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La génétique et les forêts de l'avenir

Gene Namkoong

Gene Namkoong est chercheur en génétique avancée à la Station d'expérimentation forestière du Sud-Est, Service forestier du Département de l'agriculture des Etats-Unis, Université d'Etat de Caroline du Nord, à Raleigh. Le présent article est l'adaptation légèrement condensée d'une communication présentée au 9e Congrès forestier mondial, qui s'est tenu à Mexico du 1er au 10 juillet 1985.

La génétique est un des grands défis qui attendent les forestiers de l'avenir, et plus spécialement ceux qui seront responsables des forêts tropicales du tiers monde. C'est en effet dans ces forêts que se trouvent la plupart des espèces animales et végétales du globe, dont un grand nombre sont à l'heure actuelle pratiquement inconnues. A mesure que l'on apprend à mieux connaître ces ressources, et que le domaine tout récent de la biotechnologie ouvre de nouvelles perspectives pour l'aménagement et la mise en valeur des forêts, toute une série de questions nouvelles (scientifiques, économiques, éthiques et écologiques) se posent aux forestiers. La première partie du présent article traite de ces questions d'un point de vue général, tandis que dans la deuxième partie l'auteur examine plus en détail certaines des conséquences qu'elles peuvent avoir pour la gestion des ressources forestières.

Première partie - Objectifs de la gestion

L'un des dangers immédiats de la situation actuelle est que les ressources génétiques de la plupart des espèces cultivées sont menacées d'un grave appauvrissement.

La prospérité et la productivité des forêts dépendent de la structure et de la dynamique de leur fondement génétique. Leurs capacités intrinsèques de croissance et de développement sont largement conditionnées par les facteurs génétiques et peuvent être améliorées par la sélection. L'objet essentiel de cet article, toutefois, n'est pas de traiter des techniques d'amélioration génétique, mais plutôt d'examiner la question plus fondamentale des méthodes permettant d'entretenir ou de créer une variation génétique utile, qui favorise une évolution et une amélioration continues des forêts et leur adaptation constante aux besoins de l'humanité et aux exigences de l'environnement. Noua aborderons certes les méthodes de sélection et de manipulation génétique des arbres forestiers, mais la préoccupation principale sera de déterminer quantitativement et qualitativement quelle est diversité génétique nécessaire pour remédier aux dangers et à la vulnérabilité qui résultent de peuplements uniformes monospécifiques. Nous cherchons les moyens d'assurer la diversité nécessaire tant pour les besoins immédiats que pour ceux des générations futures, de répondre à de nouveaux objectifs économiques, d'adapter les essences forestières à des sols et des climats changeants, et de garantir la survie de celles-ci au sein d'une communauté en perpétuelle évolution d'agents pathogènes, de parasites, de concurrents et de commensaux.

Pour répondre à ces questions, il nous faut porter notre regard, au-delà des arbres que nous utilisons aujourd'hui en génétique forestière, vers les populations qui leur ont jadis donné naissance et vers celles que nous devons construire pour les forêts de l'avenir. Nous devons considérer des populations périphériques qui à présent n'ont qu'un intérêt limité, mais qui peuvent receler une variation utile pour l'avenir dans des conditions différentes de celles d'aujourd'hui. Nous devons aussi considérer des essences qui à l'heure actuelle ont une faible valeur commerciale, mais pourraient présenter un intérêt futur soit en elles-mêmes, soit comme source de gènes utiles pour d'autres essences. La conservation des ressources génétiques est une tâche complexe, posant des problèmes et suggérant des solutions qui varient en fonction des possibilités immédiates d'utilisation commerciale, de la connaissance que l'on a de l'essence en cause et de sa maniabilité génétique et sylvicole.

De toute évidence, les problèmes concernant les ressources génétiques forestières ne sont pas qualitativement différents de ceux qui touchent les ressources génétiques agricoles. Ces problèmes différent dans le détail et dans leur importance relative, mais dans l'ensemble ceux que posent la conservation et la gestion des ressources génétiques sont communs à de nombreuses espèces. L'identification et la conservation de nouvelles espèces concernent tout aussi bien les plantes médicinales et agricoles que les essences forestières. L'étude écogéographique du blé est une chose nouvelle au même titre que l'étude de provenances de pins tropicaux, tandis que l'évaluation comparative de variétés de maïs fait appel à un dispositif analogue à celui d'un essai de Pinus radiata. Il convient donc d'aborder les problèmes des ressources génétiques forestières dans l'optique des ressources phytogénétiques en général, et de bien préciser les buts de leur gestion quand une décision opérationnelle met en jeu plus d'une essence ou plus d'un objectif. Après une discussion de ces objectifs, nous décrirons dans cet article la gestion des ressources génétiques forestières pour trois types d'essences;

i) celles qui ont une importance commerciale actuelle;
ii) celles qui ont un intérêt potentiel évident;
iii) celles dont la valeur est inconnue compte tenu de la technologie actuelle.

Nous étudierons les problèmes que soulève le financement de programmes plus intensifs et plus complets; nous proposerons des critères de décision pour de tels investissements; enfin, nous suggérerons des mécanismes pour appuyer les actions de conservation et d'aménagement des ressources génétiques.

Objectifs de la gestion des ressources génétiques

POLLINISATION DIRIGÉE SUR UN PIN - la génétique forestière devient plus systématique

Les décisions concernant la conservation d'espèces ou d'écosystèmes relèvent de jugements de valeur. Nous devons par conséquent nous demander qui bénéficiera des efforts de conservation et déterminer sur quels critères ceux au nom de qui nous agissons fonderont leurs appréciations. Dans le cas des essences commerciales, les intérêts des sylviculteurs et utilisateurs locaux ne coïncident pas nécessairement avec ceux des grands industriels, même s'ils se trouvent dans un même pays. Par ailleurs, d'autres personnes, en dehors de celles qu'embrasse notre large définition de l'utilisation commerciale (voir ci-dessous), tirent des avantages des essences commerciales ou non et des terres que celles-ci occupent, et sont par conséquent également concernées par ces essences. En outre, il faut tenir compte des générations futures dont le bien-être dépendra de la façon dont nous gérerons les ressources génétiques.

EUCALYPTUS DE QUATRE ANS À ARACRUZ, BRÉSIL - à la récolte, pas moins de 45 m³/ha/an.

Un facteur déterminant qui pèsera sur les décisions quelles qu'elles soient est l'insuffisance d'investissement dans les programmes de conservation et aménagement des ressources génétiques. Selon le Conseil international des ressources phytogénétiques, les dépenses mondiales consacrées à toutes les formes de conservation et de mise en valeur des ressources génétiques pour toutes les espèces animales et végétales s'élèveraient à 50 millions de dollars U.S. par an. Alors que le danger de famine, auquel la génétique pourrait porter remède, s'aggrave chaque année, les investissements mondiaux en sont toujours au même point depuis cinq ans. C'est pourquoi, après avoir décrit les options qui s'offrent en matière de gestion des ressources génétiques, nous devrons considérer la valeur qui leur est attribuée et nous poser les questions suivantes: A qui vont les profits? Qui investit dans des programmes en faveur de ces ressources? Comment un programme de conservation et aménagement peut-il être financé?

Il est certes parfaitement possible de garantir l'évolution continue et la permanence des populations végétales et animales, mais il est tout aussi évident que l'on n'en a guère les moyens financiers, sauf pour les essences forestières commerciales les plus importantes destinées à l'industrie. Même l'exécution de projets tels que l'étude éco-géographique à l'échelle mondiale des ressources génétiques du blé, qui exigerait 10 millions de dollars par an pendant plusieurs années, n'est en aucune façon assurée. Les principales plantes vivrières et textiles commerciales à elles seules demanderaient que l'on investisse beaucoup plus qu'on ne le fait aujourd'hui pour conserver et mettre en valeur convenablement leurs ressources génétiques. Alors qu'un tel financement serait peu de chose en regard du volume du commerce international de produits agricoles et forestiers, il y a, entre les besoins et les investissements, un écart flagrant que l'on n'a en rien atténué ces dernières années.

En misant exclusivement sur les forces du marché pour déterminer les priorités d'investissement, on fait implicitement passer au second plan les préoccupations politiques ou éthiques à l'égard des générations futures.

La sylviculture n'est guère logée à meilleure enseigne que l'agronomie. Pour ce qui est de la première, les investissements dans la mise en valeur des ressources génétiques proviennent essentiellement des pays industrialisés, alors que cette mise en valeur s'impose bien au-delà des limites de ces pays. Le danger de cette situation est que le bien de l'humanité risque de ne pas y trouver son compte si le développement ne sert que les intérêts d'un secteur restreint de la société. S'il n'est pas nécessairement vrai que le développement industriel ne serve pas l'intérêt général, l'inverse ne l'est pas non plus. Il est indispensable de répartir équitablement les frais, de décider qui financera les programmes et de déterminer à qui profitera l'aménagement des ressources génétiques.

Je présume qu'une juste solution à ce problème fondamental conduirait à un investissement modéré, mais bien plus élevé, dans l'aménagement des ressources génétiques. L'intérêt manifesté tant par le secteur de l'agro-industrie que par les gouvernements et les organismes internationaux - notamment la FAO - montre bien que l'on a conscience de la nécessité d'investir et de promouvoir le développement. Le désaccord porte sur les moyens. Les dangers immédiats de la situation actuelle sont que les ressources génétiques de la plupart des espèces cultivées sont menacées d'un grave appauvrissement, que l'on a laissé perdre des chances de progrès par l'amélioration génétique et que la vulnérabilité génétique et écologique de nos cultures vivrières et textiles s'accroît.

L'économie mondiale actuelle se caractérise entre autres par la répartition inégale des ressources et des avantages que ces dernières procurent. Même au sein des pays, les intérêts des agriculteurs ou des utilisateurs de bois des zones rurales différent de ceux des zones urbaines. De nombreuses ressources génétiques se situent dans des régions écartées ou dans des populations isolées et disséminées d'où il faut les extraire pour les tester ailleurs. Si l'on peut arguer de ce que l'on doit la valeur actuelle de certaines au moins de ces populations aux politiques et pratiques du passé, notamment à la protection qui leur a été accordée, il est également certain que les techniques de la génétique moderne permettent d'en développer plus rapidement les potentialités et d'en élargir l'utilitié et les avantages.

La technologie du développement peut elle-même être considérée comme une autre ressource dont la répartition est inégale, que ce soit entre nations ou à l'intérieur d'une même nation. Les centres technologiques sont le plus souvent concentrés en ville, soutenus par les industries ou par les gouvernements nationaux, et dirigés par du personnel formé en leur sein. Il y a de bonnes raisons à cela, mais les résultats sont souvent fâcheux. La mauvaise répartition des capacités technologiques entraîne une concentration des efforts sur des espèces et sur des productions d'intérêt commercial immédiat.

Autre problème potentiel: la dépendance des générations futures vis-à-vis de l'héritage génétique que leur auront légué les générations précédentes. Cet héritage, ce sont les matériels génétiques que nous leur laisserons et la technologie que nous aurons mise au point. Il peut s'amenuiser ou s'enrichir. Les objectifs d'aménagement des ressources génétiques, même s'ils sont fixés par les organismes officiels, prennent rarement explicitement en compte les besoins futurs. Les entreprises industrielles doivent évidemment appliquer aux valeurs futures des taux d'actualisation élevés, étant donné que seuls les investisseurs actuels peuvent exprimer des préférences. En fait, le point de vue de ces derniers est souvent le seul dont tiennent compte les gouvernements ou l'industrie quand ils procèdent à l'analyse économique des diverses options. En misant ainsi exclusivement sur les forces du marché pour déterminer les priorités d'investissement, on fait implicitement passer au second plan les préoccupations politiques ou éthiques à l'égard des générations futures.

Comment les populations de l'Amazonie pourraient-elles en toute équité payer le prix de l'entretien ou de l'inexploitation de zones naturelles?

Les capitalistes affirmeront peut-être que seul le marché libre est en mesure d'assurer une telle équité, tandis que les socialistes soutiendront le contraire, mais ni les uns ni les autres ne sauraient prétendre que le seul objectif doive être le profit industriel. Il est fort possible que la motivation du marché libre amène à l'équité économique, mais celle-ci ne représente pas nécessairement la justice. Les objectifs doivent être fixés en fonction de considérations politiques et éthiques, et le profit industriel n'est que l'une de celles-ci.

Les investissements dans la mise en valeur et l'aménagement des ressources génétiques sont essentiellement à l'heure actuelle le fait des sphères industrielles, soit directement soit indirectement par le biais d'un appui aux politiques et technologies officielles. Je souligne que ce n'est pas là une condamnation de la mauvaise répartition des pouvoirs, mais la constatation du fait qu'il y a des inégalités dans la répartition des technologies génétiques, des ressources et des pouvoirs, qui influent sur le choix des actions à entreprendre. Si nous admettons qu'il est possible d'envisager divers niveaux de gestion des ressources génétiques pour assurer la productivité des forêts futures, nous devons avant tout nous demander comment susciter les investissements nécessaires pour le faire de manière juste et équitable.

Sans doute les investissements actuels dans la gestion des ressources génétiques se justifient-ils par les profits financiers espérés dans les conditions présentes, mais il faut investir bien plus encore et inciter davantage les industries et les gouvernements à le faire. Etant donné que l'on ne peut attendre des industriels privés qu'ils investissent dans des programmes de faible rentabilité financière, il conviendrait d'encourager les échanges internationaux de ressources génétiques, mais on est loin d'être d'accord sur la façon d'organiser ces échanges. A cet égard, un point essentiel est la notion que les ressources génétiques sont le «patrimoine commun» de tous les peuples.

On peut aussi, dans une optique libérale, voir le patrimoine génétique comme étant à la disposition de tous - et par conséquent de quiconque a les moyens de le mettre en valeur. Ainsi, les investisseurs recourent aux ressources technologiques et autres pour produire des variétés de plus grande valeur ou d'un prix de revient inférieur, en vue de les vendre à des utilisateurs potentiels. Par le biais notamment de droits de propriété industrielle, les capitaux de premier établissement sont protégés, et l'investisseur est payé en retour. En outre, tout le monde y gagne, car les avantages procurés par les variétés améliorées finissent par profiter à la société en général. Les populations qui ont la chance de posséder sur leur territoire des ressources génétiques inexploitées ne peuvent que bénéficier de la mise en valeur de ce potentiel par le secteur privé, ne serait-ce qu'en ayant la possibilité d'acquérir des variétés améliorées.

Vues dans un esprit égalitaire, les ressources génétiques seraient un «patrimoine commun» dont chacun pourrait revendiquer les avantages. Selon cette conception, le fait qu'une nation possède une population génétique particulièrement intéressante, tandis qu'une autre a les moyens expérimentaux et les capacités d'analyse voulus pour en tirer une nouvelle variété, ne confère aucun droit exclusif ni de propriété ni de profit. La répartition inégale des ressources est regardée comme le résultat d'une sorte de loterie naturelle à l'échelle mondiale. Le rôle des gouvernements, dans ces conditions, est de veiller à coordonner l'utilisation des ressources en vue d'un bénéfice maximal, tout en permettant à chacun de tirer profit de son investissement.

En se contredisant, ces deux conceptions empêchent de satisfaire à la nécessité, justifiée à mes yeux, d'investir davantage dans la gestion des ressources génétiques. Les pays industrialisés de même que les grandes industries forestières et agricoles, principales sources d'investissement, se rallient en majorité à la conception «libérale», alors que les pays du tiers monde, qui renferment le gros des ressources génétiques, sont plutôt les tenants de la conception égalitaire. Cela étant, les investisseurs privés sont peu disposés à financer des programmes de développement à long terme sans être au moins assurés d'une protection des variétés créées, tandis que les pays du tiers monde cherchent à obtenir de l'aide pour étoffer leurs propres moyens de recherche et de formation. Dans le même temps, certaines sociétés de semences agricoles et coopératives industrielles, telles que la CAMCORE (Central America and Mexico Coniferous Resources Cooperative), entreprennent des activités de conservation et d'amélioration génétique à l'échelle internationale. D'autres organismes comme le Commonwealth Forestry Institute et l'Organisme danois pour le développement international ont mené des programmes de conservation et d'amélioration génétique financés par des gouvernements pour des raisons philanthropiques. A mesure que de nouveaux organismes privés ou étatiques entrent en lice, des objectifs contradictoires risquent de nuire à l'efficacité de la coopération et de l'assistance réciproque. A vrai dire, le rôle des institutions internationales d'aide reste flou, étant donné la multiplicité d'objectifs des programmes de gestion des ressources génétiques.

Proposition de programme

Nous ne pourrons pas avant longtemps compter sur le transfert direct de gènes comme technique utilisable.

Quand l'objet de l'aménagement est simple et clair, par exemple le profit financier, et que le sujet est un organisme ou un investisseur unique, il est relativement aisé de déterminer les investissements et les programmes optimaux. Lorsqu'en revanche les sujets susceptibles de pâtir ou de bénéficier de cet aménagement ne sont pas de la même classe politique ou économique, ni de la même génération, et qu'ils ont des besoins très différents, l'évaluation des programmes est une tout autre affaire. Si les coûts de la déstabilisation écologique ne constituent que des effets externes pour l'investisseur dans la production de bois d'œuvre, ils peuvent apparaître comme un «risque interne» aux yeux de la collectivité locale tributaire de la terre pour d'autres productions, et même aux yeux de la communauté mondiale, laquelle peut en pâtir indirectement. Les investissements privés au profit des générations futures courent le risque que celles-ci ne veuillent pas de certains produits forestiers tels que définis aujourd'hui. Les organismes publics peuvent toutefois parer dans une large mesure à ce risque en supputant jusqu'à un certain point les besoins prévisibles des générations futures.

Divers systèmes de subventions publiques permettraient sans doute d'atteindre les objectifs fixés, mais non sans mal. Il est difficile de sensibiliser le public à l'importance des problèmes en jeu et de répartir les responsabilités entre les parties intéressées. Même si ces dernières sont dans l'ensemble d'accord pour se partager les coûts et bénéfices, elles ne savent pas très bien comment s'y prendre à cet effet. Comment, par exemple, faire supporter à la génération actuelle le coût de programmes de conservation dont profiteront les générations futures? Comment les populations d'Amazonie pourraient-elles en toute équité payer le prix de l'entretien ou de l'inexploitation de zones naturelles - politique dont bénéficieraient l'environnement mondial et les générations futures mais non elles-mêmes? Comment organiser les échanges entre pays du tiers monde, riches en ressources génétiques mais pauvres en technologie, et pays industrialisés dépourvus de ressources génétiques mais bien nantis en technologie et capital? Des groupements philanthropiques peuvent-ils appuyer des programmes dont risquent de bénéficier des organismes privés, tels que des sociétés semencières, et non l'ensemble de la population? Comment les programmes d'assistance bilatérale doivent-ils équitablement répartir les allocations de fonds et les gains entre organismes publics, investisseurs privés et gouvernements d'autres pays? Enfin, d'où doivent provenir initialement les subventions, et quelles couches de la société doivent en supporter le coût?

Je pense que la justice vis-à-vis des générations futures exige que soit préservé le potentiel évolutif, et à mon avis cela est possible (Namkoong, 1982). Cet objectif peut être atteint moyennant un programme de conservation génétique (Namkoong, 1984a) qui prévoie une reproduction sélective directionnelle portant sur au moins une et de préférence plusieurs populations, ainsi qu'une action de conservation auprès de populations multiples lorsque toute intervention directe d'aménagement est impossible. Dans le cas d'essences de grande valeur marchande, l'investissement privé suffit parfois pour mettre au point des variétés commerciales importantes et préserver en même temps les intérêts de toutes les catégories de population concernées. Il est évident que les essences ou variétés de valeur marchande marginale ou non cotées dans le commerce ne peuvent guère attirer les capitaux des investisseurs privés. Les avantages découlant de leur aménagement sont en général à si longue échéance et d'un intérêt mondial si diffus qu'ils vont avant tout à l'humanité dans son ensemble. En l'occurrence, l'intervention d'organismes internationaux tels que l'Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources ou le Nature Conservancy pourra être nécessaire. En un sens, ces organisations subventionneraient le développement ultérieur de matériels génétiques ayant une valeur commerciale plus immédiatement exploitable. Elles auraient ainsi un rôle analogue à celui des stations de recherche agronomique d'Etats ou fédérales aux Etats-Unis, qui aident à mettre au point des populations de sélection qu'elles-mêmes ou d'autres utilisent pour créer des variétés commerciales. Toutefois, pour la grande majorité des essences de moindre utilité immédiate, il faudra des financements d'origine publique et non gouvernementale. Si des matériels de valeur commerciale sont finalement obtenus, il conviendrait que des redevances soient versées à ces organisations.

ESSAI EN LABORATOIRE - la forêt est aussi un laboratoire en plein air

Les conflits les plus aigus sont sans doute ceux qui ont trait aux essences commerciales ou quasi commerciales exigeant certains travaux de recherche et de développement. Les pays du tiers monde ne sont peut-être guère disposés à accorder des droits de propriété industrielle (Plant Breeder Rights) aux obtenteurs de nouvelles variétés et à garantir leurs privilèges, mais ils n'ont ni les capitaux, ni les moyens techniques voulus pour produire leurs propres variétés. Pour ma part, je suis d'avis que les variétés créées dans un pays développé ayant peu de chances d'être utiles aux pays du tiers monde, ceux-ci peuvent sans inconvénient lui en accorder les droits de propriété industrielle. Toutefois, étant donné que les matériels génétiques utilisés par les sélectionneurs appartiennent en un sens aux écosystèmes au sein desquels ils ont évolué et aux populations du pays d'origine, il est légitime que ce dernier touche en échange une redevance. Peut-être conviendrait-il de verser les redevances sur les profits et les droits d'utilisation de ces matériels génétiques dans un fonds de dépôt qui servirait à financer la mise au point de techniques jugées utiles pour la gestion par les pays d'origine de leurs propres ressources génétiques. Un fonds spécial Nations Unies/FAO pourrait être créé, auquel contribueraient des organismes gouvernementaux et non gouvernementaux, en vue d'aider à concevoir diverses utilisations locales des ressources génétiques et à les mettre en valeur à long terme, dans le cadre d'un programme plus vaste d'aménagement desdites ressources et de maintien de la diversité génétique.

Les problèmes en jeu sont complexes, et il est très difficile de mettre au point une proposition de programme globale. Cependant, il semble qu'il y ait place pour un accord équitable sur une politique mondiale de mise en valeur des ressources génétiques. C'est le moins que nous puissions faire, et nous devons saisir la possibilité qui nous est offerte d'accomplir de grands progrès tout en protégeant les intérêts des plus démunis dans les générations présentes et futures.

Deuxième partie - Trois types de gestion des ressources génétiques

1. En vue d'une mise en valeur commerciale

En règle générale, l'amélioration génétique commerciale réduit fortement la taille de population effective.

Le terme «'commercial» n'a pas ici pour objet de faire une distinction entre économie capitaliste et économie socialiste, ou entre économie de marché et économie paysanne de troc, mais de caractériser des essences en tant que ressources qui procurent un revenu direct en échange d'une certaine forme d'investissement. Ce revenu peut aussi bien provenir de la vente d'un produit forestier très élaboré que de l'utilisation directe de combustible ligneux. Sa valeur peut être mesurée différemment selon les utilisateurs. Dans les analyses que nous envisageons, les effets indirects de la forêt sur le sol, sur le régime des eaux ou sur les milieux socio-économiques ne constituent pas des revenus commerciaux.

L'objectif commercial de l'amélioration génétique est d'obtenir un génotype ou un ensemble de génotypes qui donnent un rendement économique plus élevé ou plus assuré qu'actuellement dans une proportion qui justifie qu'on les définisse comme «bons». Cette définition vaut du seul point de vue du gestionnaire, les intérêts d'autrui et de la ressource elle-même n'entrant pas nécessairement en ligne de compte. Le «gestionnaire» peut être un propriétaire privé, un actionnaire d'une société privée, ou tout aussi bien un paysan d'un pays en développement. Tout ce qu'il a à faire est d'investir son temps, son travail ou son capital pour en tirer un profit économique.

Théorie de l'amélioration génétique. L'amélioration d'une essence forestière suppose d'ordinaire que l'on procède à un nombre déterminé de sélections (de 10 à 300) dans une population qui contient généralement au moins plusieurs milliers d'individus. Les améliorations de rendement seraient liées à de multiples «loci» différents, ou positions linéaires occupées par les gènes sur un chromosome. Chaque locus peut comporter plusieurs variantes «alléliques» d'un gène donné. Ainsi, on pense que les accroissements de rendement en bois d'une essence sont la conséquence d'une accumulation d'allèles influant positivement sur ce caractère; ces allèles peuvent se trouver en de nombreux et différents loci. Avec les arbres forestiers, chez lesquels il est difficile de cerner clairement les effets de gènes isolés, il faut d'habitude considérer l'hérédité comme un phénomène quantitatif.

Dans tous les cas, on part généralement de l'hypothèse, souvent vérifiée, qu'une sélection attentive a pour résultat une amélioration transmissible héréditairement à la génération suivante. C'est pourquoi la recherche en matière de génétique forestière s'attache avant tout à estimer avec précision la valeur reproductive des parents potentiels, et à élaborer des aides à la sélection. A la première génération, on fait souvent un tri entre diverses populations, dont la meilleure sera utilisée comme population initiale. Aux générations suivantes, la population de sélection est effectivement fermée. Même si les sélections initiales ont été nombreuses, il serait naïf de supposer que la taille de population effective restera grande. En règle générale, celle-ci est fortement réduite par l'amélioration génétique commerciale. Aussi désireux soit-il de maintenir une importante population de base, le sélectionneur d'une société privée peut s'apercevoir qu'en utilisant par exemple les cinq meilleurs parents plutôt que les 10 ou 20 meilleurs il obtiendra dans l'immédiat un gain qui compensera le risque à long terme d'une perte de variabilité génétique. Cela est vrai aussi bien pour un programme de sélection récurrente simple que pour un programme de sélection récurrente d'hybrides.

La réduction de la taille de population entraîne, outre une dépression de consanguinité, une perte de variabilité génétique et par conséquent une diminution de l'aptitude à répondre à l'évolution des objectifs de sélection, évolution qui est liée à celle des objectifs de l'économie ou de l'aménagement, ou encore à des impératifs d'adaptabilité écologique. Une telle réduction nuit aussi à la capacité de la population de répondre cumulativement à une pression de sélection répétée, ou à une sélection à rebours. Ce problème semble toutefois moins aigu que lorsqu'on applique une nouvelle sélection à un caractère totalement indépendant. La perte de variabilité génétique interdit également de sélectionner en fonction de gènes de caractères qualitatifs si ceux-ci ont été perdus dans la population de sélection, et exclut la possibilité de sélectionner en vue de nouvelles aptitudes de réponse au milieu ou de nouvelles résistances si la variabilité correspondante a été perdue (Dudiey, 1977).

Un remède à la réduction de la taille de la population de sélection consiste à maintenir une hiérarchie de populations relativement importantes, moins intensivement sélectionnées (Kannenberg, 1984). Pour les cultures, cette méthode requiert de gros réservoirs de variétés non améliorées et des collections de provenances, et éventuellement une ou deux grandes populations partiellement testées et sélectionnées pour certains degrés d'adaptabilité. A partir de ces populations, les généticiens peuvent sélectionner des variétés commerciales. Cette manière de procéder est toutefois souvent malaisée en temps et en argent (Stuber, 1978), et, avec les arbres forestiers, elle peut ne mettre en jeu qu'un seul niveau de base de populations sélectionnées (Namkoong et al., 1971). Or, étant donné la nature des opérations d'amélioration des arbres forestiers, de telles populations de base seraient sans intérêt à moins d'être déjà suffisamment améliorées, et alors il vaudrait peut-être mieux les reproduire sélectivement sous forme de populations multiples en vue d'une diversité utile (Namkoong, 1984c).

ÉTUDE SUR LA GERMINATION AU PÉROU - pour des arbres de meilleure qualité et poussant plus vite

RECHERCHE SUR LES EUCALYPTUS EN AUSTRALIE - une tâche minutieuse et de longue haleine

Ces populations multiples sont d'autre part potentiellement utiles pour des caractères vis-à-vis desquels l'adaptabilité des arbres individuels n'est pas illimitée, et qui présentent une gamme plus ou moins large de variabilité économique ou écologique (Namkoong et al., 1980). Lorsqu'on sélectionne à partir de populations de base en vue d'une utilisation commerciale immédiate, il est en principe plus rentable d'améliorer le rendement ou la qualité des produits dans différentes populations adaptées à des milieux divers. En appliquant à chacune d'elles des méthodes simples d'amélioration génétique, on peut constituer un ensemble adaptable de populations fondatrices aussi aisément qu'une unique grande population de base, et en tirer plus facilement des variétés supérieures. Cet ensemble peut aussi constituer un élément d'un programme de conservation génétique, du fait que la diversité intraspécifique peut y être maintenue et souvent même améliorée (Namkoong, 1984a).

L'une ou l'autre des méthodes ci-dessus permet le recours à la biotechnologie avancée, telle que clonage et transfert de gènes. Les cultures de tissus et autres matériels clonaux s'obtiennent aussi aisément à partir d'un ensemble de populations que d'une population de sélection unique. Ainsi, le clonage n'a pas une incidence directe sur le programme de gestion des ressources génétiques; c'est simplement un moyen particulier pour utiliser les produits finals du programme.

La quasi-totalité des feuillus commerciaux, ainsi que les sapins, les mélèzes, les cèdres et la plupart des pins d'Amérique du Nord, entrent dans cette catégorie plus ou moins négligée.

De même, le transfert contrôlé de gènes ne modifie pas forcément les programmes de conservation génétique, mais il modifie à coup sur les programmes d'amélioration génétique eux-mêmes. A l'heure actuelle, l'utilisation de cette technique se heurte à de nombreux obstacles, mais il est théoriquement possible de transférer un gène utile d'un organisme à un autre. En principe, il est possible aussi de modifier ce gène si l'on en sait suffisamment à son sujet. En définitive, après une longue période d'expérimentation assez ingrate, les échanges de gènes peuvent devenir réalisables.

Toutefois, l'utilisation de cette technique reste problématique, car nous avons besoin d'en savoir beaucoup plus qu'actuellement sur les gènes particuliers et les allèles que nous désirons transférer. Les gènes susceptibles d'apporter des changements qualitatifs doivent avoir une structure assez simple pour pouvoir être transférés et agir sur le génotype hôte dans le sens souhaité. C'est pourquoi, tout comme dans l'amélioration génétique traditionnelle avec des caractères monogéniques, nous devons nous en tenir aux rares gènes pour les quels nous pouvons nous faire une idée assez précise des effets qualitatifs. Etant donné que les échanges de gènes permettent des transferts et des modifications qui seraient autrement impossibles, nous pourrons ainsi sans aucun doute voir un peu mieux les possibilités qu'offrent des génotypes déterminés, œuvrer directement dans l'intérêt commercial et enfin enrichir nos connaissances sur l'hérédité. Pour le moment, toutefois, on ne peut considérer ce processus que comme une perspective séduisante susceptible de venir un jour compléter l'arsenal des méthodes traditionnelles d'amélioration génétique (Sederoff et al., 1985). Nous ne pourrons certainement pas avant longtemps compter sur le transfert direct de gènes comme technique utilisable pour la conservation génétique.

Gestion des populations d'amélioration génétique. Il est évident que toutes les méthodes d'amélioration génétique exigent de plus gros investissements que la simple gestion d'une forêt non améliorée. Un programme d'amélioration génétique peut comporter des essais plus ou moins complexes, une estimation et une sélection portant sur divers caractères en vue de différents objectifs commerciaux dans des zones géographiques variées. Toutefois, il est aussi possible de réduire l'échelle des opérations à un dispositif très simple permettant d'obtenir un gain génétique à brève échéance - entre une et deux ou trois générations. Dans un programme d'amélioration génétique ne comportant ni essais ni autres populations de base que la population commerciale, la variabilité génétique se perd rapidement, et seuls des effets génétiques additifs, par exemple ceux qui déterminent la croissance moyenne dans un milieu donné, peuvent être exploités. A la différence des programmes plus élaborés, l'élasticité est réduite, on n'obtient pas d'information qui permette d'améliorer les gains futurs, et la variabilité génétique a tôt fait de disparaître. Il existe divers degrés de compromis entre ces deux extrêmes. Il y a donc un choix à faire pour chaque essence considérée. Lorsqu'il n'y a qu'une essence en jeu, il faut déterminer le nombre de populations à développer, leur taille, leur éventail d'adaptabilité, etc.

Les organismes concernés pourraient élaborer des programmes à long terme d'un coût raisonnable pour l'amélioration des diverses sous-populations, et considérer la collection de populations de sélection comme un ensemble métagénétique, dans le but de rehausser la valeur utile de l'essence et de l'améliorer (Namkoong et al., 1980). Cependant, avec un programme portant sur des essences multiples, il faut répartir les efforts à consentir pour chacune d'elles. Sur le plan commercial, il est peu probable que toutes les essences soient d'importance égale, et, sur le plan des potentialités biologiques, il n'est pas davantage vraisemblable qu'elles aient toutes les mêmes chances de fournir des gains génétiques. Par conséquent, pour obtenir un profit commercial maximal avec des ressources limitées, on pourrait inclure dans les programmes certains ensembles de caractères dans certains types de milieux pour une gamme limitée d'essences. C'est ainsi qu'Ohba (1984) propose de subdiviser le Japon en zones présentant différents critères de sélection prioritaires, déterminant l'intensité de sélection à appliquer.

Nous devons nous garder de conclure trop vite, au vu des conditions présentes, que la structure actuelle des populations correspond à un état d'équilibre optimal.

Une fois adoptée une formule de répartition, chaque organisme sélectionneur dresserait en conséquence une liste d'essences, en attribuant à chacune d'elles une priorité différente. Il pourra souvent en résulter une répartition très inégale des efforts, une essence faisant l'objet d'une action intensive portant sur de multiples populations, tandis que le reste sera relégué au niveau minimal possible. Même si diverses essences font l'objet de l'attention de plusieurs sélectionneurs différents, il est probable que nombre d'entre elles ne bénéficieront pas d'une sélection intensive, même s'il s'agit d'essences d'intérêt commercial actuel. Ces essences risquent en conséquence de ne jamais servir à constituer des collections systématiques de populations en vue d'une sélection ordonnée. La quasi-totalité des feuillus commerciaux, ainsi que les sapins, les mélèzes, les cèdres et la plupart des pins d'Amérique du Nord, entrent dans cette catégorie plus ou moins négligée. Pour de telles essences, une action interinstitutions concertée s'imposera peut-être, afin de conserver et de mettre en valeur des populations dans le cadre de programmes d'intensité limitée, et d'en améliorer ainsi les perspectives d'utilisation par les générations futures.

Si l'on peut prévoir que certaines essences commerciales bénéficieront d'une attention suffisante de la part d'organisations publiques ou privées, ou encore des groupes de travail de l'Union internationale des instituts de recherches forestières par exemple, il n'en ira pas de même pour de nombreuses autres. Les futurs utilisateurs des forêts constateront sans doute qu'on a négligé des possibilités de les améliorer, et qu'on a laissé plus ou moins s'éroder leurs ressources génétiques. En Amérique du Nord, en Europe et en Asie de l'Est, le problème viendra surtout de l'absence de programmes d'amélioration, et ailleurs de l'insuffisance des fonds alloués aux programmes de conservation et d'amélioration.

Malheureusement, il n'existe pas de tribune universelle où l'on puisse discuter d'une stratégie mondiale permettant d'identifier les essences qui peuvent sans inconvénient être laissées de côté. Aussi, tous choix rationnels en vue d'un programme optimal de recherche ne peuvent-ils aujourd'hui que reposer sur des critères économiques étroits valables dans l'immédiat. Le Groupe d'experts des ressources génétiques forestières, organe statutaire de la FAO qui se réunit tous les trois ou quatre ans, formule des recommandations qui comprennent des listes de priorités par région, par essence et par opération; c'est là un premier pas utile dans l'identification des mesures prioritaires à l'échelle mondiale.

La conception des forêts de l'avenir s'en trouverait sans aucun doute plus éclairée, ce qui conduirait à des écosystèmes forestiers plus stables, avec des populations plus largement adaptables à des milieux variés.

2. Gestion en vue d'une utilisation commerciale potentielle

Généralement, il y a de bonnes raisons biologiques et économiques pour que les essences commerciales principales accaparent notre intérêt immédiat, et pour que nous nous attachions avant tout à améliorer les essences qui sont déjà bien adaptées au milieu écologique et économique. Néanmoins, à mesure que la demande de produits forestiers évolue et que l'environnement physique et biologique des forêts se modifie, on peut légitimement s'attendre à des changements dans la liste des essences commercialement importantes. Aux Etats-Unis, par exemple, la moindre variation dans les prix des bois, l'emplacement des forêts de production, ou encore les techniques de reboisement, pourrait accroître considérablement l'intérêt de certaines espèces d'Alnus, Prunus et Quercus en tant qu'essences commerciales. Il est évident qu'il faut prévoir des essences et des variétés de réserve ou de substitution pour se prémunir contre l'avenir, et c'est là garantie d'autant plus indispensable que la base génétique des variétés principales se rétrécit. Les exemples ne manquent certes pas, dans les forêts du Bassin du Pacifique, d'Amérique du Nord et d'Europe, d'essences indigènes supplantées par d'autres essences commerciales, populations ou provenances.

Certaines essences ont été amplement testées, et de nouveaux essais seront certainement mis en place. La plupart de ceux qui ont été effectués jusqu'à présent visaient à remplacer entièrement des populations ou des essences par d'autres répondant mieux aux besoins du moment. Ces essais sont cependant analogues à ceux destinés à évaluer des caractéristiques déterminées de populations en vue d'éventuels croisements en retour ou transferts de gènes de caractères donnés dans des variétés ou populations établies. Ils ont souvent deux grands objectifs:

i) identifier et échantillonner la répartition de la variation génétique;
ii) analyser et discerner les différences utiles entre gènes, individus ou populations.

Ces deux objectifs sont examinés ci-après.

Variation génétique. Le premier objectif consiste à appréhender la répartition actuelle de la variation génétique résultant de la combinaison des forces naturelles et des activités humaines. Il faut répondre à des questions fondamentales sur la structure de l'espèce, les modalités selon lesquelles différents gènes et combinaisons de gènes sont communs dans certaines régions et rares dans d'autres, et la mesure dans laquelle une telle distribution est liée à la stratégie de survie de l'espèce. Chez quelques rares essences forestières, telles que Pinus resinosa, la variabilité génétique est assez réduite; des échantillons provenant d'arbres voisins ou des extrêmes de l'aire d'extension de la population sont identiques (Fowler et Lester, 1970). La plupart des essences forestières, cependant, semblent présenter un degré élevé de variabilité génétique, et une forte proportion de cette variabilité se situe à l'intérieur d'un même peuplement - du moins par comparaison avec la plupart des autres espèces végétales (Hamrick, 1983). Toutefois, il semble également qu'il y ait des adaptations héréditaires subtiles aux gradients écologiques, même chez des essences telles que Pseudotsuga menziesii (Campbell, 1979), qui en général ne présentent pas de variation très perceptible entre peuplements (Yeh, 1981). L'absence de variabilité génétique importante entre peuplements n'indique donc pas nécessairement l'absence de gènes conférant des adaptations particulières. En outre, il existe de nombreux témoignages de degrés importants de différenciation chez les conifères européens (Muhs, 1981) et japonais (Sakai et al., 1974).

On n'a guère de moyens financiers sauf pour les essences forestières commerciales les plus importantes destinées à l'industrie.

L'une des difficultés auxquelles nous nous heurtons dans l'étude des degrés et des modèles existants de distribution allélique vient de ce que nous ne pouvons échantillonner les populations que dans une tranche très étroite de temps. Alors que les changements dans la structure génétique des arbres forestiers qui influent sur l'adaptabilité peuvent prendre de nombreuses années et plusieurs générations pour s'équilibrer, les études de variation génétique se limitent généralement à une ou deux décennies, et souvent à un échantillonnage sur un ou deux ans. Ainsi peuvent échapper aisément à l'observation des changements dans la structure des peuplements qui mettent des générations à se concrétiser. Par exemple, le mode de dispersion des allèles observé dans les forêts de l'est de l'Amérique du Nord peut fort bien ne refléter que les conditions de dispersion existantes au moment de l'installation des peuplements, et davantage le contexte socio-économique des années 30 et 40 qu'un quelconque état biologique durable. Par ailleurs, l'homme influe parfois beaucoup sur la structure génétique des arbres forestiers, soit directement par le biais de la sélection, soit indirectement en modifiant les conditions de dispersion du pollen et des graines et la densité des semis. Par conséquent, comme nous l'avons exposé ailleurs plus en détail (Namkoong, 1984b; 1985), la dynamique génétique de nos essences forestières peut subir des changements importants, et il n'est pas du tout certain que même les conifères tempérés soient actuellement stabilisés. Par exemple, chez Pinus taeda (Roberds et Conkle, 1984) et chez Pinus sylvestris (Tigerstedt, 1984), les populations ne sont pas en équilibre. Elles ne sont pas davantage stables chez le bostryche du pitchpin (Dendroctonus frontalis Zimmermann) (Namkoong et al., 1979). En outre, si une essence forestière se trouve en état de transition, il en va de même des espèces associées ainsi que des populations de parasites et agents pathogènes (Namkoong, 1983). Nous ne devons jamais oublier que le déséquilibre peut être dû à nos manipulations de la structure génétique d'essences interdépendantes, et par conséquent nous garder de conclure trop vite, au vu des conditions présentes, que la structure actuelle des populations correspond à un état d'équilibre optimal.

Avec les essences tropicales, aux modes de reproduction plus complexes et plus restreints (Stern et Roche, 1974) et aux structures de peuplements plus élaborées (Ashton, 1976; Bawa, 1976), la complexité structurelle écologique et génétique peut avoir son importance pour l'adaptabilité et l'évolution continue des espèces. Il est possible que les populations forestières sous les tropiques aient évolué en subdivisions subtiles et stables, et que les forêts tempérées, tout en n'étant pas stables, soient adaptées à de larges variations de la taille et de la répartition des populations. Sous les tropiques, cependant, les populations multiples de petite taille constituent apparemment le mode de structure normal pour les essences forestières, ce qui les protège peut-être contre les épidémies dues à des agents pathogènes.

Si nous avons du mal à utiliser ces essences, c'est notamment parce que nous ne savons pratiquement rien de leur structure génétique. Faute de données sur la coévolution des concurrents, parasites et agents pathogènes, nous devons préserver une diversité plus grande que celle dont nous aurons finalement besoin, jusqu'à ce que nous puissions éliminer à coup sûr les variations qui s'avèrent superflues. Ainsi, le premier objectif des essais de provenances est l'étude des structures des populations naturelles.

Populations utiles. Le second objectif des essais de provenances est d'identifier les populations à utiliser. Il n'est pas nécessairement en contradiction avec le premier objectif - connaître la répartition de la variation génétique - , mais il est orienté vers les décisions pratiques à prendre concernant le gain génétique initial et les mesures immédiates de conservation génétique. En admettant que nous sachions quels sont les caractères ou les gènes qui sont désirables, la chose à faire tout de suite est d'estimer avec quel degré de probabilité un nouvel échantillonnage procurera un gain supplémentaire suffisant pour qu'il vaille la peine de tenter de découvrir de telles populations meilleures. Nous devons avoir le sentiment non seulement que ces populations existent, mais aussi que les tests sont conçus de manière à les localiser et à les échantillonner en temps opportun. Faute de preuves convaincantes attestant des différences importantes dans les populations, on ne retirera guère d'avantages des nouveaux échantillons de populations (Namkoong, 1978). De même, dans le cas où des différences existent mais où elles se répartissent de manière aléatoire par rapport à un quelconque facteur mesurable du milieu, nous aurons peu de chances de pouvoir mener une recherche de populations avec une probabilité acceptable de réaliser un gain supplémentaire. En outre, le gain escompté d'une nouvelle sélection de populations peut ne pas égaler celui que procurerait une sélection génétique normale à partir des populations de sélection déjà constituées. Cependant, tant que nous ne connaîtrons pas la distribution des allèles pour tous les caractères d'intérêt potentiel, nous ne pourrons pas apprécier le coût des occasions perdues d'incorporer tel ou tel caractère ou degré d'expression d'un caractère.

Par conséquent, la recherche de populations utiles comme sources de gènes pour produire des sous-ensembles de caractères désirables s'oriente vers la détermination de la variation génétique. Le plan et l'analyse de tels essais ne requièrent aucune théorie statistique nouvelle: les techniques de régression multiple peuvent être étendues à l'analyse multidimensionnelle (Namkoong, 1967). A cette fin, on prend plusieurs variables de régression comme variables causales ou variables utiles pour déterminer la localisation ou l'identité des populations. L'analyse de la relation entre une variable dépendante de la réponse au milieu, telle que la croissance, et les variables indépendantes, telles que l'altitude d'origine, est alors effectuée pour plusieurs variables dépendantes ainsi que pour les rapports de corrélation entre elles. On peut alors savoir si les variations sont autres qu'aléatoires, et estimer l'ampleur et l'utilité de ces variations pour n'importe quel caractère ou combinaison de caractères. De cette manière, on est en mesure de déterminer l'utilité soit d'une population déjà échantillonnée soit de populations non échantillonnées mais potentiellement utilisables.

Les progrès réalisés dans la conception et l'analyse de ce genre de tests permettent d'atteindre ces objectifs dans des plantations de taille modeste. Toutefois, pour les parasites et agents pathogènes, qui peuvent évoluer assez vite, les estimations des types de résistance et de leurs effets doivent être faites dans le contexte de leur population et de leur dynamique évolutive. Les procédures d'essai et d'évaluation à leur appliquer diffèrent de celles à employer pour la réponse aux variables du milieu physique. Il s'agit en l'occurrence de discerner les variations génétiques dans les formes de résistance ou dans les phénomènes de réaction. Une analyse dynamique s'impose alors pour prédire les effets de l'introduction de tel ou tel type de résistance dans un écosystème forestier.

Des procédures de testage analogues doivent être employées pour conserver et mettre en valeur des espèces et variétés de cultures qui ne sont pas actuellement d'usage commercial. On sait souvent peu de chose sur la distribution actuelle ou naturelle des caractères ou des allèles, la localisation des populations potentiellement utiles, ou l'expression de caractères particulièrement utiles. C'est pourquoi les études de parents sauvages de plantes cultivées ont pour but d'appréhender l'évolution des plantes cultivées et de découvrir des sources de gènes à introduire dans les variétés commerciales. Les études éco-géographiques de variétés non commerciales visent essentiellement à découvrir des gènes pouvant être utiles pour les variétés établies et pour de nouvelles populations de sélection. Pour nombre de ces espèces cultivées, qui ont un cycle de reproduction court et font l'objet depuis longtemps d'amélioration génétique, la préoccupation principale est la préservation. Une fois garantie la sécurité des sources de matériel génétique menacées, on peut, selon les généticiens, prendre son temps pour procéder aux divers stades de testage et d'amélioration génétique. L'organisation de tels programmes n'est pas bien définie ni arrêtée (Kannenberg, 1984), et les difficultés de reproduction et de croisement en retour ne sont pas négligeables (Frey et al., 1984). Néanmoins, je pense qu'elles seront surmontées. Par conséquent, si les techniques particulières d'amélioration génétique et l'organisation des populations de sélection diffèrent (Namkoong, 1984c), les problèmes de testage des arbres forestiers et des plantes agricoles sont les mêmes pour les espèces ou variétés qui ne sont pas utilisées commercialement à l'heure actuelle.

Il faut deux sortes d'actions pour réaliser la valeur potentielle intrinsèque des populations secondaires préservées: testage et constitution d'ensembles de populations d'amélioration génétique. Le testage est généralement nécessaire pour juger les capacités intrinsèques. Les techniques à appliquer sont celles évoquées ci-dessus pour les essais de provenances. En ce qui concerne la deuxième catégorie d'actions, les techniques sont celles indiquées pour la création de populations hiérarchisées ou multiples.

Le matériel génétique de base à utiliser dans l'un ou l'autre cas doit être un échantillon ex situ ou in situ de l'ensemble génétique disponible, d'une taille suffisante pour avoir de bonnes chances de préserver les gènes utiles. Cependant, même avec le meilleur échantillonnage possible, ce minimum peut laisser échapper de nombreux allèles s'ils ne sont présents qu'en faible quantité au moment et à l'en droit où se fait l'échantillonnage. C'est pourquoi il est essentiel de déterminer les modes et structures de variation. Pour refléter la diversité structurelle qui peut exister dans les populations, il faut des échantillons provenant de différentes régions et de divers peuplements et individus. C'est là certes tâche difficile, mais pas impossible.

LES FORÊTS TROPICALES À LA CROISÉE DES CHEMINS - peut-on sauver leurs innombrables essences?

3. Gestion de populations non commerciales

La grande majorité des essences forestières n'ont guère de valeur commerciale reconnue, présente ou future, ni ne jouent un rôle que ne puissent remplir d'autres essences. Tout au plus peuvent-elles contribuer à la stabilité de l'écosystème, ou être potentiellement utiles, mais seulement à échéance lointaine et à des fins imprévisibles. Pour de telles essences la notion d'«amélioration» au profit de l'humanité n'a pas vraiment de sens. Le seul objectif de gestion serait peut-être d'assurer la permanence d'un échantillon des populations ou de l'essence concernées; cet échantillon devra comporter un effectif suffisant et une distribution acceptable.

Il y a cependant au moins deux raisons pour envisager une gestion un peu plus intensive que la seule conservation de l'espèce. La première est l'intérêt direct de telles populations pour l'étude et la compréhension des processus biologiques dans des populations essentiellement naturelles. La seconde raison est la possibilité de découvrir des emplois actuellement inconnus tels que médicaments ou insecticides. Etant donné que notre connaissance de l'évolution des écosystèmes forestiers, même dans le cas des essences commerciales les plus précieuses, est extrêmement limitée, nous avons tout avantage à maintenir au moins un échantillon du système évolutif. Pour les essences qui sont en gros à l'état d'équilibre, il importe de savoir si leurs caractères génétiques et écologiques sont simples ou complexes, et si les facteurs de sélection naturelle, le mode d'accouplement et la fécondité réagissent entre eux pour conserver ou au contraire supprimer la variabilité génétique. Pour les essences qui ne sont pas en équilibre stable, leur capacité de revenir à un équilibre originel ou d'évoluer vers de nouveaux équilibres ou cycles limites, ou leur propension à s'éteindre, sont des considérations importantes.

Nous aimerions savoir également quelles particularités de l'évolution ont contribué à susciter ainsi un comportement stable ou instable. Connaissant mieux le comportement possible des écosystèmes, nous pourrons être renseignés sur la manière dont les essences commerciales et la forêt en général fonctionnent. La conception des forêts de l'avenir s'en trouverait sans aucun doute plus éclairée, ce qui conduirait à des écosystèmes forestiers plus stables, avec des populations plus largement adaptables à des milieux variés. Il y a bien entendu l'avantage supplémentaire de simplement comprendre comment le monde fonctionne en réalité, que cela conduise ou non à une utilisation accrue des forêts par l'homme.

On ne saurait non plus faire fi d'autres contributions des essences non commerciales au fonctionnement et à la stabilité de l'écosystème. Il existe des tissus d'associations extrêmement complexes et interdépendants, qui peuvent souvent être fragiles et facilement dégradés, avec un taux élevé d'extinction des espèces (May, 1973), mais cette fragilité n'est pas une raison pour laisser mourir de tels écosystèmes ou espèces. Nous devons au contraire penser, dans notre propre intérêt, que les diverses fonctions des essences non commerciales comprennent entre autres la productivité à long terme de toutes les autres parties de l'écosystème.

Les possibilités de gestion de ces populations sont plus restreintes que pour les essences commerciales. La meilleure formule serait sans doute la conservation in situ sous une forme ou une autre, mais pas nécessairement la plus sûre ni la moins coûteuse. Etant donné que la valeur d'une essence a toutes chances d'être associée aux fonctions communautaires, le mieux, pour la conservation, est peut-être de recourir à des zones aménagées telles que réserves, parcs nationaux ou aires naturelles. Les impératifs de taille de population et de dispersion de populations multiples restent les mêmes, et comme on ne peut guère espérer exercer, dans quelque aire que ce soit, un grand contrôle direct sur chaque espèce, la taille des populations et leur nombre devront nécessairement être excessifs. Pour les essences chez lesquelles la taille de population est un facteur agissant de l'évolution, les populations multiples devront être de taille variable. Pour les essences qui réagissent à des variables connues du milieu, y compris la coévolution des autres espèces, un échantillonnage de la gamme de ces variables est un bon moyen pour saisir une variabilité génétique étendue.

Pour de nombreuses essences, toutefois, même ces recommandations sont vaines, vu que l'on sait peu de chose de leur répartition, voire de leur existence. Dans leur cas, un échantillonnage dirigé dans des centres de diversité, comme l'indique Pires (1978), pourrait être le seul espoir réaliste de conservation. Lorsqu'il existe pour une essence des centres de diversité connus, ils doivent évidemment être privilégiés comme sources d'échantillonnage. Un échantillonnage complémentaire à partir de populations extrêmes est souhaitable (Namkoong, 1980). De même, nous ne devons pas nous en remettre exclusivement à des réserves naturelles dans les centres d'origine ou de diversité, mais également constituer des réserves dans des zones d'habitats plus extrêmes pour les divers biotypes, afin de garantir l'échantillonnage de toute la diversité génétique des espèces qu'elles contiennent. Il y a en fait des raisons de penser qu'il existe un degré élevé d'indépendance entre les mesures de la diversité biologique et les variations adaptatives qui existent à l'intérieur des espèces. Tandis que certains types d'interaction entre espèces tendent à accroître la variation génétique intraspécifique (Leonard, 1984; Futuyama, 1983), d'autres la réduisent. En conséquence, pour conserver la viabilité des écosystèmes et assurer la disponibilité de la variation génétique, la dynamique de l'évolution des espèces exige un échantillonnage par populations multiples.

Que nous considérions une essence forestière et les espèces associées comme ayant une valeur commerciale ou non, nous savons que les variations génétiques et écologiques ont peu de chances d'être dans un état évolutif stable. Certaines peuvent avoir un ensemble génétique appauvri, d'autres contenir toute la variation génétique possible dans une seule grande population, mais la plupart doivent être considérées comme étant dans un état évolutif transitoire. Qu'elles aient ou non été stables dans un passé récent, les interventions humaines ont probablement au moins changé une grande partie de leurs équilibres. Pour le gestionnaire des ressources génétiques, l'objectif n'est pas de conserver un état statique, mais d'englober un système dynamique, même si notre connaissance de cette dynamique est très limitée.

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