéré comme inévitable, on prévoyait que, dans une large mesure, la consommation céréalière globale par habitant ne s'en ressentirait pas.

37. Bien que le déficit ait légèrement diminué en 1998 (figure 3), la balance commerciale céréalière (exportations moins importations, en valeur) est restée négative dans les 4 pays en transition et dans les pays à faible revenu. Les PECO, dont la balance commerciale avait été négative pendant deux ans, ont enregistré en 1998 un petit excédent commercial de céréales ; cependant, il était beaucoup moins important que le bon résultat de 1995.

FIGURE 3 - Balance commerciale céréalière

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Source: base de données de la FAO.

B. Graines oléagineuses

38. En 1999, la production de graines oléagineuses a sensiblement progressé en Europe, ce qui correspond à l'évolution de la production mondiale. Dans cette section, deux des principales graines oléagineuses de la région sont examinées : la graine de colza et la graine de tournesol.

39. Dans l'Union européenne, les superficies ont atteint un niveau record au début des années 90 pour la culture du tournesol et en 1990 pour celle du soja. Ensuite, les superficies consacrées à ces deux cultures ont diminué tandis que celles consacrées au colza ne cessaient de progresser. En conséquence, pendant la période 1995-1999, la production de graines de colza a augmenté de 9,6 pour cent par an, tandis que celle de graines de tournesol fléchissait de 2,4 pour cent.

40. Au cours de la campagne de commercialisation 1999/2000 (octobre/septembre), la production de graines de colza s'est accrue en Europe de 23 pour cent, chiffre record, tandis que la progression était beaucoup plus faible pour les graines de tournesol : 1,8 pour cent. L'augmentation enregistrée par le colza est essentiellement la conséquence de la progression de la production de l'UE, qui est passée de 9,5 à 11,2 millions de tonnes. Cette hausse s'explique par l'expansion des superficies, elle-même imputable à l'accroissement du taux de mise hors culture obligatoire de l'UE (qui a encouragé la production de graines de colza à usage industriel) et aux paiements compensatoires intéressants effectués au titre de la PAC. Après l'augmentation de la production intérieure, on attendait une légère baisse des importations nettes de graines oléagineuses par l'UE en 1999/2000, ainsi qu'un accroissement de la consommation globale de matières grasses. Pour ce qui est des tourteaux et des farines, on prévoyait que la consommation - essentiellement tributaire des importations de farine de soja - marquerait le pas du fait du ralentissement escompté de la production animale et de la concurrence persistante exercée par les céréales fourragères bénéficiant de prix compétitifs. On a signalé pour la campagne en cours (2000/2001) une nette réduction des superficies, indiquant que les agriculteurs ont tenu compte de la chute des cours de l'année dernière et de la perspective d'une offre excédentaire pesant sur le marché, ainsi que de la réduction des paiements compensatoires pour les graines oléagineuses, décidée au titre de la réforme de la PAC de l'an dernier (Accord de Berlin).

41. Les graines oléagineuses jouent également un rôle important dans les PECO, où la production, de colza principalement, s'est développée au cours de la période 1995-1999. Cependant, les rendements de colza dans les PECO restent nettement inférieurs à ceux obtenus dans l'UE (figure 4). En 1999, la part des graines oléagineuses dans les superficies totales consacrées aux céréales et aux graines oléagineuses s'est élevée à 12,7 pour cent. La superficie sous graines oléagineuses a atteint un niveau record en 1999, en raison de leur prix, plus intéressant que celui des céréales, et du mauvais temps qui a perturbé les semis des céréales. En conséquence, les PECO ont enregistré une forte augmentation de leur production de graines oléagineuses en 1999 (de près de 14 pour cent pour le tournesol et de 50 pour cent, chiffre record, pour le colza). L'évolution du secteur des graines oléagineuses en 1999 dans les PECO indique que les agriculteurs ont commencé à réagir rapidement aux variations des prix relatifs du marché. Du fait de cet essor de la production, on a estimé que les exportations de graines oléagineuses de la région s'accroîtraient de presque 50 pour cent en 1999/2000, tandis que le pressurage des graines dans les pays et la consommation d'huiles et de farines d'oléagineux continueraient à progresser. On prévoyait pour la campagne en cours un recul de la production de graines de colza des PECO, en raison surtout de la réduction des semis en Pologne, les agriculteurs ayant réagi devant la faiblesse des cours, tombés quasiment à leur niveau le plus bas.

42. Parmi les 4 pays en transition, la Moldova est le seul producteur important de graines oléagineuses, principalement de tournesol, dont la production a augmenté en 1999 de près de 45 pour cent.

FIGURE 4 - Rendements du colza

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Source: base de données de la FAO.

C. Cheptel et production animale

43. En 1999, la production de viande et de lait a légèrement diminué en Europe, de 0,6 pour cent et de 0,5 pour cent respectivement. Celle de volaille et de porc a augmenté dans des proportions minimes, ce qui n'a pas suffi à compenser le fléchissement persistant de la production de viande de bœuf, mise en difficulté par l'abattage de troupeaux qui se poursuit dans l'UE pour cause d'ESB. La production totale de viande a progressé dans la plupart des pays à faible revenu et à déficit vivrier, des PECO et des pays en transition. La Moldova et la Lettonie, où la production de viande a chuté de 5,5 pour cent et de près de 11 pour cent respectivement, sont des exceptions notables. Dans une moindre mesure, la production totale de viande a marqué un recul dans les Républiques tchèque et slovaque et en Croatie.

44. S'agissant de la production totale de viande (exception faite des animaux vivants), la balance commerciale est restée négative dans les pays à faible revenu, tandis qu'elle s'est légèrement dégradée dans les pays en transition (figure 5). La réduction des débouchés en Russie a porté atteinte à la balance commerciale positive enregistrée par les PECO en 1998. Les échanges de viande et d'animaux vivants des PECO vers l'UE sont particulièrement importants, puisqu'ils représentaient 25 pour cent du commerce total en 1997. L'un des problèmes concernant le commerce d'animaux vivants et de viande des PECO est le respect des normes strictes de l'UE. Comme de nombreuses sociétés privées récemment créées dans les économies en transition ne peuvent pas respecter ces normes, les pays présentant des rapports pour les négociations agricoles en vue de leur adhésion ont demandé à bénéficier de périodes d'ajustement plus longues. Entre-temps, cette incapacité de satisfaire aux normes met en danger les exportations des PECO et des pays en transition vers l'UE.

FIGURE 5 - Balance commerciale: production totale de viande

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Source: base de données de la FAO.

Bovins et viande de boeuf

45. L'industrie européenne de la viande de boeuf connaît des difficultés depuis le milieu des années 90, la production reculant au taux annuel de 1,1 pour cent. On estime que, depuis leur application, les mesures préventives liées à l'ESB, telles que le Over-Thirty-Month Scheme (Royaume-Uni) et le Calf Processing Aid Scheme (CPAS), ont fait disparaître du marché 5,4 millions de têtes de bétail au total. Le Early Marketing Premium (EMP), mesure visant à réduire la production de viande de boeuf de l'UE en encourageant l'abattage à des poids inférieurs, a été appliqué à 3,6 millions de veaux dans l'Union européenne. Le CPAS et le EMP ont été progressivement supprimés en novembre 1998, le CPAS ayant toutefois été prolongé au Royaume-Uni, où il s'est terminé en juillet 1999.

46. La réduction des troupeaux de l'UE due à l'ESB et les ajustements structurels du secteur mis en œuvre dans les PECO, où la production est principalement liée aux troupeaux laitiers, ont entraîné une diminution du cheptel bovin et un léger recul de la production en 1999. Le ralentissement cyclique de l'activité de l'UE, principal producteur, s'est produit au deuxième semestre de 1999, et sa production devrait augmenter en 2000.

47. Dans l'Union européenne, la consommation de viande de boeuf a continué à se redresser lentement après la panique créée par l'ESB en 1996. En 1999, on estimait la consommation par habitant à 20,03 kg, chiffre à peine inférieur à celui de 1994, avant l'ESB. Malgré cette reprise, les tendances à long terme semblent indiquer un nouveau recul progressif de la consommation, déjà prévu avant la crise de 1996.

48. Dans presque tous les PECO, en 1999, la taille des troupeaux avait diminué par rapport à 1995. Elle a reculé de 2,6 pour cent au cours de cette période, à un rythme progressivement plus lent à mesure que les fermes d'État étaient privatisées. Cependant, dans les PECO, les secteurs de la viande de boeuf ne sont pas homogènes. Dans certains d'entre eux, les troupeaux de bovins ont commencé à se stabiliser ou à augmenter, comme en Bulgarie, en Hongrie et en Slovaquie. Dans d'autres, comme l'Estonie, la Croatie, la Lituanie et la Pologne, la baisse s'est poursuivie en 1999. Parmi les pays à faible revenu et à déficit vivrier, les troupeaux n'ont diminué que dans l'ex-République yougoslave de Macédoine. Dans les quatre pays en transition, le recul s'est poursuivi en Moldova. En Azerbaïdjan, du fait de la privatisation antérieure du secteur et de la disponibilité de pâturages, le nombre de bovins avait retrouvé en 1999 le niveau de 1995, tout comme en Géorgie et en Arménie.

Secteur de la viande de porc

49. Pendant la période 1995-1999, la production de viande de porc, soutenue par une plus grande fermeté des prix due à la crise de l'ESB, a augmenté en Europe de près de 2 pour cent par an. L'Allemagne, le Danemark, l'Espagne, la France et les Pays-Bas restent les principaux producteurs de l'UE, une part importante de la production danoise et néerlandaise étant destinée aux marchés de pays tiers.

50. À la fin de 1998 et en 1999, les cours exceptionnellement bas ont eu un effet préjudiciable sur le marché du porc châtré. Grâce au faible prix des aliments du bétail ainsi qu'à la concentration accrue et à l'intégration verticale, de nombreux producteurs européens ont pu toutefois maintenir leur niveau de production. En fait, en 1999, la production de viande de porc est restée élevée dans l'Union européenne, atteignant au total 17,6 millions de tonnes, soit 2 pour cent de plus qu'en 1998. Malgré l'abondance de l'offre mondiale de porc et l'instabilité économique persistante en Russie, les exportations de l'UE ont augmenté de 30 pour cent en raison de l'octroi par l'UE de primes à l'exportation, de l'aide au stockage privé, et de l'aide alimentaire en faveur de la Russie. Le rythme actuel d'attribution des primes à l'exportation est largement supérieur à celui de l'an dernier, l'UE ayant déjà atteint 70 pour cent de son niveau d'engagement pour cette année au cours des huit premiers mois de l'année (juillet 1999/juin 2000 selon le calendrier de l'OMS).

51. La viande de porc est la viande qui est produite et consommée en plus grande quantité dans les PECO. Malgré les bouleversements économiques sur le plus grand marché de la région (Russie) et la stagnation du principal producteur de la région (Pologne), la production totale de viande de porc dans les PECO a progressé de un pour cent en 1999. Des accroissements ont été enregistrés en Hongrie et en Roumanie qui, avec la Pologne, ont assuré près de 64 pour cent de la production des PECO en 1999. La production de viande de porc a reculé dans les pays à faible revenu et à déficit vivrier, en raison surtout du fléchissement enregistré en Albanie. La faiblesse des prix dans la région est due à l'effondrement des importations russes et à l'éviction des PECO du marché russe, imputable à la viande de porc subventionnée de l'UE. Cette situation est à l'origine d'un renforcement des interventions sur les marchés intérieurs et des protections douanières, et de différends commerciaux. Pour se protéger des importations subventionnées bon marché, nombre de pays ont augmenté les taxes à l'importation sur la viande de porc.

Secteur de la viande de volaille

52. Le secteur de la viande de volaille est celui qui s'est développé le plus rapidement dans la région, les PECO enregistrant des taux de croissance annuels de 3,7 pour cent depuis 1995. Malgré la faiblesse générale des cours de la viande en 1999, la part de la production de volaille dans le marché global de la viande a continué à progresser dans les PECO - de 22 pour cent en 1999 - surtout dans les principaux pays producteurs de la région (Hongrie, Pologne et Roumanie). Dans les pays à faible revenu et à déficit vivrier, la production de viande de volaille a augmenté à un rythme comparable à celui des PECO. Une contraction a cependant été enregistrée en Croatie, Lettonie, Lituanie et Roumanie, et également en Bosnie-Herzégovine où elle a été particulièrement forte (de 14 800 à 8 200 tonnes). Dans les quatre pays en transition, la production de volaille a augmenté en Azerbaïdjan (accroissement le plus fort) et en Géorgie, mais elle a nettement chuté en Arménie et en Moldova.

53. En 1999, la production mondiale de viande de volaille a été soutenue par les faibles cours des céréales, mais cette croissance ne s'est pas vraiment concrétisée en Europe. L'accroissement de la production dans l'UE a été inférieur à 2 pour cent car, dans l'ensemble, les prix de la viande sont restés bas et le problème de la contamination des produits d'alimentation animale par la dioxine, qui a perturbé les exportations en provenance de la Belgique et des pays voisins, a eu un effet préjudiciable sur la demande. Néanmoins, la consommation régionale de volaille a progressé de manière dynamique, passant de 13,2 kg/personne en 1996 à 15,6 kg/personne en 1999.

54. Les PECO sont restés des exportateurs nets (figure 6), avec la Russie comme principal débouché, tandis que les pays à faible revenu et à déficit vivrier sont toujours des importateurs nets, la valeur de leurs importations nettes ayant légèrement diminué après le record de 1996.

FIGURE 6 - Balance commerciale de la viande de volaille

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Source: base de données de la FAO.

Lait

55. Pendant la période 1995-1999, la production de lait de l'Europe a été marquée par une tendance à la baisse, avec un taux moyen de régression de 0,35 pour cent par an (0,38 pour cent pour l'UE). En 1999, la production de l'Europe était estimée à 176,6 millions de tonnes, soit 0,5 pour cent de moins qu'en 1998. Celle de l'UE, établie à 124,3 millions de tonnes pour 1999, était inférieure de près de 2 millions de tonnes à celle de 1995. Le nombre de vaches laitières a diminué, mais la production de lait par vache a augmenté. La majeure partie du lait produit dans l'UE (environ 94 pour cent) a été livré aux laiteries.

56. Ailleurs en Europe, la situation en matière de production laitière est hétérogène. Dans plusieurs PECO, elle s'est redressée, dépassant le niveau de 1995. La Pologne est le seul pays parmi les principaux producteurs qui ait marqué un net recul par rapport à 1998 - 5,5 pour cent - par suite de la réduction des troupeaux de vaches laitières due à la faible rentabilité. D'après les prévisions, en 2000, la production de lait de la Pologne retrouvera son niveau de 1998 grâce à l'augmentation des rendements et à la hausse prévue des prix d'achat du lait, imputable à la pénurie de lait cru de bonne qualité destiné à la transformation, après l'entrée en vigueur d'une norme exigeant une qualité supérieure pour le lait cru. Une forte croissance de la production a été enregistrée en Azerbaïdjan et en Géorgie, 3,3 pour cent et 8 pour cent respectivement. Dans trois des pays à faible revenu et à déficit vivrier, Arménie, Azerbaïdjan et Géorgie, la production de lait s'est redressée, dépassant en 1999 celle de 1995. Dans les trois autres, elle est restée inférieure au niveau de 1995. La chute la plus forte a été enregistrée en Bosnie-Herzégovine. Une autre baisse brutale a concerné la Moldova, où la production est passée de 837 000 tonnes en 1995 à 572 000 en 1999.

57. En 1998, l'excédent commercial de produits laitiers a légèrement diminué en Europe par rapport à 1997, passant de 5 037,3 millions de dollars E.-U. à 4 770,9 dollars E.-U. Le déficit commercial s'est quelque peu résorbé en 1998 dans les quatre pays en transition et les pays à faible revenu (figure 7).

FIGURE 7 - Balance commerciale des produits laitiers et des oeufs

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Source: base de données de la FAO.

VI. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES

58. Les principaux facteurs qui façonneront dans les prochaines années le contexte économique d'Europe telle qu'elle est définie par la FAO sont l'élargissement de l'UE, la reconstruction des Balkans et la situation dans les quatre pays en transition. L'évolution future du secteur agroalimentaire des pays adhérant à l'UE sera déterminée par la nécessité d'harmoniser leurs politiques commerciales et de régulation des marchés ainsi que leurs institutions avec les exigences de l'UE.

59. En 1999, après les perturbations de 1997-1998 dues aux crises asiatique et russe, la situation économique mondiale est apparue plus favorable. La croissance économique de l'Union européenne, qui avait ralenti au cours du deuxième semestre de 1998, s'est stabilisée en 1999. L'euro, entré en vigueur en 1999, a permis d'atteindre le plus haut degré d'intégration économique entre les 11 États d'Europe occidentale. L'inflation a été contenue dans la zone euro (1,1 pour cent). Le chômage est resté élevé dans l'UE: 10,5 pour cent en avril 1999, soit 0,5 point de pourcentage de moins qu'en avril 1998.

60. En 1998-1999, il y avait encore de grandes différences dans le degré d'avancement des réformes et la transformation de l'économie entre les divers PECO et les quatre pays en transition. On est parvenu à réduire l'inflation en 1998-1999. Le taux d'inflation moyen dans les PECO, qui était de 7,7 pour cent en 1998, a été ramené à 7,4 pour cent en 1999. Le seul pays en transition ayant une forte inflation est la Moldova: 30 pour cent en 1999. Les taux de chômage sont restés relativement élevés. Ils ont dépassé 10 pour cent en 1998 dans la plupart des pays en transition et sont particulièrement élevés en Croatie et en Albanie - environ 17 pour cent. Cet important chômage contribue à la pauvreté et suscite des inquiétudes quant à la sécurité alimentaire des ménages concernés.

61. Le commerce total de marchandises a progressé en Europe, de près de 6 pour cent en moyenne pour la période 1994-1998. Le taux de croissance du commerce des produits agricoles a été beaucoup plus limité, environ 1,6 pour cent. En conséquence, la part relative des exportations agricoles dans les exportations totales de marchandises est tombée de 10 pour cent en 1994 à 8 pour cent en 1998. Dans les PECO, la part des exportations agricoles a également diminué, passant de 12 à 9 pour cent.

62. Plusieurs questions de fond qui ont revêtu une importance croissante en 1999 pourraient avoir des conséquences notables à l'avenir sur la situation du marché agricole et le commerce. Il s'agit de la sensibilisation de plus en plus forte du public à l'égard de la qualité et de la sécurité sanitaire des denrées alimentaires et de l'impact des différentes technologies sur l'environnement. De nouvelles réglementations devraient être mises en place dans ces domaines; l'objectif sera de faire en sorte qu'elles ne soient pas utilisées comme obstacles non tarifaires au commerce.

63. L'une des principales contraintes auxquelles se heurte le développement de l'agriculture dans les PECO et les quatre pays en transition est l'accès insuffisant au crédit d'investissement. Dans certains pays ayant un faible PIB par habitant, les besoins d'investissement sont couverts essentiellement par les donateurs multilatéraux et bilatéraux. Cet appui reste indispensable. Dans les PECO et les quatre pays en transition, une grande partie de l'aide publique au développement (APD) a été axée en 1999 sur l'alimentation et l'agriculture, ces secteurs étant essentiels non seulement pour la sécurité alimentaire, mais aussi pour l'emploi et pour le fonctionnement général de l'économie.

64. Une autre source d'investissement dans le secteur agroalimentaire est l'investissement étranger direct. Selon les estimations de la BERD, l'apport net d'investissement étranger direct déclaré dans la balance des paiements s'est élevé en 1998 à 16,4 milliards de dollars E.-U. dans les PECO et à 1,6 milliard de dollars dans les pays en transition, soit une nette progression par rapport à 1997. Les estimations pour 1999 font état d'un léger recul dans les PECO (16 milliards de dollars) et dans les pays en transition (1,2 milliard de dollars) (BERD). Dans certains sous-secteurs, l'investissement étranger direct a compté pour beaucoup dans l'amélioration de la qualité des produits et du flux des approvisionnements. Il joue un rôle extrêmement important en renforçant la compétitivité des secteurs agroalimentaires des pays en transition et en préparant à la concurrence les pays candidats à l'entrée dans l'Union européenne, sur un marché européen unique après leur adhésion et sur les marchés internationaux en général.


RÉFÉRENCES